Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article GALERUS

GALERUS, plus rarement galerum, anciennement aussi galera (diminutif galericulum), xuvlri. Le sens propre de ce mot, qui a probablement la même origine que GALEA, correspond à peu près à celui du français calotte; mais il a pris, avec le temps, des acceptions assez diverses'. 1. Virgile nous montre les anciens habitants du Latium partant en guerre avec des calottes fauves faites de peaux de loupe. Stace, décrivant les guerriers arcadiens, dit que les uns ont revêtu des casques, tandis que les autres ont gardé la coiffure de leur pays, le galerus arcadius3. Frontin appelle encore galericulum le petit casque des vélites, qui était probablement en cuir`. A l'époque classique, le galerus est la coiffure des paysans, que l'on qualifie pour cette raison de galeriti5. Le laboureur, aux champs, porte un galerus°, qui le protège contre le soleil?; le chasseur en campagne revêt une calotte de martre 8. Les poètes latins appellent aussi quelquefois galerus le pétase de Mercure9. Des représentations de calottes rustiques, fort analogues à celles qu'on porte de nos jours, se voient sur les monuments qui représentent des scènes de la vie agricole et pastorale (fig. 347710, voir aussi fig. 433). Il a été question, à l'article GALEA, p. 1439, des calottes de cuir que l'on portait à la guerre, tantôt sous le casque (fig. 1400), tantôt à l'exclusion de toute autre coiffure 1f. Le galerus désigne 'aussi le bonnet fait de la peau d'un animal immolé que portaient les flamines12; les détails nécessaires à ce sujet ont été donnés à l'article FLAMEN (p. 106'7). Les athlètes et les gymnastes portaient une calotte pour préserver leurs cheveux de la poussière13. Les vases grecs dont les sujets sont relatifs aux jeux palestriques, en offrent des exemples 14. Sur un de ces vases on distingue les détails de cette calotte, faite de deux pièces, et fixée sur sa tête par une mentonnière (fig. 3477). On a cru reconnaître une calotte plus petite et tout à fait adhérente sur la tête de quelques athlètes dans la mosaïque des thermes de Caracalla (cf. fig. 603) 1s Le galerus des gladiateurs n'est mentionné que dans un passage de Juvénal1°, qui causait déjà de l'embarras à ses scholiastes. Les uns y voyaient un couvrechef (pileus peul habent retiarii), les autres, un objet couvrant l'épaule (galerus est umero impositus gladiatoris). Cette dernière interprétation a été reprise par Comme le galerus le plus rustique et sans doute aussi le plus ancien était fait d'une peau d'animal sur laquelle on laissait la fourrure, on en vint â donner ce nom aux perruques, calottes recouvertes de cheveux postiches, connues des Grecs avant les ltomains18 et plus anciennement encoredes peu pies orientaux 19, qui, à l'époque impériale, étaient également portées par les femmes et par les hommes (capillamentum, corymbium 2°, aéptîer quement à garnir des crânes prématurément chauves et considérées comme une ressource extrême de la toilette, elles furent ensuite adoptées presque généralement par les femmes de haute condition, pour embellir l'édifice de leur chevelure22. Les cheveux blonds des Germaines étaient particulièrement recherchés à cet effet23; on importait aussi ceux de l'Inde, qui payaient un droit d'entrée24. Les galeri de cheveux blonds, au témoignage d'un GAL 1453 GAL scholiaste', convenaient surtout aux courtisanes, alors que les matrones préféraient les cheveux noirs. Il est déjà question de cheveux postiches dans Ovide', qui les appelle cheveux achetés, crines empli. L'empereur Othon, qui avait peu de cheveux, portait une perruque si bien adaptée qu'on ne pouvait en reconnaître l'artifice 3. Pétrone, dans le Salyricon, nous montre une suivante ajustant au malheureux Giton, qui avait été complètement rasé, une perruque (corymbium) de sa maîtresse ; elle lui met aussi des sourcils postiches qu'elle retire d'une cassette. Un autre personnage, qui a subi le même sort, reçoit une perruque blonde, flavicomum corymbiunO. Martial se moque d'un chauve qui porte un galericum de peau de chevreau et compare cette perruque à une chaussure de la tête 5. Une fable d'Avianus a pour sujet la mésaventure d'un chauve qui avait coutume de mettre une perruque ; comme il était un jour à cheval, un coup de vent l'en dépouilla. Objet des risées des spectateurs, il se tira d'affaire par un bon mot : « Pourquoi s'étonner, dit-11, que mes cheveux postiches (positi capilli) soient tombés, puisque ma chevelure naturelle avait commencé par en faire autant°? » Les perruques servaient aussi de déguisement. Ovide nous montre Pallas qui, pour se donner l'aspect d'une vieille, se couvre le front de cheveux' blancs'. Tout le monde connaît les vers où Juvénal décrit Messaline, dissimulant sa chevelure noire sous une perruque blonde'. Néron, au témoignage de Suétone, mettait un pileus ou un galerus pour aller la nuit dans les cabarets 9. Il a déjà été question [cosIA, p. 1369] de bustes de princesses romaines qui portent des perruques. Un buste de ce genre, qui est au Louvre, celui de Plau tille, femme de Caracalla, est décrit ainsi par Clarac '0 : « La coiffure lourde et sans grâce de cette tête est une perruque, laissant voir des mèches de cheveux qui sortent de dessous.Matidie et Sabine portaient des coiffures artificielles formées d'une quantité de tresses postiches qu'on ne voit pas aux têtes coiffées de leurs cheveux. On sait qu'on changeait à volonté la coiffure de certaines statues; telle est une Plautille du Capitole, en marbre blanc, et dont la perruque est de marbre noir. » Visconti a publié une statue de Julie Socelnias en Vénus dont la tête présente la même particularité " : « La chevelure de cette statue est amovible, excepté les deux boucles de cheveux qui tombent sur les épaules.... Quelques-uns (Bottari, entre autres), en observant des coiffures ainsi mobiles sur d'autres têtes antiques, en ont conclu que c'était un usage adopté dans ce temps-là, de porter des chevelures fausses.... Je ne découvre dans cette singulière particularité qu'un raffinement de luxe chez les dames romaines qui, changeant souvent de mode, portèrent la vanité jusqu'à ne pas vouloir se voir dans leurs portraits ajustées avec une vieille mode, et qui obligèrent les artistes à imaginer une ressource au moyen de laquelle on pût changer la coiffure d'une statue de marbre sans l'endommager. » Visconti ajoute qu'il y a dans le musée du Capitole un buste de Julie Mammée où les cheveux ne sont pas amovibles, mais où, pour pouvoir changer la coiffure, on avait fait trois entailles des deux côtés et par derrière, dans lesquelles se plaçaient des morceaux qui représentaient une coiffure différente. Les moralistes ne laissaient pas de blâmer ce luxe insensé de chevelures postiches; on a déjà traduit [co1,IA, p. 1369] le passage où Tertullien le condamne". Cependant les chrétiennes elles-mêmes paraissent avoir obéi à la mode, car Boldetti dit avoir trouvé, dans une tombe de femme du cimetière de Cyriaque à Rome, une perruque composée de cheveux châtains 13. SALOMON REiNACII.