Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article CURATOR

CURATOR. En droit civil, ce mot comporte deux do'finitions. Dans le droit ancien, le euralor est un parent, agnat ou gentilis, chargé de protéger les bien, de la famille contre l'incapacité de celui qui les détient; el est le curator institué par la loi des Douze Tables. Plus tard, bien que le cuo'atot' ait toujours la garde des biens et non de la personne, il est plus exact de le lehuir celui qui reçoit du pouvoir publie la charge de protéger une certaine classe de personnes incapables d se protéger elles-mêmes. Comme nous le verrons plus loin, il diffère du tuteur et par la catégorie des personnes qui lui sont confiées, et pat' la nature de son intervention. 1. Lot nas XII TABLES. Le droit romain ancien na guère de pitié pour les incapables ou les faibles il se préoccupe des institutions plus que des personnes, et, parmi les institutions, la plus fondamentale, celle sur cliii tout repose, est la aoos. Le citoyen que la folie rend incapable d'administrer son patrimoine (fut'tostts) et le prodigue qui le dissipe, recevront de par la loi un curateur agnat ou gentilis ; furiosi quo que et prodigi in curatzoue suttt aqnatos'usn ex loge XII tabularum t. Le but du législateur étant de protéger le patrimoine qui doit gentis spiendori inserrire °, et non d'empêcher un particulier dose ruiner si bon lui semble, il faudra : 1° qu'il y ait un patrimoine ; 2° qu'il y ait des agnats ou des pentues que l'incapacité ou la prodigalité puissent frustrer la collection de Nieard, p. 537,_52 Corp 00cr. lot. t. 'SI, n' 5501. 90 Cl Cop. XVIII, o. LI, t. 56 IX. 07 Lii. VIII lit. VI, 1, 7 et ta, § t; as. xxxix, sis. municipale di Borna, 1872, p. 130 et suiv. ; Laocioni, Topo grofssa di Rama onOco; comosentorii di Frusstiso intorso te 5090e et gii oq,srdotti; oiiioge epigrafoio CIJIIATIO. Cie. De teg. passim. 5Digeot. t. XXVt1, t. 1, 1. 50; t. 10, 1. 13. 5 OeeIii-Rensea, n' 7007. 7 a, dans Brous, Fontes ions romani osiigai, é,t IV (1801), p. oO si (500500 CUR 1618 CUR du patrimoine légitimement attendu. A ces deux conditions seulement un curateur pourra étire donné. Le patrimoine est constitué par les biens provenant, ah intestat, de la succession légitime du père, ou d'un ascendant mâle paternel . Les dons reçus par le furiosus o par le prodigue, et les gains obtenus par eux ne sont pas soumis à la curatelle. Il en est de même de l'héritage paternel, si le père l'a laissé par testament '. En effet, quand il a institué un héritier testamentaire, le père a manifesté clairement sa volonté d'aliéner, pour ainsi dire, le bien de famille et de le donner à son héritier naturel, en propriété personnelle et entière, propriété inséparable du droit de disposer librement. En vertu du même principe, les furiosi ou prodigues sans agnats et sans gentiles ne recevront pas de curateur, parce que leur patrimoine n'est légitimement dû à personne5 ; il en sera de même des affranchis, parce qu'ils n'ont ni père ni patrimoine . Par furiosus, la loi des XII Tables entend le fou qui a des moments lucides . La curatelle à laquelle il est soumis est permanente, mais ne s'exerce pas pendant les moments lucides durant les intervalles de lucidité, le fuviosus jouit de tous ses droits . La folie entraînant nècessairemenl'incapacité,le furiosus recevait, de plein droit, et sans autre formalité, un curateur. Le prodigue au contraire n'en était pourvu qu'après l'interdiction prononcée contre lui par le magistrat compétent', et dont la formule nous a été conservée par le Les curateurs institués envertu de la loi des Douze Tables étaient appelés curatores legitimi (de lex) n ils étaient toujours choisis parmi les agnats ou les pentues °. La curatelle du fou cessait avec sa guérison, celle du prodigue par la levée de l'interdiction prononcée contre lui". Telle est, dans sa logique brutale, l'institution du curateur consacrée par la législation des décemvirs, auteurs de la loi des Douze Tables. La juridiction prétorienne, par ses arrêts, élargit peu à peu la législation primitive et en modifia l'esprit. Les édits des préteurs correspondent certainement à un état plus humain de la société; une législation nouvelle devait résulter d'une préoccupation nouvelle dans la loi romaine : la protection du faible et de l'incapable. Aux f uriosi, le préteur ajouta ceux dont la folie était permanente (mente capti), ettous ceux qu'une infirmité constante rendait incapables de gérer leurs propres affaires Tous ceux qui dilapidaient leur capital, quelle qu'en fût la provenance, furent, quand bien même ils n'auraient pas d'agnats, assimilés par le préteur au prodigue du droit ancien, ° et reçurent des curateurs. Ces curateurs n'étaient pas, comme ceux de la loi des Douze Tables, choisis nécessairement parmi les agnats ou les pentues; le préteur désignait qui il voulait". Les curateurs institués par le préteur sont appelés honoraréi, par opposition à ceux de la loi des Douze Tables, Il. La LXX pLAXTORIA et les mineurs de vingt-cinq ans. -Tout pupille, le jour où il atteignait,l'âge de la puberté, âge très précoce dans le droit romain", avait la libre disposition de ses biens 15, Cependant, à un âge si voisin de l'enfance, il n'était guère capable de les administrer. De bonne heure cette situation préoccupa le législateur. Une loi, dont la date nous est inconnue, mais que Plaute (mort en 570, 184 av. J.-C.) mentionne plusieurs fois contient des dispositions destinées k protéger le mineur pubère et n'ayant pas atteint l'âge de vingt-cinq ans. C'est la lex Plaetoria, dont le nom, défiguré dans les manuscrits, nous a été conservé parles tables d'Héraclée5t. Cette loi édictait des pénalités sévères contre celui qui abuserait de l'inexpérience du mineur pour le léser dans un contrat, ou pour lui faire commettre un acte préjudiciable à ses intérêts22. Mais comment osera-t-on traiter avec trn mineur si bien défendu 20? La protection dont on veut l'entourer ne nuirat-elle pas à son crédit? La loi aprévu l'objection: elle permit au mineur de s'adjoindre, pour une affaire spéciale (redditis calssis), un curateur dont les pouvoirs devraient expirer aussitôt l'acte terminé 20, Le consensus de ce curateur servait k la partie contractante de garantie contre le soupçon de fraude. Le mineur était ainsi protégé contre la fraude. Cette protection ne parut pas suffisante, et le préteur accorda au mineur lésé, mémo sans qu'il y ait eu fraude, le bénéfice de l'in isttegrum restitutio, c'est-à-dire l'abolition de l'acte passé, elle rétablissement des choses dans l'état antérieur 2e Ce bénéfice devint applicable môme aux actes ratifiés par le consensus du curateur n, Toutefois, l'in inte,qruln restitutio fut soumise à certaines conditions qui la limitaient sagement o sans cette précaution, les transactions avec les mineurs eussent été impossibles, par Jusqu'au moment où nous sommes parvenus, les mineurs de vingt-cinq ans pouvaient avoir un curateur, mais seulement pour la durée d'une affaire spéciale. Marc-Aurèle leur donna un curateur permanent: t, De curatoribtts vero Comment concilier ce texte avec d'autres textes nombreux et fort clairs, d'après lesquels le mineur ne reçoit pas un curateur malgré lui °? On a proposé bien des CUR 1619 CUR systèmes °'. L'opinion qui semble prévaloir aujourd'hui est que, ii partir de Marc-Aurèle, la minorité de vingt-cinq ans fut considérée comme une cause suffisante è l'établissement (l'une curatelle permanente, sans cependant que cette curatelle fût imposée aux mineurs qui n'avaient pas eu de tuteur Toutefois le tuteur qui doit, rendre ses comptes la partie adverse clans un procès °°, le débiteur qui paye une dette °, peuvent contraindre le mineur è demander un curateur : le mineur atteint de folie, et probablement aussi le mineur prodigue, reçoivent, bon gré, malgré, un curateur se Comment la curatelle des mineurs prenait-elle fin? 1° De la part du curateur, pour les mêmes raisons qui mettaient fin è la tutelle [TuTon]. De la part du mineur, quand il atteignait l'âge de vingt-cinq ans, «tas per fecta. Le mineur pouvait aussi, à l'âge de vingt ans, obtenir de l'empereur la venia aetatis. Il était dés lors affranchi de la curatelle ° et avait la libre disposition de ses biens, sauf le droit d'aliéner ou d'hypothéquer ses immeubles sans y être autorisé par décret Les règles relatives è la nomination du curateur par le magistrat, aux garanties qu'il doit donner, aux incapacités, à la responsabilité, è la limite des pouvoirs sont les mêmes qui sont requises pour le tuteur [TUT0R] 39. Après avoir recherché les origines de la curatelle, il y a lieu d'exposer, en quelques mots, comment le curateur exerçait ses fonctions : au lieu d'avoir, comme le tuteur, la charge de personnes essentiellement incapables d'administrer, le curateur s'occupe de personnes qui, si elles étaient dans leur état normal, auraient la capacité légale d'administrer. Presque toujours les personnes en curatelle ont pris l'initiative de leurs actes ; le curateur n'a qu'à les approuver ou è les ratifier; il n'a donc pas l'auctoritas ['muTos]; il doit donner un simple consensus, dépourvu de toute forme solennelle; il peut l'envoyer par lettre ou par intermédiaire, avant, pendant ou mèrne après l'acte. Le curateur contrôle la volonté de celui qui est en curatelle, mais n'agit pas è sa place, sauf le cas de démence et les cas exceptionnels d'empêchement complet Dans certains cas on donnait un curateur au pupille (o Quand le tuteur faisait admettre une excuse temporaire" ; jusqu'à la sentence définitive, quand l'excuse ayant été rejetée, le tuteur en appelait au magistrat supérleur°°; 3° quand un acte intéressait è la fois le curateur et son pupille °; 4° quand le tuteur, sans cependant mériter la destitution, était reconnu incapable d'exercer sa charge . Il y avait encore lieu de nommer un curator dans les circonstances suivantes (O Pour administrer les biens des débiteurs insolvables cut-alor bonorurn; 2° pour administrer un héritage au sujet duquel les cohéritiers étaient en procès: curator /mereditatis; 3° pour administrer un heritage, dont les héritiers n'étaient pas encore connus ou auquel ils renonçaient : curator hereditalis jacenhic; /4° pour administrer les biens d'un absent: curator absentis; 5° pour administrer les biens quand la femme est enceinte au moment de la mort de son mari : curatol' bonet'itm et ventris. Waal THÉDENAT.