Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article CAMARA

CAMARA t ou plus ordinairement CAMERA, en grec xz uépa, est un des mots par lesquels les anciens désignaient la voûte et certaines constructions voûtées. Les grammairiens grecs ne le considéraient pas comme attique ; quelques-uns même le comparaient à un mot carien qui renfermait l'idée de solidité 3. Il est certain qu'il ne se rencontre qu'une seule fois dans les écrivains de la haute époque hellénique et avec un sens tout spécial. C'est Hérodote qui l'emploie comme le nom des chariots couverts, portant une sorte de tente ou de chambre fermée, mystérieux véhicules dans lesquels les riches Babyloniennes se rendaient au temple de la déesse Mylitta, (s'7i ~euvémv iv xnt.âp Nat s-aâaaac« 3). En rapprochant cette signification de celle de voûte, qui en est nécessairement dérivée, on est amené à penser que les chambres dont il s'agit étaient primitivement formées par des pièces d'étoffe tendues sur des cerceaux, disposition que l'on retrouve encore aujourd'hui dans beaucoup de nos voitures de roulage et de campagne, mais dont il existe aussi des exemples antiques représentés en bas-relief sur les urnes funéraires étrusques 4 La figure 104i représente une de ces voitures de voyage en usage dans l'ancienne Étrurie. Coinparez aussi les xâvva0pa dans lesquels les jeunes filles de Sparte se rendaient à Amyclées pour la fête des Hyacinthies : c'étaient des chariots de bois, couverts en cure appliqué, dans ce sens originel, aux tonnelles et aux CAM 855 CAM forme de voûte, par des nattes et par des clayonnages qui se terminaient en bizarres figures d'animaux Lorsque les historiens grecs parlent de la xxµ«pa, soutenue par des colonnes ioniques, qui formait sur le char funèbre d'Alexandre une sorte d'édicule, où le cercueil royal était placé , la relation avec les anciens chariots babyloniens est encore visible ; on peut même considérer comme un souvenir de la légère charpente à claire-voie de ces chambres portatives, le treil remplissait les entre-colonnements a. Dans le char funèbre d'Agrippine, que la figure 1045 représente d'après les monnaies romaines, le toit est de même arrondi en forme de voûte. 11 est naturel que la voûte, comme presque tous les modes de construction et plus que les autres peut-être, ait commencé par être formée avec le bois, qui fournissait des matériaux flexibles que l'on courbait facilement en demi-cercle. Kag.âpa pourrait alors venir simplement du verbe grec x47Tn,, courber, origine admise par phisieurs philologues Quelque opinion que l'on ait du reste sur l'étymologie du mot, la dérivation du sens n'est pas douteuse. De même, en français, le mot berceau, du bas-latin bersa (claie d'osier), a fini, en passant par le sens d'un treillage cintré, par désigner le même genre de voûte profonde (voûte en berceau) que les anciens appelaient xaµâpa ; tout récemment encore le mot tonnelle (nom de l'allée rustique, couverte avec des cercles de tonneau), nous est revenu de l'anglais sous la forme de tunnel, avec le sens d'une longue voûte souterraine B. Il est curieux de retrouver en latin le mot camera en berceaux de treillage, sur lesquels on faisait monter des plantes grimpantes, et particulièrement une espèce de courge, qui pour cette raison était appelée cameraria9, et qui sert toujours au même usage en Orient. La célèbre mosaïque de Préneste représente une treille antique en berceau, dans un paysage égyptien des bords du Nil 1i ; c'est le sujet de notre figure 10e16. Les Grecs riverains du Pont-Euxin appelaient aussi xauâpx une sorte d'esquif, pouvant contenir jusqu'à trente hommes, qui servait aux pirates dans ces parages et qui était assez léger pour être caché pendant le jour dans les bois voisins de la côte t1. Tacite, décrivant après Strabon les mêmes bâtiments, montre bien le rapport qu'ils présentaient avec les voûtes légères dont nous venons de parler ; nous voyons qu'il n'y entrait pas de métal (sine vinculo aeris aut ferri), et qu'ils étaient couverts de manière à pouvoir être complétement fermés, dans les gros temps, avec des planches (somma navtûm tabulzs augent cloner in. modem tecti claudantur). Le mot camera, dans un sens tout à fait analogue, s'appliquait en latin aux cabines. arrondies en berceau, qui se dressaient à l'arrière de certains vaisseaux antiques, particulièrement sur ceux qui étaient destinés à transporter des personnes de distinction, comme dans l'exemple que nous donnons ici, d'après la colonne Trajane (fig. 1017) 12. Après ces constructions légères, où l'on trouve l'origine de la voûte, l'enchaînement naturel des acceptions, qui suit le progrès même de l'architecture, amène l'idée des voûtes de maçonnerie et de pierre. J'en ai signalé l'emploi dès l'époque hellénique, clans les caveaux funéraires de la Macédoine, véritables chambres souterraines, garnies souvent de lits de marbre sur lesquels les morts étaient couchés et abandonnés aux effets de la décomposition. La figure 1048 montre une de ces chambres funéraires, déblayée par nos fouilles près de l'ancienne Pydna n, Or, ce genre de construction sépulcrale est décrit spécialement sous le nom de xng pa dans un curieux récit fantastique de Phlégon de Tralles R. Le mot xx).épa désigna même toujours avec une certaine ate vo ûte pro:_aide, co1werie bel..1. Diodore t' 'nploie pour le de briques, construit o as I"Duph, te par suivant le m111. les célèbres étaient aus3l Sîen y11 i!' ~GD~tossi xxp.s e co tentent confirmé par la découoùte dans les cons-trucd'une autre ire pendant dernière ilnlts '.ail' P'irs pare royal pl .°, on peut hésiter entre u.n berceau rus dur. tes :.ii'tneS, et.une s ede p2,ille.t x eh .d Zn, `,s u dont on a re ls l ttdht P. c;a Kh _.,»a. u.i (lisp.s n demi-cercle, ment d+' loi. 'e.. .olives (assènes axer de des rigide:, de la eonstrx r' .us demi" transi heu si drain en grec e en latin, qui a servi de tlsitton pour 'ver au sens notre mot t ,aatzt' is i, solidement a. sl etat tuer tout 1l hisr; met_.1, iz la charpente du toit mi plafond, par des tr;_,cases de bois, fn remplissait ei, R l'intervalle des solives par des lits rie grands 1«ise ux relies avec des cordes et soutenus per des fiches (oui, tsprès cette espèce de texture rxriier,iS ie'iiin-tei r . ir tr ii stem cnc ÿj1, des uis en dessous :, se opus, p~,s; .at -;,rn1 pets de tt o~s, r ~ di 'nt, de co istructii: que par un véritable système d'arcature, des sa. éZ:è:cs tl; etnployrzes surtout pans les villas tata. iia.;rs °t désignées dans la chnologie des bas temps sous les noms de eaineri i• , , ae ou de ccraeeae sa`t,nz`aae's) Les couches der étaient parfois remplacées par des planches (di . Quant aux voûtes garnies de plaques de erre ".-..itreae), c'était un luxe, exceptionnel 20. Dans le les voiïtes étaient souvent creuses, les construisait ordina,,,..meut avec se). Mais .ce sovitenttes par ev ,le char . .e en fer (.:wamè si :9i tentes "), composée de h•,. et d'arceaux de ce métal (regulae fers eae, cærgae f _ n r.c is ferret j. C'est un curieux exemple de I emploi n u . dans les constructions antiques, pour les Volutes légère:s, couvrant des chambres ou des galeries fermées. qui aussi chezles Romains conservaient pl.us spécialement le nom de camera, n souvenir =des berceaux qui ont fourni la première idée de la volte, Lto°r f£ rp,,F•,, € AMFi b.SIA fe_s_atp.us . DC MEL,L se qu t -natta , ~l aa l elaalt;e, était e nf' ises'. fi .Il pas cils sont t, cet Cuit 1 l'ordre de bat, s ts'htls la p' l 1 arise :tl, : 1 'cesse des chameaux ui frisaient a I ïnée ri environnent I.' raversaiea t ', ii rie 1.i. sil.en(,e d'un narraU,t a conclu que le chameau te, de l' °ce,rliie, ,)'.ablement appartient e l espèce n'avait é(A ri '~,'' en Atri'ItU ne était leks(?i'ique5 `. Sabin i. S. 18, et-Ce_cr,2;';t,t -n _ et 1:5 ; rf. D,od. Sc. II, .i3L, 3., Slos, rot.,,, ti€éodote.ty, kt, . .r, l parte de t u . aies 5asaa,.na. 1: 3 -, ia est vrz(t :au, que a ive produit les animaux (tan l'• iception du cerf et du sanglier. Pliu. Hist. ans. 81111. 18,13; Cu e;, ti, t. 1, 1 ï0 0 )tr c t. ,, Mémoires 'u ,ri-ucévn, d'hist.. -dimml d_ien, lR Brugseh Hist. d'eoypie• p. -.d, rad,, , .:7' d'ali, r a u, En ?'a,) 37' '0v "r» ' ,sf'r1i a€ que les habitants a -eue secs) ;Jour repousser une a. La dite un. argés de tes esprits des srr,Jri' n Latine avait drs,émi au -_i de la ent a' 1' s, qui leur en t té prO,isa. Plus tard, au lité qu'on les voit empl pour 1. Afxàiue au: iluvent ci pour porter. Pearl :: 1r c'est ngrandticY 1301' en ._"rfali.{ à la guerre, s 'n' Peina, auxiliaire, en le ur siècle 1Iygiii leur s ti,atpes rc ulihr"es, une ii, reo.t ranges mo] aas u 5 C iio aa le Sa,. O' 110!! le lo de la .T i'rle 5, mais par (lei p ., rs ~tr" fion m1 net de faire remonter en me las iv !'~aii en~t notre ère l'existence ,n Égypte du chameau, amené des régnons dive sud, où °s deux espèces tlfi genre abondent encore 'I'hutN'existait-il pas dès lors missi dans l'Afrique ..le t centrale s? On se demande, ,cor amrnt les peu t des relations actives entre le côte ii,, erra née et l'intérieur dl, continent, et p re ment les Carthaginois, ont n. long i i'an«lu' ouï_ e appel!' « s du semble en effet le véhicule roda e dei civilisation propres il r,; r Pour les Grecs, de bonne hurire e., mimai avec les peuples as,n 'e te chameau put rs aei,ir ni' des symbole.' 1 i nient est pin i q o voit sur deux )le ce at'iris bort, a,aus, â, d ',ix bosses, servant nie a 'tes personnages vêtus e un cos tume oriental, L'un d'eux est isolé ;l'autre, dans lequel on a reconnu Bacchus vaine queer de l'Inde (fig. 10419) est acconipai nc, de personnages vêtus die le même manière, dansant et jouant des instruments de musique, qui lui font cortége "r. 'riais ,`. représentations par%_i.ssent rivoir mure, la nier.' après .É-C., un sr, Li'a'is appel invasion raï' sa cens „ d'avoir pur ._ (f;. 10_,l) des cli ux c ont reprc les bas-reliefs de la colonne de l'h.crdose ,, Constantinople "à Les conducteurs de : chameaux ou les soldat qui les montaient, qu'on vient de voir désignés sous le "01,! d., d, omer1no'a'i, sont appelés 'nui Hygin epibatae En dehors del'armée ,I édit deIicclétienr,entinnneaussi s.l2P 2a il `", Des chameaux furent sans doute, dans les menties contrées attelés à des chariots pour les transports publics. La charge de ce charriage ou la redevance par laquelle on s'en acquittait t appretée au Digeste raniel.esaù''. A Rome même, on axait vu de bonne heure, mais dans es jeux du cirque, des chameaux attelés à des char: O' La chair du chameau parait avoir été estimée, en Orient L'empereur Ilr'ro *abale (qui était Syrien) en fit servir i+ sa table ' On faisait des, étoffes, des cordes, etc,. en poil d chameau :?e. E, Sc CkMENJr). '?--rnj souvent identifiées les pi~ 'rstes avec Carnèr es font fiais' _ or,' relie de divis bois, des eaux, autant de 'a: 1r_i les divinités s étaient conçues es comme (xi' .i. ces d'ans une région de rendrait où O Fabius r'233) un temple 'transformé .'ngl'eur dSyracuse, en un temple dr,'ril,le ce,icr et de la Vertu 1, Là, dent les sources des Cantènes, groupées autour de ' plis connue d'entre elles, Égérie. C'est, 1k, disait-on, que ':eilr.a tenait ses colloques nocturnes avec les nymphes rés). es:atrices °', ' t qu'il avait reçu dans ses CAM 858 CAM mains le bouclier sacré envoyé du ciel, dont il confia la garde aux Saliens On disait que le vieux roi sabin y avait dédié aux Camènes un temple de bronze qui avait été transporté dans le temple de l'Honneur et de la Vertu et qu'Égérie avait quitté ces lieux pour Aricie après la mort de Numa. C'était encore à la fontaine d'Égérie ou des Camènes que les Vestales allaient puiser l'eau vive exigée par leur liturgie 4. Le nom et le rôle multiple des Camènes dans la légende s'expliquent par leur caractère de nymphes, mais il faut, pour saisir les associations d'idées créées par l'imagination populaire, rappeler une croyance commune aux religions de la Grèce et de l'Italie. Cette croyance, surabondamment constatée par l'histoire de la divination [DIVINATIO], est que l'eau possède un pouvoir magique, la propriété d'éveiller chez les êtres intelligents le sens prophétique. Aussi les nymphes passaient-elles pour douées de la faculté divinatoire, faculté qu'elles pouvaient même communiquer aux hommes, en suspendant chez eux l'exercice normal de l'intelligence. Les Grecs appelaient « possédés des nymphes » (vu(J.g)_ Âr,7tzot), et les Latins « lymphatiques » (lymphatici) ceux dont la raison égarée passait pour avoir cédé la place à la faculté prophétique. C'est par cette idée qu'il faut expliquer les attributions mythologiques des Camènes. Et d'abord leur nom, Camenae signifie déesses des incantations (carmina), des oracles ou formules magiques. L'esprit utilitaire des Romains ne séparait guère la divination de la magie et pensait que la science surnaturelle doit conduire à l'action surnaturelle, celle-ci appliquant les moyens découverts par celle-là. Prophétie et magie sont les attributs spéciaux de toutes ces divinités qui, engagées dans le même fonds de légendes, ne sauraient avoir de physionomie bien distincte ; Camesene ou Camasene, soeur ou femme de Janus et mère du Tibre 6 ; Canens, fille de Janus et femme de Picus7; enfin Carmenta ou Carmentis, dont il sera question L'emploi que l'instinct le plus populaire assigne le plus volontiers à la puissance surnaturelle est la guérison des maladies. La source des Camènes partagea longtemps avec celles d'Egérie et de Juturna, la réputation de rendre la santé aux malades En leur qualité de prophétesses et de magiciennes, les nymphes pouvaient être doublement utiles lors des accouchements. On leur demandait de hâter la délivrance par leurs charmes et de fixer par leur science divinatoire la destinée de l'enfant. Les Camènes ont laissé ce rôle à Carmenta ou Carmentis, et à leur compagne Égérie [EGERIA]. Elles n'intervenaient, s'il faut en croire une tradition un peu trop préoccupée d'étymologie, que dans l'éducation des enfants, pour leur apprendre à chanter °. Elles avaient joué le même rôle près de Rome naissante ; elles ne l'avaient pas vue naître, mais elles avaient coopéré à sa constitution religieuse, car l'ouvre de Numa avait été inspirée jusque dans ses moindres détails par Égérie et les Camènes t0. L'inspiration poétique tient de si près à la divination que les nymphes « chantantes » devinrent naturellement les déesses de la poésie le jour oit les Romains apprirent à distinguer entre les rythmes poétiques et les formules d'enchantement (carmina). Les Muses grecques, dont elles tinrent désormais la place dans la mythologie latine, étaient, comme elles, les nymphes des fontaines, attachées aux sources de l'Olympe, de l'Hélicon et du Parnasse ". Les Camènes durent leur nouvelle dignité littéraire au premier propagateur de l'art grec, Livius Andronicus de Tarente 12. Moins d'un siècle après, les Camènes avaient déjà un temple bâti peut-être par le collége des poètes, et dans lequel ceux-ci s'élevaient des statues. Du moins on l'apporte que le poète L. Attius y était représenté dans des proportions qui contrastaient singulièrement avec sa petite taille 13. Plus tard, les poètes latins délaissent les nymphes indigènes et retournent aux Muses grecques. Le nom des Camènes revient encore de temps à autre sous leur plume, mais à titre de synonyme. La différence originelle s'efface si bien, qu'ils appellent parfois du nom de Camènes les Muses d'Hippocrène ou de Libéthra. L'identification des Camènes avec les Muses dut modifier sensiblement le type primitif fourni par la religion nationale. Il n'était guère possible de les associer, comme par le passé, aux divinités souterraines, Tacita-Muta (la muette) ou Lala-Larunda (la bavarde), qu'une ancienne tradition identifiait avec les Camènes 14 et, d'autre part, la légende n'avait plus assez de vitalité pour se prêter aux retouches. Quand on disait que les Camènes étaient filles de Jupiter" ou qu'Hyménée était fils d'une Camène on ne pouvait penser aux compagnes d'Égérie. De là, une adaptation incomplète qui laisse aux Camènes une physionomie indécise, copie manquée de la gracieuse et noble figure des Muses grecques [MUSAS]. A. BOUCHli-LGCLIORCQ.