Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article ALLUVIO

ALLUVIO. Accroissement insensible (incrementum latens) qui se fait aux rives des fleuves et rivières, soit par un apport de terre qui vient s'y déposer, soit par un retrait des eaux'. La question juridique qui s'élève à cet égard est de savoir à qui appartiendra cet accroissement. Elle se décide conformément aux principes généraux. Le fleuve lui-même est public, mais son lit, suivant le jurisconsulte Pomponius, appartient aux riverains. Les riverains profite. 24 ALL 1186 ®ALO ront donc de l'alluvion qui ne fait que metttre leur sol à découvert, et par la même raison ils auront droit aux îles qui se forment dans le fleuve, et à son lit s'il vient à sécher. Il en serait autrement si la violence du courant avait détaché un champ tout entier et l'avait transporté contre ma rive. Ce champ ainsi déplacé, mais parfaitement reconnaissable, reste à son ancien propriétaire, par opposition à la terre qui, dans l'alluvion, se détache et se dépose grain l grain, sans qu'on puisse reconnaître à qui elle avait appartenu. Si cependant les arbres que ce fragment de champ a entraînés avec lui reprennent racine contre ma rive, et entrent ainsi dais mon terrain, ils m'appartiendront; et peut-être le champ avec'. Mais quand le fleuve, après avoir abandonné son ancien lit et s'en être creusé un nouveau, l'abandonne à son tour, à qui appartiendra le nouveau lit abandonné? Ce cas n'était pas sans exemple dans les fleuves torrentiels de l'Italie. Nul doute, s'il ne s'agit que d'une simple inondation'. Cet événement purement accidentel ne change rien à l'état des propriétés tel qu'il existait auparavant. Mais si les choses ont duré assez longtemps pour qu'il y ait eu vraiment nouveau lit du fleuve, les droits des anciens propriétaires sont effacés, et l'on applique au partage de ce nouveau lit abandonné les droits purs et simples des riverains. Peut-être cette méconnaissance des anciens droits tient-elle aux difficultés pratiques qu'on aurait trouvées à les rétablir. En tout cas, en exposant ce système, Gains`` avoue qu'il est fort contesté (viaest ut id obtineat), et le système contraire est soutenu par Pomponius 5 Nous avons exposé cette matière conformément aux idées de M. Ducaurroy 6. Suivant M. Ortolan' et la plupart des commentateurs, tout serait ici le résultat de l'accession et du principe que l'accessoire suit le principal. Les droits des riverains se limitent entre eux, pour les riverains opposés, par la ligne médiane du lit du fleuve, et pour les voisins du même côté, par des perpendiculaires tirées du point de rencontre de leurs propriétés à la rive sur la ligne médiane déjà indiquée. Les règles que nous venons d'indiquer s'appliquaient aux terres nommées ayri arcifZnii, c'est-à-dire dont la contenance était déterminée, non par une mesure fixe, mais par des limites naturelles ou artificielles. Ager arcifnius, dit Aggenus Urbicus', qui nulla mensura continetur, sed finitur out rnontibus aut vis, out aquarum devergüs, aut notabilibus 1 vorunx nattais, aut arboribus, eut fassis Au contraire, les terres concédées par le peuple avec une contenance fixe (agri limiteti) n'avaient rien à gagner aux alluvions, formations d'îles, abandons de lit qui avaient lieu à côté d'elles, et qui, dans ce cas, appartenaient au premier occupant 9. Quelquefois cependant les concessions de terre étaient faites par l'État, non à la mesure, mais en indiquant des limites more arci finio, suivant l'expression de Ilsgin10 qui exerça les fonctions d'Aearnteason. Les affaires concernant les alluvions et circumluvions" appartenaient au jugement des centumvirs. F. BAUDRY.