Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article USUS

USUS. Ce mot a une triple acception. Il désigne : Iole fait de se servir d'une chose copformé{nent à sa llestinalion, avec ou sans prétention à la propriété ; 20 une servitude personnelle distincte de l'usufruit ; 30 un mode de formation du droit. Sur le rôle de j'usus popr la constitution des servitudes, voir rnAnl-rio, p. 325. 1. L'usage d'une chose peut être privé ou public'. 10 L'usus privants porte sur une chose susceptible de propriété privée. Lorsqu'il est exercé par un particulier, il confère un avantage au point de vue de l'impôt du portorium : les choses qui sopt à notre usage personnel sont exemptes de l'impôt [PORTonluM, p. 592, n. 291. Anciennement l'usage prolongé d'une chose non volée en faisait acquérir la propriété [Uspc. PTo]. L'usus d'un an fait acquérir au mari (ou au chef de sa famille) la menus sur sa femme [MANUS, p. 1586]. Sous l'Empire, l'expression usus proprios désigne un droit analogue à la propriété provinciale et concédé aux colons de certains domaines impériaux de l'Afrique proconsulaire, à charge de mettre en culture les subcesica du domaine et d'acquitter certaipes redevances. Ce droit leur pst accordé par les procurateurs conformément à la loi Manciana2 [Lux, p. 1121, n. 3]. Les colons acquièrent le jus possidendi ac fruendi lieredique suo relinquendi L'usage temporaire de la chose d'autrui, avec l'autorisation du propriétaire, fut d'abord un acte sans valeur juridique3. On en Ut ensuite un contrat appelé commodat ou prêt à usage : rem utendam dure' [COMMODATUM]. Le louage de chose fut également considéré à l'origine comme conférant l'usage de la chose 6 ; puis on en fit un contrat spécial qui donnait droit à la jouissance [r.ocn TIO CONDUCTIO, p. 1286, n. 1] . Lorsque le propriétaire confie sa close à un tiers à titre de prêt à usage, de dépôt ou de gage, l'emprunteur, le dépositaire ou le créancier gagiste ne peut s'en servir contre la volonté du propriétaire sans commettre un vol, furtum usus [FUBTCM, p. 11x22, n. 14]. 20 Les choses dont l'usage est public, c'est-à-dire dont tout le monde peut se servir, sont ou bien des choses communes, ou bien des choses qui appartiennent à l'État ou à une cité. Les choses communes sont l'air, l'eau courante, la mer et, suivant certains jurisconsultes, le rivage de la mer6 [LITIUS]. Les choses qui appartiennent à l'État ou à une cité peuvent être affectées à t'usage public (usai publie() destinatae) : par exemple les places et les voies publiques, les basiliques, les théâtres, les fleuves et leurs rives, les ports'. L'État ou la cité propriétaire peut exiger une redevance [SOLAxIU3r, p. 1387] pour les constructions élevées sur un terrain affecté à l'usage pui7lic, mais qui ne nuisent pas à cet usage 8. I1.-Au dernier siècle de la République, l'usus apparait comme une servitude distincte de l'usufruit'. La séparation de l'usus et du fructus était déjà admise en droit publie10. En droit privé, l'usus confère le droit de se servir de la chose d'autrui sans en altérer la substance" et sans pouvoir jouir des fruits12. En principe, l'usager ne peut retirer de la chose un profit pécunaire : il ne peut céder l'exercice de son droit même à titre gratuit'3. La jurisprudence fit admettre la validité des dispositions testamentaires ainsi limitées. Bien qu'en général elles ne procurent au légataire qu'un avantage médiocre, on ne crut pas devoir les annuler. L'usager d'une maison, d'un esclave, d'un animal économise le loyer qu'il aurait à payer s'il louait la chose : il retire du legs un bénéfice appréciable. Il n'en est pas de même de l'usager d'un fonds de terre ou d'un troupeau : le premier n'a que le droit de se promener sur le fonds 14; le second n'a que le profit du fumier lorsqu'il fait paître le troupeau sur un champ qui lui appartient16. La jurisprudence estima qu'il convenait d'interpréter largement la volonté des testateurs et de donner aux legs d'usage un effet raisonnable. Le légataire de l'usage d'un fonds a le droit de prendre sur la récolte le blé et l'huile nécessaires à sa nourriture et à celle de sa famille16. L'usager d'un troupeau a droit à un peu de lait. Quant à l'usager d'un bois, on suppose que le testateur s'est mal exprimé et qu'il a entendu léguer l'usufruit ". On a même élargi la portée du legs d'usage d'une maison ou d'un esclave : à la condition que le légataire habite la maison ou se serve de l'esclave, il peut louer la partie de la maison dont il n'a pas besoin, ou les services qu'il ne peut utiliser18. L'usager comme l'usufrutier est soumis, par l'Édit du Préteur, à l'obligation de fournir caution's. III. L'usage est un mode de formation du droit : jus quod ususcomprobavit20. L'usage peut être général2f ou local (usus loci)22. Voir l'article MORES, p. 2002, et p. 2003, n. 20. ÉDOUARD CUQ.