Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article CONCILIUM

CONCILIUM. Dans une acception très étendue, le mot concilium était employé à Rome pour désigner toute espèce d'assemblée' en général, soit qu'il s'agît de délégués de différentes cités, ou de particuliers. Mais, pris clans un sens plus technique et plus restreint, il indiquait soit une réunion de peuples confédérés 2, soit une assemblée romaine. 1. A l'article coMMeNIA, nous avons indiqué des exemples 2 de ces diètes, formées de députés, legati, apôêou),ol, de nations alliées, soit en Italie, soit plus tard clans les provinces romaines. Quelquefois le peuple entier était convoqué, d'après les usages ou la constitution, pour statuer sur les intérêts communs de la confédération. C'est ainsi qu'on voit mentionné l'antique commune concilium des Latins 4 à Ferentina, des Étrusques au temple de Voltumnia 6, des Herniques au cirque d'Anagnie 6, des Èques, des Samnites, etc. 7. Les historiens romains mentionnent souvent aussi le concilium des Achéens de Grèce, des Béotiens, des Étoliens, de la Bétique, et d'autres provinces 6 encore comme la Macédoine etc., sans parler des confédérations religieuses instituées sous Auguste, avec le titre lI. Au point de vue spécial du peuple romain, on entendait par concilium une assemblée distincte de l'assemsemblée générale des comices par centuries' à laquelle prenaient part tous les citoyens ayant le jus suffragii. Ainsi d'abord on donna ce nom aux réunions irrégulières10 que formaient les plébéiens, principalement les jours de marchés, sous l'influence des préoccupations politiques du moment. Après la première secessio de la plèbe en 261 de Rome ou 493 av. J. C., ces assemblées furent organisées par tribus, d'abord sous les chefs de celles-ci sans doute, puis sous la présidence des tribuns. Ce furent les concilia plebis11, d'où, suivant l'opinion de Walter, les patriciens et les clients demeuraient exclus ; plus tard, on nomma ces assemblées comitia tributa, surtout quand on admit le consul ou le préteur à les présider. Quant aux concilia populi, ces mots, selon Niebuhr12, désignaient d'abord les comices curies [COMiTIA] auxquels les plébéiens étaient étrangers ; en effet ces concilia populi sont quelquefois mis en opposition par les textes avec les comices par centuries, d'après Rein et Rubino13, pour indiquer les comices tribus. Cependant il y a des cas où les textes emploient purement et simplement le mot concilium avec l'acception générale de coNclo. III. Enfin l'on entendait par concilium provinciale 14, ou CON 1433 CON quelquefois conventus, l'assemblée des députés ou notables d'une province ou d'une fraction de province, soit à la métropole, soit dans un des chefs-lieux judiciaires de la contrée. Ces réunions, déjà usitées sous la république, furent maintenues pendant l'empire, qui profita même de l'institution des xotvâ ou communia, pour l'utiliser soit au point de vue financier, soit au point de vue administratif Is. Depuis Constantin particulièrement CG, ces assemblées devinrent des états provinciaux appelés à donner leur avis, ou à faire entendre leursplaintes 17 et leurs voeux relativement à l'administration des gouverneurs [HECTOR, PHAESES], etc., ou aux intérêts communs de la province. Les réunions devaient avoir lieu à des époques périodiques, ou même parfois elles étaient convoquées extraordinairement. Elles pouvaient être autorisées par le préfet du prétoire u à charger une députation, LEGATIO, de présenter leurs requêtes à l'empereur. Les empereurs chrétiens 19, qui avaient achevé l'oeuvre de centralisation entreprise par Dioclétien, voulaient remédier, en partie du moins20, aux abus de l'administration gouvernementale dans les provinces et soulager les curies accablées par le faix de la solidarité en matière d'impôts. De là cette nouvelle vie qu'on essaya de ranimer dans les institutions provinciales. Les constitutions impériales autorisèrent même des concilia généraux pour tout un diocèse". On vit siéger, comme nous l'expliquerons bientôt, dans la métropole d'Arles en Gaule, un concilium annuel des septem provinciae, ou quinque provinciae" , mots employés pour désigner les mêmes contrées dont le vicarius de la Gaule avait l'administration spéciale, tandis que pour le reste des 17 provinces gauloises il n'intervenait que dans des cas exceptionnels et à titre de protecteur. Ce concilium provinciae paraît avoir remplacé en Gaule l'ancienne commune ou conventus Galliae tombé en désuétude au III° siècle avec le culte augusta123. Une constitution des empereurs Gratien, Valentinien et Théodose, rendue en 380, adressée ad provinciales défendait aux gouverneurs (judices) de mettre obstacle à la réunion particulière, concilium, de l'assemblée de plusieurs provinces 24. Le provinciale concilium devait se tenir périodiquement au lieu et aux époques fixées par le préfet du prétoire, ordinairement danslacitéla plusimportante2', indépendamment des réunions extraordinaires qui pouvaient être autorisées spécialement par ce magistrat 26. Cette assemblée se composait des honorati 27 et des nobles, propriétaires principaux de la province, et ses membres recevaient dans l'usage le nom de provinciales 28 ; ils délibéraient à la majorité sur les intérêts et les voeux relatifs à la province ; ils étaient même admis à voter par leurs mandataires, procuratores 29. Les décisions de l'assemblée, decreta, étaient consignées dans des lettres confiées à des envoyés, legati 00, ou bien elles étaient enre II. gistrées au greffe, apud acta, des gouverneurs 31 ordinaires, et envoyées ensuite au préfet du prétoire chargé d'en faire son rapport à l'empereur32 dans le cas où il jugeait nécessaire d'en référer à son autorité. Alors un seul député devait remettre à la cour impériale toutes les demandes avec l'avis du préfet 33. Du reste, chaque cité pouvait déléguer un envoyé spécial [LEGATIO]. Plus tard, en 385, Valentinien, Théodose et Arcadius J4 veulent que la décision du préfet ne soit pas en général définitive, mais que l'avis préparé dans son auditorium soit examiné dans le conseil d'état [coxslsroeiux rIUNCIPIS] après lecture des pétitions, et confirmé par une sentence impériale. En 392, une constitution de Théodose, Arcadius et Honorius 33 établit diverses dispositions relativement aux concilia ordinaires ou extraordinaires. Ainsi elle prescrit de lire publiquement les résolutions de l'assemblée, afin de recueillir le voeu de la plèbe qui n'y est point admise. Quant aux praefectorii, on avait dû prendre leur avis préalable dans leur domicile. L'examen des decreta demeure enlevé au cognitor ordinarius pour être réservé au préfet du prétoire, et la décision à l'empereur. En 408, Honorius et Théodose 36 laissent au préfet du prétoire le soin de choisir parmi les réclamations des provinces celles qui lui paraissent dignes de la sanction impériale. Enfin en 418", époque où la préfecture de la Gaule était déjà ramenée à Arles par les progrès de l'invasion barbare, Honorius rendit le célèbre édit adressé au préfet du prétoire Agricola et destiné à réorganiser l'assemblée des sept provinces dans cette cité métropolitaine, d'après l'usage antérieurement établi par le préfet du prétoire Petronius, mais interrompu par les circonstances. L'assemblée doit se tenir annuellement en présence du préfet, des ides d'août aux ides de septembre; elle comprendra les honorati, les possessores et les gouverneurs (judices) de chaque province, ou leurs délégués, sous peine d'amende de cinq livres d'or contre le juge, et de trois livres contre les honorati et les curiales défaillants. Le concilium est appelé à délibérer sur les intérêts communs de la province, et à prendre des décisions destinées à être rendues publiques, de manière à maintenir la justice et l'équité à l'égard des provinces absentes. Il paraît que l'usage des CONVENUS Se maintint sous la domination des Visigoths 38 ; il est à remarquer d'ailleurs que cette institution offrait une grande analogie avec celle des conciles ecclésiastiques, provinciaux ou métropolitains", qui acquit une importance considérable, et exerca même une haute influence dans l'ordre temporel, à raison du pouvoir municipal acquis par les évêques dans l'empire romain [OlIFENSOR CIVITATis].