Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article AGGER

AGGER (Xî)ua). Amoncellement de matériaux quelconques une digue, un quai, la chaussée d'une route, une levée faite de terre, de pierres, de troncs d'arbres ou de toute autre manière, particulièrement pour servir à la défense ou à l'attaque d'une place. Nous avons à considérer le mot dans cette dernière acception. 1. Ce qui regarde la défense des places est traité à l'article MUNITIO ; nous dirons ici seulement que les villes de la Grèce, fortes surtout par le choix de la position et la solidité des murailles, n'étaient pas ordinairement munies de remparts et de fossés, au moins aux époques historiques; car les descriptions d'Homère montrent que les Grecs des temps héroïques se fortifiaient au moyen de remparts, de fossés et de palissades. Les Romains, qui fortifiaient avec le plus grand soin leurs villes et leurs camps, employèrent aussi ce moyen. Le puissant agger (Cicéron' l'appelle maximus) construit par Servius Tullius pour protéger Rome vers le levant, et élargi par Tarquin le Superbe, mérite une mention particulière. Les découvertes modernes confirmant ce que rapportent les auteurs anciens', en ont fait reconnaître', entre la porte Esquiline et la porte Colline, des restes considérables. Pans la coupe (fig. 175), dessinée à l'époque où une partie de l'agger fut mise à découvert par les travaux de construction du chemin de fer, on voit d'abord un mur, actuellement visible sur une hauteur de 7n',77. Construit par assises régulières, partie en pépérin (lapis albanus), partie en tuf, ce mur a pour fondement avaient, en gé qui partaient des lignes de circonvallation et s'avançaient néral , la hauteur du mur auquel elles étaient opposées f6; graduellement jusqu'au pied des murs. Sur la pente on faisait r leur largeur dépendait de l'étendue du front que l'on voue mouvoir les béliers et les autres machines destinées à battre lait attaquer. César, au siége d'Avaricum , fit élever, en à l'art hellénique, ce bas-relief ne montre pas moins ce qui était pratiqué par les Grecs, qui ne firent en ceci que suivre les exemples venus d'Orient. Avant d'y recourir, ils avaient vu employer les mêmes engins par les Perses ". Au siége de Platée Il, les Lacédémoniens construisirent un agger de pierres, de terre et de bois, revêtu d'un parement de poutres entre-croisées. Mais ce ne fut guère que sous Alexandre et ses successeurs, lorsque la conquête eut fait pénétrer les Grecs au cœur de l'Asie, que ceux-ci adoptèrent pour l'attaque des places les procédés trèsperfectionnés qui y étaient depuis longtemps en usage. Alexandre, au siége de Gaza ", fit construire alentour un agger haut de 250 pieds, long de deux stades, où furent placées les machines, et qui servit à protéger en même temps les travaux de sape; on se souvient enfin de l'immense jetée garnie de tours et de machines à l'aide de laquelle il s'empara de Tyr ". Persée 15, après avoir investi Oeneum , fit avancer jusqu'aux murs un agger qui les surpassait en hauteur. Les contrevallations de ce genre que construisirent ATx G des blocs énormes de ce même tuf qui a servi aux constructions les plus anciennes de Home : ils ont en moyenne 3`,63. Le mur, pour mieux résister à la poussée des terres qui forment le rempart, est flanqué, à intervalles de 5'°,59, de coutre-forts ayant 2'",715 en carré. Le fossé longeait ce mur ; il avait 30 mètres de largeur et 9 mètres de profondeur environ. Sa place est encore reconnaissable aux décombres qui l'ont comblé et qui se trouvent enfermés entre le mur d'un côté et le sol naturel de l'autre. Des maisons, élevées depuis le rer siècle après J. -C. jusqu'au v s'appuyaient à ce mur, devenu inutile pour la défense de la cité, et s'ouvraient sur une rue qui suivait les contours de l'agyer. Du côté opposé du mur, on distingue dans la coupe ici figurée, comme on peut les reconnaître dans la réalité à la différence des matériaux et même à leur couleur, d'abord une levée plus ancienne formée par couches successives qui permettent encore aujourd'hui de suivre la marche du travail, depuis la terre végétale, qui est la plus rapprochée du mur, jusqu'à la pouzzolane, qui constitue le fond naturel du sol. Sur la plateforme supérieure et le long des talus dont ils suivent la pente, sont accumulés des matériaux qu'on a pris peut-être à tort pour l'agrandissement attribué à Tarquin. De ce côté, comme à l'extérieur, on a découvert des constructions, notamment un NYMPuAEuM de l'époque des Antonins, adossées au rempart. On savait déjà par d'anciens témoignages que dès le règne d'Auguste Fugger avait été converti en promenade par Mécène, et qu'on avait fini par y bâtir des habitations 7. II. Les Grecs paraissent avoir appris des peuples asiatiques (Assyriens, Perses, etc.), plus avancés qu'eux dans l'art de l'ingénieur, les principaux moyens employés pour l'attaque des places fortes. On trouve dans les livres saints, la description non-seulement des contre allations dont on fit usage en Orient dès la plus haute antiquité pour tenir une ville investie 8, mais encore des terrasses ou cavaliers surmontés de tours, élevés en face des murailles d'une ville assiégée, de manière à les dominer et des pians inclinés, 41 AGG ces murs en brèche ou à chasser les défenseurs des remparts'. Les bas-reliefs découverts parmi les ruines de Ninive ont fourni des représentations '° à l'appui des textes qui indiquaient déjà suffisamment d'où pai tait l'in eut ion de ces moyens d'attaque. On voit (fig. 176), naïvement mais clairement représenté, un agger, sur lequel un bélier a été poussé jusqu'au mur qu'il bat en brèche. Pour ne pas appartenir AGM 142 AGM 25 jours, un agger haut de 80 pieds, large de 330; celui qu'il fit construire devant Marseille avait la même hauteur'4. Il était fait, suivant l'usage, de terre et de fascines (crates) et consolidé par des poutres ou des troncs d'arbres qui en soutenaient les parois 'g : c'est ce qui explique comment les assiégés parvinrent à le détruire par le feu 19 ; il fut alors remplacé par un agger d'un genre encore inconnu (novi generis) : des murs de pierre reliés à leur partie supérieure par des poutres trans versales garnies de fascines et de terre formèrent une galerie couverte dans laquelle les assiégeants retrouvaient à l'abri. Les bas-reliefs de la colonne Trajane présentent plusieurs fois l'image de l'agger, le plus souvent entourant un camp retranché. Nous ne représentons pas ici ceux qui ont visiblement cette destination [CASTRA,IIIUNITIONES].Dans la figure 177 (p. 141), on voit "des soldats romains occupés à construire un agger, en entassant des troncs d'arbres entre-croisés. On remarque une sorte de voûte formée de poutres disposées en arcboutant, et peut-être destinée à protéger un de ces chemins couverts (cuniculi) par lesquels on pouvait faire avancer des sapes et des mines jusqu'aux murs ou aux retranchements de l'ennemi. Dans la figure 178, deux soldats dressent une machine sur le haut d'un agger n. E. SAGLIO.