Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article ARCA

ARCA. II. Ce nom s'appliquait à toute caisse publique dans la langue de l'administration romaine ; cependant ceux d'aerarium Saturni, aerarium sacrum ou militare, aerarlam privatuln désignent spécialement le trésor public de l'État, ou certaines parties du trésor public, ou enfin le trésor du prince, et font l'objet d'articles auxquels nous ren rons ici seulement des caisses constamment désignées sous le nom d'arca. exactes sur le régime municipal des villes, tant municipes que colonies ou préfectures, en Italie particulièrement, vers la fin de la république et pendant les premiers temps de l'empire [MuNIcIPIuM]. Chacune de ces cités avait son budget des recettes et des dépenses et naturellement une caisse communale (pecunia publica, arca puMica) administrée par des magistrats spéciaux, ordinairement nommés quaestores pecuniae publicae, ou aerarei, ou arcae publicae t ; plus tard, et surtout depuis Nerva et Trajan, on voit apparaître comme particulièrement chargé de cet emploi, un CURATOR RRIPUBLICAE, nommé par l'empereur. Quelquefois la questure de la caisse municipale était réunie à l'administration des fonds alimentaires pour Les ressources de la caisse cornmunale étaient ordinairement les suivantes : 1° les revenus des immeubles communaux 3 qui étaient donnés à ferme pour cinq ans ou ordinairement à long terme, et même à perpétuité [AUER VECTIGALIS] à des particuliers ou à des sociétés de publicains 4; 2° les revenus des capitaux de la commune (provenant de legs, fidéicommis, vente de biens de la cité 3) ; il était tenu registre de ces capitaux qui étaient placés par les soins d'un agent spécial, le CURATOR CALENDARn; le texte du Digeste 6 semble toutefois le mettre sur la même ligne que le questeur; 3° le revenu des mines, carrières, salines, étangs, forêts, ordinairement affermés à des publicains 7; 4° le produit de différents impôts communaux sur l'usage des aqueducs, des bains [BALNEARE] et des cloaques des droits sur les dépaissances communes ou compascua B, des péages f0, des amendes prononcées par les duumvirs et les édiles ", et diverses autres recettes analogues 12. Il paraît même que des droits d'octroi étaient perçus à l'entrée de certaines marchandises ou sur leur vente au marché, et que la perception de ces redevances, comme de la plupart des précédentes f3, était adjugée aux enchères et moyennant caution", à des sociétés de publicains ; mais ces droits ne pouvaient être établis sans l'autorisation de l'empereur 15; 5° la commune percevait en nature certains produits destinés à des services publics, ainsi une part des fruits des forêts, pour des distributions communales '6; des matériaux fournis par les riverains des chemins publics, enfin les produits du travail des esclaves de la cité f7. Comme ressources extraordinaires de l'ares de la cité, nous devons mentionner : 1° les valeurs acquises par legs, fidéicommis, ou donations entre-vifs ; 2° depuis Trajan les successions ab intestat des affranchis de la ville le ; 3° en vertu d'un sénatus-consulte spécial, les institutions testamentaires émanées des mêmes personnes'', et plus tard,en 469, en vertu d'une constitution de l'empereur Léon, insérée au Code de Justinien, de la part de tout testateur même non affranchi de la cité "° ; 4° enfin, les emprunts que la ville avait été autorisée à faire par le président de la province, et en vertu d'un mandat spécial donné par la curie au curator reepublicae u. Parmi les dépenses ordinaires ou habituelles, nous trouvons : 1° les frais d'entretien des bâtiments municipaux es ; 2° les frais d'entretien de la voirie, avec le concours des riverains; 3° les frais de conservation des fortifications, auxquelles du reste on ne pouvait toucher sans une autorisation préalable du président ou de l'empereur; un rescrit de Mare-Aurèle exigea même que le gouverneur en référât toujours au prince "g ; un tiers des revenus des biens communaux pouvait d'ailleurs être affecté à cet emploi, d'après un rescrit d'Arcadius et d'Honorius, rendu en 395 et confirmant une décision de Valentinien ; 4r' les allocations attribuées aux professeurs et médecins agréés in numerum par la curie 2"; 5° les fonds destinés à l'achat de blé, d'huile, etc., pour les distributions à faire aux pauvres. -Au nombre des dépenses extraordinaires se présentent : 1° les constructions nouvelles, qui du reste ne pouvaient être élevées sans autorisation préalable "5; 2° les frais de route ou viaticum votés aux députés près du praeses provincial ou de l'empereur 36; 3° le prix des approvisionnements extraordinaires en cas de disette 27; 4° les frais ARC 36 ARC des jeux publics, en cas d'insuffisance des fonds légués avec cette charge u ; 5° le remboursement des emprunts et autres dettes de la cité; et enfin 6° les secours aux décurions ruinés 29. Des constitutions avaient du reste interdit à la curie toute largesse faite des deniers de la ville au profit des particuliers 30 ; la cité, assimilée aux mineurs de 25 ans, avait la ressource de la restitutio in integrum contre les actes par lesquels elle aurait été lésée 31 La tutelle administrative, déjà en vigueur du temps de Pline, ne fit que s'accroître par la suite. Non-seulement sous Trajan le gouverneur autorisait les travaux de construction, mais il examinait le budget des cités, et approuvait les comptes des questeurs ou curateurs 32, et spécialement ceux du curator calendarii, nommé par lui; mais après les Antonins, l'intervention du pouvoir central dans l'administration municipale et spécialement dans la gestion de la fortune communale devint excessive et même ruineuse pour les cités. Souvent les propriétés des villes leur furent enlevées, comme on peut en juger par les édits de restitution de l'empereur Julien 33 , et plus tard de Théodose le Jeune 34. Les besoins de l'administration nouvelle organisée par Dioclétien 35 forcèrent les empereurs à confisquer plus ou moins directement une partie du patrimoine ou des revenus communaux. Non-seulement les anciens impôts (vectigalia) votés par les curies furent maintenus et rendus perpétuels 3R, mais de nouveaux furent d'autant plus aisément autorisés que désormais le trésor public s'appropriait les deux tiers des impôts en général et sauf certains versements réservés en entier à l'aerariûm 37, le tiers seulement demeurant affecté aux dépenses locales de la cité. Plus tard, cependant, Majorien et Justinien dans leurs novelles R3 essayèrent de garantir le patrimoine communal, en interdisant aux agents du trésor public u de toucher aux deniers destinés aux travaux et à l'approvisionnement des villes ; mais alors la ruine du régime municipal était consommée particulièrement en Occident, où elle avait entraîné celle de l'empire lui-même. En Orient, Justinien plaça la surveil lance du curator, autrefois attribuée au praeses provinciae, sous le contrôle des évêques `0. ARCA PRAEFECTURAE. Portion spéciale du trésor public qui forma, depuis Dioclétien et Constantin, une caisse particulière, placée sous la direction du préfet du prétoire' [PRAEFECTUS PRAETORbO] et correspondant à l'ancien aerarium militare d'Auguste. Cette caisse s'alimentait : 1° de la contribution en nature ou annona [ANNONARIAE SPECIES], dont les rôles s'appelaient annonariae functiones, par opposition aux largitionales tituli; elle était due alors, en Italie, même par les régions urbicaires 2, et par certaines provinces, pour les besoins de l'armée et des employés [ANNONA MILITARIS], et ne pouvait en général se remplacer par de l'argent [ADAERATIO]; 2° en certains cas l'arca praefecti pouvait recourir à des réquisitions extraordinaires, sauf indemnité [PUBLICA COMPARATIO], ou imputation sur l'impôt. Comme ressource extraordinaire, elle participait quelquefois pour part égale avec l'AERARIUM SACRUM et l'AERARIUM PRIVATUM, au produit des confiscations ou des biens vacants et sans maître 3. Quant aux dépenses de la caisse du préfet, elles consistaient principalement : 1° dans les frais d'entretien de l'armée et des fonctionnaires au moyen des fournitures en nature ; 2° dans le matériel de la poste [CURSUS PUBLICUS] et de l'armement de toute nature. Les provinciaux livraient aux fabriques de l'État toutes les matières premières, bois, métaux, étoffes, vêtements. etc. Ces établissements nombreux et distribués sur toute la circonférence de l'empires dépendirent, jusqu'au temps de Rufin, en 395, du préfet du prétoire; ensuite ils furent placés sous la surveillance du MAGISTER OFFICIORUM 8. Le préfet du prétoire pourvoyait à l'administration de cette caisse au moyen d'un_ nombreux personnel d'employés et des recteurs des provinces [orFICIUM, PRAEFECTUS PRAETORIO] : ainsi les impôts en nature étaient recueillis par des receveurs, suscEPTORES7, spéciaux, placés par les soins des praepositi pagoruva, et gardés par des praepositi horreorum dans des magasins publics R, le tout sous la direc fion des rectores provinciae, qui veillaient selon la forme habituelle, et par leurs tabularii, à la rentrée des impôts; la transmission de ces denrées et leur emploi normal étaient spécialement confiés aux prtmipilares ou PRIMIFILI 9, ensuite elles étaient délivrées, sur les mandats des ACTUABII ou SUBSCRIBENDARII, aux optiones des légions, qui en faisaient la distribution entre les soldats 10. [ANNONA les dépenses municipales de la ville de Rome ne furent point considérées comme distinctes de celles de l'État, puisque Rome elle-même formait une sorte de république municipale, dans le sein de laquelle s'exerçaient exclusivement les droits politiques. Ainsi l'aerarium populi supportait les charges locales, l'entretien des égouts'. Mais sous l'empire, à mesure que les droits politiques s'effacèrent et que les droits civils se généralisèrent avec la qualité de citoyen, la notion des intérêts communaux, envisagés comme séparés des intérêts généraux de l'État romain, dut se dégager et se réaliser dans les faits. ARC Bientôt ou vont apparaitre dans Rome, peut-être sous l'influence des progrès du régime des municipes [mualclriua], des revenus spéciaux, attribués à la commune et versés dans une caisse spéciale, distincte du trésor public et nommée arec, p'bliea, don l'administration appartint au sénat'. Les ressources de cette caisse se composaient principalement des droits d'entrée payés par certaines marchandises Il paraît en effet, d'après une inscription que Marc-Aurèle avait tracé autour de la ville des limites au delà desquelles les marchandises une fois entrées n'avaient plus sait que plusieurs empereurs avaient autorisé las cités à établir des impôts indirects [PoaToelum] de cette nature'. Dans le bas-empire, cette caisse municipale de la capitale subsista sous le nom d'arca quaestorla ou aerarium populi romani'. Elle était dotée de revenus particuliers et placée immédiatement sous la direction du PAAEFECTUS URBI et de son orricten. Elle pourvoyait à quelques-uns des services municipaux au moyen de prestations en nature. C'est ainsi que tous les habitants sans distinction étaient tenus à des corvées ou des fournitures d'attelages pour la réparation des murs, des portes, etc. ; bien plus, certaines régions d'Italie étaient assujetties à fournir des matériaux, comme de la chaux par exemple, pour les constructions urbaines t; mais pour les aqueducs existait une caisse spéciale [AguAt,nuc'rus]. Il avait des immeubles dont les possesseurs étaient astreints et payer par an aux voituriers ou chaufourniers une certaine quantité de vin, remplacée plus tard par une somme d'argent '°. De son côté, l'ARCA vINARiA de ta cité devait fournir son contingent en or, qui devait être changé par la corporation des changeurs u, direction du PRAEFECTUS URBI, et administrée par le ta-fionelis vïnoa'eut judex ou tribunzts fori Dinard ', cette caisse avait pour objet d'assurer l'approvisionnement en vin de la capitale et le bon marché de ce liquide. A cet effet, les régions suburbicaires de Rome devaient, ainsi que d'autres provinces, fournir à cette ville' des prestations en vin, qui étaient vendues pour le compte de l'ardu un quart au-dessous du cours du marché; les comptes des susceptores vini étaient, réglés par le ricanes urbis; ils devaient faire enregistrer les quittances des débiteurs de l'area, sous peine d'en supporter les risques ARCA FRUBENTARIA. Caisse destinée à faciliter l'approvisionnement en blé' ; elle emmagasinait l'ANNONA CIVICA due par les provinces et la distribuait ou la vendait au-dessous du cours'. A Rome, cette administration était soumise ANNONAE; à Constantinople toutefois, où il existait une institution semblable, il n'est pas question de ce dernier 3 ; certaines cités avaient aussi leur caisse frumentaire 4. ARC Aima occaiiA. Magasin ou caisse municipale' pour l'approvisionnement d'huile, que l'on tirait principalement d'Afrique 2 ; souvent en effet on distribuait cette denrée aux pauvres, au moyen des MENSAE OLEARIAE, boutiques privilégiées où l'on vendait l'huile. ARCA paovINCIAE. ---Certaines provinces ou portions de provinces avaient des associations religieuses consacrées au culte de Rome et d'Auguste [commuNE, it,mNON, CoNCILIUM PBOVINCInE]. Ces réunions possédaient une caisse alimentée par certaines contributions c'est ce que prouvent les inscriptions qui indiquent les fonctions d'un judex arcae Galliarum,d'unallectorGalliaruln,d'uninquisitorGalliaruni' .