Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article VIA

VIA, route ou rue. GRèCE. T. La route ou cite min se dit ôiéç, moins souvent poétiquement Une grande route est « porteuse de peuple n , parfois aussi Çzds;x-i(, u route royale n, en souvenir des routes de la Perse achéménide. La route carrossable est ;'; (une fois dans Homère) 2, ou encore oziXrnoç, sç3. La route bien battue ou fréquemment foulée est Topiio. La route étroite ou sentier (callis, semita, trames) se dit 'oç, rr;3ç, VIA 778 VIA âTpa7rd;' ; la route traversière qui abrège le raccourci (compendiaria) se dit É-CTOfJ.o; 2. Là où une route s'élargit pour faire place à un évitement ou à une halte, il y a e'r.'ro al, (diverticulum) 3. Les lieux de repos, avec petits abris ou sièges (deversoria, :afipta; les sièges sont dits Agirait Le mot rrx'rpo7:7i peut aussi désigner un sentier latéral 6. La rue se dit ;ut, Spdfi.oc, rGu.r; 6, ),a;ipa 7 et aussi 1,idç; une rue très large s'appelle 77a1.Eia (ô86ÿ) ; une rue très étroite est dite 6TEV« 7rdÿ, âft.poôo; ou â c ooôov 3. Dans les villes helléniques à l'époque romaine, l'inspecteur des rues et ruelles s'appelle Fuli.irltr,; ou rrflvo 77ip jo; 10. II. Sur des tracés déterminés par le relief du terrain, la végétation et les points d'eau, le passage fréquent d'hommes ou d'animaux de bât donne naissance à des pistes; ces pistes ne deviennent des routes que lorsque le travail des mains s'ajoute à celui des pieds pour les régulariser, en rendre le sol plus résistant, faciliter l'écoulement latéral des eaux de pluie, le passage des torrents, adoucir les montées et les descentes trop rapides. Il y a donc beaucoup de types intermédiaires entre la route proprement dite, telle que l'ont construite les Romains, et la piste plus ou moins aménagée. Longtemps avant la domination romaine, il a existé des voies de communication répondant à des nécessités militaires, religieuses ou commerciales ; mais la supériorité des Romains, en cette matière, a été nettement marquée par Strabon" : « Tandis que les Grecs, qui semblaient avoir réalisé pour leurs villes les meilleures conditions d'existence, n'avaient jamais visé qu'à la beauté du site, à la force de la position, au voisinage des ports..., les Romains se sont surtout appliqués à faire ce que les Grecs avaient négligé, c'est-à-dire à construire des chaussées, des aqueducs et des égoût.s... Ils ne se sont pas bornés à prolonger ces chaussées dans la campagne environnante, mais ils ont percé les collines et comblé les vallées, pour que les plus lourds chariots puissent venir jusqu'au bord de la mer prendre la cargaison des navires »f2. III. Aux époques dites minoenne et mycénienne (2500-1000 av. J.-C.), il existait déjà, en Grèce, des tronçons de routes et des rues pavées. Ainsi une route pavée, bordée de magasins, conduisait au palais de Cnossos et aboutissait à une place carrée, garnie de sièges sur deux côtés; le palais lui-même formait un carré avec une grande cour pavée au centre 13; il y avait aussi une route pavée conduisant vers l'ouest au petit palais 1'`. D'autres routes minoennes ont été relevées aux environs de la forteresse de Goulas, en Crète. Une rampe large de huit mètres, soutenue par un puissant mur de soutènement (fig. 7-4'2i), pavée de grandes dalles irrégulières, subsiste au sud-ouest de l'enceinte de Troie" (fig. 71,23). Steffen, en dressant la carte de l'Argolide, y a reconnu l'existence de routes datant de l'époque mycénienne : entre Kharvati et l'acropole de Mycènes, on renpontre une chaussée « cyclopéenne » percée de drains 16; à Mycènes même, en face de la Porte des Lions, une belle rampe pavée marque la voie royale des chars, allant de la porte au grand palais 17. Dans l'île de Scyros, des routes « cyclopéennes » facilitaient les communications entre les ports et les vallées cultivées 78. On a même signalé des restes de ponts « cyclopéens », notamment près de la route de Nauplie à Épidaure [hors, p. 361]. A l'époque homérique, les textes sont muets, bien qu'il soit question d'une route carrossable, 4.a,YT6;, conduisant aux sources du Scamandre13. Voyageurs et commerçants usaient de pistes, dont rien ne dit qu'elles fussent aménagées avec quelque soin ; le fait que les voyageurs devaient recourir à l'hospitalité, qu'il n'est jamais question d'auberges, témoigne de la nature rudimentaire des relations commerciales, car « dès qu'une route est sillonnée par des caravanes, l'hôtelier remplace l'hôte » 20. ' IV. On peut se dispenser de croire, avec Diodore 21, que Sémiramis ait fait construire des routes dans son empire, niveler des montagnes et élever des digues VIA -779-VU dans les marais. Mais il est certain qu'avant la domination des Achéménides, l'empire hittite, comprenant une notable partie de l'Asie Mineure, a été pourvu de routes dont le centre parait avoir été Pteria, la capitale des Hittites. « De même, a dit Ramsay, que le système actuel des routes en Anatolie s'explique par la position de Constantinople, de même le plus ancien réseau, antérieur à l'histoire écrite, oblige d'admettre que la capitale de la péninsule était dans la Cappadoce du Nord'. » On a démontré que la grande route royale (6i ç pxsatx7i) 2, décrite en détail par Hérodote 3, avait été une route hittite de Sardes à Pteria, avant de devenir la grande voie de l'Asie occidentale au temps des Perses, reliant Sardes et Éphèse à Suse par les portes Ciliciennes, franchissant les hauts plateaux de l'Antitaurus pour gagner les vallées du Tigre et de l'Eu phrate 4, Cette route est, en effet, 'jalonnée de monuments rupestres et funéraires (tumulus, etc.) que l'on a tout lieu d'attribuer aux Hittites. La tête de ligne était à Sardes; d'oit partaient trois embranchements vers la côte : A) Route descendant l'Ilermus, côtoyant le Sipyle, passant à Mostène, Magnésie, Cymé, Phocée ; B) route passant entre le Sipyle et le Tmole, par la vallée de Nymphi vers Smyrne; C) route traversant le Trnole, descendant le Caystre, passant par Tyra et aboutissant à Éphèse. La route principale avait pour stations (nous ne citons que les plus importantes) Méonie, Satala, Coloé, Bagis, Temenothyrae, Kidyessos, Léontocéphale (A/loura Kara-Ifissar) Orcistos, Pessinonte, Cordiurn, Ancyre, Pteriae. Elle traversait l'Euphrate et l'ilalys sur des ponts de bateaux ; celui de l'Halys était déjà en usage du temps de Crésus, qui le franchit en marchant vers Pteria M. Radet a mis en lumière l'importance du commerce lydien dès le vile siècle : les Méoniens ont servi d'intermédiaires entre Babylone, Ninive, Pteria et les colonies grecques 8. Ce sont les Lydiens qui donnèrent un caractère commercial à la grande voie militaire tracée par les Hittites entre l'Halys et la mer Égée. Hérodote dit qu'ils furent les premiers à faire métier de xz7c-r,),oa 9, mot qui implique le commerce de détail et le courtage ; le xas:r,))Eïov primitif, sur le bord de la grand'route, était à la fois hôtellerie, caravansérail et magasin. Les Perses, depuis Cyrus, utilisèrent et améliorèrent les routes existantes. Hérodote leur attribue l'institution des courriers royaux, avec relais de poste 10 Suivant Xénophon Cyrus fit construire des écuries le long des routes et y plaça des valets chargés de soigner les chevaux ; c'est aussi dans ces relais qu'on recevait les lettres d'Un courrier pour les transmettre à un autre; les courriers voyageaient même pendant la nuit [cuuses PuaLlcus]. Outre les auberges, écuries et magasins, on trouvait sur les routes, de distance en distance, des fortins destinés à en assurer la sécurité 12. « Sauf l'institution des courriers et la substitution de l'itinéraire Arbèles-Suse au tracé Ninive-Babylone, la grande ligne officielle par où Cyrus et Darius expédiaient leurs ordres aux satrapes d'Orient conservait, au moins dans ses traits essentiels, l'organisation qu'elle avait reçue des anciens maîtres de l'Asie u. » M. Radet a pensé que la grande route royale, le long de laquelle les rois de Perse fondèrent des colonies f4, était essentiellement une route de caravanes, alors que le texte d'IIérodote semble indiquer qu'elle était surtout postale. Mais les 114 stathmes que compte l'historien d'Éphèse à Suse par Sardes, impliquant des étapes de 21 kilomètres et une vitesse quotidienne de 27 kilomètres seulement dans un voyage total de treize jours, paraissent plutôt convenir, suivant l'observation de M. Radet, à l'allure de caravanes qu'à celle de courriers. Telle n'est pas l'opinion de W. Ramsay 79, fondée sur le fait que certaines sections de la route royale, parcourues par lui, sont peu accessibles même à des cavaliers ; à quoi l'on peut objecter que Xerxès, traversant l'Asie, voyageait tantôt en char, tantôt en [ARniAAIAxA'S. C'est aussi de l'époque achéménide que date la grande route allant de Babylonie et de Perse aux Portes Caspiennes 17. En revanche, la route transversale du Sud de l'Asie Mineure, suivant la vallée du Méandre 73, appartient seulement à l'époque gréco-romaine ; nous en dirons quelques mots plus loin. Il faut sans doute attribuer une haute antiquité à la route dite de Memnon, par laquelle ce héros serait venu de Suse à Troie ; les Phrygiens, du temps de Pausanias, en montraient encore les stations, étapes prétendues de son armée '9. V. Ce que les textes et les études faites sur le terrain nous apprennent des routes grecques, à l'époque classique, n'est pas fait pour en donner une idée favorable ; la circulation doit toujours y avoir été pénible. Les Grecs n'ont jamais su jeter des viaducs au-dessus des vallées ni gravir les montagnes par des routes en lacets. Il y avait même des chemins qui escaladaient des pentes raides par des degrés taillés dans le roc ou grossière ment construits avec des pierres ('),(;,.rite,;, comme aux environs de Mantinée 20. Thucydide parle de routes construites en Macédoine, évidemment dans un dessein militaire, par Archélaos fils de Perdiccas 21 ; mais la stratégie grecque, n'usant pas de grands convois, se contentait des sentiers existant dans le pays. Quelques routes carrossables, comme celle qui reliait Athènes au Pirée 22, répondaient sans doute à un intérêt commercial ; mais les meilleures routes n'étaient que des tronçons assez courts, établis pour faciliter les pèlerinages et les processions religieuses. Dans ces processions, les femmes étaient transportées en voiture, tant à Athènes 23 qu'à Sparte V4; il fallait donc que les routes qu'ellessuivaientfussent carrossables[vElllcuLUar]. Telle était la voie sacrée d'Athènes à Éleusis, qui avait été l'objet d'une description minutieuse par Polémon 2s VIA 780 VIA Le tracé, à peu près identique à celui de la route moderne, se reconnaît surtout au delà du monastère de Daphni. Cette route a été en partie taillée dans le roc ; du côté du Céphise, sur un élément du parcours, elle est supportée par un mur 1. Elle traversait un des lacs salés dits 7lheitoi sur une passerelle de pierre large de cinq pieds, construite, d'après un décret que nous possédons, en 421, dans l'intérêt de la sécurité des prêtresses qui portaient les objets sacrés`-'. Sur la même route, vers 320, un pont fut jeté sur le Céphise 3. Une route très ancienne, d'Athènes à Delphes, était celle que suivait chaque année la procession pythiade 4. Eschyle, dans un passage obscur 5, parle des forgerons d'Iiéphaestos, avaient frayé pour Apollon, à coups de hache ou de marteau, un accès facile vers le Parnasse. Ilérodote 6 indique la longueur de la route depuis l'autel des Douze Dieux d'Athènes jusqu'au temple de Zeus à Olympie, preuve qu'il y avait, pour les pèlerinages, des chemins repérés et fixes, dont les difficultés naturelles devaient avoir été plus ou moins atténuées par le travail des hommes. Parmi les traces de ce travail, outre les évitements creusés dans le roc pour permettre les croisements, les plus fréquentes sont les ornières artificielles, profondes de quelques centimètres, qui ont pour but de rendre moins dangereux le passage des chars sur des rochers affleurants7. On a souvent supposé que ces ornières avaient été creusées peu à peu par les roues elles-mêmes, ruais cette opinion, comme l'ont vu Leake, Ross, Mure, E. Curtius et Caillemer, est inadmissible : elles ont été creusées pour les roues. Grâce à ces rainures, des chars portant des objets de culte pouvaient circuler sur des routes très rocailleuses sans courir trop de risques. Mais « lorsque le fond sur lequel une route devait passer était du rocher, ou de la pierre recouverte d'une couche de terre fort mince, les Grecs ne rendaient pas carrossable toute la largeur de la chaussée. Ils se contentaient d'un grossier nivellement ; puis ils creusaient pour les roues des rainures qu'ils nivelaient avec grand soin. Entre les deux rainures, lorsque le sol était trop raboteux ou trop inégal, on répandait du sable ou du graviers ». Aux environs d'Orchomène, on voit un chemin pourvu de deux rainures parfaitement nivelées, alors qu'entre elles le sol est creusé de trous et semé de pointes. « Pour remédier à l'inconvénient des rencontres de chars, il suffisait d'établir deux voies parallèles, ou même, en se contentant d'une voie unique, de disposer, de place en place, des courbes d'évitement. Les deux moyens furent employés. Sur la route de Sparte à Hélos, on voit des rainures profondément creusées qui s'infléchissent en demi-cercle de chaque côté de la voie et vont se rejoindre un peu plus loin 9. » VI. Nos informations sur la technique des routes grecques se réduisent à peu de chose. L'expression axu.wrrt 6 ç, appliquée à une route de Cyrène par laquelle passaient les processions 1D, est expliquée par AtÛO7T: o ro ; cela ne signifie pas, suivant Boeckh ", que la route fût pavée, mais qu'elle avait été consolidée à l'aide de petites pierres, le mot (sxû?ov, synonyme de ),2-Û727(, désignant les restes de taille. L'emploi de cailloux concassés doit être admis dans certaines routes battues avec grand soin, mais non pavées, comme la voie, large de trois mètres, conduisant du Céramique à l'Académie et à Colone, dont l'existence a été reconnue il y a une vingtaine d'années'`. Aux abords des villes, les routes étaient bordées de monuments funéraires : c'est pourquoi le mort, dans les épigrammes, est souvent censé s'adresser au passant, au voyageur. Le déblaiement partiel du quartier du Céramique à Athènes nous a révélé l'aspect d'une voie antique à la sortie d'une grande ville (fig. 7421)13 Sur le reste du parcours, on trouvait, de loin en loin, des auberges (7rxv3oxa7a), des magasins (xx7•0ieïx), et des lieux de repos (xxra),ûa_tç, ctvxaxûao; ; cf. plus haut, § I), qui ne manquaient même pas sur de mauvais chemins, comme celui d'Oropos à Athènes ". Des chapelles latérales étaient dédiées à Apollon, Hermès et IIécate, protecteurs des chemins et des carrefours. On tonnait des fonctionnaires spéciaux chargés de mesurer au pas la longueur des routes; une route ainsi mesurée était dite (is~OrµxTteuÉVr 10. A Olympie, on a trouvé deux dédicaces d'un Crétois qui se dit hémérodrome du roi Alexandre et béinatiste de l'Asie, c'est-àdire courrier du conquérant Macédonien et métreur de ses itinéraires 1G. Un autre métreur des routes parcourues par Alexandre, auteur d'un livre sur les marches de l'armée grecque en Asie, est mentionné par Athénée i7 ; un troisième est cité par Pline 1°. VII. Les successeurs d'Alexandre paraissent avoir entretenu et étendu, en Asie Mineure, le système des routes achéménides : nous savons qu'Antigone, par exemple, établit un service de courriers 19 et que des routes furent tracées entre les villes côtières 20. Mais la création la plus importante de cette époque fut la grande route des Indes, décrite par Strabon d'après Artémi VIA 781 VIA dore'. Alors que la route royale (§ IV) était tortueuse, cherchait à éviter les espaces incultes, la route de l'Inde est presque droite, coupe le steppe lycaonien et répond aux besoins de communications rapides de l'époque hellénistique Les villes principales qu'elle reliait sont Éphèse, Magnésie, Tralles, Nysa, Antioche, Laodicée du Lycos, Apamée, Métropolis, Philomélion, Laodicée Katakékaumène, Coropasos, Garsaoura, Soandos, Mazaca3. Ainsi fut substitué un itinéraire systématique et direct aux tracés longs et irréguliers, voies locales mises bout à bout, qui couraient en zigzag, avant la conquête d'Alexandre, le long de la bordure septentrionale du Taurus. En Égypte, dans la vallée du Nil, les communications se faisaient 'par eau ; les villages se servaient aussi à cet effet des digues. Dans les régions désertiques, les pistes suffisaient. Pourtant, il existait une véritable route de Coptos à Bérénice sur la Mer Rouge, que Ptolémée Philadelphe, disait-on, avait fait construire par ses soldats. Pour parer au manque d'eau, on y disposa de distance en distance des aiguades et des écuries pour chameaux. Grâce à cette voie, toutes les marchandises de l'Inde et de l'Arabie, ainsi que celles des marchés éthiopiens qu'on expédiait par le golfe arabique, étaient dirigées vers Coptos, qui en était devenu l'entrepôt. On évitait ainsi, par une route isthmique', les difficultés de la navigation sur la Mer Rouge 5. VIII. On a pu se faire une idée du tracé des rues dans la Grèce préhellénique par l'exploration de la troisième ville de Phylakopi (fig. 7425) s. La régularité du plan est d'autant plus surprenante qu'elle contraste avec le manque de symétrie des villes helléniques. La même remarque vaut pour Gournia, autre bourgade d'époque préhellénique, en Crète'. Les rues des villes grecques, sans excepter Athènes étaient en effet étroites et sinueuses 9. Hippias frappa d'une taxe les propriétaires des maisons dont les étages supérieurs faisaient saillie sur la voie publique [11IAENIAN173I] 10. Après l'expul sion des Tyrans, la surveillance des rues incomba à l'Aréopage, aux cinq astynomes et aux cinq no7owi ". À Sparte, les voies publiques étaient sous le contrôle desrois12; à Thèbes, elles concernaient probablement le tétrarque, mais la ville n'en était pas moins très malpropre, avec des rues obstruées par des tas de fumier 13. A Athènes comme à Platées, au ve siècle, on pataugeait dans la boue". Il y avait pourtant des rues plus larges et mieux tenues que les autres : c'étaient celles qui servaient à des processions, comme la rue des Trépieds à Athènes t5. Le protecteur des rues était Apollon «yu[EUç; la protectrice des rues et surtout des carrefours était Hécate. Des termes de ces divinités, ou des chapelles sous leur vocable, étaient souvent placés devant les maisons. Hippodamos de Milet fut le premier à introduire l'idée de la symétrie et de l'hygiène dans la construction des villes " e; il montra ses talents d'ingénieur-architecte au Pirée (vers 4h0) ", à Thourioi 10 et peut-être à Rhodes 19. Dinocratès s'inspira de ces principes nouveaux20 dans la construction d'Alexandrie. Cette ville, ainsi que d'autres cités hellénis tiques comme Priène, Nicée, Antioche sur l'Oronte, la nouvelle Sélimonte (fig. 7426)", avait de larges rues se coupant à angle droit et des places nombreuses. Une rue d'Alexandrie, longue de trente stades sur cent pieds de large, courait de la porte de l'est à celle de l'ouest. Mais dans les petites villes et les villages d'l' gypte, les rues ((t,ûu.oa) étaient fort étroites. Comme à Athènes et ailleurs22, elles portaient souvent des noms de corps de métiers ou de commerçants : ainsi il y avait, à Arsinoé, des rues dites des marchands de sel, des pêcheurs, des marchands de lentilles, etc.23. S. REINAC❑. ROSIE. Terminologie. Les Romains avaient à leur disposition de nombreux mots pour désigner, en VIA les distinguant nettement les unes des autres, les différentes sortes de chemins et de routes. Le plus usité elle plus général était celui de via' ; on l'employait souvent dans un sens taies étendu, qu'il s'agît d'une grande route, d'un simple chemin de campagne ou d'une rue de ville : mais souvent aussi il était pris dans un sens restreint et précis. En droit, on opposait la via à l'actes et à liter. La via (de vehere, tirer 2 était une route ouverte à la circulation des voitures, oit deux chars au moins pouvaient se croiser ou marcher de front' ; la loi des Douze Tables fixait déjà sa largeur minima à huit pieds, lorsqu'elle était tracée en ligne droite (in porrectum , à seize pieds dans les détours (in anfractum, id est ubi Jlexum est)4. La largeur de l'accus (de agere, conduire), quatre pieds seulement, ne permettait que d'y faire passer des bestiaux ou des véhicules à la suite l'un de l'autre'. L'iter (de ire, aller), large de deux pieds, n'était praticable qu'aux piétons, aux cavaliers et aux litières6. A ces trois termes correspondaient trois espèces de servitudes' [SERVITUS, p. 1'283]. La via impliquait l'actes et Plier ; en principe l'iter était compris dans l'actes, mais on pouvait l'en exclure par une clause formelle et ne concéder que l'actes sine itinere 8. Comme synonymes de via, au sens restreint, on rencontre parfois à une basse époque le mot strata, qui paraît sur les bornes milliaires dès la première moitié du nie siècle de notre ère ° et dans les textes littéraires cent ans plus tard '°, et aussi le mot agger 11. La semita, dont la largeur ne représentait que la moitié, sentis, de celle de liter, était une simple sente 12 ou, en ville, un trottoir bordant les maisons f3 ; la callis, un chemin tracé dans les montagnes par le passage des troupeaux transhumants"; le trames" et le diverticulum 16, des chemins de traverse. On appelait les rues de ville viae urbicae 17 ou vici'", les rues ou sentiers en pente clim.", les chemins en lacets antbitus 20, les carrefours et embranchements de routes divortia 21, bivia 21, trivia 23, quadrivia 24. D'après les agrimensores, les lignes de délimitation qui séparaient deux domaines et, par suite, dans les colonies, le cardo maximes et le decuumanus maximes, ainsi que les limites secondaires qui leur étaient parallèles ou perpendiculaires, servaient de chemins23 [LI3IES] ; selon que ces chemins étaient ouverts au public ou réservés aux riverains, on disait iter populo debetur ou non debetur 26 Ulpien divisait les viae proprement dites en trois 732 VIA classes : vice publicae, vine privatae, vine vicinales 21; mais ces dernières, à vrai dire, rentrent le plus souvent dans la définition des viae publicae et ne devraient pas former une catégorie à part. Les viae publicae sont celles qui ont été établies sur un sol appartenant au domaine public 28, domaine de l'État ou domaine des villes, dornaine originairement public ou devenu tel par l'expropriation [PUBLICATlO], et dont l'usage était permis à tous" (de là les expressions viae ordinariae, viae vulgares). Les principales d'entre elles, créées et entretenues aux frais de l'État, sans préjudice des charges et prestations des villes et des riverains, correspondaient aux jixct),txal eôo( des Grecs ; elles étaient appelées par analogie viae regiae, regales ou basilicae, et encore viae consulares ou viae praetoriae 39 à cause de la qualité des magistrats qui les avaient construites; viae militares 37 à cause des services qu'elles rendaient aux armées; elle aboutissaient au bord de la mer, à un fleuve, à une grande ville, à une autre voie 32. D'après quelques commentateurs, les viae militares proprement dites devraient être distinguées des viae publicae véritables ; ces dernières étaient établies suivant toutes les règles de l'art et utilisées par les services de la poste d'État [cunsus ruBLicus] ; les viae militares ne seraient que des chemins en général assez courts et peu soignés, tracés pour les besoins de la défense et des communications stratégiques 33. Les viae vicinales, vicinae, paganicae, servaient seulement à relier des routes plus importantes ou des bourgades rurales (vici) ; leur entretien incombait à ces bourgades mêmes et aux propriétaires voisins34; elles avaient presque toujours le caractère de viae publicae, c'est-à-dire, en l'espèce, qu'elles appartenaient aux municipalités; mais Ulpien décide qu'elles pouvaient être viae privatae (dq la sorte des vice agrariae), si elles étaient créées et non pas seulement entretenues par les particuliers propriétaires du sol36. Les rues des villes, viae urbicae ou vici, rentraient aussi dans la catégorie des viae publicae36. Quant aux viae privatae, privati ,jaris, peculiares ou domesticae, ce sont celles qui ont été établies sur un sol appartenant à des particuliers et que ces derniers entretiennent à leurs frais, avec le droit d'en autoriser ou d'en interdire l'accès aux étrangers 37; celles d'entre elles qui étaient situées à la campagne s'appelaient aussi viae agrariae, campestres, rusticae 36. On rangeait encore parmi les viae VIA 783 VIA privatae les chemins qui servaient à plusieurs voisins (viae communes) ' et ceux qui étaient exploités à titre de servitude sur le domaine d'autrui 2. Développement historique. Servius' et Isidore de Séville' prétendent que les Romains avaient appris des Carthaginois l'art de construire des routes. Il est plus probable qu'en cette matière comme en tant d'autres, ils s'étaient mis à l'école des Étrusques '. On n'a pas seulement retrouvé en Étrurie les traces de nombreux chemins antérieurs à l'époque romaine °, taillés au ciseau dans le roc, s'élevant en lacets ,jusqu'au sommet dés hauteurs escarpées oit se dressaient les villes, et bordés quelquefois par un petit fossé latéral pour l'écoulement des eaux de pluie (fig. 74127) 7; mais aussi en plusieurs endroits, notamment à Fiésole 8, à Pérouse 9, à Saturnia 10, auprès de Graviscae , on a découvert, sous le niveau des chaussées romaines, de grandes dalles de pierre calcaire, sur lesquelles des stries, parallèles, ou des ornières, avaient été marquées à la longue par les roues des chars ou même creusées à dessein. Ces pavements ne peuvent être l'oeuvre que des ingénieurs étrusques et ils ont servi de premiers modèles aux Romains. Mais ceux-ci ont singulièrement perfectionné les procédés qu'ils empruntaient à leurs devanciers, grâce surtout à l'emploi du mortier de chaux et de sable usité en Égypte depuis une haute antiquité, dont ils eurent connaissance dans les dernières années du Ive siècle avant l'ère chrétienne, par l'intermédiaire des Grecs de l'Italie méridionale ou des Carthaginois''. De bonne heure, sans doute, des chemins simplement tracés à travers champs relièrent Rome aux cités voisines et l'extension de ce réseau primitif dut marcher de pair avec le développement des relations commerciales et les progrès de la conquête 13. Pour les premiers siècles de la République, Tite-Live mentionne la via Gabinau, qui fut plus tard prolongée jusqu'à Préneste, la via Latina", qui allait de Rome en Campanie par les vallées du Trerus et du Liris, au nord des monts des Volsques, et la via Salaria ie, par laquelle le sel des marais d'Ostie était conduit dans le pays des Sabins; les noms que portent ces routes et qui ne.dérivent pas, comme ce fut ensuite la règle, de noms de magistrats romains, sont un indice de leur haute antiquité. Mais la première voie pavée que les Itomains aient construite est la via Appia, de Rome à Capoue, à travers les Marais Pontins, poussée ultérieurement jusqu'à Tarente et Brindisi ; elle était l'oeuvre d'Appius Claudius Caecus, censeur en 312 av. J.-C. 17; il est peu vraisemblable qu'elle ait été tout entière dallée dès le début' 8. D'autres suivirent, à commencer peut-être, dans les dernières années du Ive siècle 19, parla via Clodia, à l'intérieur de l'Étrurie méridionale, de Rome à Forum Clodii, en attendant qu'elle fût prolongée jusqu'à Luca; puis la via Aurelia, de Rome à la Ligurie par la côte d'Étrurie, due sans doute à C. Aurelius Cotta, consul en 241; la via Cassia, encore en Étrurie, de Rome à Fiésole 20 ; la via Flalninia, de Rome à Ariminum, sur l'Adriatique, par l'Étrurie et l'Ombrie, construite, croit-on, par C. Flaminius, censeur en 220; la via Aemilia, au nord de l'Apennin, d'Ariminum à Placentia, par Bononia et l'arma, oeuvre de M. Aemilius Lepidus, consul en 187 21, etc. (fig. '7433). Les directions suivies par ces routes nous renseignent sur leur véritable caractère; ce sont avant tout des voies stratégiques; elles étaient destinées à faire communiquer la capitale, par l'itinéraire le plus direct, avec les colonies militaires qui jalonnaient les étapes des Romains dans la péninsule et consolidaient leur domination. En 174 les censeurs Q. Fulvius Flaccus et A. Postumius Albinus mirent en adjudication publique, pour la première fois, la construction des chaussées et des trottoirs des routes hors de Rome, ainsi que le pavage des rues de Rome ellemême". Parmi les hommes qui ont le plus contribué pendant l'époque républicaine à l'essor du réseau routier, à son embellissement, à son aménagement commode, il faut surtout citer C. Gracchus; on lui dut pendant son tribunal., en 123 av. J.-C., une tex Sempronia viaria,envertu de laquelle il fit tracer des voies nouvelles, droites et continues, renforcées de pierres de taille que liaient du sable et du ciment, combler ou traverser par des ponts le lit des torrents et les bas-fonds marécageux, placer des bornes par intervalles pour permettre aux cavaliers de se mettre en selle, et indiquer sur des colonnes, de mille en mille pas, le chiffre des distances [a11LL aitlu I) 23. Sur ce dernier point C. Gracchus paraît seulement avoir transformé en règle générale un usage plus ancien ; on ne tonnait pas moins de neuf milliaires d'Italie antérieurs à l'année 123 2" ; le premier en date, sur la via Appia, à la station d'Ad 1liedias, remonte aux environs de l'an 2502J. Au temps de César, l'Italie entière était sillonnée de routes qui rattachaient Rome à toutes les villes importantes. Dans les provinces les travaux de voirie étaient loin d'être aussi avancés. On ne connaît en dehors de l'Italie qu'un petit nombre de voies romaines antérieures à l'Empire ; commecelles de la péninsule, elles avaient un caractère essentiellement militaire. Les deux principales sont la via Domitia en Gaule et la via L'gnatia dans l'Europe orientale. Le nom de la première n'apparaît qu'au temps de Cicéron 26 ; il VIA 784 VIA indique qu'elle avait pour auteur Cn. Domitius Ahenobarbus, proconsul de Narbonnaise en 121; cependant, dès le milieu du second siècle, Polybe nous dit que le trajet d'Ampurias au Rhône, 1600 stades, avait été exactement mesuré par les Romains de huit stades en huit stades, c'est-à-dire de mille en mille' ; cette partie de la route serait donc antérieure au proconsulat de Domitius et daterait des guerres d'Espagne, au début du second siècle 2, si toutefois le texte de Polybe n'est pas interpolé 3. La via Domitia mettait en relations faciles, par terre, l'Espagne et l'Italie'; elle allait des Pyrénées à Tarascon par Elne, Narbonne, Béziers, Nîmes, etde Tarascon aux Alpes Cottiennes par la vallée de la Durance et le col du mont Genèvre 5 (fig. 7438). La via Egnatia, qui traversait l'Illyrie, la Macédoine et la Thrace, de. Dyrrhachium à Apollonie et à l'lIebrus fig. 7439), est mentionnée pour la première fois sous ce nom par Polybe, au début de la seconde moitié du second siècle'. En Asie on a découvert, sur le parcours de différentes voies, un certain nombre de milliaires bilingues, au nom de M'. Aquilius, consul en 129, chargé ensuite d'organiser la nouvelle province comme proconsul' ; il s'agit évidemment de routes plus anciennes, construites par les Séleucides et les rois de Pergame, que les Romains à leur arrivée dans le pays ont aussitôt utilisées, remises en état et jalonnées de bornes'. Les empereurs romains ont apporté, tous ou presque tous, un soin extrême à l'amélioration du réseau routier que la République leur léguait. Les historiens anciens et les bornes milliaires attestent également l'importance de l'oeuvre qu'ils ont accomplies. En Italie il ne s'agissait désormais, dans l'intérêt non plus de la conquête et de la défense militaire, mais de la facilité des relations administratives et des échanges commerciaux, que d'assurer le bon état des voies anciennes et de les compléter par un petit nombre de voies nouvelles qui les continuaient, les i'eliaient ou les doublaient. A l'exemple de César, qui avait consacré de grandes sommes à la restauration de la via Appia 10, Auguste, dès l'an 27 av. J.-C., répara à ses frais la via Flaminia et chargea plusieurs personnages honorés du triomphe de réparer pareillement les autres voies, avec l'aide du Trésor public et sa propre assistance". Claude prolongea la via Valeria, de Rome à Corfinium, par la via Claudia Valeria, de Corfinium à Aternum sur l'Adriatique 12, et la relia à Interocrium, sur la via Salaria, par la via Claudia nova, qui partait aussi de Corfinium". Vespasien creusa un tunnel dans l'Apennin au défilé de Petra Pertusa, aujourd'hui Furlo, pour éviter à la via Flaminia la montée d'une pente raide et étroite 14. Domitien fit construire, de Sinuessa à Puteoli. la via Domitiana, qui se détachait de la via Appia et longeait la mer15. Pline le jeune'', Dion Cassius 17 et Galien" vantent l'activité déployée par Trajan ; on lui doit en particulier l'exécution de la chaussée pavée de la via Appia à travers les garais Pontins, sur une longueur de dix-neuf milles (decennovium), entre Forum Appii et Terracine'0, et la construction de la via Trajana, qui rattachait, comme la via Appia, Bénévent à Brundisium, mais en desservant Canusium et le littoral de la mer Adriatique, au lieu de passer par Tarente"; une monnaie de son principat porte au revers l'image d'une femme assise, tenant dans la main gauche un roseau et dans la droite une roue, et au-dessous les mots: via Trajana (fig. 7428). Sur l'arc de Constantin la via Flaminia est représentée couchée au pied de l'Empereur Marc-Aurèle (fig. '7429)". Septime Sévère a donné son nom à une route du Latium, le long de la mer Tyrrhénienne '2.; il relia Rome par une autre route au domaine impérial de Villa Magna, dans l'ancien pays des IIerniques, sur la rive droite du Sacco 23. D'assez nombreux milliaires du tue et du ive siècle montrent qu'à cette époque l'entretien des routes italiques n'avait pas cessé d'être l'objet d'une surveillance attentive. Dans les provinces la République avait laissé beaucoup plus à faire au régime suivant: il s'agissait presque partout, non pas seulement de compléter un réseau déjà existant, mais de créer un système de voies de communication adapté aux nécessités, à la fois, delaprotection des frontières et de la mise en valeur économique des régions intérieures, toutes reliées entre elles et avec Rome. Là aussi, comme onle verra plus loin en étudiant chaque province séparément, les principaux constructeurs et réparateurs de voies romaines ont été Auguste, Claude, particulièrement en Gaule où il était né, les Flaviens, les Antonins, surtout en Espagne, patrie de Trajan, les Sévères, notamment en Afrique d'où ils étaient originaires. Procédés de construction. Ulpien distinguait, au point de vue de la technique, trois sortes de routes : les vice terrenae, qui ne consistaient qu'en-une piste de VIA -7S3° VIA terre battue et nivelée, les viae glarea stratae, dont la chaussée était recouverte de gravier pilé, les vicie silice stratae, pavées de dalles de pierre 1. Les Romains ont excellé dans l'édification des deux dernières. Il en subsiste en Italie et dans les provinces des vestiges importants, à l'aide desquels on peut se faire une idée des procédés employés pour les établir. Dans les textes littéraires et épigraphiques les mots viam tueri 2 ou viam manère 3 embrassent tous les travaux que pouvait comporter la construction ou l'entretien d'une route; viam sternere', struere 5, instituere 6, innovare7, c'est la construire; viam glarea sternere8, l'empierrer; viam silices, lapide '0 ou quadrato saxo sternerell la paver; viam restituere72, reficerel3, ad pristinam formam reducere 14, la restaurer; viam purgare 15 ou verrere 16, la nettoyer; viam deteriorern facere 17, altérer son état primitif, par exemple en la rétrécissant. Stace a décrit en quelques mots les travaux de la via Domitiana de Campanie 1E. Nulle part Vitruve ne traite spécialement des routes, mais il parle en détail des ruderationes ", pavements d'édifices LPAViMENTï)M;, qui étaient faites de plusieurs assises de matériaux différents, et l'on peut rapprocher ces indications de celles de Pline70 et d'un autre chapitre de Vitruve sur les ambulationes "1, passages empierrés servant de lieux de promenade. Nicolas Bergier, qui avait fait des fouilles auprès de Reims en trois endroits", sur l'emplacement d'anciennes voies romaines, y put constater l'existence de « plusieurs matières bien distinguées et unies par certains lits les unes sur les autres... 11 y a, dit-il, tel rapport des pavez des maisons antiques avec les matières des grands chemins des champs que l'ordre de celuy des maisons estant reconnu pièce à pièce et nom pour nom peut suppléer à celui des champs et restablir les noms propres de chacune couche qui m'estoient inconnus d'ailleurs » f3. Par celte méthode il a tracé les règles théoriques de la construction des routes romaines 24. On commentait par délimiter entre deux petits fossés parallèles (sulci) 2' la largeur de l'espace que la voie devait occuper; dans l'intervalle, toute la terre meuble était enlevée sur une assez grande profondeur 2° et, autant que possible, jusqu'à ce que l'on rencontrât le roc; on nivelait et pilonnait le fond de la fouille, que IX, l'on recouvrait de sable et de mortier, et au besoin même on y enfonçait des pieux pour augmenter sa force de résistance 27. Sur ce fond s'élevaient ensuite quatre couches superposées de maçonnerie 28, représentant une hauteur totale de 1 mètre à 1 m. 50"3 : 10 le statumen 3° (de 0 m. 30 à 0 m. 60), composé de plusieurs rangs de pierres plates reliées par du mortier ou de l'argile; 2° le redus ou la ruderatio31 (0 m. 25), mince couche d'un béton formé de petits cailloux, de F r L B 0462:,,,,. ete pierres cassées, de fragments de briques, et battu avec des pilons ferrés pour lui donner plus de solidité ; 3° le nucleus 32 (0 m. 30 à 0 m. 50), béton plus fin en gravier ou en sable cylindré par couches; 41° le summum dorsum "'«O m. 20 à 0 m. 30), fait dans les viae glarea stratae en cailloutis, dans les vice silice stratae en dalles plus ou moins larges; de toute façon cette partie supérieure devait présenter une surface unie34; elle était légèrement bombée en son centre, de manière à permettre l'écoulement des eaux 36. Deux trottoirs surélevés (margines 36 ou crepidines 37), dallés ou empierrés,' encadraient la chaussée (agger)38, dont les séparait parfois un petit rebord (umbo)39; on appelait gomphi 40 des pierres taillées en forme de coin et faisant saillie, placées de distance en distance le long des trottoirs pour les consolider. Enfin deux fossés latéraux recueillaient les eaux de pluie". Bien entendu, dans la pratique, ainsi que les fouilles ont permis de le constater, l'épaisseur, la disposition respective et même le nombre des couches superposées variaient beaucoup (fig. 7130)42. Quelquefois le rudes et le VIA 786 VIA nucleus étaient intervertis; ailleurs le nucleus n'existait pas; d'autres fois encore la route ne comprenait qu'un dallage, reposant directement sur un massif de bétop, ou qu'un lit de petites pierres et de gravier, supporté par un lit de gros cailloux. Deux principes paraissent avoir inspiré constamment les ingénieurs romains : s'adapter du mieux possible aux conditions locales, et surtout mettre les routes à l'abri des infiltrations par quelque moyen que ce fût (alternances de roches diverses, constitution d'une infrastructure compacte et imperméable, bombement des surfaces), pour assurer leur durée'. La nature des matériaux utilisés dépendait des ressources de chaque région. Les dallages consistaient soit en blocs polygonaux et inégaux de pierre dure (silex), basalte, lave ou marbre grossier, soit en pavés rectangulaires et réguliers (saxum quadratum) ; les empierrements en cailloux roulés ou,taillés de la grosseur d'un oeuf, souvent mêlés à de la pouzzolane, à de la brique pilée ou même à des scories de fer; le nucleus, le rudes et le statumen, en roches plus tendres (la craie et l'argile remplaçaient, s'il le fallait, la chaux et le ciment). De même la largeur des voies n'avait rien d'uniforme. Aux portes de Rome elle atteignait jusqu'à 10 ou 12 mètres, dont un tiers pour chacun des trottoirs. En général les plus fréquentées, pour trois chars de front, avaient une largeur de 14 à 16 pieds (4 m. 13 à 4 m. 72) ; les autres, pour deux chars, 10 à 12 pieds (2 m. 95 à 3 m. 54); presque partout les trottoirs ne dépassaient pas 2 pieds chacun (0 m. 59). En montagne, où le travail était particulièrement difficile, la largeur des routes était encore réduite jusqu'à 6 pieds (1 m. 77), ne laissant d'espace que pour un seul char, sauf à ménager par intervalles des places moins étroites pour les croisements. Le plus souvent, surtout aux origines et en Italie, les voies romaines étaient tracées, autant que possible, en ligne droite ; elles évitaient le fond des vallées, où l'on redoutait l'action destructive des infiltrations et des inondations, et passaient de préférence à mi-côte. Pour s'élever jusqu'aux cols où elles franchissaient les crêtes montagneuses', elles décrivaient des lacets d'une pente quelquefois très accentuée. Elles nécessitaient de grands travaux d'art, en dehors même des ponts auxquels un article spécial est consacré [PoNs]. Dans les régions marécageuses et même parfois en terrain sec, lorsqu'il fallait traverser une plaine ou une vallée par-dessus laquelle on ne pouvait, comme à Narni, jeter un viaduc b, les ingénieurs, toujours préoccupés d'empêcher la désagrégation de l'infrastructure par les eaux, avaient recours à l'établissement de chaussées en remblai, dont la largeur pouvait aller jusqu'à 10 ou 12 mètres et l'élévation au-dessus du niveau du sol environnant jusqu'à 3 ou 4 mètres; la chaussée sur laquelle la via Appia traversait les Marais Pontins ne comptait pas moins de 28 kilomètres de longueur. Des routes passaient en corniche au-dessus du lit des ravins5; d'autres, entaillées à flanc de coteau le long de parois rocheuses et escarpées, avaient besoin d'être appuyées et consolidées par des mursdesou tènement, des voûtes ou des arcades; on peut citer comme exemple typique les murs de soutènement de la via Flaminia près d'Urbin (fig. 7431)'. Avec les moyens d'action très limités dont les anciens disposaient, le creusement des tranchées était particulièrement pénible et coûteux; en Narbonnaise à Sisteron7, sur la rive droite du Danube au défilé des Portes de Fer s, en Bithynie à Amastris en Syrie près de Beyrouth 10, en Coelésyrie près d'Abila Lysaniae ", des inscriptions gravées sur le roc commémorent l'heureuse exécution de ces travaux difficiles. Presque partout les voies se rétrécissaient pour passer dans une tranchée ; cependant la via Appia en franchit une après Terracine, sur 30 mètres de longueur et 36 rn. 55 de hauteur 1", en conservant une largeur de 4 m. 44, y compris les trottoirs. Dans certains cas on n'hésitait pas à creuser un tunnel [CRYPTA]. Celui qui passe sous le Monte Grillo, entre Baïes et Cumes, est long de plus d'un kilomètre ; des puits y faisaient pénétrer la lumière; il fut construit par Cocceius sur l'ordre d'Agrippa, au moment de la guerre contre Sextus Pompée 13. Deux autres, qui sont mentionnés dans les Itinéraires, traversaient la colline de Pausilippe entre Naples et Pouzzoles. L'un, le plus proche de la mer (aujourd'hui Grotta di Sejano), avait été exécuté par Cocceius en même temps que le tunnel de Cumes et pour répondre aux mêmes besoins i`; il fut réparé au ive siècle15 ; il avait 770 mètres de longueur, de 4 à 6 de largeur et de 4 à 8 de hauteur. L'autre, plus en arrière, décrit par Sénèque sous le nom de crypta Nea VIA 787 VIA. politana' et construit sans doute sous le règne de Claude, mesurait 707 mètres de longueur, de 3 à 4 de largeur et de 3 à 5 de hauteur. Le tunnel ouvert par Vespasien en 77 sur la via Flaminia, au défilé de Petra Pertusa, n'avait que 37 de longueur, mais de 4 à fi de largeur et de 4 à 5 de hauteur2. Pour compléter la description des voies romaines, il faut rappeler l'existence de marches de pierres disposées le long des trottoirs, pour permettre de monter aisément à cheval ou en char, et de bornes qui indiquaient de mille en mille pas le chiffre des distances ; l'emploi des unes et des autres avait été sinon inauguré, du moins généralisé en Italie par la lex Sempronia viaria de C. Gracchus en 133 av. J.-C. 3. Aux abords des villes, les routes étaient bordées à droite et à gauche de monuments funéraires de toute forme et de toute grandeur; la « voie des tombeaux » à Pompéi nous donne un spécimen très bien conservé de l'aspect qu'elles présentaient jadis (fig. 7432) '. Des arcs de triomphe [Allers], élevés souvent à l'endroit même oü la route entrait en ville', portaient des inscriptions en l'honneur des empereurs, des magistrats ou des simples particuliers qui avaient contribué à sa construction ou à sa réfection ; c'est ainsi que l'arc de Rimini rappelle les réparations de la via Flaminia par Auguste'. On rencontrait sur le parcours des voies romaines, en dehors des villes ou villages qu'elles desservaient, deux sortes de stations destinées à permettre aux voyageurs de s'arrêter et de se reposer; l'Itinéraire de Jérusalem les distingue nettement les unes des autres; c'étaient les mutationes ou relais, espacées en moyenne de 10 à 12 milles (15 à 18 kilomètres), et les mansiones 3 ou haltes pour la nuit, tous les 30 ou 40 milles (44 à 60 kilomètres). Administration. A l'époque républicaine, la construction et l'entretien des routes d'Italie étaient confiés, comme tout l'ensemble des travaux publics, aux cen leurs 9 [clnsoR]. La voie Appienne et peut-être:aussi la voie Flaminienne devaient leur nom aux censeurs qui les avaient tracées. Ces magistrats étaient libres d'ouvrir de nouvelles routes, dans la limite des crédits alloués par le Sénat à cet effet; ils procédaient à leur adjudication et à leur réception dans les formes ordinaires [LOCATIO]. Quand il n'y avait pas de censeurs en exercice, leurs attributions incombaient en général aux consuls ou, à leur défaut, au préteur urbain, ou même, sur désignation spéciale du Sénat, à des magistrats inférieurs, édiles ou questeurs 10. En fait, toutes les routes d'Italie qui ne sont pas l'oeuvre des censeurs sont dues à des consuls, aucune à un préteur 11 ; l'importance qu'elles avaient pour l'extension et le maintien de l'autorité de Rome explique les soins tout particuliers dont elles étaient l'objet de la part des plus hauts magistrats. Deux bornes milliaires de l'époque républicaine portent cependant des noms d'édiles 12. Pendant l'année 65 av. J.-C., 111inucius Thermus, alors préteur, fut en même temps curator viae Flaminiae i3, et Jules César, alors édile, semble avoir été pareillement curator viae Appiae74; il ne s'agissait pour l'un et l'autre que de veiller à la remise en état et à l'entretien de ces deux routes. Les titres de curator vus sternundis 16 et de curator viarum15 apparaissent dans les inscriptions au dernier siècle de la République pour désigner des fonctionnaires spécialement préposés à la voirie 17 ; rien n'indique qu'ils aient été affectés à telle ou telle route déterminée; l'un d'eux est appelé curator viarum e lege Visellia 13 ; nous ignorons ce qu'était cette lex Visellia qui l'avait institué. On connaît cependant plusieurs autres lois de l'époque républicaine qui traitaient de l'établissement et de l'aménagement des voies italiques, leges viariae ". La plus célèbre est la lex Sempronia, due à C. Gracchus pendant son tribunat20 ; il en a été question plus haut. La loi agraire de 111 rappelle que les viasii vicani, c'est-à-dire les citoyens auxquels des terres de l'ager publicus ont été concédées en bordure des voies romaines, sont obligés de les entretenir°'. En 50 le tribun L. Scribonius Curio proposa une loi qui rappelait, paraît-il, certaines dispositions de celle de Rullus 22; elle lui aurait confié pour cinq ans la charge de construire de nouvelles routes avec les ressources produites par une taxe sur les chars23; comme la loi de Rullus, elle ne fut pas adoptée. En province tout ce qui concernait les routes rentrait dans les attributions des gouverneurs20. L'administration de la voirie urbaine appartenait, à Rome, aux édiles curules et plébéiens, qui se répartissaient les divers quartiers de La ville à l'amiable ou par tirage au sort 2'S ; dans les municipes et les colonies, aux quattuorviri, duumviri et édiles locaux 26 VIA '7S8 VIA rAEDILTS]. Les frais d'entretien des rues incombaient aux riverains; en cas d'inexécution, les travaux étaient adjugés d'office par les édiles, aux frais des contrevenants'. Il n'était pas alloué de fonds aux édiles de Rome pour ouvrir des voies nouvelles ou entreprendre des travaux neufs; ils avaient seulement l'autorisation de faire servir à cet effet ce qui restait des amendes qu'ils avaient infligées, une fois l'entretien des rues payé, et les sommes qu'ils prélevaient spontanément sur leur fortune personnelle2. Ils veillaient à l'observation des règlements de police 3; la circulation des voitures n'était pas permise, en principe, entre le lever du soleil et la dixième heure [vrnlceLusr] 4. On trouve encore à Rouie, au-dessous des édiles et pour les seconder, des IV viri vus in orbe purgandis dont le jurisconsulte Pomponius place la création un peu après celle du préteur pérégrin, c'est-à-dire dans la seconde moitié du 111e siècle av. J.-C.', et des II viri vus extra urbem purgandis 7 ;ces derniers exerçaient leurs fonctions dans un rayon de mille pas hors de la ville, ubi continente habitabitur. Peut-être les deux viocuri dont parle Varron, et qui avaient donné leur nom aux clivi Pullius et Cosconius S, étaient-ils en réalité des IV viri vus in urbepurgandis. Auguste, qui s'était chargé dès l'an 27 av. J.-C. de remettre en état à ses frais les grandes voies d'Italie reçut du Sénat, en l'an 20, la mission de pourvoir désormais à leur entretien aux lieu et place des censeurs abolis 10. Il délégua ses attributions sur ce point à des magistrats appelés, comme ceux qu'on rencontre tardivement sous la République, curatores viarum ". La cura viarum est la plus ancienne des curatelles impériales extra urbem et elle resta jusqu'au Ive siècle l'une des plus importantes. Nous connaissons le nom et la carrière d'un certain nombre de ces curatores n, Sept portent simplement le titre général de curator viarumi3; tous les autres sont dits curateurs d'une ou de plusieurs voies nommément désignées. Mommsen croit que l'institution de ces derniers doit remonter au règne même d'Auguste et que chaque grande voie italique était dès lors attribuée à un fonctionnaire particulier; les curatores viarum, sans spécification, que l'on rencontre à cette époque ", seraient des magistrats extraordinaires, char gés des environs immédiats de Rome 1°. Mais M. Hirschfeld fait observer que le premier curator déterminé, dont il soit question dans les inscriptions, est un curator viarum Labicanae et Latinae, contemporain'de Tibère f6, et encore n'était-il que de rang équestre; le premier de rang prétorien, un curator vine Aemiliae, n'apparaît que sous le règne de Néron Il résulte cependant d'un passage de l'Apoltololsgntose qu'il existait un curator viae Appiae au temps de Claude"; peut-être est-ce à ce dernier empereur qu'on doit l'organisation définitive de la curatelle; on est tenté de la rapporter à l'époque où Claude fit revivre, pour l'exercer lui-même, l'ancienne censure républicaine des routes; en tout cas il semble qu'au début les curatores viarum, sans spécification, existaient seuls et que leur compétence s'étendait à toutes les voies19. Il ressort des inscriptions qu'à partir, tout au moins, du règne de Néron les principales routes, qui allaient de Rome aux frontières d'Italie, étaient administrées par des curateurs de rang sénatorial, ayant exercé au préalable la préture, assistés de subcuratores20 et parfois aussi de tabularii 21, affranchis impériaux chargés sans doute de la comptabilité des fonds venant des empereurs; quelques autres, moins importantes, par des curateurs de rang équestre 22. Ces fonctionnaires étaient nommés par l'empereur et responsables devant luit'. Ils affermaient les travaux d'entretien et en surveillaient l'exécution'', autorisaient des travaux nouveaux sur le sol de la voie publique2', faisaient supprimer ceux qu'on y avait exécutés sans autorisation 26 L'argent nécessaire leur était fourni en principe par l'aerarium 27; en réalité, c'étaient surtout les subventions des empereurs23, sous forme de versements du fiscus à l'aerarium 29, qui faisaient les frais des grandes voies italiques; les contributions des villes et des possessores riverains s'y ajoutaient30. Deux inscriptions nous apprennent que, pour réparer la via Appia auprès d'Aeclanum, sur une longueur de 15.750 pas, Hadrien avait donné 1.1b7.000 sesterces et les possessores 569.10071; c'est l'unique indication numérique que nous possédions sur le coût des travaux et encore est-elle peu explicite, puisqu'il s'agit d'une simple réfection et que la largeur do la voie n'est pas mentionnée. Au IIe siècle, VIA 189 VIA le rôle financier des curatores viarum prit une extension nouvelle. C'est à eux que fut confiée, dans la plupart des cas, la surveillance de magistrats municipaux qui géraient les fondations alimentaires instituées par Nerva 1 [ALIIIExTARIl PUERI]. On rencontre à cette époque des personnages qui portent le double titre de curator vine, praefectus alimentorum2; curator viae et praefectus alimentorum 9 ; curator vice et alimentoruin' ; l'auteur de la Vie de Marc Aurèle dans l'Histoire Auguste va même jusqu'à employer l'expression de curatores viarum et regionum 5, tant était grande l'influence que donnait aux curateurs l'administration des districts alimentaires, dont la répartition territoriale était fondée sur les divisions résultant du tracé des grandes voies. Cependant la cura viarum et la praefectura alimentorum constituaient théoriquement deux fonctions distinctes 6, et il y a des praefecti alimentorum qui n'étaient pas en même temps curatores viarum 7. Les curatores viarum existaient encore sous le règne de Constantin 3 ; il n'en est plus question dans la Notitia dignitatum; le soin des routes appartient alors en Italie, comme dans les provinces, aux gouverneurs. La création des curatores viarum, dont l'autorité s'étendait jusqu'aux portes de Rome, avait entraîné la suppression des II viri vils extra urbem purgandis, peut-être dès l'an 20 av. .1.-C., en tout cas antérieurement à l'année 13 9. Au contraire, les IV viri vus in urbe purgandis de l'époque républicaine furent maintenus et continuèrent à assumer l'entretien des voies de la capitale, concurremment avec les édiles 10 et sous leur surveillance; les inscriptions les appellent habituellement IV viri viarum curandarum'1; leurs fonctions faisaient partie du vigintivirat; elles rentraient parmi celles dont il fallait avoir exercé l'une ou l'autre avant de briguer la questure12. D'après Suétone, Claude déchargea les questeurs du soin de pourvoir aux frais du pavement des voies, stratura viarum13. M. Ilirschfeld suppose avec raison que ces mots concernent le pavement des rues de Rome, dont les dépenses incombèrent désormais au fscus en même temps qu'aux riverains'`. Une inscription loue Vespasien d'avoir remis en état toutes ces rues, que ses prédécesseurs avaient négligées'". On trouve par ailleurs la mention d'un procurator ad silices sous Antonin le Pieux16, d'un procurator regionum urbicarum, contemporain de Commode, auquel on avait donné la mission de repaver les deux tiers des rues de Rome", enfin d'un procurator silicum viarum sacrae urbis sous Septime Sévère ou un peu plus tard'1. A la même époque paraît un procurator viarum urbis" , de rang équestre, qui seconde les édiles et les IV viri viarum curandarum. L'institution des curatores regionum par Sévère Alexandre 2p entraîna le déclin, puis la disparition de tous ces fonctionnaires. Sous le Bas-Empire le soin des rues de Rome concerne désormais le préfet de la ville, assisté des curatores regionum, des vicomagistri et du curator operum publicorum; à Constantinople existe aussi un praefectus urbi, investi des mêmes attributions que son collègue de Rome. Dans toutes les cités d'Italie et de province l'administration de la voirie, c'est-à-dire à la fois des rues de ville et des chemins de la campagne (vice vicinales), resta confiée sous l'Empire aux magistrats locaux. Ceux-ci l'indiquent quelquefois dans leur titre même et l'on relève dans les inscriptions la mention de quattuorviri viarum curandarum2l et d'un duumvir curator viarum sternundaruln 22 ; d'ailleurs les décurions pouvaient désigner au besoin des curateurs spéciaux pour s'occuper de ces matières23. D'autres textes épigraphiques signalent des travaux de voirie exécutés par des duumvirs24 ou des édiles25. Les frais retombaient sur les possessores voisins26; on pouvait y faire face aussi à l'aide de taxes de péage 27; dans certains cas les magistrats eux-mêmes28, des corporations sacerdotales29 ou de simples particuliers U0 les prenaient à leur compte. Quant aux grandes routes provinciales, leur construction et leur entretien continuaient à faire partie des attributions des gouverneurs31. Les empereurs intervenaient parfois pour subvenir à l'établissement ou aux réparations de ces voies comme de celles d'Italie32. Mais le plus souvent les dépenses étaient couvertes exclusivement par les impôts que payaient les provinciaux33 On avait recours, pour qu'elles fussent moins élevées, à la main-d'oeuvre pénale3'° [opus 1UBLICUM] ou militaire La police des rues et routes était réglementée par des édits émanant des différents magistrats dont relevait la voirie urbaine, italique ou provinciale". Il n'était pas permis d'encombrer les voies en y déposant des meubles 36 ; les foulons ne pouvaient y suspendre des vêtements à sécher, de manière à gêner le passage 37 ; depuis le règne d'Hadrien, les véhicules chargés de lourds. fardeaux n'avaient plus le droit de circuler dans la ville-de Home [VEAICULUM] 38. L'édit du préteur contenait un certain nombre de dispositions relatives à cette matière : défense VIA 790 VIA de rien faire ou déposer sur les voies qui pût nuire à leur libre usage'; pour les propriétaires d'objets ou de constructions susceptibles de détériorer les voies, obligation de les enlever 2; quiconque était troublé dans l'usage d'un chemin public obtenait un interdit spécial' ; un autre interdit défendait de molester quiconque rétablissait un chemin dans ses anciennes dimensions ou le réparait sans lui causer de dommages La connaissance des procès occasionnés par l'application des réglements de voi rie était dévolue naturellement, à Rome, au préteur ou au préfet de la ville ; en Italie, aux curatores viarum et plus tard aux gouverneurs; dans les provinces, aux gouverneurs; dans les villes, aux magistrats municipaux. A l'époque du Bas-Empire l'obligation pour les riverains d'assurer l'entretien des rues et routes est fréquemment rappelée dans les lois et constitutions impériales; un titre spécial du Code Tltéodosien s'y rapporte : ce n'est pas un sordidum Inunus et nul n'en doit être exempté 5. Le réseau des voies romaines; cartes et routiers.-Les voies romaines à l'époque impériale formaient un vaste réseau continu, dont la capitale de l'Empire était le centre (fig. 71i33, 7434 et suiv.). On pouvait se rendre par terre et sans interruption depuis Rome jusqu'aux colonnes d'Hercule, à la pointe occidentale de l'Armorique, à l'embouchure du Rhin, à l'embouchure du Danube, à Byzance, à Athènes. Au delà du fretum Gallicum, les routes de Bretagne faisaient suite à celles de Gaule ; au delà du Bosphore, les routes d'Asie mineure faisaient suite à celles de Thrace et se prolongeaient d'un côté jusqu'à Ninive et Babylone, de l'autre jusqu'au Nil. Du Nil à l'Atlantique courait la voie littorale de l'Afrique du Nord, sur laquelle s'amorçaient les voies de l'intérieur de l'Égypte, de la Proconsulaire, de la Numidie et des Mauritanies ; à Alexandrie, elle se soudait à la route d'Asie; de Carthage à Lilybée et de Tingis à Gadès, pour rejoindre l'extrémité des routes italiennes et espagnoles, le trajet par mer était court et facile. Dans chaque région un grand nombre de chemins secondaires se détachaient, dans tous les sens, des artères principales et desservaient les localités importantes. Nulle part il n'y avait de coupure infranchissable ni de lacune. Ce système si complet et si bien compris permettait de pourvoir à la défense des frontières, assurait la bonne administration des provinces, facilitait les voyages et les échanges commerciaux entre les contrées les plus éloignées' [sur le service de la poste impériale, voir l'article cuasus PUBLICUS]. Il fait grand honneur au génie pratique des Romains. C'est en milles que les distances inscrites sur les bornes comptées partout, sauf dans la Gaule, où, depuis le règne de Septime Sévère, on les indiquait en lieues, leugae 7. En Italie, la numérotation des milles avait pour point de départ Rome elle-même 3 et les distances locales n'étaient marquées dans les inscriptions des bornes que rarement, à titre accessoires. On comprend que dans les provinces il n'ait pas été possible d'adopter ce mode de supputation. Seuls deux milliaires du règne d'Auguste, à l'extrémité occidentale de la Narbonnaise, ajoutent aux chiffres locaux celui de l'éloignement de Rome10. En général, les milles sur les routes provinciales étaientnumérotés d'une ville à l'autre. Dans certains cas une cité particulièrement importante était prise comme tête de ligne, capta viarum, et toutes les données numériques d'une ou de plusieurs routes, jusqu'à une grande distance, étaient calculées par rapport à elle; il en était ainsi, par exemple, pour Lyon en Gaule, pour Éphèse en Asie, pour Cartilage en Afrique". La plupart des bornes ne portaient qu'un chiffre indiquant l'éloignement de la ville à partir de laquelle la voie avait été tracée; quelquesunes cependant faisaient savoir à combien de milles on se trouvait de chacune des deux extrémités de la route". D'autres portaient troisi3 et même cing14 chiffres, calculés d'après l'éloignement des principales villes de la région. Les milliaires retrouvés sur le lieu même ou dans le voisinage de leur emplacement primitif sont ✓ //Jasa conà c'est e ro u VIA 792 VIA l'une des sources les plus sûres dont nous disposions pour la connaissance du réseau routier (fig. 7436). On en possède actuellernent près de 4.000, dont un tiers pour la seule Afrique du Nord et 600 environ pour l'Italie (400 dans l'Italie méridionale, 100 en Sardaigne, aucun en Corse ni en Sicile)'. De bonne heure on avait centralisé tous les renseignements relatifs à la viabilité du monde romain. Dès le principat d'Auguste la carte générale de l'Empire, dressée par les soins d'Agrippa et exposée sous le portique de Poila 2, donnait l'image du parcours desroutesprincipales; les légendes qui l'accompagnaient devaient contenir des indications sur les distances3. Pline a fait grand usage de ce monument dans les parties géographiques de son histoire Naturelle. L'Itinéraire d'Antonin et la Table de Peutinger, que nous possédons, en dérivent indirectement. L'Itinéraire d'Antoninest un routier oulivret deposte, donnant pour toutes les provinces la liste des grandes voies, avec le nom des stations qu'on y rencontrait et les distances calculées en milles au total 372 voies sur un développement de 53.638 milles t ; il est complété par l'Itinéraire maritime qui décrit les côtes et les trajets de mer, et par l'Itinéraire de Bordeaux à Jérusalem et d'Iléraclée à Milan, par Aulona et Rome, rédigé en 333 à l'usage des voyageurs chrétiens qui se rendaient en pèlerinage aux Lieux Saints'. Les erreurs, les répétitions et les omissions de l'Itinéraire d'Antonin font supposer à M. Kubitschek qu'il est, non pas, comme on le croit d'ordinaire, un document original et officiel, mais un remaniement tardif d'une oeuvre plus ancienne, dont se sont inspirés également les auteurs de la Table de Peutinger et la Cosmographe anonyme de Ravenne ; il serait fait d'après une carte analogue à celle du portique de Poila, qu'on aurait établie sur l'ordre d'un empereur Antonin, sans doute Caracalla'. M. Elter s'applique à disculper l'Itinéraire d'Antonin des reproches d'insuffisance ou d'inexactitude que lui adresse M. Kubitschek et voit en lui, comme dans l'Itinéraire de Jérusalem et même dans la Table de Peutinger, un guide à l'usage des pèlerins du Ive siècle; il aurait été rédigé à Milan d'après un routier général plus ancien et un certain nombre d'itinéraires particuliers; peut-être son auteur a-t-il utilisé aussi la Géographie de Ptolémée7. La Table de Peutinger, ainsi appelée du nom de l'archéologue Conrad Peutinger d'Augsbourg, à qui l'avait léguée Conrad Celtes qui l'avait découverte en 1507, estaujourd'hui servée Vienne ; moins une carte véritable, car elle ne tient pas compte des longitudes et latitudes, qu'une représentation picturale' (fig. 7435) de l'Europe romaine, de l'Afrique septentrionale et de l'Asie antérieure jusqu'à la limite des conquêtes d'Alexandre, destinée avant tout à renseigner les voyageurs ; l'une des douze feuilles dont elle se composait, contenant l'extrémité occidentale du tableau, n'existe plus 0. Elle n'est qu'une copie, faite au mir siècle, d'un original exécuté au Ive (entre septembre 365 et mai 366, d'après K. Miller) 10 ; on admet d'ordinaire que cet original lui-même aurait eu pour base le routier officiel du temps des Antonins; M. CunLz ne le croit pas et le rattache plutôt aux caries de Ptolémée". Afin d'expliquer les erreurs qu'on remarque dans la Table, M. Schweder s'est efforcé de démontrer que, sur les originaux dont elle dépend, on n'avait voulu marquer que la direction des voies, avec les noms des stations et les chiffres des distances, sans prétendre figurer leur parcours exact'. M. Gross la Compare dans le détail à l'o=uvre anonyme du Cosmographe de Ravenne et recherche dans quel rapport elle se trouve avec ses sources immédiates ou lointaines, en particulier avec la carte d'Agrippai . VIA 793 VIA Quelques inscriptions renferment des listes de stations analogues à celles des Itinéraires, avec lesquelles il est intéressant de les comparer. On a découvert à Vicarello, en Étrurie, quatre gobelets d'argent portant gravés sur leurs flancs tous les noms des localités que l'on traversait pour se rendre de Gadès à Rome; ce sont des ex-voto offerts à une divinité thermale par des Espagnols reconnaissants Un texte mutilé d'Autun énumère les voies qui rayonnaient autour d'Auxerre (fig. 7436) 2. Sur les trois faces conservées d'un cippe octogonal de Tongres sont décrites les routes de Cologne à Strasbourg, de Reims à Amiens, de Cassel à l'extrémité de la cité des Atrébates 3. Ajoutons enfin que dans bien des cas, ainsi que M. von Domaszewski l'a prouvé, l'examen des inscriptions relatives aux postes de beneficiarii situés sur le parcours des voies, et particulièrement aux carrefours, nous donne d'utiles indications *. A l'aide de tous ces éléments d'information et des vestiges encore visibles d'anciens chemins romains, on peut reconstituer la carte routière de l'Empire 3. Il est nécessaire d'observer que la conservation et la découverte des bornes milliaires dépendent de circonstances trop accidentelles pour que leur plus ou moins grande fréquence soit justement proportionnée, dans chaque région, au développement plus ou moins avancé de la voirie; l'Italie nous en a rendu beaucoup moins que l'Afrique et pourtant elle était à coup sûr mieux pourvue de routes. On ne doit pas oublier, d'autre part, que les Itinéraires d'Antonin et de ,Jérusalem et la Table de Peutinger datent d'une époque assez basse et sont incomplets et fautifs. Le plus sûr moyen de retrouver le parcours véritable des anciennes voies romaines, c'est de suivre attentivement leurs traces sur le terrain même ; beaucoup d'entre elles, que les Itinéraires passent sous silence et d'où ne provient aucun milliaire, ne sont connues que par leurs ruines. Il s'en faut que dès à présent le relevé de ces ruines ait été fait partout avec Ix. une précision suffisante. On en sait assez cependant pour constater que non pas seulement en Gaule, mais dans tout le monde romain, les grandes lignes de communication établies sous l'Empire n'ont guère varié depuis, malgré tant de si.ècles écoulés 0. Le réseau des temps chrétiens ressemble de près à celui des routes romaines 7; le canevas des routes modernes reproduit bien souvent un dessin analogue 8 ; « les chemins de fer eux-mêmes, si indépendants qu'ils paraissent des habitudes latines, ont dû parfois les respecter 9 ». C'est que les Romains avaient conformé leurs voies aux lignes fondamentales des régions qu'elles traversaient10; aussi sont-elles vraiment éternelles, par la permanence nécessaire de leurs directions comme par la solidité inébranlable de leurs assises. Les routes d'Italie "(fig. 7437). Le réseau routier de l'Italie romaine date presque tout entier de la République. Commencé par la construction de la via Appia en 312, il paraît s'être développé surtout au ne siècle avant J.-C. la lex Sempronia viaria de 123 marque un moment décisif de son histoire. Vinrent ensuite les grands travaux de restauration de César et d'Auguste et les créations nouvelles de quelques empereurs, tels que Claude, Domitien, Trajan et Septime Sévère 12. Beaucoup de ces voies italiennes portaient des noms spéciaux, tirés presque toujours soit des villes vers lesquelles elles se dirigeaient au départ de Rome (via Labicana, par exemple), ou des pays qu'elles desservaient (via Latina), soit des censeurs (via Appia), des consuls (via Aemilia) ou des empereurs (via Domitiana) qui les avaient établies. La disposition générale du réseau était très simple et très logique. Elle ressemble, dans ses lignes essentielles, au tracé actuel des voies ferrées; il ne faut pas s'en étonner : à la fin du xixe siècle, dans la péninsule de nouveau unifiée, s'est fait sentir nécessairement l'influence des mêmes conditions géographiques et politiques qu'aux nie et ne siècles avant notre ère. Deux préoccupations dominantes ont inspiré les Romains d'autrefois, comme aussi leurs modernes successeurs rattacher Rome capitale à toutes les parties de l'Italie assurer d'autre part la continuité des communications entre les frontières extrêmes et les versants opposés de cette bande territoriale qui s'allonge du Nord au Sud, sur une médiocre largeur, entre deux mers et des deux côtés de l'arête Apennine 13 Des routes multiples rayonnaient en tous sens autour 100 Ve/didena VIA VIA de Rome ' ; au Ive ap. J.-C. vingt-neuf, d'après la ~ de l'enceinte d'Aurélien. C'est ;aux abords de ces Notitia regionutn Urbis, sortaient des quinze portes routes, entre l'enceinte d'Aurélien et le me mille, VIA 795 VIA que les catacombes chrétiennes ont été creusées 1. Les trois principales des voies partant de Rome s'orientaient hardiment vers le Sud-Est, le Nord-Est et le Nord-Ouest et reliaient le Latium à Brindisi, le grand port d'embarquement vers la Grèce et l'Orient, à la riche plaine du Pô, point de départ des chemins alpestres vers l'Europe centrale, à la Corniche ligure, d'où l'on gagnait aisément la Gaule et l'Espagne. La via Appia 2, la plus ancienne et la plus illustre de toutes, regina viarum, comme l'appelle Stace fut construite de Rome à Capoue (132 milles) par Appius Claudius Caecus, pendant sa censure en 3124, et prolongée ensuite jusqu'à Bénévent et Brindisi. Son plus ancien milliaire conservé remonte à la première guerre punique'. César pendant sa jeunesse la répara à ses frais o. Elle franchissait l'enceinte de Servius à la porta Capena, l'enceinte d'Aurélien à la porta Appia (aujourd'hui Porta San Sebastiano) et se dirigeait en droite ligne vers Terracine par Bovillae et Aricia, sur le versant Sud-Ouest des ]ponts Albains, et par les Marais Pontins, puis elle faisait un crochet au Nord-Est pour desservir F'undi, rejoignait le littoral à Formiae, le suivait de Formiae à Sinuessa et de nouveau l'abandonnait pour atteindre Capoue par Casilinum. Jusqu'au ve mille elle était bordée de très nombreux monuments funéraires [sEPCLCRC1ll, p. 12331, qui subsistent en partie; plusieurs d'entre eux, comme le mausolée de Caecilia Metella (fig. 6341), furent transformés en forteresses au moyen âge. Elle a été déblayée jusqu'au me mille en 1830-1833 etl'on apu constater par des fouilles la superposition régulière des quatre assises qui la constituaient. La traversée des Marais Pontins, en chaussée surélevée, exigea de colis toux travaux et de fréquentes restaurations; de Tripontium à Terracine, sur une longueur de dix-neuf milles (decennovium) 7, un canal navigable longeait la route ; au début de l'Empire, pendant certaines saisons, le trajet était plus facile par eau que par terre g. Trajan le premier fit daller cette partie de la chaussée, en 107 ap. J.-C. Théodoric s'occupa encore de la remettre en état10 La via Flaminia", de Rome à Rimini (212 milles) est l'oeuvre de C. Flaminius, censeur en 22012. Il n'en reste aucun milliaire de l'époque républicaine ; le plus ancien date seulement de 124 ap. J.-C. 13. Peut-être C. Grachus l'a-t-il réparée; on lui doit en tout cas la fondation de la ville de Forum Sempronii sur son parcours. Auguste, en 27 av. J.-C., la restaura tout entière'. Elle sortait de l'enceinte de Servius par la porta Fontinalis, entre le Capitole et le Quirinal, traversait le Champ de Mars, sous le nom de via Lata, en suivant le trajet du Corso actuel, sortait de l'enceinte d'Aurélien par la porta Flaminia (aujourd'hui Porta delPopolo), franchissait le Tibre au me mille sur le pont Mulvius, remontait la rive drt ite jusqu'à Saxa Rubra1", traversait l'extrémité Sud-Est de l'Étrurie, puis l'Ombrie tout entière du Sud au Nord. Elle allait d'abord directement de Narnia à Mevania 1G; sous l'Empire, on la fit passer plus à l'Est, par Interamnia et Spoletium, pour rejoindre son ancien tracé à Forum Flaminii 17. L'Apennin était franchi au seuil de Scheggia (station d'Ad Aesim), auprès duquel s'élevait un temple de J upiter Apenninus 1s. Un peu plus loin on rencontrait le défilé de Petra Pertusa et le tunnel percé par Vespasien f0. La route atteignait l'Adriatique à Fanum Fortunae et la longeait jusqu'à Rimini. Comme la via Appia, elle fut entretenue et réparée par les rois goths 20. La via Aurelia 21 de Rome à Vada Volaterrana (189 milles), continuée de Vada Volaterrana à Vada Sabatia par la via Aemilia Scauri", et de Vada Sabatia au Var par une section de la via Julia Augusta23, est plus récente et parait dater seulement du premier quart du 11e siècle av. J.-C. (1' Aemilia Scauri fut construite en 109, la Julia Augusta en 12); il est probable qu'au début elle s'arrêtait à Cosa, point terminus de la via Clodia, qui lui est antérieure. On distinguait la via Aurelia velus, venue du Janicule, et la via Aurelia nova, venue du Vatican; après leur jonction, à l'Ouest de Rome, la route, par Lorium, gagnait la côte qu'elle ne quittait plus; elle ne faisait aucun détour pour toucher aux vieilles cités de l'Étrurie méridionale, Caere ou Tarquinii; a dès l'origine, les Romains l'ont conçue comme une voie de pénétration et ils n'ont suivi qu'un principe : couper au plus court". » Le nom de via Aurelia fut étendu sous l'Empire à tout l'ensemble des roules en bordure de la mer Tyrrhénienne jusqu'aux Alpes maritimes 23 et même jusqu'à Arles2e. D'autres voies mettaient Rome en relations non plus VIA une route littorale reliait Fanum Fortunae, point où la via Flaminia atteignait la mer, Ancône, Catellum Firmamum, Truentum, Castrum Novum et Aternum t4. Les viae Clodia et Cassia'6 jouaient en Étrurie le même rôle que la via Salaria en Picenum et que la via Flaminia en Ombrie. La via Clodia, construite probablement à la fin du iv' siècle av. J.-C., se détachait de la via Flaminia un peu après le pont Mulvius et, par Careiae, Forum Clodii, Saturnia, elle aboutissait sur la côte de la mer Tyrrhénienne, à Cosa, où plus tard la via Aurelia vint la rejoindre, avec embranchement de Saturnia à Populonia. La via Gassia, construite dans la seconde moitié du in' siècle, se détachait de la via Clodia avant Careiae16 et gagnait Florence par Sutrium, Volsinii, Chiusi, Cortone et Arezzo" ; elle se prolongeait de Florence jusqu'à la rencontre de la via Aurelia par deux routes, dont l'une aboutissait à Pise 18 et l'autre passait par Pistoie et Lucques 30 ; sur la via Cassis s'amorçait, un peu avant Sutrium, une route parallèle à la via Flaminia, qui, par Ameria20 et Tuder, gagnait Pérouse, reliée elle-même à Chiusi 21. D'autres voies enfin, les plus nombreuses, rattachaient simplement Rome aux différentes cités de sa banlieue. Telles étaient les viae Labicana 22 (qui se confondait avec la via Latina à partir de Compitum et d'où se détachait sur la droite la via Tusculana) n, Praenestina 24 (appelée via Gabina 23 dans la première partie de son parcours ; elle aboutissait, elle aussi, à la via Latina ; la via Collatina 26 s'en détachait sur la gauche), Somentana 27 (qui tombait dans la via Salaria à Erelum), Portuensis 2s (avec la via Campana 2°, qui la doublait entre le ter et le xie mille, en suivant de plus près le cours inférieur du Tibre), Ostiensis 30 (sur laquelle, à gauche, s'embranchait la via Laurentina 31), Ardeatina 32. Quelques voies secondaires ou transversales, comme les vicie Asinaria ''«qui sortait de la porte du VIA 796 avec les extrémités de la péninsule, mais avec les contrées voisines, et desservaient l'Italie centrale. La via Latina', dont le tracé primitif doit remonter à une époque reculée, se détachait de la via Appia au Sud de la porta Capena, pour franchir le mur d'Aurélien à la porta Latina et gagner la Campanie en traversant tout le Latium par la vallée du Trerus et du Liris, au NordEst des monts Albains et des monts des Volsques ; elle envoyait, de Teanum Sidicinum à Minturnes, un embranchement vers la via Appia 2, qu'elle rejoignait elle-même à Casilinum.La via Tiburtina 3, qui sortait du mur de Servius à la porta Esquilina, du mur d'Aurélien à la porta Tiburtina, et qui passait l'Anio au Ponte Mammolo, était continuée de Tibur à Cerfennia par la via Valeria 4, de l'époque républicaine (on l'attribue à M. Valerius Messala, censeur en 154 av. J.-C.), et de Cerfennia à Aternum par la via Claudia Valeria 3, oeuvre de l'empereur Claude en 48-49 ap. J.-C. ; celle-ci traversait l'Apennin au défilé de Forca Carusa (Mons Inaeus) et descendait ensuite la vallée inférieure de l'Aternus ; ainsi Rome communiquait avec les pays des Eques, des Marses, des Péligniens, des Marrucins et l'Adriatique. De même la via Salaria 6, qui s'arrêtait à Rieti dans le pays des Sabins sous la République', fut prolongée par Auguste en 17-16 av. J.-C. à travers le Picenum, jusqu'à Truentum sur l'Adriatique, par la vallée du Truentus et Asculum ; sur elle s'embranchait la via Caeciliae, qui aboutissait au bord de la mer à Castrum Novum et que rejoignait à Foruli, près d'Amiternum, la via Claudia novae, venue, par la vallée supérieure de l'Aternus, de la via Claudia Valeria et due comme elle à l'empereur Claude i° ; deux autres embranchements allaient, l'un d'Asculum à Firmum ", l'autre d'Asculum à Ancône f2, rejoint à Urbs Salvia par une route transversale qui se détachait de la via Flaminia à Nuceria CarnellariaS3 ; VIA 797 uIA même nom, coupait les viae Latina et Appia et rejoignait la via Ardeatina au me mille), Triumphalis' (partie du pons Neronianus et tombant dans la via Clodia entre le vme et le lxe mille), Cornelia 2 (qui se détachait de la via Aurelia nova sur la droite et allait à Caere), Vitellia «reliant la via Aurelia velus à l'embouchure du Tibre), Severiana 4 (suivant la côte, d'Ostie à Antium, où aboutissait d'autre part un chemin venu de Bovillae sur la via Appia, et de là à Terracine), Sublacensis «construite par Néron dans la vallée de l'Anio, entre la via Valeria et sa villa de Sublaqueum), cornplétaient le réseau routier du Latium 6. La plus importante des routes qui ne partaient pas de Rome était la via Aemilia 7, continuation de la via Flaminia et artère maîtresse de l'Italie septentrionale'. Elle avait été tracée par M. Aemilius Lepidus, consul en 187 av. J.-C. 0, dont on lit le nom sur trois milliaires 10. Elle courait en ligne droite au pied de l'Apennin, de Rimini à Plaisance (168 milles) ; trois routes traversaient la montagne pour la relier au versant de lamer Tyrrhénienne, la première de Faenza à Florence ", la seconde de Parme à Lucques 12, la troisième de Parme à Luna 13. La via Aemilia rencontrait à Plaisance la via Postumia 14, conduite de Gênes à Dertona et de Dertona à Crémone par Sp. Postumius, consul en 148, et poussée dans la suite de Crémone à Aquilée 15 par Vérone ", Vicence, Padoue, Altinum et Concordia. D'autre part la via Popillia 17, due à P. Popillius, consul en 132, dont il reste un milliaire 18, longeait les lagunes du littoral, de Rimini à IIatria ; elle fut prolongée plus tard jusqu'à Altinum. Tout le triangle Itimini-Plaisance-Aquilée, entre les viae Aemilia et Postumia et l'Adriatique, était sillonné de routes : de Bologne à Padoue par Ferrare, de Modène à Vérone par Elostilia, de Parrne à Mantoue, etc.19. C'est par la Vénétie que l'Italie communiquait avec les provinces danubiennes. La via Flavia 20, con struite par Vespasien en 78-79 ap. J.-C. 21, suivait la côte d'Aquilée à Pola, puis de Pola à Tarsatica en Dalmatie, tandis qu'un chemin plus direct coupait la péninsule d'Ilistrie, de Tergeste à Tarsatica 22. La route d'Aquilée à Emona en Pannonie franchissait l'Alpis Julia près de Nauportus 23. Deux autres conduisaient d'Aquilée en Norique à travers les Alpes Carniques, la première par le col de Tarvis et Virunum 24, la seconde par Julium Carnicum et Aguontum 23. Quatre autres franchissaien les Alpes Rétiques : l'une allait de Vérone à Trente, suivait la vallée de l'Isarus et gagnait Veldidena (Innsbruck) par le col du Brenner 26 ; une autre, construite par Drusus l'aîné en 15 av. J.-C., à la suite de ses victoires sur les Rètes, et appelée via Claudia Augusta par l'empereur Claude 27, partait d'Altinum 28, rejoignait la précédente à Trente, la quittait au pons Drusi, remontait la haute vallée 29 de l'Adige et descendait celle de l'Inn jusqu'à Valdidena ; les deux dernières, reliées à la via Postumia par la route des lacs (Vérone-Brescia-Bergame-Côlne) 30, allaient de Chiavenna à Coire, la plus orientale par le col de la Maloggia 31, la plus occidentale par le col du Splügen 32. Autour de Milan, rattachée par Laus Pompeia n à Plaisance 34, point terminus de la via Aemilia, rayonnaient les voies de la Transpadane vers Bergame 3à, Côme 36, Aoste, par Novare et Eporedia 37, Turin par Ticinum et Laumellum 38. Trois routes franchissaient les Alpes occidentales 39. Deux d'entre elles partaient d'Aoste 40. La première passait par l'Alpis Poenina (Grand Saint-Bernard) 41 ; elle suivait le trajet d'un très ancien chemin d'invasion, utilisé peut-être par les Boïens et les Lingons à la fin du ve siècle av. J.-C. et en sens inverse par Galba, lieutenant de César, en 57 42 mais il ne semble pas qu'elle ait été rendue carrossable avant le premier siècle de l'Empire 43 ; un temple de Jupiter Poeninus s'élevait au point culminant du col de là on descendait sur le Rhône à Martigny. La seconde VIA 798 VIA passait par l'Alpis Graia (Petit Saint-Bernard) 1 et gagnait Moutiers en Tarentaise par la vallée de l'Isère ; c'était la plus fréquentée à l'époque républicaine. La troisième partait de Turin 2 et se dirigeait vers la Durance et.Briançon par Suse et l'Alpis Cottia (col du Mont Genèvre) ; elle ne fut aménagée qu'au temps d'Auguste, par le roi Cottius ; c'était de beaucoup la plus fréquentée sous l'Empire. En Ligurie, la via Julia Augusta', de Plaisance au Var, datant de l'an 12 av. J.-C., empruntait jusqu'à Dertona le tracé de l'ancienne via Postumia; puis, tandis que celle-ci allait rejoindre à Gênes la via Aemilia Scauri, continuation de la via Aurelia, elle passait plus à l'Ouest, atteignait le littoral à Vada Sabatia et le longeait désormais en contournant les Alpes Maritimes, par le chemin que, d'après la légende, Hercule avait jadis suivi r, ; sur la route même, au-dessus de Monaco, le trophée d'Auguste (fig. 7122 rappelait les victoires remportées sur les peuples alpestres au début de l'Empire 6. De la via Julia Augusta se détachaient : sur la droite à Dertona la via Fulvia qui allait à Turin par Horta, et aux Aquae Statiellae une autre route qui aboutissait aussi à Turin par Alba Pompeia et Pollentia 8. Dans l'Italie méridionale l'artère maîtresse était la via Appia 9, de Capoue à Bénévent par Caudium, de Bénévent à Tarente par Venouse et l'intérieur de l'Apulie, de Tarente à Brindisi en coupant diagonalement la Calabre. Sur tout son parcours d'autres voies venaient s'y embrancher. C'étaient, à Capoue même, au Nord, la route de Caiatia et Telesia10 ; au Sud, une route qui bifurquait d'un côté vers Cumes et de l'autre vers Pouzzoles" ,; la route de Naples par Abella 12. La via Domitiana 13, le long de la mer, construite par Domitien de Sinuessa à Cumes, se continuait au delà de Sorrente jusqu'au promuntoriztnt ,llinervae 14; entre Pouzzoles et Naples elle passait en tunnel sous le Pausilippe et elle était doublée en arrière par une autre voie dont le parcours comportait également un tunnel15. Sur la via Appia, un peu après Capoue, s'amorcait la via Popillia 16 ; elle était due, comme la route du même nom de l'Italie septentrionale, à P. Popillius, consul en 132 av. J.-C., dont il reste une inscription donnant la liste des stations principales et de leurs distances de Capoue à Reggio (au total, 321 milles t7); elle desservait la Campanie du Sud, la Lucanie, le pays des Bruttii, par les vallées du Tanager, du Sybaris et du Crathis, et avait une très grande importance pour les relations avec la Sicile et l'Afrique ; des embranchements allaient de Nuceria à Pompei f8 et à Stabies 19, de Salerne à Paestum, Velia et Buxentum, retombant sur la via Popillia à Caesariana20. De Bénévent partaient : une route qui remontait la vallée du Calor et, par Telesia et Allifae, rejoignait la via Latina à Teanum Sidicinum 21; une route qui traversait tout l'intérieur du Samnium, par Saepinum, Aesernia22, Aufidena, pour aboutir à la via Claudia Valeria dans le pays des I'éligniens 23 ; la via Trajana 2', qui gagnait Brindisi par Aecae, Canusium, Gnathia et la côte de l'Adriatique, doublant la via Appia. D'Aternum à Sipontum une route longeait le littoral, puis traversait la presqu'île du Gargano et de nouveau suivait la mer jusqu'à Gnathia 2' ; elle était reliée à celle de l'intérieur du Samnium par un embranchement de Larinum à Bovianum 26, et à la via Trajana par un embranchement de Sipontum à Aecae 27. La via Aeclanensis 28 remontait d'Aeclanum, sur la via Appia, vers llerdoniae, sur la via Trajana. La via Ilerculia 29, création de Maximien Hercule, unissait les vitre Trajana, Appia et Popillia, d'Aequum Tuticum au pons Au /Ni, près de Venouse, et delà à Nerulum par Potentia et Grumentum. Une route descendait de Venouse sur Héraclée 30. Une autre enfin, le long de la mer, contournait la Calabre de Brindisi à Tarente, par Ilydruntum 31, et reliait Tarente à Reggio par Métaponte, Héraclée, Crotone et Locres 32. La côte de la mer Adriatique, aussi bien que celle de la mer Tyrrhénienne, était bordée par une ligne ininterrompue de voies, se continuant les unes les autres, et l'on pouvait aller commodément d'Aquilée à Ilydruntum, comme de l'embouchure du Var au détroit de Messine. D'une mer à l'autre les viae Julia Augusta et Postumia dans l'Italie du Nord, de Gênes à Aquilée, Flaminia, Salaria et Valeria dans l'Italie du centre, de home à Rimini, Truentum, Aternum, Appia et Trajana dans l'Italie du Sud, de Capoue à Canusium, ménageaient des passages. Les routes romaines traversaient donc la péninsule dans tous les sens, de part en part. Les routes de Sicile, Corse et Sardaigne (fig. 7437). L'Itinéraire d'Antonin et la Table de Peutinger attestent que la Sicile avait été dotée d'un réseau très complet. Sur chacune de ses trois faces, une voie suivait constamment la côte et, de plus, les Thermae Mme VIA 799 VIA renses étaient reliées à Agrigente et à Catane; ces deux dernières villes étaient elles-mêmes rattachées l'une à l'autre par une voie transversale, ainsi que Géla et Syracuse, Lilybée et Palerme . Strabon donne à la voie de la côte septentrionale, entre Messine cl Lilybée, le nom de via Valeria°, qu'elle devait à un Valerius, gouverneur de Sicile sous la République3. Cicéron parle d'une via Pornpeia, qui traversait 1\Iessine°; elle devait desservir la côte orientale . On n'a retrouvé jusqu'à présent en Sicile aucune borne milliaire; Mommsen attribue ce fait à la décadence de l'île sous l'Empire; ors aurait négligé alors d'entretenir les routes créées à l'époque républicaine 6• Les indications si précises de l'Itinéraire d'Antonin rendent cette explication peu vraisemblable d'ailleurs une inscriptionduivsiècle, auprès des Therrnae Selinontiae, concerne un proepositus du cursus publicus et la construction d'une station ; les routes à cette époque n'étaient donc nullement abandonnées. Pour la Sardaigne, où la Table de Peutinger soc signale aucune voie, le témoignage des milliaires exceptionnellement nombreux confirme celui de l'itinéraire . Une route suivait le littoral oriental de Caralis au Sud à Tibula au Nord' ; deux autres traversaient l'intérieur de l'île, la première de Caralis à Olbia par Biora la seconde de Caralis àTibula par Othoca et Ilafa, avec embranchements d'une part sur Tuiris Libisonis et d'autre part sur Olbia une quatrième longeait le littoral occidental de Tibula à Turris Libisonis, Othoca et Sulci d'où l'on regagnait Caralis soit par Bitia et Nora, sur la côte méridionale1 3, soit directement, par l'intérieur 14• En Qorse on ne connaît qu'une seule route, le long de la côte orientale, de Mariana à l'alla '; il n'en reste aucun milliaire. Les routes de Gaule, de Belgique et de Germanie (fig. 7438)16. -La plus ancienne voie romaine de la Gaule est la via Domitia, qui date de l'établissement même des conquérants en Narbonnaise et qui était destinée à assurer les communications, par terre, entre l'italie etl'Espagne i Dès l'époque républicaine elle fut complétée probablement par d'autres roules,allant du côté de l'Est d'Arles ou Tarascon à Aix et au littoral des Alpes-Maritimes, du côté de l'Ouest de Narbonne à Torsbuse ° C'est à Agrippa sous le principat d'Auguste et sans doute pendant son premier gouver_ uement,en 39-38 av.J.-C. ,que la Gaule dut le dessin général (le son réseau et l'établissement de ses principales voies, substituées aux anciens chemins gaulois" et suivant, reliant ou suppléant, selon les cas, les grandes artères fluviales. Agrippa rattachala ville de Lyon, capitale nouvelle des régions soumises pas' César, d'une part à la via Doinitia de Narbonnaise, d'autre part à l'Océan par Saintes et Bordeaux, à la Manche par Reims, au Rhin par Langres50. `TlA 800 VIA. Lyon joua désormais au delà des Alpes le même rôle que Rome dans la péninsule italique'. Claude acheva l'ceuvre d'Agrippa : « il construisit les routes difficiles, celles qui civilisent, qui vont à travers montagnes, bois et marais 2 ». Après l'an 50 de notre ère, il n'y eut plus guère qu'à maintenir en état, par des réfections partielles et périodiques, les voies tracées un peu partout au début de l'Empire 3. Les milliaires étaient numérotés, en principe, à partir du chef-lieu de chaque cité Septime Sévère fit compter les distances, dans les trois Gaules et les deux Germanies, en lieues gauloises' ; les milles romains restèrent en usage dans la Narbonnaise. Les empereurs gaulois du lue siècle se distinguèrent entre tous par leur zèle à entretenir les routes, si nécessaires à la défense militaire et à la prospérité économique du pays6. Encore au ve siècle un patrice, vers 410, ouvre un passage nouveau à la voie de la Durance 7 et un préfet du prétoire, aux environs de 440, répare la voie d'Arles à Marseille'. « Cette route du Midi, après avoir inauguré la domination romaine en Gaule, lui servait de ligne de retraite 9. » La Narbonnaise était traversée du Nord au Sud par la grande voie, création d'Agrippa, qui suivait de Lyon à Arles la rive gauche du Rhône, théâtre d'une circulation intense et objet de soins constants : les milliaires commencent au temps de Tibère et ne s'arrêtent qu'avec le règne de Valentinien10. La route parallèle de la rive droite, qui envoie un embranchement vers Nîmes par Uzès, est connue seulement par ses milliaires". Sur le Rhône, à Arles, Vienne et Genève, aboutissaient les routes des Alpes, continuation de celles d'Italie12. La plus méridionale, prolongement des viae Aurelia, Aemilia Scauri, Julia Augusta, au Sud des AlpesMaritimes, longeait le littoral, depuis l'embouchure du Var jusqu'à celle de l'A"gens, et allait ensuite de Fréjus à Aix et Arles"; d'Arles on pouvait aller à Aix, soit par l'intérieur des terres, en passant près de Salon', soit par Marseille et Fossa Mariana 15 ; on la désigne elle-même de nos jours sous le nom de voie Aurélienne, que dans l'antiquité l'Itinéraire d'Antonin est seul à lui donner1°. Sur elle s'embranchaient au Nord deux routes qui se terminaient l'une et l'autre à Riez : la première, construite par Caligula et non citée dans les Itinéraires, partait de Saint-Jean près de Cagnes et passait par Vence et Castellane (Salinae) 17 ; la seconde, mentionnée par la Table de Peutinger, partait de Fréjus 13. La voie des Alpes Cottiennes bifurquait à Gap: une route descendait la Durance et rejoignait Arlesi°, avec embranchements de Gap à Valence 20 et de Saint-Rémy à Beaucaire 21 ; une autre remontait vers le Nord, gagnait l'Isère et tombait sur le Rhône à Vienne 2'. De même la voie des Alpes Grées bifurquait dans la haute vallée de l'Isère, pour se diriger vers Vienne et Lyon par Aoste et Bourgoin23 et vers Genève par les Fins d'Annecy (Bautae) 2'`; une route enfin allant d'Aoste à Genève, le long du Rhône, par Penne, reliait ces deux lignes". La voie des Alpes Pennines, qui passait sur la rive droite du lac Léman, à Vevey et Lausanne 25, était rattachée, elle aussi, à Genève par Nyon 27. A l'Ouest du delta du Rhône la via Domitia, toujours très fréquentée, desservait Nîmes et Narbonne et entrait en Espagne par le col du Perthus '$; deux de ses milliaires conservés datent du principat d'Auguste2"; une route, sinon tracée, du moins réparée à la même époque 30, allait de Narbonne à Toulouse par le seuil de Lauraguais". C'est à Toulouse que le réseau de l'ancienne Aquitaine, entre les Pyrénées et la Garonne 32, venait se souder à celui de la Narbonnaise. Une route allait de Toulouse à Bordeaux par Auch et Bazas 33, une autre de Toulouse à Dax par Saint-Bertrand-de-Comminges et Pau''` Elles étaient reliées l'une à l'autre, à l'Est, par une route de Saint-Bertrand-de-Comminges à Auch 35, et de là à Lectoure et Agen, avec embranchement de Lectoure à Toulouse"; à l'Ouest, par deux routes de Dax à Bor VIA 801 VIA deaux, la première par le littoral, la seconde par l'intérieur 1. On franchissait les Pyrénées occidentales en deux endroits, au col du Somport, par une route venue de Pau', et au col de Roncevaux, par une route venue de Dax3. Une voie préromaine, encore utilisée sans doute sous l'Empire et abandonnée depuis le moyen âge, traversait les Pyrénées centrales au port de la Ténarèse La partie de l'ancienne Celtique annexée par Auguste à l'Aquitaine, entre Garonne et Loire', était traversée par deux grandes routes unissant Lyon à Bordeaux, la première par Rodez, Cahors, Agen (ses milliaires vont d'Alexandre Sévère à Dioclétien ; elle parait dater du me siècle)', la seconde, due à Agrippa, par Clermont, Limoges, Saintes '. De la première se détachaient trois routes allant en Narbonnaise, de Lodève à Saint-Thihéry 8, de Cahors à Béziers', de Cahors à Toulousel0. Deux routes transversales les unissaient, de Saint-Paulien à Clermont" et d'Agen à Saintes par Périgueux 12; une autre allait directement de Bordeaux à Limoges par Périgueux et se prolongeait jusqu'à Argenton 1t. De Saintes partait une route qui gagnait Bourges par Poitiers et Argenton 1'; de Poitiers s'en détachaient deux, vers Angers et Nantes" et vers Tours10; à Bourges passait la voie de Decize à Tours f7, et aboutissait une voie venue de Clermont par Néris 1s. La Lyonnaise était encadrée par deux grandes voies venues de Lyon. La première suivait la Loire depuis Feurs et le littoral méridional de l'Armorique 19 ; Claude la poussa jusqu'à Coz Castell'Ach sur la Manche 20; dans la partie supérieure de son tracé s'en détachaient sur la gauche la route de Feurs à Clermont 21 et une route de Roanne à Vichy 22. La seconde remontait la Saône jusqu'à Chillon, rejoignait l'Y'onne23, descendait la rive 1X. droite de la Seine de Montereau à Paris'', Rouen, Lillebonne et Harfleur 25 ; sur elle s'amorçaient à Chaton les routes de Besançon et de Langres2', à Auxerre celle de Reims par Troyes 27, à Petromantalum (Magny?) celle de Beauvais et Amiens 2s, à Lillebonne celle de l'embouchure de la Somme par le pays de Caux 29. Ces deux grandes voies étaient reliées par plusieurs routes transversales, de Perrigny à Autun3', de Decize à Autun (fig. 7436) 31, de Cosne à Auxerre 32, d'Orléans à Sens 33 et à Paris 34. -Sur la rive gauche de la Seine une route allait de Paris à Rouen par Dreux, Évreux et Pont-de-l'Arche 35. De Chartres en partaient deux autres qui desservaient aussi la basse Normandie 36 : l'une, coupant la précédente, par Dreux, Lisieux et Brionne, gagnait Lillebonne37; l'autre, par le Mans, Jublains, Vieux et Bayeux, gagnait Valognes 38 ; celle-ci était rejointe au Mans par une route venue de Tours39 et à Valognes par la route d'Angers à Rennes, Coutances et Cherbourg 40; un milliaire atteste que Vieux était relié à Lisieux' ; les communications étaient assurées sans interruption, parallèlement à la mer, de Cherbourg à Lillebonne. En Armorique l'Itinéraire d'Antonin ne connaît qu'une route, celle qui va d'Angers à Cherbourg; la Table de Peutinger ne mentionne, en outre, que la route d'Angers à Brest, déjà nommée, et une. route de Rennes à Erquy, rencontrant celle de Cherbourg à Dol'2. Mais des bornes milliaires et d'importants vestiges attestent l'existence dans cette région d'un certain nombre d'autres voies43, allant notamment de Rennes à Vannes44, de Vannes à Corseul", de Carhaix à Erquy46, et rayonnant aux environs de Vannes " et de Carhaix La route principale de la Belgique49 était celle qui allait de Lyon à la Manche par Chalon-sur-Saône, Autun, 101 VIA Auxerre, Troyes, Châlons-sur-Marne, Reims 1, Soissons, Amiens, Boulogne; on la devait à Agrippa 2. Elle était doublée sur la gauche par une route de Troyes à Amiens par Meaux, Senlis et Beauvais 3, avec voies transversales du Mont-Aimé (Bibe) à Reims 4, de Sens à Soissons de Senlis à Soissons', et sur la droite par deux routes qui aboutissaient comme elle à Boulogne, la première partant de Soissons et passant par Cambrai, Arras, Thérouanne', la seconde partant de Reims et passant par Bavay, Tournai, Cassel et Thérouanne', avec voies transversales de Cambrai à Bavay «se continuant sur Cologne )i0, d'Arras à Tournai II, d'Amiens à Cassel par Arrasf2. La partie orientale de la Belgique était desservie par les routes qui rayonnaient autour de Reims vers Warcq (Bose) et Cologne 13; Arlon et Trèves''`, avec bifurcation sur Cologne i6 et Mayence f6 ; Verdun et Metz", avec bifurcation sur Trèves i6 et Strasbourg 1°; Naix et Toul, se continuant au Nord par la vallée de la Moselle jusqu'à Metz20 et au Sud vers Langres"; enfin Bar-sur-Aube et Langres 22. Le pays des Lingons, Séquanes, Helvètes et Bauraques 23, rattaché d'abord à la Belgique, puis, à partir du principat de Domitien, à la Germanie Supérieure, était traversé par les routes qui mettaient Lyon et les Alpes en relations avec le Rhin. De la grande artère de Lyon à Boulogne, sur laquelle s'amorçaient, à Auxerre ou à Troyes, la voie de la basse Seine et, à Reims, les voies les plus importantes de la Belgique, partaient vers le NordEst, à Chalon-sur-Saône, la route de Langres, Toul et Metz, oeuvre d'Agrippa24, et la route de Besançon et Kembs 23. Elles étaient coupées par une route Sud-Est Nord-Ouest, d'Orbe et Yverdon à Reims, passant à Pontarlier, Besançon, Langres".; Orbe et Yverdon étaient reliés par Lausanne 27, d'un côté à Nyon, Genève, Vienne et Lyon, de l'autre à Vevey et à la route des Alpes Pennines28. De Vevey partait une route traversant toute la plaine helvète par.Avenches, Soleure et Bâle 29 Les routes de la Germanie romaine ont été l'objet de travaux nombreux et minutieux 30 ; grâce aux recherches faites sur le terrain pour l'étude du limes, on a pu relever les traces certaines d'un grand nombre de chemins qui ne sont pas mentionnés dans les Itinéraires 31. Une route militaire, établie dès les premiers temps de l'occupation, suivait le Rhin sur sa rive gauche depuis la station d'Ad Fines, au Sud du lac de Constance, à la frontière de la Rétie"-, avec embranchements dans la Germanie Supérieure vers Rixheim et Vieux-Brisach 33, et de Brumath à Spire 34 ; sur cette route aboutissaient à Kembs celle qui venait de Besançon, à Strasbourg celle qui venait de Metz, à Bingen celle qui venait de Trèves 35 Une autre, créée par Trajan en 100, longeait pareillement la rive droite jusqu'à Neuwied36. Une série de voies transversales partaient du Rhin et se terminaient au limes 37. Une route, créée par Vespasien en 74, partait de Strasbourg, gagnait Rottweil, remontait jusqu'à Rothenburg et Cannstatt parla vallée du Neckar et de là se dirigeait vers l'Est, en Rétie35. Dans la Germanie Inférieure, Cologne était la clef du réseau. Là se croisaient la route latérale au Rhin, par la rive gauche, qui venait de Mayence et se continuait jusqu'à Nimègue et Leyde VIA 803 VIA (elle se dédoublait dans le delta du Rhin pour suivre d'un côté le bras le plus septentrional, par Utrecht, et de l'autre le Waal, par Dordrecht'), et celles de Trèves par Marmagen, de Reims par Warcq, de Bavay par Tongres 2 ; de Tongres partait une route latérale à la Meuse, qui se terminait à la hauteur de Nimègue 3. En résumé, on peut ramener schématiquement tout le système routier des Gaules aux éléments suivants : une artère médiane, d'Arles à Lyon et Lyon à Boulogne par Reims ; une série de voies divergentes, conduisant de Lyon, la capitale, aux extrémités des frontières, villes du Rhin, cols des Alpes et des Pyrénées, ports de l'Océan et de la Manche (Bordeaux, Brest, Cherbourg, IIarfleur); des lignes périphériques reliant presque tous les points terminus des routes précédentes, voie de la rive gauche du Rhin au Nord-Est, voies Aurélienne et Domitienne se faisant suite au Sud, voie de Dax à Bordeaux, Saintes, Angers, Rennes, Cherbourg à l'Ouest, voie de Cherbourg à Lillebonne et Boulogne au Nord-Ouest; enfin, dans l'intervalle, un nombre considérable de chemins de jonction comblant les vides et mettant les cités en relations les unes avec les autres, partout où les conditions naturelles le permettaient et où les besoins de la vie politique et économique le faisaient désirer. Les roules de la péninsule ibérique «fig. 7434). Dès l'époque républicaine une roule, continuation de la via Domilia de Narbonnaise, longeait la côte orientale de l'Espagne, depuis le col du Perthus jusqu'à Tarragone, Valence (Valentia) et Carthagène (Carthago nova); Polybe y fait allusion °. Les plus anciens milliaires de la péninsule proviennent d'un embranchement de cette voie, de Tarragone à Lérida (Merda) et portent les noms de deux préteurs de l'Espagne Citérieure au temps de César, C. Flavius Labeo s et M'. Sergius'. Sous le principat d'Auguste, à qui l'on doit l'achèvement de la conquête et l'organisation des provinces espagnoles, une route nouvelle (via Augusta 8), partie de la précédente, se dirigea vers Cadix (Gadès) par Cordoue (Corduba) et Séville (Ilispalis) ; désormais on put aller directement et rapidement des Pyrénées au détroit de Gibraltar. Les empereurs qui ont le plus contribué, après Auguste, à développer le réseau sont Trajan, né lui-même en Espagne, Iladrien, dont la famille était d'origine espagnole, et Caracalla. Les milliaires ne cessent qu'à la fin du Ive siècle ap. J.-C. La Bétique était traversée tout entière par la via Augusta, depuis l'arc appelé Janus Augustus, sur le Guadalquivir, à l'Est de Maquiz (Ossigi) jusqu'au port de Cadix, par Cordoue, Ecija (Astigi) et Séville'. De chacune de ces trois villes partaient d'autres routes i0 : de Cordoue vers le Nord à Merida (Ernerita Augusta) 1f, vers le Sud à Grenade (Illiberri 12) et à Malaga (Malaca) par Antequera (Anticaria 13) ; d'Ecija vers Merida"; de Séville vers le Nord et l'Ouest à Merida", à Huelva (Onoba) et à l'embouchure du Guadiana 10, vers l'Est à Antequera t7. Une route littorale, reliée à Cazlona (Castulo) en Tarraconaise, allait d'Almeria (Urci) à Cadix 11; une autre, en arrière, se détachait à Guadix (Acci) de la route de Cazlona à Almeria et atteignait Grenade 19. Les routes de Lusitanie rayonnaient autour de Lisbonne (Olisipo) et de Merida. Lisbonne était reliée au Sud à Faro (Ossonoba) 20 et à l'embouchure du Guadiana par Beja (Pax J ulia) 21, au Nord à Braga (Bracara Augusta) par Santarem (Scallabis) 22, au centre à Merida par trois voies: la première se détachait de la route de Beja à Alcacer do Sol (Salacia) 23; la seconde, de celle de Braga à Santarem, rejoignant la première un peu avant Merida2`; la troisième, entre les deux autres, coupait en droite ligne de Lisbonne à la station des Septem arae sur la seconde u. La principale des routes qui partaient de Merida était celle qui gagnait, au Nord, Salamanque (Salmantica) 20; il en reste des vestiges importants et de nombreux milliaires ; on l'appelle encore dans le pays « El camino de la plata », ce qui veut dire, non pas « le chemin de l'argent », mais « le chemin en chaussée », du latin platea 57 ; un de ses embranchements se dirigeait au Nord-Ouest vers Braga 28. Deux routes allaient vers le Nord-Est de Merida à Tolède (Toletum), l'une par la vallée du Tage, l'autre par celle du Guadiana et les monts de Tolède 29 ; une troisième vers l'Est, de Merida à Oreto (Oretum) 30. En Gallécie et Asturie Braga, qui est reliée, comme on l'a vu, à Lisbonne 31 et où l'on conserve un très grand nombre de milliaires provenant de différents points du Conventus Bracaraugustanus32, communiquait avec Astorga (Asturica Augusta) d'après l'Itinéraire d'Antonin par quatre routes : la première passait par Chaves (Aquae Flaviae) 33; elle paraît dater du règne de Tibère et franchissait la Tamega, à Chaves même, sur un pont élevé au temps de Vespasien" ; la seconde passait par Puente de Naveda (Nemetobriga) 33 ; la troisième suivait VIA la côte jusqu'à El-Padron (Iria Flavia) et redescendait droit sur Astorga par Lugo (Lucus Augusti) t ; la quatrième n'était qu'une ramification delaprécédente, qu'elle quittait à El-Padron pour desservir la Corogne (Brigantium) et qu'elle rejoignait à Lugo Astorga était ellemême le point de départ de trois voies importantes vers le pays des Cantabres et le cours supérieur del' Ebre par Cerro de Lancia (Lancia) 3, vers Penalva del Castro (Clunia) et Saragosse (Caesaraugusta) vers Salamanque par Zamora (Ocelodurum) 5. Dans le Nord de la Tarraconaise aboutissaient les trois routes venues d'Aquitaine à travers les Pyrénées, par le col de Roncevaux et Pampelune (Pompaelo) 5, le Somport et Jaca (laça) 7, le Perthus et Gérone (Gerunda) 8; leurs extrémités étaient réunies par une grande voie Ouest-Est, d'Astorga et Léon (Legio) à Tarragone, par Bribiesca (Veroresca), Saragosse (Salduba), Huesca (Ossa) et Lerida9. Les principales routes des plateaux de l'intérieur partaient de Saragosse 10. Elles formaient trois groupes. La voie de Saragosse à Penalva del Castro, par Numance (Numantia)11, est la première qui ait été l'objet d'une étude scientifique, entre Osma (Uxama Argaela) et Olbega (Augustobriga) 12; à Penalva elle bifurquait vers Astorga d'un côté", Zamora et Salamanque de l'autre 14. On pouvait se rendre de Saragosse à Merida soit par Tolède i5, soit par Oreto 16; les deux routes ne se séparaient qu'à Bayona de Tayuna (Titlilcia)17. Enfin une dernière voie gagnait Carthagène par Albacete (Saltigi)18, Le premier groupe était rattaché au second, de Simancas (Septimanca) à Bayona de Tayuna par Ségovie 39, et le second au troisième, de Fuenllana (Laminium) à Albacete 20. La grande route du littoral oriental courait de Tarragone à Carthagène 21. Les gobelets de Vicarello attestent que le chemin le plus direct vers Cadix s'en détachait au Sud de Jativa (Saetabis), à la station d'Ad Aras, pour rejoindre Cazlona et le Guadalquivir22. Les environs de Carthagène23 et de Cazlona24 étaient parcourus par plusieurs voies ; il faut citer notamment celle de Carthagène à Guadix et Grenade25 et celles de Cazlona à Guadix, par la Guardia (Mentera Bastia) 25 ou par Toya (Tugia) 27, et de là à Almeria. VIA Le dessin général du réseau est très net et conforme à ce que permettaient d'attendre la configuration physique et l'histoire politique de la péninsule : une ligne littorale à peu près continue; des voies s'enfonçant dans l'intérieur en utilisant les vallées des grands fleuves ; d'autres les reliant à travers les plateaux d'Estramadoure et de Castille ; des routes particulièrement nombreuses dans les plaines fertiles et les districts miniers de la Bétique, dans le bassin de Saragosse, dans les districts extrêmes et montagneux de la Galicie et de l'Asturie, tardivement conquis et difficiles à maintenir dans l'obéissance 28. Les roules de Bretagne (fig. 7434)". La Bretagne romaine était dotée d'un nombre relativement élevé de routes. L'Itinéraire d'll ntonin en énumère quatorze 30 et beaucoup d'autres, dont il ne parle pas, sont connues par leurs milliaires et surtout par les vestiges qu'elles ont laissés; elles portent dans le langage populaire de vieux noms caractéristiques, Watlingstreet, Stanestreet, Erminestreet, Fosseway, Icknieldstreet, etc. ; l'une d'elles, en Lancashire, est remarquable par le soin avec lequel elle avait été construite et l'excellent état de conservation de quelques-uns de ses tronçons : c'est l'une des mieux pavées de tout l'Empire 31. Les plus anciens milliaires que l'on possède sont contemporains d'Iiadrien; les plus récents datent du milieu du ive s. 32. Londres, à proximité des côtes gauloises, était la clef du réseau", comme Rome en Italie et Lyon en Gaule. De là rayonnaient, dans quatre directions, les voies principales 3`. Ici encore la disposition actuelle des chemins de fer présente de frappantes analogies avec celle des routes romaines3^. La première voie est celle du Sud-Est; elle mettait Londres (Londinium) en relations, par Canterbury (Durovernum), avec les trois ports du Kent, sur le détroit du Pas-de-Calais : Lymne (Portus Lemanae) près de Folkestone, Douvres (Dubrae), Sandwich (Rutupiae) 36 ; un quatrième chemin, que les Itinéraires ne mentionnent pas, mais dont il reste des traces, reliait Canterbury à Reculver (Regulbium). La voie du Sud-Ouest se divisait à Silchester (Calleva) pour aller : par Winchester (Venta Belgarum) à Bittern (Clausentum) près de Southampton37 et Chichester (Noviomagus VIA 805 VIA R.egnorum)1 avec routes transversales de Winchester à Londres (Stanestreet) 2 ; par Old Sarum (Sorbiodunum) d'une part 3, et Bath (Aquae Sulis) d'autre part (Fosseway) 4, à Exeter (Isca Dumnoniorum), avec continuation jusqu'à l'extrémité de la Cornouaille' et route transversale du canal de Bristol à Winchester6; par Cirencester (Durocornovium) sous le nom d'Erminestrect, à Caerleon (Isca Silurum) et Caermarthen (Maridunum) dans le Sud du pays de Galles 7. La grande voie du NordOuest8 est désignée, de Londres à Wroxeter (Viroconium), sous le nom de \Vatlingstreet; elle était rejointe à Wroxeter par une route venue de Caerleon9, à Chester (Deva) par une route venue de Caernarvon (Segontium), dans le Nord du pays de Galles 10, et de là elle se dirigeait, le long de la côte occidentale, vers les murs d'IIadrien et d'Antonin, qu'elle rejoignait, le premier à Carlisle (Luguvallium), le second au fond du Firth de la Clyde. La grande voie de l'Est aboutissait également aux deux murs, à Corbridge(Corstopitum) et au Firth du'Forth11; on l'appelle Erminestreet dans la région de Lincoln (Lindum) et d'York (Eburacum), Watlingstreet aux abords du mur d'Iladrien 1". On peut y rattacher les routes du Suffolk et du Norfolk, dont la plus importante allait de Londres à Norwich (Venta Icenorum)1'. Dans l'intérieur de la Bretagne, entre les deux voies de l'Est' et de l'Ouest, les routes transversales étaient nombreuses '; il faut citer notamment celles de Chesterford à Dorchester 13 (Icknieldstreet), de Lincoln à Cirencester 16 (Fosseway), continuation de la Fosseway venue d'Exeter, de Doncaster (Danum), Gloucester (Glevum), appeléeaussi Icknieldstreet 17, de York à Manchester (Mancunium)1S de Catterick (Cataractonium) à Carlisle 1s Deux voies longeaient le vallum Hadriani; l'une, large de cinq mètres et demi, suivait exactement tous les détours, sauf dans les parties les plus escarpées; l'autre, établie à quelque distance en arrière, courait en ligne droite pour unir les stations des deux extrémités ; le parcours n'en est pas encore complètement déterminé 20. Une voie militaire reliait pareillement les camps et les stations du vallum Antonini 21 En Bretagne, comme en Gaule, les routes de pénétration qui partaient du centre du réseau étaient donc complétées par des lignes de jonction et des lignes périphé riques; presque partout des voies qui se continuaient et se raccordaient bordaient les côtes orientale, méridionale et occidentale, et au Nord la double barrière des valla, avec leurs chemins de ronde, achevait le circuit. Les routes des provinces danubiennes (fig. 7439) 22 Les provinces de la région danubienne furent pourvues, au fur et à mesure de la conquête romai=ne, d'un système routier très complet et très bien compris, qui avait pour but tout à la fois de faciliter la circulation sur la frontière, en face des barbares, d'assurer en arrière les communications avec l'Italie et de relier dans chaque circonscription administrative la capitale aux localités les plus importantes. Bien que la ttétie23 ait été soumise par Drusus et Tibère dès l'année 15 av. J.-C., on n'y a pas retrouvé de milliaire antérieur à Septime Sévère ; ceux du une siècle y sont nombreux, comme dans toutes les régions danubiennes; les plus récents datent du règne de Julien. Augsbourg (Augusta Vindelicorum), la capitale, était rattachée à l'Italie d'un côté par Kempten) jadis Cambodunum) avec embranchements sur Giintz2S, Bregenz (Brigantia) et Coire (Curia)2a, oit aboutissaient les routes du Splügen et de la Maloggia, de l'autre par Epfach (Abudiacum) et Innsbruck (Veldidena) 26, où aboutissaient les routes du haut Adige (via Claudia Augusta) et du Brenner"; des voies transversales unissaient Bregenz et Innsbruck 28, Kempten et Epfach". Les routes venues d'Augsbourg rejoignaient celles de la Gaule, au Sud du lac de Constance, par Bregenz, Arbon (Arbor Felix) et Pfyn (Fines) 30, et celles de la Germanie Supérieure, à la hauteur de Cannstatt, par les stations de Pomona et d'Ad Lunam 31, Trois voies allaient de Rétie en Norique celle du Nord suivait le limes depuis la Germanie Supérieure jusqu'à Abensberg (Abusina), avec embranchement sur Augsbourg par Neuburg (Submontorium) 32, et ensuite la rive droite du Danube jusqu'à Passau (Batava Castra) 33 ; celle du centre passait par Pfünzen (Pons .iEni), rattaché à Augsbourg 34 (avec embranchement sur Epfach) 30, à la route du limes 3°, à Innsbruck 37; celle du Sud partait d'Innsbruck dans la direction de Lienz (Aguontum) 30 Le Norique 39, où les milliaires du III' siècle et même encore du ive sont abondants, était traversé par deux VIA 806 VIA routes Ouest-Est. Celle du Sud, la plus importante, à laquelle on travaillait dès le règne de Claude aux abords de Klagenfurt', et dès le règne de Trajan aux abords de Cilli (Celeia) 2, suivait la haute vallée de la Drave 3 elle communiquait avec l'Italie à Lienz par la voie venue de Zuglio (Julium Carnicum), à Mariasaal (Virunum), près de Klagenfurt par celle du col de Tarvis, à Cilli par celle d'Aquilée à Laibach, très fréquentée, qu'elle continuait jusqu'à Pettau (Poetovio) 4. Celle du Nord longeait le Danube 5. Elles étaient reliées, du Sud au Nord, par une route de San Peter im Ilolz (Teurnia) à Salzbourg, jadis Claudium Juvavum (où se terminait celle qui venait de Rétie par Pftinzen) °, \Vels (Ovilava) et Lorch' (Lauriacum), et par une route de Mariasaal à \\Tels 3, avec voie transversale de Mariasaal à Salzbourg Nous sommes assez mal renseignés, comme on le voit, sur la viabilité du centre de la province. En Pannonie 10 des travaux de voirie ont été exécutés sur la rive du Danube, entre Banostor (Malata) et Petervarad (Cusum), sous le principat de Nerva 11, mais le premier en date des milliaires conservés de la Pannonie Supérieure ne remonte qu'au règne d'Antonin le Pieux, quoique la voie d'Aquilée à Laibach et celle du Danube soient certainement beaucoup plus anciennes. Dans l'ensemble de la province les routes Ouest-Est étaient au nombre de trois, parallèles à la Save, à la Drave et au Danube : la première de Laibach à Semiin (Taurunum)12 communiquant avec l'Italie par la grande voie d'Aquilée, avec la Dalmatie par trois routes aboutissant à Sziszek (Siscia) 13, Alt-Gradiska (Servitium)14 et Mitrovitza (Sirmium)15 ; la seconde de Pettau à Eszek (Mursa), d'où elle rejoignait la précédente par Vinkovce (Cibalae)1°, avec embranchements de Varazdin (Aquaviva) à Satarjevo (Andautonia) 17 et de Vinkovce à Brod (Urbas?) 13; la troisième de Vienne (Vindobona) à Duna Bogdany (Cirpi), où elle obliquait du Nord au Sud pour suivre le fleuve et reprendre ensuite après Vukovar (Cornacum) la direction Ouest-Est 19. Une autre route Nord-Sud reliait le Danube et la Drave, de Vienne. à Pettau 20, avec embranchements de Soprony (Scarbantia) à Petronell (Carnun tum) 21, de Soprony à Gyér (Arrabona) et 0-Szôny (Brigetio) 22, de Stein am Anger (Savaria) à Pecs (Sopianae), Eszek et Viokovice 23 ; de cette dernière partaient des voies transversales, qui allaient de la station de Mogentianae à Alt-Ofen (Aquincum) 24, de Pecs à Batta (1llatrica) et Alt-Ofen 25, à 0-Sztiny 00, à Gyiir et Petronell 27. Dans le détail l'identification d'un certain nombre de points de ce réseau compliqué reste douteuse. En Dalmatie 26 la route côtière de Zara (Iader) à Salone (Salonae) paraît remonter à l'époque républicaine, mais la majeure partie des voies datent du premier siècle de l'Empire ; au témoignage des inscriptions, Tibère, en 16 ap. J.-C., fit construire par le légat P. Cornelius Dolabella cinq routes, non encore toutes identifiées, se dirigeant de Salone vers les montagnes de l'intérieur 29 ; celle des Archi romani (Burnum) à la rivière Sana est due à Claude en !Ci" ; les milliaires ne disparaissent qu'à la fin du ive siècle. La principale route était celle qui suivait le littoral depuis l'Histrie jusqu'à la Macédoine ; on pouvait aller par mer de Pola à Zara et de là par terre à Salone, soit le long de la côte par Skradin (Scardona) et Trait (Tragurium) 31, soit dans l'intérieur par los Archi romani 32; mais on pouvait aussi contourner le Sinus Fianaticus, de Pola à Tersatto (Tarsatica) et Segna (Senia), d'où l'on gagnait les Archi romani 33. Salone était reliée par des routes secondaires à Spalato, Stobrec (Epetium) et Omis (Oneum) 31; après Salone, à Vido (Narona) 35, la route bifurquait pour rejoindre Scutari (Scodra) 36 et Alessio (Lissus) parla côte, en passant à Ragusa Vecchia (Epidaurum) 37, et par l'intérieur, en passant à Niksic (Andarba) 38. Sur cette grande artère s'amorçaient les voies de pénétration qui se dirigeaient de Segni vers Siszek 39, des Archi romani vers la vallée de la Sana 40, de Salona vers Alt-Gradiska et Mitrovilza 41 et vers la station d'Argentaria42, de Vido vers Sarajévo43 et vers Nevesinje 44, d'Alessio vers Lipljan (Ulpiana) 4°. Des milliaires ont été retrouvés dans l'arrière-pays, entre Probog et Travnik 46, entre Sarajévo et la Drina47, et auprès de la Drina "8, d'où la Table de Peutinger fait partir une voie qui rejoint Mitrovitza 49 VIA -807VTIA La mise en défense de la Mésie Supérieure, aux confins du royaume dace, avait pour les Romains une importance toute particulière. Dès l'année 33-34 de notre ère, Tibère faisait construire une route le long du Danube'. Une inscription rupestre rappelle les travaux difficiles exécutés par Trajan sur la même voie aux Portes de I+er2. Ce chemin militaire suivait le fleuve, de Belgrade (Singidunum) à Artchar (Ratiaria) 3. Deux autres s'en détachaient à Kostolac (Viminacium), le premier au Nord vers Kavaràn (Tibiscum)4, le second au Sud vers Nich (Naissus) d'où il se prolongeait au Sud-Ouest vers Uskub (Scupi) et la Macédoine 6, avec embranchement sur Alessio en Dalmatie ', au Sud-Est vers Sofia (Serdica) en Thrace 8, tandis qu'un dernier embranchement remontait de Nich à Artchar sur le Danube 9. A peine la Dacie 10 était-elle devenue province romaine que Trajan y faisait tracer des routes, jusqu'à son extrémité septentrionale: un milliaire des environs de Torda (Potaïssa) est de l'année 109-110 de notre ère". Les dernières bornes datées qu'ait fournies cette région, de bonne heure abandonnée par les Romains, appartiennent au principat de Maximinl2 et à celui de Gallus et Volusianus ", Il n'est pas question de la Dacie dans l'Itinéraire d'Antonin ; nous ne connaissons ses routes que par la Table de Peutinger, les noms énumérés parle Géographe anonyme de Ravenne " et les découvertes épigraphiques et archéologiques. Karlsburg (Apulum), la capitale, était, comme d'habitude, au croisement des voies principales : celle du Nord, qui se prolongeait jusqu'à Mojgrad (Porolissum)16 ; celle du Sud-Ouest, qui par Varhély (Sarmizegetusa) et Kavaran (Tibiscum) retombait sur le Danube à Orsova (Tsierna)16, avec embranchement le long de la Maresia vers Veczel (Micia) "; celle du Sud-Est, qui par Ilermannstadt (Cedoniae) rejoignait l'Oltu (Alutus), le descendait jusqu'à Resca (Romula) et obliquait vers l'Ouest pour se terminer, elle aussi, sur le Danube, non loin d'Orsova, à Turnu Severinu (Drobetae)18. Dans ]e centre, aux environs d'Apulum et dans le Nord-Ouest, le long de la Marisia et de l'Oltu, on a relevé les traces d'autres routes, que la Table de Peutinger ne signale pas f9. Dans la Mésie Inférieure20 les milliaires ne commencent que cent ans après la conquête, sous le principat d'Hadrien. La grande voie latérale au Danube se continuait de Lom (Almum) à Bestepe (Salsovia), sur le bras le plus méridional du Delta 21 ; de là elle gagnait la côte avec voie transversale, d'Isakcea (Noviodunum) à Karanasib (Istrus) 22 et la suivait jusqu'aux confins de la Thrace à Ackiolu (Anchialus) 23. Plusieurs routes, connues soit par laTable de Peutinger, soit simplement par leurs ruines2', allaient du Danube vers le Sud, l'Ilaemus et la Thrace : de Gigen (Oescus) à Sofia, de Gigen à Lovatz (Melta) et Philippopoli 25, de Sistova (Novae) à Sliven (Cabyle), de Silistri (Durostorum) à Provadia (Marcianopolis)ae; elles étaient reliées, de Lovatz à Provadia, par une voie parallèle au Danube 29. L'une des deux grandes routes de la province de Thrace 28 suivait aussi la même direction : c'est celle qui, venue de Kostolac et de Nich, passait par Sofia, Philippopoli, Andrinople (Hadrianopolis) et se terminait sur la via Egnatia, un peu avant Byzance 29, avec embranchements au Nord de Philippopoli à Sliven et Ackiolu 30 et d'Andrinople à Sliven 31, au Sud d'Andrinople à Tusla (Trajanopolis) 32. L'autre grande voie de la Thrace était la via Egnatia, avec laquelle nous atteignons l'extrême limite de l'Europe latine et nous pénétrons dans le monde gréco-oriental. Les routes de l'Afrique du Nord (fig. 74344) 83. L'Afrique du Nord est l'une des régions de l'ancien monde romain où le réseau des routes était le plus serré et où il en subsiste les vestiges les plus nombreux et les plus importants, bornes milliaires 34 et chaussées empierrées 35. Les premières bornes datées sont de l'an 14 ap. J.-C., au début du règne de Tibère, sur la route de Tacape (Gabès) à Thévest.e (Tébessa) par Capsa (Gafsa) 30 A l'époque suivante et jusqu'au commencement du second siècle, les milliaires sont rares 37. Ils se multiplient au contraire pendant le principat d'Hadrien, qui marque un VIA 808 -VIA moment décisif dans le développement de la voirie africaine 1. L'activité des constructions se ralentit ensuite, pour reprendre au temps des Sévères, originaires d'Afrique, et surtout sous Caracalla. A partir du second tiers du nie.siècle il 'n'y eut plus guère que des réparations, qui se poursuivirent du moins très régulièrement, d'un empereur à l'autre, jusqu'à la fin du ive siècle 2. On sait par les inscriptions que plusieurs de ces travaux d'établissement et d'entretien ont été exécutés par la main-d'oeuvre militaire 3. Les routes de la Cyrénaïque et de la Tripolitaine4 mettaient en relations l'Égypte et la Byzacène, partie méridionale de la Tunisie actuelle. Leur tracé était simple. La principale suivait la côte depuis Catabathmon, à la frontière égyptienne, jusqu'à Tacape, par Cyrène, Leptis Magna et Oea 5. En Cyrénaïque elle était doublée en arrière par deux voies secondaires, de Catabathmon à Mecira 5, et de Mecira à IIippone'. De même en Tripolitaine la Table de Peutinger indique en deux endroits, de Leptis Magna à Sabrata et à l'Est de Tacape, deux lignes parallèles le long de la mer et un peu en arrière. Une voie militaire très importante, que les explorations des officiers du Sud tunisien ont bien fait connaître, pénétrait assez profondément dans la Tripolitaine, en forme de triangle, entre Leptis Magna et Tacape, par Turris Tamalleni (Telmin), pour relier les postes fortifiés du limes s. Une autre allait de Tacape vers le Sud, dans la direction de Cydamus (Ghadamès) 9. La Proconsulaire 10 était sillonnée dans tous les sens par des routes romaines, dont il reste en beaucoup d'endroits des bornes milliaires ou des empierrements, Les premières construites avaient pour but de rattacher les unes aux autres les différentes localités du littoral, de remonter la vallée fertile du Bagradas, de faire communiquer Théveste, où tenait d'abord garnison l'unique légion d'Afrique, avec les ports de Carthage, d'lladrumète et de Tacape. D'autres vinrent ultérieurement les doubler ou les couper, pour permettre aux habitants et aux produits de chaque centre de quelque importance dans l'intérieur d'accéder à la côte : « Les voies de cette province ne convergeaient pas toutes vers un seul et même point, comme celles d'Italie vers Rome, comme celles de Gaule vers Lugdunum; c'était à la mer qu'elles allaient11. » La route de Tacape à Hadrumète, Carthage, Thabraca et Hippo Regius f2, dont la fondation première remonte peut-être à l'époque punique, suivait p iesque continuellement le littoral; cependant elle traversait, de Putput à Maxula, la dépression qui sépare le golfe de Hammamet de celui de Tunis, au lieu de contourner la péninsule du cap Bon, et entre Hippo Diarrhytus et Thabraca elle s'éloignait un peu de lamer f 3 ; une voie secondaire la reliait à Clupea et Missua dans la péninsule du . cap Bon 14. Chaque port.était le point de départ d'une ou de plusieurs routes de pénétration" : de Tacape à Capsaf6 et de là d'un côté à Nepte, sur la rive occidentale du lac Triton17, de l'autre à Thelepte, où la voie bifurquait vers Théveste13 et vers Cillium 19; de Macomades Selorum et de Thenae vers Sufetula; de Sullectum par Thysdrus à Aquae Regiae ; d'lladrumète à Théveste par Aquae Regiae, Sufetula, Cillium 20, avec embranchements d'Hadrumète à Thysdrus et d'Aquae Regiae à Sufes; de Carthage à Théveste par Musti, Althiburus, Ammaedara21, avec embranchement d'Unuca à Thignica par Thuburbo Majus22; de Cartilage à Hippo Regius par la vallée du Bagradas et Bulla Regia23; de Thabraca à Simitthu et Naraggara20; d'Ilippo Regius à Thagura 25 et à Calama35. Les principales lignes transversales de raccordement étaient celles de Sufetula à Musti et d'Aquae Regiae à Tipasa27, avec embranchement de Tipasa à Calama28. On peut distinguer en Numidie 29 trois séries de routes. D'abord celles qui allaient de l'Est à l'Ouest, la première le long de la côte, d'flippo Regius à l'embouchure de l'Ampsaga par Rusicade 33; la seconde de Théveste à Thamugadi (soit par Mascula sur le versant septentrional de l'Aurès, soit par Bagaï un peu plus au Nord), et à Lambaesis, devenue à partir de Trajan le quartier général de la légion IIIe Auguste, et de là à Sitifis (soit par Zaraï, soit par Lamasba) 31; la troisième au Sud de l'Aurès, en bordure du désert, d'Ad Majores à Bescera (Biskra32. Ensuite celles qui rayonnaient autour de Cirta (Constantine) vers Rusicade, Calama, Tipasa, Théveste, Bagai, Thamugadi, Lambaesis, Sétif par Mileu et Cuicu133. Enfin celles qui entouraient VIA 809 VIA l'Aurès de Lambaesis à Bescera et d'Ad Majores à Théveste ou qui le traversaient par le défilé de Tirammine2. Comme en Proconsulaire, les découvertes archéologiques permettent de corriger et de compléter les indications de l'Itinéraire d'A ntonin et de la Table de Peutinger. Dans la Maurétanie Césarienne3 la voie du littoral se poursuivait depuis l'embouchure de l'Ampsaga jusqu'aux Portus Divini (Oran et Mers-el-Iiébir) 4. Mais elle était beaucoup moins importante et moins fréquentée que la grande route est-ouest, création d'Hadrien, qui traversait toute la province de Cuicul aux environs de Siga, par Sitifis, Auzia, Oppidum Novum et Mina'. Celle-ci, entre Sitifis et Auzia, présentait un double tracé : le plus ancien décrivait un long circuit vers le Sud pour contourner le massif des Zibans, le plus récent passait, en ligne à peu près directe, par la montagne 6. D'autre part, à l'ouest elle était doublée par une autre route du 111e siècle, qui la quittait à Mina pour gagner la Tingitane par Altava et Pomaria7. Plusieurs voies sud-nord mettaient Cuicul en relations avec Choba$ et avec Igilgilis 0, Sitifis avec Igilgilis 10 et avec Saldae, par Ad Sava" et par Tubusuptu 12, Saldae avec Rusuccuru f3, Sufasar avec Caesarea14. En Tingitane 16 la route littorale de terre n'existait pas. L'Itinéraire d'Antonin déclare expressément que de Tingis aux Portus Divini le trajet se faisait par mer16. Dans l'intérieur l'Itinéraire ne signale que deux routes, la première suivant la côte de l'Océan Atlantique de Tingis à la station d'Ad Mercurios, au sud de Sala", la seconde se détachant de la précédente en une localité appelée aussi Ad Mercurios, près de Zilis, et passant par Oppidum novum et Volubilis pour se terminer à Tocolosida 18. Le parcours de l'une et de l'autre a pu être à peu près complètement déterminé sur le terrain, mais elles n'ont encore fourni aucun milliaire. Un certain nombre de villes ou de villages cités par le géographe anonyme de Ravenne et non encore identifiés paraissent être les stations d'une route qui continuait Ix. celle de la Césarienne orientale et qui se dirigeait de la Malva vers Volubilis, probablement par le col de Taza". D'après les recherches de M. de la Martinière, en arrière de la route d'Oppidum novum et de Volubilis, une autre, qui lui était parallèle, passait par Babba et Prisciona et aboutissait dans la région de Fez, et une dernière, de Sala à la région de Fez, reliait de l'Ouest à l'Est tous les fortins du limes méridional20. MAURICE EIESNIER. L'ORIENT GRÉCO-ROMAIN (fig. 7439). Ce qui a été dit de l'Occident latin, au point de vue de l'établissement des routes et de leur régime administratif, n'est pas moins vrai des pays de langue grecque à la même époque. Nous n'avons donc plus à nous occuper que du réseau. On a vu que les faibles renseignements recueillis sur les voies grecques antérieures à la conquête romaine sont tirés exclusivement des sources littéraires et que les observations sur le terrain y ajoutent fort peu de chose. Il n'en va plus de même pour la période que nous avons maintenant à étudier; l'exploration des voyageurs modernes, surtout dans ces dernières années, est plus instructive que les auteurs anciens; même quand le tracé exact d'une route ne se reconnaît plus sur place, les milliaires, par leurs notations précises, permettent en quelques cas de le définir à peu près. Sans doute, les reconstitutions qu'on nous offre demeurent, à grande échelle, pour une bonne part conjecturales 21 ; mais les incertitudes ne sont que dans le détail, et l'essentiel seul nous importe ici. Deux nécessités primordiales : le commerce et les transports de guerre ont favorisé le développement du réseau routier'-2 ; il est donc particulièrement serré aux frontières de l'Empire et dans les régions de grande activité économique. Il a dû se réduire à rien dans la Grèce d'Europe, dont la situation était, à cet égard, des plus médiocres, notamment par suite du brigandage. Hadrien seul entreprit de transformer en une route carossable, au moyen de digues puissantes jetées dans la mer, le chemin important, mais très court, qui conduisait de Corinthe à Mégare par la gorge difficile des 102 Taure? Sarm egetusa Sr' cerna VIA 810 VIA roches Scironiennes: au bord du golfe Saronique on gigantesques travaux d'infrastructure qui l'attaquaient voit encore, par endroits, dans ce défilé de 6000 pas, quelques débris, suspendus aux parois du rocher, des dans toute son étendue D'une facon générale, les empereurs ont négligé les communications en Achaïe ; VIA 811 VIA on n'a retrouvé de milliaires romains que dans le voisinage immédiat de Patras 1 et près d'Athènes 2, sur la Voie Sacrée d'Éleusis, ainsi que dans la vallée de Tempé ' et le sud de la Thessalie et ils ne datent guère que de la fin du rue siècle et des débuts du Ive". C'est donc un peu pour mémoire que nous rappellerons les voies portées sur les anciens routiers. La Table de Peutinger en indique une épousant à peu près les contours de la plus grande partie du Péloponnèse, par Corinthe, Sicyone, Patras, Olympie, Pylos, Méthone, Messène, Sparte et Asopus ; une autre prenant en diagonale la presqu'île, par Corinthe, Tégée, Mégalopolis, Lacédémone, avec des embranchements : Olympie-Mégalopolis (le long de l'Alphée) et Tégée-Épidaure. En Thessalie, la tête de ligne était Larisse ; on allait de là à Pharsale, Hypata, Élatée 6, Platées, Mégare et Athènes Une autre route côtière, partant de Mégare, suivait au nord les bords du golfe de Corinthe, et par la vallée de l'Achéloiis atteignait Actium et Nicopolis, puis les rivages de l'Épire et de l'Illyrie 6. La prospérité de la Macédoine 9 était un peu supérieure ; pourtant cette province aussi fut négligée : la route militaire, déjà construite sous la République, qui traversait le pays de Dyrrachium à Thessalonique, la Via Egnatia, n'était importante que par ses aboutissants, fort peu par les stations de son parcours : Lychnidus sur le lac d'Ochrida, Héraclée de Lyncestide, Édesse et Pella. Des milliaires déterrés, les uns ne remontent qu'à Caracalla 10, les autres attestent une réfection cent ans plus tard11. Thessalonique était aussi reliée à la Mésie par un chemin dont on a retrouvé un milliaire de 306 dans le Vardar, près des ruines de Stobi 12. De l'autre côté de la Chalcidique, la Via Egnatia avait son prolongement le long de la mer Égée, par Amphipolis 13, Philippes, Topirus, Aenu, Périnthe et Byzance 14. De Thessalonique, une autre route, après Béroa et Pydna, contournait l'Olympe et gagnait Oloossone 15, puis Larisse en Thessalie. En Thrace, province impériale, on ouvrit des routes militaires aussitôt après l'annexion: l'administration fit construire et livra aux commerçants, dès 61 16, des postes de refuge, où les voyageurs trouvaient un asile que l'état du pays rendait nécessaire 1'. Les milliaires s'y échelonnent, dans le temps, plus qu'ailleurs 18. De Périnthe et d'Aenus partaient deux voies sur Andrinople, puis Philippopoli ; une autre de Périnthe sur Anchialus. Le long du Pont-Euxin, une route raccordait les bouches du Danube en Scythie avec Byzance, par Tomes, Odessus et Anchialus 19. Les îles de vaste superficie avaient, comme les conti nents, besoin de chaussées pour l'acheminement des marchandises aux points de débarquement. Les deux plus grandes du monde grec, Chypre et la Crète, ne furent pas, à ce point de vue, complètement oubliées. Dans la première, à part une voie qui la traversait, de Citium à Soli, par Golgi et Tamassus, on se borna à une route côtière sur tout le pourtour (sauf la pointe du nord-est) par Salamine, Chytri, Cerynea, Lapethus, Soli, Paphus Nova et Palaepaphus, Curium, Amathonte, Citium20. En Crète, dès les premiers temps de l'oceupation romaine, il existait déjà une route traversant l'île 21. Plusieurs inscriptions semblables rappellent l'activité d'un légat de Claude, qui restaura 'Cà; iiolç xcel Toû; âvôooÊzpovcc; 22. Ce dernier mot, énigmatique, correspondrait, d'après H. Estienne, à l'àv8pdo«ap.o; défini par Hésychius comme un chemin étroit; mais on a proposé également d'y voir un montoir de pierre, comme on en dressait de distance en distance, pour aider les cavaliers à enfourcher leurs montures 23. Les mentions incorrectes de la Table de Peutinger montrent seulement que Cydonie (La Canée) et Gortyne se trouvaient reliées par terre. En Égypte, le système des routes et des ports, organisé, sur le modèle des Pharaons, par les premiers Ptolémées, avait été ruiné, comme toute leur administration, pendant les troubles qui signalèrent le règne des derniers Lagides. Personne ne nous dit expressément qu'Auguste ait rétabli les routes de terre et de mer ; cela est certain cependant 24 et résulte implicitement des termes dans lesquels Strabon 25 nous parle encore de la voie de Coptos à Bérénice, des données de Pline l'Ancien 26 sur cette route, qu'à raison de la chaleur intense on parcourait surtout la nuit ; les relais comportaient des points d'eau (hydreumata) ; tout le trajet (257 milles) demandait douze jours. Une seconde voie, partant aussi de Coptos, menait à un autre port de la mer Rouge, plus au nord, Myos-Horrnos. Toutes deux, suivies par les marchands de l'Inde, de l'Arabie, de l'Éthiopie 21, étaient infestées par les brigands et les pillards, dissimulés dans les cavernes de la montagne, qui assaillaient les riches caravanes 28 ; les postes militaires, de distance en distance, étaient eux-mêmes en sûreté dans les grottes 29 ; quelques voyageurs, sauvés des Trogodytes et des Arabes, ont gravé là des proscynèmes 30. Hadrien construisit plus tard (vers 137) la via nova conduisant, « à travers une région peu sûre n, de sa chère ville d'Antinoüs, près d'Hermopolis, jusqu'à Bérénice ; celle-là n'allait pas directement de la mer Rouge au Nil ; elle décrivait un angle très obtus; longtemps elle longeait la mer, laissant à gauche les mon VIA 812 VIA tagnes côtières, puis, quelque part, vers Myos Hormos, tournait vers le Nil, traversant dans sa plus grande largeur le désert arabique. L'empereur la pourvut largement de postes armés t et de citernes où s'engouffrait le ruissellement des montagnes. Plus tard il n'est plus question de cette voie et on peut se demander si elle a subsisté; néanmoins quelques traces en ont été relevées de notre temps 2. La voie fluviale ne suffisait pas, apparemment, pour les transports de la vallée; le Nil, en effet, était longé par une route3 qui, partant d'Alexandrie, passait à Chéran (Babylone), Hermopolis, et continuait au delà de Philae, où commentait un nouveau comput des milles 4 ; Trajan y donna ses soins D'autre part, la mer Rouge était reliée au Delta par un chemin qui, par Serapeum, rattachait à IIerôopolis le havre de Clysma, au fond du golfe de même nom 6 et, coupant la péninsule de Sinaï, gagnait la pointe du golfe Aelanitique 7. On voit encore par la Table de Peutinger qu'une route conduisait aux grandes oasis à l'ouest du Nil et qu'une voie côtière se prolongeait, par Cyrène, d'Alexandrie jusqu'aux Syrtes. Arabie, Syrie, Palestine, Phénicie. Le commerce de l'Inde et de l'Arabie avec le bassin de la Méditerranée, outre son itinéraire d'Égypte, en avait un autre du côté est de la mer Érythrée 8. Un marchand d'Égypte, qui écrivait sous Vespasien, cite 9 le ropot5ptov de Leucè Kômè, sis à peu près en face de Bérénice, point de départ des voyages vers Pétra et les États du roi nabatéen ; les chefs de caravanes, xxtt.-iiMtl.7ropot, emmenaient avec eux une telle foule de gens et de bâtes de somme qu'on eût dit, aux étapes, des campements militaires ". Les Romains surveillaient ce transit avec grande attention. Pline cite un tronçon rattachant Pétra et Gaza par le sud de la mer Morte", et qui, à Gaza, rejoignait une autre grande voie commerciale, devenue aussi plus tard une route de pèlerins, conduisant de Damas au delta du Nil ". Suivant l'Itinéraire d'Antonin, après Éleuthéropolis elle n'atteignait la côte qu'à Ascalon ; plus tôt dans la Table de Peutinger, qui la montre arrivant de Caesarea Panéas à Tyr, Ptolémais Acé, Jappé, Jamnia. Le commerce n'avait sans doute pas qu'un seul passage ; il s'agit de deux tracés confluant à Gaza et poursuivant ensuite, par Raphia, Rhinocolura, Péluse, Daphné, jusqu'à IIéliopolis et Memphis. Les caravanes qui passaient à l'est de la mer Morte et du Jourdain ne jouirent d'une véritable sécurité que Iorsque Trajan, ayant formé la province d'Arabie, eut créé les voies stratégiques qui en protégeaient le limes, à la lisière de l'Arabie déserte. On en connaît actuellement deux i3, également établies par le gouverneur C. Claudius Severus : l'une, achevée en Iii, allait en droite ligne de la frontière nord de la province vers la Syrie, se dirigeant par la capitale Bostra, dont les ruines grandioses révèlent aujourd'hui l'importance, vers Philadelphie (Amman), non moins étendue et pros père, et de là, en plein sud, par Pétra, vers la mer Rouge; la seconde, qui existait déjà en 105, fut restaurée en 112 ou seulement alors transformée en voie militaire; elle menait de Philadelphie à Bostra par Gérasa et Adraha. La première 14 avait jusqu'à 6 mètres de largeur; elle était soigneusement empierrée en appareil polygonal de basalte. De très nombreux milliaires ont été retrouvés tout le long, aux noms de Trajan, MarcAurèle et Vérus, qui la restaurèrent dans les années 161 et suivantes, Commode, Pertinax, Septime Sévère, Garadalla, dont le légat Furnius Julianus, en 213, montra dans ces régions une grande activité, Maximin, Vaballath, Dioclétien. L'autre", au bord de laquelle on lit les mêmes noms, avec ceux d'Hadrien et de Julien, quoique beaucoup plus longue, était plus pratique, car elle rie traversait pas les mêmes solitudes dépourvues d'eau, dans lesquelles il avait fallu creuser des citernes; elle desservait, outre la cité considérable de Gérasa, où se voient encore des restes de portiques et de constructions fort importantes, de petits centres actifs, Arbéla (Irbid), Adraha (Dorat) ; la première ne comportait, comme station intermédiaire, que l'insignifiante 'l'hanHa de la Table de Peutinger. Réunies à Philadelphie, toutes deux n'en faisaient qu'une jusqu'à IIesbon et Médéba ; plus au sud, au contraire, les derniers explorateurs ont retrouvé avec surprise un certain nombre de fragments de routes, semblant se doubler les uns les autres, mais qui devaient servir à relier entre eux les nombreux postes militaires jalonnant ou avoisinant le limes extérieur de l'Arabie 16. A part Aréopolis (RabbathMoab) et Pétra, les noms romains, sur tout le parcours, demeurent inconnus ; mais la multitude des ruines encore visibles de Bostra à dlaan et Akaba" , grands camps (principalement celui d'El-Ledjoun) et postes militaires d'étendue variable, montre à quel point cette zone était fortifiée. En Palestine", une grande route romaine reliait Bostra à Damas par Phaené, où subsistaient récemment encore des ruines importantes ; une autre menait de Damas à Gérasa, par Névé et Adraha; un embranchement se détachait de Névé vers Tibériade par la rive sud du lac, mais on atteignait aussi cette dernière ville, au départ de Damas, par la rive nord. De Gérasa, un tronçon gagnait à Scythopolis la voie samaritaine partant de Tibériade 19, qui suivait, à une distance irrégulière, la rive droite du Jourdain jusqu'à Jéricho, d'où montait vers Jérusalem (Aelia Capitolina) celle qui venait de Médéba. Aelia était elle-même un grand carrefour, d'où rayonnaient : vers le nord la voie de Samarie, Néapolis (Naplouse) et Ptolémais Acé ; vers l'ouest la voie de Joppé (Jaffa) par Emmaüs-Nicopolis (avec embranchemant de là sur Gaza par Éleuthéropolis) et Lydia-Dîospolis; vers les régions montagneuses du sud, un chemin à itinéraire douteux, qu'on ne distingue qu'avant Hébron, desservait des villes peu connues. VIA 813 ---ViA Au nord de Bostra, une autre route, suivant à peu près la lisière du plateau volcanique du Safa, et passant par Saltaha (Nelnara), atteignait, après un long parcours très difficile dans des régions desséchées la grande cité de Palmyre, née dans une oasis fertile, centre commercial de premier ordre pour les produits de l'Iran et de l'Inde, et devenue sous les empereurs romains une base d'opérations contre les Parthes. 1l1ais Palmyre était principalement reliée à Damas, suivant un itinéraire qui est encore celui des caravanes 2, et dont la surveillance était assurée par quelques postes mentionnés dans la Notitia dignitatum 3. De Palmyre on parvenait aussi à l'Euphrate par une voie aujourd'hui assez généralement abandonnée, qui longeait la villesanctuaire Résapha-Sergiopolis et débouchait sur le fleuve aux abords de Sura. Cette Strata Diocletiana comme l'appelle un des milliaires qu'on y a déchiffrés 5, dut exister avant notre ère, dès le début de l'occupation romaine 6. De Damas, les convois de Palmyre traversaient péniblement l'Anti-Liban et le Liban et, après une halte à Héliopolis, entre ces deux chaînes, venaient prendre la mer au port de Béryte7. Enfin, en dehors d'une voie secondaire qui la rattachait à Émèse (Homs), Palmyre, grâce à une route ouverte par Antonin le Pieux, continuée ou refaite sous Septime Sévère 8, trouvait encore une issue vers Epiphania (Hama) et Apamée, du côté' de l'Oronte et de la grande métropole d'Antioche, qui communiquait avec la mer par le port, aujourd'hui ensablé, de Séleucie de Piérie. Émèse elle-même, ou Épiphania, était rattachée au port d'Antaradus, et quant à la voie côtière venant d'Égypte, elle se prolongeait, au delà de Césarée de Palestine, par Ptolémais Acé, Tyr, Sidon, Béryte, Antaradus, Laodicée, Séleucie et Antioche 9, pour ne citer que les relais les plus notables. La dernière de ces villes était capot viae, d'après un milliaire de Néron S0, et il semble bien que son terminus se plaçait à Ptolémais Acé. Il y avait là une très ancienne voie d'invasion, que le gouverneur de ce temps ne fit qu'entretenir, améliorer ; elle dut être fort utile lors de la grande insurrection juive ; mais après la pacification elle n'eut plus qu'une valeur commerciale, même un simple intérêt local pour chacun des points indiqués ; elle desservait les alentours de chaque cité 1f. Mésopotamie, il rmenie. Les caravanes d'Orient avaient aussi à leur disposition d'autres tracés plus septentrionaux, tous aboutissant à Antioche. La voie riveraine de l'Euphrate (fleuve navigable aux bateaux plats à partir de Thapsaque environ), qui passait à Circesium, dernier poste romain, Nicephorium-Callinicum, Sura, avait surtout une importance militaire et n'en prenait une pour le négoce que de là à Antioche par Barbalissus et Chalcis 12. La Mésopotamie, entre la moderne Mossoul et Zeugma, passage souvent cité dans les auteurs pour son pont de bateaux, était traversée par deux voies qui se rejoignaient à chaque extrémité 13: l'une suivait le cours supérieur de l'Aborras !4, et, comme nous le montre la Table de Peutinger, passait à Résaina-Théodosiepolis, entourée par Justinien de forteresses nombreuses 1J, Carrhae et Batnae, ville de grandes foires annuelles ; l'autre avait pour stations principales Nisibe, Dara, dont Justinien fit une place formidable, Constantia et Édesse. La première était plus courte, mais plus désertique et plus brillée . Il est infiniment probable que tous ces chemins ont été l'objet de réfections sérieuses, surtout à l'époque où la Mésopotamie devint une marche militaire de premier rang, c'est-à-dire au Bas-Empire et principalement sous Justinien qui, selon Procope, releva ou renforça toutes ces villes frontières ; mais l'auteur du De aedificiis ne dit pas grand'chose de l'entretien des chaussées 16, et de son temps il ne se faisait plus de milliaires. Les deux grandes artères mésopotamiennes croisaient de distance en distance des chemins secondaires: l'un rattachait Dara à Circesium par le coude de l'Aborras ; un autre, qui ne figure pas dans les anciens routiers 17, Constantia à Résaina. Une troisième voie, d'intérêt bien supérieur, ne reliait pas seulement Carrhae et Édesse ; ces deux villes, au coeur d'une région qui servit plus d'une fois de centre de rassemblement militaire et vit des quartiers généraux d'armées, se rattachaient directement aux deux grands fleuves16. Carrhae communiquait avec l'Euphrate par son affluent le Bélias, qui confluait à Nicephorium, itinéraire jalonné précédemment d'une série de stations parthiques !9; Édesse avec le Tigre par une route qui atteignait celui-ci à Amida et en suivait désormais les berges. Enfin, vu l'importance stratégique du grand quadrilatère déterminé par le Bélias et la boucle incomplète de l'Euphrate 20, autrement dit l'Orshoène, d'Édesse on arrivait encore à l'Euphrate par deux autres routes, l'une sur Samosate, elle-même reliée à Constantia, l'autre par Batnae dans la direction d'Hiérapolis. A l'ouest de l'Osrhoène, dans une contrée très peuplée jadis et fort peu aujourd'hui, toutes les voies convergeaient vers Antioche, à la seule exception de celle qui, à Épiphania, quittait l'Oronte et, dans la direction du nord, couverte par des châteaux forts ", poussait vers Chalcis, Béroéa (Alep) et au delà. Avant d'arriver aux moyens de communication en Asie Mineure, il convient d'étudier les voies des régions frontières qui la protégeaient. Les limites de l'Empire ont beaucoup changé, au cours des siècles, dans les contrées montagneuses à travers lesquelles serpente l'Euphrate supérieur" ; toutefois il posséda presque toujours, sous le nom de Petite Arménie, le pays situé YIA 814 VIA immédiatement à l'ouest du fleuve 1. Entre elle et la Syrie, la jonction s'opérait dans cet angle intermédiaire que dessine l'Euphrate entre Samosate et Mélitène. Cette dernière ville, également distante et fort distante d'Antioche et de Trébizonde, occupait une position de premier ordre. De Samosate on y arrivait par deux routes : l'une suivait à peu près les zigzags du fleuve2 ; l'autre, prenant à travers les terres, n'a plus laissé aucune trace, sauf le pont bien connu de Kiachta 3. Mélitène commandait un carrefour de vallées : celle du Tochma-Sou actuel, suivie par la route de Césarée de Cappadoce ; l'Euphrate vers le sud ; l'Arsanias (ilourad-Sou) à l'est, couvert par les places de Dascusa et Ziata ; au nord l'Euphrate supérieur (KaraSou), que la voie riveraine continuait d'accompagner, de près ou de loin suivant l'orographie, en passant à Dascusa, Zimara, Analibla, Carsaga, puis quittait soudain pour faire un détour vers une autre position centrale, Satala (Sadagh) 4. Là, nouveau carrefour 5 : à l'est, les sources de l'Euphrate, derrière lesquelles commençait l'Araxe, avec une route qui, par Elegia et plus tard Théodosiopolis (vers Erzeroum), conduisait à Artaxata; à l'ouest les routes du Pont et de Cappadoce 6; au nord celle de Colchide, par le Lycus-Boas (Tchorok), et celle de Trébizonde, voie accidentée dont s'écarte peu la chaussée moderne, au bord de laquelle les « khans ont conservé certains noms de stations des anciens itinéraires'. Asie Mineure. Ramsay, dans un ouvrage classique', a défini comme suit le plan de cette étude : Io la grande route royale, avec ses embranchements sur les districts voisins; 20 voies reliant avec Sardes et Smyrne le nord de la Phrygie et la Galatie ; 30 routes militaires pour la garde de la frontière orientale ; 4' routes militaires construites vers la fin du ter siècle avant notre ère, pour défendre la province de Galatie et réduire les tribus de montagnards en Pisidie et Isaurie ; 50 voies commerciales secondaires conduisant du nord-ouest au sudest de la péninsule. Le plan aurai tl'avantage d'être très clair ; mais il resterait incomplet, et Ramsay lui-même ne l'a pas exactement suivi. De plus, nous commencerons par les voies militaires vers les confins orientaux, qui se raccordent étroitement avec celles 'que nous venons d'étudier. Dans cet ensemble, il y a peu d'itinéraires absolument nouveaux ; la plupart de ceux de l'époque romaine étaient déjà en usage sous les dernières dynasties helléniques. Le tracé est présenté très différemment, en bien des cas, dans l'Itinéraire d'Antonin et la Table de Peutinger; mais souvent un tracé approximatif résulte suffisamment de l'indication des villes principales situées sur le parcours, et cela est particulièrement vrai pour les cartes de dimensions réduites. Les routes d'Asie sont bien loin d'attester le même travail soigneux que celles d'Italie; le dallage ne devait pas être continu ; les vestiges les plus sûrs sont fournis par des milliaires, des restes de ponts, des entailles dans le roc en pays montagneux. La contrée était généralement pacifique ; ce sont des raisons commerciales qui ont avant tout déterminé les grandes lignes du réseau. La Petite Arménie avait deux centres : Mélitène et Satala ; la Cappadoce également : Césarée ou Mazaca, et Sébastée (Sivas). De la première, une voie peu directe, très reconnaissable aujourd'hui, conduisait à Mélitène par Comana, Cocussus et Arabissus °. Une très riche série de bornes 10 rappelle toutes les réparations faites par Septime Sèvère et ses fils, Llagabale, Alexandre Sévère, Maximin, Pupien, Balbin et les Gordiens, les Philippes, Dèce, Galle et Volusien, Dioclétien. C'est dire toute l'importance de cette artère durant l'époque troublée du me siècle. Il y avait déjà là une route commerciale vers 100 av. J.-C. " ; Sévère a dû, le premier, lui donner des fondations de pierres ; le premier sans doute il abandonna le rêve d'annexer la Grande Arménie ; aussi fortifia-t-il les lignes intérieures. Cette route, vers 400, commença d'être beaucoup moins fréquentée, à cause des brigands isauriens qui la rendaient périlleuse 12, et l'on suivit dès lors plutôt les routes de Cilicie au sud, celles de Sébastée au nord. Un tronçon, partant du sud, menait aussi de Germanicia (Marach) à Arabissus 13, par la haute vallée du Pyramus. Césarée et Sébastée étaient elles-mêmes reliées directement. Sébastée était la clef d'un grand nombre de communications 14 : routes vers Comana de Cappadoce, vers Arabissus, vers Mélitène, vers Zimara, vers Satala par Nicopolis 12, vers Comanade Pont et vers Ancyre. Le Pont fournissait une voie d'accès en Arménie, d'abord par le médiocre chemin de Trébizonde, puis par Amisus, capitale commerciale de la contrée (alors que Sinope en était la capitale stratégique) et seule porte ouverte sur l'intérieur, entre Amastris et Trébizonde, à travers la chaîne puissante dominant le Pont-Euxin 1° Le négoce s'y acheminait par une route d'origine royale 17, venant de Sébastopolis et Zéla ; à Amasée elle en croisait une autre, très ancienne aussi, parallèle au rivage, qui, d'Andrapa, près de l'Halys, et par Euchaita, suivait en gros la vallée de l'Iris, puis celle du Lycus, et vers Nicopolis se raccordait à la route Sébastée-Satala. L'importance politique éventuelle de cette artère apparut déjà dans les guerres de Pompée et de Mithridate ; le vainqueur y fonda Nicopolis, agrandit et rebaptisa Néocésarée, Magnopolis, Néapolis, Pompéiopolis. Les milliaires i8 ne rappellent pas moins de vingt reconstructions entre 97 et 323. Comme, depuis Vespasien, les provinces du Danube devenaient de plus en plus les quartiers généraux de l'armée romaine, cette route du VIA -815-VIA Pont Polémoniaque fut la voie la plus courte vers Méliténe aux effectifs envoyés d'Europe. Néocésarée était elle-même la tête de deux voies, l'une vers la Cappadoce, l'autre vers Tavium (Galatie), passant toutes deux sans doute par Comana Pontica'. On pouvait aussi pénétrer en Cappadoce par le sud, de Cilicie, grâce à deux voies qui se rejoignaient à quelque distance de la côte, en arrière des alluvions du Sarus et du Pyramus : l'une venait du golfe d'Alexandrette et, par Sisium, se dirigeait sur Cocussus; l'autre empruntait les célèbres Portes Ciliciennes2, par Tarse, Podandus, Faustinopolis, Tyane et Césarée. 11 paraît bien établi, quoique le fait n'ait pas été sérieusement vérifié, que, comme en Syrie, une voie côtière épousait dans les grandes lignes les contours de l'Asie Mineure On ne sait si elle poussa jamais jusqu'à Dioscurias et Pityus dans la région du Caucase (la Table de Peulinger l'arrête à Trébizonde), niais en territoire d'empire elle devait rejoindre partout les principales localités sur le rivage. En beaucoup de points elle devait être antérieure à la domination de Rome, par exemple en Paphlagonie, où elle décrivait des arcs de cercle ayant leurs extrémités aux cités de la côte qu'il fallait desservir. Claude avait exécuté des travaux aux environs d'Amastris, creusant à travers le roc un raccourci pour éviter un détour au sud de cette ville ; Vespasien et ses fils ne furent pas moins actifs C'est surtout à partir du Bosphore que cette route suivait de près le littoral, par Chalcédoine, Nicomédie, Cius, Cyzique, Parium, Lampsaque, Abydos, Dardanos, Ilium, Alexandrie Troas, Assus, Antandrus, Adramyttium, Attaea, Elaea, Myrina, Cymé, Smyrne, Téos, Lébédus, Colophon, Éphèse, Milet, Myndus, même Cnide'. Passé la Carie, elle s'enfonçait quelque peu dans l'intérieur, traversait l'Indus, longeait la côte jusqu'à Telmessus, coupait à travers la montagne, suivait le Xanthus de Tlos à l'embouchure, à Patara; après un tracé incertain dans le détail, on la retrouvait à Myra, Phasélis, Attaléa ; elle reculait encore dans l'intérieur, comme les villes elles-mêmes, vers Perge ', Sillyum, Aspendus, et enfin longeait encore la mer, sauf aux bouches des torrents, par Célendéris, Séleucie du Calycadnus, Corycus S, Elaeussa9, Soli-Pompéiopolis et Tarse. La plus importante des voies d'accès vers l'intérieur, en partant de l'ouest, était la voie gréco-romaine, remise à neuf par le gouverneur M'. Aquilins vers 130, dont la tète se trouvait à Éphèse et qui empruntait d'une manière générale la vallée du Méandre, puis celle du Lycus. Elle eut d'abord une utilité militaire, principalement sous la République, car elle permettait d'atteindre au plus vite les peuplades entreprenantes cachées dans les mon tagnes de Pisidie et d'Isaurie ; il y eut un moment où les pirates des côtes et les brigands de Lycie interdirent l'abord du pays par le sud, et ces circonstances firent attribuer temporairement à l'autorité du gouverneur d'Asie une partie des territoires auxquels, plus à l'est, aboutissait cette grande lignet0. Mais normalement ce fut là surtout une route commerciale. Elle passait par Magnésie du Méandre, Tralles", Laodicée du Lycus, Colosses et Apamée-Cibotus; elle franchissait le fleuve à Antioche de Carie, au lieu de suivre les rives nord du Méandre et du Lycus, où l'on profite aujourd'hui d'un meilleur chemin ; mais à l'origine les cités principales se pressaient sur la rive gauche; le trafic ne l'abandonna pas. Apamée-Cibotus marquait encore un carrefour de premier ordre ; de là la route d'l phèse poursuivaitf2 vers Antioche de Pisidie, d'où elle gagnait le sud, et, laissant à l'ouest le lac Caralis, se prolongeait vers Isaura, Derbe et Laranda. Une autre continuait vers le nord-est jusqu'à la plaine du Caystre, ensuite, vers Julia Ipsus, s'infléchissait au sud-est, dans la direction de Philomelium, Laodicée brûlée (Laodiedea combusta), Archelaïs 13, puis, tournant au midi, rejoignait, par Tyane et Faustinopolis, à Podandus, la route redescendant des Portes Ciliciennes ". La Pamphylie et la Pisidie se couvrirent de voies secondaires ; une des plus notables était cette Via Sebaste15, construite en 6 av. J.-C. par Cornulus Aquila, pour relier les colonies militaires créées dans la région par Auguste f 5. Elle faisait une sorte de Z : de Laodicée brûlée elle menait à Iconium, Lystra Pappa, Juliopolis, Parlaïs (d'où, par Mallus, se détachait une voie atteignant la mer à Sidè 13), Antioche 13, Cremna et Comama20. Cette voie se rattachait aussi à unè autre qui, de Pappa, menait vers Apamée et Apollonie 21, cette dernière ville 22 étant une station de la route qui, de Laodicée du Lycus, conduisait à Cibyra2' et à Attaléa sur la Méditerranée. De Cibyra enfin un chemin, construit ou réparé par Septime Sévère, s'avançait jusqu'au lac Ascania (Idoudour-Gheul)24. Une assez grande obscurité plane encore sur le détail des itinéraires anciens de Lycie et de Pisidie. La Table de Peutinger en signale quelques-uns faciles à esquisser sur la carte 24 : Iconium, Barata, Castabala, Cybistra, avec embranchements, l'un sur Podandus et l'autre sur Tyane21 ; Barata, Laranda 27, Ninica-Claudiopolis, et embranchements, l'un sur Célendéris, l'autre sur Séleucie d'Isaurie ou du Calycadnus, où l'on allait également de Laranda par Olba2S. Les voies romaines de Galatie sont moins sûres encore ; elles n'ont pas dû se multiplier, d'ailleurs, dans VIA 816 VIA cotte province déshéritée. Pourtant les itinéraires anciens mentionnent diverses routes rayonnant de la capitale, Ancyre' : l'une 2, vers l'ouest, rattachait cette ville à Dorylée, par Germè, d'où l'on atteignait aussi Pessinonte3 ; deux autres, par Cratéa-Flaviopolis au nordouest ', et par Gangra-Germanicopolis au nord-est, à la grande route est-ouest de Bithynie ; celle du sud-est, par Aliassus, Aspona, à Archelaïs 5 ; celle de l'est, par Tavium, à la Cappadoce. La Bithynie6, dans sa partie orientale, comprenait surtout, obéissant à l'allure générale des plissements montagneux, la grande voie Nicomédie, BithyniumClaudiopolis, qui vers Cratéa entrait en Paphlagonie, suivait les affluents supérieurs du Billaeus et continuait vers le Pont 7. Elle semble avoir été en relations avec la côte par un chemin Bithynium-Tieium8, qui fut remis en état au Ive siècle 9. De Nicée une route importante se détachait vers Dorylée '0 et prenait ensuite, par la vallée du Tembris, la direction d'Ancyre. Une autre, venant de Nicomédie par l'intérieur 11, contournait après Nicée le lac Ascanius et rejoignait Cius, Pruse, franchissait vers Milétopolis le Rhyndacus et poursuivait vers Cyzique 12 La voie Nicée-Dorylée mettait la Bithynie en communication avec les confins orientaux de la province proconsulaire d'Asie, dont le premier gouverneur, M'. Aquilins, avait entrepris bien vite, pour raisons de sécurité, des chemins de ronde provisoires 13, qui subsistèrent, d'une direction d'ensemble sud-ouest nord-est, comme les limites mêmes de l'Asie, et qui traversaient les divers districts de la montagneuse Phrygie : voie d'Apamée à Cibyra ; voie de Dorylée à Apamée, par Nacoléa 14, Bruzus, d'où un embranchement empruntait la vallée du Glaucus, qui coule, en baignant Euménie, vers Iliérapolis et Laodicée '° ; il évitait le détour par Apamée aux voyageurs venant des parties reculées de la Phrygie et se rendant à Éphèse. Pour d'autres, le terme du voyage était le grand port de Smyrne ; aussi l'artère capitale Apamée-Éphèse se trouvait-elle doublée par une seconde, parallèle mais de moindre importance par son transit, qui, allant droit d'abord vers Sardes, suivait bientôt la vallée de l'Hermus jusque vers Téménothyra et aboutissait à Acmonia Au départ de Smyrne, elle était doublée elle-même par la voie secondaire contournant le Sipyle et envoyant de Magnésie un chemin vers l'industrieuse cité de Thyatira 17. Les deux routes fluviales détachaient des embranchements : l'un d'eux, de Tralles, desservait la Carie' 8 par la vallée du Marsyas (Alabanda, Lagina, Stratonicée, jus qu'à Idyma, au commencement de la Pérée rhodienne)19; un autre joignait Antioche et Aphrodisias; un troisième Laodicée et, par Themissonium, Cibyra, également reliée à Apamée 20 ; de Sardes aussi on allait à Laodicée par Philadelphie, Tripolis et Hiérapolis ; d'li phèse on gagnait directement Sardes par une route passant à Hypaepa et enjambant les hauteurs du Tmolus 21. Entre Sardes et Laodicée, Philadelphie était la tète d'une voie conduisant à Acmonia, qui, poursuivant dans la même direction, longeait la rivière Tembris, s'allongeait devant Apia, Cotiaeum et atteignait Dorylée22. De Cotiaeum, un autre chemin menait à Docimnium 23, Prymnessus (jointe à Laodicée brûlée par Julia et Philomelium), Synnada et Apamée 92. Enfin une dernière série de voies commerciales avait pour point de départ Cyzique, « porte de l'Asie» 73. Deux artères principales: l'une empruntait la vallée du Macestus, par Milétopolis, Hadrianotherae 26, et, passant entre Attalaea et Nacrasa, aboutissait à Thyatira ; la seconde, laissant à l'est le lac Aphnitis, gagnait à Poemanenumle Tarsius et le remontait pour atteindre Pergame, puis Elaea27. Entre elles d'eux, plusieurs raccords : Hadrianotherae-Pergame et Pergame-Thyatira. Une troisième voie, par la vallée de l'Aesepus, menait de Cyzique à Adramyttium et encore à Pergame 28. Peut-être même Pergame était-elle reliée, par Stratonicée, Ancyre de Mysie, Synaus, Aezani et Cotiaeurn, avec Dorylée 9°. On voit combien est riche et complexe le réseau des routes de l'Asie Mineure, spécialement dans la province proconsulaire. Tel que nous le présente la Table de Peutinger30, avec des erreurs certaines, il paraît aussi très confus. Cependant on n'a pas de peine à y reconnaître, dans la moitié occidentale de l'Anatolie, une sorte de disposition en éventail, comme un double entonnoir, dont les vallées de l'Hermus et du Méandre représentent les couloirs, tandis que Phrygie et Pisidie en sont le cône commun. Il y a là un effet naturel de la configuration du pays, et du reste c'est avec l'Italie que se pratiquaient les échanges les plus actifs. Les voies les plus fréquentées à l'époque byzantine furent, pour une raison toute semblable, celles qui s'orientaient vers Constantinople 31, principalement celles du nord de l'Anatolie, alors qu'auparavant celles du sud avaient plus d'importance. Aucun document ne nous offre la liste des routes du Bas-Empire ; mais beaucoup se sont conservées dans les pauvres sentiers turcs d'aujourd'hui. C'est surtout Justinien32 qui a donné ses soins à tout le système, et vigilamment entretenu la grande artère partant VIA 817 VIA de Nicomédie' et bifurquant plus loin vers Césarée et Sébastée, aux approches de cette Arménie qui créa tant