Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article SACCUS

SACCUS (Ec xoç et aâxxoç). Tissu grossier en poil de chèvre employé particulièrement à la fabrication des sacs, qui en ont tiré leur nom. Dans les parties du monde ancien où le lin à l'origine était rare et coûteux [LINUM], la toile dut être, pendant assez longtemps, réservée pour le linge fin ; les étoffes plus rudes, nécessaires à la confection des sacs et objets de même nature, se faisaient surtout avec du poil de chèvre tissé; de là, la parenté probable du acixoç et du sAGUM'. En Orient, le poil de chameau était aussi très apprécié pour cet usage comme il l'est encore aujourd'hui. L'Édit de Dioclétien consacre tout un chapitre aux sacs et articles similaires confectionnés avec du poil de chèvre ou de chameau (de saetis caprinis sive camellinis) 2. 11 fixe ainsi qu'il suit le prix des matériaux qu'on y employait : 1° poils bruts, la livre 6 deniers (0 fr. 219); 2° poils tissés (pili neti) pour sacs, la livre 10 deniers (0 fr. 365). Viennent ensuite les sacs confectionnés, dont nous allons parler ; notons seulement qu'on y assimile les bâts [SAGMA] pour bêtes de somme, évidemment parce qu'ils se composaient en partie d'un azxoç. Malgré la précision de ce document, il est bien probable que, quand la toile de lin est devenue plus commune, elle a dû servir aussi à faire des sacs, comme elle servait à faire des tentes, des voiles de navires, etc. 3. 1° Le sac, chez les Grecs aussi bien que chez les Romains, servait d'abord à enfermer le blé, le sel, les légumes et toutes les denrées que l'on voulait mettre en vente ou garder pour ses propres besoins 4. Dans cet usage il avait certainement la même forme qu'aujourd'hui, comme le montre la figure 5985, d'après un basrelief de la colonne Trajane ;onyvoit des soldats romains occupés à remplir, probablement avec du blé, des sacs, que d'autres chargent ensuite sur leurs épaules pour les transporter'. Au nombre des plus grands parmi ces récipients, il faut sans doute compter les saccopathnae, qui peuvent avoir, suivant l'Édit de Dioclétien, 3 pieds (0m,887I) en long et larges en proportion et se vendent alors à raison de 16 deniers (0 fr. 584) la livre.Puis vient la nombreuse série des sacs de voyage, désignés dans l'Édit sous le nom générique de ZABERNA, très voisin de saccus, avec cette différence qu'il s'applique plus spécialement aux sacs faits pour contenir des habits; il se rapproche donc beaucoup aussi de MANTICA. Un grand bissac jeté sur l'échine d'une bête de somme, suivant un usage encore très répandu en Orient et dans les contrées méridionales [CLITELLAE, SAGMA], peut supporter une lourde charge ; une paire de zaber nae ou de sacci en poils tissés, du poids de 30 livres, se vend pour cette destination 40 deniers (1 fr. 46). Les Grecs avaient des noms divers (aâxxoç, axxxiov, aXxTaç, (l.zpat7r7toç, Oaaaxoç), pour désigner les sacs qu'ils portaient avec eux au bain ou au gymnase 6. Nous nous bornerons à rappeler dans cette catégorie le xo)puxoç, qui n'est pas seulement un ballon sur lequel le pugiliste exerce ses poings [coRYCUS], mais d'abord un sac dans lequel les éphèbes et les athlètes enferment leurs vêtements, leurs provisions et les différents accessoires nécessaires à leurs exercices; on le voit suspendu aux murs des palestres, des salles de bains' (fig. 5986) 8, des dépôts d'armes [cf. CLIPEUS, fig. 1648]. Les sacs étaient d'un usage journalier SAC 933 SAC pour toute espèce de transports et de déménagements'. Les vases peints offrent des exemples de sacs de ce genre plus ou moins ornés ; ils ressemblent, d'ailleurs, aux sacs ordinaires; le côté où ils s'ouvrent est noué quand ils sont remplis' et ils forment alors (fig. 5987) un ballot sur lequel le voyageur peut s'asseoir pour se reposer'. 2° Le sac à argent (sacculus) est pour l'ordinaire de dimensions bien moin dres ; mais il est plus gros que la bourse diffère guère par la forme. Tandis qu'on porte la bourse avec soi quand on sort de sa demeure, le sacculus, contenant de plus fortes sommes, y reste enfermé dans un meuble'. Il joue un grand sentirôle dans les maisons administrations publi ques; c'est un des insignes des questeurs, magistrats d'ordre financier Le sac que représente la figure 5988 se voit sur un bas-relief du Vatican ; ce monument a dû orner la tombe d'un appariteur (viator) des questeurs, employé comme garçon de caisse ou de recette au trésor public (aerarium) 6. Là surtout où le coffre-fort est bien garni, on inscrit sur chacun des sacs le chiffre de la somme qu'il contient ou qu'il peut recevoir [ARGENTARII, fig. 49517. 3° Sorte de coiffe dans laquelle les femmes enfermaient leur chevelure rejetée sur la nuque; elle doit être distinguée de la résille [RETICULUM], qui répond au même besoin mais qui est en filet et emprisonne les cheveux sans les cacher. Au contraire, le azxxoç est une poche d'étoffe pleine, un véritable sac, et, par conséquent, ressemble beaucoup au REKRYPHALOS, du moins à celui qui affecte cette forme. En effet, les deux termes semblent avoir été tout à fait synonymes'. Le aclxxoç fut en grande faveur auprès des femmes grecques au ve et au Ive siècle avant notre ère ; l'ouvrier appelé axx;tutQzv,;7llç n'avait pas d'autre tâche que de tisser pour elles des coiffes de cegenre9. 4° Saccus vinarius (crixxtvoç û?,ta'crlp), sac à filtrer le vin; on en coiffait les vases dans lesquels on versait le vin avant de le consommer, afin d'arrêter la lie et les autres impuretés, que les procédés de fabrication chers aux anciens devaient y mélanger dans une forte proportion [VJNUM]. On se débarrassait des plus grosses à l'aide de la passoire [coLUM] ; l'opération s'achevait avec le filtret0. Il était généralement en toile de lin; mais les gourmets se plaignaient, avec raison, du goût désagréable que la toile, surtout quand elle est neuve, communique au liquide ". On s'imaginait aussi que l'usage du filtre avait l'avantage de rendre le vin moins capiteux". C'était ce qu'on appelait saccare (axxx) ttv) et castrare vinum 13. Le filtre en toile était, du reste, employé encore dans plusieurs industries 9l. 5° Saccus nivarius, sac rempli de neige, qu'on plongeait dans le vin pour le rafraîchir. On pouvait aussi verser le vin par-dessus la neige et le filtrer ainsi du même coup. C'était un procédé très simple, à la portée de tout le monde, et qui pouvait dispenser de recourir au COLL'M, employé pour le même usage. Mais avec les vins fins on préférait le CoLUM pour la raison indiquée plus haut: c'est que la toile du saccus en altérait la