Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article FAMA

FAMA (1I1r~g7)). La Renommée est au nombre des personnifications divines qui, sans jamais atteindre à la réalité d'une divinité proprement dite, ont néanmoins passé IV. quelquefois, des oeuvres poétiques qui les ont consacrées, parmi les objets de la vénération populaire'. Fama représente les rumeurs vagues, sans origine connue, qui répandent à travers le monde la notion de quelque fait extraordinaire. Dans les poèmes homériques, cette personnification est appelée Ossa', et présentée comme une messagère de Zeus qui se répand, rapide comme un embrasement, à travers les foules. Même quand Ossa est employée comme nom commun, elle implique une action divine 3, tandis que chez les poètes postérieurs à Homère elle est une simple voix'. Quant à (Itlg.rj, Homère ne la personnifie pas encore 5 ; elle est cependant au nombre des signes mystérieux (Tipa'rz ou arrg.«T«) par lesquels se manifeste l'intervention divine dans les choses de ce monde 6. Elle peut n'être que la parole du premier venu, prononcée comme au hasard, mais que la volonté des dieux accommode aux circonstances et transforme en révélation. Chez Hésiode, vaest appelée une divinité 1; dès lors elle prend une signification plus précise, comme toutes les abstractions avec lesquelles le progrès du sentiment religieux et du sens philosophique a fait des personnalités. Hérodote raconte que la nouvelle de la victoire de Platées se répandit le soir même de la bataille au camp de Mycalé et il explique ce fait miraculeux par l'action divine de Fama8; Sophocle l'invoque avec l'épithète d'immortelle et en fait un enfant de la riante Espérances. D'après Pausanias, il existait à Smyrne un sanctuaire de la Renommée divinisée (iepbv xXvSdvo v) et tout un système d'oracles qui prenait ces rumeurs pour base 10. Athènes avait un temple de Fama, comme elle en avait un d'Eukleia, d'Aidos, d'Eléos, d'Orma". Cette religion se rattachait communément à Zeus, le dieu qui voit et qui sait toutes choses ; c'est ainsi qu'on l'invoquait sous le vocable de cépv .oç ou eûcpâg,toç 12, la Renommée étant dès le temps d'Homère considérée comme la messagère et même la fille de ce dieu. Il n'est pas exact de dire que les Latins ont connu un culte de Fama; quand Plutarque affirme que les Romains lui ont consacré un sacellum auprès du temple de Vesta, près de la Via Nova, l'expression de vEwç ~~u.r~ç xzl K),r,S6vo; n'est que l'adaption du vocabulaire grec à une croyance romaine assez différente 13. La divinité ainsi honorée est Mus Locutius ou Loquens, c'est-à-dire la personnification de la voix mystérieuse qui, dans le silence de la nuit, annonça l'arrivée des Gaulois. Fama chez les Latins est avant tout une figure de la religion poétique; il n'y a guère d'ouvrage, d'un caractère épique, où elle ne joue un rôle". Virgile en a tracé une description célèbre, dont les éléments semblent empruntés à celle de Typhon qu'on trouve chez Apollodore". Fama est pour lui une 123 FAM 972 FAM fille de la Terre, mise au monde par la colère des dieux, la plus jeune sœur de Coeus et d'Encélade. Ovide, dans les Métamorphoses, Valerius Flaccus et Stace, d'autres encore ont renouvelé, mais pas toujours heureusement, la description de Virgile. Des peintres proprement dits s'en sont inspirés; l'Anthologie latine renferme deux épigrammes consacrées à une représentation de Fama dans les écuries du Cirque'. Les poètes allégoriques etsymboliques du moyen âge, à commencer par Martianus Capella, n'ont pas manqué d'accueillir cette personnification avec beaucoup d'autres semblables. Les inscriptions latines où Fama figure à titre de divinité sont fort rares' ; la plus intéressante : FAMAE AUG. SACRUM, qui correspond exactement à GLORIAE AUG. SACRUM, n'est pas sûre, et Th. Mommsen conjecture: DEANAE. Il en est de même des représentations prétendues de Fama sur les monnaies 3. Il semble d'ailleurs que de très bonne heure l'expression ait pris un sens défavorable, grâce peut-être aux descriptions poétiques que nous avons citées. Ennius déjà l'opposait à Gloria et en faisait la personnification de la renommée mauvaise4; l'adjectif famosus implique surtout cette nuance. J. A. IIILD.