Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article EVOCATI

EVOCATI (Avdx),-grot). Les auteurs anciens, qui ont parlé des différents modes de recrutement usités dans l'armée romaine, ont distingué le recrutement normal du recrutement anormal et de l'evocatio [DILECTus]. Ce qui caractérise ce dernier genre de recrutement, c'est que le soldat qui en est l'objet est appelé au service par sollicitation personnelle d'un commandant d'armée, non par l'effet d'une mesure générale, et qu'il cède volontairement à une invitation, au lieu d'obéir à un ordre. Les evocati étaient donc des hommes', généralement d'anciens soldats 2 qui, répondant à l'appel d'un chef militaire, prenaient ou reprenaient les armes pour lui donner une preuve d'attachement ou acquérir de nouveaux titres à sa protection. On comprend aisément que le développement des armées romaines et leur dispersion sur un grand nombre de points à la fois, qui obligeait d'en augmenter constamment l'effectif, ait donné naissance à l'evocatio : les généraux, surtout ceux qui se disputèrent le pouvoir à la fin de la période républicaine, trouvaient, à s'en servir, le double avantage qu'ils pouvaient, en évitant les formalités et les lenteurs du recrutement officiel, renforcer les cadres de leur armée, et qu'ils étaient sûrs de se procurer ainsi des EVO 867 __ EVO soldats dévoués et éprouvés. La première mention d'evocati qui se trouve dans les auteurs, nous ne disons pas le premier emploi qui en ait été fait, remonte à l'année 299 av. J.-C., où Siccius aurait formé une cohorte de 800 réengagés'. De mème, Flaminius `' en aurait emmené avec lui 3000 en Macédoine. Après lui, tous les grands chefs militaires firent usage d'evocati, Marius 6, Pompée 6, César7, Octave 6; Catilina en avait dans son armées et Cicéron, autour de lui, en Cilicie 10. Sous l'empire même on trouve encore, de temps à autre, la mention d'evocatil', soit dans les textes des auteurs, soit sur les monuments épigraphiques 12. Il est vrai qu'ils sont plus souvent appelés revo cati qu'evocati ; mais l'institution est la même. Les evocati différaient sur plusieurs points des autres soldats. Ce n'étaient point des réguliers i non milites sed pro milite, dit Servius u ; ils recevaient une solde importante augmentée parfois par la libéralité du général'' ; enfin naturellement, leur engagement prenait fin avec la guerre ou l'expédition qui en avait été la cause. Certains auteurs ont avancé aussi qu'ils étaient dispensés des obligations de service imposées d'ordinaire aux soldats u. Tantôt ils étaient versés dans des régiments déjà existants pour les renforcer : c'est ainsi que les utilisèrent Marius, Pompée et Césarl6; tantôt ils formaient des unités tactiques distinctes, des corps d'élite, que le général chargeait des opérations particulièrement difficiles c'est le rôle que leur réservèrent Cicéron et Octave. Le premier composa ainsi une firma manus evocatorum, sous les ordres d'un préfet particulier97, tandis quo le second, avant la bataille de Modène, constitua de la sorte un corps de dix mille hommes '8, Il semble d'ailleurs que, en pareil cas, ils étaient chargés surtout de la garde personnelle du général 19 ; c'est parmi les evocati que celui-ci choisissait ses hommes de confiance". Aussi étaient-ils à peu près assimilés aux centurions quand les auteurs parlent d'eux, ils les citent après les centurions u et avant les simples soldats22; et l'on voit par certains passages que la distinction de rang entre les evocati et les centurions était bien faible 23 ; il arrivait, d'ailleurs, que des centurions, même des primipilet rentraient dans l'armée comme évocats", auquel cas, il est bien difficile de supposer qu'ils aient accepté, en reprenant du service, un rang inférieur à celui qu'ils avaient en le quittant. L'usage suivi par des généraux républicains de former ainsi, au moyen de réengagements, un corps d'élite aux membres duquel ils confiaient des missions ou des fonctions de confiance, donna naissance au corps permanent des evocati Augusti, dont nous allons maintenant étudier l'organisation. F+vo'Arl AUGt'S=r. --L'institution des evocati 1 ugitsti remonte à Auguste, ainsi que le prouvent les assertions des auteurs25 et le texte des inscriptions 2o. 111es prit, non pas comme on avait fait avant lui pour les évocats de la république, dans tous les corps indistinctement, mais parmi les troupes tenant garnison "t Rome ou aux environs, dans les cohortes prétoriennes auxquelles on s'adressa de préférence 27 pendant tout l'empire, dans les cohortes urbaines 26, dans la légion II0 Parthique 20 et aussi dans la flotte de Misène 3e Il en forma un corps distinct, cuo.tnua ).'itov, suivant l'expression de Dion" qui est confirmée par le témoignage des inscriptions 32. Celles-ci nous apprennent également que les évocats étaient sous les ordres du préfet du prétoire 33 ; mais ils n'avaient point, comme les autres troupes de Rome, un drapeau particulier, signe de l'unité tactique, non plus qu'un préfet, ou un tribun D'autre part, on ne trouve pas parmi eux de sons-officiers ou de spécialistes 34. Le seul titre que l'on rencontre appliqué à un évocat, est celui de curator salariorum ab indicibus 36; et, de fait, il fallait bien, pour la régularité de la comptabilité et des payements, qu'un ou plusieurs évocats fussent chargés de veiller à la solde de leurs camarades. Ils ne constituaient donc pas un corps militaire régulièrement organisé, pas plus que les primipileres attachés à la suite de l'empereur, à côté desquels ils campaient, suivant le témoignage d'Hygin 36. Ils ne recevaient pas non plus de solde (stipendium), comme les soldats, mais un traitement (solarium) 37 Le nombre des evocati Augusti est inconnu; on peut seulement .supposer qu'il était relativement consid€rable33. Leur rang dans la hiérarchie militaire est en teint analogue à celui qu'occupaient les évocats de l'époque républicaine : ils étaient immédiatement inférieurs aux centurions 39 ; comme eux, ils recevaient pour décoration une couronne d'or mais jamais de colliers, de bracelets ou de phalères, qui étaient réservés à l'armée active'', L'étude des textes épigraphiques permet de se rendre compte des fonctions réservées aux evocati Auguste. L'un d'eux porte le titre de ab astis fori a2 ; un autre de a comsnentarïis custodiaruen' ; un troisième de a quaestionibus praetectorum rpraetorïo 44 ; un quatrième était arehitectus a'r'mamentarïi irnperatoris45; un cinquième, avocates fi3alatinu.s 48, c'est-à-dire employé à un titre quelconque, dans le palais de l'empereur; un sixième, agriulerlso?' ; un septième, majoriarius mensorumexpression assez obscure. D'autres enfin étaient attachés aux légions dispersees dans le monde romain40; il semble :mime qu'il y en ait eu un par légion eU. Il. y étaient chargés peut-être du contrôle des fournitures de hlé et de vivres livrés aux EXA 868 EXA convenablement publiées °; les descriptions que nous en