Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article PAN

PAN. Ce dieu occupe dans le panthéon hellénique une place à part. Quoique d'origine manifestement nationale et sans mélange d'éléments exotiques il reste pendant des siècles confiné dans les milieux agrestes où il dis naissance. Et lorsqu'il pénètre, accueilli comme un intrus de complexion populaire et de tempérament rustique, dans les centres cultivés d'Athènes et de Thèbes, aux débuts du v^ siècle avant notre ère, c'est sans se dégrossir jamais qu'il subit l'action civilisatrice, la triple influence du patriotisme, de l'art et de la littérature. L'épopée d'Homère et d'Hésiode ignore jusqu'au nom de Pan et aucun monument ne permet de faire remonter son histoire au delà des guerres Médiques. C'est au lendemain de Marathon qu'il fut révélé aux Athéniens et par eux au reste de la Grèce : la légende veut qu'il ait apparu sur le mont Parthénius au courrier qui était parti d'Athènes pour porter à Sparte la nouvelle de la victoire et que, se réclamant des services rendus à la cause nationale, il ait obtenu pour la première fois des hommages et des sanctuaires jusque-là il n'était point sorti de la région boisée et montagneuse d'Arcadie sa patrie. Nous savons toutefois, par des témoignages pose térieurs, qu'il fut un des plus anciens dieux du Péloponnèse, qui avait reçu de lui le nom de Panda 3. Dans l'Arcadie même, ii se petit qu'il ait été, non pas seulement parmi les divinités les plus vénérables, mais le dieu suprême t. Le berceau de sa religion était le mont Lycée où son culte était inséparable de celui de Zeus Lycéen, s'il ne l'y a pas précédé. Il y partageait avec lui, aux temps historiques, l'hippodrome, le stade, le bois sacré et le temple où se célébraient annuellement les Jeux Lycéens'. Des monnaies arcadiennes continuent à être frappées à l'effigie d'une divinité double qui mêle leurs noms : Aioarxv 0. A Heraea il possédait un temple où il avait le titre de dieu national, Er'ymp(ou ; à Mégalopolis il faisait partie, avec Apollon jouant de la cithare et avec deux n'oi'ae, d'un groupe désigné comme celui des premiers dieux. A Lycosura, près du mont Ménale, il rendait des oracles et un feu permanent brûlait en son honneur ; non loin de là, à Melpea, la légende lui faisait trouver la syrinx, flûte de roseaux qui est son attribut caractéristique ; dans les bruits mystérieux qui troublaient les solitudes sylvestres, les habitants croyaient reconnaître sa musique divine On l'associait à Despoïna, la fille de Déméter ; l'on disait qu'il avait le pouvoir et de faire aboutir les prières des hommes et de punir les méchants 8. Toutes les hauteurs de l'Arcadie paraissent lui avoir été consacrées ° ; la mythologie dès l'antiquité en tirait argument pour faire de Pan un dieu solaire, antérieur et supérieur à Zeus 10 ; le dernier des mythologues modernes qui ait défendu cette interprétation de l'être de Pan, après Weleker et Gerhard, est M. V. Bérard dans son étude sur l'Origine des cultes arcadiens". Nous pensons avec Roselier que Pan, sans cesser pour cela d'être le plus populaire, le plus éminent des dieux d'Arcadie, y fut simplement la personnification de la vie pastorale. C'est pour cela qu'il reste dépourvu de tous les traits de noblesse morale et de générosité héroïque qui se rencontrent chez les plus humbles divinités, selon l'idéal d'Homère et d'Hésiode; qu'il n'a aucun rapport, ni avec l'ordre politique ou domestique, ni avec la dignité sacerdotale ou celle de l'art, à peine avec Ia, loi naturelle 12. C'est à l'esprit attique quil faut faire honneur 'lu document le plus complet et le plus pittoresque qùe nous possédions sur la légende et sur la personnalité de Pan, Ce document est l'hymne homérique, dont la composition ne remonte guère au delà du ve siècle i3. Le dieu y est présenté comme un fils d'hermès et de la nymphe Dryops d'Arcadie Il a les pieds et les cornes du bouc, une chevelure inculte, une barbe broussailleuse. En PAN 297 .esPAN compagnie des Nymphes il fait retentir de ses ébats les halliers, les monts et les prés; chasseur, il poursuit, les bêtes et, le soir venu, il se délasse en jouant sur la flûte des airs qui défient ceux du rossignol. Quand il naquit, moitié homme, moitié animai, de tempérament bruyant et lascif, sa mère s'enfuit épouvantée "-; mais Hermès, le père, l'enveloppa dans des peaux de lièvre et le porta dans 1 Olympe, où les dieux furent ravis à son aspect, Dionysos surtout qui le nomma Pan parce qu'il réjouissait le coeur de tous (oexva--eéot). Cette peinture nous livre le dieu sous sa face populaire; le patriotisme et le sens religieux des esprits cultivés essaient de lui en donner une plus noble, sans réussir d'ailleurs à l'imposer à la vénération autour d'eux L'âme grave et mystique de Pindare l'associe à sa propre existence, en élevant dans le vestibule de sa maison un sanctuaire où la divinité de Pan fait pendant à celle de Cybèle, la Grande Mère des dieux, Et le poète durant la nuit, écoutant les chants des jeunes filles qui le célèbrent, en prend occasion pour composer lui-même, en son honneur, un hymne où il l'appelle souverain d'Arcadie, gardien des sanctuaires augustes, compagnon des Charites vénérables, patron des pêcheurs et le plus parfait des choreutes 2. Simonide vante l'hommage que Miltiade lui décerna après Marathon, en installant dans la grotte de l'Acropole la statue de marbre qui le représentait avec les attributs d'un vpoxaatoaacpoç `. Eschyle dans les Perses le mêle au récit de la bataille de Salamine ; Sophocle, Euripide, Aristophane i'inyoquentàl'occasion, en relevant par les éclats du lyrisme religieux le caractère trivial de sa figure de berger arcadien '' Les parents de Platon exposent le futur philosophe sur l'Hymette après sa naissance pour le consacrer à Pan, aux Nymphes, à Apollon Nomios: le philosophe lui-même, dans le Phèdre, parlera des sites arrosés par l'ilissus où Pan est vénéré en compagnie des Nymphes et d'Achélous 6. Enfin Hérodote, qui nous a raconté la légende de la révélation de Pan aux Athéniens, le reconnaît dans une des huit grandes divinités de Mendès en lg,ptc, ville qui fut le centre le plus important du culte d'Osiris, ce dieu thériomiorphique comme Pan et comme lui brutalement lascif et fécondant 6 C'est l'époque où à Athènes sont institués en son honneur des lampadophories et des sacrifices annuels, où dans l'île de Psyttaleia lui sont voués des x()ana grossiers que mentionne Pausanias; c'est l'époque aussi où s'introduit la coutume, dont il VlI, sera question plus loin, de lui dédier des bas-reliefs afin de l'invoquer et de lui rendre hommage en compagnie des Nymphes, d'Hermès et d'Achélous (fig. 3494) 7. Athènes restera d'ailleurs la ville privilégiée du culte de Pan ; si l'on ne peut citer de grands sanctuaires érigés en son honneur, si des statues pour le luxe ou pour le culte y sont rares comme partout ailleurs 8, il n'en est pas moins l'objet d'une piété très populaire. Lucien nous dira, et la remarque est vraie dès les temps de la guerre du Péloponnèse, qu'il y est honoré plus qu'en aucun lieu du monde 9 Deux ou trois fois par an, on lui offre des sacrifices en commun; tous les procédés de l'art industriel, sans excepter la numismatique, illustrent ses traits. Une comédie parodique d'Araros met à la scène le pittoresque épisode de sa naissance, tel que le raconte l'hymne homériquel0. Mis en rapport avec Dionysos et son thiase, il a sa place marquée parmi les Satyres et les Silènes ]RSccuc's, p, 614, fig. 692. et p. 623, fig. 711]; il influe même sur la plastique de ces personnages et sert à déterminer l'élément animal de leur physionomie '-. Les expéditions d'Alexandre à travers les Indes ayant fourni aux poètes et aux artistes le moyen d'identifier le héros principal avec Dionysos, Pan figurera à ses côtés comme son écuyer et même comme son adjudant général''. Dans la poésie bucolique qui fleurit à l'époque des Diadoques, il a avec Aristée, Arcadies comme lui, sa grande part dans la faveur qu'obtient la vie libre et naïvement sensuelle des milieux agrestes, sans doute parce que la peinture en fait contraste avec les moeurs raffinées des villes L3, De même les érotiques trouvent avec Pan ample et pittoresque matière à peintures licencieuses et même à inventions obscènes l'. En sa qualité d'etre grossier, satisfait des plaisirs les plus bas et des pratiques les moins recommandables, il fournit un pendant à Eros et s'oppose à lui à la fois par ses dehors physiques et par les instincts de sa nature primitivei6, Ce contraste, l'art et la religion l'ont également accentué, mais par exception et sous l'influence du mysticisme orphique, entre Pan et Dionysos, alors que le plus souvent l'opinion populaire aime à associer les deux divinités dans une aperception commune 16. M, Roscher, dans une excellente monographie, groupe ingénieusement les diverses attributions du dieu dans la légende, en les dérivant toutes de sa t'onction principale qui est celle de berger nomade et en les expliquant par les coutumes qui sont restées, même de nos 38 PAN -298 PAN jours, chez les naturels d'Arcadie '. C'est sa qualité de paire, poussant devant lui à travers les solitudes sauvages, d'humbles troupeaux de moutons et surtout de chèvres dont il fait sa seule société, qui explique son physique où l'homme se double de l'animal, son tempérament fruste. son genre de vie, ses occupations favorites, ses plaisirs, ses rapports avec les autres dieux, avec les hommes et les animaux. Comme berger, il est représenté par les poètes et par les artistes en compagnie de la (hèvre, et il a la physionomie avec les instincts du bouc'. Il fait sa demeure soit des grottes naturelles, soit du couvert des arbres, ce qui est cause que partout où son culte s'acclimate, ces lieux lui sont consacrés et servent de cadre â sa personnalité 3. Comme berger encore on aime à le représenter sur les hauteurs d'où son regard perçant veille au loin sur les troupeaux, parant aux dangers qui les menacent. Une des attitudes que la peinture de vases aime à lui donner est celle de l'observateur qui, abritant les yeux avec la main, se détache au haut d'une cime, d'un promontoire, sur le fond clair du ciel, ici saluant Hélios qui se lève ou Sélénè qui s'en va, ailleurs fouillant l'horizon pour dépister le gibier et les oiseauy de proie 4. Car il est chasseur comme it est berger, ayant pour attribut caractéristique le i,2yi».U).ov ou pedutr1 et pour compagnon ou le chien qu'il dresse ou le lièvre qu'il étale comme un trophée, à moins qu'il ne le fasse servir à ses jeux. Les chasseurs arcadiens lui présentent des offrandes pour avoir sa protection; et quand la chasse a été mauvaise, ils fouettent son image, comme les paysans espagnols injurient et battent leur Madone Il est également oiseleur, pêcheur â l'occasion 8 ; ainsi gn'Arïstee son compatriote, ainsi que Priape auquel il ressemble par tant de côtés, il est le protecteur des ruches, et le miel est parmi les offrandes que lui présentent ses adorateurs 7. Ses plaisirs favoris sont la musique et la danse [hAccilu.s, fig. 711]', non pas artistiques et élégantes, mais rustiques et bruyantes; il a inventé la flûte formée par l'assemblage de sept roseaux d'inégale longueur; il l'a découverte par les solitudes du mont 'dénate, et la légende la personnifie dans une nymphe appelée Syrinx, qu'il poursuit de sou amour Les bruits étranges qui troublent le silence des bois sont interprétas par les naturels du pays comme I'acln(1 de ses ébats en compagnie des Nymphes dont il mène le choeur. Il est, en même temps que musicien, choreute et danseur infatigable, plaisant, rivalisant avec les Satyres; il fait claquer ses doigts en tournant(cxgcT,rçet soulève avec le pied le couvercle de la ciste sacrée, comme ferait un rustre irrévérencieux et pétulant'. Toujours en vertu de la même conception d'une vie agreste et brutalement sensuelle, Pan est, avec les Satyres et pour les mêmes raisons avec Priape, une des personnifications les plus expressives de l'érétllisme amoureux. Il est l'amant de toutes les Nymphes, qu'il poursuit par les campagnes et les bois; dans le nombre, sans compter Syrinx dont nous avons parlé, Pitys, incarnation du pin toujours vert, sous lequel il abrite son sommeil et ses danses, Écho qui prolonge le son de sa flûte dans le silence des pâturages, sont l'objet de légendes où se manifeste son ardeur amoureuse. Ovide traduit une fable d'origine hellénique, Faune s'y substituant à Pan, quand il le mêle au roman d'Omphale, sous prétexte d'expliquer la nudité des Luperques, en réalité pour peindre la sensualité effrénée du dieu'. Une légende de Patrae rappelée par Pausanias mettait une bande de Panisques aux trousses de Dionysos, comme dans un drame satyrique de Sophocle les Satyres s'acharnent à la poursuite d'Achille'. Il sera question plus bas de l'ouvre de l'art hellénistique où Pan est mis en rapport avec Olympus ou Daphnis''. « Lorsque Pan prend ses ébats et que les Nymphes chantent en dansant, l'écho résonne autour de la cime des monts a, dit l'hymne homérique. Ces' bruits, le sco liaste les nomme navlx ztv-IWxTx". On a rappelé à ce sujet la scène du réveil d'Ulysse dans l'Odyssée, alors que le héros, percevant les voix des compagnes de .Nausicaa, ne sait s'il est l'objet d'une sorte d'hallucination divine' 3. Pour Pan, la légende raconte que sa syrinx effrayait les paysans et les bûcherons 16 ; Silvanus et Faunus sont chez les Latins l'objet de superstitions semblables. Cicéron parle de la voix des Faunes qu'il n'a jamais entendues pour sa part mais qui, dit, il, ont mainte fois retenti dans les bataillesi7. C'est de là qu'est dérivée l'idée du démon qui jette, par des bruits étranges, la terreur dans les âmes. A Marathon pour la première fois, Pan a ainsi manifesté sa puissance au profit de l'indépendance nationale, devant les Grecs ligués contre les Perses, et mérité d'être associé dans la reconnaissance publique au héros Echetlos qui assommait les ennemis avec le soc de la charrue'. Pan trouble les guerriers sur le champ de PAN -299 PAN bataille comme il transporte d'égarement les boeufs Jusque dans leurs étables, les précipitant dans une course désordonnée 1. 11 intervient de même à Salamine oit on l'a aperçu planant sur un promontoire, et dans File de Psyttaleia qui lui vouera les xoana encore existants du temps de Pausanias 2. Euripide caractérise cette action mystérieuse en parlant du fouet redoutable avec lequel Pan Cronien provoque la terreur 3. On signale de même son intervention au siège de Phylé en /403, dans les expéditions d'Alexandre à travers l'Inde, et, avec Apollon, dans la déroute des Gaulois à Delphes. Sur un bas-relief votif, on le voit aux côtés d'Alexandre-Dionysos prononcent sur le sort des Indiens vaincus 4. Prédisposé par sa qualité de chasseur à se transformer en soldat, il est vénéré comme tel dans l'île de Lesbos et un autel carré d'Éphèse le représente avec des attributs guerriers : « Toutes les terreurs, dit un scoliaste, sont l'oeuvre de Pan 5. » M. Roscher explique ce pouvoir mystérieux par un fait physiologique : celui de l'accablement maladif, des songes pénibles et des cauchemars que l'ardente chaleur de midi provoque chez les bêtes et les gens 6. La superstition chez les anciens avait personnifié ces phénomènes dans un daemon meridianus qu'elle identifiait avec Pan, avec Faune et Silvain ses similaires latins. Le mortel qui les rencontrait à pareille heure était l'objet de leur malice ou de leur colère. Théocrite remarque qu'à l'heure de midi le berger doit s'abstenir de jouer de la flûte pour ne pas troubler le repos de Pan qui en tirerait vengeance ; de même aux Palilies, le pâtre supplie la déesse de lui épargner à midi la rencontre de Faune qui alors parcourt les champs 7. C'est le daemon que les Grecs nommaient 'E'rt).T,tç et dont Macrobe dit qu'il s'attaquait aux hommes pour peser sur eux de tout son poids et leur donner la sensation de l'étouffement Mais Ephialtès devient à l'occasion Ophe'lès, le guérisseur; les cauchemars se changent en songes salutaires 'et prophétiques qui suggèrent le remède aux maladies °. C'est ainsi que Pan, divin rebouteur, fut à la suite d'une peste vénéré à Trézène sous le vocable de Luteries, et que d'une façon générale on le considérait à l'occasion comme un sorcier bienfaisant, capable de rendre des oracles, d'enseigner leur route aux voyageurs égarés et d'apaiser les tempêtes au son de la flûte 10. Pan extracteur d'épines, sujet popularisé par la sculpture, est dans l'art l'expression naïve de ce côté de sa physionomie Transporté de Grèce dans l'histoire légendaire de Rome, Pan ne pouvait manquer d'y être identifié avec celles des divinités champêtres qui, ayant d'autre part un 1 caractère national, rappelaient à la fois son extérieur inculte, son rôle pastoral et son être grossièrement sensuel. On peut voir aux articles FAUNUS et LUPERCALIA comment cette métamorphose s'accomplit, comment par lvandre l'Arcadien, la grotte située au bas du Capitole et les cérémonies qui s'y rattachaient furent, aux yeux des archéologues hellénisants, des importations d'Arcadie, non des institutions nationalesY2. Nous n'insistons pas davantage sur la transformation de l'être de Pan par la philosophie du Portique et par la métaphysique des Néoplatoniciens qui firent de lui, à la faveur d'un calembour, la personnification du Grand Tout : 'r'o rrFiv, que l'art représente sous ses traits traditionnels, au centre des signes du zodiaque 13. A l'heure où le polythéisme décline, Plutarque, avec l'inconscience d'un homme qui voit les symptômes sans en découvrir les causes, nous raconte la légende de la mort du Grand Pan , cette mort est celle du paganisme lui-même qui cependant va se survivre, mais comme un objet d'exécration, dans la personne dudiable,reproduction exacte, par sa plastique et par son être moral, du vieux Pan des Arcadienst'°. l'être de Pan, si nettement que semble l'avoir fixé la littérature avec ses traits caractéristiques d'aiyo7cp6aorsoç et de -rpayocmdes ç et avec ses attributs de la syrinx, du lagobolon et de la chèvre 13, l'iconographie du dieu n'a pas moins souffert jusqu'à ces dernières années de la confusion établie entre son type propre et celui du Satyre chez les Grecs, entre tous les deux et celui de Faune chez les Romains. C'est aux travaux récents de MM. Stephani, Furtwaengler 1G et Wernicke que nous sommes redevables d'une distinction scientifique ; le dernier a de plus dressé un inventaire à peu près complet et méthodique des représentations du dieu dans tous les domaines de l'artf7. A part les représentations qui ont pour objet Héraclès et sa légende, il n'est point de sujet qui, à partir de l'époque hellénistique, ait fourni une moisson plus abondante de monuments; c'est que, s'il répugne aux procédés du grand art, il est éminemment favorable aux manifestations de la fantaisie ou plaisante ou sensuelle, riche en éléments grotesques et en contrastes, très propre à la caricature)". Cependant les types eux-mêmes sont en nombre restreint et on peut les ramener dès l'abord à deux principaux. Dans l'un surabondent les traits de la nature animale; dans l'autre, l'animalité est réduite au minimum, les cornes seules et les oreilles, montrées d'ailleurs avec discrétion, permettant de deviner le dieu arcadien, de l'affirmer avec PAN ;3011 --PAN certitude là seulement où les attributs et l'ensemble de la scène déterminent sa personnalité. Entre ces deux types s'échelonnent des figures où les éléments doubles de la physionomie sont l'objet de dosages très variables, suivant la fantaisie des artistes et le goût des milieux. En tete de la série dans laquelle domine le caractère d'animalité, il faut placer une statuette en bronze, originaire du Péloponnèse (fig. 5488), où Pan n'est en somme qu'un bouc dressé sur ses pattes de derrière, avec un thorax et des bras humains, la main gauche tenant la syrinx qui achève de l'identifier I. On suppose que de ce type furent les marina de hile de Psyttaleia et la statue en marbre de Paros qui fut placée par Miltiade dans la grotte de l'Acropole 2; une monnaie de Thasos au lieu d'une tête de bouc, lui donne les traits d'un veau, et dans une statuette en terre cuite, découverte à Rhodes, il a le groin d'un porc 3. Mais le goût artistique des Grecs, à l'époque où Pan devient populaire, est trop pur pour que dès lors on ne s'efforce pas d'humaniser ses traits. En Attique il subit l'influence du type des Satyres et des Silènes dont l'art dramatique a fait des danseurs costumés en boucs ".Pan entre, lui aussi, dans le thiase dionysiaque et devient à l'occasion le maître du choeur; comme tel, s'il garde la physionomie originelle du plus lascif des animaux, il la combine avec l'attitude, les gestes et le profil humains °. Ce type se retrouve, exprimé avec force, sur les monnaies de Panticapée qui portent au droit (fig. 54489) une tête à l'expression brutale et sauvage Une transformation complète dans un autre sens s'élabore en dehors de l'Attique, où l'action du théâtre est moins sensible; elle crée le type d'un Pan juvénile, sans barbe, aux cheveux courts et crépus, et portant de petites cornes très habilement combinées avec les ondulations de la coiffure. L'image la plus remarquable en ce genre est un bronze du Cabinet des médailles (fig. 5490) qui reproduit le type du Doryphore de Polyclète et que M. 1•nrtwaengler considère même comme une oeuvre originale de son école 7. Ii ne diffère guère du Doryphore que par de petites cornes placées assez haut dans la chevelure pour ne pas altérer les lignes du front; la main droite allongée tenait la syrinx et dans la gauche la lance était remplacée par le layobolon. C'est le type que nous retrouvons dès lors sur différentes monnaies (fig. )162, 5194) 8, plus tard dans le beau buste connu sous le nom de Faune de Winckelmann; celui-ci, à part des cornes très discrètes et des oreilles légèrement en pointe, fait songer, non au dieu sauvage des Arcadiens, mais à un héros de sensualité raffinée et élégante s. Tel est aussi le cas de deux figures de Pan du ter siècle av. J.-C., dont nous connaissons l'auteur et l'époque par une inscription en grec ; trouvées à Civita Lavigna, dans les ruines de la villa d'Antonin le Pieux, elles représentent Pan debout, appuyé sur la jambe droite, la tête légèrement inclinée; les mains et les attributs ont été restaurés ; l'animalité est indiquée par les oreilles pointues et les cornes ; mais l'expression est délicate et noble. Ce sont sans doute des copies d'un type du ive siècle 10. Dès cette époque la figure de Pan thériomorphique est exploitée comme motif de porteur en architecture, combinée avec des pilastres, des balustrades, ou même elle entre dans la composition des objets mobiliers 91. Il est représenté barbu, les cheveux longs ou tressés rejoignant la barbe, drapé dans un ample manteau qui enveloppe l'un des bras en laissant passer l'autre, avec, dans la main, l'attribut de la syrinx ; sous le manteau passent les cuisses velues montées sur les jambes du bouc (fig. 54492). Ce motif a été varié de façons diverses; Pan, au lieu d'être debout, dans une pose hiératique, est accroupi, sans draperie et jouant de la syrinx '2 ; il arrive que la main droite soulève audessus de la tête barbue et cornue un trophée de pampres et de raisins et que ses épaules, au lieu d'être drapées, sont couvertes d'une peau de lynx ou de lièvre 12. Il existe aussi des hermès de Pan, parfois doubles, dont PAN -301 PAN un de caractère noble et grave, qui adosse Pan à une figure de Nymphe ou de Ménade ; les deux figures sont couronnées de pampres, de raisins et de fruits l En rapprochant ces oeuvres des monnaies et des terres cuites de Grèce, d'Asie Mineure, de Sicile et de l'Italie méridionale qui ont fait la part très large aux représen tations de Pan, en effigie, en pied, debout, assis ou accroupi, on est frappé de la variété qu'y met la combinaison des éléments animaux ou humains ". Nulle part cette variété n'éclate davantage que dans les têtes et les masques, les uns en terre cuite, les autres en marbre et en bronze, qui sont pour la plupart de la période hellénistique et dont les artistes romains ont exagéré le caractère grimaçant et caricatural '. Un masque en bronze, aujourd'hui à Dresde a su concilier une certaine dignité du visage avec des cornes de bélier qui se déploient comme un casque au-dessus du front 5. Un relief en terre cuite (fig. 5493) nous donne du dieu trois expressions distinctes qui forment, prises ensemble, comme la synthèse de son être moral ". L'une Fig. 5492. Pan. des faces, cornue à la façon du bé lier et couronnée de lierre, a l'expression joyeuse du compagnon de Bacchus; l'autre, coiffée de pommes de pin, par les plis du front et de la bouche, par les cornes menaçantes du bouc et les oreilles pointues, par le pedum brandi à la hauteur de la nuque, donne une impression de colère et d'impétuosité : c'est le type du batailleur rustique; la troisième, sans cornes ni oreilles visibles, dépourvue d'attributs, est caractérisée par des yeux ronds sous les sourcils épais, par la bouche tristement entr'ouverte, par les cheveux et la barbe tombant en ondulations désespérées; celle-là est comme une image de l'épouvante, sans doute la personnification de la terreur panique. On peut citer dans I.e même ordre d'idées deux masques, faisant partie d'un même disque de marbre, où l'artiste semble avoir voulu fixer l'antithèse du Pan populaire, joyeux, sensuel. et du Pan mystique tel que le concevaient Pindare et après lui les philosophes ou les orphiques'. Ce qui est caractéristique pour l'histoire du culte de Pan, c'est qu'avant l'époque d'Alexandre le (rand, le dieu est à peine l'objet d'une légende, et que ;'art aussi bien que la littérature hésitent à le mêler à la vie des autres divinités 3. Il n'y a d'exceptions à faire que pour les rapports qu'il entretient avec Hermès et avec les Nymphes, auxquels se joint non la personnalité, mais le masque du dieu fluvial Achélous. Sur ce thème ont rte sculptés un assez grand nombre de bas-reliefs votifs qui ont beaucoup exercé la science des archéologues '. M. Pottier, à l'occasion de la découverte faite à Eleusis d'un de ces monuments, en a étudié dès 1881 toute une série ; les conclusions de son travail ont été récemment confirmées par M, AVernicke10. Tous ces bas-reliefs procèdent d'une même intention pieuse que caractérise d'une part la présence de Pan et dHermès, d'autre part celle de figures féminines, presque toujours au nombre de trois, qui sont désignées soit par des inscriptions, soit par l'ensemble de la scène connue des Nymphes. Pan debout, assis ou accroupi, est reconnaissable (fig. 5494) aux pieds de boue et à la syrinx 11 Que dans quelques cas, les figures féminines puissent être interprétées comme les Charites, les Heures ou les trois filles de Cécrops, la chose n'est pas contestable ; mais la destination originelle de ces monuments répondait certainement au culte des Nymphes [NYMPHAE' ; elle rappelle l'introduction dans Athènes de Pan, installé après la victoire de Marathon dans PAN 302 PAN la grotte célèbre de l'Acropole, non loin dei'Asclépéion'. Sans s'attacher toujours à donner l'image fidèle de cette grotte, les artistes qui ont sculpté les reliefs pour les besoins d'une piété nouvelle, en ont perpétué le souvenir, d'abord avec une intention formelle, plus tard en vertu d'une tradition inconsciente a. Quant au Pan accroupi jouant de la syrinx, il reste, même sans les Nymphes, un type favori; les vases peints des dernières époques nous en offrent de nombreux spécimens, avec cette différence que les plus anciens préfèrent le Pan barbu, les plus récents au contraire le Pan juvénile et imberbe, très semblable aux Satyres 3. Comme oeuvre de sculpture célèbre on ne peut citer qu'un Pan de Praxitèle qui le représenta avec des pieds de bouc, portant une outre sur ses épaules, en groupe avec des Nymphes et Danaé; la présence de cette dernière ne se prête à aucune interprétation plausible '. Au groupe de Praxitèle il faut, dans l'ordre des oeuvres en renom, rattacher le relief de Damophon qui ornait une table au temple de Despoina, à Mégalopolis. Le dieu y était représenté dans l'attitude du joueur de syrinx et, en compagnie des Heures, faisait pendant à Apollon citharède °. Parmi les peintres fameux qui ont illustré le type de Pan, on ne peut nommer que Zeuxis, qui fit cadeau de sa toile au roi Archélaos. L'oeuvre représentait le dieu surpris durant son sommeil par les Nymphes qui l'enchaînaient et lui coupaient la barbe, pour l'enlaidir aux yeux d'Écho leur compagne 6. C'est la contre-partie d'un sujet complaisamment traité par les artistes et les poètes de l'époque romaine, celui de Pan cherchant à surprendre les Nymphes et les héroines afin de satisfaire sa lubricité. Enfin le peintre Protogène, identifiant Alexandre avec Dionysos et lui donnant Pan comme compagnon d'armes, lui fait une place dans une oeuvre de caractère officiel qui illustrait l'expédition à travers l'Inde: plusieurs bas-reliefs romains ont exploité ce thème 7 C'est également à l'époque hellénistique qu'il faut faire honneur des groupes à intentions érotiques oit Pan est rapproché des éphèbes héroïsés. Il en existe des répliques de provenance romaine dans la plupart des grands musées de l'Europe s. Le plus célèbre est le groupe de Pan donnant une leçon de flûte à un jeune homme nu que les uns appellent Olympos, sur la foi d'un texte de Pline, quoiqu'il n'existe dans la légende aucun rapport de ce héros avec Pan, les autres Apollon, et qui très vraisemblablement représente le berger Daphnis Pline nous apprend qu'un groupe de cette espèce, qui avait pour auteur le sculpteur Héliodore, était placé sous le portique d'Octavie et y faisait pendant au groupe du centaure Chiron instruisant Achille. Le premier, qui passait dans son genre pour une des merveilles de la sculpture antique, doit être rattaché à l'école de Praxitèle. Au contact du thiase bacchique où Satyres et Silènes se sont multipliés, Pan fut lui aussi, tout d'abord à Athènes, l'objet d'une multiplication pittoresque que l'art a exploitée, particulièrement dans des scènes où Dionysos et Aphrodite sont les personnagesprincipauxt0. De plus, comme pour les centaures [CENTAURI], le type unique du Pan viril se diversifie dans des figures de femmes et d'enfants. La diffusion nous est at testée déjà par des textes qui datent de la guerre du Péloponnèse; quant aux Panines et aux Panisques, ils n'ont été imaginés que plus tard, durant la période hellénistique, et vulgarisés par la sculpture gréco-romaine". Un Panisque, désigné par l'inscription PAINISCOS, est gravé sur un miroir étrusque en compagnie de Marsyas [CAELATURA, fig. 982]. On a cru reconnaître une Panine sur une monnaie de Métaponte qui représente une tête d'expression féminine, aux boucles ondulées où se dissimulent des cornes : mais il s'agit sans doute d'un Dionysos jeune'. La plus curieuse figure de Panine est une statuette en marbre de la villa Albani, qui représente (fig. 549à) le personnage debout jouant de la flûte double ; la tête est cornue, les cuisses velues se continuant par des pattes de chèvre; le haut du corps, drapé d'une peau de chèvre, n'en est pas moins élégant et la figure agréable 13. Comme Panisques, on peut citer celui du bas-relief qui représente l'éducation du jeune Arcas par la nymphe Oenoé Pan enfant y joue de la syrinx dans un décor champêtre auprès d'une grotte 1`'. Je renvoie à l'étude de M. Wernicke pour le détail extrêmement complexe des représentations de Pan, mêlé à des légendes connues ou par la nature du sujet, ou par la fantaisie des artistes, soit qu'il y joue un rôle secondaire, soit qu'il ait simplement la valeur d'une figure pittoresque et décorative °. J.-A. Hutu. PAN 303 -PAN fêtes célébrées dans le sanctuaire de Zeus Panamaros, un des dieux protecteurs de la ville de Stratonicée, en Carie. Les inscriptions découvertes par MM. Cousin et Deschamps sur l'emplacement du temple 1 nous donnent quelques renseignements sur elle, comme sur les autres fêtes célébrées dans le même lieu, les Heraia et les 1Coanyria. La fête durait dix jours. La cérémonie essentielle était une procession, arpodloç 2, dans laquelle, à l'opposé de ce qui se pratiquait dans les Piomyria, on transportait solennellement l'effigie du dieu du sanctuaire à la ville de Stratonicée 3, où il résidait dix jours dans le Ce séjour du dieu hors de chez lui, dans la ville, était une occasion de réjouissances, que les largesses du prêtre de Zeus rendaient faciles à tous. Les inscriptions de Panamara félicitent les prêtres, comme de leur piété envers les dieux, de leur générosité envers les hommes teoaredcaç La fête des Panamareia, comme les autres d'ailleurs, donnait lieu à des distributions de tout genre : distributions d'huile, de vin, de viande, d'argent même, aux étrangers comme aux gens du pays. Toutes, les inscriptions découvertes sont autant d'exemples de ces fastueuses libéralités, qui semblent avoir constitué l'intérêt principal de la « panégyrie » des Panamareia E. CAIIE'\. célébrée tous les ans, et plus solennellement tous les quatre ans, en l'honneur d'Athéna. Nom de la fé'te. 11 y a lieu tout d'abord de distinguer les Panathénées, fête annuelle, et les « grandes Panathénées », fête pentétérique'. Mais il arrive souvent, même à l'époque classique, que la distinction ne soit pas faite ; le mot IIxtaê ;vara peut alors désigner indifféremment l'une ou l'autre des deux fêtes2. Thucydide, racontant le meurtre d'Ilipparque 3, le rapporte aux « grandes Panathénées» ;Hérodote° et Aristote', à propos du même événement, parlent des « Panathénées ». Quand la distinction est faite, la grande fête est dénommée Ilava(hivata eâ »ey0x6 (rarement l'article est, soit supprimé', soit, au contraire, redoublée) ou, à l'époque impériale, v (e eyaa Ilaval;jvata °. Pour la fête annuelle, on trouve la désignation HxvaO.(vela o -à utxp )0; mais la formule officielle semble avoir été rx IlavaO-iyaiot mut' EVtauTdv ". De plus en plus, d'ailleurs, la fête annuelle rentra dans l'ombre, et le simple « IlavaOwata. » désigna la grande solennité pentétérique. Ainsi, chez Aristote, l'époque plus ancienne désigne un espace d'une annéea', a le sens d'intervalle de quatre ans. I1 faut signaler en terminant l'expression plus rare, pour désigner la grande semble-t-il, le seul mot 7r6ornrtis(c '. Quant au simple 'Ai'svaia, on n'a aucun texte sûr pour affirmer qu'on ait pu, à l'époque historique tout au moins, dénommer ainsi la grande fête d'Athéna1G Origine et sens de fa fête. La fête des Panathénées, au témoignage général des textes, remonte au mythique Erichthonios 11. C'est lui qui aurait élevé sur l'Acropole un xoanon1l à la déesse et fondé en même temps la fête et les jeux. Le nom de la fête aurait été alors 'AO-vatal°. Puis Thésée, quand il eut rassemblé sous l'hégémonie d'Athènes toutes les bourgades de l'Attique [s'NOrüisMOSI, aurait fait de cette fête locale une fête commune à tous les Athéniens". Il se peut que les « Athénées » d'amant Thésée n'aient, été imaginées que pour expliquer historiquement le nom même de « Panathénées ». Quel est, en tout cas, le sens primitif de la fête? Les textes nous manquent pour le déterminer; ils nous montrent ce qu'était la fête aux temps classiques et ne nous renseignent pas sur sa signification primitive. Il faut au moins signaler l'ingénieuse théorie d'Aug. Mommsen, dans la réédition de son Heortologie2i Pour lui, le cycle des fêtes en l'honneur d'Athéna est un cycle de fêtes agraires : Athéna a joué, pour les paysans de la plaine attique, avant Déméter,le rôle de divinité de la vie des champs. Erichthonios né, d'après la légende, de la semence d'Héphaistos tombée dans le sein de la terre, c'est le grain de blé qui, confié au sol dans le mois Pyanepsion (décembre), donne la récolte neuf mois après, au mois Hékatombéon (août), date de la célébration des Panathénées (voir infra). Les Panathénées seraient donc essentiellement la fête de naissance d'Erichthonios, conçu comme symbole d'un phénomène naturel; première forme. Dans la suite l'idée primitive s'obscurcit, de même que passe au second plan le caractère agraire de la, déesse Athéna; Erichthonios n'est plus qu'un héros, protégé d'Athéna, qui pour l'honorer institue la fête des Panathénées ; comme Erichthonios est l'ancêtre commun de tous les Athéniens, la fête aussi devient la fête de tous les Athéniens, fête de « syiicocisrne » et d'unification; seconde forme, Enfin le rôle d'Athéna, grandissant, fait oublier celui d'Erichthonios, et les Panathénées célèbrent, en commémorant les victoires de la déesse, la puissance même et l'empire de son peuple ; troisième forme. On ne peut discuter ici une théorie qui tient à tout un système sur la signification des cultes attiques primitifs". Si l'on veut quitter le domaine de ces hypothèses aven PAN -304 m_o PAN tureuses, il faut s'arrêter à l'époque historique. Qu'est-ce alors que la fête des Panathénées? II faut écarter L'idée que les Panathénées commémoreraient la naissance même d'Athéna 1 : c'est une opinion de savants modernes qu'aucun texte ne justifie; rien clans le rituel de la fête ne se rapporte a cet événement 2. A s'en tenir aux faits, on peut distinguer deux éléments essentiels. Le scoliaste d'Aristide nous dit que la fête était célébrée en l'honneur de la victoire d'Athéna sur les géants. Or nous verrons qu'en effet, sur le péplos offert à la déesse, était représentée sa lutte contre les ennemis monstrueux des Olympiens . Il faut, d'autre part, considérer le nom même de la fête. Pollux rapproche avec raison le nom de Dans ce sens les Panathénées sont la fête nationale, fédérative de tous les Athéniens, comme les a P anionia » de tous les Ioniens; le culte d'Athéna n'est là, comme ici celui de Poseidon, que le moyen d'expression de l'idée politique et civique. Tandis qu'une autre grande fête athénienne, les Cleusinies, est purement religieuse, mystique, celle-ci est à la fois, très nettement, religieuse et politique. Mais le fait, tout particulier à Athènes, que le nom de la ville et du peuple est le même que celui de la déesse °, a contribué beaucoup à la confusion des deux éléments, qu'il convient de séparer.. C'est ce caractère politique de la fête des Panathénées qui explique les deux points de son développement historique que nous pouvons à peu près saisir. Si l'origine de la fête est très haut dans l'histoire athénienne, elle resta jusqu'à Pisistrate une fête locale et surtout aristocratique. Pisistrate institua la grande fête pentétérique 7, avec le concours gymnique et le concours musical; du même coup il faisait des grandes Panathénées une fête populaire et qui s'adressait à tous les Athéniens, et une fête panhellénique qui s'ouvrait e tous les citoyens du monde grec ; rien, on le voit, qui s'accorde mieux avec la direction générale de la politique des Pisistratides. Au siècle suivant Périclès, chef de la démocratie athénienne, complète l'oeuvre de Pisistrate et augmente encore l'éclat de la fête des Panathénées. S'il n'a pas, comme le dit Plutarque créé le concours musical (voir infra), il l'a du moins beaucoup étendu; un édifice spé';ml, l'Odéon, lui est dès lors réservé, Des décrets règlent la participation des alliés d'Athènes au sacrifice des Panathénées. La construction du Parthénon lui-même, enfin, s'inspire de préoccupations analogues. On ne saurait exagérer l'importance de la grande fête dans la vie politique de l'Athènes du v" siècle". Époque de le célébration. -. Les grandes Panathénées étaient célébrées tous les quatre ans ; les petites, tous les ansf0. Un scoliaste de Démosthène parle de ces dernières comme d'une fête trietérique; c'est un témoignage isolé, qui ne s'accorde pas avec les textes épigraphiques'?. Les textes et les inscriptions rapportent les grandes Panathénées àla troisième année de l'olympiade 13. Dans la première, la deuxième et la quatrième étaient célébrées les Panathénées annuelles ; nous avons des exemples certains pour la première et la quatrième année''. AY avait-il des petites Panathénées dans la troisième année de l'olympiade, ou les rites de cette fête formaient-ils simplement, cette année-là, le noyau de la grande solennité pentétérique ? Cette seconde solution est plus net:relie ; Pisistrate, en fondant les grandes Panathénées, n'ajouta sans doute pas une fête toute nouvelle au calendrier des fêtes attiques. Aussi bien la première solution ne pourrait être admise que si la date de célébration était différente pour les petites et pour les grandes Panathénées. Quelle est la date exacte? Pour la grande fête, Proclus" donne une indication formelle, le 3 d'Hékatombéon finissant. Un texte d'Aristote 16, concernant les athlotètes organisateurs des grandes Panathénées, rapporte la fête à ce même mois; nous savons d'autre part que le troisième jour du mois finissant était consacré à Athéna t7. Il faut donc s'en tenir à l'indication de Proclus. Pour les petites Panathénées, il ressort d'un texte de Démosthène qu'elles étaient célébrées le 11 Hékatombéon 18. D'autre part, dans une inscription qui renferme le compte des peaux provenant des sacrifices publics 19, et où ces sacrifices sont rangés par ordre chronologique, celui des Panathénées se trouve placé entre celui de la Paix (16 Ilélcatombéon) et celui des Eteusinies (I3oedromion) ; la date indiquée pour les grandes Panathénées convient donc à la fête annuelle, De ces témoignages et d'autres plus ou moins directs, il faut conclure que l'une et l'autre fête se célébraient le ?S Hékalombéon ; il n'y avait donc pas, dans la troisième année de l'olympiade, de petite fête distincte de la grande. Les Panathénées sont ainsi une fête de plein été, comme l'attestent des témoignages nombreux20; moment convenable pour le délassement et le repos qui doit précéder le travail de l'automne21. Si quelques auteurs de date tardive, le pseudo-Virgile du Ciris 22, Himérius 2%, parlent des Panathénées comme d'une fête du printemps, on ne peut guère l'expliquer que par une confusion entre les Panathénées et les Quinquatries romaines" (19 mars). Orgeniscteur's de la frite. Les magistrats ordinaires de la cité athénienne ont leur rôle dans l'organïsation des Panathénées; l'archonte éponyme est chargé de la recette de l'huile destinée aux vainqueurs2J; l'archonteroi, au ive siècle tout au moins, préside à la lampadodrolllie 2"; la 3oun , d'autre part, est l'auxiliaire des trésoriers pour l'administration financière des concours 97, des athlotètes pour la confection du péplos 28 et la fabrication des amphores (voir infra). Mais il y a aussi des fonctionnaires spéciaux chargés de la préparation de la fête. Dans le temps le plus ancien, les hiéropes (tepcaoto.) PAN 305 PAN semblent avoir été les seuls organisateurs '. Mais à partir du ve siècle, il faut faire une distinction entre la grande fête et la fête annuelle. Celle-ci, qui reste fidèle à la tradition ancienne, est toujours administrée par les hiéropes annuels, iEpo7oiel xxti' , vix'. 6v 2, qui sont au nombre de dix; ils sont tirés au sort. Une inscription' nous les montre réglant les dépenses, achetant les bêtes de sacrifice, partageant les viandes, présidant à l'ordonnance de la grande procession. Dans la grande fête, ils restent chargés de ce qu'elle a de commun avec la fête annuelle, c'est-à-dire avant tout des sacrifices. Mais l'organisation des concours et de tout ce qui s'y rapporte est le fait de fonctionnaires nouveaux, les ATHLOTHETES. Une inscription 4 de 410/9 nous donne ainsi le compte des sommes versées, à l'occasion des grandes Panathénées, d'une part aux athlotètes, d'autre part aux hiéropes xa't' ivtajTov, pour l'hécatombe, ait xxTOt,.flev. Les athlotètes '' sont au nombre de dix, un par tribu ; ils sont élus pour quatre ans ; ils organisent la procession, surveillent le travail du péplos, dirigent les concours, distribuent les prix aux vainqueurs ; des honneurs particuliers leur sont réservés ; ils sont nourris au Prytanée pendant le mois des Panathénées G. Au nt siècle enfin apparaissent les agonothètes. L'agonothète est un fonctionnaire annuel, élu, chargé, semble-t il, aussi bien des autres fêtes de l'année que des Panathénées Ses devoirs sont les mêmes que ceux des athlotètes. Nous décrirons la fête des Panathénées sous sa forme la plus complète, celle de la fête pentétérique. La cérémonie essentielle des Panathénées, à l'époque classique, est la remise du nouveau péplos, en procession solennelle, à la déesse Athéna, avec le sacrifice qui l'accompagne. Les jeux sont le complément naturel de cette manifestation religieuse. Nous étudierons successivement ces deux parties de la fête. Le péplos,la procession et le sacrifice. -La pratique de l'offrande solennelle d'un vêtement à la divinité, fréquente à l'époque classique 8, remonte à la période la plus ancienne. Ainsi, au sixième chant de l'Iliade Hécube, sur la prière d'Ilélénos, transmise par Flector, se rend au temple d'Athéna et remet entre les mains de la prêtresse Théano un péplos, le plus beau qu'elle a trouvé dans sa demeure; la prêtresse le place « sur les genoux d'Athéna » et adresse ses supplications à la fille de Zeus. Que de l'expression employée par le poète « Aàt,i;ç €r' yo.Svxsty », il faille conclure à l'existence d'une statue de culte assise ou que, comme le veut Reichelf0, l'offrande ait été faite à un « trône » sans image matérielle de la divinité, il reste que cette cérémonie est comme le prototype de celle qui s'accomplissait dans Athènes le 28 Hékatombéon. La remise du péplos est la pratique essentielle du culte d'Athéna. Dans les Oiseaux d'Aristophane", un personnage voulant deman VI1. der quelle sera la déesse protectrice de la ville nouvelle, s'exprime ainsi : a Pour qui tisserons-nous le péplos? » Le péplos était-il offert à la déesse tous les ans ou seulement aux grandes Panathénées? La plupart des textes appuient la seconde hypothèse'', Cependant, le décret de Stratoclès en l'honneur d'Antigone et de Démétrios, que nous lisons chez Diodorei0, fait mention du « péplos annuel d'Athéna », -ctv Tiç '_àOrlvâç 77277X69 xxT' EvtauT6v. L'usage de l'offrande annuelle du péplos semble donc s'être établi dans les dernières années du ive siècle ; il n'existait sans doute pas du temps de Lycurgue (338325)14. Plus tard il fut abandonné de nouveau ; les grammairiens de l'époque impériale ne connaissent que le péplos offert tous les quatre ans. Cette diversité d'usages suivant les temps explique que deux scolies ", à propos d'un même vers d'Aristophane, donnent sur ce point deux renseignements contradictoires. Le péplos te LPEPLOS] était exécuté entièrement par des mains féminines. Le jour de la fête des CHALKEIA ", dans le mois Pyanopsion, la prêtresse d'Athéna Polias et les arrhéphores commencent de tisser le péplos. Les arrhéphores [ARIixEPHORIA] sont au nombre de quatre; l'archonte-roi en choisit deux pour le travail du vêtement sacré 18, Aux arrhéphores s'adjoignent des jeunes filles et des femmes'', les épyxuxivat. Un décret honorifique 20 nous en donne une Iiste, rédigée par ordre de tribus ; elles étaient fort nombreuses et ne participaient peut-être pas toutes au travail effectif. La confection du péplos est surveillée par les athlotètes et le conseil, qui examine les « projets e (apnlu(ygaTr,) 2' ; il s'agit sans doute de la décoration du vêtement; plus tard, le conseil, s'étant montré partial dans ses jugements, perd son droit d'examen, qui est transféré à un tribunal. Le péplos de laine 22, de couleur jaune u, était décoré de scènes représentant Athéna luttant, aux côtés de Zeus, contre les géants 2'. Au Ive siècle, des portraits d'hommes vivants entrent dans la composition des scènes qui ornent le péplos; cet honneur échut par exemple, au témoignage de Diodore 28 et de Plutarque 26, à Antigone et à Démétrios : mais les dieux marquèrent leur mécontentement de cette impiétés'. Quant à l'expression bien connue d'Aristophane, parlant des Athéniens d'autrefois, tot Tou 7ulitàou 28, elle ne semble pas se rapporter à un tel usager', peu en accord avec les habitudes religieuses du ve siècle; Aristophane veut simplement dire que ces ancêtres étaient dignes des exploits figurés sur le péplos, A quel sanctuaire d'Athéna était destiné le péplos des Panathénées? Il devait évidemment recouvrir l'antique tions 30. Dr le temple qui renferme le vieux xoanon, c'est. jusqu'au ve siècle, le temple bridé par les Perses en 480, dont on a retrouvé les vestiges ; c'est, à partir du ioe siècle, l'Erechthéion, élevé à peu près sur son empla PAN306 PAN cernent, et toujours désigné sous le nom d'7pyaïoç vee)ç. Mais il n'est pas douteux que Périclès, en construisant le Parthénon, ait formé le projet, qui n'aboutit point, d'y transférer la vieille idole Ce qui suffit à le montrer, c'est que le sujet du tableau central de la frise orientale de la cella est précisément la remise du péplos. Si ce n'est pas l'interprétation universellement admise c'est la seule qui nous paraisse satisfaisante. Ce tableau central doit donc nous renseigner, toutes réserves faites sur l'écart entre la com position artistique et l'exacte réalité, sur ce qu'était la cérémonie de la remise du péplos. Un homme tourné vers la droite et un jeune garçon qui lui fait face tiennent en main une pièce d'étoffe rectangulaire, qu'ils examinent et se préparent à déplier ; à gauche, une femme se tourne du côté de deux jeunes filles qui portent sur la tête des objets qui semblent être des sièges garnis de coussins (fig. 5496). La femme est la prêtresse d'Athéna Polias ; l'homme qui reçoit le péplos est, soit l'athlotète chargé de surveiller la confection du vêtement sacré (A. Mommsen), soit un trésorier de la déesse (Michaelis). Quant aux deux jeunes filles, ce sont des diphrophores 4, et les sièges qu'elles portent sont sans doute destinés aux dieux, dont la présence idéalise hardiment cette scène tirée de la pratique réelle du culte. De part et d'autre, en effet, du tableau central, les dieux sont assis; mais ils font face à l'extérieur, du côté de la procession, de telle sorte que la scène de la remise du péplos est isolée de tout le reste de la représentation. Peut-être en fautil conclure que, au temps du moins de la construction du Parthénon, la cérémonie s'accomplissait dans le secret, à l'intérieur du temple °, et que le péplos même ne figurait pas alors dans la procession. Plus tard s'introduisit la coutume, peut-être empruntée au culte égyptien d'Isis, de placer le pépies sur un char en forme de vaisseau, muni d'un mât, i 'rêç, et d'une vergue, xapafa 6; le péplos faisant là office de voile. Un fragment de Strattis 7, poète de la comédie moyenne, fait allusion déjà à cet usage. Un décret honorifique de 298 av. J.-C. 6, en l'honneur du poète Philippidès, mentionne le cadeau fait aux Athéniens par le roi Lysimaque d'une machinerie nouvelle pour le vaisseau panathénaïque. Plus tard encore, le navire, d'abord traîné jusqu'aux Propylées par un attelage, fut actionné par un mécanisme inconnus. Sur la procession des Panathénées qui est restée pour nous, grâce au génie de Phidias, la partie la plus célèbre de la fête, sur son ordre et sa composition, c'est, avec quelques textes, la frise de la cella du Parthénon qui nous donne le plus de renseignements; mais son interprétation est loin d'être assurée sur tous les points. La procession partait, au point du jour10, du Céramique' 1. Elle s'y organisait à la fois, d'après les témoignages de Thucydidet" et d'Aristote13 àpropos du meurtre d'Hipparque, au Céramique extérieur et au Céramique intérieur, près de l'endroit dénommé Leôkôrion. Puis le cortège pénétrait au complet sur l'agora, qu'il traversait tout entier. Il semble qu'il en faisait le tour, honorant l'un après l'autre les autels qui s'y élevaient, et que les cavaliers profitaient de ce large espace pour s'y donner en spectacle et y évoluer ; c'est ce qu'on peut tirer d'un passage de Xénophon 24. C'était là, près des « Hermès », que le cortège se déployait dans sa splendeur et que la foule se rassemblait pour l'admirer 160 L'étape la plus importante de la procession, entre le Céramique et le temple d'Athéna, était i'Eleusinion, au témoignage direct ou indirect de plusieurs textes10. Le site exact de l'Eleusinion est très incertain ; ces textes même sur la procession panathénaïque sont en faveur de l'hypothèse qui le place à l'ouest de l'entrée de l'Acropole 17. Le cortège ensuite touchait à sa dernière station, le Pelasgikon, et pénétrait de là sur le plateau par les Propylées. Le vaisseau panathénaïque n'y entrait pas; Pausanias le vit a remisé » près de l'Aréopage t8, Sur la composition du cortège et son ordonnance, c'est surtout la frise de la cella du Parthénon qui nous renseigne. On ne peut songer ici à discuter toutes les questions qu'elle soulève ; montrons seulement comment elle corrobore les indications qui nous viennent d'ailleurs. Une inscription 1s nous donne la liste des personnages auxquels revenaient des parts dans le sacrifice des Panathénées. Il est évident que ces personnages étaient présents à la procession qui le précédait. Ce sont d'abord les prytanes, les neuf archontes, les trésoriers de la déesse, les stratèges et taxiarques. Or on peut reconnaître (fig. '726) les prytanes, les archontes ou les trésoriers (toute précision est impossible) dans les figures 19-23 et 43-46 de la planche XIV de Michaélis '0. Ce sont ensuite les Imputes, chargés de conduire les bêtes de sacrifice ; on les voit (fig. 5500) sur la frise (n05 1-11, pl. XII, et 108 PAN 307 PAN 131, pi. XI). Ce sont enfin les canéphores [CANEP1ORAE]. Quelles sont, sur la frise du Parthénon, les figures qu'on peut interpréter comme telles? Faut-il entendre, au sens restreint du mot, par canéphores celles qui portent sur la tête les corbeilles sacrées, Ht xavâ 1? Dans ce cas deux seulement qui marchent en tête du cortège (nOe 50 et 51, pl. XIV) peuvent être ainsi dénommées ; faut-il admettre au contraire 2 que, par une extension de sens assez naturelle, toute jeune fille porteuse d'objets de culte est une canéphore ? Dans ce cas, elles sont largement représentées sur la frise (fig. 5497). Il devait y avoir d'autres participants à la procession des grandes Panathénées; ainsi,les ergastines et les athlotètes, qui n'avaient pas motif de figurer à la fête annuelle, où les uns ni les autres ne jouaient aucun rôle, avaient leur place marquée à la grande fête. Les métèques 3 aussi, nous le savons par de nombreux textes, étaient présents dans la grande procession [METOIGOI, fig. 5022]. Loin que les devoirs dont ils étaient chargés fussent pour eux une humiliation c'était un moyen de participer aux cultes de la cité c. Les métèques portaient des bassins, nommés (iixcipat, remplis d'objets de sacrireprésentés sur la frise du Parthénon (n°s 13-15, pl. XII). Leurs femmes portaient des ombrelles', qui étaient aussi des objets de culte 8 et des hydries du Parthénon (fig. 5498), ce sont des jeunes gens qui, derrière les rro zircfs, portent des hydries sur l'épaule (n°' 15-19, pl. XII) ; ce sont bien cependant des métèques, puisqu'ils marchent derrière les scaphéphores, qui appartenaient certainement à cette classe ".Quant aux diphrophores, rien n'indique que ce fussent des métèques; aussi bien si, comme nous l'avons admis plus haut, elles figurent dans la scène centrale de la frise du Parthénon (fig. 5496), et si les sièges qu'elles portent sont destinés, non pas aux canéphores, mais aux dieux eux-mêmes, leur rôle n'est pas moins important, ni moins honorable que celui des canéphores elles-mêmes 11. On reconnaîtra encore (fig. 5499) sur la frise (nec 38-43 de la p]. XII) les 9tidd.oÿ.6pot, vieillards choisis parmi les plus beaux de chaque tribu, qui suivaient la procession, porteurs de rameaux d'olivier 12. Peut-être y avait-il quelque rapport entre le cortège des 8aaaotpdpot et le concours d'Eyavêp(a, dont il sera parlé plus loin (p. 310). La présence enfin de l'élément militaire dans la procession, hoplites, cavaliers et conducteurs de chars, est attestée par les textes. Les premiers sont mentionnés par Thucydide 13, dans sa narration du meurtre d'Hipparque, et Aristote 14 y fait allusion à propos du même événement ; leurs chefs, stratèges et taxiarques, figurent dans l'inscription Corp. inscr. att. II, 1, n. 163. De nombreux textes de Xénophon se rapportent au rôle des cavaliers dans les processions H. Et c'est surtout à la procession des Panathénées que songe Démosthène 12, quand il se plaint que taxiarques, stratèges, phylarques et hipparques ne connaissent plus les manoeuvres sur le champ de bataille, mais seulement les évolutions sur l'agora. D'où vient que les hoplites n'apparaissent pas sur la frise du Parthénon, et que seuls les cavaliers y aient leur place [ÉQUITÉS, fig. 2719], et une place considérable, qui ne correspond pas à l'importance réelle de la cavalerie dans l'ensemble des forces militaires de la cité? En dehors des raisons d'ordre esthétique, il peut y en avoir une autre : la cavalerie athénienne venait d'être réorganisée, au milieu du ve siècle, et le brillant défilé des éphèbes cavaliers offrait ainsi un intérêt d'actualité 1r. Le sacrifice. Le sacrifice panathénaïque, tel que d'après la légende il avait été institué par Erichthonios lui-même18, consiste dans la double offrande d'une bête de gros bétail et d'une autre de petit bétail, 'r,(6oto'i n, Les colonies et les villes tributaires de l'empire d'Athènes reconnaissent en quelque sorte leur dépendance de la métropole par l'envoi aux grandes Panathénées des boeufs PAN 308 PAN et des brebis destinés au double sacrifice 1. Et sur la frise du Parthénon, derrière le gros bétail, apparaissent les brebis offertes en ir.(lictov. L'inscription Corp. inscr. att. 11, 1, 163 fait connaître, pour la fête annuelle, le détail des sacrifices panathénaïques. On offre d'abord deux sacrifices préliminaires, le premier à Athéna 11vgieia, l'autre à une divinité dontlenoni estperdu, et qui peut avoir étél' Athéna de l'ancien temple Ces sacrifices doivent être offerts d'après la coutume », xa83.ntcp apdsopov ; et le partage des viandes fait ainsi qu'il suit 3 : cingparts aux prytanes, trois aux archontes, une aux trésoriers, une aux hiéropes, trois aux stratèges et taxiarques,et la part accoutumée aux conducteurs des bêtes de sacrifice et aux canéphores ; le reste aux citoyens. Puis vient le sacrifice au grand autel d'.Athéna; un animal, choisi parmi les plus beaux, est sacrifié sur l'autel d'AthénaNiké, tous les autres sur celui d'Athéna Poilas. A la suite du sacrifice, les viandes sont distribuées au peuple athénien, chaque dème recevant une part proportionnelle au nombre de ses représentants. Le prix des bêtes de sacrifice est cette fois de 41 mines. L'hécatombe des grandes Panathénées était encore plus considérable; en 410/9 on dépensa 5 114 drachmes. Le sacrifice panathénaïque est rappelé sur la frise du Parthénon (fig. 5500) ; sur le côté nord, c'est le sacrifice traditionnel, avec l'vn(àoro,E, gros et petit bétail ; sur le côté sud, l'hécatombe Les jeux. La fête des Panathénées, comme toutes les grandes fêtes grecques, comporte, à côté des cérémonies religieuses, des jeux sous la forme de concours [CERTAMixAp Par celles-là fête attique, elle est par ceux-ci fête panhellénique; c'est donc surtout cette partie de la fête qui s'est, on l'a dit à partir de Pisistrate, toujours plus développée, et c'est par ce côté surtout que la solennité pentétérique diffère de la Pète annuelle. A part un petit nombre d'exercices 6 qui, se rattachant aux plus anciennes traditions, ne sont pratiqués que par les citoyens athéniens, les jeux panathénaïques sont ouverts à tous les Grecs ; de grands noms du monde hellénique figurent parmi les vainqueurs aux concours des Panathénées. Sur les règles d'ordonnance générale, communes aux jeux de toutes les fêtes grecques, voir LUol. II y avait aux Panathénées trois concours (âyàve;) principaux : le concours musical (aouatxds), le concours gymnique (yugvtxd;), le concours hippique (hidrtxd,) A ces concours s'adjoignaient ceux qu'on peut appeler, avec Aug. Mommsen, les petits concours : pyrrhique, euandrie, lampadodromie; on peut encore classer, sinon parmi les concours, du moins parmi les jeux, les chants lyriques qui remplissaient la veillée sacrée, 7avvua(ç, et précédaient le départ de la grande procession. Il y avait enfin une régate (vawv Nous connaissons ces concours par quelques textes, qui donnent peu de détails, et surtout par les inscriptions Corp. inscr. att. Il, 966-970, qui sont des listes de concours ou de vainqueurs aux jeux, et d'où nous tirons à peu près tous les renseignements qui suivent. Concours musical 7. Le gouatâoç âyrSv des Panathé nées comprend un concours de rhapsodes et un concours musical proprement dit. Le concours de rhapsodes, où l'on chantait, à l'exclusion de tous autres, les poèmes d'Homère 8, remontait à Pisistrate, fondateur des grandes Panathénées. On sait quelle part lui est attribuée dans la recension des poésies homériques. Platon' fait honneur de la même institution à Hipparque, qui nous est représenté comme un ami de la poésie et des poètes, Diogène Laérce 10 à Solon. Nous ignorons ce qu'était au juste le concours des rhapsodes à l'époque classique et aux temps qui suivirent. Il apparaît qu'au ve siècle encore on récitait l'ouvre d'Homère; Suidas" nous dit, en effet, qu'on décida de réciter le poème de Chcerilos sur les victoires d'Athènes dans la guerre contre Xerxès avec les poèmes d'Homère. Nous en savons un peu plus sur le concours musical proprement dit. Plutarque t2 en attribue formellement l'institution à Périclès, qui bâtit à cet effet l'Odéon. Mais il semble que Plutarque se soit mépris t". D'abord il serait surprenant que les Pisistratides aient exclu de 1'âyw gouatxdç qu'ils instituaient la poésie lyrique'. De plus un texte de Plutarque t3 luimême nous atteste l'existence aux temps anciens, v 4l'?,, de la poésie lyrique aux Panathénées. L'argument de la XIP pythique de Pindare parle de la victoire pana. thénaïque de Midas d'Agrigente au concours de flûte, au début du ve siècle. Enfin deux vases panathénaïques du vie siècle représentent un concours de ce genre". C'est donc à Pisistrate qu'il convient de faire remonter l'âyùv gouctxdç. Périclès n'a fait que lui donner plus d'importance par la construction d'un local à lui réservé. L'inscription Corp. inscr. att. II, 965 (ive siècle) nous renseigne sur l'organisation du concours. Il se composait d'un concours de poésie avec accompagnement de cithare (iuOxpwlo() et de flûte (auawôo:,, puis d'un concours d'instruments, cithare (xrIapta-raO et flûte (aûa,ïzxt). Les PAN 309 st.PAN prix consistaient en une somme d'argent l ; le premier de chaque concours recevait en outre une couronne. La valeur des prix était la suivante : Citharèdes : 1"» p une couronne de 1000 drachmes, plus 500 drachmes d'argent ; 2e, 3" et 4e prix (restitution), 1200, 800 et 400 drachmes. Aulèdes:Ierprix,couronnede300drachmes; 2e prix, 100 drachmes. Citharistes : ter prix, couronne de 300 drachmes, plus 500 drachmes argent; 2e prix, manque ; 3'prix, 100 drachmes. Aulètes : il ne reste à peu près rien de cette partie de l'inscription. Comme l'inscription porte l'indication vêpiat 2è', oloïç et âvêoxmi x:6amter2iç, il est légitime de penser qu'il y avait pour ces deux concours des prix réservés aux enfants, arxiècç : peutêtre les premières lignes de l'inscription, tout à fait mutilées, leur étaient-elles consacrées 2. Sur la nature des compositions lyriques ou musicales récitées dans ces concours, nous manquons de renseignements; on peut seulement remarquer, par la différence de valeur des prix accordés àla cithare et à la flûte, combien le premier de ces instruments était plus estimé que l'autre La valeur assez considérable de ces prix, le fait d'une construction réservée par Périclèsa ces concours, d'autres circonstances encore prouvent que l'yJw p.o'cixé; des grandes Panathénées était fort important et les victoires qu'on y remportait très estimées ", C'était d'ailleurs un concours ix acævcw, ouvert à tous les Grecs ; ainsi le scoliaste d'Aristophane nous parle du cithariste Phrynis de Mitylène, vainqueur aux Panathénées °. Des renseignements plus complets sur 1'yiov g,ouccx6ç seraient du plus haut prix pour l'histoire littéraire. Concours gymnique.Le concours gymnique(yugvtx'oç (bv), comme le concours musical, remonte à Pisistrate. D'après Eusèbe pourtant, il aurait été célébré pour la première fois en 566 av. J.-C. II est dit formellement qu'il revenait tous les quatre ans, donc aux grandes Panathénées L'emplacement du concours était, au moins jusqu'au ive siècle, dans la localité dénommée Echelidai 7, près du Pirée. Au ive siècle, sous l'administration de Lycurgue, est construit, sur la rive gauche de l'Ilissus, le stade panathénaïque 8, agrandi et embelli au ne siècle après J.-C par Mérode Atticus. C'était dans les jeux gymniques qu'on proclamait aux Panathénées les décrets honorifiques °. Le concours était Ex u2ireswv parmi les vainqueurs dont les inscriptions nous ont conservé les noms, très peu sont des Athéniens t0. La durée du concours gymnique, d'après un texte d'Aristide, était au moins de deux jours llp Les inscriptions nous donnent des renseignements assez précis sur la composition du yty.vtxbç yév. €1 y avait trois classes de concurrents. Aux deux catégories qu'on retrouve dans tous les jeux de la Grèce, les 1re.ôsç et les èvlpeç, s'ajoute, dès le ive siècle, celle des « jeunes gens », ie ivo(ot. Quant à la nature des exercices, ce sont les mêmes à Athènes qui depuis longtemps étaient pratiqués à Olympie [oLYMPfni, et que Pisistrate s'est contenté de mettre au programme du concours qu'il venait d'instituer. Au rve siècle, les nards; comme les 'ivetot luttent au stade, au pentathle, à la lutte, au pugilat, au pancrace [cti"t'S, r.ucT8, Qclx Q uErrrlcèi!. Aa rte siècle, nous trouvons qu'on a enlevé aux ,txièeç l'exercice du pentathle, sans doute jugé trop pénible, et qu'on l'a remplacé par deux courses de stade, la doliclaos et la diaulos 'cuRsesi. Le concours des àvôpe; comprend les mêmes exercices, entre lesquels viennent s'intercaler deux autres, l'Iaippios _:iurponRoarosj et 1'{zopilles [lioer,zronnoèuA]. En résumé, nous ne pouvons mieux faire que de donner ici le tableau dressé par blommsensa e t qui s'applique à l'ydv du ne siècle : Puisqu'il semble que le concours gymnique durait deux jours, il y a lieu de penser que le premier était réservé aux onze concours des o zCoç et des YEVEtoi, et le second aux neuf concours des zvt oç ; on remarquera que la course ati'lu oç est en tete de l'une et de l'autre série. Les prix du concours gymniquef0 consistaient en un nombre déterminé d'amphores d'huile. Ces amphores, connues sous le nom d« i amphores panathénaïques » l', portent d'un côté l'image d'Athéna debout, avec l'inscription rwv 'AO/v,îïev éfi)è«,v, de l'autre, le plus souvent, la représentation d'une scène de concours (fig. 282, 283). Quelques-unes sont datées du nom de l'archonte qui a présidé à la recette de l'huile (voir infra). L'inscription Corp. inscr. att. II, 965 (ive siècle) nous donne l'indication du nombre d'amphores attribuées aux vainqueurs. Le premier prix est toujours de cinq fois supérieur au second, et la différence entre les prix des craineç et ceux des [ 0ltot est toujours de dix amphores pour le premier prix, de deux amphores pour le second. Voici d'ailleurs le tableau complet, emprunté, comme le précédent, à A Mommsen l3 : PAN --310 --PAN L'huile distribuée aux vainqueurs provenait, en principe, des oliviers sacrés d'Athéna [vlonsAZ] épars sur tout le territoire de l'Attique. L'administration des ;,.dptat changea suivant les époques. D'abord t l'État athénien vendait directement le produit de la récolte, une fois mise à part l'huile destinée aux prix des concours; les ucotat étaient alors comme une servitude sur les terrains des propriétaires athéniens. Plus tard, l'État se contenta de lever une contribution d'un cotyle et demi par pied d'olivier sur les propriétaires des terrains qui contenaient les p.dptat ; par là le revenu des oliviers sacrés devenait fixe, au lieu de varier suivant la valeur de la récolte 2. Chaque année l'archonte prélevait la quantité voulue et la remettait entre les mains des trésoriers de la déesse; ceux-ci la conservaient à l'Acropole et la remettaient eux-mêmes, au moment convenable, aux athlotètes, qui faisaient la distribution aux vainqueurs. Concours hippique. Le concours hippique (fhrvrtxoç àywv)estle plus ancien dans les û,e eit f4,i fêtes panathé naïques.Il remonte, d'après la tradition, à E r ichthoni os lui -même 3. Pisistrate ne fit que l'étendre et qu'en faire un grand concours panhellénique. Al'époque classique encore, un exercice rappelle la plus ancienne tradition de l'dtymv trétrixdç ; c'est l'exercice de l'apobate, à oôzrr,ç. On le trouvera décrit à l'article DESULTOR (fig. 2332); tout ce qui concerne l'organisation de l'àYinv i7s7rncdç est traité à l'article HIPPODROmos, dont un chapitre est consacré aux jeux hippiques des Panathénées'. Petits concours. Au concours hippique faisaient suite, précédant la grande cérémonie du 28 Hékatombéon, les e petits concours e. Ils se distinguent des autres par leur caractère religieux. Aussi, tandis que les grands concours s'adressent aux bonnes volontés individuelles, amateurs » ou athlètes de profession, les petits concours sont des «liturgies» [LEITOURGIA]. L'inscription Corp. inscr. att. II, 2, 965 mentionne les trois concours de cette classe, rrt,psÇ,v, etirein s, )l'a tyç. Pyrrhique. La danse nommée pyrrhique [PvnRxICHÈ] avait un rapport direct avec Athéna. On disait que la déesse l'avait dansée après sa victoire sur les géants'. Elle faisait partie du programme des grandes et des petites Panathénées. Un chorège en faisait les frais; l'un des clients de Lysias prétend avoir dépensé pour cette chorégie 800 drachmes aux grandes Pana thénées, 700 drachmes aux petites 6. Il y avait trois concours de pyrrhique, répondant aux trois classes agonistiques, ratio;, a'(ivclot, iivôpeç 7. Le prix accordé au choeur victorieux était, dans chaque classe, un boeuf d'une valeur de 100 drachmes. Un relief qui formait la base d'un monument dédié par un chorège vainqueur a été retrouvé par Beulé devant les Propylées s. Il représente (fig. 5501) huit jeunes gens, divisés en deux demi-choeurs; ils sont nus, portant seulement le casque et le bouclier ; ils observent tous la même pose et le même pas. Si le bas relief est la copie exacte de la réalité, il ne peut que représenter le choeur des «(scbot ; il y avait donc en tout, pour chaque chorège, vingt-quatre danseurs à instruire et à équiper. Eiavip(a. Il y avait à Athènes, aux Panathénées, un concours d'cisvlp(a [IALLISTEIA], ouvert, d'après un texte, aux seuls Athéniens". Il semble avoir consisté, pour chaque tribu, à présenter un certain nombre d'hommes remarquables par leur force et leur gràce viriles; c'est ainsi que dans les Mémorables de Xénophon Socrate dit qu'aucune ville ne saurait rivaliser dans l'euandrie, pour la belle taille et la vigueur des corps, avec Athènes. Mais, tandis que d'après l'inscription Corp. inscr. att. II, 2, 965, le prix de l'euandrie était un boeuf de 100 drachmes, Aristote nous dit que les prix de ce concours étaient des boucliers 12. Peut-être, avec le temps, le concours d'euandrie avait-il changé de caractère 13 et s'était-il assimilé aux concours militaires d'c'Ta,(a et d'oio7ra(r que nous présentent les Théséia [TRESEIA]? D'autre part, nous avons signalé plus haut les vieillards qui, porteurs de rameaux d'olivier, marchaient avecla procession des Panathénées. Ce cortège de 95ÀAotpiipot avait-il quelque rapport avec le concours d'euandrie? La chose est possible. En effet, dans l'inscription Corp. inscr. att. II, 965, à la ligne qui suit celle concernant l'euandrie, on Iit : « à la tribu victorieuse un boeuf de 100 drachmes ». De quel concours s'agit-il? Plusieurs solutions sont possibles ". D'après l'une d'elles, il s'agirait encore ici de l'eûav®o(a, qui aurait comporté un concours pour les izvipsç et un autre pour les vieillards, 90i?,opdpot. .Lampadodromie. La lampadodromie des Panathénées se trouve rapprochée, dans une inscription ts, de celle des `llcpatsTtaia; Athéna avait en effet, dans la légende, des rapports avec Héphaistos. Elle était orga PAN -311 PAN nisée, pour chaque tribu, par un gymnasiarque, sous la surveillance de l'archonte-roi '. Pour la description de la lampadodromie, on se reportera à l'article LAMPADEDaoruA. Le prix du vainqueur était une hydrie de 30 drachmes 2 Mais il semble que c'est là une récompense assez mesquine, et que la tribu victorieuse devait en obtenir une plus considérable pour son compte c'est ce qui donne quelque vraisemblance à l'hypothèse d'A. Mommsen 3, qui rapporte la ligne 27 de l'inscription Corp. inscr. att. II, 965 à la lampadodromie ; il y aurait en un vlxrt'riptov pour la tribu et un eXov pour le coureur victorieux. La lampadodromie est le dernier concours que mentionnent les inscriptions. Comme les concours précédaient la grande procession du 28 Hékatombéon (voir ci-après), la lampadodromie se place assez naturellement le soir du 27. La nuit du 27 au 28 était une veillée sacrée, la,cavva' h de l'inscription C. ïnser, att. II, I, 163. Plusieurs cérémonies avaient lieu au cours de cette veillée, qu'Euripide dans quelques vers, semble avoir décrite. Il parle des chants des jeunes gens, des choeurs, des litanies (ôl.o).ûyµxca) des jeunes filles. Un texte d'Héliodore ' mentionne en effet un péan en l'honneur de la déesse. Pour les choeurs, nous y trouvons une allusion dans un texte de Lysias 6 ; et sur la même base, décorée du relief des pyrrichistes, dont il a été parlé plus haut (fig. 5501), est représenté (fig. 2257) un choeur cyclique, composé de sept personnages, et d'un huitième qui semble les conduire Cette veillée sacrée devait offrir un spectacle imposant 6 Des superstitions d'ailleurs étaient attachées à cette nuit mystique ; Hipparque eut cette nuit-là, Ev apo,ré vux'i Fwv Ilavaerlvxlo,v 9, un songe qui trouva son accomplissement. Régate. L'inscription panathénaïque Corp. inscr. att. II, 2, 965, mentionne un dernier concours, la régate (vatev gaUct). Nous ne savons à peu près rien par ailleurs sur ce concours, sans doute le dernier introduit dans le programme des Panathénées. Un passage du poète comique Platon, cité par Plutarque7', où il est dit du tombeau de Thémistocle, placé à l'entrée du Pirée, qu'il assiste « aux luttes des vaisseaux, quand il y en a », se rapporte vraisemblablement à la régate panathénaïque. Les prix sont assez élevés 300 drachmes au premier, plus 200 drachmes pour un festin, 200 drachmes au second. Peut-on tracer enfin un programme général de la fête? Aug. Mommsen en présente un qui dans l'ensemble est très vraisemblable". II faut partir de ceci, que la journée principale, le 28 Hékatombéon, est consacrée à la procession et au sacrifice, et que sans doute cette journée était l'aboutissant, le point culminant de toute la fête. Les concours doivent donc se placer avant cette journée. L'ordre des concours est celui même donné par les inscriptions, et qui est corroboré par plusieurs textesf2 concours musical, concours gymnique, concours hippique. A la suite des grands concours venaient les trois « petits concours », dont le dernier, vraisemblablement, était la lampadodromie, qui devait se placer le soir même qui précédait la veillée sacrée et la grande solennité du 28, Dans cette ordonnance, la régate ne peut trouver sa place que le lendemain de cette solennité. Combien de jours enfin durait la fête? Aristide dit que le concours gymnique ne se célébrait pas en un jour, et encore moins le concours Inusicalf3. Il faut donc que le concours gymnique ait pris au moins deux jours, et le concours musical trois; de plus, au moins à partir du ne siècle, le concours hippique, chargé comme il apparaît dans les inscriptions, doit avoir rempli au moins deux jours. A ces sept jours il en faut adjoindre au moins trois pour les petits concours, la procession, le sacrifice, et la régate. Les grandes Panathénées, dans leur développement complet, ne pouvaient donc durer moins de dix joursia II. -En dehors d'Athènes, on trouve des « Panathénées » à Pergame et en Troade et peut-être à Rhodes. Sur les Panathénées de Pergame, nous n'avons de renseignement que la mention qui en est faite dans quelques inscriptions honorifiques'', où il est dit que la proclamation sera faite €e t'oï; IIavae'gva(otç. Nous sommes un peu mieux renseignés sur les Panathénées de la Troade. Quelques inscriptions font connaître la confédération formée à partir du Ive siècle av. J.-C. par les villes de la Troade 16, et dont la capitale était la Nouvelle-Ilion. Le culte fédéral était celui d'Athéna Rias; les villes s'intitulent elles-mêmes 21 uesiç ai Cette «panégyrie » ne peut être que la fête d'Athéna que d'autres inscriptions dénomment en propres termes « les Panathénées ». Les Panathénées de la Troade étaient organisées sur le modèle de celles d'Athènes. Il y avait des petites Panathénées, ta.txpâ IIxvalr)atx f 8, sans doute annuelles, c'étaient les plus anciennes, et une autre fête plus considérable, les « nouvelles Panathénées », Fq. véa Ilav1erpauy.19. Les concours de la grande fête athénienne se retrouvent en Troade; il est question d'un concours musical etdramatique, eu(a.alstxôç ln(«îv, âxpox ,xrx, d'un concours gymnique, vuptvtxdç, et hippique, hrri(xôç20. Ces concours sont présidés par un agonothète 2A. Et enfin la présence des canéphores, qu'on félicite de leur belle grande procession, là aussi, clôturait la fête. Il semble enfin qu'on ait également célébré des « Panathénées » à Rhodes. II n'y a pas de texte formel sur ce point. Mais Philostrate rapproche quelque part 23 le sacrifice qu'on offrait à Athéna sur l'acropole d'Athènes de celui qu'on lui offrait à Rhodes; et les inscriptions" nous révèlent l'existence, parmi les nombreuses associations religieuses de l'île, d'un collège de IIaval-r,vx'ia'at. dectes dans la préface des Nuits attiques d'Aulu-Gelle, comme du titre d'une compilation (,tavli)5'at, de ,vâv ilyoµat, undique collecta). Digesta, de digerere (in or PAN 312 --PAN dinem), fut le nom d'ouvrages dans lesquels les matières étaient distribuées suivant un ordre systématique. Les jurisconsultes classiques avaient écrit des ouvrages sous ces deux noms. On possédait des Digestes d'Alfenus Varus, de Juventius Celsus, de Salvius Julianus, d'Cipius Marcellus et de Cerbidius Scaevola, et des Pandectes d'Llpien et de Modestiinus ]JURLSCONSULTI, p. 718, 721 et 725]. Lorsque Justinien monta sur le trône, les écrits des jurisconsultes officiels (quibes perinissum erat jura condere) jouissaient encore de l'autorité, sous les conditions énoncées par la loi des citations JUaisconsuLTI, p. 725]. Mais il régnait entre eux des contradictions qui embarrassaient les juges. La multiplicité de leurs ouvrages n'était pas moins gênante, et on était sans cesse obligé, en les consultant, de faire abstraction des parties du droit qui avaient changé. D'ailleurs, les manuscrits étaient loin d'être aussi nombreux que les livres le sont devenus dans les temps modernes ; et c'était une obligation lourde et souvent difficile à réaliser pour un juge, que d'avoir à sa disposition tous les ouvrages de droit auxquels il était tenu de se conformer. A la fin de l'année 530, pour remédier à cet état de choses, Justinien chargea une commission, à la tête de laquelle était Tribonien, questeur du palais sacré, de préparer un extrait des écrits des jurisconsultes. Outre Tribonien qui la présidait, elle se composait de seize personnes, fonctionnaires, avocats et professeurs de droit, tant de Constantinople (Théophile et Cratinus) que de Béryte (Anatolius et Dorotheus). L'histoire de la confection du Digeste est contenue dans trois constitutions de Justinien qui forment au code le titre de veteri jure enucleando'-. Le plan qui fut mis à exécution consistait à faire des extraits des jurisconsultes classiques, en choisissant librement dans tous leurs ouvrages, sans égard à la loi des citations, laissant de côté ce qui était tombé en désuétude et évitant les répétitions et les contradictions. Tous ces extraits étaient distribués suivant un ordre systématique. Tribonien et ses collaborateurs étaient libres de les altérer et de les interpoler pour les mettre en harmonie avec la législation du jour. Ils en usèrent largement, faisant fonction de législateurs et s'efforçant de mettre les fragments auxquels ils donnaient force de loi en harmonie avec la législation simplifiée, et à tout prendre supérieure, de Justinien, Afin qu'il ne pût être porté atteinte à son oeuvre, Justinien défendit d'en écrire les copies avec des sigles ou abréviations pouvant jeter du doute sur la Iecture, et d'y faire des commentaires, de peur de renouveler les disputes des jurisconsultes et d'embrouiller les textes qu'il croyait tout à fait clairs'. Mais il permit de traduire le Digeste en grec mot à mot (xttzâ méfia) et d'accompagner les rubriques des titres de paratitles (rupéztr)x), c'est-à-dire d'indications des matières contenues dans le titre, avec rapprochement des textes appartenant au même sujet et épars dans des titres différents3. Les Pandectes furent terminées et promulguées le 16 décembre 533 et reçurent force de loi à partir du 30 du même mois. D'après Justinien, la commission avait consulté près de 2000 volumes formant trois millions de lignes d'où elle avait extrait 150000 lignes, c'est-à-dire un vingtième environ, formant 9127 fragments empruntés à39 jurisconsultes, dont trois appartiennent à la période républicaine, et deux seulement dépassent la période classique et appartiennent au règne de Constantin. Les deux périodes les plus fécondes sont celles qui vont la première d'Hadrien jusqu'aux Antonins, la deuxième de Septime à Alexandre Sévère. C'est à f'lpien et surtout à son commentaire sur L'Édit du Préteur que le Digeste a le plus emprunté. Les extraits de cet auteur en forment presque un tiers; avec raison, car c'est le plus net et le mieux formulé des jurisconsultes romains. Après lui c'est Paul qui a le plus fourni; ensuite viennent Papinien, Julianus, Pomponius, Scaevola et Gains. Le Digeste est divisé en livres et en titres. L'indication en téte de chaque titre porte le nom de rubrique, à cause de l'usage où étaient les copistes de l'écrire en lettres rouges. Les fragments. recevant de Justinien l'autorité légale, prennent le nom de leges. Chacun d'eux est numéroté et porte en tête le nom de l'auteur et de l'ouvrage d'où il est tiré. Un index général des jurisconsultes mis à contribution et de leurs ouvrages placé en tète des Pandectes nous a été transmis par le manuscrit de Florence. Les Pandectes et le Code furent rédigés dans le même ordre que l'Édit perpétuel, qui lui-même avait suivi en gros l'ordre adopté par la loi des XII Tables. Les Pandectes se composent de cinquante livres qui furent divisés par Justinien lui-même en sept parties, sur le seul motif, à ce qu'il paraît, de l'excellence du nombre sept. « La première est appelée Prota (23'i nepw'ra), soit parce qu'elle contient les principes généraux, soit par cela seul qu'elle précède toutes les autres ; elle comprend les quatre premiers livres. La seconde, qui porte le même titre que le livre V par lequel elle commence, de Judiciis, contient aussi les actions in rem et divers titres détachés; elle s'étend jusqu'au livre XI. La troisième, livres XII à XIX, comprend tous les contrats, si l'on excepte les stipulations, et a reçu le nom de liebus (creditis). Les quatre dernières parties ne reçurent pas de Justinien des noms particuliers, et les commentateurs les ont désignées, tantôt par leur premier livre, tantôt sous le nom générique de libri singulares, en raison de ce qu'elles contiennent chacune diverses matières détachées. La quatrième partie (Urnbilieus), livres XX e XXVII, traite des gages et hypothèques, des usures, des preuves, des dots et des noces et des tutelles et curatelles; la cinquième, livre XXVIII à XXXVI, des testaments, des legs et fidéicommis. La sixième partie, livre XXXVII à XLIV, traite des possessions de biens, du droit de patronat, des hérédités légitimes, des donations, des affranchissements, des interdits, des exceptions et de plusieurs autres matières ; elle se termine par le titre général de Obligationibus et actionibus. La septième partie, livres X LV à L, comprend les stipulations, les modes d'extinction des obligations, le droit criminel, les appels, le droit municipal, et enfin Ies deux titres de verborumn. signiim catione et de Regulis juris, qui se rapportent à toutes les matières du droit `. » On s'est demandé quel était l'ordre suivi pour la distribution des fragments dans chaque titre, et cette question a été résolue avec une grande érudition PAN .--313 PAN par Bluhme. Suivant ce travail, sauf le commencement des titres, pour lequel on a chdisi, en général, un morceau d'introduction, et sauf quelques passages intercalaires, l'ordre logique n'est pas celui. qui a été observé, et on en a suivi un autre, résultant selon toute probabilité de la manière dont les Pandectes furent préparées. Bluhme suppose que les écrits des jurisconsultes qu'on voulait extraire furent divisés en trois masses, correspondantes aux trois premières années d'études suivies dans les cours de droit [ANTECESSOR], et que le Digeste fut formé en ajoutant bout à bout les trois catégories d'extraits qui en résultaient. La plupart des titres contiennent des extraits des trois catégories. La première est tirée des commentaires ad Sabinum, de la partie moyenne de ceux ad Edictum, des Digestes de Gaius et de Julien, des Institutes, tant de Gaius que des autres, des regulae, etc. La deuxième se compose du commencement et de la fin des commentaires sur l'Édit, des commentaires ad Plautium, des Digestes de Celsus et de Marcellus, des ouvrages de Modestinus, etc. ; la troisième, des quaestiones, responsa et definitiones de Papinien, de Paul et des autres, y compris les Digestes de Scaevola. II résulte de l'ordre même suivi dans le travail et de la suppression des répétitions, que la deuxième catégorie est moins longue que la première et que la troisième est la plus courte de toutes. Bluhme a proposé de les nommer, la première, catégorie sabinienne, la deuxième, catégorie de l'Édit et la troisième, catégorie de Papinien. Une quatrième, de beaucoup moindre étendue, a été formée, sans doute après les autres, d'extraits d'oeuvres qui n'étaient pas en usage dans les écoles ni dans la pratique du temps. Nous renvoyons au grand ouvrage de Savigny5 pourl'histoire des l'andantes au moyen âge et de l'influence qu'elles eurent sur la renaissance du droit romain. F. BAUDR .