Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article AMPHISBETESIS

AMPIIISBETESIS ('Ap.ptagr,'e aiç).-Terme de procédure chez les Athéniens. Dans une acception générale, le mot a'e1o r'elotç désignait toute contradiction apportée au droit dont une personne se prétendait investie. On pouvait dire, en ce sens, de celui qui intentait une action en revendication : «u.ptaé1yrcC. Mais il était principalement employé en matière héréditaire, et il avait alors une acception spéciale que nous devons indiquer. Lorsqu'un Athénien mourait sans laisser de descendants connus, le parent le plus proche, qui voulait recueillir l'hérédité, était obligé de former une demande d'envoi en possession. Cette demande O, tç Toi, x),7jpou), adressée à l'archonte compétent, était portée par celui-ci à la connaissance du public au moyen d'affiches et de proclama tions dans les assemblées du peuple : Ttç «µ?Lys -rlTEiv 7ca pxxa'cx~ia)s)sat'o 5OÛ cerzI 'rot( xar pou xaTZ yévoç 5èj xxTâ StaEI7sxaç t. Les intéressés étaient par là mis en demeure de faire valoir leurs droits : «gyteentziv 7rapaxaTOceCi UEtv. L'«gy(ae s'r,ctç et la 7rapaxzTaèo)(t?l mentionnées dans ce texte se rapportent-elles aux mêmes hypothèses; ou bien doiton distinguer des cas où l'«gytc6r'ITlatç était admissible, d'autres cas où il y avait lieu à la 7rapaxaTaèo),7j ? p. 1, 308 ; R. Rorhette, Choix de peul. 23, et p. 287 ; Zahn, Die ,ehotaste Ornant. Pomp. 111, 91 ;Avellino, Bull. Napol. III, p. 83; (1. Jahn, 1. 1. p. 95; 11elhig, Wald in IV, 1, p. 308 ; R. Rochette, 1. 1.; Jahn, 1. 1.; Helbig, 1152. 33 O. Jahn, 1. 1. et I, 311. 3 Schol. in Demosthenem, 378, 18, éd. Didot, p. 623. 4 Pollux, V III, 122; cf. Bekker, Aueedota, 1, p. 194 et 311. 3 Westermann, De jueiujamandi nisehe Alterthutnskunde, Halle, t. 11, 1846, p. 262; Schbmann, Attise/te Process, Heffter s et, après lui, de Boor ° ont dit qu'il n'y a pas-à rechercher une différence entre les deux expressions; car elles s'appliquaient à la même hypothèse. Tous ceux qui contestaient les droits du prétendant à l'hérédité devaient s'opposer à l'envoi en possession, «infuser)TEty, et verser la consignation du dixième exigée par la loi, 7rupxxuTUecinety. Mais cette opinion doit être écartée ; car, si elle était vraie, le texte porterait âµtntaGr,Tv'v xal (et non pas el) aueuzercGé),aety. La disjonctive prouve qu'il s'agit de deux choses différentes. La difficulté est maintenant de déterminer les deux hypothèses prévues dans la proclamation. Bunsen 4 croit que, si la contestation était relative à une hérédité pour laquelle il n'y avait pas encore eu d'envoi en possession, il y avait t; si, au contraire, l'envoi en possession était déjà prononcé, la contestation devait nécessairement se produire sous forme de 7rapaxzTaGoki. Harpocration dit, en effet, que la 7t0tpaxxT«Go)a'l est dirigée contre celui qui est saisi, xu' à Tot ÀxGévro; On peut répondre qu'il eût été véritablement bizarre d'inviter, par la bouche du héraut, les citoyens à contester des envois en possession antérieurement prononcés par le magistrat. Nous allons bientôt mentionner des textes qui parlent de napaxaraGO),rj pour des hérédités non encore adjugées. Aussi quelques éditeurs ont rectifié le texte d'Harpocration et lu Meier et Scheemann 6 se fondant sur les définitions de plusieurs grammairiens disent qu'il y avait âµino-C rrAut; lorsque l'opposition était fondée sur la qualité d'enfant légitime ou adoptif; 7rapaxxTetGo),Ÿi lorsque l'opposant invoquait un droit moins respectable, la qualité de successeur testamentaire, ou un degré de parenté collatérale plus rapproché que celui du prétendant à l'envoi en possession. Nous nous bornerons, pour toute réfutation, à citer des exemples d'enfants procédant par la 7ru puxurueùle, 8. Nous nous rattachons à une dernière opinion, proposée par Platner et soutenue par Steigertahl 10 et Schneider 1t Celui qui croyait devoir s'opposer à l'envoi en possession pouvait indistinctement employer la voie de l'âµptaGlyTratç de consignation préalable, et n'exposant pas le plaideur à de graves conséquences, ne donnait aucun préjugé en sa faveur. Au contraire, lorsqu'il optait pour la 7rapaxuTâ6oayi, le dépôt d'une importante consignation judiciaire, qui devait être perdue en cas d'insuccès et la menace de pénalités plus graves encore°, étaient des conditions rigoureuses auxquelles il se soumettait ; en les affrontant il prouvait qu'il avait une grande confiance dans son bon droit. Pour cette raison, on exigeait du prétendant à l'envoi en possession qu'il fît de son côté la même consignation; sinon il devait se désister de sa demande. On peut donc dire que l'â .ya:reti, rat; ordinaire et à laquelle les intéressés avaient recours lorsque la bonté de leur cause ne leur semblait pas douteuse. Ce qui fait dire à Schneider : « Paracatabolia forma gravior est, é (,.gtaGli' r atç levior S3. » Lorsque l'envoi en possession avait été prononcé, la voie I. de la 7rupaxxrueoXil devait toujours être suivie; la simple clu.ptaGŸiTrlatç n'était plus admise dans ce cas 14 Nous consacrerons à la 7rapro) un article spécial. Il nous suffit d'avoir indiqué ici ce qui la distingue de l'âµrotegŸiTriatç. E. CAILLEMER. monument construit par les Romains pour y donner les combats de gladiateurs et les chasses d'animaux sauvages [GLADIA TORES, VENATIO]. Les premiers jeux i, dont l'invention est attribuée aux Campaniens, étaient dès longtemps familiers aux Étrusques, lorsqu'ils furent pour la première fois introduits à Rome et offerts dans le Forum Boarium, l'an 264 av. J.-C., par Marcus etDecimus Brutus, qui voulaient ainsi honorer la mémoire de leur père Jusqu'à la fin de la république, ils eurent lieu dans le Forum, où l'on élevait à la hâte des échafaudages en bois pour ces fêtes d'une magnificence toujours croissante. En 59 av. J.-C., C. Scribonius Curio voulant surpasser Scaurus dans la somptuosité des jeux qu'il offrait, fit exécuter deux théâtres en bois adossés l'un à l'autre. Après les représentations dramatiques les scènes s'enlevaient, les spectateurs restaient à leurs places, et les deux théâtres, par un mécanisme combiné 4, venaient se réunir pour n'en faire qu'un seul, qui était circulaire, et dont le centre, formé par la réunion des deux orchestres, présentait une arène pour les jeux des gladiateurs; le dernier jour des fêtes on laissa les deux théâtres réunis, en enlevant les scènes pour former une arènes. César, trouvant cette arène mieux appropriée que celle du cirque pour les chasses de bêtes féroces, fit élever, l'an 46 av. J.-C., un double théâtre semblable en bois. On l'appela amphitheatrum e à raison de cette disposition, et theatrum venatorium du nom de l'espèce des jeux 7. C. Statilius Taurus éleva dans le champ de Mars, l'an 30 av. J.-C., le premier amphithéàtre en pierre'; et l'on doit supposer que la pierre n'y était employée que partiellement, car il fut atteint sous Néron par le grand incendie de Rome'; il n'en est fait mention nulle part depuis cette époque. Auguste, dont les suggestions avaient poussé Taurus à bâtir son amphithéâtre, en fit élever probablement plusieurs : son testament, gravé sur les murs du temple d'Ancyre, nous apprend qu'il donna vingt-six combats de bêtes fauves dans le cirque, dans le Forum et dans des amphithéâtres". En Italie, la place publique avait servi d'arène pour les gladiateurs, et Vitruve 11 explique par cette raison la coutume persistante en ce pays (à la différence de ce qui avait lieu chez les Grecs) de donner aux forums la forme d'un quadrilatère allongé, qu'il considère comme mieux appropriée à ce genre de jeux. Dès le premier siècle, s'élevèrent dans tout l'empire, à l'imitation de Rome, des amphithéâtres dont les ruines attestent encore la grandeur, même dans des villes de médiocre importance. En Italie surtout, il n'y' eut guère de ville si petite ou si pauvre qui n'eût de temps en temps des spectacles de ce genre. Les amphithéâtres ne furent pas moins nombreux dans les Gaules, en Espagne et dans tout l'Occident; on en construisit dans les provinces d'Afrique et d'9sie. En Grèce les 31 AMP -X4-2 e-e AM-P combats de gladiateurs et les chasses ne furent jamais goûtés que par la dernière classe du peuple; aussi ne doit-on pas s'étonner de rencontrer dans la Grèce peu de restes certains d'amphithéâtres, quoiqu'il en ait été élevé un assez grand nombre à partir du ne siècle 12. Le nombre des amphithéâtres aujourd'hui connus par leurs ruines ou par des témoignages positifs n'est pas loin d'une centaine 13. Quelques-uns, en partie debout, sont classés parmi les plus beaux restes de l'antiquité romaine. Tels sont ceux de Rome, de Vérone, de Pola, de Capoue, de Pouzzoles, de Pompéi, de Syracuse, d'Arles, de Nîmes, etc. 1` Rome n'eut d'autre amphithéâtre en pierre sous les premiers Césars que celui de Taurus. Caligula y donna des combats de gladiateurs, jeux célébrés aussi dans le champ de Mars 15. Il commença un amphithéâtre qui ne fut pas continué après lui. Néron en fit construire un en bois près du champ de Mars 16, l'an 57. Au même temps appartient la ruine connue sous le nom d'ampltitlieatrum Castrense, à Rome 1T. Le travail en brique, d'une très-belle exécution, est semblable à celui des pieds-droits de la porte du camp prétorien, ouvrage du règne de Tibère, et à celui des arcs dits de Néron, près la porte Majeure. Vespasien, après la guerre de Judée, construisit ce grand amphithéâtre Flavien, aujourd'hui le Colisée, que Martial comparait aux plus grandes merveilles de l'antiquité 18. Il fut établi au milieu de la ville dans l'emplacement du stagnum Neronis 19. L'immensité de l'édifice ne permit pas à Vespasien de le terminer. L'an 80 de l'ère vulgaire, Titus l'inaugura. Le témoignage des historiens 29 est confirmé par les médailles : on voit l'amphithéâtre Flavien représenté sous divers aspects sur celles de Titus (fig. 270) et même de Vespasien E1. On présume toutefois que Titus ne vit pas l'achèvement de l'édifice et que Domitien le termina. L'un et l'autre firent lutter dans l'arène submergée des barques remplies de combattants 22 [NAUMACIIIA]. Cependant il est impossible de supposer que les substructions de l'arène du Colisée existassent dès ce temps-là, et que le sol de cette arène ne fût pas plus bas que le sol actuel ; car d'une part, l'eau, qui eût envahi les substructions, aurait causé de très-grands dégâts, et d'autre part les portiques du rez-de-chaussée eussent été inondés et inabordables. On ne peut préciser l'époque de la construction de ces souterrains ; il semble résulter d'un passage d'Hérodien qu'ils existaient du temps de Commode, qui descendit et combattit lui-même dans l'arène. Il s'y rendait par un souterrain communiquant avec la loge impériale 23. Hadrien donna des fêtes dans cet amphithéâtre. Antonin le Pieux fut obligé de le restaurer 24. Sous Macrin, Dion fut témoin de l'incendie occasionné par la foudre R5 qui consuma toute la partie supérieure et endommagea le reste des gradins. La violence du feu et l'impossibilité de l'éteindre dénote la grande quantité de bois employé pour la partie haute de l'édifice. Une médaille, frappée à l'effigie d'Alexandre Sévère, rappelle que cet empereur inaugura de nouveau l'amphithéâtre, qui depuis l'incendie n'avait pu servir à cause des grands travaux de restauration qui s'y exécutaient. La substitution de la pierre au bois fut probablement la cause de cette longue interruption des représentations. Pendant cet intervalle elles furent données dans le cirque. En 357, Ammien vit l'édifice parfaitement intact 26. Sous Théodose II et Valentinien III (de 425 à I50), le préfet de Rome Lampadius fit réparer l'arène, le podium, les portes et les gradins 27. Les dernières chasses, dont l'histoire fasse mention, furent celles de 523; elles sont rappelées par Cassiodore, qui y assistait. Bède, écrivain du vine siècle, dit que de son temps le monument était encore entier. L'amphithéâtre Flavien, placé sur un terrain plat entre l'Esquilin, le Caelius et la Velia 48, présente un aspect grandiose et régulier; sa situation en rendit la construction dispendieuse. D'autres amphithéâtres taillés entièrement dans le roc, creusés dans les flancs d'un ravin ou placés sur la déclivité d'une montagne, offraient une apparence moins majestueuse, mais étaient édifiés avec plus d'économie. La ville de Sutri nous montre un exemple d'amphithéâtre taillé dans le roc sans aucune construction; les corridors et les vomitoires subsistent encore 29. A Paestum les premiers gradins tout au pourtour de l'arène sont seuls creusés dans le sol 30; ceux de la partie supérieure sont soutenus par des substructions. Nous retrouvons la même combinaison à Pouzzoles 31 et à Pompéi 3$. Les amphithéâtres de Pergame 33 et de Cyzique34, en Asie Mineure, sont établis chacun dans un ravin très-encaissé au fond duquel coule un ruisseau. Par les dispositions de la construction on voit que, dans le premier, les eaux pouvaient être arrêtées afin de transformer l'arène en bassin pour y faire combattre des animaux amphibies, ou pour y introduire des combattants sur des barques. Dans tous les cas l'exiguïté du lieu ne permettait pas de donner de véritables naumachies, le grand diamètre de l'arène ayant 51 mètres et le petit 37 mètres. Le cours d'eau traversait l'arène suivant le grand axe ; les ouvertures qui se trouvaient à l'extrémité de ce dernier donnaient passage au torrent. Le monument était en partie taillé dans le roc. Les restes d'un amphithéâtre, aussi taillé dans le roc, ont été retrouvés par Blouet à Corinthe, au-dessus et près de la ville moderne 33 Parmi les amphithéâtres adossés à la pente des collines, nous remarquons celui de Syracuse 38, et celui de Pola, en Istrie 37. Ce dernier est d'un grand effet du côté de la mer; le soubassement et le premier ordre disparaissent à l'opposé par le fait de la conformation du terrain. L'inclinaison et la nature du sol ont permis de pratiquer des siéges dans le roc et d'épargner les frais de construction des carceres, corridors et escaliers. La forme des amphithéâtres était elliptique, sauf de rares exceptions, parmi lesquelles nous citerons celui de Sparte, dont le plan était circulaire 38. Blouet en rapporte la construction à l'époque du bas-empire. Le marbre, la pierre de travertin, le tuf et la brique entrèrent dans la construction du Colisée. La façade, les portiques extérieurs, les chaînes, les arcs étaient composés de pierres liées par des crampons en fer scellés avec du plomb; de tuf et de briques étaient faits les murs intérieurs AMP 243-AMI' et les voûtes. A Vérone 59, à Capoue u, à Nîmes", la pierre est employée avec autant de profusion qu'au Colisée : l'amphitheatrum Castrense est en brique ; celui de Pergame en pierre et moellon, celui de Cyzique en gros blocs de granit, ceux de Bordeaux et de Saintes en petits matériaux bloqués avec du mortier et reliés par des assises de briques ; celui de Pompéi en opus incertum. Leur étendue était subordonnée à l'importance locale, en tenant compte du nombre des habitants des villes voisines, privées de semblables édifices. Le Colisée contenait 87 mille places 4' déterminées et pouvait en plus permettre à 15,000 personnes environ d'assister aux spectacles. Son grand axe, compris les constructions, était de 188 mètres, le petit axe de 156 mètres ; ceux de l'arène étaient : le grand de 76 mètres, le petit de 46 mètresk4. Le grand axe de celui de Pouzzoles avait 190 mètres, le petit 144 mètres. M. Friedliinder, dans son travail si complet sur ce sujet 44, indique les mesures de cinquante-deux amphithéàtres, dans un tableau auquel nous renvoyons. Beaucoup de ces édifices étaient situés dans l'intérieur des villes sur un sol de niveau et offraient un plan elliptique d'une régularité complète. Les plan, coupe et élévation du Colisée reproduits45 (fig. 260, 271, 272, 273), et les explications qui vont suivre serviront à rendre plus clair ce que nous avons à dire des amphithéàtres en général. La façade du Co hsce s'élevait sur deux degrés et com prenait quatre étages d'ordres (fig. 269). Les trois premiers étaient à arcades et ornés de demi-colonnes doriques, ioniques et corinthiennes ; le quatrième présentait un mur percé de fenêtres rectangulaires et orné de pilastres corinthiens. Chaque étage à colonnes comprenait quatre-vingts colonnes et autant d'arcades; le dernier comptait quatre-vingts pilastres sur piédestaux et quarante petites fenêtres. Entre les piédestaux on avait pratiqué quarante ouvertures. Soixante-seize des arcades de l'ordre inférieur servaient d'entrée aux spectateurs et portaient chacune un numéro différent, en chiffres gravés sur la clef ; les quatre autres, non numérotées et situées aux extrémités des axes de l'ellipse, formaient les entrées principales. Les arcades supérieures éclairaient les promenoirs, qui contournaient l'édifice, ainsi qu'une partie des couloirs et des escaliers : chacune de ces dernières avait un parapet au milieu duquel était un piédestal surmonté de statues. Les arrachements confirment les inductions qu'on peut tirer des médailles frappées sous Titus (fig. 270) A6 et sous Domi tien, sur lesquelles on voit des statues ornant le milieu des arcades. Les mêmes médailles montrent encore au dernier étage des cercles qui alternent avec les fenêtres indiquées précédemment : ces cercles sont peut-être les clipei dont parlent les auteurs anciens, et qui n'étaient autres sans doute que des boucliers en métal. L'on remarque aussi sur ces médailles des quadriges placés au-dessus des arcades du rez-de-chaussée des quatre entrées principales; celles-ci se distinguent encore des autres entrées par une plus large ouverture; l'entrée de l'empereur était seule ornée de colonnes dégagées. Ces entrées sont accusées à Nîmes par une saillie de 0'1,30 et par une largeur plus grande de 0'1,65, que celle des autres arcades. Un fronton placé sur les colonnes du deuxième étage et des tètes d'animaux sculptées dans les tympans du rez-de-chaussée et de l'étage supérieur ornaient la porte du petit axe, réservée aux magistrats qui représentaient l'empereur. Au quatrième ordre du Colisée, au-dessus des fenêtres, une série de consoles correspondaient à autant de trous pratiqués dans la corniche ; ces consoles soutenaient, et les trous maintenaient les pièces de bois verticales, ou mâts (mati), destinées à tendre le velarium, afin de mettre les spectateurs à l'abri des rayons du soleil. L'amphithéâtre de Nîmes présente aussi des exemples de ces supports, qui se répétaient intérieurement, pour y placer probablement d'autres poteaux et contre-fiches étayant les mati; dans l'épaisseur du mur, de petits escaliers conduisaient à la plate-forme supérieure, réservée pour les hommes chargés de la manoeuvre du velarium. A Pola les mati descendaient dans une rainure de la hauteur de l'attique et venaient se poser dans un dé fixé sur la corniche du deuxième ordre. La hauteur des amphithéâtres et le nombre d'ordres employés dépendaient de leur dimension et de leur position: à El-Djemm, l'antique Tysdrus, dans l'ancienne province de Carthage, on compte quatre étages d'ordres 0.7; à Pola un soubassement et trois étages, à Vérone trois étages, à Nîmes deux étages. Des avant-corps situés à peu près dans les milieux des parties comprises entre les entrées principales, sur la façade de l'amphithéâtre de Pola, renfermaient AM P -24-s AMP des escaliers conduisant du sixième étage aux gradins supérieurs". Dans les substructions qui soutenaient les bancs des spectateurs, l'amphithéâtre Flavien présentait au rez-dechaussée cinq ambulacres ou galeries parallèles à l'ellipse de l'arène ; ils conduisaient aux escaliers et passages qui desservaient les différentes places. Le premier ambulacre formait un portique de 80 arcades qui toutes donnaient accès sur la voie publique. Ce portique se trouve dans tous les amphithéâtres construits sur un terrain horizontal ; dans ceux qui sont adossés au flanc d'une montagne, le portique est interrompu, quelquefois transformé en soubassement comme à Pola Ô9, ou il est remplacé par un mur de soutènement, comme à Pompéi 50. Des quatre entrées principales, deux arcades situées aux extrémités du petit axe étaient réservées, l'une à l'empereur, l'autre à ceux qui occupaient la tribune placée en face de la sienne ; les deux autres entrées situées aux extrémités du grand axe, conduisaient à l'arène. Le second ambulacre n'était séparé du premier que par des piliers qui correspondaient à ceux de la façade; il donnait directement accès aux escaliers (scalae) et aux passages (vice, itinera, aditus). H n'a son pareil qu'à l'amphithéâtre de Capoue qui, par ses dimensions, se rapprochait beaucoup du Colisée. Le troisième ambulacre divisait en deux parties la masse de construction dans laquelle se trouvaient les escaliers et quelquefois les carceres ou chambres dans lesquelles les animaux étaient enfermés avant de paraître dans l'arène. Il desservait le premier onaenianunl, et était éclairé d'en haut. Du quatrième ambulacre on arrivait au podium. Ces deux derniers ambulacres avaient été adoptés dans plusieurs amphithéâtres où le quatrième circonscrivait l'arène, dont il n'était séparé que par un mur. Enfin, le cinquième ambulacre, qui ne se retrouve qu'à El-Djemm 51, se distinguait par son revêtement de marbre, par ses ornements de stuc et son pavé de mosaïque 5'; peut-être servait-il de circulation pour l'empe renr et les dignitaires; ou bien, comme l'a conjecturé M. Duc, était-ce là que se réunissaient les gladiateurs avant de paraître en public ; des portes, en effet, ouvraient directement cette galerie sur l'arène. Les murs des escaliers et des passages sont généralement normaux aux courbes elliptiques, quelquefois ceux qui forment l'entrée de l'arène suivaient une direction parallèle au grand axe. Le premier ambulacre qui, à l'amphithéâtre Flavien, servait de portique d'entrée, et celui qui lui était attenant, se répétaient aux deux étages supérieurs Il y avait ainsi à proximité de toutes les places de vastes promenoirs, sous lesquels les spectateurs pouvaient se réfugier en cas de pluie. Au troisième étage les escaliers occupaient une place dans ces ambulacres. Dans la hauteur du quatrième ordre, l'épaisseur de la construction était réduite à la largeur du premier ambulacre ou por.tique extérieur; il s'y trou vait des passages et des escaliers conduisant aux gradins supérieurs et au portique qui les couronnait. Dans les autres amphithéâtres, les ambulacres, les escaliers et les passages étaient disposés d'une manière analogue. La position des amphithéâtres taillés dans le roc ou adossés contre une colline modifiait sensiblement le nombre des ambulacres et la combinaison des escaliers. Ces édifices par suite de leurs dispositions et de leurs dimensions recevaient les eaux pluviales en telle abondance qu'ils exigeaient un écoulement facile et bien ordonné. La restauration du Colisée de M. Duc fait voir avec quel soin les architectes avaient étudié les conduits et la canalisation. De l'extérieur passant à l'intérieur, nous remarquons dans la cavea, c'est-à-dire dans la partie destinée aux spectateurs, trois divisions : le podium où étaient les places d'honneur, les maeniana ou gradins, le porticus ou portique. AMP215 -seAMP Le podium était une plate-forme élevée au-dessus de l'arène, qu'elle circonscrivait, et assez haute pour mettre les spectateurs à l'abri des atteintes des animaux féroces. Il renfermait les places destinées à l'empereur. aux sénateurs, aux principaux magistrats, aux vestales, aux préteurs, à l'ordonnateur des fêtes et aux personnes de distinction 53. Les gradins (grades) étaient plus larges que les autres, de manière à recevoir des siéges mobiles (subsellaâ) u. Les places d'où l'on jouissait le mieux du spectacle étaient situées aux extrémités du petit axe de l'arène; deux loges, dominant le podium, y étaient réservées, l'une, appelée cubiculum, à l'empereur,l'autre,vis-à-vis, (editoris tribunal), aux consuls, 1 au préteur qui présidait aux jeux et à celui qui les donnait 55. Ces loges portaient aussi les noms de puleinar et de suggestum 58. Des passages et des escaliers particuliers les réunissaient aux grandes salles placées sur le petit axe; les salles dépendantes de la loge de l'empereurétaient ornées de stucs et de marbres. A Pompéi et à Mmes, le podium était divisé en plusieurs loges séparées entre elles par des dalles en pierre. Dans la dernière de ces deux villes, outre les sénateurs, les vestales et les principaux magistrats, le podvtm recevait les corporations importantes de la cité, dont les noms sont encore inscrits en gros caractères sur la moulure de son couron nement; on y lit le nombre des places qui leur étaient réservées 5T La face du mur du podium sur l'arène était revêtue de pierres parfaitement polies pour enlever toute prise aux animaux : ce revêtement était de marbre au Colisée 58, il était peint à Pompéi ". Comme ce mur ne s'élevait quelquefois pas assez haut pour défendre les spectateurs des assauts des bêtes, on le surmontait de filets, de grillages en métal ou de rouleaux soit en bois soit en ivoire tournant sur des axes de fer. Les noeuds du treillis de l'amphithéàtre de Néron avaient pour ornement des touffes d'ambre sculptées u0. Ces précautions ne furent probablement pas toujours suffisantes, car les auteurs anciens rapportent que l'on creusait dans certains amphithéàtres, parfois un canal (etlripus) et au pied du podium, pour éloigner les animaux et principalement les éléphants. Un mur servant d'appui appelé balteus, séparait le podium des gradins; au Colisée des mosaïques l'enrichissaient 6°. Deux baltei divisaient en trois parties, dans le sens de la hauteur, les gradins de ce même édifice; des terrasses ou praecinctiones longeaient ces baltei et offraient une grande facilité pour les communications. Chaque division s'appelait maenianum 6a. Les chevaliers, dont les places venaient aussitôt après celles des sénateurs" , et auxquels Caligula permit l'u sage des coussins 66, occupaient le premier maenianum du Colisée. A ce maenianum, audessus des grandes entrées de l'arène , on trouve les traces de deux tribunes qui, peut-être comme dans les théâtres , étaient réservées aux préteurs ou aux vestales. Vérone n'en possédait point d'autres; Nîmes, au contraire, n'en avait pas à cette hauteur. Au second maenianum étaient placés les tribuns" et les simples citoyens. Puis venaient au dernier maenianum, sur des gradins en bois", les gens des classes inférieures (popularia) 6a. Au Colisée ce summum maenianum se subdivisait en deux parties, l'une découverte, et dont les gradins étaient en marbre ", l'autre couverte par un portique sous lequel se plaçaient les femmes du vulgaire et la plèbe (pullati)", assises sur des gradins comme sous les portiques qui terminaient les gradins des théâtres T. Ces gradins étaient en bois. Le portique n'était pas indispensable, malgré l'ordonnance d'Auguste qui y reléguait les femmes, puisque l'amphithéâtre de Nîmes en est dépourvu. Des cathedrae, ou loges, couronnaient à Pompéi l'ensemble des gradins ". Les femmes des puissants personnages étaient autorisées à partager les places des vestales. Le balteus, qui, au Colisée, séparait le summum maenianum de celui du milieu, était décoré de fenêtres et de niches; beaucoup plus élevé que les autres, il établissait probablement une division bien marquée entre les tribuns et les classes inférieures. A chaque précinction il y avait des ouvertures ou vomitoria qui des ambulacres donnaient accès aux gradins. En face des vomitoires se trouvaient les scalaria ou petits escaliers qui descendaient entre les gradins et divisaient chaque maenianum en sections ayant la forme de coins, ce qui leur fit donner le nom de cuneus. Si le maenianum était trop étendu en hauteur, des vomitoires s'ouvraient dans son milieu. Pompéi et Nîmes en ont conservé des exemples assez complets. Les gradins étaient en bois, en pierre ou en marbre. Chaque place était numérotée à Pompéi, et était limitée par deux traits gravés dans la pierre à Nîmes et à Pola. Tout spectateur était muni d'un billet [TESSNIIA], qui indiquait la place qu'il devait occuper ". Les vomitoires, qui donnaient accès dans le milieu des maeniana, coupaient les gradins et étaient entourés de balustrades qui, au Colisée" (fig. 274), et dans l'amphithéâtre de Capoue", avaient été décorés de sculptures représentant des rinceaux, des animaux et des personnages. Le bon ordre dans le placement des spectateurs était confié à des employés (locarii ou dissignatores) et la surveillance générale était l'attribution du villicus amphitheatri. L'arène, vaste espace central destiné aux combattants, a reçu son nom du sable (arena) dont elle était couverte, et que l'on y jetait pour absorber le sang répandu. Des empereurs comme Caligula, Néron et Carin ont montré leur prodigalité en remplaçant le sable par du cinabre ou de la poudre d'or 76. L'arène était de forme elliptique, rarement circulaire; les deux entrées principales s'ouvraient aux deux extrémités du grand axe; le mur du podium parfois était aussi percé de portes d'où sortaient combattants et animaux. Dans certains amphithéâtres, l'arène était supportée par des substructions dans lesquelles se trouvaient des ambu lacres et des chambres pour les bêtes. Au-dessous de la galerie que soutenait le podium de l'amphithéâtre Flavien, il y avait des chambres, et sous l'arène cinq ambulacres,dont deux épousaient la forme elliptique, et trois, dans le milieu, étaient parallèles au grand axe et séparés par de petites chambres". Dans ces trois derniers ambulacres on remarque les traces des pentes douces qui montaient à l'arène : au-dessus des petites chambres il existe des ouvertures carrées en AMP 21s7 AMP forme de puits dans les angles desquelles sont les rainures où s'adaptait le mécanisme employé pour hisser les animaux et les faire paraître instantanément au milieu de l'arène des trappes en bois devaient recouvrir ces ouvertures, dont l'amphithéâtre de Capoue et celui de Pouzzoles offrent des exemples d'une parfaite conservation78. Les substructions de l'arène du Colisée sont de l'époque de la décadence, celles qui les avaient précédées ayant été détruites, au ve et au vie siècle, par deux tremblements de terre, et restaurées parles préfets de Rome Lampridius et Basilius, comme le certifient les inscriptions. L'ainphithéâtre de Vérone n'avait de substructions que sous les axes de l'ellipse et sous les ambulacres; celui de Syracuse avait des chambres, une grande salle et un ambulacre qui y conduisait. L'arène de Pergame était probablement en bois, car aucun arrachement ne témoigne qu'il y ait eu des substructions. De ces souterrains sortaient aussi les décorations (pegmi ou pegmata 79) qui devaient servir au spectacle. Martial, Calpurnius et Hérodien nous apprennent, en effet, qu'on représentait des scènes mythologiques et que l'arène se changeait soit en forêt, soit en gouffre, d'où s'élançaient les animaux 80. La munificence de ceux qui donnaient les spectacles allait jusqu'à répandre des pluies odoriférantes (sparsiones) sur les spectateursR1,ou àfaire brûler des parfums dans destrépieds. Les jours de représentation tout cet ensemble était couvert par une tente de couleur ou velarium 82. Pline nous dit que L. Spinter fut le premier qui couvrit le théâtre avec du lin fin, et que Néron fit étendre sur l'amphithéâtre un velarium bleu parsemé d'étoiles 83. Les différentes toiles, qui composaient le velarium, étaient tendues au moyen de poulies, de cordes et d'anneaux attachés aux mali, que faisaient mouvoir, au Colisée, des marins de la flotte86; on pouvait facilement découvrir telle ou telle partie de l'amphithéâtre à la demande des spectateurs ".La partie du milieu, qui couvrait l'arène, était fixe, et ordinairement ornée de broderies figurant un char, un aigle ou tout autre sujet analogue. Cette toile devait être maintenue par des cordes horizontales qui se fixaient aux mâts et par des cordes verticales qui descendaient vers le podium : telle est la supposition que font naître les points d'attache qui existent au podium de Nîmes. C. THIERRY.