Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article AUSPICIA

AUSPICIA (Oitavof). Dans le sens restreint et historique du mot, signes envoyés par Jupiter aux magistrats romains pour garantir au préalable la validité et l'utilité AUS 581 AUS de leurs actes publics 1 : et, par extension, droit d'observer ces signes, droit que l'on désigne d'une manière plus précise, dans son application, par le terme de spectzo 2. Cette définition exclut à dessein les auspices privés (auspicia privata 3), sur lesquels nous savons d'ailleurs peu de chose et qui tombèrent de bonne heure en désuétude [AUGURES]. II y a entre les auspices privés et les auspices publics une différence de valeur, mais non de nature. La famille, prototype de la cité, avait pour intermédiaire, entre elle et Jupiter, son chef, le père de famille. Les auspices privés étaient interprétés au besoin par des Augures privés comme les auspices publics par des Augures publics. Le parallèle est exact de tout point; il n'y a pas lieu d'y revenir. Les auspices privés comptaient pour beaucoup à l'origine dans l'organisation sociale, puisque leur possession était la condition préalable da droit d'auspices publics (auspicia publica populi Romani 4). Selon l'idée qu'on se fait de la société romaine à l'origine, on peut dériver le droit d'auspices publics de l'approbation première donnée à Jupiter par Romulus 5 ou le considérer comme la résultante des auspices privés 8. Quoi qu'il en soit, les auspices étaient à Rome la base et la consécration de l'autorité publique. Ils ne peuvent être un seul instant absents de la société ; ils se transmettent régulièrement de magistrat en magistrat, et si la cité se trouve accidentellement dépourvue de magistrats, les auspices « reviennent» ) à leur point de départ, à la communauté patricienne (auspicia patrum) 8 représentée par son Sénat, et le Sénat délègue l'exercice du droit collectif à un Interroi. Ce reflux des auspices vers leur source s'appelait renovatio auspiciorum 9. MINORA, ALIENA). Sous le régime monarchique, le roi était l'unique détenteur du droit d'auspices et le possédait dans toute sa plénitude, le déléguant au besoin sans l'aliéner ni l'amoindrir. Mais le système républicain compliqua la théorie et la pratique des auspices. D'abord, les auspices furent confiés à deux magistrats qui y avaient un droit égal. En outre, les consuls n'ayant plus de caractère sacerdotal, il fallut accorder au Pontifex maximes le droit d'inaugurer, avec auspices, les ministres du culte public [PONTIFICES, AUGURES]. Lorsque les plébéiens, dépourvus d'auspices privés 10, réclamèrent l'éligibilité au consulat et qu'on leur opposa des raisons théologiques f1, il faut bien que, dans la transaction qui créa pour un temps (444-367) des tribuns militaires à puissance consulaire, on ait fait quelque différence entre les auspices des tribuns patriciens et ceux qu'on ne put refuser à leurs collègues plébéiens". La transformation de la questure en magistrature (447), l'institution de la censure (443), de la préture et de l'édilité curule (366), la création de magistrats extraordinaires, depuis les dictateurs jusqu'aux collégesdelIvirs, IIIvirs, Vvirs, VIlvirs, Xvirs, XXvirs chargés de dédier des édifices, de fonder des colonies ou de parta ger des terres, de surveiller l'annona, etc., enfin, la prorogation des magistratures ordinaires, en répartissant le droit d'auspices entre plusieurs dépositaires, rendirent indispensable mi remaniement de la théorie. Il fallut, en prévision de conflits inévitables, déterminer la valeur relative des auspices aux mains des divers magistrats. On divisa donc les magistrats et leurs auspices en majeurs (auspicia maxima) et mineurs (minora) 13. Les auspices majeurs rendent aptes à l'imperium et sont souvent confondus ou associés avec lui dans le langage ordinaire "`. Furent considérés comme ayant les auspices majeurs, les consuls (ou tribuns consulaires) et les préteurs : parmi les magistrats extraordinaires et prorogés, les dictateurs, proconsuls et propréteurs et peut-être les maîtres de la cavalerie. Les censeurs, dépourvus de l'imperium, ont des auspices pour lesquels le titre de majeurs est purement honorifique. Les édiles curules et les questeurs eurent les auspices mineurs. Il y avait impossibilité théorique et danger pratique à accorder les auspices aux magistratures plébéiennes qui ne procédaient point du pouvoir traditionnel et s'étaient fondées en dehors des auspices ; mais il y avait aussi avantage en ce sens que les actes des magistrats plébéiens tomberaient par là sous la dépendance des règles augurales. La collation des auspices aux tribuns et aux édiles de la plèbe paraît avoir été décidée par la loi Publilia Philonis (339)'9. En fait, sinon en théorie, les édiles eurent les auspices mineurs et les tribuns donnèrent aux leurs une force égale à celle des auspices majeurs. Pour exécuter la loi Publilia, il suffit de faire présider les comices qui élurent les magistrats plébéiens par un magistrat investi du droit d'auspices. A côté des auspices majeurs et mineurs se placent des auspices délégués par un magistrat à son subordonné et dont celui-ci use pour le compte et sous la responsabilité du mandant (auspicia aliena). Sous le régime monarchique, il ne pouvait y avoir, en dehors des auspices royaux, que des auspicia aliena. Jusqu'en 447, les questeurs n'avaient pu avoir que des auspicia aliéna, délégués soit par les rois, soit par les consuls : après 447, ils eurent encore besoin d'une délégation d'auspices lorsque, chargés par les consuls ou les préteurs de poursuivre un procès en matière capitale, ils devaient convoquer les centuries, ce qui ne pouvait se faire sans les auspicia maxima. Le cas se présentait bien plus souvent à la guerre. Le triomphe ne pouvait être décerné qu'à celui qui combattait sous ses propres auspices : les succès remportés avec des auspicia aliena étaient attribués à celui qui les avait délégués 'e. Qu'il fût entier, amoindri ou délégué, le droit d'auspices autorisait à user de tous les modes réguliers d'auspication ; car la différence entre les auspices majeurs et mineurs n'était pas dans la nature des signes observés, mais dans l'emploi qu'on en pouvait faire ". Cette classification des auspices était insuffisante pour AitS prévenir les conflits. Il fallut graduer l'effet réel des auspices d'après la dignité relative des magistratures et mettre les auspices du dictateur au-dessus de ceux des consuls, et ceux des consuls au-dessus de ceux des préteurs. Lorsque deux consuls ou deux préteurs commandaient une armée, ou que les censeurs procédaient au cens, il était nécessaire que l'un des collègues eût un droit supérieur. On combina cette inégalité indispensable avec l'égalité théorique en faisant alterner les faisceaux et les auspices. Dans les camps, les magistrats collègues se transmettaient chaque jour de l'un à l'autre le commandement en chef 1F. Il est probable, du moins pour les premiers siècles de la république, que les auspices alternaient également à Rome où les consuls se transmettaient de mois en mois la présidence du collége et les faisceaux. II. COLLISION DES AUSPICES (OBNUNTIATIO).-Ces pr'écaUtions ne suffirent pas, en définitive, à écarter toute collision des auspices. On avait bien empêché deux magistrats de poser la même question à Jupiter, mais il pouvait se faire que, deux magistrats le consultant pour des raisons différentes, Fun d'eux observât un de ces signes négatifs qui équivalaient à une interdiction générale, au moins pour une journée (client vitiare)10, de certains actes garantis par les auspices. Tels étaient l'éclair ou le tonnerre qui prohibaient la tenue des comices, et, en général, les dirae [AUGURES]. Dans ces cas, la puissance des signes négatifs était telle que, dignes d'attention quand ils étaient annoncés par un simple particulier, ordinairement obéis quand ce particulier était un Augure [AOeuRes, ils s'imposaient lorsqu'ils avaient apparu au moindre des magistrats. La notification officielle de ces signes fâcheux, appelée nuntintio quand elle émanait d'un particulier, était désignée, quand elle émanait d'un magistrat, par le ternie d'obnuntiatio ", à cause de sa force prohibitive. A part l'obnuntiatio dirarunt, par laquelle le tribun C. Ateius essaya de retenir Crassus partant pour l'Orient (55 av. J.-C.)" et de l'opposition faite au cens de ;5 22 et de 65", tous les exemples historiques d'obnuntiation ont trait à la tenue des comices. Elle consiste alors simplement en la notification, faite au magistrat président par le magistrat opposant en personne n, qu'un éclair a été aperçu. Pour se garantir de l'obnuntiatio, les magistrats supérieurs défendaient aux inférieurs d'observer le ciel le jour où ils tenaient les comices (ne quis 3nagistratus ininor (le coelo servage velit 33). Mais, comme il n'y avait pas de hiérarchie réelle, leur défense pouvait ne pas être respectée ; et, quelle que fût la sanction de cette désobéissance, il esl à croire que les signes négatifs n'en étaient pas moins obligatoires pour avoir été observés subrepticement. Nous ne savons si l'obnuntiatio a jamais été employée de bonne foi ; en tous cas, on comprit qu'il était impossible de supprimer l'obnuntiation de mauvaise foi, et on se décida à en réglementer l'usage, au risque d'avouer par là combien la religion tenait peu de place dans ces manoeuvres politiques. Cette question fut une de celles que réglèrent les lois 18 Le collègue momentanément inférieur pouvait encore prendre les auspiees,msis les Biens n'avaient plus force obligatoire (Liv. XXII, 42 ( XXVIII, 9). 19 Cic. Att. I'1, 1. 20 Cette distinction doit ètre maintenue, malgré 1a collusion que fait Donat (Ad f 852.21 Cie. Divin. 1,16 ; Dion.11. 6 ; Veil. r1, 46 ; Flor. 1,45 ;'Lucan. 111,126 i Appiao. Aelia et P'ufia (vers 154 av. J.-C.), portées pour définir la part de liberté que le calendrier pontifical et la théologie augurale laissaient encore à l'exercice de la souveraineté populaire dans les comices'-'6. Autant qu'on peut le conjecturer d'après des faits postérieurs, ces lois reconnurent au consul le droit d'obnzlntiatio vis-à-vis de son collègue" et du P. M. présidant les comices curiates" : aux tribuns le même droit vis-à-vis des consuls" et des censeurs'°, à charge de réciprocité, et déclarèrent toute autre immixtion non recevable. L'obnuntiation n'était acceptée par le président des comices que si elle lui était notifiée avant le commencement du vote 31. Elle exerçait son effet suspensif également sur les comices centuriates et sur les comices par tribus, mais seulement en tant qu'assemblées législatives. En effet, Lange croit, pour de bonnes raisons, que les lois dont s'agit avaient fait une exception pour les comices électoraux3 quant aux comices judiciaires, on ne pouvait admettre, ne fût-ce que pour la forme, qu'un acte de justice, supposé impartial, pût être arrêté par ordre céleste. Les lois Aelia et Zulia, pour lesquelles Cicéron et les conservateurs de son temps n'avaient pas assez d'éloges3J, n'accordaient aux tribuns qu'un avantage illusoire contre une véritable diminution d'autorité, car ils possédaient déjà sous forme d'intercession un vélo plus puissant que l'ohnuntiation, tandis que les consuls eurent sur les comices tribunitiens un droit de vélo que la loi ne leur reconnaissait pas jusque-là. Aussi, un siècle après, P. Clodius abrogea ces dispositions par la loi Clodia (58) qui abolit l'obnuntiation (ne quis obnuntiaret 31). Cette loi, d'une légalité très-contestée et aussi souvent violée qu'observée, ne laissait plus subsister que la nuntintio des Augures. Du reste, les auspices n'étaient plus pris au sérieux par personne. A peu près délaissés par les généraux, proconsuls et propréteurs", ils n'étaient plus, à Rome même, qu'une. pure formalité. Les magistrats déclaraient parfois d'avance que, tel jour, ils feraient usage de l'obnuntiation, ou mème, comme Milon, qu'ils s'en serviraient pour tous les jours comitiaux 3° : aussi ne faut-il pas s'étonner que. la force ait été parfois employée pour détourner la menace, en empêchant l'opposant de parvenir jusqu'au président des comices. Le consul Bihulus usa en pareil cas (59)de l'obnuntiation par édit''', mais on ne voit pas qu'elle ait été respectée sous cette forme anormale. Il n'est plus question de l'obnuntiation sous l'empire : la suppression des comices par Tibère lui enleva toute raison d'être. III. CLASSIFICATION QUALITATIVE DES AUSPICES (A USPICIA URBANA, BELLICA). -11 n'a été question jusqu'ici que des auspices consultés dans Rome et pour des actes accomplis au sein de la ville même, de l'urbs; en un mot, des auspieia urbana. Les auspices urbains sont les plus importants de tous, tant à cause du rôle important qu'ils jouent dans la vie politique du peuple romain, que parce qu'ils sont la condition essentielle et la base des auspices militaires. Nul ne peut posséder en propre les auspicia bellica (enilitaria) 33, s'il ne possède déjà les auspices urbains du degré" supérieur AIS h83 (maxima). Au point de vue du droit augural, il n'y a pas de différence spécifique entre les auspices urbains et militaires, pas plus que nous n'en n'avons constaté entre les auspices majeurs et mineurs, car il n'1 avait pas de mode de divination spécial pour les uns ou les autres 30. Si les chefs d'armée se servaient à peu près exclusivement des poulet c'est à cause des facilités qu'offrait cette méthode d'ailleurs fort suivie aussi à Rome), car on trouve aussi des exemples d'auspices de guerre ex avibus -00. Mais. au point de vue politique, ii y a entre les auspices urbains et les auspices militaires une différence qualitative considérable qui, si on laisse de côté les auspicia mz= mira, correspond exactement à la distinction entre I'inipei'iiirn restreint et l'imper atmmilitaire. On sait quel'iinperiem des magistrats supérieurs, limité dans la ville (dorai) par le droit de provocation et l'intercession trihunitiemne, reparaissait sous sa forme primitive de pouvoir absolu au dehors (militiae). De même, les auspices urbains devenaient au dehors les auspices militaires. Mais il se produisit entre la théorie des auspices et celle del'iniperiurn un désaccord, en ce sens que le POMUGRIUM resta toujours la limite extrême des auspices urbains, tandis que l'un erium militaire ne commençait qu'à un mille au delà. Il y avait donc entre cette enceinte fictive tracée par des conventions politiques et le pomoerium une zone neutre où les auspices risquaient d'être suspendus si l'on n'inventait un expédient ; et c'était précisément dans cette zone que se trouvait le Champ-de-Mars, c'est-à-dire le lieu où se faisaient d'ordinaire les levées, le lieu où se réunissaient toujours les comices centuriates, quelquefois les comices par tribus et le sénat. L'ensemble des décisions rendues pour régler cette question épineuse constituait le jus pomoerif" que Cicéron signale comme un des points difficiles de l'art augural. Il était impossible en pratique de reconnaître les auspieia bellica aux magistrats urbains qui franchissaient le pomoerium pour exercer des fonctions civiles au Champde-Mars, comme il était impossible de les ôter à ceux qui, déjà investis d'un commandement militaire, venaient du dehors pour présider des comices, ou parler au sénat, ou attendre le, triomphe sous les murs de Rome. Voici, autant qu'on peut en juger, comment fut résolu le problème. Le poseoerium resta théoriquement la limite des auspices urbains. Un magistrat ne put le franchir sans faire préalablement" une auspication, dont le cérémonial et l'effet durent être différents suivant les cas. Si le magistrat, allant commander une armée, avait pris d'abord les auspices sur le Capitole, ces auspices se transformaient au passage du pomoerium en auspices de guerre; si, au contraire, pour des fonctions pacifiques, il allait les prendre au Champ-de-Mars, 1'auspication préalable ne faisait que lui maintenir le droit d'auspices dans la zone neutre'". Pour les généraux qui venaient du dehors sur le Champde-Mars, la question était simple. Comme ils ne franchissaient aucune limite inaugurée, ils conservaient indubitablement leurs auspices de guerre. Il a été dit plus haut que les auspices de guerre ne pouvaient que se surajouter aux auspices urbains. Cette règle fut d'abord violée dans les cas d'extrême nécessité, puis, à partir de Sylla, conipletement mise en oubli pour la nomination des proconsuls et des propréteurs. Lespromagistrats, nayant point d'auspices urbains, ne pouvaient régulièrement en avoir d'aucune espèce. Cependant, des 401 av. J.-C., nous trouvons nui proconsul etlsoyé contre les tiques". Les guerres perpétuelles et l'annexion des provinces firent des promagistratures une institution stable, qui put se réconcilier avec, la théorie des auspices par la prorogafio itnpemii `", car le principe était sauf si l'on ne faisait que continuer l'imperium à des fonctionnaires qui étaient sortis de Rome encore magistrats et pourvus des auspices. Mais Sylla rompit avec ce système en décidant que les consuls et préteurs n'iraient dans les provinces qu'après avoir déposé leur magistrature Depuis lors, les généraux et gouverneurs n'eurent réellement plus d'auspices, comme Cicéron le remarque". 's àujourd'hui, dit-il, nos généraux commencent à faire la guerre lorsqu'ils ont déposé leurs auspices. » Aussi, ne sera-l-il plus question que e lr:;,-, ia u,'banc. Eux seuls, à l'abri' des nécessités press -0 s de la guerre, ont pu être soumis aux règles de l'art augural, et rester effectivement obligatoires 47. de foi, les auspices n'avaient pas besoin d'être légalement nécessaires pour être consultés, On peut dire avec TiteLive48 que rien ne se faisait sans eux. Mais de pareilles entraves étaient bien lourdes et les nécessités gouvernementales firent restreindre le nombre des cas où les auspices (urbains) étaient obligatoires. Nous allons passer en revue ces actes marquants qui, abstraction faite de l'inauguration sacerdotale, étrangère au domaine politique i:AUGURESj, peuvent se réduire à quatre : la nomination des magistrats ; leur entrée en charge : la convocation des comices, et le départ de l'armée. I ° Nomination d'un magistrat. Un principe générai, qui ne souffre point d'exception, est que la transmission des auspices ne peut se faire sans la garantie préalable des auspices. Le mode de transmission le plus simple est la nomination directe, sans élection. Il ne fut jamais ente ployé qu'exceptionnellement, pour la promotion de l'interroi et du dictateur. La promotion de l'interroi a cela d'anormal qu'elle s'opérait sans observation actuelle des auspices, sur la foi des promesses divines dont le sénat, unique représentant de la société en l'absence des magistrats, était dépositaire, et dont l'effet virtuel devenait actuel en pareil cas. Le dictateur était nommé par un consul et sous ses auspices G9. En temps ordinaire, la nomination était remplacée par l'élection dans les comices. Convocation des Comices électoraux, législatifs, judiciaires. Toute assemblée délibérante devait être réunie dans un temple et sous les auspices de son président. Cette règle a certainement été appliquée aux séances du sénat o0, AUS 384 AUS mais, tout en maintenant la nécessité du temple, au moins pour les séances où devait être voté un sénatus-consulte 51 la coutume paraît avoir fait bon marché des auspices. Auspices et temple demeurèrent, en revanche, absolument indispensables pour les comices, soit curiates °=(y compris les comices calates), soit centuriatesK3, soit par tribus54. Les auspices du président devaient être obtenus ex avibus 66 ou ex tripudtzs56, mais non pas ex ccelo : ils devaient en outre être pris le jour même sur le lieu de réunion. C'est pourquoi dans le Comitium, le Vulcanal57 ; sur le Capitole, la curie Calabre 58 et l'auguraculum in arec°9 (pour les comices curiates et calates) ; dans le Forum, les Rostres 60 (pour les comices par tribus) ; dans le Champ-de-Mars, le lieu dit « le jardin de Scipion61n (pour les comices centuriates), étaient des temples spéciaux affectés à la prise des auspices. Le magistrat qui allait convoquer les comices centuriates, devait encore faire une auspication particulière (auspicium peremneta) avant de franchir le petit cours d'eau (amnis Petronia 63) qui coulait près de là, parce que, sans cette formalité, l'effet des auspices était arrêté par une eau courante (fans manalis 6''). S'il s'agissait d'assemblées non délibérantes (conciones), il n'est pas certain que les auspices aient été obligatoires; mais on est porté à le croire quand on sait que les censeurs les prenaient pour procéder au cens, c'est-à-dire probablement pour convoquer le peuple 65, et que l'armée, tout à fait assimilable aux comices centuriates non délibérants, devait camper dans un temple. Pour les réunions présidées par les tribuns (concilia plebis), il est évident que, jusqu'en 339, elles furent franches d'auspices : depuis, on paraît avoir essayé de les y soumettre66 3° Entrée en charge des magistrats. Le jour de son entrée en fonction, tout magistrat ayant droit d'auspices devait en faire usage pour constater l'assentiment donné par Jupiter à son élection. L'observation des auspices avait lieu sur le Capitole, et, dans les derniers temps de la République, les auspices météorologiques (ex (oelo) étaient de rigueur en cette circonstance, ce qui empêchait de convoquer les comices le même jour. Ces auspices étaient sans doute utilisés immédiatement pour le tirage au sort des provinces, car ces sortes d'opérations se faisaient d'ordinaire avec auspices 67 4° Départ des armées. Le chef d'une armée romaine, déjà pourvu de l'imperium par une loi curiate, devait prendre les auspices sur le Capitole le jour de son départ au matin et faire les voeux d'usage 68. Ces auspices lui confèrent le droit de prendre, une fois hors du pomoerium, les auspices de guerre, qui cessent de plein droit lorsqu'il rentre dans l'intérieur de cette enceinte inaugurée 69. Cette cérémonie était si bien entrée dans les moeurs qu'on la maintint, en dépit de la théorie même, pour les promagistrats 70 qui n'avaient point l'imperium domi ni les auspicia urbana. son quelconque, les auspices ne pouvaient être considérés comme valables, il fallait les « reprendre ». C'est ce qu'on appelait la repetitio auspiciorum 71, qu'il ne faut pas confondre, comme le fait entre autres Servius avec la renovatio produite par un interrègne. Il y a ici deux cas à considérer. Ou bien les auspices, soit reconnus fàcheux,négatifs, entachés d'un vice de forme, par l'auspiciant, soit frappés d'obnuntiation n'avaient pas été utilisés, et alors il suffisait de les reprendre un autre jour; ou bien le magistrat auspiciant, soit pour n'avoir pas remarqué d'irrégularité, soit pour n'en avoir pas tenu compte, avait fait usage de ces auspices viciés (vittosa) ; et en ce cas, avant de reprendre les auspices, il fallait annuler les actes accomplis en dehors de la garantie régulière exigée par la religion, et cela sous peine de péché pour le magistrat et de malheur pour la société73. Le décret augural qui déclarait le vitium avait donc un effet rétroactif et pouvait jeter une perturbation sérieuse dans la marche des affaires si l'irrégularité découverte était restée longtemps inaperçue. S'il s'agissait d'élections, les candidats élus (vitio creati) étaient obligés (l'abdiquer sans pouvoir se porter de nouveau candidats 7". Les exemples d'abdications de magistrats sont nombreux j5 et on ne cite guère qu'un cas de désobéissance, dont le consul C. Flaminius se rendit coupable (223) 76, et qu'il expia à Trasimène (246). Quand tous les magistrats auraient abdiqué à la fois, l'interrègne assurait la continuité des auspices [INTEHBEGNUnt]. Mais pour les magistrats plébéiens, dont l'autorité, née en dehors de la communauté patricienne et des auspices, ne pouvait se maintenir que par une transmission ininterrompue, l'abdication ne leur était possible que si le vice de leur élection était découvert avant leur entrée en charge, leurs prédécesseurs étant encore en fonctions 77. Si le vice frappait un acte législatif, cet acte devait être régulièrement abrogé par un autre vote ; mais, en pratique, on se contentait pour cela du sénatus-consulte rendu en conséquence du décret augural, et déclarant que la loi avait été portée contrit auspicia. C'est ainsi que furent cassées la loi agraire Titia (99 av. J.-C.) et les lois de Livius Drusus (91)78. Quant aux auspices que les généraux emportaient du Capitole, s'ils étaient trouvés viciés ou seulement suspects, il n'était pas question d'annuler quoi que ce fût ; mais le général averti devait revenir à Rome pour les reprendre. Cette répétition, impraticable dans les guerres lointaines, fut remplacée par une répétition sur place, dans un temple inauguré à cet effet selon un rite spécial 22. Disons en terminant que la pratique des auspices ne pou AUT 585 AUT vait se passer de fictions légales. Les auspices oblatifs ont dû être parfois des signes réellement observés, mais les auspicia impet7'ita [AUGURES] n'étaient la plupart du temps que fictifs. Un magistrat ne pouvait attendre, pour entrer en fonction, qu'il eût aperçu un éclair, phénomène peu commun dans la saison qui ouvrait l'année officielle, et les comices ne se seraient pas assemblés souvent s'il avait fallu que leur président vît à un moment donné des oiseaux voler de gauche à droite. De même que les dil°ae ne comptaient pas pour qui ne voulait pas les apercevoir, de même la simple annonce que les signes demandés avaient apparu suffisait pour créer l'existence légale de ces auspices.