Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article CURIALIS

CURIALIS. Ce mot, dans le Bas-Empire, est le synonyme exact de décurion ; il s'applique à tous les membres du sénat municipal, ou CURIA. Le titre de curialis, à partir du quatrième siècle, ne constitue plus une dignité personnelle, mais une condition sociale qui s'acquiert par la naissance ou par la fortune; par la naissance tout fils de curialis devient curialos lui-même à dix-huit ans t;_ par la fortune, il suffit d'avoir une fortune de 25 ar pents de terre pour pouvoir être inscrit dans la curie Les curiales composaient la noblesse municipale ; mais c'était un honneur qui s'achetait par des charges écrasantes et auquel on tentait de se soustraire par tous les moyens ; si bien que être curialis n'était plus considéré comme un droit, mais comme une obligation. C'est bien ainsi que l'entendaient les empereurs. Aussi les hérétiques et les infidèles, même les juifs, que les empereurs chrétiens frappèrent de tant d'incapacités, ne cessèrent jamais, da moment qu'ils avaient la fortune acquise, de faire partie de la curie ; on ne voulait pas qu'ils pussent jouir de l'immunité qu'on trouvait en dehors des rangs des curiales'. Avec une pareille manière de traiter la curie, on ne tarda pas à regarder le titre de curialis comme un châtiment il paraît qu'il y avait des juges qui l'infligeaient loco stopplieii , et les empereurs eux-mêmes frappèrent de cette peine les prêtres excommuniés . Quelles étaient donc les charges qui pesaient si lourdement sur les curiales ?On peut les diviser en deux classes, suivant qu'elles se rapportent aux intérêts de la cité, ou aux intérêts du pouvoir central nous n'indiquerons ici que les principales . 4° La perception de l'impôt, cura exiqendi tri b titi. Cette obligation était de toutes la plus écrasante et la plus odieuse. Voici en effet très sommairement comment procédait le gouvernement impérial dans les derniers siècles pour la levée de l'impôt foncier, CAPITATIO TRRRENA. Le chiffre en était fixé pour chaque cité par l'autorité supérieure ; mais là s'arrêtait son action. Une fois le chiffre fixé, tout le reste regardait les curiales. C'étaient eux qui devaient, d'après ce chiffre, établir la quotité à payer par tête pour chaque contribuable de la cité ; c'étaient eux encore qui devaient poursuivre sur leurs propres concitoyens la rentrée de l'impôt, tout en demeurant responsables du payement intégral. Leur situation est exactement celle des collecteurs de l'ancien régime, avec tout ce qu'elle a de répugnant et d'odieux. D'après un pareil système financier, on comprend que les curiales étaient réellement n le nerf de l'État et les entrailles de la cité o, comme les appelle une célèbre Novelle de Majorien7 ; on comprend aussi qu'ils aient tout fait, jusqu'à renoncer à leur condition d'hommes libres, comme cet empereur s'en plaint au même endroit, pour échapper à une aussi terrible corvée on comprend enfin, comme le dit Salvien, que ces singuliers percepteurs aient été « autant de tyrans o pour leurs concitoyens , tyrans malgré eux si l'on peut dire, mais qui n'en devaient pas moins être intraitables, puisque leur propre fortune était en jeu. 20 Les corvées pour l'entretien des relais de poste 3° Les corvées pour l'entretien et le logement des troupes de passage Clin 1633 CUR if La contribution de l'AuRUM CORONAI9IUM, etc. Autant les ennuies font d'efforts pour échapper à leur misérable condition, autant les empereurs en font d'autre part pour les y maintenir. Ainsi le curiale ne peut vendre aucune propriété foncière, soit à la ville, soit à la campagne, sans une permission spéciale du gouverneur de la province ; il ne peut mème s'absenter de sa ville sans autorisation ' Toutes les donations que les curiales peuvent faire soit entre vifs, soit par testament, à des personnes qui ne sont pas de la curie, sont frappées d'un impôt au profit de l'ordre, le dessanisrnus. En un mot, le curiale était enchaîné à sa condition par une loi inexorable. Elle pouvait pourtant n'être pas sans remèdes. Car en échange de ces charges accablantes les curiales jouissaient de certains privilèges '. Le plus important de ces privilèges est l'obtention de l'immunité ; mais on ne l'acquiert avec le titre de clarissime, c'est-à-dire de sénateur, qu'après être passé par la filière de toutes les charges qui frappent cette classe. L'excès du mal était trop grand dans la condition dit curiale pour que celui-ci y fût retenu par l'appàt de quelques privilèges ; aussi l'on vit les curiales mettre tout en oeuvre pour échapper à leur sort. Les uns entraient frauduleusement au sénat avant d'avoir exercé toutes les charges municipales ; d'autres se prétendaient enrôlés dans l'armée ; d'autres se réfugiaient dans les manufactures impériales; le plus grand nombre devenaient colons ou allaient se réfugier chez les Barbares L! Le résultat d'un pareil régime fut qu'à l'époque de Justinien, presque tous les curiales, malgré la sévérité des lois, avaient déserté leur condition; les curies ne comptaient plus qu'un nombre très restreint de membres '. G. LACOUR-GAYET. la classe des AGENTES IN REJS' de l'administration du Bas Empire, pour exercer à Bome et surtout dans les pro2 la mission d'inspecteurs de police. On les nommait quelquefois aussi curugendanit ou usrncas , en rapprochant les premiers des STATiONARII, qui paraissent avoir rempli une mission analogue, mais à poste fixe, car on les range parmi les appariteurs t. Primitivement les curiosi, comme les agentes in rebus, étaient placés sous la direction supérieure du PRAEFECTUS PRAETORIO, comme on peut en juger par les constitutions impériales adressées par Constance à ce haut fonctionnaire5. Mais ce service fut, avec beaucoup d'autres, réuni au ministère du MAGISTER OFFIGIORUSI6 ou maréchal du palais. En effet, il choisissait tous les ans dans le corps si bien organisé des agentes in rebus les inspecteurs destinés à parcourir les provinces, pour surveiller les diverses parties du service public et spécialement la poursuite des ennemis du prince et des malfaiteurs 7; il y en avait d'ordinaire deux par province. C'est ii C. TSCOd. xii, s, i-s. 12e. Just. X, xxxi, Is. '3v. Hoodoy, Droit municipal, p. Gis. '5 Voir la Novell, de Majorien de 458, citée plus haut. -15 No,,. XII, I, De deco,',onibos; Riidi5er, De conali5u, imperii romani post Consto,otosn,. Breslau, 1838; Menu, De l'origine de l'hérédité du detco,'io,sat dons les municipes ro.. Neuss, 1864; Hoadoy, Le droit municipal, Paris, 6876, p. '480-631 Fastel de cutuosI. 1 Bethmann-Hollweg, Civilp'oceoo, 2' éd. 111, 19, 44. 2 V. C. set is Cod. Theod, De c,o'ioo. VI, 09; C. Just. XII, 53 'S'aller, ilechtegeoch., n' 304, 305, prie. V1,35 Cod. Theod. t c. 31 Cod. Th. XVi, 5, De epioc. cecI.; e. t Cod. Theod. vi. 29. -5 C. t et Cod. Theod. ho,, titesio. 6V. Joonn. Lydus, De .lfogist. 11, II I dans la même pensée de rattacher directement à la cour l'action la pois directe sur ce qui touchait à la sô,'eté de l'État, qu'après la chute du ministre Rotin, le service (les postes, cunsus PL'BLlctJS , fut aussi soumis au MAGISTER OFF1CIORuM. Non seulement ce fonctionnaire eut le droit d'émettre des evectiones ou ordres de transport gratuit, mais encore il fut appelé à légaliser les diplômes délivrés par le préfet. En conséquence, l'officions dis premier comptait un inspecteur des postes, cuniosus cousus pstb/ici °, et devait surveiller par ses agents inférieurs, dont il fallut souvent réprimer les abus et restreindre l'action, la marche de ce service important dans les provinces". Mais l'objet principal de la mission des curiosi était le contrôle de l'administration des gouverneurs de province, inspecteurs étaient invités à envoyer à l'empereur leur rapport sur tout objet d'intérêt public"; ils devaient d'ailleurs informer les gouverneurs par des dénonciations, elogia ou nntns-ia, des crimes parvenus à leur connaissance" ; mais il fallut leur interdire le droit de procéder eux-mêmes à l'arrestation des inculpés, en leur permettant seulement de former une dénonciation, à charge de la prouver' devant le gouverneur de la province (jeidex pi'ovinci'ae), à leurs risques et périls en cas de calomnie. attachés à l'inspection des ports et rivages, à l'effet (114 dénoncer au ministre des finances, cornes lal'gltinnuloz secteruti,, les infractions aux lois sur les douanes, vectiqa[ia ou psrtoi'ia t G. lIusstol;RT.