Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article COMMUNIA

COMMUNIA, -1. En droit privé, tes mots communia ou re.s communes se disaient des choses qui sont dans un état de communauté négative, comme Pair la mer, l'eau courante et que nul ne peut :;'approprier i globo, mais seulement par parcelles ;lus coeimumisj. H. On appelait aussi commune ou ces communes un objet appartenant à plusieurs par indivis et constituant l'état de communie ~', ou communauté indivise, pouvant, donner eu à l'action en 'armure [eonuiiaa rivai'usBe ses e-1 111. Le nom de ('O) ,11-, e,, i' se donnait encore aux )tiens communaux'', '.ni aux lofa reiteta non distribués sur luger eublieus aux membres d'une colonie, afin d'utiliser ces landes pour la dépaissance commune, loua pose aa , de même que des propriétaires voisins pou' aient s'entendre, afin d'user de 1' même ,`acon d'une portion de leurs terres vaines, ou en frï' !,e, ou en plais qu'en nommait aussi e' mpaseua, nmunalia. Quelquefois plusieurs communes ou Mis associaient leurs saltus ou pâturages pour t`axplo' ' on par indivis, cor pes'ua', de même que des pâturages étendus pouvaient appartenir à un seul °. On peut voir dans les cas où ces landes dépendaient d'une cité ou d'un CoNc'LlaBi;Lum, FonuM ou va:us, l'origine première ou le type d'une partie au moins de nos biens communaux °. Quelquefois même des fonds étaient accordés à une colonie; à condi'ion que les autres terres jouiraient du pâturage en communi0 sur les premiers. IV. Enfin appelait iuelgnefois commune une corpora con-nMes; ou i' mana, ou une réunion de cités commet 1 ,: e oufatii,ouNoanentaiiaaumIl On :' vit jdc'à trente ci`és se réunir dans un reo'e aria au chef-lieu, pour une tete religieuse ou pour régler une affaire de la confédération 'n [LAuüxcx FOFnus]. Rome abolit ces associations de cités, soit en Italie, soir rriême dans ses provinces conquises ou les restreignit au point de vue du oornmLriciux ou du CoNNuB 0Mlyd,. Cependant plusieurs. peuples conservèrent non seulement leurs d s munici paux, mais même des réunions ou associai égal consacrées par d'antiques usages i sauf ce. 3 ma cations ts, c est ainsi que, dissoutes d abor.i et: Grèce, elles valsent ensuite réorganisées Cette question a été niMani:?:ent approfondie par E. Eulin dans son ouvrage sur la constitution des cités de l'empire romain 1". Cicéron" mentionne encore pendant la république des eommunia en Sicile. Sous l'empire, Auguste i0 autorisa l'établissement de nouveaux xotvcl ayant pour objet la célébration de cérémonies religieuses, ou la consécration d'un temple en l'honneur de l'empereur et de la ville de Rome [titousoN1. Une province entière comme celle d'Asie (commune Asiae), ou une subdivision de province, ou même quelques cités '° envoyaient des députés dans une ville déterminée (metrorolis), souvent à tour de rôle, pour 'tre le siège de la réunion. On y fixait les ressources affectées à cet objet et réunies dans une caisse commune, et leur répartition entre les associés, ainsi que la nomination des chefs religieux (sac-endos provlnciae) du xotvot. Le même fait se reproduisit en Bithynie, en Galatie, en Cappadoce, en Syrie, en Thessalie, en Thrace, et vraisemblablement dans toutes les provinces de 1 empire. Ainsi, en Occident, les provinces gauloises' avaient leur confédération et leur fête d'Auguste, organisée au confluent de la Saône et du Rhône, àLyon, od se trouvait placé l'autel de l'empereur. L'Espagne formait son eonventus à Tarracone 23. La Germanie elle-même posséda son autel et son sacerlios chez les Ubiens 24, et les inscriptions montrent que ce culte avait été maintenu ultérieurement par les successeurs d'Auguste, et même introduit dans les provinces nouvellement conquises, comme en Dacie où on trouve un sacerdos tete Augusti coronatu3 Baciarum triton 2'. Les peuples associés prenaient le titre de gardiens du temple de l'emper'eur,'eaolxépot'a; ils envoyaient des députés, Bévaôpoz, au conventus, pour choisir l'ARCIIIEIsFUS ou les prêtres d'un 7 ang inférieur, répartir les cotisations des associés, etc. ; quelquefois c,es assemblées votaient des remerciements ou des témoignages de reconnaissance au gouverneur de la province, à l'expiration de ses fonctions'", d'après un usage déjà pratiqué antérieurement sous la république as et défendu sous Néron z9. On vit souvent les corneiania adresser des députations, legationes, à l'empereur, comme jadis au sénat, quelquefois même pour accuser le proconsul on le praeses provinciae 2°, L'empereur répondait directement aux requêtes du r.oints par lettres adressées à l'assemblée, au chef-lieu de réunion 3t, ou aux habitants de la province, art Athos, Lusitanos, etc Il parait que, des l'origine, cette organisation toute religieuse en apparence avait été mise à profit par les empereurs, comme moyen de surveillance ou de contrôle COM 1411 --COM sur l'administration des provinces par les agents impériaux "2. Dans la période qui suit Constantin, ce système est complètement en vigueur". Nous renvoyons pour ce sujet important aux articles kOlNON et CONVENTUS. G. HUMBERT. d'objets corporels indivis entre plusieurs copropriétaires'. L'indivision (oommunio) peut faire naître entre les communistes (soeii, dans un sens large) diverses obligations. Quand l'indivision résulte d'un contrat de société, les associés en poursuivent l'exécution par l'action pro soeio [SOCIETAS], mais ils recourent à l'action communi dividundo, pour partager les res corporales indivises entre eux. Lorsque la copropriété est résultée, sans société', d'un legs ou de la donation d'une même chose à plusieurs, ou d'un achat fait en commun', les obligations réciproques qui peuvent naître de l'indivision sont dites formées comme par un contrat quasi ex contractu, parce qu'elles sont soumises aux règles des obligations contractuelles4. Par exemple, si un des copropriétaires a perçu seul des fruits ou autres avantages provenant de la chose commune', il en doit compte aux autres, comme il a droit à une indemnité pour les dépenses nécessaires, ou même utiles seulement, par lui faites pour la chose commune ; de même il en doit une pour les détériorations causées par sa fautes. Un pupille peut se trouver ainsi obligé même sans l'autorisation de son tuteur'. En outre les copropriétaires sont tenus de sortir d'indivision lorsque l'un d'eux le demande. Si le partage n'a pas lieu à l'amiable au moyen de traditions ou de mancipations réciproques, chacun d'eux peut le demander par l'action communi dividundo. C'est une des trois actions qu'on appelle judicia divisorta', actions divisoires; elles sont dites aussi actions doubles ou mixtes (judicia duplicia, actiones duplices ou mixtae 16), parce que chacune des parties y joue le rôle de demandeur et celui de défendeur, en ce sens que le juge peut prononcer contre chacune d'elles une sentence de condamnation, même contre l'actor qui d'ordinaire ne pourrait qu'être débouté de sa demande u Enfin ces actions ont le caractère remarquable de renfermer seules les quatre parties de la formule d'action (partes formulae) sous le système de procédure formulaire, savoir la demonstratio, l'intentio, la condemnatio, plus l'adjudicatio qui ne se rencontre que chez elles [ACTIO]''. Ces actions étaient civiles in jus, bonne fidei. Étaient-elles in rem ou in personam ? Un grand nombre d'interprètes disent qu'elles sont mixtes, à la fois in rem et in personam, à raison du texte des Institutes de Justi Hien portant : quaedam arrtionas M2 tain causaaen oorinere videntur, tom in rem quai' ira personam, etc.1', partie que, bien. qu'en principe elles donnent à résoudre au juge une question d'obligation, el--les lui permettent aussi de résoudre quelquefois une question de propriété, par exemple quand le possesseur, agissant communi dividundo, se voit contester la qualité de copropriétaire d'autres ne trouvent dans ce texte qu'une manière de parler inexacte, qui met sur la même ligne le pouvoir de transférer la propriété donné par l'adjudicatet b' droit qu'il a dans l'action réelle de reconnaitre un droit de propriété préexistant"° Nous pensons, avec M. Du Caurroy ie', que I'acticn coinmuni dividundo est, comme les deux autres actions divisoires, une action personnelle, in personam '7o puisqu'elle tend à faire constater son droit de créance; d'ailleurs l'intentio ne peut être à la fois in rem et in persoriato, et enfin la distinction des actions in bonne fidei et stricti j'unis ne s'applique, en droit romain classique, qu'aux actions civiles et personnelles. Cr les actions divisoires sont bonne fidei". Si le § 20 du titre de actionibus des Institutes 19 dit qu'elles ont naxtatn causant, tom in rem quarn in personam, cela signifie qu'elles ont un double but ou objet et, tant à l'égard des choses qu'à l'égard des personnes, un effet mixte, en donnant le double pouvoir an juge de constater des obligations en condamnant, et de transférer la propriété par l'adjudicatio. En effet, quand une chose corporelle est indivise entre plusieurs, le partage, qui a pour effet de substituer un droit exclusif sur un lot déterminé à un droit indivis sur un ou plusieurs objets communs, contient un échange ao de parts indivises, et implique, d'après la doctrine qui avait prévalu en droit romain, un caractère translatif et non déclaratif de propriété. Cette translation s'opérait par l'acte du juge, et civilement, lorsque le judicium était legittmum'I, que la chose fût mancipi ou nec mancipi. Bien que l'adjudiratio ne fût pas possible en matière d'usufruit, on avait admis, entre usufruitiers par indivis, une action communi dividundo utile''. Cela fut étendu aux cas de communauté en matière d'emphytéose, de superficie, de servi PIGNES]. Des cohéritiers pouvaient même employer cette action, quand ils voulaient accidentellement partager certains objets seulement, ou qu'ils les avaient d'abord laissés indivis lors de l'action fantiliae erciscunclac24, Quant à l'office du juge dans le partage, il est tracé par les lois romaines en détail 25. G. Ilr.BERT COI 1412 COM explique l'obscurité qui enveloppe les commencements de la comédie par la raison qu'elle était d'abord tenue en moins grande estime que la tragédie ; il constate quel'archonte ne donna qu'assez tard aux chorèges des choeurs de comédies [CHOREGIA]. Un jour vint où l'on cita les noms des auteurs de comédies, mais l'on ne savait à qui la comédie (levait la forme définitive qu'elle avait prise Sans doute il y a une analogie générale entre l'épopée héroïque et la tragédie, entre la poésie satirique du Margitès etla comédie, mais on ne saisit pas exactement comment la transition s'est faite et l'on voit seulement la comédie proprement dite se substituer un jour à la poésie ïambique 2. Elle fut, d'après Aristote, une transformation des choeurs phalliques qui, de son temps, étaient encore en usage dans beaucoup de villes 3. Les phallophores faisaient entendre des chants lubriques, décochaient des railleries plaisantes à l'adresse de ceux qui se trouvaient sur le passage de leurs processions et s'abandonnaient àtoute la gaieté des vendanges avec une liberté qu'autorisait la nature même des fêtes agrestes de Dionysos'. De la même façon, la tragédie est sortie du dithyrambe'. Les Doriens et les Athéniens se disputaient l'honneur de la première invention de la comédie, les premiers alléguant que les essais les plus anciens étaient dus aux Mégariens et aux Siciliens (Épicharme était Sicilien), et invoquant l'étymologie du mot lui-même où ils voyaient une dérivation du mot xségr;, qui dans leur dialecte signifiait village'. Aristote accepte la priorité des Siciliens avec Épicharme et indique Cratès comme le premier auteur athénien qui, renonçant à la forme ïambique, ait traité des sujets comiques 7. La partie de la Poétique où Aristote traitait spécialement de la comédie est malheureusement perdue, mais la réserve qu'il montre dans les premiers chapitres où il est parlé en général de la poésie dramatique, et le petit nombre des affirmations qu'il se permet de hasarder et que nous venons de résumer, prouvent qu'à une époque où l'on possédait les oeuvres, l'histoire des origines du genre paraissait difficile à constituer. Sur l'étymologie du mot comédie, il y avait désaccord entre les Doriens et les Athéniens : les premiers le faisaient dériver de xwge, village ; les autres y voyaient un composé de xmgoç et de wôr. D'après O. Müller, une des parties principales de la fête des petites Dionysiaques, ou Dionysiaques champêtres, était un couros ou festin, fort différent du couros pendant lequel on exécutait les épinicies de Pindare, très bruyant, où l'on buvait à flots, chan tait et dansait'. Le mot xwgog est rapproché du mot xwp.ca of dans la loi d'Evégoros, citée par Démosthène ; d'après M. Foucart, il désigne le cortège bachique qui accompagnait le dieu dans le trajet de l'autel au théâtre, et constitue une partie importante de la cérémonie religieuse s. M. Egger opte également pour l'étymologie de xwgoç et il cite une peinture de vase grec où un personnage féminin, désigné sous le nom de xogpèice, figure dans un is mç15. M. Bernhardy préfère l'étymologie xé,gr;; il remarque qu'une pièce proprement dite, qu'un drame a un rapport bien plus naturel avec des fêtes de village. 11 accepte que les (pxa),trâ sont bien le point de départ de la comédie, mais pas davantage, car il leur manque l'élément dramatique 11. M. Wilamowitz rapporte aussi l'étymologie qu'Aristote, d'après les Doriens, rattachait à Quoi qu'il en soit sur l'étymologie du mot comédie, on ne peut cependant que reproduire ce que dit 0. Müller de l'influence qu'eut le culte de Bacchus sur la formation du genre lui-même : (Grâce à lui, l'imagination acquit cet essor audacieux par lequel nous avons déjà expliqué plus haut la naissance du drame en général. Plus la comédie attique est proche de ses origines, plus elle a de cette singulière ivresse intellectuelle qui, chez les Grecs, se manifeste dans tout ce qui se rattache àDionysos, dans la danse et le chant, comme dans le mime et la plastique. L'allégresse etla licence des fêtes bachiques donnaient àtous les mouvements de la comédie une certaine hardiesse grotesque, quelque chose de grandiose dans son genre, qui élevait même ce qu'il y avait de vulgaire dans les tableaux, dans une région toute poétique. Cette gaieté folâtre de la fête affranchissait en même temps et complètement la comédie des lois de la décence et de la dignité, encore très sévèrement observées à cette époque. Loin de ces orgies, s'écrie Aristophane, quiconque n'est pas initié aux mystères bachiques de Cratinos, mangeur de taureaux 53 ! Le grand comique appelle ainsi son prédécesseur en le comparant, par l'épithète qu'il lui donne, à Bacchus lui-même. Un écrivain postérieur 14 envisage toute la comédie comme un produit de l'ivresse, de l'étourdissement de l'esprit et de la licence des fêtes nocturnes de Dionysos 75. » Les conclusions de la critique sur l'origine de la cornédie se bornent en résumé à ceci : comme genre littéraire, elle apparaît d'abord chez les Doriens ; elle a pris naissance dans le culte de Bacchus, et elle lui doit une inspiration première dont l'influence est manifeste dans ce qui nous est resté de la comédie ancienne. Ces conclusions, conformes au peu que nous dit Aristote, sont confirmées COM 1413 COM par l'histoire entière du genre. Nous traiterons successivement de la comédie chez les Doriens et chez les Athéniens. La comédie dorienne nous est connue par de rares fragments et quelques indications que l'on recueille dans les grammairiens et dans les oeuvres des classiques. Elle témoigne du goût naturel des Doriens pour la plaisanterie et la mimique, et, si elle n'a pas dans l'histoire l'importance de la comédie attique, elle n'en garde pas moins l'honneur de lui avoir servi de premier modèle 16. Conformément au génie de la race, elle diffère suivant les lieux. On peut l'étudier chez les Péloponnésiens, chez les Mégariens, chez les Siciliens. On y rattache les genres de la parodie et de l'idylle ou poésie bucolique, qui ne devaient fleurir qu'après le règne d'Alexandre ~'. Les Spartiates se plaisaient aux jeux des Dikéliktes qui représentaient des aventures ridicules avec force gestes comiques. On cite comme personnages de ces petites pièces ceux du voleur de fruits, du médecin étranger 18. A Sicyone et dans les villes voisines, le culte de Bacchus et la pompe phallique admettaient de vrais intermèdes comiques 19. Les Mégariens et leurs colons de Sicile revendiquaient également l'invention de la comédie, , t les uns, dit Aristote, en raison de leur état démocratique, les autres parce qu'Épicharme était né chez eux » 20. L'antiquité de la comédie à Mégare ne peut être contestée 21. On cite les noms de Susarion, qui introduisit la comédie en Attique", de Myllos, d'Évétés, d'Euxénidès23, de Tolynos, auteur d'une forme métrique qu'employa Cratinos et qui reçut le nom de ce dernier n ; on attribue à Maeson l'invention des masques comiques n [PERSONA]. La comédie des Mégariens était tenue en médiocre estime par leurs voisins d'Athénes, plus lins et plus spirituels. De Maeson il reste un seul vers qui avait été gravé à Athènes sur un Hermès 26. Il avait cependant créé deux types, celui de l'esclave insolent et celui du cuisinier. Le proverbe o Myllos entend tout» indique la frayeur qu'inspirait la verve audacieuse de ce poète comique n. Ce petit peuple de Mégare apparaît comme doué d'une vivacité singulière, s'abandonnant à toutes ses passions, allant de l'excès de la joie à l'excès de la douleur 23. Placé au point de contact des races dorienne et ionienne, participant de deux civilisations, sorte de champ de bataille où étaient aux prises l'aristocratie et la démocratie, il alliait, semble-t-il, la violence et la mobilité. Les anciens sont unanimes à reconnaître aux Siciliens le don d'une parole facile et spirituelle 29. Cependant jusqu'aux guerres médiques on ne fait mention que des ïambes d'Aristoxène de Sélinonte 30. Pour que la comédie prît la forme dramatique, il fallait bien des conditions : le progrès de la culture générale, les exigences d'un goût plus difficile à satisfaire, l'influence d'une cour appréciant les plaisirs de l'esprit. Quelques détails témoignent d'un art dramatique auquel les Athéniens ont pu faire des emprunts. On parle de concours auxquels présidait un jury de cinq juges, d'un lieu affecté aux exercices des acteurs, d'un théâtre permanent 31 Celui en qui l'on peut reconnaître le premier auteur du genre, le créateur de la congédie, Épicharme, était un homme remarquable à tous égards M. Né à Cos, il appartenait à la famille des Asclépiades. II suivit le tyran Cadmos en Sicile et fit représenter à Mégare (de Sicile) plusieurs comédies vers l'olymp. 73, 3 ; av. J.-C. 486. On voit en lui un élève des Pythagoriciens, et certains ont supposé que ses comédies n'étaient à ses yeux qu'un moyen de répandre sans bruit et sans danger les doctrines de ses maîtres. C'est aller trop loin ; mais l'on peut très bien accepter que la direction et l'emploi de son talent furent déterminés par l'influence d'une école qui a donné l'exemple de l'étude des moeurs. D'autre part, à la même époque, la tragédie athénienne d'Eschyle n'était pas ignorée en Sicile et l'art dramatique n'était plus à créer. Mégare de Sicile fut détruite (olymp. 74, 2; av. J.-C. 483) et ses habitants transportés à Syracuse. Dès lors Épicharme vécut dans cette dernière ville où il se livra de plus en plus à son art. On a conservé les titres de trentecinq de ses comédies dont il reste cent soixante-huit fragments. Le premier, il suivit dans ses pièces un plan régulier, traça de vrais caractères et développa le dialogue avec habileté. Il faisait alterner le tétramètre trochaïque (metrum Epicflarmium) et le rythme plus léger et plus vif de l'ïambique trimètre. Les chants correspondant aux mouvements de la danse étaient écrits en anapestes. Deux de ses pièces étaient en entier composées d'anapestes. Sa langue est le dialogue dorien dans toute sa pureté, mais sans aucune recherche. Il aimait les jeux de mots, les antithèses : on a de lui un exemple assez curieux de gradation. Les titres de ses pièces paraissent pour la plupart indiquer des sujets mythologiques 33. On a essayé de reconstituer le plan de la plus célèbre, du Mariage d'Hébé, parodie où l'on voyait le roi et la reine de l'Olympe se quereller vivement, Hercule faire gauchement le galant auprès d'Ilébé, et Minerve, sous les traits d'une virago, souffler dans une flûte pour accompagner la danse lourde et disgracieuse de Castor et de Pollux 38. Épicharme a créé les types du paysan, de l'ivrogne, et du parasite : ce dernier surtout était appelé à un long avenir. La comédie dorienne s'appliquait à peindre des caractères et non des individus : par là, Épicharme est plutôt le précurseur de Ménandre que d'Aristophane, et COM 1414 COM ln fait peu' -pliquet' par la di-ii-ipline plus sévère des cités doriennes". "_.'lite: i "si 'que louvail eulelo le t' '_r le licence de la ,.sr M Ili . Épicharme mourut. e e ïi re 1, !e tr-+ii t-dix ans, laissant la double reputaI et de philosophe.Platon professait polir lui une baud. . ill. : «Les poètes excellents sont, pour la comédie, Eph "mruie, et, pour la tragédie, Homère » 3c On nomme à côté d'Épicharme deux poètes, ses contemporains, Lhorrnis 37 et Dinolochos. Le premier donna aux acteurs une longue tunique qui tombait jusqu'aux pieds et orna la scène de draperies rouges ; on connaissait de lui sept t omédies38. Dinolochos est cité comme le 1«llève ou le riva] d'Épicharme 39 ; les grammairiens donnent les noms de cinq de ses comédies. L'histoire de la comédie sicilienne finit avec les mimas de Sophron et de son fils Xénarque. Malgré le talent ince'm; de ces deux auteurs, leurs oeuvres ne faisai:. te prouver la fin du vrai drame dans leur pays. lie Frime, écrit en prose, composé comme le sont les dialogues bucoliques, empruntant ses sujets aux petitsincidents de la vie, visant à. intéresser par une fidèle imitation, n'est pas une comédie : c'est une scène tracée d'après nature avec plus eu moins d'art et de vérité. Il amena un genre nouveau, très artificiel, mais ne manquant point d'agrément et dont Théocrite, trouvera la forme parfaite. La comédie des Italiotes, ou de la Grande-Grèce, appartenait, autant que l'on peut en juger par les témoignages des grammairiens, au genre de la parodie. L'auteur le plus célèbre, Rhinthon de Tarente, était un contemporain du premier Ptolémée ; on lui attribuait trente-huit drames désignés par le nom d'hilarotr'agédies. En réalité les Doriens n'ont jamais pu s'élever dans le drame au-dessus de l'imitation, qu'elle fût naïve ou burlesque, qu'elle empruntât son objet au cours ordinaire de la vie, aux légendes mythologiques ou à des oeuvres littéraires. L'intelligence vraie des conditions de la comédie comme de la tragédie était réservée aux Athéniens, La comédie attique prétendait remonter haut, jusqu'aux pièces de Su'-arion 40. Une tradition veut que d'autres poètes de Mégare aient fait représenter des comédies e Athènes vers 485 av. J.-C. ".Les fragments d'une didascalie attestent au isi qu'avant l'année 4161), on représentait à Athènes des comédies en même temps que des tragédies4' ; mais c'est seulement un peu plus tard, lorsque Athènes était à l'apogée de sa puissance et de sa prospérité, qu'apparaissent les premiers noms d'une longue liste de plus de cent poètes comiques. L'usage est de distinguer la comédie ancienne épeots xeruWè:«), la congédie moyenne (l) rées xmntsréis), la coin-die nouvelle La ri t iédi5 ancienne avec Chionidès, itlagnès, Ecphantidès, Cratès, Cratinos, commence vers l'olympiade 80, _s, J.-C. 460. Eschyle touchait à la fin de sa carrière (il meurt (ni h, deux ans après la représentation de l'Ores tz~). était déjà connu (il est couronné pour la la plein e foin en 4€68). Périclès entrait clans la vie pu Mique, et le sophiste Gorgias émerveillait ses auditeurs par la subtilité de ses pensées et la recherche de son langage. Les premiers comiques nous sont cornus par les titres de quelques pièces, de rares fragments et les jugements des anciens. Leur principal mérite consiste à avoir su mettre à profit polar la comédie, jusqu'alors obscure, l'exemple de la tragédie. La composition dramatique, le développement d'une action, l'art du dialogue, la mise en scène, n'étaient plus à inventer; mais dans la réforme qu'ils entreprenaient d'un genre qui, en Attique, en était resté à l'improvisation des bouffonneries primitives n, ils apportèrent un esprit de choix et d'indépendance. Là est la marque du génie athénien. Dans l'art comme dans les institutions, il agit d'après les conseils d'une raison libre. Ici, le danger était d'imiter servilement la comédie sans avenir des Doriens ou d'emprunter le cadre et les procédés de la tragédie. Les premiers comiques profitèrent de tout et créèrent cependant une forme littéraire absolument nouvelle, qui répondait aux besoins de leur siècle. Chez les Doriens, la forme dramatique était restée indécise et flottante, le nombre des personnages présents sur la scène n'était. pas limité, le choeur n'était qu'un accessoire qu'aucune règle n'imposait au poète. Chionidès se contenta du choeur et d'un protagoniste, rôle que l'auteur remplissait sans doute lui-même 45. Mais avec Cratinos on a déjà la comédie telle qu'elle restera durant toute sa première période. Le nombre des acteurs est de trois, comme dans la tragédie4t, Le choeur, composé de 2-t choreutes, garde, avec le souvenir des libertés des processions bachiques, le droit de se tourner à un moment de l'action vers les spectateurs et de les entretenir des questions les plus étrangères au sujet de la pièce. Cette partie si intéressante de la comédie ancienne est la par'abase [minus]. Cratinos peut être regardé comme le père de la comédie ancienne. Né l'an 519 av. J.-C., il aborde la scène en 454 et meurt en 423, âgé de quatre-vingt-dix-sept ans, après avoir obtenu le prix avec sa llua(vt (la Bouteille), l'année même de la première représentation des Nuées d'Aristophane. Sans avoir le génie d'Aristophane, il comprit avant lui ce que pouvait être le théâtre cornique dans une démocratie telle que la démocratie athénienne: une discussion libre et plaisante de questions intéressant la cité". Ainsi conçue, la comédie devient une sorte d'institution. Tout ce qui se rapporte aux intérêts généraux du peuple lui paraît être de sa compétence. A une époque où le journalisme n'existait pas, elle en tint lieu. Elle avait la prétention, souvent justifiée, de dissimuler la leçon sérieuse et, utile sous des dehors plaisants ou grossiers 4s Mais la controverse de la presse moderne a ses garanties; la satire latine elle-même, sorte d'essai moral soigneusement étudié, destiné à être lu, est tenu à une certaine discrétion. La comédie ancienne est la poésie du rire, avec tout le relief et toute l'exagération qu'impliquait la représentation antique. Pour égayer la multitude qui se pressait sur les gradins du théâtre, l'auteur comique jet COM tera le gros sel à pleines mains, risquera les fantaisies les plus invraisemblables. Le simple ridicule ne lui suffit pas : il emploie volontiers le grotesque et ne recule pas devant, la caricature. Passionné, partial, il dénature les faits, déchire les personnes, le tout, aux grands applaudissements d'un peuple qui a l'ivresse de l'égaille. Il en résulte que les appréciations du poète comique ne doivent pas être acceptées sans réserve. Le placer au migre rang qu'un Thucydide, voir en lui comme un censeur officie! des opinions et des actes, serait: contraire à la saine critique. La comédie ancienne est un document qu'il faut consulter, mais non sans défiance. Bans le procès de ce peuple athénien, si vanté et si dénigré, elle constitue une partie importante du dossier; mais l'historien ne doit y voir qu'une déposition qu'il convient de contrôler avec soin. C'est ainsi que Socrate, Périclès, Nicias, Démosthène, Ciéon, Lamachos et bien d'autres citoyens illustres d'Athènes sont livrés sur la scène aux risées du peuple. Ce procédé aujourd'hui nous paraît indiscret, et les Athéniens eux-mômes crurent un jour nécessaire d'interdire de représenter sur la scène un personnage vivant mais cette restriction tomba bientôt en désuétude T9, J Elle était contraire à l'essence même de la comédie, telle que la concevaient les contemporains de Périclès. La comédie ancienne était un divertissement public ; elle faisait partie des fêtes du dieu qui invite à tous les caprices et a toutes les licences. I1 n'y a rien d'étonnant à ce qu'un drame où la réminiscence des chants phalliques se fait sentir partout, fùt la contre-partie des spectacles solennels et majestueux qu'offraient les sujets mythiques ni; héroïques traités par la tragédie. En face de l'antiquité hellénique, vénérée de tous, le poète comique exposait la vie de la cité moderne avec ses contradictions, ses petitesses, ses misères de toute sorte. Le ridicule, et non le respect, était son domaine où il s'abandonnait à toute se verve, sans pitié pour les travers et les vices qu'il croyait utile de flétrir. En cela il faisait acte de patriotisme, et que sa critique fût équitable ou partiale, on lui tenait compte de l'intention et du talent, et cette démocratie, dont il relevait es durement les faiblesses et les fautes, riait de bore coeur avec lui du portrait peu flatte qu'ut soumettait à son jugement. La comédie ancienne nous est connue surtout par l'si uvre d'Aristophane. On ignore la date de la naissance de cc grand poète. Sa première pièce, cItateail„ fut représentée en 428 av. J.-C., olymp. 88, 1, et roussit. 11 composa d'après les uns cinquante-quatre, d'après les auges quarante-quatre comédies. Onze seulement ont été conservées. Elles embrassent une période de trente-sept ans. Ce sont : les Ac/tarniens (ol. 88, 3: av. J.-C. 425), les Chevaliers (ol, 88, 4; av. J.-C. 424), Ms Iic ss (ol, 89, 1; av. J,-C. 423), les Guêpes (ol. 89, 2 ; av. J,-C. 422), la Paix (ol. 89, 3 ; av. J.-C, 421), les Oiseaux ((d. 91, 2 ; av, J.-C. 414), Lysistvata (ol. 92, 1 ; av. Je O. 411), les Fêtes de Cérès et de Proserpine (oit. 92, 1 ;' av. J.-C., 411), les Grenouilles (ol. 93 ; av. J.-C. 405), 1'Assern_llée des femmes (ol. 96, 4; av. J.-C. 392), Plutus (ol. 97, 4; av. J.-C. 388), Ces deux dernières pièces appartiennent au genre de la comédie moyenne. Des drames perdus il reste plus de 49 Voir pour toute cette question assez obscure Clinton, Aastï Hel?. Préface, prn-zv. 584, suppose qu'une toi supprima le ehmur pour le punir de ses excès. Donat, De tom dedia, apprécie exactement le lied l'ancienne comédie. Lu loi qui défendait u.'q x.upm4v a n,, portée dans rot. 85,1.av.J.C.ais,r'éatplus observée désrarchont,td'Eu V9) M 700 fragm ai i Io,uille;;;e'tsement trop peu in pontants pour n si Tuer avec quelque sûreté t plan d'une Ainsi, la r ,niédie ancienne nous „st; tounue neuuf' pièces d'un même poète. Les fragments qui restés des ouvres do :;es émules no centienn contredis les résultats auxquels la critique es: te rivée s l'' s de ces quelques monuments précieux a tous eg.. 1s; mars la perte des drames d'Eupoflis (dates cor:nues.o1.87,4;89, 3; 89, 4; av. J.-C. 429,422, 421), dePhrynelsos (dates extrêmes connues : ol. 87 à 13, 3: au. J.-C. 432 à 405), d'Ans eipsias (cieux fois s a.il lueur et Aristophane : ol. 89, 1; 91, 2 ; a.v, j.-C. 424, 415), de Platon le cornique (plusieurs dates depuis Fol. 88 jusqu'à Fol. 97 ; av. J,-C. 428, 392), pour ne citer que tes noms les plus importants, empêche d'apprécier toute ia fécondité du génie grec dans un germe unique. La comédie moyenne une longue transition de la co médie ancienne à la , nouvelle. Elle compte vingt poètes dont les ouvraes -n,r'igneient un nombre double de celui des. pièces d.. la comédie ancienne : Athénée donne le chiffre approximatif de 800". Encore faut-il ajouter que peut-être plus de' la moitié des poètes que _es grammairiens portent ais compte de ta comédie ancienne, auraient été plus _justement attribués à la comédie moyenne, L'Assemblée des femmes et le Plutus permettent de se faire quelque idée de ce que fut ce genre à ses débuts ; niais 1`obscurité se fait d1`:s que l'on s'éloigne de ces commencements d'une période qui s'étend de le fin de la guerre dur. Péloponnèse à 1'avénement d'A® lexaudre. On explique ordinairement la transformation que subit la comédie athénienne par une sorte d'affaissement des caractères, par un découragement général qui rendaient le peuple indifférent aux railleries dont sa politique gourait être l'objet '=, li est certain que l'issue de la guerre du Péloponnèse fut, une sévère leçon, que les Athéniens montrèrent dès lors plu de sagesse et reprirent ainsi dans le monde grec un rang très honorable. °Jais sans nier l'influence qu'un grand fait politique peut exercer à un mondent donné sur le o rseloppement d'une littérature, oit peut objecter que la poésie rec:que, cul passant du drame politique à mure forme nouvelle, rouiiniait i'évoiution qui a l'ait se succéder l'épopée, l'ode et le drame. Le ive siècle est l'âge de la prose, de l'éloquence, de la philosophie. Ces genres nés à la fin du. siècle précédent, se substituent à tous les autres, L'époque de la réflexion, de l Ittude des moeurs, succède à l'époque de l'enthousiasme poétique. Le besoin de la nouveauté est une loi esthétique, et l'on ne. peut être surpris qu'un peuple foi rue aux leçons de Platon et ''A,_istete ait demandé à sas poètes de se plier à ces n .ôts. Les deux principaux éléments qui caractérisent la comédie mute--21: .,t .. pressiers ; le choeur le caricature i; 'tes_se des chefs des partis. L cl, aétait un reste es orfdirelyriques du genre; Fur: déjà s'en montrait embarrassé dans ses tragédies : ï ',ait guère d'autre utilité que de débiter la parabase distraire par le spectacle d= ses danses et de ses évolu thvménès, 01, 85, «, av. J.-C. 437 ; Sao'. d'Aristoph. Achar,, 87. Elle fut, remise en nigaeur ou renouvelée vers Vol. 91, a.. J-C. 410. Il semble qu'elle ire contenait pas d'interdiction absolue et se bornait ?r demander aux poè'''o de respecter Phonoe,rr des hommes d'État contemporains, ;tout cela es( antérieur à ta don ,tion n Trente. COM 1416 COM fions. Il était destiné à être supprimé du jour où la comédie, cessant d'être militante, se renfermerait dans l'imitation des travers ridicules des différentes classes de la société. La comédie ayant renoncé à emprunter ses sujets à la politique du jour, les attaques directes contre telle personnalité éminente n'avaient plus d'excuse, et les poètes durent se priver du plaisir d'affubler un acteur du masque et du nom d'un homme d'État. Ces changements se firent graduellement, et l'habitude de railler les personnes ne disparut pas en un jour, mais nous voyons déjà dans le Plutus d'Aristophane que l'on évitait de s'attaquer aux citoyens influents. Les personnages de la comédie moyenne sont de deux sortes : d'abord les poètes et les philosophes dont les oeuvres et les systèmes prêtaient à la plaisanterie 5E; puis des types empruntés aux classes inférieures de la société : paysans, soldats, artisans, parasites, courtisanes 63. La satire trouvait aisément à s'exercer aux dépens de tels personnages. Ainsi la comédie en vient à emprunter ses ressources à l'étude de la société contemporaine. L'action dramatique est dès lors conçue d'une manière plus conforme à une imitation de la vie réelle; à la surprise que provoquaient les hardiesses de l'imagination d'Aristophane, succède l'intérêt qui s'attache au développement ingénieux du sujet; les incidents sont plus nombreux, l'intrigue mieux liée; le langage des personnages se rapproche du ton de la conversation ordinaire 5S. Il est certain que les sujets purement littéraires ou mythologiques étaient traités volontiers par des poètes qui ne se rendaient peut-être pas encore bien compte des richesses que leur offrait l'observation des moeurs, cette veine nouvelle qu'ils venaient d'ouvrir. De là un caractère d'érudition qui distingue la comédie moyenne de ses deux soeurs 55. Les auteurs qui ont cultivé la comédie moyenne avec le plus de succès, Euboulos, Alexis, Antiphanès, Anaxandridès, avec leurs précurseurs de la comédie ancienne, Théopompe et Platon, se distinguaient par la vivacité et la correction de leur style 56. La comédie nouvelle (1 va) fut un pas en avant dans la voie où était entrée déjà la comédie moyenne ; ce ne fut pas une forme vraiment nouvelle du genre comique. Ce qui était imparfait, elle l'acheva avec un art dramatique plus raffiné et plus sûr de lui-même. Elle renonce définitivement à l'élément poétique et s'attache à contenter les goûts d'un âge froid et incapable d'enthousiasme. La transition entre la comédie moyenne et la comédie nouvelle est, on le comprend, moins brusque qu'entre la comédie ancienne et la moyenne. Les deux genres durent paraître côte à côte sur la scène pendant quelque temps. M. Keehler remarque, d'après l'étude des inscriptions de didascalies, que la séparation est accomplie à la fin du ul° siècle et au commencement du aie. Les inscriptions de cette époque ne mentionnent plus aucune oeuvre de la comédie moyenne J7. Cette période répond aux règnes d'Alexandre et de ses successeurs. C'est l'heure de la décadence d'une race qui jusqu'alors avait tenu le premier rang dans le monde. Mais cette décadence a encore le charme d'une grâce et d'un goût qui ne peuvent pas abandonner l'Attique. La grandeur nationale n'estplus; mais la comédie nouvelle atteste le dernier effort littéraire d'un peuple éminemment artiste. Par cela même qu'elle est exempte d'un caractère national trop marqué, elle a pu servir de modèle aux imitations d'autres peuples. Le cadre qu'elle s'était tracé a peu d'étendue. Les rapports de société chez les anciens étaient loin encore de présenter la variété qu'ils ont dans les temps modernes. L'amour devient ce qu'il est resté depuis, le pivot de la poésie dramatique. Mais les moeurs grecques, en confinant la femme dans le gynécée, offraient à l'auteur comique peu de situations dont il pût tirer parti. « Lorsque la séduction d'une Athénienne forme le noeud de l'action, elle a été accomplie dans l'ivresse et l'entraînement de la jeunesse, dans une rencontre subite, dans un de ces pervigilia par exemple, tels que la religion d'Athènes les avait toujours sanctionnés, ou bien une prétendue esclave ou hétaire dont un jeune homme est mortellement épris, est reconnue comme une Athénienne de bonne naissance, et le mariage couronne la liaison commencée dans une tout autre intention ".» La plupart de ces caractères avaient été employés déjà par la comédie moyenne et se retrouvent dans les pièces de Plaute et de Térence. C'est l'amant passionné, la maîtresse coquette, la courtisane provocante, l'esclave rusé, le soldat fanfaron, le parasite vorace, les parents obstinés ou faibles, etc 59. Ces types étaient désignés par des noms significatifs, procédé tout à fait conforme aux habitudes d'une langue où les noms propres étaient formés d'après les règles de la dérivation et qui a été longtemps conservé par les modernes, mais avec moins de raison. Le grammairien Donat, s'inspirant des idées grecques, pose cet usage comme une règle et en donne la raison : « Dans la comédie, les noms des personnages doivent avoir une étymologie qui réponde au caractère lui-même. En effet, il est absurde dans un sujet comique de donner à un personnage un nom qui ne lui convient pas ou de lui attribuer un rôle en désaccord avec son nom. Voilà pourquoi l'on appelle Parménon un esclave fidèle, Syrus ou Géta un esclave infidèle, Thrason ou Polémon un soldat, Pamphile un jeune homme, itlyrrhina une matrone ; les noms de Storax et de Circus donnés à un enfant rappellent l'idée, l'un de parfums, l'autre du jeu et des gestes ; et de même pour les autres". Les anciens comptaient soixante-quatre poètes de la comédie nouvelle ; moins de trente noms nous ont été conservés. Des maîtres du genre, Ménandre, Philémon, Diphile, Apollodore de Caryste, il ne reste que des fragments fit. Sans les imitations latines de Plaute et de Térence, on se ferait difficilement une idée de ce que fut cette dernière évolution de la comédie attique. Ménandre (ol. 109, 3 à 122, 2; av. J.-C. 342-291) fut l'ami de Théophraste et d'Épicure, de deux moralistes. L'antiquité a été unanime à reconnaître l'excellence de sa poésie. Ses drames, au nombre de plus de cent, continuèrent à être représentés longtemps après lui. Il était COM 1417 COM la lecture favorite des Grecs et des Romains les plus distingués. L'on admirait surtout dans ses ouvrages la conduite de l'action, la vérité des moeurs, la fidèle représentation de la vie 82. Son génie présentait de grandes ressemblances avec celui d'Euripide, en qui l'on voit avec raison un des précurseurs de la comédie nouvelle. On goûtait surtout clans Ménandre les nombreuses maximes et sentences que l'on regardait comme de vraies leçons morales et dont on fit de bonne heure des compilations. La décence était assez respectée dans ses comédies pour que, malgré la nature des sujets, on ne vit pas d'inconvénient à les mettre entre les mains de la jeunesse. Térence reproduit, à un degré moindre, les qualités de force et de finesse du drame de Ménandre. Ainsi la comédie nouvelle nous conduit à la comédie romaine. Celle-ci a s'y rattache d'une manière vivante par la translation de toute la scène grecque à Rome, et non par une simple transmission de livres ; chronologiquement même, elle la continue sans interruption. En effet, bien que l'apogée véritable de la comédie coïncidât avec le temps qui suit immédiatement la mort d'Alexandre, une seconde génération succède à la première ; Philémon le fils continue Philémon le père, et il est probable que des poètes comiques de mérite et d'autorité moindres fournirent plus tard encore de nouvelles productions à l'amusement du peuple. Lorsque Livius Andronicus débuta devant le public romain avec des pièces du genre grec (514 de la fondation de Rome, 240 av. J.-C.), toute l'audace de l'entreprise consistait en ce qu'il tenta en langue romaine ce que beaucoup de ses collègues et contemporains avaient coutume de faire en grec dans les villes grecques 63. Mais, si heureuse qu'ait été cette influence de la comédie nouvelle sur le théâtre latin, il faut reconnaître qu'à Athènes même, la décadence s'en fit sentir dès le troisième siècle. L'étude des didascalies attiques de la seconde moitié du ule et du commencement du 110 siècle nous montre qu'il y a des années où aucune comédie nouvelle ne se produit devant le public : il n'y a pas de concours. C'était sans doute une conséquence de la décadence littéraire et politique où tombait peu à peu la grande cité. Les solennités religieuses et artistiques étaient ailleurs : à Alexandrie, à Antioche ou à Pergame. Le théâtre attique était tombé au rang de scène provinciale où les auteurs n'apportaient plus leurs productions nouvelles 64. F. CASTETS, II. A quelle occasion et à quel moment les comédies se produisaient-elles sur la scène attique? Nous avons vu qu'à Athènes, comme à Rome, les représentations théâtrales faisaient partie du culte. C'était pendant les solennités religieuses que se produisaient en public les oeuvres des poètes tragiques et comiques. Nous n'avons à nous occuper que de ces derniers. Comme l'origine de la comédie se rattache directement au culte de Bacchus, il n'est pas étonnant que les représentations de ce genre aient pris place principalement dans les fêtes consacrées au dieu du vin. C'est seulement assez tard qu'on 62 De là le mot du grammairien Aristophane : a Mismeps .al pts, e6srpe; 4p K6hler, Mittheilungen des deutsch. Inst. in Athen, 1878, p. 129-130. 65 Cf. A. Mommsen, Heortologie, p. 323 et pl. 1; Schmerl, Quibus Atheniensium diebus festis fabulae in scenam commissae sin t, Breslau, 1879, p. 17; Bouché-LePhilologie, 1877, p. 168 et s. 67 V. la carte dans Bouché-Leclercq, t. c. pl. xi. 68 Aesch, 1, 157; cf. Mommsen, Heort. p. 325, 331; Schmerl, t. c. p. 17. 69 Isae. 8, 15. Cf. Mommsen et Schmerl, 1. c. A Salamine, on trouve mentionnées des représentations tragiques, Ccrp. insc. graee. 108; Ephemeris, 4097; II. a pu voir s'introduire des comédies dans la plupart des solennités grecques ; mais depuis le ve jusqu'au lue siècle, elles restent à Athènes le divertissement particulier des grandes fêtes bachiques. Du 8e au 120 jour du mois Posidéon (novembre-décembre) avaient lieu Ies petites Dionysies ou Dionysies champêtres (Otovéata Tlc x312' âypo ç, v.txpx ®tovûata) 6' dont faisaient partie aussi les Dionysies du Pirée (Atovéata rà iv IIetpataZ) n. On y donnait des représentations comiques et tragiques, qui avaient lieu dans la campagne, dans les bourgs, et même dans des quartiers d'Athènes comme le Collytos 67, où fut joué l'OEnomaüs de Sophocle 68. Le même passage d'Eschine nous indique clairement qu'on représentait des comédies. C'est à des représentations de ce genre qu'assistait le client d'Isée, encore enfant, assis aux côtés de son grand-père, dans le bourg de Phlya 69. La fête des Dionysies du Pirée, qu'on place dans les mêmes jours70, comprenait aussi des représentations scéniques des deux genres 7t. Dans le mois suivant, Gamélion (décembre-janvier), se plaçait une des fêtes les plus importantes pour les comédies : les Lénéennes (M 'ému, Otovéata iv Aftuvatç). Elles se célébraient du 8e au 120 jour du mois 72, et l'on pense que les représentations scéniques duraient trois jours 73. Cette fête fut instituée postérieurement aux Dionysies champêtres et aux Dionysies urbaines, mais cependant à une époque qui se place avant Pisistrate et le poète Thespis u. Elle devint alors une grande solennité où prenaient place de préférence les concours de comédies, tandis que les concours de tragédies étaient plus nombreux dans les grandes Dionysies urbaines". C'est, en effet, aux Lénéennes qu'Aristophane lit jouer les Acharnions, les Chevaliers et Ies Grenouilles. Nous arrivons au mois Anthestérion (janvier-février), où nous trouvons une autre fête bachique, les Anthestéries' ('Avteare pta), composées de trois jours, la mtotyict le 14, les ~dcç le 12, et les zûTpot le 13 76. M. Mommsen pense que ces deux derniers jours étaient consacrés à des représentations scéniques, tragédies et comédies 77. M. Rinck les admet même pour le premier jour, la 7tttotyfe 78. Mais la question est controversée. Pour le premier jour, on ne s'appuie que sur une inscription qui mentionne des sommes versées pour le droit de deux oboles et destinées au 140 jour du mois Anthestérion 79 : c'est précisément la date de la 7rtOotyla. Mais ces sommes du Aewptxév ne sont pas forcément destinées à des représentations dramatiques, et l'on ne peut pas en conclure que l'on ait donné des tragédies ou des comédies ce jour-là 60. Pour le second jour, les xtfe;, on admet des représentations, ou au moins des récitations de tragédies faites par les poètes qui concouraient. Cette assertion est également douteuse 81 ; mais nous n'avons pas à l'examiner, puisqu'il n'y est pas question de comédies. Enfin, au troisième jour, les Xétpot, on place des représentations ou des récitations de comédies, en invo cf. Mommsen, p. 332. 70 Cf. Foucart, 1. c.; Bouché-Leelercq, Atlas, p. 77. 71 Mommsen, Heort. p. 331; Schmerl, 1. c. p. 18. 72 Mommsen, p. 332 et pl. t; Bouché-Leclercq, p. 76. 73 Mommsen, p. 342. Cf. Sauppe, Berichte d. 76 Id. p. 10. 76 Mommsen, p. 343 et pl. r; Bouché-Lectercq, p. 76. 77 Mommsen, p. 362, 368. 78 Rinek, Religion d. Hell. II, p. 53; cf. Schmerl, 1. c. p. 20. 76 Corp. insc. graee. 147, et Corp. insc. Att. 1, 188; cf. Schmerl, p. 20. 60 Cf. Schmerl, 1. c. p. 21. Sur l'emploi du lnc ois, cf. Pollux, VIII, 113; Corp. insc. graee. 147 et le commentaire de Bbckh.-81 Pour les deux opinions, cf. Bfickh, De Dionys. p. 103 et s.; Schmerl, 1. c p. 36 et s. 178 COM -1418 C 0l41 quant un texte important de Plutarque, d'après lequel Lycurgue aurait proposé une loi décidant qu'un concours aurait lieu au théâtre, pendant les xéTpot, 6repl T iv xwµtpiwv, et que le vainqueur serait inscrit (xaT«Àéyculat) pour les fêtes urbaines E2. Boeckh a pensé qu'il s'agissait là d'une simple récitation publique, après laquelle on désignait les comédies dignes d'être représentées aux grandes Dyonysiaques, de même qu'aux xôeç on aurait désigné les tragédies 83. On a objecté qu'il était bien étonnant de faire représenter aux grandes Dionysiaques des pièces connues du public; que d'ailleurs une seule comédie (rèv vtxl,aavra) n'aurait pas suffi, puisqu'il y avait aussi un concours aux Dionysiaques urbaines ; qu'enfin le peu d'espace de temps qui sépare les Anthestéries des grandes Dionysiaques n'est pas suffisant pour monter une pièce et apprendre leurs rôles aux acteurs et aux choreutes 84. L'interprétation proposée par C.-Fr. Hermann est plus plausible : les mots 7rspl Twv xo,µtplàv désigneraient un concours entre les acteurs de comédies, comme aux y eç on aurait choisi les acteurs de tragédies, pour les faire figurer dans la grande solennité des Dionysiaques urbaines S6. Si cette solution est exacte, nous n'aurions pas à noter de véritables représentations de comédies aux Anthestéries. Pour les grandes Dionysiaques ou Dionysies urbaines (Aiovééeia p.EYûaa, Tà iv l'Acs-TEi», il n'y a aucune contestation. Elles avaient lieu du 8 au 14 du mois Élaphébolion (février-mars) 86. Démosthène et le scholiaste d'Aristophane parlent simplement des représentations de tragédies et de comédies qui y avaient lieu 87. D'après Sauppe, elles devaient durer trois jours, Ies 11, 12 et 13; chaque jour, on aurait donné une trilogie dramatique dans la matinée et dans l'après-midi une comédie 88. Les comédies restèrent donc attachées spécialement au culte de Bacchus pendant toute la période florissante de l'histoire athénienne. Plus tard, après la mort d'Alexandre, il est possible que des représentations dramatiques se soient introduites dans d'autres fêtes S9; mais, à partir de cette époque, le théâtre et les solennités religieuses d'Athènes sont en pleine décadence, comme on l'a montré plus haut, et l'histoire n'en est plus intéressante. III. Il n'y a pas lieu d'insister ici sur l'organisation matérielle et scénique des comédies grecques, qui en cela ne diffèrent pas des autres représentations dramatiques pas non plus à examiner la façon dont on montait une pièce de théâtre, quels personnages en faisaient les frais, comment les acteurs et les choreutes apprenaient leurs rôles [CHOREGIA, DInnsKALIA], quelle importance avait le choeur dans la comédie grecque, combien de personnages le composaient, comment il évoluait dans l'orchestre [CHORUS]. Nous nous contenterons de parler du public qui assistait aux comédies, parce qu'à cette question se rattachent quelques points importants à considérer. Ce public, comme dans les autres représentations théâtrales, se compose de deux classes distinctes. Il y a les spectateurs privilégiés qui occupent des places réservées et qui, au moins à l'époque gréco-romaine 96, sont sans doute admis sur la présentation d'une marque spéciale [TESSERA] ; ce sont les hauts dignitaires de l'État, les prêtres, les magistrats en fonction, les stratèges, les proèdres, etc. Ils se placent sur les premiers gradins, ou même sur des sièges particuliers, dans la partie la plus voisine de l'orchestre que Pollux appelle p.Époç ou)Eurtxév 91. D'un autre côté, il y a la foule qui prend place sur les gradins supérieurs, après avoir payé le droit d'entrée de deux oboles que l'État lui faisait distribuer à ses frais [THEORIxoN] 92. C'est une multitude immense qui peut comprendre plus de 20,000 personnes, et l'on s'est demandé si l'on ne prenait pas des mesures pour la répartir avec un certain ordre dans le théâtre. M. Benndorf pense que chaque tribu avait au moins sa place indiquée et il en donne, pour l'époque gréco-romaine, d'ingénieuses raisons93. Toujours est-il que cette introduction d'une pareille masse de spectateurs n'allait pas sans quelque tumulte. Des surveillants spéciaux, nommés aga6tpopot ou ~agco foc [RHABDOUCnoI], armés de baguettes 96 et probablement assistés de serviteurs95, avaient pour fonction de maintenir l'ordre dans cette foule agitée et bruyante. Leur présence ne suffisait pas sans doute à empêcher les collisions, et nous savons que de ces mêlées on ne sortait pas toujours sans coups ou sans blessures9G Comme les réprésentations duraient toute la journée, on apportait des provisions, on buvait, on mangeait9j. Pendant la pièce, Ies spectateurs manifestaient leur mécontentement ou leur satisfaction, comme de nos jours, par des sifflets et des huées (aup(TTEtV, x).wçetv), ou par des applaudissements et des exclamations de joie (xporety, Oopubeiv) 98. On criait bis (otniç), si l'acteur plaisait"; s'il cléplaisait, on l'insultait, on lui jetait des figues, des raisins, des olives'°°; on allait parfois, assure-t-on, jusqu'à lui donner des coups lot Au sujet du public des comédies en particulier, faut-il admettre que les jeunes gens et les femmes y assistaient? La liberté licencieuse de la plupart des comédies grecques, surtout au temps d'Aristophane, est telle que, même en se mettant en dehors de tout préjugé moderne, on peut se demander si un père de famille athénien pouvait y conduire sa femme ou ses fils. Pour les jeunes gens, la question parait devoir être résolue d'une façon affirmative 162. Pollux, après le aipoç fiou),su'rtxiv réservé aux principaux citoyens de la ville, désigne une autre zone du théâtre par le nom significatif de ireuccly 103 Il y avait donc un emplacement réservé aux éphèbes. Le fait est confirmé CON --1419 -CON parle scholiaste d'Aristophane et par les lexicographes 10'" Platon, imaginant un concours où auraient lieu des représentations de tout genre, dit que les petits enfants donneraient sans doute le prix aux faiseurs de tours, les enfants plus grands « aux auteurs de comédies », mais que sans doute les jeunes gens, les femmes instruites, et presque toute la foule, préféreraient les auteurs de tragédies 155. Bien que Platon parle ici d'un concours imaginaire, il est probable qu'il tient compte en parlant ainsi des moeurs et des usages de ses contemporains. Dans un de ses plaidoyers, Isée représente un citoyen d'Athènes conduisant ses petits-fils aux fêtes des Dionysies champêtres, auxquelles ils assistent assis à ses côtés108. On ne craignait donc pas pour eux les indécences de ces fêtes très libres. Aristophane, dans un passage de la Paix, s'adresse aux enfants en particulier207, et Lucien met dans la bouche de Solon un discours où il donne la représentation de tragédies et de comédies comme un excellent moyen d'éducation pour les enfants, qui apprennent ainsi à connaître les vertus et les vices des hommes 10g. Enfin, dans la cavea du théâtre de Milo, on a trouvé une inscription portant : vaaviuxtev Târcoç 105. Nous ne pouvons donc pas douter, en présence de témoignages si précis, de la présence des enfants et des jeunes gens aux représentations de comédies, et elle nous avertit déjà de la différence profonde qui sépare les moeurs antiques de nos usages modernes en cette matière. Pour les femmes, la question reste beaucoup plus obscure, parce que nous manquons de documents formels. Aussi a-t-elle fourni matière à bien des controverses. Ceux-là mêmes qui, d'après les textes que nous venons de citer, admettent la présence des jeunes gens aux comédies, répugnent souvent à croire que les femmes honnêtes de la' société grecque aientpu y assister. Mais d'autres ne voient pas de raison sérieuse pour justifier une interdiction formelle 910. Le débat est encore ouvert et l'une et l'autre opinion sont défendues par des noms illustres. Nous ne pouvons donc avoir la prétention de la trancher, et nous nous contenterons d'énumérer les principaux textes qui sont en discussion. On trouve des allusions à un public de femmes dans les comédies grecques'. Mais de quelles femmes s'agit il? Sont-ce les rtEratàtu1 fvat 'rûty yuvatxtw dont parle Platon, les femmes de la bonne société, ou seulement des femmes du bas peuple et surtout des courtisanes, dont la présence aux comédies n'est pas discutée112? On voit bien aussi des rôles de femmes dans la comédie grecque, et parmi elles des femmes honnêtes; mais on sait que ces rôles étaient tenus par des hommes [scENICIARTIFICES], et dès lors cette raison ne prouve rien pour la présence des femmes parmi les spectateurs. On invoque encore les mots grecs qui signifient spectatrice (Ue«-cpta, 6500E« pta); mais il faut reconnaître qu'ils se trouvent dans des textes où il n'est pas forcément question d'une représentation de comédie116. Platon, en trois passagesl'4, parle de femmes au théâtre ; mais il est question de la tragédie, ce qui est bien différent, car tout le monde s'accorde à reconnaître qu'elles pouvaient assister aux représentations tragiques. Satyros dans Athénée12 nous montre Alcibiade revêtu d'une magnifique robe de pourpre pour une de ses chorégies et excitant l'admiration, non seulement des hommes, mais des femmes : ne s'agit-il pas aussi dans cette circonstance d'un concours de tragédie ou de musique? Le scholiaste d'Aristophane, dans un texte assez altéré 118 rapporte qu'un certain Sphyromachos avait proposé un décret qui fixait aux hommes et aux femmes des places distinctes et qui séparait aussi les courtisanes des femmes libres; mais rien ne prouve que ce passage s'applique aux comédies, ni même qu'il soit sûrement question d'une représentation dramatique, plutôt que d'une autre cérémonie publique. On nous apprend encore qu'aux théâtres de Syracuse et de Parga on lit gravés sur des gradins des noms de femmes et reme de prêtresses"; mais rien n'autorise à en conclure qu'elles assistaient aux comédies 118 En somme, on voit que, malgré la diversité des textes commentés dans ces nombreuses dissertations, il est impossible d'en rien tirer qui soit absolument significatif. Nous pouvons seulement en conclure qu'à notre connaissance aucun règlement formel n'empêchait les femmes athéniennes d'assister aux comédies. D'autre part, est-il permis de croire que la liberté licencieuse de ces pièces en écartait, par une sorte d'usage établi, les jeunes filles et les femmes de la bonne société? Ce qui peut guider chacun dans la solution de cette question, c'est surtout l'opinion générale qu'il s'est faite des moeurs grecques, de la part plus ou moins grande qu'avaient les idées de convenance dans la vie de la femme athénienne, du degré d'immoralité que les anciens pouvaient attacher à des paroles ou à des représentations qui nous paraissent à nous licencieuses, mais qui ne les choquaient peut-être pas au { COMÉDIE ROMAINE. -Le génie comique s'est manifesté à Rome sous des formes diverses; outre la comédie proprement dite, il y a produit la satura, l'atellane, le mime, etc. Nous ne nous occuperons ici que de la comédie véritable; nous étudierons successivement celle qui était imitée du grec et jouée par des acteurs revêtus du pallium (comoedia COM 1420 COM ou fabula palliata), et celle qui mettait sur la scène les moeurs romaines, et dont les acteurs portaient la toge (comoedia ou fabula togata). Comoedia palliata. On appelait ainsi la comédie dans laquelle l'acteur portait le vête ment grec et qui, par consé quent, était plus exactement irnitée des pièces grecques. Les ai ' représentations de scènes de comédie que l'on rencontre dans les monuments romains se rapportent à la palliata, quand ils ne sont pas directement empruntés au théâtre grec. On en trouvera des reproductions aux articles qui traitent des acteurs et de PERSONA]. La figure 1879 représente, d'après un bronze du musée de Florence 119, un personnage vêtu du pallium, qui lui enveloppe même la tête, et chaussé du soccus ; il ne lui manque que le masque, dont les acteurs ne se couvraient pas toujours. On sait que le théâtre grec fut introduit à Rome en 514 (240 av. J.-C.) par le Tarentin Livius Andronicus. Livius fut surtout un auteur tragique ; on trouve pourtant, dans ce qui nous reste de son oeuvre, quelques titres de pièces et quelques vers qui semblent se rapporter à des comédies. Naevius, qui vient après lui (mort vers 555 de Rome, 199 av. J.-C.), écrivit à la fois des comédies et des tragédies; il est surtout célèbre pour avoir essayé d'introduire la politique au théâtre. Comme il appartenait au parti populaire, il attaqua sans ménagement les plus grands personnages de l'aristocratie et en fut sévèrement puni d'abord par la prison, puis par l'exil. Plaute (né vers 500, mort en 570 de Rome, 254 à 184 av. J.-C.) s'enferma dans les études de moeurs et de caractères. Nous avons de lui 20 comédies, sur 130 qu'on lui attribuait; ces vingt pièces, avec la Vidularia, qui s'est perdue, formaient celles qu'on appelait fabulae Varronianae, parce que le savant Varron les avait mises à part comme n'étant contestées par personne. Après Plaute, la comédie romaine semble s'être attachée de plus en plus à l'imitation fidèle des auteurs grecs, d'abord avec Caecilius, Celte d'origine, qui vint à Rome comme prisonnier de guerre, vers l'an 560 (194 av. J.-C.) et dont les pièces n'existent plus ; puis, avec Térence, né à Carthage, amené comme esclave à Rome, où il fut l'ami et le protégé de Scipion Émilien. Après avoir composé six comédies, que nous possédons encore, Térence mourut en 595 (159 av. J.-C.) âgé de vingt-six ans. A ce moment, il semble s'être produit une réaction contre ce théâtre qui s'appliquait à copier trop fidèlement les originaux grecs. Les pièces de Plaute furent reprises avec des prologues nouveaux. Celui de Casina, et, selon Ritschl, la plupart des autres que nous avons conservés, datent de cette époque. Avec les premières années du vile siècle, s'achève la période active et créatrice de la comoedia palliata; la vogue passe à d'autres genres. Désormais le nombre des auteurs qui s'occupent de traduire en latin les comédies grecques devient plus rare, et probablement leurs pièces ne sont plus faites pour le théâtre'. Celles de Plaute et de Térence ne cessèrent pas tout à fait de paraître dans les représentations publiques; mais il est vraisemblable qu'elles n'y furent plus jouées qu'assez rarement et dans des occasions extraordinaires. Les anciens n'ont pas toujours porté le même jugement sur les auteurs de comoediae palliatae que je viens d'énumérer, et, suivant les époques, on leur a assigné des places différentes. Plaute fut d'abord mis au-dessus des autres, et, pendant quelque temps, la critique romaine naissante ne semble presque occupée que de lui 121. Un peu plus tard, Caecilius l'emporte sur Plaute. Un grammairien, qui vivait probablement dans la seconde moitié du vile siècle, Volcatius Sedigitus, avait composé une sorte de liste, ou comme on disait, de canon en vers, où il distribuait des rangs aux divers poètes comiques de Rome. Dans cette liste Caecilius est mis le premier et Plaute le second 12B Cicéron semble partager cette opinion u3. Mais quand le goût devint plus difficile, Térence, dont les pièces avaient quelquefois déplu au peuple, que Volcatius ne mettait qu'au sixième rang, et que César appelait un demi-Ménandre, fut jugé plus équitablement et même placé au-dessus de ses rivaux par les gens éclairés. Si de ces notions rapides sur la vie et le mérite des comiques latins nous passons à l'examen général de leurs oeuvres, nous remarquerons d'abord qu'elles sont imitées ordinairement de la comédie nouvelle des Athéniens, quelquefois de la comédie moyenne, jamais de la comédie ancienne La raison en est facile à comprendre. La comédie ancienne traitait librement les questions politiques, ce qui est possible et naturel dans une démocratie ; mais un État aristocratique et sévèrement gouverné, comme était Rome, ne pouvait guère permettre que le théâtre devînt un écho du forum. La comédie ancienne se moquait sans scrupule des principaux personnages d'Athènes, les nommait par leur nom, et même n'hésitait pas à les mettre sur la scène. A Rome, la loi des Douze Tables défendait sous les peines les plus sévères de composer une pièce de vers « qui pût porter atteinte à la réputation d'autrui » 132; il était donc très difficile aux auteurs latins d'imiter les pièces d'Aristophane. Avec la comédie moyenne et la comédie nouvelle, qui s'étaient renfermées dans l'étude des moeurs et le développement des caractères, le même inconvénient n'existait plus. A. la vérité, il y en avait un autre : les moeurs d'Athènes n'étaient pas tout à fait celles de Rome, les rapports des divers membres de la famille entre eux ou avec leurs esclaves différaient dans les deux pays ; il y avait, dans les pièces d'Alexis ou de Ménandre, des caractères que Rome ne connaissait guère, comme celui du soldat de fortune, qui se vend au plus offrant. On pouvait donc craindre que le Romain ne se reconnût pas dans ces tableaux qui représentent la vie et les personnages d'Athènes. Il arrive en effet quelquefois que le poète se croit obligé de rappeler à ses auditeurs que la scène n'est pas à Rome, et que certains détails qui les choquent sont conformes aux moeurs grecques : licet hoc COM 1421 COM Athenis nobis 14G. Le plus souvent il se contente de changer sans le dire ce qui serait trop contraire aux habitudes de son pays. Plaute le fait à chaque instant ; Térence luimême, quoique imitateur plus exact, ne s'en fait pas faute 127. Il faut d'ailleurs remarquer que ce n'est guère que par le détail et les accessoires que les personnages de Ménandre appartiennent à la Grèce ; au fond, ils sont de tous les pays. La comédie nouvelle devait beaucoup aux enseignements de la philosophie socratique ; à cette école, elle avait pris l'habitude de représenter les caractères par leurs traits les plus généraux, ce qui est la tendance de toutes les philosophies : elle cherchait avant tout à saisir et à peindre l'homme. Aussi les peintures qu'elle en faisait, quoique applicables principalement aux Grecs, pouvaientelles convenir aussi aux Romains, et Cicéron dit en termes exprès que chacun y retrouvait l'image de sa vie de tous les jours 150 Étudions d'abord la disposition extérieure des comédies latines, telle que nous la trouvons sur les manuscrits qui nous les ont conserv©es. Quelques-unes sont précédées par une sorte de préambule qui contient en quelques lignes une indication rapide de l'époque où chacune d'elle a été représentée, des jeux dans lesquels elle a paru, et des acteurs qui l'ont jouée pour la première fois. C'est ce qu'on appelle des didascalies [DIDASCALIA]. Nous ne savons pas à quel moment ces didascalies ont été faites et quels sont les grammairiens qui les ont rédigées. On a cru longtemps que les pièces de Plaute n'en avaient pas ; mais Ritschl a retrouvé, sur le manuscrit Ambrosien, celle du Pseudolus et quelques traces d'une autre qu'il attribue auStichus i29. Il y en a en tête de toutes les comédies de Térence, qui proviennent de deux versions différentes. Les critiques semblent d'accord pour préférer celles qu'on trouve sur le célèbre manuscrit du Vatican qu'on appelle Bembinus, du nom du cardinal Bembo qui en était possesseur 130. Après la didascalie, vient le prologue, qui, quoique placé encore en dehors de l'action, n'en est pas moins une partie importante de la pièce. Il n'y avait pas de prologue dans le théâtre primitif des Grecs, ou plutôt on entendait ce mot dans un sens différent de celui qu'il a pris dans la suite : on l'appliquait à toute la partie de la pièce qui précédait la première entrée du choeur sur la scène. Euripide, qui choisissait quelquefois pour sujet de ses drames des légendes peu connues et prenait plaisir à placer ses personnages dans des situations nouvelles, éprouva le besoin d'en prévenir d'avance ses spectateurs pour leur épargner des surprises désagréables. Il imagina donc d'introduire en tête de ses tragédies quelque dieu ou quelque personnage important qui, avec plus ou moins d'adresse, en faisait connaître le sujet. Les poètes comiques suivirent très volontiers cet exemple. Auparavant, lorsqu'ils voulaient s'adresser directement au public, ils le faisaient dans la parabase; quand la parabase eut disparu avec le reste du choeur, ils se servirent du prologue, soit pour préparer les spectateurs à écouter favorablement leur pièce, soit pour se plaindre des injustices dont ils se prétendaient victimes. Cet usage passa aux comiques latins. La plupart des pièces de Plaute (quatorze sur vingt'31) ont des prologues. Quelquefois c'est un dieu qui parle, comme chez Euripide; d'autres fois c'est un des personnages de la pièce ou un acteur particulier. D'ordinaire ils annoncent la comédie qu'on va jouer, en racontent le sujet et réclament pour elle un peu de bienveillance et d'attention. C'est ce que fait le personnage représenté dans une miniature ici reproduite (fig. 1880) du manuscrit de Térence de la bibliothèque Ambrosienne à Milani32 ; au-des sous de la figure on lit ce vers du prologue du Phormion: Térence fut réduit par les attaques de ses adversaires à abuser, comme il le dit lui-même, de ses prologues pour se défendre 133. Nous les avons tous, sauf celui qui précédait l'Bécyre à la première représentation; et dans tous le poète n'est occupé qu'à répondre aux reproches qu'on lui adressait de s'être fait aider par de puissants collaborateurs, ou d'altérer (contaminare) les modèles grecs en ajoutant à la pièce qu'il imitait quelques incidents ou quelques personnages qu'il allait prendre dans une autre. Chez lui, c'est toujours un acteur spécial qui dit le prologue, avec un vêtement particulier (ornatu prologi). A la figure tirée du manuscrit de Térence, que nous avons re produite plus haut, nous en joignons une autre (fig. 1881) d'après un bas-relief du Musée du Louvre 1°°.On se fonde pour y reconnaître l'acteur chargé de dire le prologue sur cette circonstance,nullement décisive il vrai, qu'il parle devant un rideau. Une fois même, dans une pièce de Térence, cet acteur est le chef de la troupe, Ambivius Turpio, qui vient en personne prêter l'appui de sa considération au jeune poète dont le public refusait d'entendre une des plus belles oeuvres 13a. COM -1422 --COM Quant aux pièces elles-mêmes, les anciens éditeurs avaient coutume de les diviser en cinq actes, mais cette division paraît aujourd'hui à beaucoup de critiques tout à fait arbitraire. Dans l'ancien théâtre grec elle n'existait pas; c'étaient les chants du choeur qui coupaient la représentation sans l'interrompre et donnaient quelques moments de répit au public. On appelait 27eto-etov l'intervalle qui s'écoulait entre deux de ces chants 136 ; et le nombre de ces i iticr ètu n'était pas fixé d'avance. On en compte deux, trois, quatre ou davantage, suivant l'importance du sujet, en sorte qu'en y joignant le apaoyoç et l'l otos, c'està-dire la partie qui précède le premier choeur, et celle qui suit le dernier, la pièce pouvait avoir, comme nous disons aujourd'hui, quatre, cinq, six actes, ou même plus. C'est seulement à l'époque alexandrine que la règle des cinq actes paraît avoir été adoptée. Les poètes de la nouvelle comédie ne la connaissaient donc pas, et il est naturel de croire que les comiques latins, qui les suivaient fidèlement, ne s'y sont pas non plus conformés. Nous savons que, sur le théâtre de Rome, le rideau (aulaemn) se baissait au commencement de la pièce et qu'il ne se relevait que lorsqu'elle était entièrement achevée 137 Vraisemblablement la pièce se poursuivait dans l'intervalle sans aucun arrêt jusqu'à la fin. Donat le laisse entendre, lorsqu'il dit qu'il ne fallait pas laisser respirer le spectateur, de peur que, si l'action s'interrompait un moment, il n'en profitât pour s'en aller. Ii arrive pourtant quelquefois que la scène reste vide. Dans le Pseudolus l'esclave annonce qu'il s'éloigne pendant quelques instants pour préparer une de ses fourberies et qu'il va revenir bientôt; il ajoute Il est probable qu'il en était ainsi dans toutes les occasions semblables, et que le joueur de flûte était chargé d'amuser le public pendant que la scène était vide; mais ces occasions étaient rares, et il y a des pièces où elles ne se présentent jamais. La règle des cinq actes fut adoptée chez les Romains à l'époque de Varron (lui en fit, à ce qu'on croit, le sujet d'un de ses ouvrages 139. Horace l'a formulée d'une manière tout à fait impérative dans son Art poétique 140. Non contents de soumettre à cette règle les poètes de leur temps, les grammairiens voulurent l'imposer aussi à ceux qui les avaient précédés. Ils prétendirent diviser leurs ouvrages en cinq actes; mais ils sont obligés eux-mêmes d'avouer que ce n'est pas un travail aisé et qu'il est difficile de reconnaître quand commence ou finit un acte nouveau "»1 C'est la preuve évidente que les poètes antérieurs à Varron ne s'étaient pas astreints à cette division régulière. La seule division réelle qu'il y eût dans les comédies romaines est celle qu'indique le grammairien Diomède, quand il dit qu'elles se composent de diverbia et de cantica, c'est-à-dire de ce qui se parle et de ce qui se chante 143. Les diverbia sont toujours écrits en vers ïambiques trimètres, que les Romains appelaient senarii. Ce vers avait été imaginé par Livius Andronicus sur le modèle de celui dont les Grecs se servaient pour le dialogue dans leurs comédies et leurs tragédies; seulement les poètes latins s'y permirent beaucoup plus de licences que n'en prenaient les Grecs. Les scenarii n'étaient pas accompagnés par les instruments; les comédiens les prononçaient 143 ils ne le chantaient pas. Nous avons vu ailleurs ce que c'étaient que les. cantica [CANTICUM]. Ils sont très fréquents dans les comédies romaines. M. Ussing a calculé que dans Plaute ils occupaient près des trois quarts des pièces, dans Térence au moins la moitié u". La musique y tenait donc une place très importante. « Les cantica, dit Donat, étaient exécutés par des flûtes égales ou inégales, droites ou gauches (tibiis paribus aut itnparibus, dextris eut sinistris). Les flûtes droites ou lydiennes indiquaient par leur gravité que le ton de la comédie serait sérieux. Les flûtes gauches ou syriennes (sarranue), par leur vivacité légère, montraient que la pièce devait être plaisante ; quand on annonçait qu'elle allait être jouée avec un mélange de flûte droite et gauche, c'était la preuve que la gaieté et le sérieux s'y mêleraient ensemble 1`''. o Nous retrouvons ces indications dont parle Donat dans les didnsealies de Térence, et l'on y mentionne aussi le nom de l'artiste qui avait composé la musique de ses comédies'46 : c'est Flaccus, esclave de Claudius. Un bas-relief (fig. 1882), qui représente une scène analogue à la 2° du 50 acte de l'Andria de Térence, montre une joueuse de flûte placée entre deux groupes d'acteurs, et accompagnant leurs paroles du son de ses instruments 147. Comme les pièces de Diphile et de Ménandre qui leur avaient servi de modèle, les comédies romaines n'avaient pas de choeurs. Quant à la façon dont les comédies romaines étaient représentées, les détails qu'on peut donner à ce sujet ne sont pas particuliers à la comédie seule ; ils s'appliquent presque tous aux autres jeux scéniques mais comme c'est grâce à la comédie que nous en avons conservé le souvenir, que nous ne les connaîtrions plus s'ils ne se trouvaient dans les prologues de Plaute ou de Térence et dans les notes des commentateurs qui les CO1IT -1423 COM expliquent, il me semble que c'est à propos de la comédie qu'il convient de les exposer. Jusqu'à la fin du siècle, il n'y eut pas à Rome de théâtre permanent : quand on voulait donner au peuple des jeux scéniques, on élevait sur des supports quelques planches au-dessus du sol : c'était la scène. On enfermait un certain espace de terrain dans des palissades de bois : c'était la cavea. Il est problable que ce terrain était choisi d'ordinaire sur les rampes de quelque colline, afin que tout le monde pût voir. Dans les premiers temps les spectateurs s'y entassaient sans ordre ; tous les rangs y étaient mêlés. On exigeait que le public assistât àla représentation debout, parce qu'on craignait, dit. Tacite, qu'il ne prît l'habitude de perdre toutes ses journées au théâtre, s'il s'y trouvait trop à l'aise 148. En 560 (194 av. J.C.), on donna pour la première fois des places distinctes aux sénateurs. C'est sans doute aussi vers la mémo époque que s'établit l'usage pour les citoyens aisés de faire apporter des sièges au théâtre par leurs serviteurs. En 600(154 av. J.-C.) une tentative fut faite pour construire un théâtre en pierre, mais les censeurs ordonnèrent de détruire l'oeuvre commencée, et par une réaction naturelle, on revint à toute la rigueur des prescriptions anciennes. Un sénatus-consulte défendit qu'à Rome et dans le voisinage, jusqu'à la distance d'un mille, on fit apporter des sièges au théâtre et que l'on demeurât assis pendant la représentation d'une pièce1°. Mais cette sévérité, selon Tite-Live, ne dura qu'un temps 15°, et Ritschl suppose que ce fut le triomphe de Mummius, en 608 (146 av. J.-C.) qui donna l'occasion d'abandonner définitivement les anciennes habitudes. Les jeux, nous dit-on, furent alors célébrés avec plus de soin et comme ils l'étaient en Grèce 151 ; ce qui semble dire qu'on construisit pour la première fois dos théâtres complets, à l'imitation de ceux des Grecs, et avec plusieurs rangs de gradins dans la cavea. Seulement ces théâtres ne duraient pas au delà de la circonstance pour laquelle ils étaient faits ; la fête finie, on démolissait ces gradins improvisés et cette scène provisoire (subitarii gradus, scaena in tempos structa 152). En 687 (67 av. J.-C.) le tribun Roscius Othon porta une loi (lex Roscia theatralis) par laquelle les chevaliers romains, ou plutôt tous ceux qui possédaient le cens équestre, avaient seuls le droit de s'asseoir aux quatorze premiers gradins 153. L'orchestra étant réservée aux sénateurs, le peuple ne pouvait trouver de place qu'après le quatorzième gradin. Enfin en 699 (55 av. J.-C.), Pompée fit construire un théâtre en pierre, le premier qu'on eût vu à Rome, et qui porta son nom 15` [Voir pour plus de détails Toi ATRUM]. Les théâtres ont pu être temporaires à Rome pendant deux siècles, parce que les réprésentations ne revenaient qu'à de certaines occasions, et n'avaient pas lieu, comme chez nous, toute l'année. Chez les Romains, ainsi que dans la Grèce, les jeux scéniques faisaient partie du culte. C'était pendant certaines fêtes religieuses que les tragédies et les comédies se produisaient pour la première fois 155 Parmi les fêtes annuelles et ordinaires, il y en avait au moins cinq où l'on célébrait des jeux scéniques. C'étaient ts les ludi Romani qui avaient lieu au mois de septembre, en l'honneur des trois dieux du Capitole; 2° les ludi Plebeii, mentionnés comme scéniques dans une didascalie du manuscrit Ambrosien que Ritschl attribue au Stichus de Plaute; 3° les ludi Apollinares, où Ennius fit jouer son Thyeste; 4° les ludi »galeuses, où furent représentées plusieurs des pièces de Térence; 5e les ludi Florales, où nous savons que les mimes se permettaient toute espèce de turpitudes. Sous l'empire, les représentations théâtrales furent introduites encore dans les ludi Cereales, Augustales et Palatini. A ces fêtes régulières et annuelles il faut ajouter quelques circonstances extraordinaires qui pouvaient donner lieu à des jeux scéniques : tels étaient, par exemple, les lods funeraies ou funebres, on sait que les Adelphes et l'Hécyre de Térence parurent aux funérailles de Paul-Émile. Les représentations de ce genre ne pouvaient se faire pendant l'hiver dans des théâtres qui n'étaient pas fermés; aussi Juvénal dit-il que la scène est muette depuis les ludi plebeii jusqu'aux ludi »galeuses, c'est-àdire depuis le mois de novembre jusqu'au mois d'avril 16. La saison théâtrale, pour ainsi parler, ne durait que sept mois ; cet intervalle était rempli, comme on vient de le voir, par un assez grand nombre de fêtes ordinaires et extraordinaires où l'on célébrait des jeux scéniques ; ces fêtes se prolongeaient quelquefois plusieurs jours : les ludi Romani, par exemple, durèrent quatre jours à partir de 540 (214 av. J.-C.) 157; il s'ensuit que le nombre des pièces nouvelles nécessaires pour alimenter tous ces jeux devait être assez considérable. Il était donc nécessaire qu'il y eût, vers la fin du vie siècle, quand la comédie était dans sa nouveauté, un assez grand nombre de poètes comiques que les exigences du public forçaient de travailler vite et de produire beaucoup 158. C'est ce qui explique les 130 pièces qu'on attribuait à Plaute. Quelques critiques prétendaient qu'elles étaient l'oeuvre de poètes contemporains ou antérieurs, mais que Plaute les retouchait et qu'on y retrouvait sa façon d'écrire 159. On comprend aussi que, par suite du besoin de satisfaire le public, devenu de plus en plus difficile, et de fournir à tant de fêtes différentes, il se soit formé à Rome un certain nombre de troupes dramatiques. Avant l'introduction du théâtre grec, les saturae, ou pièces nationales, étaient jouées par des jeunes gens pour qui ces représentations étaient un plaisir et non un métier; mais les comédies grecques étant plus régulières, plus savantes, exigeaient plus d'étude et ne pouvaient être abandonnées à des acteurs improvisés 1e0. Elles furent donc jouées par des comédiens de profession, qui se réunissaient en troupe (grex, caterva), sous la direction d'un chef (dominus gregis), qui était quelquefois l'acteur principal (actor prirnarum). Parmi ces chefs de troupe, nous connaissons Publilius Philo, qui joua certaines pièces de Plaute, et Ambivius Turpio, qui fut le principal acteur de celles de Térence. Sur Roscius, le plus grand acteur comique de la fin du COM 1424 COM vile siècle de Rome, un plaidoyer de Cicéron nous a conservé des détails fort curieux161. Il est aisé de nous figurer comment les chefs des meilleures troupes arrivèrent à prendre une grande importance. Les magistrats qui présidaient aux jeux publics étaient fort intéressés à contenter le peuple,"et tenaient à ne faire représenter que des pièces dont il fût satisfait. Les prologues de Térence et les explications de Donat nous montrent comment ils s'y prenaient pour y arriver. Comme ils étaient d'ordinaire assez peu lettrés et peu capables d'apprécier le mérite des auteurs, ils se fiaient au chef de la troupe avec laquelle ils avaient traité pour le choix des pièces qui devaient être représentées. Ce chef était donc devenu l'intermédiaire obligé entre le poète et les magistrats ; aussi était-ce à lui que les poètes s'adressaient quand ils avaient quelque comédie qu'ils voulaient faire jouer t82. C'est lui qui fixait le prix que les magistrats devaient lui payer pour son ouvrage. Ce prix n'était pas d'ordinaire fort élevé : on nous raconte, comme un véritable prodige, que Térence reçut, pour son Eunuque, 8,000 sesterces (1,600 francs) 163 Mais au moins le poète était sûr de toucher toujours la somme. Le directeur de la troupe, qui choisissait la pièce, qui la proposait aux magistrats, qui l'estimait, devait en répondre. Si elle ne réussissait pas, il fallait qu'il rendît la somme à celui qui, sur son estimation, l'avait achetée 164; c'était le meilleur moyen qu'avaient imaginé les Romains pour forcer les directeurs à avoir du goût et à ne pas ennuyer le public. On voit qu'en réalité le directeur courait seul quelques risques; il était naturel qn'il cherchât aussi à retirer quelques profits. Ritschl pense que la pièce qu'il avait garantie, quel qu'en fût le succès, devait désormais lui appartenir 165. II pouvait la faire jouer de nouveau dans d'autres jeux publics, si on le lui permettait, comme fit Ambivius pour certaines comédies de Caecilius, qui avaient été d'abord mal accueillies, et qu'il parvint à faire applaudir 16G. Mais alors elles n'avaient pas les mêmes privilèges ni les mêmes avantages que si elles étaient nouvelles. L'Eunuque fut la seule comédie de Térence pour laquelle on fit une exception ; elle plut tellement au peuple qu'elle fut reprise comme nouvelle et payée de nouveau, acta est tanto successu et p lausu atque su ffragio,ut rursus esset vendita et ageretur iterum pro nova 167. Indépendamment des jeux qui se célébraient à Rome, il restait encore au directeur de la troupe la ressource de représenter les pièces qu'il avait achetées dans les autres villes de l'Italie. Elles avaient aussi des fêtes publiques, des théâtres ; elles aimaient les jeux scéniques, et il est probable qu'elles appelaient volontiers les troupes qui avaient eu le plus de succès dans la capitale. Les directeurs avaient donc un grand intérêt à se faire un répertoire, comme on dit aujourd'hui; et c'est là ce qui les engageait à risquer un peu d'argent pour s'assurer la possession définitive des comédies nouvelles qu'ils représentaient sur la scène de Rome. Les prologues de Térence nous apprennent encore qu'avant que la pièce ne fût jouée, il y avait une sorte de représentation d'essai, qui devait ressembler beaucoup à nos répétitions générales. Les magistrats y assistaient,quelquefois aussi les ennemis du poète parvenaient à s'y glisser et faisaient du scandale par leurs remarques malveillantes 168 Rien n'empêche de croire, ainsi que le veut Ritschl, que les choses se passaient d'ordinaire comme nous venons de le raconter, d'après les prologues de Térence. Nous savons pourtant qu'il y avait des cas où les auteurs s'adressaient directement aux magistrats sans passer par l'intermédiaire des directeurs de troupes. C'est ce qui arriva à Térence lui-même, quand il voulut faire jouer sa première pièce.Suétonerapporte qu'il l'apporta aux édiles, et que ceux-ci envoyèrent le jeune poète la lire à Caecilius, qui devait sans doute en juger le mérite t69. Cette intervention directe des édiles, dans le choix d'une pièce de théâtre, s'explique peut-être ici par l'influence des grands personnages que fréquentait Térence, et qui pouvaient l'avoir recommandé aux magistrats. Une lettre de Cicéron nous apprend qu'en 699, à l'inauguration du théâtre de Pompée, les pièces qui furent représentées avaient été approuvées par un critique de cette époque, Spurius Maecius Tarpa 170. Nous retrouvons le même critique chargé des mêmes fonctions une quarantaine d'années plus tard, sous le règne d'Auguste. II est mentionné deux fois dans les oeuvres d'Horace 171, et les commentateurs en font une sorte de censeur dramatique officiel sans l'autorisation duquel aucun ouvrage ne pouvait se produire sur la scène 17z On s'est demandé si les pièces nouvelles représentées à Rome pendant les jeux publics donnaient lieu, comme en Grèce, à des concours dramatiques où le vainqueur était couronné et recevait une récompense. Avec le peu de documents qui nous restent, la question n'est pas aisée à résoudre. Les prologues de Plaute ne permettent pas de douter qu'au vie siècle il n'y eût une sorte de lutte établie entre les acteurs et des prix donnés aux plus habiles. Les auteurs de ces prologues ont grand soin de recommander aux gens qui président aux jeux publics (curatores ludorum) d'être impartiaux : ne palma detur cuiquam artifici injuria 173 ; ils se plaignent des cabales qui s'exercent soit par des intermédiaires qui vont donner le mot d'ordre aux partisans d'un acteur favori, soit par des billets qu'on se passe les uns aux autres; ils demandent que des inspecteurs soient chargés de parcourir les rangs des spectateurs pour voir s'il ne s'y trouve pas des claqueurs à gages 174. C'est le commencement de ces brigues du théâtre ou du cirque, qui troublèrent si souvent la paix publique pendant l'empire. Mais il faut remarquer que, dans tous ces textes, il ne s'agit que des comédiens. Quant aux auteurs eux-mêmes, quelques passages laissent entendre qu'on les honorait aussi d'une palme quand ils avaient produit une oeuvre supérieure à celles des autres 170; mais ces passages sont assez vagues, et doivent peut-être se prendre dans un sens métaphorique. Ce qui est sûr, c'est qu'en supposant même que ces concours dramatiques aient existé chez les Romains à certains moments, ils n'ont jamais eu ni la même importance ni le même éclat qu'en Grèce. Les mêmes prologues de Plaute, que je viens de citer, nous aident à comprendre combien il était difficile aux acteurs de se faire entendre du public. Ce public, ils nous le montrent très bruyant et fort agité. Ce sont des gens qui se battent, des esclaves qui prennent la place des hommes libres et qu'il faut mettre à la porte, COM 1425 COM des courtisanes qui viennent se faire voir et détournent l'attention de leurs voisins, des matrones qui bavardent ou rient aux éclats, des nourrices avec leurs enfants « qui crient comme des veaux » ; c'est le commissaire lui-même (dissignatot'), qui dérange tout le monde pour conduire les gens à leur place, et trouble l'ordre qu'il devrait protéger 176. Aussi l'acteur du prologue commence-t-il par faire réclamer le silence par le crieur public : Face jans nunc, tu, praeco, omnem auritum poplum 147 ; puis il le demande luimême, tantôt avec violence, tantôt avec douceur 18, sans avoir beaucoup d'espoir de l'obtenir. Devant un auditoire si peu tranquille, dans des théâtres immenses et en plein air, les comédies avaient beaucoup de chances d'être peu écoutées et mal entendues. Les spectateurs même les plus attentifs et les plus intelligents devaient en perdre beaucoup. Heureusement il y avait, dans la façon dont les pièces étaient représentées, des conventions et des procédés qui aidaient à faire deviner ce qu'on n'entendait qu'à moitié. D'abord le prologue, en racontant la pièce par avance, permet de suivre plus aisément l'intrigue ; puis les personnages se distinguent par un costume traditionnel qui les fait du premier coup reconnaître : les vieillards, les jeunes gens, les esclaves, les pauvres, les riches, les gens heureux et les gens tristes sont vêtus d'une manière différente 179. Dans les premiers temps ils s'affublent de grandes perruques qui sont noires, blanches ou rousses, « de sorte que la couleur des cheveux découvre l'âge de la personne 180 » Avec les masques, qu'ils prennent plus tard, à l'imitation des Grecs, la différence est encore plus aisée à faire; on voit, dès qu'on les regarde, l'âge, le caractère, la situation de ceux qui s'en couvrent [PERSONA]. Non seulement les costumes sont invariables, mais les gestes et la démarche sont asservis à certaines lois déterminées. Les uns doivent s'avancer d'un pas plus grave ; les autres marchent plus vite 181. Le ton même avec lequel ils parlent est minutieusement réglé. Naturellement les personnages secondaires ne doivent pas trop attirer l'attention sur eux, il leur faut adoucir les éclats de leur voix, s'ils l'ont trop forte, et laisser celle de l'acteur principal dominer les autres 182. II n'y a donc, dans la représentation, rien d'imprévu, qui puisse dérouter les spectateurs; tout, au contraire, les met sur la voie de l'action et travaille à la rendre claire pour leur intelligence. C'est véritablement un triomphe de la discipline et de la convention. On n'a qu'à voir paraître l'acteur : à son costume, à sa démarche, au son de sa voix, on devine quelle place il tient dans l'intrigue et ce qu'il va faire ; on peut dire si c'est un soldat, un leno, un parasite etc. ; Il. et, comme ces divers personnages, dans ces comédies fort peu variées, sont toujours traités de la même manière, qu'ils font et disent à peu près partout les mêmes choses, quand on les a reconnus, on n'a presque plus besoin de les écouter pour savoir ce qu'ils vont dire. C'est ce qui fait comprendre qu'on ait pu suivre une pièce de théâtre et s'y intéresser, malgré tant de raisons qui de-. vaient empêcher de bien entendre les acteurs. Cotetoedia togata. ,-Ce genre de comédie fut ainsi appelé de ce que les acteurs qui la jouaient portaient la toge. Il mettait donc sur la scène la vie romaine, et représentait des évènements qui étaient censés se passer à Rome ou dans les environs 181.1 Aussi Horace met-il les togatae à côté des praetextae, ou tragédies romaines, et regarde-t-il les unes et les autres comme une tentative heureuse qui fut faite pour créer un théâtre national Le plus célèbre auteur de togatae fut Afranius, qui vivait au vue siècle de Rome. Nous avons conservé fort peu de fragments de la conwedia togata; il est assez vraisemblable que, malgré les éloges que lui donne Horace, elle ne fut pas une innovation aussi importante et aussi complète qu'on pourrait le penser. On voit par les fragments d'Afranius que son théâtre devait ressembler beaucoup à celui de ses prédécesseurs. La seule différence qui le sépare d'eux, c'est qu'il paraît s'être plus occupé de peindre des scènes de famille; il a pénétré davantage dans l'intérieur de la maison romaine. C'est au moins ce qu'indique le titre de quelques-unes de ses pièces : Di vortium, Privignus, Fnzancipatus, Fratriae. Il a introduit plus souvent, dans son théâtre, des jeunes filles de naissance libre, des querelles de ménage, des femmes soupçonnées par leur mari, etc. Mais d'ordinaire il se contente de reproduire sous des noms romains les sujets et les personnages du théâtre grec. Horace le fait entendre, quand il dit qu'Afranius a couvert Ménandre de sa toge : On peut donc soupçonner que, dans la plupart des cas, la togata ne différait de la pelliata que par le costume des acteurs. C'est sans cloute ce qui fit qu'elle n'eut qu'un succès assez médiocre auprès du peuple. Le nombre des auteurs de togatae est très petit, et la vogue de ce genre de pièces ne paraît pas avoir dépassé l'époque de Sylla. Cependant il est arrivé plus tard qu'on a quelquefois repris sur le théâtre des togatae d'Afranius 188; les auteurs en composaient aussi de nouvelles, mais c'était pour les lectures publiques 187. GASTON BOISSIER. 179 EOMPAR t.TM PI BLI ;A, -tir, appelait ainsi la ouisitionforcee rue denrée:, an lenfanes au profit pour l'alimentation de la capitale' et des arm en campagne, lorsque l'impôt en nature ét ait insuffisant ai\O\\ MILITAIHS Ce système, qui a son origine clans 1_+ FRUMENTLM l'iiTU}r poilé déjà en province sous la république', est réglementé par plusieurs constitutions du bas-empire. En principe, dans les marches, les troupes n'avaient droit. qu'au logement chez les habitants [METATU',sI]. Mais ana cas de marches forcées ou de nécessité absolue ', l'empereur pouvait exiger, -rdicere, dey pres tations extraordinaires en nature ; el', étaient four nies par les propriétaires principaux soi'Esl contre remboursement au taux du marché', ou bien la quittance délivrée par les, chefs était imputée aux prestataires sur leur cote de contribution 7, On appelait aussi cornrro'rdio pub/1. ou 1, f u a, out °ynoiuloue l'achat forcé file bilé en province ou même parfois d'autres denrées ( pecres), comme l'huile et le lard au maximum fixé par le sénat, ire préfet de Constantinople, dépensait ainsi cinq ou six cents livres d'or par an., fournies en partie par le sénat °, et employées par les agents des sénateurs qui pratiquaient des réquisitions sur les possessores" ; mais l'exception établie au profit des ir ferior-e.s fut abolie par Anas tase 1'. G. ll"nBLBT. COMPENSATIO. -Imputation réciproque de deux dettes l'une sur l'autre, au cas où deux personnes se trouvent respectivement débitrice et créancière hune de l'autre'. La compensation a tété admise par des raisons d'équité'. En effet, il saut mieux que celui qui parerait le premier n' soit pas exposé a refile-mander, peut-être vainement, ce qu'il a payé"; d'ailleurs ii est éminemment utile d'abréger les payements. 1. Cependant ce mode ne fut admis d'aire ]Romains que dans certains tous Mut.;ns part.iclrlières. D'abord o11 aux CENTAHI1;, obligé` d'avoir des ll -' , [comtat-, ACC,.I'Tr ET ne,PExs1j et tenir au courant I' tel avec ceux qui usas:eut avec eux. En banquier agissant -mire son débiteur de ;t af . 1 e de la formule d`action qu'il obtenant du pinte tua 1. exprimer quo le compte se balançait par un il son profit, et la rédiger ainsi: s'il apparaît que Titius doit à Ables Agerius dix mille sesterces de plus qu'Aulas Age-rius ne doit a Titius', 'Du reste, cette compensation supposait deux dettes d'objet de même nature, par exemple de l'argent, du bié ou du vin, et de même qualité, et toutes deux exigibles, et ii fallait l'opérer dans l'intn,ztio de la formule : s'il y avait exagération de la demande, l'rotentje n'étant pas vérifiée, l'émit fin «triais perdait son procès à raison de la plus petitio ". Ces conditions rigoureuses ne se rencontraient pas dans la deductio, autre espèce de compensation imposée, peut-être par imitation de la précédente, au bonorum emtor. Au cas où un débiteur ne payait pas ses créanciers f" ,. fart let, °), son patrimoine était vendu en masse (honorent etstdiiio), et, l'adjudicataire appelé bonorurre ern(Or était considéré comme le successeur universel du débiteur en déconfiture, et pouvait exercer contre les tiers, àtitre d'actions uI ! , les actions de celui-ci ; or si un débiteur du de fihazc ' a° avait, de son côté, une créance coutre celui-ci_, la matin de la formule autorisait le juge à établir ce que le débiteur devait en plus au foaudetor, avant de le condamner envers l'emtor bonorur)a. Peu importait, du reste, que les deux dettes eussent un objet de même nature, et que 1 -bligation du defraudator ne fût pas exigible ; enfin la plus j)etitio n'était point à craindre ici, puisque la d 77, 7 .) d , être appliquée à la condemnatie, qui était toujoursincerti 6. Lia dette du fraudator, àterrne ou non, devait d'ailleurs être évaluée à raison de son exigibilité et du dividende promis par le honor,cm emtor à la masse des créanciers. La latitude laissée au juge dans les actions borane fidei pour apprécier, d'après la bonne foi, l'existence et l'étendue des obligations réciproques des parties, lui permit aussi de tenir compte de la compensation entre leurs dettes rnéme de diverse nature, mais seulement entre celles qui résultaient de la même cause, indiquée par la a'e,reonstratia de la formule 7. Cette compensation devait être invoquée par la partie et opérée par le juge -' lorsqu'il prononçait la sentence, qui était nécessairement pécuniaire sous le système de procédure foin ,,.lai, e', Mais la compensation était: admise ipso lare i0 en ce seins que, pour la faire valoir, il n'était pas besoin de faire ajouter à la formule une exception de dol, d'ailleurs sous-entendue dans les actions de bonne COM 1'I27 -COM foi; l'office du juge l'autorisait suffisamment à en tenir compte pour tout ce qui se rattachait à l'affaire qu'il avait mandat d'examiner aux termes de la dernonstraie, et que I'intentin lui commandait de résoudre ex /ide bond. Par cette raison aussi, le juge ne s'occupait que des créances suffisamment liquides, el n'admettait pas le dépositaire à invoquer la compensation f7. Plus tard le jurisconsulte Julien décida, au temps d'Adrien, que le juge pouvait admettre un défendeur, attaqué par l'action ex stipulotu, en vertu d'une stipulation prétorienne, à opposer l'exception de dol, pour invoquer la rempensation 13. Un rescrit de Marc-Aurèle étendit cet! décision à i.oute action de droit strict, et, moyennant 1'i ,u dol/. ", autorisa donc la compensation même entre dettes qui n'étaient pas nées de la mémo cause. Dans ce l'exception de dol une fois vérifiée, le juge devait-il absoudre le défendeur ou pouvait-il le condamner à l'excédent de sa dette sur sa créance? La première opinion est soutenue par plusieurs interprètes modernes 1', invoquant un texte suspect d'interpolation par les éditeurs barbares qui nous ont conservé les sentences de Paul'. Mais nous préférons la seconde, car une exception n'a pas seulement pour effet ordinaire d'exclure la demande, mais encore de faire réduire par le juge le chiffre de la condamnation 13; autrement il serait bien rigoureux de forcer le demandeur à réduire sa demande dès l'origine, sous peine de perdre son procès ; enfin l'exception insérée dans la formule donne à l'action le caractère d'une action de bonne foi', oit l'existence du droit du défendeur à la compensation n'aboutit certainement pas à débouter le demandeur absolument; il en était de même au cas d'action de droit strict, par exemple ex stipulatu, modifiée part exception de dol 1B. Tel est aussi le sens naturel du texte des Institutes de Justinien, interprété par la paraphrase de Théophile ', l'un de ses rédacteurs. Quoi qu'il en soit, cet empereur a innové dans le sens d'une extension de la compensation, qu'il déclare avoir admise ipso jure dans toute action, même réelle, sauf le cas de dépôt et de spoliation ". Mais il est bien difficile de déterminer la portée de ces innovations ; Cujas" croyait qu'elles se réduisaient à ce qui touche les actions réelles et que précédemment déjà la compensation avait lieu ipso jure dans les actions nées de tous les contrats; mais il invoquait des textes peut-être propres à l'argentarius et altérés depuis par Tribonien 22; il est problable que Justinien n'a pas voulu dire que la compensation opérerait de plein droit, par la seule volonté de la loi, et indépendamment d'une décision judiciaire, en sorte que les deux dettes fussent éteintes, si elles étaient liquides, jusqu'à concurrence de la plus faible, à partir du jour où elles avaient coexisté, même à l'insu des parties. La constitution de Justinien signifie d'abord qu'on n'aura pas besoin, pour invoquer la compensation, de demander l'exception de dol ; puis que la compensation ne dépendra pas de l'appréciation du juge et que, s'il a refusé de l'admettre et que la créance opposée en compensation soit plus tard établie, elle devra être traitée comme si le juge avait fait la compensation23, Il est problable aussi que Justinien a introduit l'exception, qui refuse à ceux qui occupent rial à propos la possession d'autrui, le droit d'opposer une compensation àla réclamation du propriétaire'. G. Hu9IDClT. If. Les Athéniens ne doivent avoir connu ni la compensation légale, ni même, au moins dans la plupart, dos cas, la compensation judiciaire. Lorsque deux personnes étaient respectivement créan =ère et débitrice l'une de l'autre, leurs deux créances ne s'éteignaient pas de plein droit; chacun des créanciers pouvait très légitimement exercer des poursuites contre l'autre. II n'y avait donc pas de compensation légale. La compensation judiciaire elle-même n'était pas toujours possible. Le mode de suffrage usité dans les tribunaux athéniens aurait, à la rigueur, permis aux luges, quand les deus créances étaient c ovales sommes, de dire que le défendeur actionné . ne devait rien au demandeur; car le défendeur, condamné à payer, aurait pu immédiatement exiger du demandeur originaire la somme même qu'il venait de payer ; il était plus simple de d ;clarer qI_e les deux parties n'étaient plus respectivement débitrices et de leur épargner les lenteurs et les frais d'un double payement. Les pouvoirs étendus accordés aux luges athéniens les autorisaient à déclarer implicitement que les deux dettes étaient, totalement éteintes, en rejetant les prétentions du demandeurMais, quand les sommes dues étaient inégales, on n'aperçoit pas comment le juge, obligé de se prononcer pour ou contre le demandeur, aurait pu proportionner la condamnation à ce qui restai' dû sur la dette la plus forte, déduction faite d'une somme égale à la moindre des deux dettes. Les deux boules dont il disposait ne lui donnaient le choix qu'entre l'admission et le rejet de la demande telle qu'elle avait été formulée elles ne lui offraient pas le moyen de manifester une opinion intermédiaire 21. C'était là précisément ce qui faisait dire à llippodamus de Milet que le jugement par houles, en forçant les juges à adopter les opinions extrêmes et en les mettant dans l'impossibilité d'obéir aux inspirations de leur conscience, pouvait être pour eux une cause de parjure. Mantithée doit mille à Boeotos ; Boeotos doit cinq cents à 1Ilantithée ; en réalité Boeotos n'est créancier que de cinq cents. Et cependant, si,Boeotoss'avise de demander mille en justice, il faudra les lui accorder ou rejeter complètement son action. Ne vaudrait-il pas mieux, disait Hippodamus 2", remettre à chacun des juges une tablette, sur laquelle i1 inscrirait la solution qui lui semblerait dictée par la justice : Boeotos est créancier, non pas des mille qu'il réclame, mais de cinq cents seulement? A défaut de la compensation, les Athéniens usaient de la reconvention. Lorsque l'un des deux créanciers avait pris l'initiative des poursuites, l'autre pouvait lui répondre aussitôt par une demande reconventionnelle, soumise ami même juge ou portée devant un autre tribunat. Ces demandes reconventionnelles étaient,nous ditDémosthène un moyen pour les défendeurs de paralyser les demandes originaires et d'échapper à leurs conséquences : Àméae:v S'cïç =yxÀ1jRxa¢ tovrc¢ç cr,v ôixrv Txûr;ly. Quand la demande reconventionnelle n'était pas portée N. luta. COM 1428 COM devant le juge appelé r statuer sur la demande principale, il y avait deux instances distinctes et, par conséquent, deux jugements. _\lais, un3me dans le cas ou un seul tribunal avait à statuer sur les deux actions, il n'y avait pas jonction d'instances ; chacune des deux prétentions était l'objet d'un jugement, spécial. Boeotos se dit créancier de Mantithée ; rllantithée se dit créancier de Boeotos ; les deux prétentions sont. soumises au même arbitre ; celuici statuera par deux jugements si indépendants l'un de I'autre, que l'un pourra être contradictoire, tandis que l'autre sera par défaut 2a Les juristes athéniens étaient donc, comme nos anciens coutumiers, imbus de cette pensée, formulée encore par Loysel au xvi' siècle 2'', que « une dette n'empêche point l'autre, t5 E. CAILLEMFB. COMPERENDINATIO (Diasi COMPES. May,,. Entrave qu'on mettait aux pieds des prisonniers et des esclaves, soit pour les punir, soit pour les empêcher de s'échapper. Le mot 't:Ear, se trouve clans les auteurs grecs parlant de prisonniers de guerre ou d'autres captifs', et des esclaves qui travaillaient dans les mines 2. Une grande partie des esclaves qui cultivaient la terre pour les Romains, particulièrement en Italie, étaient ainsi enchaînés (compediti 3, lligaie"', vincti "). Des représentations antiques de cet instrument font comprendre comment il mettait celui qui en était chargé dans l'impossibilité de s'enfuir, sans cependant empêcher tous ses mouvements. Ordinairement deux anneaux fixés aux chevilles (eompedis orbes ", 7lèo"v xoixouç') sont réunis par des chaînons ou des cordes à un troisième anneau placé entre les jambes, lequel est relié à la ceinture par une autre attache; d'autres fois, la chaîne qui réunit la cein tune aux entraves des pieds F,g descend le long de l'une des jambes L'Amour, Psyché aussi, ont été ainsi figurés les fers aux pieds, une houe à la main (fig. 1883; '. On possède des représentations analogues de Saturne : ce sont des ouvrages de la i Renaissance, peut-être d'après un modèle antique Le même nom s'appliquait sans doute à tout lien, quelle qu'en fùt la matière et la disposition, qui tenait les pieds enchaînés11 : à ceux qui, placés àl'extrémité d'une chaîne, attachaient un prisonnier à un mur ou à un poteau H, aussi bien qu'à ceux dont on vient de voir le modèle, qui laissaient une cer taine liberté de mouvements, et même aux ceps qui rapprochaient les deux pieds d'un condamné, de manière à le réduire à l'immobilité. On en voit (fig.1884) un exemple " On faisait aussi des anneaux assez larges pour être placés aux jambes : c'est ce qui semble résulter du moins d'un passage de Plaute ". On trouve une seule fois' le mot e nnpedes employé improprement pour les anneaux qui tenaient les mains, ou menottes. On appela aussi compedes 1G des anneaux d'ornement portés quelquefois par les femmes aux deux pieds, comme on le voit dans la figure 1883, tirée d'une qu'une variété de l'anneau de jambe porté très anciennement en Grèce et en Orient COIIPI'FÀLIA.-Fête des Lares e'ompitales, protecteurs d'un coMPrruM et des viei ou papi qui y confinaient. Elle était au nombre des fêtes mobiles (conceptivae feriae), dont l'époque devait, être fixée par un prêtre ou un magistrat. Chaque année le préteur en annonçait la date'. Elle se célébrait au milieu de l'hiver', peu de jours avant les Saturnales, quand, l'année terminée, ceux qui avaient travaillé se reposaient. Alors les paysans venaient au co'ntipituna déposer auprès des Lares les jougs brisés, symbole du labeur accompli', et, des maisons du voisinage, on leur apportait des présents, gâteaux, bandelettes, pièces de vêtement; on suspendait devant leurs images des pelotes et des poupées de laine (maniae) 4, qui étaient censées représenter les membres de la famille : devint ainsi une troisième divinité associée aux honneurs des Lares compitales dans tout l'empire Mais il ne permit pas aux collèges de se reformer; il chargea de nouveaux magistri, choisis chaque année parmi les habitants des vici, d'organiser les jeux et d'y présider [VIC0MAGISTRI], et voulut qu'on les célébrât deux fois par an, en mai et en août, probablement le premier jour de chacune ' ces mois 1B, On trouve néanmoins la fête des campt'Im".. inscrite encore aux 3, li et 5 janvier dans les calendriers du bas empire 20. E. SAGLIo.