Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article TÉMENOS

TÉNU NOS(Tiji.Evoç').-Domaineinaliénable constitué par acte publie et offert comme marque d'honneur. Les langues latine et romanes n'ayant aucun terme équivalant à téménos, on traduit parfois ce mot par une expression ne convenant qu'à l'un des côtés physiques souvent accessoires et pouvant même manquer, ce qui produit un contresens 2. 1. Nature et aspect. Le TÉN.Evog est toujours une terre. Sa situation, dans le principe, semble avoir été essentiellement rurale ou suburbaine ; mais, à l'époque hellénique, on voit établir, par donation' ou échange", des téménos dans les villes 5, près du port', au centre du quartier des affaires', sur l'agora 6. Clisthène constitue même un téménos dans le prytanée d'Argos 9. L'étendue de ces domaines varie de quelques pieds carrés à la grandeur d'une vallée, d'une montagne, d'un canton entier. Les limites sont fictives ou marquées par des bornes 10, des pieux ", une clôture continue 12, 7tapf o?.0. l3' formant alors un clos sacré''. La surface de ces concessions domaniales reste parfois stérile et nue comme les cimes du Gargare16, ou à l'état de jonchaie comme à l'embouchure du Céphise dans le Copaïs"; le périmètre des sources que l'on veut préserver de la contamination forme presque toujours un téménos agreste et boisé TEM -81TEM une forêt [NEMUS], un bois, un bocage [â),coç tamis] s'élevaient maintes fois sur toute l'étendue de la terre dédiée2. Si le sol a été défriché, on a un alter ou un FUN s. Dans le premier cas, on aperçoit les champs couverts de moissons du téli. VO; xOu),-i;ïov4, ou les vignes succédant aux guérets du rs(LEV5; muTaargç x l â, oupriç 5, des plantations d'oliviers 6, voire même des jardins où, selon le conseil de Platon', l'eau des ruisseaux voisins fut amenée « pour les arroser et les embellir en chaque saison 8 ». Les constructions que l'on élève dans les TE(bV7) sont de types et de destinations les plus divers : un autel, qui n'est souvent qu'une butte de terre, y71çiû,u.a9, constitue le Tp.EVO; [3wu.d; TE homérique10, que les Latins traduisent par lucus et ara" ; un tombeau 12, tumulus ou construction; un hérôon 13, une chapelle, e-tlx6 f4, un MUSAEUSI 15, un temple, vxç IB, â.ôurov" peuvent s'élever au centre de l'area et donner par synecdoque leur nom au domaine entier 18. Séparés, ou diversement réunis, ces édifices se trouvent parfois entourés de l'ensemble des bâtiments constituant, soit un 'A my. -rheïovi), un µavTEïov [o[lACULUst] 20, un pèlerinage ou une foire [PANEGYRIS] 21, soit un de ces monastères asiatiques abritant plusieurs milliers d'eunuques 22, soit enfin une de ces cités saintes gouvernées par des assemblées politiques spéciales et formant le 7rEp17rd),tov23 d'un grand sanctuaire d'Asie ou d'Afrique. Mais tous les téménos n'ont pas cet extérieur religieux. Dans beaucoup de villes grecques, ce sont des portiques2' et, peut-être 2', des maisons à appartements20 des boutiques à louer 2', des cours pour entrepôts 28, des hôtels de voyageurs 29 ; dans les campagnes de l'Attique et des pays soumis aux Athéniens, on y voit des fermes, des écuries et tous les bâtiments de la vILLA IIUSTICA30. Platon disait que, dans les TE(1E97) de sa République, les éphèbes« établiront des bains chauds avec des provisions de matière sèche et combustible pour les vieillards, les malades et les laboureurs accablés de lassitude 31 » ; il souhaitait encore que les jeunes gens y bâtissent « les gymnases pour eux-mêmes32 ». Ce désir, qui était moins une réminiscence du TÉ(I.EVO; ôpdumv 33 delphique que l'envie de reproduire ailleurs ce qu'on voyait déjà dans les jardins du héros Académos 34, semble avoir été réalisé par un enfant de Cnide, dont l'épitaphe poétique annonce à l'étranger qu'au bout d'un petit sentier il trouvera un téménos avec palestre, bains, champs de courses, etc. 35. II. Classification. D'après ce que rapportent Platon et les poèmes homériques, il semblerait plus rationnel de prendre comme base la répartition géographique des quatre grandes familles grecques et de chercher comment l'institution des téménos, que l'on trouve d'abord en Thessalie et enÉpire36, se propagea chez les Arcadiens les Ioniens d'Europe et d'Asie38, puis finalement, mais à titre exceptionnel 39, chez les Doriens. Ce serait prématuré, car nous avons trop peu de renseignements sur l'histoire des téménos et sur leurs modalités variables dans les divers mats de la Grèce aux différentes époques. On est donc contraint à une classification empirique; le groupement par genres aura l'avantage, comme résultat immédiat, de montrer l'abus que firent du mot r J.svoz plusieurs de nos contemporains en l'employant comme synonyme de hiéron'°. Si l'on collige tous les passages relatifs aux téménos dans Hérodote, Thucydide", Xénophon, Aristote'2 et dans les recueils d'inscriptions pourvus d'un index complet, on pourra répartir ces citations dans nos six premiers groupes ; parvenu aux temples urbains des divinités poliades de la Grèce propre et de l'Italie méridionale, on n'aura plus aucune de ces références. C'est l'autorité des poètes", des prosateurs d'époque romaine" ou celle de quelques écrivains actuelsu qu'il faudrait invoquer si l'on voulait décrire comme téménos l'espace limité entourant le naos de tous les temples publics de la Grèce, construits dans une ville, in solo publico; espace que les inscriptions et les prosateurs des Ve et vI° siècles comprennent toujours sous la dési 1° Téménos royaux et princiers. Ce sont les mieux connus: ils étaient tous productifs, xlFrup.x1, et tous situés à la campagne 2 ; parfois, très proches des villes 3 et sur les bords des rivières'. Leur grandeur, variable', pouvait atteindre 50 arpents6, mi-partie en vignes, mipartie en terres labourables'. Alors qu'un citoyen et un esclave', affranchi ou non, ne recoivent qu'un x)''ripoc de terre, un ou plusieurs ° téménos sont accordés aux chefs et ce sont les premiers d'entre les citoyens 10 qui les leur décernent comme marque d'honneur11, récompense de hauts faits t2, etc. Ces dotations immobilières étaient inaliénables 71 et héréditaires : rxTpwïov TE~.EVOç 1', expression homérique qui autorisa les poètes du ve siècle à' considérerTÉU.EVOç comme synonyme de Tâ 7zxTOiex et à lui donner le sens de patrimoine. L'acropole d'Athènes devint le téménos du roi Cranaos 13 ; de même, les trois parts de l'héritage légendaire de Saturne furent le TsN.Evoç u.ilipoç de Jupiter i6, le Tl 'ioç IlocEti ',oç de Neptune et le téménos infernal de Pluton que les poètes latins, contemporains des Lagides 17, traduisirent par templa caeli'°, templa Neptunia'J et templa Aclierusia2°. Ces domaines patrimoniaux produisaient de gros revenus, mais étaient grevés, de fait d'abord, de droit ensuite, par les lourdes charges de l'entretien du culte ; les «vxxrsC sont grands pontifes dans leur État, comme les r?u),o~xetaEiç dans les tribus, les upIt?(xpyot dans les phratries 21 ; ils doivent entretenir le feu sacré, offrir les sacrifices et donner le repas commun [ursTTASIS] aux époques convenues22. Ces iyxéxntot )ivtro'J y(xt étaient si onéreuses et si étroitement liées à la possession d'un téménos que les premières constitutions qui enlevèrent le pouvoir politique aux rois, leur laissèrent les TEU€vEx xxl ipoa.vxç 23. Les révolutions grecques s'étant faites par échelons et avec une rapidité variable selon les races et les États, on trouve, à l'époque hellénique, toute une série de modalités différentes pour l'organisation de ces antiques domaines royaux. A Cyrène, le roi possède encore des téménos au vie siècle ; dans les États doriens TEM on n'en trouve plus depuis le retour des Héraclides 25 ; à Sparte, il n'y en a pas ; chaque citoyen paye son écot pour les repas publics; l'État fournit aux rois toutes les victimes des sacrifices L6. Téménos des Athéniens 27. La révolution qui enleva la royauté aux Codrides confisqua leurs téménos au profit de l'État et en affecta les revenus à l'entretien du culte public. D'après la constitution athénienne en vigueur à l'époque d'Aristote28, c'est le magistrat, portant le titre de at),Eéç et choisi pour « accomplir les sacrifices institués par les ancêtres », qui avait la charge de louer les téménos à des fermiers et d'enregistrer les baux, qui étaient de dix ans avec paîments annuels à chaque neuvième prytanie29. En fait, la charge du roi est purement d'honneur et de garantie :un contemporain nous dit que ce sont les démarques qui percoiventles annuités" et quicommencer] tles premières poursuites pour faire condamner à l'infamie les fermiers débiteurs ainsi que leurs descendants et leurs héritiers jusqu'à complète libérations'. Une inscription du siècle précédent" énumère quelques-unes des nombreuses formalités prescrites pour louer ou réparer un téménos des arpenteurs spéciaux 3s bon-Tx( 34 fixent la contenance du lot; le Sénat délibère ; on rédige une sYNGRAPUf: l'assemblée du peuple doit approuver la délibération du Sénat, et faire graver sur pierre le décret qu'elle rend 3i5; alors le ]ixetda' ç, d'accord avec les PoL TAI et conformément à la syngraphè et aux rapports des ôptcTri, fait la location ; les APODEITAI reçoivent les loyers et en remettent le montant aux questeurs des dieux de la cité. Si le roi met quelque retard dans l'exécution du décret, mille drachmes d'amende ; s'il enfreint la loi, dix mille drachmes d'amende, etc. Par analogie, les Athéniens appelèrent téménos toute terre de culture vouée aux dieux pour l'entretien des temples i6, celles provenant de la dime des pays conqui s 37 comme celles appartenant aux temples des contrées qui tombaient sous leur domination 38 Les terres sacrées du manteion délien, qu'elles soient àDélos ou à Rhénée, deviendront des téménos dans les comptes de l'amphictyonie athénienne 3° ou des hiéropes détiens 40. Cette dénomination est spéciale aux Athéniens et à quelques TEM 86 TEM rares nations grecques restées autochthonesl. Partout ailleurs, on ne connaît plus que les téménos stériles, Tx âxxpax 2 ; les téménos productifs, Tà xxp7tN.x 3, sont dernière expression que Xénophon, bien qu'Athénien, désigne toujours le -wpiov qu'il institua à Scillonte avec sa part de dîme provenant de la vente des prisonniers. Ce domaine comprenait des montagnes, des bois, des prairies ; nourrissait du gibier, des porcs, des chèvres, des brebis, des chevaux; produisait de l'orge, du vin, etc. ; on récoltait d'excellents fruits dans un nco; environnant le temple, vxdç, et l'autel. Bien qu'il y eût une statue de l'Artémis d'Éphèse, qu'on fît des sacrifices tb T qç iEpz; voutrt;, ce domaine n'était pas un téménos 7 ; la stèle votive porte : iepbç b yû oç T'7lLç 'ApTép.tôo; °. 30 Télnénos funéraires. D'après une coutume ancienne, chaque famille enterrait ses morts dans son champ 9 ; beaucoup de ces sépultures existaient encore à l'époque hellénique10, et quelques-unes étaient appelées téménos 1i, soit que, placées dans un xX719o;, elles eussent été réservées f2 à chacune des ventes ou locations de cette terre, soit plutôt parce qu'on les avait primitivement érigées dans un 7LxTpWC01I Ti(J.EVO;. Quoi qu'il en fût, ces anciennes tombes étaient considérées par Aristote fa comme marques d'honneur décernées aux héros qui y étaient ensevelis. Platon voulait que l'on continuât cet usage, en consacrant dans les villes des téménos en même temps que des temples 14, et en choisissant dans la campagne, lors du partage des terres, d'autres téménos productifs, dont les revenus et les locations, perçus par un questeur spécial, devaient permettre à chaque classe de citoyens, ayant un DAIMON ou un IEROS particulier, de se réunir périodiquement et de participer aux festins qui suivent les sacrifices 15. Les historiens de l'époque hellénique citent quelques villes qui, concédant un téménos à un mort illustre, accordent un terrain pour y ériger un autel, une chapelle et y donner périodiquement les jeux funèbres 16. Quelle différence faisaient les Grecs entre un téménos funéraire et un tombeau, même monumental, avec chapelle, péribole, etc.' 7? Un particulier pouvait-il ériger un téménos en l'honneur d'un de ses parents décédés ? D'après Platon, ce sont les législateurs qui désignent les téménos 18, et les épimélètes qui veillent'à leur conservation 19. Cependant, à l'époque hellénistique, on peut citer Épictéta20, Diomédon 21, et un Antigone 22, se constituant chacun un téménos dans l'Archipel ou en Asie Mineure. Il est probable que cela ne fut possible qu'au moyen d'une fiction légale 23. Cependant, on peut déjà fixer un point : Platon indique comment on doit faire les locations, et en tirer des revenus pour les cultes de daimon ou de héros 21. lpictéta comme Diomédon établissent au préalable des rentes perpétuelles pour l'entretien de leur tombe et les frais de leur culte funéraire ; on sait que, pour les sépultures ordinaires, ces dépenses incombent aux héritiers 2G. L'aspect de ces téménos funéraires est des plus variables : tertre tumulaire perdu dans la campagne; petite bâtisse que la piété musulmane transforma en marabout d'un patriarche biblique; parfois, à côté de la chapelle, où peuvent s'entasser les plus riches ex-voto 26, un TEU.évto; olroç 27, une palestre 2°, que décorera un Hermès, regardé d'abord comme Psychopompe, puis Dans l'Attique, c'était le xrt3,a6ç qui jugeait tous les TEM -R7TEM procès, ôttxôtxxa(xt, entre familles et prêtres au sujet de la possession de ces sanctuaires 1. 4n Téménos des associations. On n'a pas à rechercher ici comment les thiases [TI1lASUS], d'abord fractions de tribus 2, et voués au culte des notTpwot Oeot3, se transformèrent en associations pour compléter ou remplacer les sectateurs de certaines divinités primitives, étrangères ou récentes 5. Quand un nouveau thiase se constituait, ses membres se procuraient, généralement dans le faubourg°, « un terrain que l'on entourait de murs et que l'on consacrait : c'était le TÉ1LEVOç, centre de la communauté 7 ». Dans ce clos sacré, on élevait un vx6ç 8, demeure de la divinité, des habitations pour les ministres du culte, oîxr,Trptx °, de grandes salles pour les réunions de l'assemblée, olxos, oix(a, Tdrot 10, et un Otusrbvfl, réservé « aux banquets et aux réunions pour boire en commun12 ». La domesticité était souvent nombreuse'3 et l'ameublement très riche ". Ces thiases se multiplièrent sous les Diadoques et la domination romaine; on les retrouve partout, même à Rome : des llerahléistes, chassés d'Asie Mineure, vinrent avec la protection des empereurs établir leur téménos près des thermes de Trajan'. C'est probablement sur le modèle des OtxawTtxz TEN.ÉVr,, que furent établis les téménos de certaines confréries religieuses 16 et ces Tâ 7CcT?Un'tX'r, cercles de nationaux étrangers dont la Schola' 8 italienne du Levant est le type le mieux connu". A l'imitation des thiases se formèrent également un grand nombre de sociétés dont le but était de consacrer un téménos à des rois encore vivants ruais « émanés de la divinité » ; les Attalistes, association établie par le flûtiste Craton, dédièrent des téménos à tous les rois de Pergame 20 qui les subventionnèrent. 5° Téménos du culte des Diadoques, de Rogne et d'Auguste. En Grèce et dans les îles, tous ces téménos d'associations étaient in solo privato, ce qui marque assez leur différence avec les temples du culte officiel et public ; en Asie, comme en 1gypte, les cités vont dédier aux rois d'abord, à Rome et Auguste ensuite 21, des temples in solo publico, et on les appellera également téménos. Plusieurs motifs peuvent être invoqués 1° Alexandre, ses successeurs et les empereurs sont considérés comme des fondateurs de villes, soit qu'ils les eussent bâties, soit qu'ils leur eussent rendu la liberté; ils ont droit aux honneurs qui ont été accordés par Amphipolis à Agnon et à Brasidas 22. 2° Les idées d'alors si finement analysées dans l'épitaphe de Régilla23. 3° L'influence du panthéisme très apparente dans le décret de Clazomène 24 pour l'érection d'un téménos à AntiochusIee I1° L'ancienne coutume, existant encore chez les Grecs 2'", d'appeler téménos tous les temples des Orientaux 26 6° Téménos des cultes barbares. En hgypte, tous les sanctuaires consacrés aux divinités indigènes sont des téménos 27; le peuple emploie ce terme pour les endroits oit il place les petites chapelles qu'il offre à ses dieux préférés 28, à leurs cwvaot 29 ; les rois s'en servent pour ces grands temples qu'ils font bâtir ou restaurer. Des plaques de consécration en or, trouvées dans les fondations d'un monument, portent seulement To TÉU.EVO; 'Oriemt, après les noms de Ptolémée 1Jvergète, de sa soeur et de sa femme 30. Cet usage n'est pas particulier à l'Égypte ; IIérodote 31 et Xénophon 32 parlent des téménos babyloniens ; tous ces grands sanctuaires d'Asie Mineure, fondés par les Lyciens, Cariens 33, Lélèges 34, ou indigènes de l'intérieur 33, resteront pour les Grecs des téménos, bien que ce mot implique une idée moins relevée 3e que le terme plus général iEpdv, par lequel on les désigne également. 7° Téménos des temples de la Grèce. Ils sont excep ( TEM -88TEII tionnels', si l'on fait abstraction des édifices in solo privato, des monuments funéraires, des téménos de Proserpine, Déméter 2 et Pluton 3; de ceux qui furent dédiés à d'antiques divinités comme Alektroma 4, les Cabires6, ou à des dieux récents, tels qu'Esculape6 et Bacchus 7. Les temples officiels situés sur les acropoles ou dans l'enceinte des grandes cités n'ont pas de téménos, mais une cour, xükr) 8, comme les palais des rois homériques 9; les temples construits en pleine campagne, les grands oracles eurent peut-être un téménos dans le principe, mais les prêtres et les administrateurs évitent le plus souvent d'employer ce mot dans les inscriptions pour désigner le sol ou la cour de leur hiéron. On peut se demander avec Platon si le téménos est d'origine grecque ou si les Ioniens n'empruntèrent pas le mot 10 et la chose aux Pélages Tyrrhéniens ", aux Chypriotes 12, etc. Les deux plus anciens téménos, ceux d'Olympie 13 et de Pherséphaassa de Cythère en Étolie u, sont attribués par la légende à un Héraklès ; les poésies homériques citent bien quelques téménos à Ithaque', en Thessalie16, ou en Étolie", mais elles placent tous les autres chez les Phéaciens f8, les Troyens ", les Mysiens 20, les Lyciens'-" et les Chypriotes22; d'après la Bible, il y aurait eu en Palestine, bien avant l'invasion de Josué, plusieurs villes appelées Téménat 23Le nom de la plus connue, Téménat-Ilarès 24 signifie « portio Solis 25 », ou plus exactement le téménos du soleil, et les envahisseurs israélites l'auraient changé, par métathèse, en TéménatSérail 26, le grand temenos, « portio abundans 27 », pour faire disparaitre un souvenir de l'idolâtrie des anciens Tlall'L[l\I (Tb iEpdv, vx;). Temple, lieu saint, endroit rituellement consacré à un culte public. Gin qE. I. Nomenclature. Chaque temple avait un nom propre 1, formé, le plus souvent, du nom même de la divinité qu'on y adorait 2: Hoatô-ilïov3, IIoaEtôoîvtw4, `Ilpaiav, EapxTEiOV. Certains sanctuaires sont désignés par un nom spécifique ; le plus connu est N.xvTEiov, OIACULUDI, qui s'emploie pour les temples de Delphes 5, de Dodone 0, d'Amphiaraos7, de Jupiter Ammon8, etc. Quant aux termes génériques convenant à tous les temples, il y en a deux: Tb tEpdv et b ad,. Ces mots ne sont pas synonymes; ils ont tous deux un sens spécial, qu'ils conserveront jusqu'à l'époque chrétienne'. Thucydide rie parle du vals que trois ou quatre fois, et toujours avec l'idée de construction 10, ou de démolition ". Par contre, il emploie iepdv plus de cinquante fois12,pour désigner les temples de la Grèce13, de Sparte", d'Athènes', que ceux-ci soient sur l'Acropole 16, dans les faubourgs17 ou au milieu de la campagne" ; pour les oracles d'Olympie", de Delphes20 et de Délos21 ; hiéron est pour lui le temple où l'on vient invoquer la divinité", se réfugier en suppliant" ou chercher asile 24, déposer les trésors d'un État 25 ou piller les objets sacrés Ilérodote 27, Xénophon 26 et les prosateurs 2' classiques suivent la même règle. C'est que naos désigne seulement la construction, parfois monumentale, abritant l'image de la divinité; c'est l'édifice que dessinent les artistes et que décrivent les touristes ; hiéron est le temple entier 30, le lieu saint, l'espace" qui reste toujours sacré 32, même après la destruction des monuments qui y étaient". Pour saisir cette distinction, à laquelle ne convient aucune comparaison moderne 34, il suffit de se rappeler que ce n'est point dans le naos qu'avaient lieu les actes les plus importants du culte, la purification ou ablution, le sacrifice, la communion ou repas commun ; que le temple grec se compose d'un ensemble de constructions séparées, indépendantes ; qu'enfin, pour établir un temple, il n'était pas nécessaire de bâtir un naos, mais qu'il fallait : un espace consacré 35 publice, non private; 2° un delubruna pour se purifier ; 3° un autel pour les sacrifices ; 4° tin symbole visible manifestant la présence de la divinité ; que si TEM 89 TEM l'idole était abritée dans tin naos, et elle l'était rarement, l'autel devait être placé en dehors et en avant de ce naos [ARA, p. 318, fig. 409]. II. Origine du hiéron et lieux saints primitifs. On ignore à quelle époque les Grecs commencèrent à désigner le temple par l'expression Tb ispdv, qui n'est, comme le latin sacrum' auquel elle correspond exactement, que la forme neutre d'un adjectif. L'Iliade et l'Odyssée donnent à ispdç et aux mots qui en dérivent des acceptions diverses'' exprimant moins une qualité reli gieuse', comme â fto;, xwdç, GEexb-Tdç, 6Ea7rétno, qu'une idée de force, de puissance, d'agilité, de grosseur ; les iEp7)ta ne sont pas toujours des bêtes de sacrifice 4 et :EpOÛ«) n'a pas encore complètement remplacé Il faut descendre jusqu'à l'époque hellénique pour rencontrer Tb ispdv dans les textes. Eschyle n'est probablement pas le plus ancien auteur qui l'employas, mais il semble que le terme fut inventé par les Athéniens', ce peuple paraissant avoir été le premier à faire, dans l'État, une distinction entre les biens sacrés et publics, Tx iupx (itTExvx) xx) Tx 8-r,pAtae. Bien avant la période hellénique, les Grecs avaient des lieux saints et l'habitude de les désigner par un nom neutre; on ne peut que conjecturer celui de ces substantifs que l'usage permit de sousentendre dans l'expression Tb iEOOV. lO Tti,EVOç fut pris, même par les Romains', comme équivalent de templum; de nos jours, on l'emploie comme synonyme de hiéron" [Tl?ïHÉxos]. Le téménos est qualifié "Jyvv dans Pindare " et Euripide 12 ; je ne crois pas qu'avant Aristophanet3 on lui ait donné l'épithète de 2° "A),TOç devient synonyme poétique de hiéron", quand il est employé pour TÉN.Evo; ?'Tint'-,ç et désigne les vergers d'arbres fruitiers plantés près des temples'', les parcs, parfois considérables's, ombrageant des sanctuaires de la ville" et de la campagne", protégeant des sources captées pour l'alimentation urbaine"; il n'est alors que l'ornement du hiéron et son caractère sacré dérive de sa situation. On appelait également ;iatroç ces bois hantés 20 ou malfamés21, ces champs tragiques 22 lA. ou maudits23 que l'on abandonnait à la végétation et où on n'entrait qu'au risque d'y mourir". Rien dans les légendes homériques ou helléniques, les monuments égéens ou mycéniens, les métaphores de la langue ou les rites ne rappelle que les ancêtres des peuples de l'Ilellade aient jamais été hommes des bois. 3° "AvTpov. De vieilles légendes des insulaires italiens montrent les pasteurs habitant les grottes et y abritant leurs troupeaux 23 ; d'anciens mythes crétois recueillis par Ilésiode25 représentent Jupiter naissant confié par Rhéa à Gaia, la l'erre, qui le cache dans un antre sur le mont Aigaion, dans la région de Dicté ; une version parallèle place la même scène à mille stades du Dictée'', dans une grotte de l'Ida que Maury regardait comme « le premier temple du nouveau dieu» 28. Les ancêtres des Grecs ne furent jamais vrai tT0129 que dans un ou deux petits cantons30 et leur architecture religieuse n'offre aucun caractère rupestre3'; nous devons cependant chercher pourquoi les Hellènes approprièrent leurs grottes en hiéron et comment ils furent fatalement amenés à y remplacer certains cultes par d'autres 32. A peu d'exceptions, aucune des cavernes de l'Hellade, des îles environnantes et de la côte d'Asie Mineure ne forme une chambre parfaitement close ; toutes ont leurs parois perforées de canaux parfois minuscules. Suivant la direction de ces conduits, on distingue deux genres de grottes, qui ont chacun leur importance propre dans l'histoire religieuse. A. Grolles d'origine superficielle. Elles son t formées par des infiltrations d'eau pluviale que l'on voit sourdre dans le plafond ou les parois latérales et qui produisent souvent de belles stalactites33. Comme ces grottes ne se trouvent qu'au-dessus de la nappe phréatique, elles sont toutes dans la zone d'altération et, partant, soumises à de continuelles transformations qui amènent des changements de culte. Ém. Burnouf a bien étudié tous les antres de l'Acropole et montré comment l'eau y arrive après chaque orage. Dans la grotte du flanc oriental, ce ne sont encore que « des suintements qui en mouillent les parois. Elle ne semble pas y avoir été jamais consa TEM 90 TEM crée au culte»), soit qu'elle fût de formation récente2, soit qu'on n'ait pu utiliser le pela de liquide qui y pénètre, puisque « la masse des eaux tombées sur l'Acropole prenait son cours vers le nord-ouest » 3. C'est dans les grottes de ce versant nord-ouest que les eaux affluèrent; elles y formèrent, par la réunion des fissures rocheuses, de véritables conduits d'où s'échappaient des sources qu'utilisèrent les sujets de Cécrops. C'était leur seule eau potable; ils la mirent à l'abri des souillures en consacrant ces grottes aux Nymphes. La grotte n'était pas transformée en temple mais placée dans un hiéron ; d'ordinaire, on déclarait sacrés la grotte et l'espace environnant dont les limites étaient fictives ou marquées par des inscriptions rupestres'. Si on avait la place, on plantait un alsos', mais on laissait toujours un espace libre devant la grotte 7 ; l'autel, bloc cubique en pierre' ou tas de gros cailloux9, était érigé sur cette esplanade 19 et non dans la grotte, comme semble le montrer toute une série d'ex-voto (fig.3352). Chaque voyageur pouvait se désaltérer, offrir un sacrifice'» et formuler un voeu : Eumée demande aux Nymphes le retour d'Ulyssef2. Lors des sécheresses calamiteuses, c'était le chef du bourg, le roi qui venait, comme Ulysse, sacrifier agneaux et chevreaux "dans cesvieuxsanctuaires établis par les premiers rois»° et près desquels ils avaient placé la porte de leur ville15.Quand prévalut lerégimerépublicain, les magistrats ne pourvurent point au culte des Nymphes comme à ceux des autres divinités poliades" ; le motif ne doit pas être cherché dans un changement de croyances ou de population, mais vient uniquement de ce qu'il n'y avait presque plus de ces vieux hiérons consacrés aux Nymphes. Les sources les plus importantes, telle que Pirène sur l'Acro-Corinthe, avaient été livrées aux ingénieurs qui, pour mieux assurer le captage et l'adduction des eaux, durent transformer le hiéron en NUIPHAECM ; le nom grec reste toujours vuu.c52iov, mais, au lieu de s'appliquer à un temple, il désigne une «construction moitié religieuse, moitié profane ». On peut suivre la marche progressive des ingénieurs qui, chaque siècle, étendent le rayon de leurs empiétements sur ces domaines sacrés f7. A l'Acropole d'Athènes, la grotte Agraulion n'est plus considérée comme le séjour des Nymphes ; on le sait par Euripide qui redit les légendes admises de son temps. Agraule garde son nom, mais devient femme de Cécrops et mère d'Erichthonios i8; elle conserve son hiéron, mais ce n'est plus le temple d'une immortelle, c'est l'hérôon d'une «p7'r, ' rt; qui se dévoua à la mort pour le salut de sa patrie79 : aussi les éphèbes viennent-ils prêter serment dans ce téménos 20, v 'Aypav)aou21. Comme on avait perdu le souvenir des nymphes auxquelles était dédiée la grotte voisine, l'antre de Macra22 ou de Cécrops'', on en fit le lieu où les trois filles d'Agraule°4, Aglaure, Hersé et Pandrose, viennent danser sur le vert gazon aux accords de Pan"; cela permit d'expliquer comment le dieu rustique avait pris possession de ce hiéron urbain après les guerres médiques26; dans une autre salle, le poète place la rencontre d'Apollon et de Créuse", fille d'Érechthée, ainsi que la naissance d'Ion, héros éponyme des Ioniens 28. Ces légendes étaient trop récentes pour être admises par tous les esprits Si; Apollon fut bien adoré dans celte ancienne grotte blacra30, mais on lui décerne plutôt le surnom de `l' 7toaxpaïo;31 que celui Un aventurier, Arkhédamos 33 de Théra, s'installe dans une grotte de l'Hymette; il la creuse, écrit son nom sur tous les murs, plante un jardin et à l'ancien culte des Muses ajoute ceux d'Apollon Ilersos 3`, de Pan, des Grâces, etc. Se donnant pour w;,.md1,-r,7TOç, il pratiquait la divination 3F. Les charlatans de cette sorte ont toujours été nombreux en Grèce ; pour éviter qu'ils n'usurpassent des sources appartenant à l'État, les magistrats durent faire placer près de celle-ci la marque ô)lt.6alov 36. Le culte, qui ne pouvait être assuré avec les modiques revenus de ces sanctuaires, fut laissé à la charge des prêtres attachés aux divinités poliades ou aux sanctuaires sur le territoire desquels se trouvaient ces grottes et ces sources'". Au mont Lycée, c'est le prêtre de Zeus Lycéen qui venait à la fontaine Hagno invoquer la nymphe tutélaire. On disait que Jupiter avait été élevé par la triade Hagno, Theisoa et Néda. Pareille légende se retrouve pour les grottes crétoises de l'Ida et du Dicté. L'antre idéen resta un lieu de culte jusqu'à l'époque romaine".; les objets les plus anciens qu'on y a retrouvés 39 ne paraissent pas remonter plus haut que le xe siècle, et sont attribués aux Doriens °. La disposition des lieux est la même que dans toutes les grottes saintes de la Grèce, et conforme à la description homérique du TEM -91TE11I ipôv Nutl.gâwv d'Ithaque 1. « Les parois ne sont pas remaniées et l'on ne trouve point trace de niches ou de crochets pour soutenir les âvaO iiN.0era » ; l'autel est placé en dehors, à ciel ouvert, sur une esplanade en avant de la grotte dont l'ouverture se trouve naturellement orientée vers l'est ou levant équinoxial 4. B. Grottes d'originepro fonde, auxquelles on doit joindre toutes ces déchirures rocheuses, zisp.a'ra, par lesquelles se manifeste l'activité volcanique; quelques-unes eurent une importance considérable dans l'histoire religieuse des hellènes, car, sans utilité pratique pour les citadins, même dangereuses pour eux, on érigea, dès les premiers âges leur périmètre en téménos ; plusieurs furent abandonnées à des devins, qui y établirent de nouveaux cultes, y fondèrent des oracles6 ouverts à tous sans distinction de famille, de patrie ni de race. Il semble que les devins s'établirent principalement près des sources hypogènes riches en gaz carbonique et près des endroits où se dégagent des fumerolles composées principalement de vapeur d'eau, que l'on faisait respirer parfois aux prêtresses et même aux clients 9. L'antre est toujours placé dans le hiéron; parfois même le /xau.a s'ouvre dans une pièce spéciale du naos, à laquelle on donne le nom homérique de âôurov (fig. .51421). Les grottes à mofette, où le gaz carbonique se dégage à la température ambiante, sans vapeur d'eau et d'une façon invisible, furent parfois aussi accaparées par des devins qui les consacrèrent à leur divinité particulière, Apollon", Héraklès ", Aphrodite 12, mais le plus grand nombre de ces endroits dangereux fut voué à Pluton, à [LEMS, p. 1068]. L'antre de la Néda où Pausanias 13 vit une statue archaïque de la Déméter Noire parait avoir été un de ces lieux maudits dont le téménos était âea7:ov 14 Pour la grotte d'Hermione, le doute ne paraît guère possible 17. Quand le culte de Cérès se propagea, et fut adopté dans des cantons où il n'y avait point de eT6i.vrz "Aôou 1b, on les remplaçait par un vulgaire katavothre dans lequel on lançait les victimes; c'est ce qui semble avoir eu lieu à Potniai 1t, d'après un conte 18 spécial à tous les pays où se trouvent des avens 19. On ne peut rien préciser pour l'Argolide 20 et l'Attique 21; il se peut que la grotte d'Éleusis", où périrent les cochons d'Eubouleus 23, fût une bouche d'enfer comme semblerait l'indiquer le petit Plutonion construit sur l'esplanade même de cette grotte 24 ; mais celle-ci est parfaitement distincte et même assez éloignée du mégaron des déesses. Peut-on faire une distinction physique entre lesyâap.a-ra ;-;iç, consacrés aux deux déesses, et les a,r6i.aza 'A3ou25, ou les /acwvEïa26, signalés par les auteurs :' D'après le folklore levantin, il semblerait que les deux dernières expressions étaient réservées plus spécialement à ces endroits oit se dégagent des vapeurs chaudes mêlées à des composés sulfureux, mais on ne peut rien affimer. Quant aux volcans, ils étaient voués à Héphaistos et parfois on construisait dans les environs un ilyo atEcov. On connaît celui de Lipari 27. Le plus célèbre de l'Asie Mineure est le Yanar 28 ; d'après Waddington, c'est encore « un lieu de pèlerinage pour les habitants du pays 29. » 4° "Eproç. On ignore le sens primitif de ce mot, que Sophocle emploie avec l'épithète iEp'ov 3Ô, et qui fut souvent 31 regardé comme équivalent de heretum " héritage, rattaché à la même racine33 que norias et z6p'coç 34. Dans l'Iliade, ipxoç est toujours employé, même au figuré ", dans le sens de rempart 36 ou de clôture ". Cependant, quand Achille veut invoquer le Zeus Pélasgique et lui faire une libation", il se place au centre de l'enclos temporaire où se dressait sa tente : e râç N.Eacu sprIï 39. La même expression reviendra au sujet de Priam, qui, dans la cour de son château royal, fait une libation à Zeus Idéen et implore sa clémence4U. C'est une formule consacrée pour la place où l'on se met et non pour la divinité que l'on invoque. L'autel sur lequel Laërte et Ulysse ont brûlé tant de cuisses de boeufs" en l'honneur de Zeus 'Epxeïoç se trouve également dans la cour du château d'Ithaque ; Phémios se demande s'il sortira du mégaron 42 pour s'y réfugier. Ce n'est donc pas l'autel du foyer domestique;celui-ci est toujours placé à l'intérieur de l'habitation". TEM 92 TEM Ni en Grèce, à Mycènes ou à Tirynthe', ni en Crète, à Cnossos, à Phoestos 2 ou même à Gournia on n'a retrouvé de ruines pouvant être attribuées à un édifice sacré, à un temple ; mais presque toujours on a constaté les restes d'un autel dans la grand'cour du château royal. C'était le lieu saint de la cité et, lors des grandes fêtes périodiques, on y venait invoquer les dieux, 6T; c2p ipxcï. Si la fête intéressait les habitants de toutes les villes, et que ceux-ci fussent trop nombreux pour tenir dans la cour du palais, on faisait comme Nestor, qui réunit 45 000 personnes en dehors de Pylos. La cour du palais, le Ëpxoç tpdv ', étant en plein air, toutes les assemblées qu'on y réunissait jadis continuèrent à se tenir en plein air ; le hiéron resta donc un endroit découvert comme l'agora 5, comme le tribunal, comme le furent également les théâtres et les stades. III. Origine du naos. Le premier naos cité est celui d'Apollon Sminthien, dont Chrysès est le prêtres : « tout ce que le poète en dit, c'est qu'il est gracieux, yxp(Et; 7 ». Nous ne savons donc rien de ses dimensions ni de sa forme ; on peut imaginer un édifice en bois ou en pierre, un naos monolithe tel qu'en avaient les Égyptiens 8, une édicule comme celles de Phocée ou de Marseille '° (fig. f35), voire même une sorte de baldaquin, de dais à six colonnes (fig. 48î7) ou à quatre (fig. 1038). L'étymologie ne nous est d'aucun secours: « vas, de vxiw, habiter " ». Cependant il est à remarquer que ce premier naos n'est point dans une ville 12 ; il est isolé à la campagne, près d'une petite crique maritime 13; la divinité qu'on y adore n'est ni poliade ni ethnique; son culte est ouvert à tous. Quand les Achéens conduisent une hécatombe, ce n'est pas Chrysès qui sacrifie, mais un Achéen, 'ri; pybç âv-o pou'Ar,lf,dpoç 14. C'est que Chrysès est un de\ in et ne se trouveattaché à aucun culte public; son chef, son «vas 16, c'est Apollon, au nom de qui il se présente et dont il porte le sceptre et les bandelettes. De ces « ministres d'Apollon », quelques-uns seront les ancêtres de grandes familles sacerdotales 16 ; d'autres seront, à l'époque hellénique, des fondateurs d'ASCLEPIEION, comme certains devins avaient été, avant l'époque homérique, les créateurs des sanctuaires de Delphes 17, de Délos 18, de Dodone fy et de Paphos 20. 1° Mav-Eiov. Les oracles sont probablement les premiers temples construits en Grèce, et il semble certain qu'ils furent fondés par des étrangers, comme le dit Hérodote 21. Leur institution est contraire à l'esprit grec, mais ils répondent à une telle nécessité de la conscience humaine qu'on fut bien forcé de les tolérer d'abord cf d'en faire ensuite une véritable institution d'État. On sait qu'un Grec n'entreprenait rien avant de recevoir un signe d'assentiment de la divinité 22. Il ne pouvait s'adresser, dans le principe, qu'aux dieux de sa famille ou de sa cité, et bien qu'il fut gênant, parfois même dangereux, de prendre le chef de sa famille ou son roi comme confident de ses projets secrets, il était impossible d'aller consulter les dieux des autres villes 23. Cléomènes, roi de Sparte, se trouvant à Athènes et étant monté à l'Acropole pour « interroger la Déesse », se vit chasser du hiéron par une prêtresse qui le traita d'étranger 24 ; l'entrée d'Olympie, oit cependant se trouvait le Pelopeion, était interdite aux Achéens 25. Aucune de ces restrictions n'existe pour le manteion; ce n'est jamais, comme on l'a dit, un sanctuaire dorien ou ionien, il n'est même pas panhellénique ; c'est toujours un sanctuaire universel: Grecs de toutes tribus ou de tous dialectes peuvent y venir comme le Lydien 26, le Romain 27 ou le Carthaginois 28, l'Arabe 29 et le Tyrien 30. Ce cosmopolitisme est trop contraire à la religion primitive des Grecs pour qu'on puisse chercher parmi ceux-ci les premiers fondateurs d'oracles ; il nous faut croire les légendes qui les font venir de la Thrace, des pays hyperboréens, orientaux ou africains ; exclus des cultes domestiques et officiels de la Grèce, ils fondèrent des cultes spéciaux et les sanctuaires qu'ils établirent devaient plutôt ressembler aux édifices de leurs pays d'origine qu'à ceux des contrées ois ils venaient se fixer. Il ne reste que des renseignements légendaires sur ces oracles primitifs ; on se souvenait encore à l'époque romaine que le premier temple de Delphes était 'aTEptvov, « construit avec des ailes », mais ce terme ambigu fut pris dans son sens propre par les mythographes 31, Une monnaie, également d'époque romaine 32, représente le manteion 33 de Paphos (fig. 6588) sous la forme d'un édifice assez haut Manqué de deux ailes basses ; c'est peut-être l'aspect extérieur que pouvait avoir la grande salle hypostyle de Karnak 3+, c'est le type des temples de la Syrie 33, de ce monument représenté sur une peinture crétoise", et d'un autre monument que reproduisent cinq plaques d'or de Mycè TEM -93TEM nes' (fig. 6785). Tous les archéologues y ont vu une œuvre ou le souvenir d'une oeuvre de Chypre et de la Syrie; la présence des colombes perchées surla crête du mur, comme on en voit des deux côtés du temple sur la monnaie de Paphos, a fait penser aux cultes des mêmes pays. On oubliait le rôle que jouait le pigeon dans l'oracle de Dodone [ORACULUM] et dans le culte de nrosè., mère d'Aphro dite. Cette construction en charpente d'empilage reposant sur un socle de pierres reproduit peut-être un modèle syrien ou égyptien, mais sa structure est grecque. 2° Temples elrangers de la Grèce. D'après IIérodote, les temples de Cythère 2, de Thasos etc., auraient été fondés par des Phéniciens' ; il est certain que les Sidoniens, comme plus tard les Tyriens et les Carthaginois fondèrent des temples dans la plupart de leurs colonies. On n'a pas à rechercher ici l'action qu'ils exercèrent sur la religion des Pélasges 6 et les rites, mais on doit examiner la triple influence qu'ils eurent sur la construction du naos grec. A. L'idée même du naos est d'origine égypto-phénicienne. Aucun des peuples apparentés aux Grecs ne conçut le dessin d'enfermer la divinité ou son image dans un édifice C'est également une conception égyptienne que d'élever à grand frais un luxueux et vaste bâtiment inhabitable dont les portes sont presque toujours fermées, oh les fidèles ne peuvent se rassembler pour prier, où on ne célèbre aucun culte public, où personne n'est admis à pénétrer à l'exception des prêtres et du roi t. B. L'architecture égypto-phénicienne du temple fut peut-être imitée par les constructeurs des premiers oracles, mais elle subit de telles transformations qu'elle devient méconnaissable dans les édifices helléniques de l'époque classique. Cependant les Grecs continueront toujours à faire, comme les Égyptiens, des temples sans fenêtres, obscurs, où « règnent des ténèbres à peu près complètes, où rien n'indique qu'on ait jamais fait usage de flambeaux ou d'aucun autre mode d'illumination 9 ». Comme le dit Mariette, à propos du temple égyptien, cette obscurité voulue n'était pas destinée à augmenter le mystère des cérémonies ; « elle est le seul moyen possible alors de préserver les objets précieux, les vêtements divins des insectes, des mouches, de la poussière dit dehors, du soleil et de la chaleur elle-même '0 ». C. La construction égyptienne ou phénicienne était connue des Grecs à l'époque mycénienne in, mais cet art de bâtir ne pouvait être adopté définitivement dans le bassin de la mer Égée, car toute la région était consacrée à Poseidon. Les Égyptiens ignoraient ce dieu '2, qui ébranle la terre, renverse les édifices les plus massifs et les plus solides 13. La fréquence des phénomènes sismiques amena les indigènes à chercher des types de construction qui, mieux adaptés à leur pays, fussent plus résistants ; si donc l'idée de l'architecture religieuse est, directement ou non, d'importation africaine, le moyen de la réaliser, le mode deconstruction doilctre cherché dans les usages adoptés par les ancêtres des Grecs. 3° `IIpiLov. Le culte des morts est probablement la religion la plus ancienne des Grecs" ; elle se retrouve chez les peuples qui leur sont apparentés', et n'était point connue des Égyptiens 1G. A toutes les périodes de l'histoire grecque, on voit des exemples de morts divinisés et d'héroons transformés en hiérons [HÉROS] ; beaucoup de temples curent pour origine une sépulture et plusieurs naos furent primitivement des monuments funéraires. Les plus anciennes tombes de la Grèce sont établies sur un plan circulaire3', et cette habitude fut plus ou moins observée jusqu'à l'époque chrétienne 's ]SEPULCRCM]. Alf. 111aury a montré dans quelles circonstances, à l'époque homérique, le 'r,p(ov'y, « tombeau de peu d'élévation 20 », était tranformé en un ipwov, « toujours fort élevé' », et comment cet ai7tu cana 22 devenait un hiéron lorsqu'on décidait de rendre un culte public au héros 23. L'héroon des âges primitifs 2'°, bâtiment cylindrique surmonté d'un cône (fig. 6310), étant situé dans l'enceinte de la maison 25, près des greniers ou trésors [THESAURUS', et ayant le même aspect que ceux-ci qui étaient consacrés au culte des Pénates26, on comprend la relation qui s'établit chez les Grecs, comme chez les Italiens, entre les PÉNATES et les VAPES et on voit comment on continua longtemps à donner la même forme cylindro-conique à tous les monuments consacrés aux cultes domestiques, urnes cinéraires (fig. 2508), cippes funéraires (fig. 2586), sanctuaires des Pénates u (fig. 5552 et 5553)1 etc. TE11 -94TEM Msyapov. Ce mot, qui est l'exacte traduction du sémitique Itikal', désigne une habitation plus grande que les autres. A l'époque héroïque, c'était le nom que l'on donnait aux demeures royales; Achille est né Ev p.sycipotcty 2 ; il dit du château de son père aarpbçsvi p,Eyxpotaty 3. Cette forme plurielle, employée également pour Tx ô«,p.2Ta, provient de ce que le Sdptoç des grands chefs se composait toujours de plusieurs corps de bàtiments indépendants les uns des autres comme dans nos habitations seigneuriales du moyen âge. Chacun avait son culte spécial; les Mânes étaient adorés dans cette partie des cours oit se trouvait le tombeau des ancêtres ; les Pénates recevaient un culte là où étaient les provisions d'hiver, les magasins; quant aux Lares, ces OEol p.tiytot, leur sanctuaire se trouve dans cette partie de la maison que l'Odyssée ° place Z v Sdu.ou, c'est-à-dire dans l'habitation. On a retrouvé, dans différents palais crétois, de véritables chapelles avec des instruments du culte et de petites idoles 6. Ce sont les dieux protecteurs de la famille; leur culte était secret', on le célébrait dans cette pièce retirée du logis, iiôu:ov qui correspondait au lararium des Latins °. Beaucoup de familles n'avaient qu'une seule divinité tutélaire; mais on ne craignit point d'introduire dans son laraire de nouveaux dieux, dontle pouvoir bienfikisant ne pouvait que s'ajouter à celui de la divinité principale. C'est de cette ancienne coutume domestique que viendra l'usage de placer des dieux rtlvvxot dans les naos publics, et celui de construire dans un même hiéron plusieur vaierut autour du naos principal. L'Odyssée nomme plus spécialement p.iyapov la grande salle du palais, celle (lui s'ouvre directement sur la cour d'honneur et qui servait à la fois d'arsenal'° et de lieu de réunion pour les festins et certaines assemblées " Cette salle, qui correspond à l'ATlllurl latin, paraît construite d'après le plan et la forme des salles d'apparat des grandes demeures égyptiennes de la X1Ie dynastie 12. Comme celles-ci, elle est hypostyle et hypèthre; les solives apparentes du plafond t3 sont soutenues par des colonnes en bois" ; il n'y a point de fenêtres", le jour vient d'une grande baie rectangulaire ,CAVAEDIUM] placée au centre du plafond. Au-dessous de cette baie, se trouvait l'autel du foyer domestique et parfois un arbuste16 qui joue un rôle dans quelques légendes. Les archéologues s'accordent aujourd'hui à considérer cette salle d'honneur, ce mégaron, comme le premier naos consacré au culte officiel de la cité grecque. L'hypothèse de la transformation du mégaron royal en naos des divinités poliades permet de mieux saisir la raison de beaucoup de détails dans l'architecture du temple; elle nous montre aussi pourquoi les Hellènes donnaient le nom de mégaron aux anciens temples, à ceux des deux déessesl1, ainsi qu'au sanctuaire de Delphes 16,que la Pythie appelait iu.vSôµov", Éuw 7t!GVrLVT1dV". IV. Classification des hiérons. En Grèce, il n'est pas toujours possible de reconnaître l'endroit consacré au culte public2t. Il n'y a souvent que décombres ou constructions plus mesquines que les maisons d'alentour. Cet état ne provient ni de la misère des temps, ni de l'incurie des fidèles, mais de ce que, « dans l'opinion des Grecs, c'est une oeuvre pie d'élever ces baraques; c'est un sacrilège de les détruire » 92. Que l'église s'écroule, que ses matériaux soient dispersés, l'endroit n'en reste pas moins consacré 2' ; il n'est jamais abandonné ou désaffecté 2'` ; à certains jours, ces lieux qui semblent déserts reprennent de l'animation ; « on brûle un peu d'encens, on chante quelques prières » 25 et les fidèles s'y pressent. Il en fut toujours ainsi ; arrivant à Colone, Antigone reconnaît un hiéron uniquement à ce que l'endroit est inculte, désert, qu'on y entend chanter de nombreux rossignols26 et qu'on y trouve « une pierre mal polie » 77. 1° hiérons fondés par des particuliers. Deux siècles avant J.-C., une femme fonde à Santorin un hiéron comprenant un temple des Muses, des statues, des héroons, etc. ; trois officiants sont institués et doivent tous les ans offrir pendant trois jours un sacrifice suivi, chaque jour', d'un repas auquel peuvent participer soixante-six personnes et leurs enfants ; pour couvrir toutes les dépenses d'entretien, de culte, de sacrifices et de ces trois banquets d'au moins soixante-dix couverts, Epictéta lègue 3000 drachmes devant produire annuellement 210 drachmes 28. Il importait peu que le monument tombât en ruines, il fallait conserver la rente et l'endroit où se célébrait l'annuel triduo. Ce hiéron fut fondé par Epictéta pour abriter et conserver une sépulture ; d'autres, sans être mieux dotés, le furent à la suite d'un vou29, d'un songe. Sur l'ordre d'un oracle, Poseidonios d'Halicarnasse consacre un hiéron avec des autels à plusieurs divinités; chaque année, on doit sacrifier cinq béliers et une chèvre, faire le repas sacré, etc., et il institue une rente de quatre statères d'or (environ 107 francs), prescrivant que, s'il y a un reliquat, on l'emploiera pour des offrandes, eiç fl,vxOriu.a'rx 30. Les plus riches de ces hiérons furent ceux que l'on établit avec des dîmes de butin ; c'était un moyen fort scrupuleux de jouir d'un bien sacré. Xénophon raconte qu'arrivés à Kerasunde les Dix-Mille se partagèrent l'argent provenant de la vente des prisonniers ; mais avant, on avait prélevé la dîme pour Artémis d'lphèse et Apollon. Le TEM 95 TEM montant de cette dîme sacrée fut confié par portions aux généraux, qui se chargèrent de l'offrir aux dieux. Xénophon remit la moitié de ce dépôt à Delphes ; mais, sur le conseil d'un oracle, il consacra la part d'Artémis à l'achat d'un magnifique domaine où il se retira ; il y fonda un hiéron, édifia un autel et un naos. Tous les ans, « il employait la dixième partie des fruits que produisaient ses terres à faire un pompeux sacrifice auquel étaient invités tous les habitants du voisinage, hommes et femmes » 1. Dans l'Attique, les îles et sur la côte asiatique, tous ces hiérons fondés par des particuliers sont appelés téménos comme les sanctuaires appartenant aux thiases, aux confréries d'Asclépiades, etc. ; l'administration, l'entretien, les cérémonies sont réglés par le fondateur ou une association choisie par lui pour assurer le maintien du culte 2 ; l'État n'a qu'un pouvoir de contrôle d'ordre général 3. A côté de ces innombrables hiérons consacrés pour des raisons particulières, destinés à ne servir, qu'à d'annuels anniversaires, voués toujours à une ruine rapide, mais jamais abandonnés, il y en avait d'autres destinés à la vie religieuse des populations. Chez les modernes, le temple paroissial est le centre où s'accomplissent toutes les cérémonies du culte; chaque Grec avait pour le moins trois sanctuaires où il était inscrit, où il devait figurer dans les fêtes périodiques et aux dépenses desquels il devait contribuer. Fustel de Coulanges a montré que chaque Athénien faisait « partie à la fois de quatre sociétés distinctes; il est membre d'une famille, d'une phratrie, d'une tribu et d'une cité » Chacun de ces échelons avait son culte, son prêtre, son sanctuaire. Le culte de la famille se célébrant dans la maison privée, on n'a point à en parler ici. 2° IJiérons des phratries. Ce sont des survivances d'anciens cultes communs à plusieurs familles distinctes et fondés avant le retour des Iléraclides 5 ; on ne trouve plus de phratrie dans les États doriens du Péloponèse et de la Crète 5 ; jusqu'ici, on ne l'a rencontrée qu'à Delphes ', à Thèbes en Attique 9, dans les îles de l'Archipel, sur les côtes asiatiques et dans les colonies de 1'Italie10. Elle paraît analogue à la curie latine" et quand les historiens grecs ont à parler de celle-ci, ils emploient le terme 9exip(x 12. En Attique, les démocrates cherchèrent toujours à briser cette vieille institution patricienne71; n'y parvenant pas, ils la dénaturèrent Clisthènes créa de nouvelles phratries et « aux sacrifices héréditaires des familles substitua des sacrifices où tous les hommes furent admis »14. Il semble qu'en Attique les phratères ne se réunissaient point dans un hiéron public, mais dans un téménoslo concédé par l'État ou acheté par eux et dont l'entretien leur incombait; ils étaient donc, sous ce rapport, dans la même position que les autres communautés et confréries particulières, l'État considérant moins la phratrie comme une division administrative que comme une association religieuse 10 Le AEb; rpziptog est parfois un héros éponyme 17, mais le plus souvent c'est un dieu de la nature physique : Zeus 18, Poseidon 19, Latone20, Dionysos 21, etc. Le principal acte religieux consistait en sacrifices et repas sacrés pendant la fête des Apaturies ; c'est ce que disent les auteurs22 à propos de l'Attique, mais une inscription delphique indique quinze frairies obligatoires pendant l'année pour les membres de la phratrie des Labyades 22. 3° [hérons des tribus. Toutes les races grecques ayant conservé le régime de la tribu jusqu'au christianisme, on doit partout retrouver de ces sanctuaires plus ou moins modifiés selon les régimes locaux24. Il semble que pendant la fin de la période royale et durant l'oligarchie des EUPATDIDES, la vie religieuse des agglomérations politiques ait eu pour prêtres les ru),of,xctaniç, qui exercaient le ministère sacré comme les rois l'exerçaient dans leurs palais. Cette hypothèse expliquerait, mieux que l'invasion dorienne 23, pourquoi on ne trouve point en Grèce de temples urbains avant le vue et même le vrre siècle. Les Eupatrides, qui jusqu'alors étaient seuls à contribuer de leur fortune aux différents services publics et religieux, n'avaient nul besoin de somptueux sanctuaires; vivant dans le loisir, passant volontiers leur temps, comme ces princes feudataires d'Ithaque ou de Schérie, à faire de fréquents banquets, ils dépensaient plus pour les sacrifices, les repas sacrés, que pour la création, l'embellissement des sanctuaires locaux. Cette existence religieuse fut bouleversée en Attique par les réformes de Solon et de Clisthènes, l'admission de citoyens pauvres dans les tribus, la création de nouvelles tribus formées de gens à fortune médiocre. Des Eupatrides cherchent encore à conserver la prêtrise, mais tous les tribules sont astreints à contribuer aux dépenses du culte et aux frais des repas sacrés. A partir du ve siècle, leur rôle religieux n'a plus qu'une importance secondaire pour les Athéniens; obligés qu'ils sont déjà à subvenir aux cultes des phratries et des dèmes, ils préfèrent profiter des nombreux cultes de l'État, ô11j.orn? ispl, qui ne coûtaient rien puisque les frais en étaient couverts par les revenus des téménos; ils firent de moins nombreux sacrifices au héros protecteur de leur tribu, et dès le Ive siècle l'État est contraint de les subventionner en leur accordant une part de téménos dans les clérouquies 2°. Les inscriptions attiques ne donnent que peu de détails sur les sanctuaires, les sacerdoces, les cultes et TEM -96TEM les frairies de ces divisions administratives [amui:, p. 45'2]; on sait que la tribu Ilavatov(ç dressait les stèles de ses décrets sur l'Acropole 1, iv 'ri ispû, Toi; IIavïi(ovoç 2. Dans quelques villes de l'intérieur, habitées principalernent par des cultivateurs qui n'étaient pas obligés, comme les commercants et les industriels, à de fréquents changements de résidence, les citoyens d'une même tribu continuèrent longtemps à se grouper autour du sanctuaire de la tribu et à vivre ensemble dans un même quartier. Parfois, comme à Mégalopolis3, le nom du quartier et celui de la tribu qui y est domiciliée dérivent d'un nom de temple. A Mantinée, la tribu 'Enai,Ea4 habitait le quartier in' 'AÀiav, près du temple d'Atbéné Aléa mentionné par Pausanias 5. Cette tribu avait-elle ce temple comme sanctuaire et s'était-elle placée sous la protection de la divinité qu'on y adorait s? Dans ce cas, il faudrait admettre qu'à Tégée le grand temple d'Athéné aurait servi à la fois de sanctuaire à la tribu i "A6avaiav 7 et de centre religieux à la confédération arcadienne, à moins de croire que la tribu n'avait qu'un téménos dans le hiéron fédéral, comme la Ilavaioviç d'Athènes avait son héroon dans l'enceinte de l'Acropole. La question est moins douteuse pour les colonies ; la tribu y représente le plus souvent un groupe ethnique vivant dans un quartier séparé 8 ; le temple de ce quartier forme donc une sorte de paroisse pour les tribules. 11 est alors établi, dans une concession, un téménos jouissant de privilèges spéciaux accordés par capitulations' des rois indigènes, renouvelées par les Perses, maintenues par les Diadoques et les Romains 1D 48 Ilierons des dèmes. Ces sanctuaires de bourgades se confondent, dans la plupart des États, avec les temples de tribus 11. En Attique, ce sont des centres religieux de circonscriptions administratives établies par Clisthènes en remplacement des naucraries ; mais, comme les hiérons de phratries et de tribus, ce sont toujours des institutions religieuses personnelles et non locales, car les Grecs n'ont jamais eu l'idée de la paroisse dans laquelle peuvent s'inscrire de nouveaux arrivantsf2 ; en quelque endroit que résidât un Athénien, fût-il même dans une clérouquie de l'Archipel13, il continuait toujours à faire partie du dème auquel appartenaient ses ancêtres 1i. On connaît un certain nombre de hiérons affectés aux cultes des dèmes de l'Attique 15; leur administration est indépendante; ce sont les démotes qui pourvoient aux dépenses, choisissent ou tirent au sort les prêtres et les prêtresses, ainsi que leurs assistants et les administrateurs des biens [DLMOS, p. 84]. 5o Iliérons des États. Les plus anciens cultes de l'État sont les cultes des divinités domestiques des pre mières familles royales, ceux dont le roi était le iEpeé; et dont il faisait les frais avec les revenus de ses téménos ; leurs hiérons furent établis sur les ruines des vieux châteaux royaux 1G. A ces cultes primitifs d'autres furent ajoutés, par suite de circonstances diverses. En 598, après l'entreprise avortée de Cylon, les Athéniens élèvent des autels à la Violence et à l'Insolence"; après les guerres médiques, ils adoptent le culte de Pan. Durant les premiers temps et dans beaucoup de pays restés monarchiques, comme Sparte '$, ces hiérons ne se distinguent en rien de ceux des tribus et des dèmes; ce sont de grands espaces découverts avec un autel, parfois un naos ou même une maison dans laquelle on conserve les instruments du culte et Ies archives. La splendeur de ces temples ne commence qu'à l'époque des tyrans. Aristote, voulant prouver que l'une des ressources de la tyrannie fut d'entreprendre d'immenses travaux, « pour appauvrir les sujets en les occupant 70 », cite la construction du temple de Zeus Olympien par les Pisistratides et « les grands ouvrages que Polycrate fit exécuter à Samos 2° ». Cependant ce même auteur affirmait que le but de la tyrannie fut de protéger le peuple contre les riches ; que son essence fut de combattre l'aristocratie 21. Dans tous les États de la Grèce, les tyrans ou les démagogues cherchent à enlever aux Eupatrides la clientèle religieuse, en créant des cultes populaires et en leur donnant plus d'éclat que n'en comportaient les cultes aristocratiques. Frapper l'imagination des foules par des fêtes pompeuses, qui se déroulent autour de somptueux édifices, fut le procédé mis en oeuvre par les démocrates, pour accomplir cette réforme religieuse. L'histoire d'Athènes étant mieux connue que celle de Sicyone ou de Corinthe, il est plus facile d'y suivre les transformations qu'y subirent les grands hiérons à chaque révolution ; on multiplie les sacrifices et Pisistrate en fait tous les frais; plus tard, on augmentera le nombre des repas sacrés et ils seront payés par le trésor public. Le peuple ne se contente pas de viandes sacrées, il lui faut des spectacles ; on invente des fêtes religieuses à grand cortège ; Pisistrate réorganise les Panathénées ; Périclès en augmentera la splendeur [PANATl1ENAIA, p. 304]. A l'ancien sacrifice hiératique, on ajoute des représentations théâtrales, concours tragiques et comiques; les Pisistratides instituent les grandes Dionysies, construisent le temple de Dionysos Eleuthereus et, dans le hiéron même, établissent un théâtre dont les rayons, regxiSEç, partaient tous de l'autel pris comme centre-de l'hémicycle 22 Le peuple veut de l'argent, on lui crée du travail 23 en lui faisantbâtir de vastes naos pour de nouveaux dieux 24, ou pour d'anciennes divinités qui avaient déjà leurs sanc TEM --98 TE..M plusieurs États se reconnaissent une origine commune', ils forment souvent une association politique et reli place sous la protection d'une divinité spéciale. Tous les citoyens des États fédérés conservent les cultes exclusifs et spéciaux à leur cité, tribu, phratrie, famille, mais tous participent au culte du dieu protecteur de la fédération et tous peuvent pénétrer dans le hiéron fédéral, prendre part aux fêtes et aux sacrifices de la fédération 2. Ces sanctuaires sont généralement très vastes et, le plus souvent, situés dans un bois, en pleine campagne 3. Comme les fêtes n'ont lieu qu'à de longs intervalles, qu'elles durent plusieurs jours et attirent beaucoup de pèlerins, il en résulte des dispositions spéciales pour que les fidèles campent sous la tente, pés par villes s'approvisionnent facilement auprès des marchands forains' placés sous la surveillance d'un yooavdt.t.o; 7avrlYôES051'. A côté de ce fonctionnaire, on trouve encore un âpyupoax67•.o; 3, dont les fonctions ne sont pas bien défi nies'. Il est certain que, dès l'origine de la monnaie, il y eut des ateliers monétaires dans la plupart de ces hiérons fédéraux ; les pièces qui en sortent sont au nom de la confédération, ou portent une légende Olympie est le type du hiéron fédéral et resta le modèle qu'imitèrent les amphictyonies pour organiser les oracles dont elles s'emparaient. E. Curtius a montré que l'Iléraion d'Olympie fut d'abord le centre religieux de seize villes d'Élide et de Pisatide14 ; qu'ensuite le temple de Zeus Olympien devint le sanctuaire de la confédération formée par les Eléens et les Héraclides'. Ce n'est que longtemps après, quand les Achéens et les Ioniens furent reconnus comme Hellènes, que l'on admit tous les citoyens grecs dans ce Panhellénion. Ce qui caractérise Olympie, c'est son isolement dans la campagne et son éloignement de tout centre habité; c'est la grandeur relative de l'Altis et des annexes qui l'entourent (fig. 6789) 1E : au levant, le stade, l'hippodrome et l'Hellanodikéon ; au sud, le Bouleutérion ; au couchant, le Léonidaion pour les hôtes illustres, le Théokoléon pour les prêtres en fonction, la palestre et le grand gymnase, etc. (fig. 5397) ; ce sont ces nombreux édifices spéciaux qu'on nomme Trésors dont le plus ancien date de 582; c'est encore l'Agora" située dans l'Altis même, le théâtre78 construit à i côté du hiéron de Vesta ; les nombreux hiérons dont les plus célèbres sont ceux de Zeus 1e, de Héra '0, etc. ; les trente et quelques autels qui tous devaient servir une fois par mois à un sacrifice que faisait, soit le théocole en fonction, soit l'exégète, l'aulète, le xyleus, soit l'un des devins ou des spondophores21. En dehors de ces trente et quelques sacrifices mensuels qui étaient obligatoires, il y avait chaque jour un sacrifice de fondation sur le grand autel de Zeus 22, et tout Hellène pouvait en outre y offrir son sacrifice particulier 23, après s'être procuré la victime et avoir acheté au xyleus le bois de peuplier2` nécessaire à la combustion. Ce grand autel ne se trouvait point en avant du naos de Zeus Olympien ; il était plus au nord, devant le Pélopion et l'Héraion, à égale distance de ces deux monurnents2o ; sa grandeur était inusitée puisqu'il devait servir aux nombreux sacrifices offerts pendant la courte durée des fêtes. Pausanias dit qu'il se composait de deux terrasses TEM -99TEM superposées : l'inférieure avait 125 pieds de tour était construite en pierre, et deux escaliers, également en pierre,permettaient d'accéder àlaplate-forme sur laquelle on égorgeait les victimes, spectacle auquel les femmes et les jeunes filles pouvaient assister en temps ordinaire 2. Sur cette première terrasse, ou 7spauatg, s'élevait une seconde xp-ri7r(,3, que l'on appelait TOc ~3uu.ou 'r i1Jé lXe'QTxTOV et. sur laquelle, en présence des hommes seulement, on faisait griller les cuisses des victimes. Ce deuxième étage, prdbablement de forme rectangulaire t, avait un soit le nombre des hiérons et des monuments placés dans l'Apis d'Olympie, ce téménos° ne fut jamais qu'une place à peu près carrée dont chaque côté n'avait qu'un stade de longueur ; c'est l'étendue même que l'on donna au bûcher d'Iléphestion par ordre d'Alexandre e. Ce monarque voulait faire grand et désirait élever des constructions aussi vastes que les plus énormes bâtiments de l'Égypte i0 et de la Chaldée. Dans ses mémoires, on trouva six projets de temples à construire à Délos, Delphes, Dodone, Dion, Amphipolis, Cyrrhe et Ilion ; périmètre de 32 pieds ; il était formé des cendres laissées sur l'autel et surtout des cendres du foyer public qui brûlait dans le Prytanées. Tous les ans, le 19 du mois 1Jlaphion, les devins, p.av'rn g, emportaient la cendre du Prytanée, la délayaient et la pétrissaient dans l'eau de l'Alphée jusqu'à ce qu'elle fût de consistance assez pâteuse s pour que, transportée sur le grand autel, on pût y tailler des marches permettant d'aller de la première terrasse au sommet de la seconde ; à l'époque de Pausa nias, ce sommet s'élevait à 22 pieds au-dessus du sol î° Hiérons des monarchies hellénistiques. -Quelque chacun d'eux devait coûter quinze cents talents". Ils ne furent jamais construits, les généraux se souciant peu de consacrer à, la gloire des dieux une somme valant cinquante millions de francs. Cependant quelques idées d'Alexandre furent reprises par ses successeurs. La rapide fortune d'Alexandrie fut le prétexte de la création de nombreuses villes neuves" qui se distinguent par un plan mieux tracé", par la grandeur des quadrilatères réservés à certains hiérons. En général, ceux-ci étaient destinés à remplacer les hiérons fédéraux ; on devait, par des jeux et des spectacles coûteux, attirer la population de TEM 100 TEM toute une région assez étendue et l'inviter à participer aux cultes que l'on rendait au roi, à la reine et à leurs ancêtres. De ces hiérons royaux proviendront deux réformes : l'ordonnance dans la hiérarchie sacerdotale et dans la disposition monumentale des sanctuaires; les Grecs n'en conçurent jamais le dessein, mais ils les préparèrent inconsciemment. A l'époque hellénique, on n'aurait pu placer un prêtre d'Apollon sous le commandement d'un prêtre d'Athéné ou de Poseidon ; à l'époque hellénistique, les prêtres des dieux olympiens acceptent d'être subordonnés aux pontifes de la reine mère ou du feu roi. Ces pontifes sont nommés par le roi' et celuici leur donne un certain pouvoir disciplinaire et religieux sur les prêtres des temples voisins 2. Quand les Romains viendront, ils transformeront ces sanctuaires royaux en temples de Rome et d'Auguste ; les pontifes qu'ils y placeront auront à surveiller, au point de vue religieux, toute une province dont ils prendront le nom dont ils assureront le seul culte officiel et obligatoire, le sacrifice à César. Quand on instituera les diocèses, quand les empereurs seront chrétiens, la puissance hiérarchique de ces grands prêtres des hiérons de lOINON sera dévolue aux archevêques et métropolitains qui deviendront alors fonctionnaires religieux. La seconde réforme suit une même marche progressive. Choisy prétendait que, « à partir de l'époque d'Alexandre, les tracés symétriques ont définitivement prévalu dans l'art grec3 o. Rien n'est moins exact, et l'exemple qu'il cite, l'acropole de Pergame'. (fig. 6790), suffira à montrer les progrès qu'avaient à. faire les architectes des Attalide', avant d'atteindre la majestueuse régularité et la symétrie solennelle de l'architecture des Antonins. Les Attalides disposaient de 35000 mètres carrés formant quatre terrasses successives; l'inférieure, très irrégulière, fut affectée à l'agora K); la seconde est transformée en un hiéron, oit le culte de Zeus était associé plutôt au culte bien connu des Attalides qu'à celui de toute autre divinité olympienne; ce hiéron n'est pas rectangulaire, le grand autel 1 ,seul monurnentquile décore, n'est ni au milieu, ni même à distance égale des côtés latéraux ; la troisième terrasse (C) n'a aucun de ses côtés parallèles, c'est le hiéron d'Athéné Poilas ; le petit naos (D), qui en est le motif principal, ne fut ni reconstruit' ni agrandi ; on l'a laissé en bordure. L'aspect. de la quatrième terrasse est bien différent ; au milieu du hiéron s'élève le temple de Trajan(F) ; la porte de la cella est le point de rencontre, le decussis des diagonales menées des quatre coins du hiéron, du templuin. Les architectes des Attalides n'ont point connu cette régularité et cet art des ensembles ; leurs créations ne sont que réminiscences; ils lèvent un grand autel à deux étages comme celui d'Olympie ; ils placent le théâtre (G) des artistes dionysiaques sous le hiéron d'Athéné Polias, comme Lycurgue d'Athènes avait construit le théâtre de Dionysos au pied de la terrasse du Parthénon. Là oit excellent les architectes de Pergame, c'est dans l'emploi des sculptures décoratives et dans le dessin des portiques ; ils en placent partout 6, même sur le grand autel' ; le portique devient pour eux la décoration principale des hiérons ; ils suivent en cela les principes de l'école macédonienne. Le roi Philippe et son fils dé corèrent Olympie de plusieurs portiques dont l'un, célèbre par ses qualités acoustiques8, ornait le côté oriental de l'Attis. Les Romains conserveront l'usage des portiques, mais ils les emploieront comme cadre de leurs ensembles décoratifs; trois portiques (P), dont deux symétriques, forment le fond et les côtés du hiéron de Trajan à Pergame ; dans le hiéron voisin, les Attalides avaient bâti une longueur de plus de 125 mètres de portiques à deux étages (P) ; mais ces portiques sont placés en équerre sur les côtés est et nord, et n'ont pas la même profondeur. V. 11`ature et classification des naos. Quand on décidait de construire un naos, il fallait consulter un oracle9, la Pythie", ou ce règlement qu'Aristote nomme iwv ia v 1.1.0ç". En général, les Grecs plaçaient leurs temples sur les hauteurs, dans un endroit assez découvert pour que l'horizon ne fût point ;masqué, et assez fortifié naturellement pour que les richesses et les trésors conservés dans le naos fussent à l'abri' le Orientation. L'axe du temple de Phigalie est sur une ligne sud-nord, et c'est vers ce dernier point que la façade est tournée ; dans le sanctuaire de Délos, presque tous les temples ont une orientation différente. Le naos gr' TEM 101 d'Apollon a son entrée à l'E. ; le premier temple de gauche (Létoon) l'a à l'0. ; c'est vers le S.-S.-E. que regarde le nouvel Artémision et vers le S.-E.-E. que regarde l'ancien. De toutes les théories émises pour expliquer ces divergences', la plus rationnelle paraît être celle à laquelle conduisent les hypothèses successives d'Em. Burnouf2, L'entrée du temple est placée devant le point du ciel où se produit, à époque fixe, certain phénomène astronomique que l'empirisme le plus grossier permet de reconnaître3 ; ce n'est point là reste d'astrolâttrie, mais moyen pratique et des plus vulgaires de déterminer l'époque d'une fête périodique ; si celle-ci doit avoir lieu, par exemple, vers le 22 mars ou le 22 septembre, l'alxdv du dieu, la porte du naos et l'autel seront sur une droite dirigée vers l'est, parce que, seulement à ces deux dates, le soleil se lève à ce point de l'horizon 4 ; si la frairie est mensuelle, la porte du temple et l'autel regarderont la partie du ciel où l'on peut observer une des phases de la lune au lever ou au coucher .JTateriaux et construction. [Nous n'avons pas à analyser ici en détail la construction des temples; c'est un ensemble de questions qui a été étudié ailleurs. Pour la nature et l'usage des matériaux, nous renvoyons à MU-US, PARIES, STRUCTURA; pour les éléments constitutifs des ordres employés dans l'architecture des temples, à vons pas nous dispenser de résumer brièvement l'évolution qui s'est produite dans la construction, car elle explique aussi la transformation accomplie dans la grandeur, la richesse et l'importance de la demeure où habitait la divinité. [L'appareil en pisé, d'argile mêlée de paille hachée, ou de briques crues mêlées d'un chaînage en poutrelles de bois ['tfuRus, p. 20491, a été le système ordinairement usité pendant l'époque préhellénique, à Troie, Théra, Cnossos de Crète, Tirynthe et Mycènes. L'âge hellénique le reçut de ses devanciers et le pratiqua encore longtemps eux am, p. 1119]' . L'architecte du vieux temple d'Athéna à Olympie avait encore, au vine ou vile siècle, bâti le mur de ]a cella en briques crues, placées sur un soubassement de pierres appareillées'. A Panopée, en Phocide, Pausanias vit encore une chapelle très ancienne dont les murs étaient de briques crues; à Mégare, l'empereur IIadrien fit rebàtir en marbre un antique temple d'Apollon qui était tout entier en briques'. [Dès l'époque préhellénique, le passage à la pierre est accompli; certains murs du palais de Cnossos sont en blocs de gypse ou de calcaire, que l'on continuait à relier par des pièces de bois et qui servaient de soubassements; par-dessus, on utilisait encore le pisé et le bois pour les parois ; les colonnades étaient de bois 9. Ce pro TEM grès ne fut pas perdu pour l'âge dorien. Il ne semble pas qu'on ait eu recours à l'intermédiaire de la terre cuite. On alla tout de suite aux matériaux plus résistants ; on donna d'abord pour base aux parois de pisé des soubassements de pierres sèches; puis le mur entier l'ut appareillé avec des blocs de pierre '°. On sait, d'autre part, comment la colonne deboismycénienne,d'abordemployée comme piquet et pointue par le bas, devint un tronc de cône allongé et posé sur une dalle de pierre", comment ces bases isolées formèrent elles-mêmes peu à peu un stylobate continu [STYLOBATES, p. 154]. On suit pas à pas la substitution de la colonne de pierre à la colonne de bois dans l'Héraion d'Olympie, transformation qui, dans cet édifice, dura plusieurs sièclesl2. Depuis longtemps aussi on a reconnu qu'il faut chercher dans le bois les origines de la frise, des métopes, des triglyphes, des mutules, des gouttes [METOPA] 13. Le fronton [rASTIGIUItI, temple de Thémis à Rhamnmrie. TYMPANUM] n'existait pas dans les édifices préhelléniques ; il était remplacé par une terrasse couverte en terre pilonnée [TECTUM, p. 59]. Mais quand on inclina sur deux versants cette terrasse, pour l'écoulement des eaux de pluie, puis quand on posa sur ces deux pentes des tuiles rendant le toit encore plus imperméable, le comble dessina un tympan très bas, dont on voit la forme dans le palais de Thétis dessiné sur le vase François (fig. 327)1, et qui, peu à peu s'amplifiant, devint le couronnement magnifique de l'édifice2. [La décoration plastique, avant d'être formée par les sculptures, les reliefs et les acrotères de marbre que nous a légués l'âge classique[ACROTERIUM, SCULPTURA], fut faite d'argile peinte, de masques, de dalles de terre cuite polychromes, qui bouchaient les vides laissés dans le tympan ou dans l'ouverture des métopes, qui garnissaient l'extrémité des tuiles faîtières [ANTEFIXA, PICTURA p. 459]. Nous avons aujourd'hui, pour nous guider dans ces recherches sur l'aspect des temples primitifs en Grèce, un exemple très instructif, celui du temple d'Apollon, découvert à Thermos, en Étolie qui, datant du vie siècle, fut conservé sans doute jusqu'au me sous sa forme ancienne d'édifice de bois, orné de tuiles, d'antéfixes, de corniches, de métopes et triglyphes en terre cuite peinte. Les métopes, en particulier, sous forme de dalles d'argile décorées de tableaux semblables à ceux des vases du vie siècle (fig. 5643), sont des documents précieux pour nous faire comprendre la décoration architecturale de cette époque (fig. 6794'. La même ornementation en céramique peinte a joué un rôle important dans l'IIéraion et dans certains Trésors d'Olylnpie [FIGLIrUM, p. 1133], ou dans le temple de Métaponte en Sicile, même après que la construction en pierre eut remplacé la structure de bois 6. De là naquit la polychromie de l'ensemble, reportée sur le marbre ou la pierre, et distribuée presque exclusivement dans les parties hautes du monument [E. P.] La difficulté des moyens de communication et l'absence de voies fluviales déterminèrent les Grecs à se servir des matériaux que l'on trouvait près des chantiers 8 ; de là cette grande variété dans la construction et l'architecture, dont les règles sont moins souvent des lois esthétiques que des formules imposées par la résistance des matériaux9. C'est ce que prouve Vitruve en disant, à propos de la ratio intercolumniorum d'Ilermogènes10, que les temples diastyles (fig. 1750) et aréostyles doivent avoir des épistyles en bois, parce que des architraves de pierre, même de marbre, se rompraient" si on essayait de leur donner cette portée72. Ce fut également par suite du peu de résistance des matériaux employés dans la con 1 Voir la révision plus récente de celle partie du vase dans Furtwaenglcr et arch. hist. 11, 1902-1908, pl. IL a ini Sotiriadès et Kan cran) ; cf. Fougères, 1. c. 8 Jusqu'à 1 epoque hellenistique, les gros matériaux sont toujours locaux. II n'y a guère d'exception que pour les bois dont le transport par mer est assez facile. 9 Si la 1h'orle de la résistance des matériaux est due à Galilée, il est certain que les Grecs avaient des connaissances empiriques très développées sur les propriétés mécaniques du bois et des differentes espèces de pierres. Cf. Ed. Col1i sur l'art antique, on discute cette ordonnance des entre-colonnements comme si tous le, temples avaient éte faits de la même matière. La charge d'écrasement de la struction des murs que les Grecs durent reporter tout le poids de la toiture sur des colonnes et renoncer ainsi à donner à leurs grands temples la forme in antis. 3° Plans et Formes. N«bç iv 7:«p«rr ect 13. C'est la forme la plus simple et celle que les Grecs employèrent le plus souvent pour la façade de leurs maisons". L'édifice n'a que trois murs, dont deux latéraux; sur les extrémités antérieures, ANTAE, de ceux-ci repose l'architrave, que soutiennent deux colonnes placées vis à-vis des pieds droits d'une porte, percée dans la cloison séparant le vestibule de l'intérieur du naos (fig. 6792). Le plus ancien spécimen du temple à antes est l'Érechthéion primitif représenté sur un bas-relief de l'Acropole"S; l'ante de gauche est très visible, bien que ni le choix des matériaux ni leur plus grande épaisseur ne la fassent distinguer du reste de la muraille 16, qui est représentée construite en assises alternativement hautes et basses ('~eubtabb0p.ov). Ce qui caractérise cette construction, c'est que l'entablement n'appartient à aucun ordre grec17, mais offre quelque ressemblance avec l'ordre toscan. Sur les murs latéraux, et de distance en distance, reposent les extrémités des poutres transversales du plafond ; chaque poutre est séparée de ses deux voisines par une ouverture, b'rr, moitié moindre que la largeur même de cette poutre. Sur ces poutres et parallèlement au mur, mais en surplomb, se trouvent: 1° une architrave réduite à l'une des trois faces de l'architrave ionique ; 2° une frise lisse ; 3° une corniche peinte en rouge, ou cymaise, probablement en terre cuite, et au-dessus de laquelle on voit de larges tuiles plates dont les rebords latéraux sont pincés par d'épais couvre-joints triangulaires. Il est à supposer que ce toit n'était pas, comme ceux de l'architecture classique, à deux rampants et deux pignons, mais à quatre rampants 13 comme semble l'indiquer un petit fragment du bas-relief". On ignore encore à quelle époque les Grecs adoptèrent les combles à longs pansL0; sur le vase François, les deux édifices21 ne paraissent pas avoir un fronton triangulaire (fig. 327 et 6674) ; un des temples de l'Acropole est figuré avec un comble à croupes ou à quatre versants sur une hydrie à reliefs"" (fig. 5051). Choisy prétend qu'à Pestum « l'existence d'une croupe parait nettement écrite dans le plan même de la basilique 2' )). Naos prostyles. C'est probablement l'invention du fronton, âe'rôç, attribuée aux Corinthiens", qui détermina les Grecs à porter le poids de l'extrémité antérieure de la toiture non plus sur deux antes et deux colonnes, mais pierre employée pouvant varier entre 20 kilos et 2 500, il suffit pour la connaître de prélever un petit cube de 3 à 10 centimètres de côté. 13 Vltr. 111, 2, t. 14 Cf. Laloux, Archit. gr. fig. 227, façade d'une maison à Délos. 16 Th. Wiegand, Poros-Archet. pl. xiv, fig. 2. 16 Dans la plupart des monuments grecs, comme dans le trésor cuidien de Delphes, les antes ne sont plus qu'une survivance inutilisée du pilastre qui s'est conservé chez les Romains. -15 M. I.echat, Sculpt. ontiq. ae. Phid. p. 63, est d'avis contraire et décrit un n édifice dorique avec sa corniche à mutules décorés de gouttes n. 18 Les toitures à quatre rampants furent conservées très longtemps par les Étrusques, comme le prouvent l'urne funéraire fig. 1 275 et le plafond d'un caveau fig. 1274. L'origine des triglyphes s'explique mieux par les poutres de ces quatre versants que par toute autre théorie. rend compte des dernières hypothèses émises pour l'origine du toit grec classique à deux rampants. 21 G. Perrot-Chipiez, Hist. de l'art. VU, fig. 221 et 232. 22 Cette peinture du iv--ni' siècle semble inspirée d'un motif plus ancien. TEM -103TEM sur six colonnes au moins placées en avant du naos ; deux médianes sont en face des pieds droits de la porte ; deux extrêmes sont vis-à-vis les deux antes ; entre la colonne angulaire et l'ante on place encore une autre colonne intermédiaire « pour soutenir les architraves qui vont en retour à droite et à gauche»). Cette disposition dont s'inspira l'architecte de la tribune des Caryatides, pour placer les six statues qui supportent l'entablement`', se retrouve dans le trésor construit par Géla, vers 582, à Olympie 3 ; on la rencontre également dans l'Artémision d'Épidaure qui semble dater de la fin du Ive siècle. Tous ces édifices sont d'ordonnance tétrastyle 3; mais, à Délos, on a parfois donné la forme prostyle à des temples hexastyles (T. d'Aphrodite et d'Hermès 0, ancien Artémision') et, à Éleusis, Philon transforma le Télestérion en une construction prostyle t dodécastyle (fig. 2631). Naos am.pliiprostyles. Les temples prostyles n'ont qu'une façade ; les édifices amphiprostyles en ont deux: l'une à l'extrémité antérieure, l'autre à l'extrémité postérieure, in postico 9 ; toutes deux sont pareillement formées d'un portique placé en avant des antes et sur montées d'un fronton 10 [FASTIGIUyI, TY3IPANCM l ; par défi nition, la forme amphiprostyle implique donc un toit à deux versants ; l'exemple le plus souvent cité est le temple de la Victoire Aptère bien qu'il ne subsiste que de très petits fragments des frontons"; on voyait encore à Athènes, près de l'[lissus, un autre temple ionique amphiprostyle 12 qui était consacré à Artémis Agrotéral3 ou à Déméter et Perséphoné 1'° ; d'après M. Fougères, le nouvel Artémision de Délos était amphiprostyle, ainsi que le temple d'Apollon dit des Athéniens ou des Sept Statues 1o. Naos aptères. Ces trois formes précédentes ne sont que les principaux types10 d'une longue série de naos dont le caractère commun est l'absence de portiques latéraux; les flancs de tous ces naos sont nus et formés par un mur ; il n'y a point de bas-côtés extérieurs, d'ailes, rTEpv. Tout temple aptère n'est pas fatalement in antis, prostyle ou amphiprostyle ; on trouve parfois des combinaisons de ces trois formes : l'Artémision d'Éleusis avait deux façades in antis ; il yen a d'autres dont rien ne rappelle l'architecture grecque et sa technique : un petit temple de Sélinonte n'a sur sa façade ni colonnes ni antes " ou cornes du bâtiment, mais deux pieds droits encadrant une baie percée dans le mur antérieur qui est parallèle etsemblable à la cloison séparant le vestibule de la neff «fi g. 6793). Cette forme n'est pas hellénique, mais redeviendra à la mode sous l'influence égyptienne des Lagides ; pendant la domination des Ptolémées. on construisit à Santorin un temple à Théa Basileia; il est encore parfaitement conservé1° et n'a aucune colonne extérieure (fig. 67911) 20. Les Hellènes n'auraient point imaginé un tel monument ; pour eux, comme pour tous les historiens de l'art, la caractéristique de l'architecture grecque fut toujours la colonne et l'entablement qu'elle sup pas l'effet d'une mode passagère ni d'un usage invétéré, mais nécessité abso lue : jamais, en Grèce, on n'est parvenu, avant la domination romaine, à bâtir un mur capable à la fois de clore un grand espace et de porter une toiture quelque peu considérable, parce que jamais on n'a su y obtenir une cohésion suffisante des matériaux 22, malgré tous les artifices imaginés 23 et les frais considérables de main-d'oeuvre qui en résultaient 2'.. Les murs du petit temple de Rhamnonte sont en gros appareil polygonal (fig. 5510) ; ils ne s'élèvent que jusqu'à 2 mètres du sol, parce que ce genre primitif de construction s'écroule facilement si on veut lui donner une hauteur trop grande par rapport à la largeur de la base ~'. Toute la partie supérieure du temple était en bois hourdé d'argile crue n'ayant qu'une solidité relative et temporaire. De bonne heure les Athéniens renoncèrent pour les édifices sacrés26 à ce mode de bâtir, qui ne subsista guère que dans le Péloponèse, et ils employèrent les carreaux de pierre bien rectangulaire (7t),(v0ot27), dont se servaient depuis longtemps les Crétois, les Troyens, ainsi que les Éoliens et les Ioniens asiatiques ; seulement, en Attique, on n'employa point de mortier et les carreaux de pierre furent joints à sec. Les murs du temple de la Victoire Aptère sont construits en carreaux de marbre du genre iso8o~ov ; ils ne tiennent que par la pesanteur et les Turcs n'eurent qu'à les démonter pour démolir le temple dont Leake chercha vainement la trace". Bien que le vandalisme fût exécuté à la hâte et sans aucun soin, il a suffi de remettre les pierres en place pour relever l'édifice. Des murs établis ainsi ne peuvent résister à l'énorme poussée des grosses poutres qu'on employait 104 TEM alors pour les toits à versants ; il fallut donc reporter le poids de celles-ci sur des colonnes offrant plus de stabilité, surtout dans les régions où se produisent les tremblements de terre'. Les temples aptères n'ont guère plus d'une vingtaine de mètres carrés 2 ; si on veut de plus vastes édifices, il faut établir dans leur intérieur des lignes de colonnes et enceindre les murs extérieurs d'une colonnade continue, d'un 7rTEatnua. La colonne est une nécessité de l'architecture grecque a ; elle n'est qu'un ornement dans la construction romaine ; Metellus, Mucius et d'autres ajoutèrent des colonnades à d'anciens temples de Rome' ; en Grèce, le ptéroma s'élevait en même temps que les murs du naos 5 ; parfois, on le dressait avant, comme le montre le temple de Ségeste qui a ses architraves et son fronton, alors que les murs du naos ne furent jamais bâtis'. Naos périptères. D'après Vitruve, ce sont des temples ayant « six colonnes à chaque façade antérieure et postérieure et onze de chaque côté, y compris les colonnes d'angles 7 ». On conçoit l'ordonnance hexastyle des façades 8 : les deux colonnes médianes sont vis-à-vis les pieds droits de la porte centrale ; deux autres correspondent aux antes terminant les murs latéraux du naos ; enfin, les deux extrêmes sont chacune dans l'axe de la colonnade des bas-côtés ; pourquoi celle-ci n'a-t-elle que onze colonnes ? Il faut signaler aussi comme disposition ancienne et fort rare les façades à cinq colonnes du temple de Thermos (fig. 6791), disposition justifiée par la présence d'une colonnade centrale intérieure, qui divise la cella en deux longues nefs parallèles. Quoi qu'il en soit, les édifices de ce genre sont fort peu nombreux et on ne trouve guère d'exemple en Grèce que le temple archaïque de Thermos et le temple d'Esculape à Épidaure; celui-ci n'a point d'opisthodome, ce qui le rend conforme au temple de l'Honneur et de la Vertu, cité par Vitruve comme modèle de temple périptère'. Cependant les archéologues s'accordent à donner le nom de périptère à tous les naos entourés d'un portique à un seul rang de colonnes, que la façade soit hexastyle comme l'indique Vitruve, ou pentastyle comme celle de Thermos, ou octastyle comme celle du Parthénon; qu'il y ait 7 colonnes sur chaque côté (T. de Kourno) ou 1'2, (T. (l'Égine, de Sunium) ; 13 (T. d'Assos, de Zeus à Olympie) ; 14 grand T. de Pestum) ; 15 (T. de Thermos et T. de Bassin ; 16 (Iléraion d'Olympie), ou 17 comme au Parthénon et au plus grand temple de Sélinonte. On admet généralement que la forme périptère est la plus ancienne des formes classiques 10; on la retrouve dans l'Iléraion d'Olympie dont le plan date du vine, peut-être même du ix' siècle et dont les matériaux, bien que renouvelés dans leurs éléments 12, conservèrent au temple son primitif aspect. Le soubassement des murs, rOoCTxTY1g, est en pierre jusqu'à la hauteur d'un mètre ; au-dessus s'élevaient des pans de bois ou des assises de briques crues 13. Toute la toiture et l'entablement étaient en bois et reposaient sur les 16 colonnes intérieures 14 et sur les 44 qui sont à l'extérieur. Il est à remarquer que dans cet édifice archaïque, comme dans celui de Thermos, la colonnade périptère est beaucoup plus profonde et que les colonnes sont plus espacées que dans les temples qui furent bâtis en pierres, pendant les vie et v10 siècles, par les Doriens du Péloponèse et de l'Italie méridionale18. Ce sera sous l'influence des écoles d'Asie Mineure qu'on reviendra, en Grèce, aux larges entre-colonnements et qu'on cherchera à obtenir de profonds portiques, d'abord par la double colonnade du naos diptère, ensuite par la seule rangée de colonnes des temples pseudodiptères. Naos diptères. Ils ont huit colonnes de front sur chacune des deux façades antérieure et postérieure et sont entourés d'un double rang de colonnes sur les côtés 11. Vitruve18 cite comme exemple le temple ionique d'Éphèse que Khersiphron de Knosse et son fils Métagènes construisirent dès les premières années du via siècle', et qui fut entièrement détruit 20 en 356 av. J.-C. Naos pseudodiptères. Ils ont également huit colonnes de front, mais les quatre médianes seules correspondent au mur du naos 21; sur chacun des côtés, il n'y a qu'une seule rangée de t5 colonnes ; le portique qu'elles forment a une largeur égale au septième de sa longueur. Ce genre de temple Putt imaginé, d'après Vitruve22, pendant le dernier tiers du me siècle par llermogènes d'Alabanda pour 1'Artémision de Magnésie du Méandre23 ; cependant les archéologues regardent comme pseudodiptère le temple T de Sélinonte 24 construit pendant la seconde moitié du viu, siècle , la colonnade latérale n'est pas de 15, mais de 1.7 colonnes. Temples ronds énonoplères ou périptères, çf. Naos hypèthres. Les deux façades sont octastyles25 ou décastyles2t et ont une porte chacune ; le reste de l'extérieur est semblable à celui des temples diptères. A l'intérieur, se trouve une colonnade formée de deux ordres superposés, coluinnas in altitz.ldine duplices 17 ; elle est aussi éloignée de la muraille que le sont, à l'extérieur, les colonnes du péristyle. Le milieu, sans toit, est à ciel ouvert, medium autem sub diu est sine tecto 28. L'interprétation de ces sept mots donna lieu à de nombreuses hypothèses. Ch. Chipiez traduit medium par « espace intermédiaire » et croit qu'il désigne l'intervalle compris entre le mur du naos et les colonnes de l'ordre intérieur; «la lumière tombe tout d'abord sur... les plafonds qui couvrent les portiques inférieurs; puis, à travers les entre-colonnements des portiques supérieurs, o TEM 103 TEM elle se répand comme par autant de fenêtres dans le naos » Cette hypothèse présente des difficultés de construction que les Grecs n'auraient pu surmonter 2, même à l'époque hellénistique ; il semble donc plus rationnel de conserver à medium le sens de milieu du temple et de revenir aux anciennes théories. Dès le xvie siècle, on admit que le temple hypèlhre avait trois nefs, que les deux latérales étaient couvertes, mais que la médiane restait, sur la plus grande partie de sa longueur, à ciel ouvert comme l'atrium des maisons romaines. On objecta la pluie° et la poussière "; Canina imagina de placer un lanterneau au-dessus de cet espace sine recto; des urnes étrusques en forme de temple ont bien cet appendice (fig. 2511) ; on le retrouve peut-être dans les temples à coupole mais on rie le voit jamais sur les temples dont le toit à deux versants est figuré par les monnaies 3 et les bas-reliefs En fait, l'objection de la pluie ou de la poussière n'a qu'une importance très secondaire10 et ne prend de valeur qu'avec notre conception actuelle d'un édifice clos" ; la décoration intérieure des temples n'était pas plus riche que celle de l'extérieur; les statues du fronton, les bas-reliefs de la frise ou des métopes n'avaient pas besoin de moins de protection que l'image du dieu ; celle-ci pouvait être en bois sculpté, mais l'entablement de l'lléraion d'Olympie l'était également'. Plusieurs temples ne furent jamais couverts 1U ou ne le devinrent qu'après plusieurs siècles et de nombreux remaniements" ; il semble même probable que tous les naos helléniques avec ptéroma extérieur et colonnade intérieure, comme l'Tléraion d'Olympie, le vieux temple de Corinthe, celui d'Aphaia d'Égiue, d'Apollon de Phigalie 15, le Poseidonion de Pestum, le temple T de Sélinonte etc., eurent toujours leur nef médiane à ciel ouvert sur la plus grande partie de sa longueur, et que cette nef formait ainsi une cour intérieure et centrale bordée d'un portique, parfois à double ordre de colonnes superposées ; par cette disposition, le grand temple monumental ressemble moins au mégaron palatin, prototype du temple aptère, qu'à la maison grecque décrite par l'Iliade'', l'Odyssée et les auteurs helléniques (fig. 2499). 40 Distribution intérieure. Les petits naos aptères, comme les temples périptères d'Épidaure, de Suniurn, de Némée, etc., n'ont qu'une seule pièce, le rrlxôç ; elle est couverte, hermétiquement close, et ne communique avec l'extérieur que par une porte donnant sur ile vestibule d'entrée et fermant avec une clef (fig. 6318-6350) que conservait le prêtre _stiBA, p. 12421. Le vestibule, ou pronaos, forme monumentale du 77ooiou,o; et prototype de l'exonarthex byzantin, n'est qu'un lieu de passage ; dans le fond, se trouve la porte du sécos; en avant, s'ouvrent trois baies lx. pour y accéder du dehors. Parfois, à la partie postérieure du temple, in postico, on voyait un autre vestibule, que les archéologues nomment opisthodome ; il est semblable au pronaos mais, le plus souvent, sans communication directe avec le sécos. La statue de la divinité se trouvait dans la partie la plus profonde du ritixdç et dans l'axe même de la porte d'entrée ; peut-être cette salle unique servait-elle de dépôt pour les objets pré cieux, les étoffes, etc. ? Quant aux offrandes en métal commun, aux ex-voto en pierre [DONARIun], on les dressait derrière les grilles de l'opisthodome et du pronaos, oit elles étaient à l'abri des vols, mais non de la pluie et de la poussière. o Nous avons signalé la disposition parô ticulière du temple de Thermos dont l'entrée, précédée d'un vestibule, est formée de deux portes, chacune donnant accès dans la cella divisée en deux nefs par une unique rangée médiane de colonnes (fig. 6791). Les grands temples à double colonnade intérieure ont également un large vestibule ; il est couvert, s'ouvre en avant par trois baies sur le péristyle extérieur et, en arrière, par une seule porte, sur la nef centrale ; celle-ci est limitée, à droite comme à gauche, par un rang de colonnes superposées qui la sépare des nefs latérales ; on croit qu'il y avait des tribunes sur ces bas-côtés 17; peutêtre y en avait-il également aux deux extrémités de la nef majeure" ; l'une, avant les premières colonnes intérieures, aurait été placée au-dessus de l'endroit qui devint plus tard le narthex byzantin ; l'autre, derrière les dernières colonnes intérieures, aurait servi d'abri à la statue de la divinité dans certains temples hypèthres du vie siècle. Quoi qu'il en soit, cette nef majeure était encore à ciel ouvert dans le temple périptère hexastyle de Phigalie construit par Ictinos vers 417, et elle a une colonnade transversale la limitant dans le fond. C'est derrière cette colonnade que se dressait la statue d'Apollon Épikourios. Au Parthénon, l'image d'Athéné était placée en avant de la colonnade transversale, mais le temple était entièrement couvert. Sur plan, cette nef centrale, que borde un portique sur trois de ses perties latérales, qu'entourent souvent sur ses bas-côtés des cases séparées les unes des autres par des cloisons perpendiculaires au mur 19, ressemble plus à la cour des habitations grecques (fig. 2499 B) et à l'ATRIUM des Étrusques et des Latins qu'au mégaron de l'âge héroïque. Après avoir traversé la cour d'une maison ou d'un château, on entrait dans une grande salle rectangulaire dont le plafond était soutenu par quatre colonnes; c'est 14 TEM 106 TEM le mégaron (fig. 2496) ou la pièce bourgeoise qui en tenait lieu (fig. 2999 C); on retrouve cette pièce aux quatre colonnes dans les plus anciens temples, où elle sert de sanctuaire, de choeur; c'est le av1xdç ou «8urov' [ADITUM]. La séparation de ce sécos et de la nef est très apparente dans les plans de l'ancien temple de Corinthe 2 et du temple T de Sélinonte (fig. 6795) 3 ; il se peut que dans d'autres édifices, comme l'Iléraion d'Olympie, cette cloison fût en bois comme le Téu7r),ov des églises orthodoxes. A Phigalie, le sécos est indépendant de la nef ; il a même une porte spéciale ouverte dans le mur latéral de gauche 4. Au Parthénon, on voit encore les traces de cette salle aux quatre colonnes ; seulement elle n'a jamais été employée comme sécos, probablement parce que ce temple était relativement récent et couvert sur toute son étendue. Complètement séparée de la nef par un mur sans porte 6, cette salle ne communiquait avec l'extérieur que par le derrière de l'édifice. d'où son nom de ;i7rtadôop.oç qu'elle porte dans les inventaires [THESAURUS ; l'opisthodome n'était pas une pièce spéciale, mais l'ensemble de toutes les parties, Td7rot 6, qui sont sur le derrière d'un édifice, d'une habitation. C'est dans l'opisthodome des maisons que se trouvaient le Aana o; et la Taaaatou?7Eia (fig. 2499 G', où tissaient les femmes esclaves ; c'est dans l'opisthodome du Parthénon qu'était « l'atelier des vierges n, 7zac8EVJJV 7, admises à broder le manteau d'Athéna. Pour le personnel des temples, cf. SACERDOS, CEE; les offrandes, DOxARIUM ; les biens des temples, BONA TEM ÉTRURIE. Par suite de leur isolement au milieu des peuples longtemps incultes de l'Italie, les Étrusques conservèrent, mieux que les Grecs, la plupart des modes et des procédés en usage vers la fin du second millénaire parmi les habitants de l'Égypte et de l'Asie Mineure. C'est dans les monuments de cette époque et de ces régions de la Méditerranée orientale qu'il faut chercher les origines de la plupart des antiquités primitives de la Toscanes ; les Grecs avaient également emprunté leurs premiers modèles à ces contrées, mais ils les conservèrent peu, parce que leur esprit particulier de recherches amena une évolution d'autant plus rapide des types qu'elle fut encore accélérée, par l'invasion dorienne d'abord, puis, à dater du vie siècle, par la domination des Perses en Ionie. On sait par Vitruve combien les temples helléniques différaient du temple étrusque qui conserva toujours l'aspect barycépliale, large et trapu que devaient avoir les monuments mycéniens et qui caractérise tous les édifices aréostyles construits en bois 10. La facade se développait sur une étendue égale aux cinq sixièmes de la longueur du monument ; cette longueur était divisée en deux parties égales: l'une, antérieure, formait un portique avec double colonnade octastyle portant un fronton ; l'autre, située en arrière et entourée de murs, constituait l'intérieur du naos que l'on partageait en trois cellæ" par deux cloisons longitudinales 12 ; la cella médiane occupant les quatre dixièmes de la largeur totale, alors que chacune des collatérales n'en prenait que les trois dixièmes (fig. 6796)13. L'origine et la cause de cette division du temple en trois salles parallèles furent longtemps cherchées dans les idées religieuses que l'on prêtait aux Étrusques, alors même qu'il n'est nullement prouvé que tous les temples toscans de ce type fussent consacrés à une triade divine i4. Les Grecs connurent également ce plan et ils l'adoptèrent pour des édifices où il ne semble point qu'on ait adoré des divinités auvvaot. Le temple T de Sélinonte (fig. 6795) en offre un exemple '° d'autant plus remarquable qu'on y voit derrière la cella médiane un espace oblong, identique à celui que l'on retrouve dans les temples C de Marzabotto, de Florence, etc. Il se pourrait que le naos de Sélinonte fat l'feuvre d'un architecte toscan ", mais semblable hypothèse ne se peut formuler à propos du petit temple égyptien de Thèbes consacré à la déesse Hathor 17 (fig. 6797) : celui-ci se compose d'une salle hypostyle, d'où l'on pénètre par un petit perron dans un pronaos, sur lequel s'ouvrent trois salles séparées par deux cloisons longitudinales. La salle du milieu servait seule de sécos ; dans les deux collatérales se trouvaient la sacristie et le trésor. Bien que cet édifice ne date que de la seconde moitié du me siècle, le plan est purement égyptien et se reconnaît facilement dans d'autres monuments, moins bien conservés, mais datant de l'époque des Pharaons. Le naos étrusque n'a point de colonnades latérales ; la toiture reposait donc, au moins de trois côtés, sur les murs extérieurs; mais l'agencement des poutres de cette toiture donna lieu à des hypothèses d'autant plus nombreuses que leurs auteurs cherchèrent toujours à concilier le texte de Vitruve 18 avec ce que l'on voit le plus souvent dans l'architecture de l'époque hellénique 19 ; il semble, au contraire, que les Étrusques conservèrent un mode de toiture dont le typo légèrement modifié se retrouve sur un bas-relief du Louvre (fig.1696) dont il existe de nombreuses TEM réplique anciennes même en terre cuit ' Dans les deux mo uments figurés par ces sculptures, on aperçoit, au-dessus du mur, les saillies, traiecturae, que forment les extrémités, mutuli 2, des arbalétriers ou, plus exactement, des chevrons qui en tiennent lieu ; ces chevrons conservent la même section d'équarrissage dans toute leur longueur; ils ne reposent point en partie, comme on le représente toujours depuis le xvie siècle, sur ces poutres horizontales que l'on nomme entraits et dont les extrémités sont visibles dans la construction dorique où elles forment les triglyphes. Il y a là une différence capitale entre les deux modes de charpente. Dans l'un, le plus récent, la poutre oblique vient s'assembler dans la mortaise embrevée de la poutre horizontale, d'où le mutule aplati au-dessus du triglyphe de l'entablement dorique ; dans l'autre, plus ancien, la solive horizontale, ou entrait, bute contre la face postérieure du chevron 3, dont l'extrémité libre fait saillie au dehors et sera représentée, dans l'architecture en pierre de l'époque impériale, par une console, le modillon corinthien. Ces modilIons ne dessinent jamais, dans les monuments romains, une avance aussi prononcée que celle des chevrons de la toiture du temple toscan qui, d'après Vitruve devaient descendre jusqu'au quart supérieur des colonnes et former ces grands auvents que nous connaissons par les urnes étrusques en forme de temple (fig. 2511). On conserve dans les musées de nombreuses plaques en terre cuite peinte qui montrent comment les naos toscans étaient décorés ° ; il y avait non seulement, ainsi que chez les Grecs, des antéfixes, acrotères, cymaises placés sur le toit et le fronton pour les protéger de la pluie, mais encore des revêtements d'architrave b, des chambranles de porte 7, des frises murales 3 [FIGLlxool, p. 113i], etc. RosiE. I . Nomenclature. On a v u à l'article FANUM que les Romains désignaient par ce mot « tout lieu public consacré par les pontifes à une divinité, pour être sa propriété et sa résidences » ; c'est donc l'équivalent du grec hieron ; comme lui, il signifie « le lieu sacré » en général, le sol qui supporte et contient les plantations. constructions, aménagements quelconques destinés au culte '0 ; c'est ainsi que Tite-Live nomme fanum"le sanctuaire de Feronia où se trouvaient un bois sacré, fucus 12, un templum 13, etc. Cependant f'anum ne conserva pas toujours, comme hiéron, son sens général; on s'en servit parfois pour désigner l'édifice même et Vitruve écrit fana aedi/icare 14. Enfin, il semble que, sous l'Empire, ce mot ne s'employait plus à Rome que pour les petites chapelles fondées par des particuliers ou des associations cultuelles d'étrangers 10. Quant aux grands temples TEM publics, à ceux dont la construction couvrait toute 1 supencelt, de leur terri oire sacre, on les appela du nom même de cette construction, aedis, ou parfois encore templum. Aedis, que l'on a rapproché de aestus, aestast0 et de iitç, â8iaç 17 ainsi que du nom de l'Etna'g, aurait d'abord désigné le foyer domestique 19, puis la salle d'honneur, le mégaron où se trouvait ce foyer ; plus tard, ce mot aurait été employé, mais seulement sous la forme plurielle, dans le sens d'habitation20, comme nous disons a rentrer dans ses foyers », ou par analogie avec les termes homériques tin Suaia, ti N.iyaFa. signifiant un château. Cependant, on continua, ainsi que le firent les Grecs pour i.iyxpov, à user du singulier dans le sens de naos 21. Toutefois, pour éviter une confusion pouvant se produire avec un pluriel nécessité par la pluralité, on ajoutal'épithètesacrae. Les chrétiensadoptèrentl'expression et l'appliquèrent au temple de Jérusalem 2d ou à leurs églises, alors que le temple païen devenait pour eux aedis profana 23. L'intérieur de l'aedis sacra est divisé en une ou plusieurs chambres que l'on nomme cella 24, terme dont les archéologues se servent abusivement pour désigner l'édifice entier, alors qu'il n'a que le sens de a-rtxdç et ne s'applique qu'à la pièce où se trouve la statue de la divinité. En général, le nom d'un temple est indiqué par celui de la divinité précédé du mot aedis : in aede Gastoris2o, aede Dianai 2e, Veneris 27. Parfois, on ajoute celui du lieu où est construit le temple : in aede loris in Capitolin" , ou celui d'un personnage : in aede Iovis Mariana 29; aedem Fartunae quam Seiani appellant 30; cette formeci aidant à comprendre le sens de in aede Pompei 'agni 31, où le nom de la divinité n'est plus exprimé. Templum, dont l'étymologie reste obscure 32, est un vocable usé pal' les nombreuses acceptions qu'on lui donna successivement pour traduire Tb 'EFiv, ti€N.o'so , va;., etc. Vitruve l'emploie souvent dans ces différents sens 33 ; mais il ne s'en sert jamais au sujet d'un temple romain pour désigner l'aedis ou la cella intérieure. Un passage de cet auteur semblerait même montrer que ce terme, en architecture religieuse, indiquait seulement l'aire sur laquelle s'élevaient les murs et les colonnes de l'édifice ; la surface supérieure du podium est pour lui le summum templum. De là viendrait l'expression juridique3' aedes templorum, qui ne désigne point «les naos des Hérons, des lieux consacrés aux dieux» , mais « les naos des lieux inaugurés ». L'auguratio ne se confond jamais avec la CONSECRAT10 ; il y a là deux cérémonies distinctes ; l'une accomplie par les augures et, probablement,i,inconnue des Grecs ; l'autre faite ton,)ours par les pontifes, comme l'indique fort bien Servius'. Varron, consulté par Pompée, lui écrivit que templum désignait un lieu constitué par les augures ; que certains édifices, bien que profanes, étaient constitués en •temples, alors que tous les édifices sacrés n étalent pas des temples et que même l'aedis de Vesta 2 n était pas uri temple 3. Cicéron, qui lui aussi tirait vanité de sa science augurale, emploie les expressions templa ffata ` effara templum 5 et dit, en parlant des Rostres, an alto augurato tenaplo ac loto G. Le templum romain est un lieu, mais on ne peut le comparer au hiéron grec, et, 'il est ju'ct de dire que « le lieu de réunion du sénat de Rome éta t oujours un temple»), il faut ajouter que c temple était profane 8 et nullement sacré. II. l'emple ugural ou fulgurai 9. Les anciens Gre s tiraient des présages du vol des oiseaux et du tonnerre, ainsi que des éclairs; les Italiens admirent ces phénomènes comme prémonitoires, mais il en raffinèrent l'étude et paraissent avoir établi certains principes que ne con ni cent point les Ilellènes10. Pour mieux saisir la volonte des dieux, il fallait pour le Romain que le présage se produisit, non par rapport à la position toujours Instable d'une personne, mais dans un point du ciel bien déterminé et scrupuleusement orienté ". Cette règle de nuit absolument nécessaire pour les assemblées ou réunions don les membres se groupaient différemment; c est alors k l'eu de l'assemblée qui était constitué en temple par la fixation de ses quatre points cardinaux. On voit dan' s les récits de l'Iliade et de Tite-Live combien le mode opéra o re des Italiens différait de celui des Grecs '2. Priam et '\um veulent savoir si Jupiter les approuve ; l'un se pl e ~t erses xt , fait une libation et prend conrance et \oy nt un aigle voler à sa droite 13. ;Numa monte à la ci adelle et s'asseoit sur une pierre face au midi un augu c, la tête voilée, tenant dans sa droite le LI us enveloppe d'un regard Rome et sa campagne, invoqu es dieux et, de l'orient à l'occident, détermine e r ions en d sant que celles de droite sont au midi, qu c 11es di, gauche sont au nord ; puis, aussi loin que sa vue o tait tlesigne une limite. Mors, prenant son lztuu dan la ain gauche et posant sa droite sur la tet de Nu a 1 nvoque Jupiter et lui demande de faire ppar t e dans es limites qu'il vient de fixer, un signe mandes e d ap rohation 1t. Voilà ce que nous savons de ce ain s r 1 pie augural ; le reste n'est que contro ti ses r airiens à propos de la technique opé rat r ir n distingue le temple céleste du temple terrestre16. Le premier est formé par la voûtte du ciel que l'augure, se plaçant face au midi, l'orient a sa gauche, l'occident à sa droite, divise en deux plans verticaux se coupant à angle droit et formant quatre secteurs sphériques égaux16, quatre régions [AUGURES, p. 554, HARUSPICES, p. 18 sq. ; DIVINATiO, p. 295]. Les auteurs décrivent deux méthodes pour le tracé de ces lignes. Les régions antica, postica, sinistra et dextra ne peuvent être situées au midi, au nord, à l'orient et à l'occident du demandeur que si les lignes formées avec le lituus sont diagonales et dessinent le sigle x du decussis, ainsi que l'a montré Abeken 17. Cependant les Romains ayant nommé ces deux lignes cardo et decumanus, les géomètres firent remarquer que la raison s'opposait a ce qu'un cardo fût incliné sur le méridien terrestre et que. cardo et méridien devaient se confondre et avoir même direction dans l'espace'$. Les savants admirent cet argument ; mais, au lieu de chercher d'autres noms à ces lignes , ils préférèrent en redresser la direction et les tracer en -as de sorte que, pou r Pline par exemple 19, la première région s'étend du nord au' levant équinoxial et devient par conséquent nord-est; la deuxième, de ce levant au midi et se trouve au sud est ; la troisième, du sud au couchant d'équinoxe, est-sudouest et la dernière, de l'ouest au nord, occupe tout le nord-ouest 20. Les points cardinaux sont indiques par les extrémités du cardo et du decumanus et ne forment plus des régions, regiones L7, spalia 22, parles23 ; celles-ci ne peuvent plus être désignées par un seul nom, antica, postica, sinistra, dextra ; il fallut leur en donner deux et l'on eut une gauche-antérieure et une gauche-postérieure, comme on avait une droite-antérieure et une droite-postérieure 2`. Pline chercha à démontrer que cette nomenclature dérive du système étrusque 20. Rappelons qu'en Ftrurie on ne divisait pas la voûte céleste par 1, mais par le carré de ce nombre et qu'on obtenait ainsi 16 régions 26 qui, d'après le témoignage d'un Car thaginois de l'époque vandale ou byzantine, auraient éte le séjour d'un certain nombre de divinités 21; il est robable que ce fut la croyance ancienne 28, mais la plupart des noms qu'il indique, les mansions et les sorts d it il parle, semblent appartenir à l'astrologie orientale 29. Ces opérations et ces lignes dans l'espace resteraient virtuelles si on ne les reproduisait sur le terrain et, si on n'en consignait le résultat sur une petite plaque que l'on conservait là même où s'était placé l'augure3' Le templum terrestre n'est plus une calotte sphérique mais un carré", inscrit dans un cercle concentrique à TEM -109 TEM 1 horizon yensible ; les diagonales qui aboutissent aux quatre coins du carré, ou les axes perpendiculaires aux côtés, sont la trace des lignes décrites en l'air avec le lituus; leur intersection doit se faire à l'endroit où se tenait l'opérateur. Puis on limite le lieu, constiluere fines' ; une ancienne formule 2 montre, ainsi que le récit précité de Tite-Live 3, que cette opération était moins que rigoureusement conduite et qu'elle se faisait à vue de pays, voire même à perte de vue tuendo d où l'origine même du mot templum d'après Varron ; le principal était d'employer une formule, conceptis verbis ° [INAuGCItATIO, p. 435 b], qui n'était pas toujours la même. Dans celle employée in A rce, un mot fautif revient trois fois ; Turnèbe l'a corrigé en tescum alors qu'on aurait pu conserver tectuyn qui est dans certains manuscrits' et se trouve conforme à un passage d'Isidore de Séville a. On appelait templa minora des cabanes en planches ou des tentes n'ayant qu'une seule ouverture par laquelle, le matin entre minuit et midi, des observateurs contem . niaient le ciel pour y saisir les augures se produisant illico 10, ex lemplo 71, c'est-à-dire immédiatement après que le temple céleste avait été constitué 12. Dans l'auspication militaire, c'est la tente du chef, TABERNACULuM .Iucis, qui servait de templum minus ; on la nommait alors augurale13. !t, llilani''` a décrit, comme représentant un petit templum augural, une ligure géométrique tracée sur la surface plane d'un monument étrusque. Cette ligure a la forme d'un fer à cheval ; au centre, un petit rond d'où partent six droites divergentes ; les deux premières se dirigent vers les extrémités de la corde qui sous-tend l'arc du fer à cheval et limitent assez bien une regio antica ; deux autres lignes, presque dans le prolongement des premières, formeraient la postica ; il y aurait deux sinistrae et deux dextrae n ; M. Deecke et Thulin" croient que ce sont des régions hépatiques àl'usage d'un jecorarius, fig. 3713. III. Temples primitifs. Les cou rnencements de Rome ressemblent à ceux de toutes les colonies grecques (Lite fondèrent les États dont la constitution n'avait pas été m dlfiée par l'invasion dorienne. Un bâtard de famille ro ale devient roi de la ville neuve et grand prêtre du cuit commun ; à sa mort, on lui aurait rendu les mêmes honneurs héroïques qu'à un â?z-llY€-r,,18. Son successeur se bâtit un palais royal, Regia13, donton conserva pieusement toutes les pièces affectées au culte royal. L atrium serait resté consacré à Vesta ; un sacramin serait resté le reliquaire des armes du dieu paternel [MARS, p. 16151; un autre aurait été transformé en temple de ores Consiva où seuls le sacerdos publicus et les vestales pouvaient pénétrer. Li sujets forment une confédération de gentes divis es en tribus et curies gouvernées par des patriciens chacune de ces divisions, comme en Grèce, conserve son culte spécial ; elle a ses dieux particuliers ou ses génies ; elle se réunit pour offrir des sacrifices et participer à des repas sacrés que subventionne l'État °. Avant le partage des terres, on avait réservé les téméno 1 des dieux pour assurer les dépenses de ces différents cultes. La ressemblance que l'on trouve entre les inst tutions religieuses primitives de la Grèce et du Lati i provient-elle d'une parenté ethnique ou, comme le p tend Denys 22, de ce que Romulus aurait consulté ce qu y avait de plus saint et de plus universellement adn is dans la religion grecque ? On peut imposer par la pe suasion ou la force une constitution, mais on ne con\ertit.pas un pays à une religion, dont le caractère prop est l'indépendance absolue des différents cultes de la famille, de la phratrie ou curie, de la tribu, de la gel s ou 7évo;. On ne peut dire que la religion latine soit un copie de celle des Grecs ; mais toutes deux sont parentes et divinisèrent les mêmes phénomènes de la nature, ainsi qu'un grand nombre d'abstractions. Tullus IIostilius voue deux fana à PALLOR et à PAVOT? un demi-siècle après, les eupatrides élevaient à Athè les deux autels à la Violence et à l'Insolence 23. Les mythes sont aussi nombreux en Italie qu'en Grèce et l'Énéide, comme l'Odyssée, puise aux deux sources. L'ancienne théologie romaine est seulement plus morale, on y trouve moins d'histoires orientales2t, et Denys la proférait à celle de ses compatriotes 2'. On a cru, même chez les anciens 26, qu'un des caractères de la religion primitive des llomains fut l'absence, jusqu'à l'avènement d s Tarquins, de toute peinture ou sculpture représentant les dieux. Cela ne proviendrait-il pas de ce que le culte célébré par le roi dans sa Ilegia n'avait besoin que d'un autel, comme celui que les zat),eï, célébraient dans leur mégaron .' Les plus anciennes idoles retrouvées sous le dallage noir du forum sont de petits Apollons grecs du Vie siècle"; c'est à cette époque que la constitution romaine fut modifiée; que les Tarquins, à l'exemple de leurs contemporains, les tyrans des cités grecques, donnent un culte public à ceux qui n'en avaient pas28, organisent des fêtes populaires religieuses, des processions où le roi parait couvert des insignes de Jupiter" construisent de grands temples ouverts à tous les citoyen' qui pouvaient venir adorer des statues. Ce fut à des artistes toscans que s'adressèrent les Tarquins ; le modeleur Vulca fut appelé de Véies 30 et exécuta la statue d Jupiter, dont on repeignait la figure au minium pour les jours de fêtes. Vulca fit encore le quadrige formant l'acrotère centrale du Capitole n. Ce temple servit de modèle et resta le type des édifices sacrés. Du reste tout demeura toscan dans les temples, au dire de Var Ton 32, jusqu'à la construction du temple de Cérès don la décoration fut confiée à deux Grecs, Démophile e Gorgase 33, à la fois peintres et modeleurs en terre. C'est TEi1I 910 TEM toujours à la décoration que se bornera l'influence grecque et elle ne parviendra pas à modifier complètement l'évolution de l'art romain. Quel que soit le talent des Grecs ou des Asiatiques, ils devront toujours, comme Apollodore de Dansas, sacrifier leur propre goût pour satisfaire celui de leur opulente clientèle. IV. Capitoles. On a vu à l'art. CAPITOLIUU l'histoire de ce temple que fondèrent les Tarquins et dont le plan primitif, que la piété fit toujours conserver', eut une influence considérable sur l'architecture religieuse des Romains et des chrétiens. Les ruines se trouvent sur le sommet occidental du mont Capitoline, en face du sommet oriental qui portait l'Arx et le temple de Junon Moneta. Le Capitole était orienté vers le S.-S.-E. devant un vaste espace libre, area capitolina 3. On l'avait construit sur un podium large de 52 m. 5 et haut de 4 à 5 mètres, €Ici r,r.r,aïôoç ûvga,i)c', qui constituait à vrai dire le templum. Ce soubassement est formé de six murs parallèles construits en tuf; les deux latéraux ont 5 m. G d'épaisseur et les médians 4 m. 2; semblable disposition se trouve à Pergame sous le temple de Trajan et même sous l'autel de Zeus ° ; mais on sait par Varron qu'il y eut toujours des FAvlssx sous le Capitole et qu'après l'incendie du G juillet 83 av. J.-C. on n'avait pu baisser le terrain devant ce monument ni en surélever 1a base, à cause de ces cryptes servant de Trésors 7. Sur toute la longueur de l'extrémité postérieure du soubassement s'élevait un mur dont l'importance est extrême au point de vue de l'art, parce qu'il devint l'origine d'un plan particulier de temples que l'on voyait à Constantine que l'on trouve bien conservé à Vienne 9 et d'où sortiront ces églises 10 que l'on nomme basiliques en T. L'aedis, ou mieux les aedes 11 du Capitole ne s'appuyaient que sur les trois cinquièmes médians de ce mur postérieur et n'occupaient que les douze trente-cinquièmes du templum ou surface du soubassement. Elles semblaient extérieurement ne faire qu'un seul édifice, n'ayant qu'un toit et un fronton12 ; mais, intérieurement, le monument était divisé dans toute sa longueur, pardeux mursderefend13, en trois cellae, ar,xoi 7rxPzAarnot'`, ayantchacune sa porte d'entrée. Était-ce par suite d'une ancienne croyance étrusque ou d'une association politique de cultes comme à l'Érechthéion' d'A thènes ? Quoi qu'il en soit, cette coutume fut maintenue sous des formes diverses dans tous les autres capitoles de l'empire, et encore aujourd'hui nos églises sont divisées en trois nefs au fond desquelles se trouvent le chœur et ses deux chapelles collatérales ; les trois portes de la façade des cathédrales ont également la même origine, ainsi que le porche hypostyle qui se trouve dans tous les monuments antérieurs au mie siècle". Le Capitole avait trois portiques, porticus appositas aedibus16 : deux latéraux, composés d'un alignement de quatre colonnes forma t, avec le pilastre engagé à l'extrémité du mur postérie r, quatre entre-colonnements. Dans le dernier Capitole, les olonnes mesurent 2 mètres de diamètre à la base, l'entre-colonnement est de 9 m. 20, de sorte que les architraves avaient une portée libre de 7 mètres. En avant des cellae et de leurs colonnades latérales se trouvait le troisième portique formant porche; il était hexastyle ' (fig. 1148) avec trois rangs en profondeur ; par suite de la grandeur du quinconce, le milieu du telnplum,le decussis, se trouvait être sur le seuil de la cella majeure dédiée à Jupiter 18. A Pompéi", le Capitole rappelle moins celui de Rome que le temple T de Sélinonte, bien qu'il n'y ait ni opistho= dome hypostyle, ni colonnade périptère et que la largeur de l'édifice soit proportionnellement plus considérable. L'intérieur est divisé en trois nefs par deux rangs de huit colonnes ioniques, portant des tribunes et un second ordre de colonnes corinthiennes. Dans le fond de la nef majeure, quatre petites cloisons délimitent les trois cellae de la triade capitoline et un mur transversal les sépare du posticum, où étaient deux pièces servant de sacrariurn et un escalier d'accès pour les tribunes. La façade n'a point de pronaos comme les temples grecs, bien qu'on remarque une légère saillie des murs latéraux du naos ; par contre, il y a un porche hexastyle se rattachant à l'édifice par deux rangs latéraux de quatre colonnes en comptant celles des angles. On montait à ce porche par un escalier de quinze marches et deux paliers affectant une forme spéciale20. Le podium, haut de 3 mètres, recouvre une crypte à trois nefs dans laquelle on entre par une petite porte du côté oriental. Bien que de la même époque que celui de Pompéi, le Capitole de Brescia, dédié en l'an 72 ap. J.-C., conserve un aspect plus latin ; les trois cellae tiennent toute la longueur de l'édifice et ont chacune leur porte, s'ouvrant sous un porche formant façade et se développant en perron devant la nef majeure. Cette division en trois sanctuaires s'est particulièrement conservée en Afrique où la plupart des centres habités21 consacrèrent un capitole des Augustes" à Jupiter O.M., à Junon Reine et à Minerve Auguste21. Ces trois divinités ont même à Sbeitla trois édifices distincts, ayant chacun leur toiture et leur fronton26, bien que ne constituant qu'un même capitole; il semble qu'il en fut de même à ConstantineL5, mais ce sont là des exceptions rappelant l'antique coutume que signale Vitruve. D'ordinaire, les divinités capitolines n'ont qu'un seul naos divisé en trois nefs se terminant au chevet par trois chapelles qui, de même que dans nos églises rurales, se réduisent à trois niches. A Dougga, la niche centrale, le choeur, est demi-circulaire ; les deux collatérales, plus petites, sont rectangulaires28. V. Temples de l'époque classique. -Les Romains TEM 117 TE14I connurent l'architecture grecque et l'admirèrent ; ils lui empruntèrent peut-être plus qu'à celles des autres peuples qu'ils vainquirent; adoptèrent ses entablements, mais comme motifs de décoration, ornamenta' , et non comme modes de construction. Parfois, on essaya de bâtir à Rome des temples dans le genre hellénique; Vitruve cite celui de Castor in circo Flalninio2, qui aurait été la copie des naos consacrés à Minerve sur l'acropole d'Athènes et sur le cap Sunium. On peut ajouter le temple de Vénus et Rome, réminiscence du naos grec avec pronaos, opisthodome, ptéroma, mais l'on s'autorisa des critiques d'Apollodore pour considérer cet édifice comme une conception bizarre d'Hadrien ; ce pastiche grécoromain différait trop de hardis des Latins. Ce fut une des erreurs de Vignole de croire que les temples romains ressemblaient aux temples des Grecs, même à ceux qui furent construits en Orient après la conquête romaine ; et si l'erreur se maintient, c'est parce qu'en adoptant sa terminologie des cinq ordres on prit l'habitude de donner les mêmes noms à des choses dissemblables. 1° L'emplacement de l'aedis est choisi de telle sorte que le monument, s',il est àla campagne, orne le paysage ; s'il est dans la ville, contribue à la majesté décorative ou soit disposé pour la commodité et l'avantage des citoyens Les capitoles domineront la cité et ses murailles ; le temple de Mercure sera sur le forum ; ceux d'Isis et de Sérapis, dans le marché; d'Apollon et de Bacchus, près du théâtre ; ceux de Vénus, dans le faubourg, ainsi que ceux de Vulcain, de Mars, de Cérès °. 2° L'orientation est abandonnée aux circonstances locales. On doit préférer le couchante ; mais, s'autorisant de ce que les hgyptiens construisaient leurs sanctuaires sur les bords du Nil, on mettra les temples perpendiculaires aux fleuves, aux routes ou dans l'axe des promenades et des places publiques ; la règle est que les pas sants puissent facilement saluer l'autel et la statue. 3° L'implantation se fait sur une haute plate-forme à parois verticales sur trois des côtés, SUGGESTUS ', servant maintes fois de Ta1BUVAL et qu'on nomme podium ; les Grecs l'appellent xEyim' comme ces petites bases dont les trois marches ou degrés architecturaux s'allongent sur les quatre faces de leurs monuments. Le podium n'a de marches que sur sa partie antérieure (fig. 409), et l'escalier, parfois monumental (fig. 4102), souvent coupé de paliers ou divisé par des piédestaux 10 des stylobates, aboutit d'ordinaire à un perron et se compose d'au moins neuf à quinze marches. Vitruve insiste pour que le nombre de celles-ci soit toujours impair, afin qu'en commentant à monter du pied droit ", on pose le même pied en arrivant in summo templo12, c'est-à-dire sur l'aire du podium. Que si le relief du sol ne permet pas d'établir une plate-forme aussi grande que l'exigerait le templum, on la prolongera sur les côtés de l'escalier par des stylobates ; parfois même ceux-ci sont placés au milieu des marches, comme on le voit à Assise''. 4° La crypte, signalée une fois en Grèce à l'époque des Antonins 14, existe sous la plupart des temples, dans le podium ; on connaît très bien celles qui servaient, pour le trésor public ou les dépôts privés, dans les temples de Castor'', de Saturne1G, de la Concorde" ; parfois ces cryptes s'étendaient bien au delà de l'aire des temples etformaient un lacis de souterrains (tig.2901). 5° Le plan de l'aedis est quelconque : carré, barlong, rond, rotunda [Tnoeos). Ce qui importe, ce n'est pas la forme qu'on donne aux bâtiments, mais que le decussis des diagonales ou des perpendiculaires du templum se trouve sur le seuil de la cella. Le Capitole de Brescia et le temple de la Concorde, à Rome, sont des rectangles étendus en largeur et représentant la moitié supérieure d'un carré dont la moitié inférieure est occupée par le porche et le perron. La cella du temple de Vienne '° a la forme d'un T suspendu dans le haut d'un rectangle hypostyle ; la barre horizontale du T ferme le haut du rectangle et rappelle le long mur du posticuin au Capitole ; la branche verticale se termine au decussis des diagonales du rectangle, là où se trouvait la porte. 6° Le porche latin, inconnu des Grecs, remplace le pronaos, mais il n'est pas établi comme celui-ci entre les murs prolongés du naos. Ces murs latéraux ne forment saillie que dans le temple de ]Rome et Vénus imaginé par Iladrien19 ; la saillie est à peine indiquée dans un temple d'Esculape à Spalato ; elle reste rudimentaire dans le Capitole de Pompéi, premier monument que construisirent les colons de Sylla; déjà les Siciliens négligèrent de reproduire ce caractère si typique de l'architecture hellénique et plus d'un de leurs naos est clos en avant par un mur percé d'une porte 2p. Ce mur antérieur ou quatrième mur du temple est une des marques de la construction italienneL1. D'après Vitruve, le porche est d'origine étrusque et doit occuper ou indiquer toute la moitié inférieure du rectangle constitué en templum. Dans certains monuments asiatiques, ott ce porche n'aurait pu se combiner avec le pronaos ou le ptéroma, le naos est placé dans la partie supérieure d'une aire bordée de portiques ; c'est sur le seuil du Trajaneum de Pergame qu'est le decussis de l'esplanade entière. En Europe, le porche est souvent limité à la largeur de la nef majeure ou ressemble même à un tambour placé devant la porte ; parfois, il semble ne reposer que sur le perron, comme au temple de la Concorde. Ce n'est pas interprétation décadente de la belle façade hellénique ; ce sont deux types distincts nés de cultes et de rituels particuliers. Il en fut de même pour le ptéroma ; les Italiens ne l'employèrent que dans leurs pastiches de philhellènes ; les portiques latéraux du Capitole qui furent classiques étaient nécessités par le TEM -112 -TEM besoin de marquer les côtés du telnplum, mais on n'en trouve plus dans la regio postica limitée par un long mur. 7° La forme pseudo-périptère est propre à l'archiLecture italienne. Vitruve, qui la mentionne, n'en parle point parmi les formes décrites par Hermogènes 1. Les archéologues l'ont retrouvée en Sicile 2, mais dans un édifice oit « tout est matière à surprise`. » En fait, ce fut la forme de choix qu'employèrent les Romains ; elle exige une connaissance profonde de la construction des murs ; il faut savoir distinguer les parties qui ne doivent qu'enclore l'édifice, et les rendre aussi légères que possible, d'avec celles qui doivent porter la toiture et ont besoin d'être renforcées par des contre-forts, des pilastres ou des colonnes engagées. L'un des meilleurs spécimens de ces temples pseudo-périptères est la Maison Carrée (fig. 6799), que ses harmonieuses proportions ont fait considérer par les uns comme l'oeuvre d'une école grecque de Marseille°, alors que d'autres l'attribuent à ces l+'.gyptoGrecs transportés pour coloniser vîmes. Un autre exemple très Fortune à Pompéi. remarquable se voit à Pompéi dans le temple de la Fortune Auguste «fig. 6798) : trois pilastres renforcent, à l'extérieur, le milieu de chacun des murs latéraux; à l'intérieur, ceux-ci sont creusés de deux niches' qu'ornaient des statues. Ce petit édifice, construit aux frais et sur le terrain d'un M. Tullius' pendant le premier lustre de notre ère°, est un spécimen rudimentaire de temple en T ; le posticum, plus large que la nef, déborde de quelques décimètres sur les côtés; contre le mur postérieur du templum s'adosse une abside que décorait une chapelle en forme d'édicule, dont l'entablement10 était soutenu en arrière par deux pilastres et, en avant, par deux petites colonnes encadrant la statue de la Fortune Auguste placée sur un piédestal. On notera que l'escalier du podium est, comme celui du Capitole de la même ville, divisé par un palier sur lequel on voit encore l'autel" ; c'est en avant de l'autel qu'était placée la grille en fer de clôture 12. 8° Le fronton latin a une pente très accentuée, de sorte que, pour une même longueur, son sommet est d'un tiers plus élevé que dans les naos helléniques ; cette différence ne résulte pas d'une forte inclinaison de la toiture puisque le fronton romain n'en épouse pas toujours la forme ; ce n'est qu'un motif de décoration, dont on brise les rampants'", dont on retrousse même l'architrave en forme d'arc, comme le montrent de nombreuses médailles (fig. 61189). 9° Le toit à deux versants des Grecs ne convenait, avec sa charpente compliquée, qu'à des édifices de peu de largeur ou à des salle hypostyles; les Romains le remplacèrent par des voûtes en maçonnerie, tout en conservant le fronton triangulaire et la colonnade qui le porte. On connaît la coupole qu'Iladrien plaça sur le Panthéon d'Agrippa14 ; le berceau de pierres que ce même empereur fit placer sur le naos grec qu'il consacra à Rome et Vénus n'existe plus qu'en parti° (fig. 'h322), mais on peut étudier la technique et l'effet de ce mode de toiture dans le temple de Nema usus à Nîmestf. 10° La cella n'occupe souvent qu'une faible partie de l'intérieur d'une aedis. On a vu que le Capitole était divisé en trois eellae indépendantes ; ce fut la conséquence ou peut-être la cause de cette défense, que maintenaient les pontifes de dédier une seule cella à deux divinités. Le temple de Castor (et de Pollux) semble être une exception". Hadrien fut obligé de diviser son naos grec par une cloison transversale dessinant deux absides adossées, de sorte que les deux colossales statues de Ronéo aeterna et de Venus feli,x «étaient assises dos à dos '9. » Vitruve ne cesse de redire que ce qui importe dans la construction d'un temple, c'est de le disposer en vue du culte et des cérémonies qu'on doit y faire 20. TEM -113 --TEM Quelle que soit la différence pouvant exister entre les divers cultes adoptés par les Romains, elle est moins considérable que celle qui sépare les cultes de l'Italie de ceux que l'on pratiquait en Grèce. °`° V'I. Temples étrangers. On n'a pas à étudier ici les temples de tous les peuples soumis aux Romains ni à chercher comment, dans les diverses provinces, les architectes surent tirer parti des matériaux locaux et de l'habileté professionnelle des constructeurs indigènes pour bâtir des sanctuaires adaptés aux différents cultes nationaux. Si nous ne parlons ni des temples de la Bretagne ni de ceux que les Gaulois élevèrent au Puyde-Dôme 2, à Mise, ou de ceux que les Libyo-Phéniciens et les Maures construisirent en Afrique 3, il nous faut cependant mentionner les temples de l'Égypte et de la Syrie, à cause des influences religieuses et artistiques que ces deux contrées exercèrent jusque dans Rome. On a déjà montré, à propos de la déesse Isis [§ VIT, p. 583 et fig. 4106], la forme spéciale qu'avait l'lsium pompéien au siècle d'Auguste 4. A Borne, pendant l'époque d'Hadrien, fut construit un autre temple d'Isis, non plus en briques, mais en « granit apporté d'Égypte pierre à pierre»). De même que dans tous les sanctuaires de la vallée du Nil, dont Strabon nous a laissé une description schématique 6, il y avait des pylônes, des obélisques et une « avenue monumentale bordée de cynocéphales et de sphinx 7 ». En même temps que les matériaux, il avait fallu faire venir des ouvriers pour les mettre en oeuvre s ; la tentative ne semble pas avoir été renouvelée et l'art de travailler le porphyre et autres roches cristallines ne se développa jamais à Rome autant que chez les Alexandrins et les Byzantins. Le sanctuaire syrien pouvait s'imiter sans autres matériaux que le calcaire. Les trois temples superposés du Janicule qui furent successivement consacrés à la SY111A DEA ont déjà été décrits" ; l'L'iiogaballiuni a été cité à propos du dieu d'Émèse [ELAG ABALus] ; peut-être fautil ajouter le Templam Solis 10, élevé, en 274, au Champ de Mars, par Aurélien, soit que ce monument fût orné des zvxGiip.a7z rapportés de Palmyre 1t, soit qu'il « rappelât par son plan la disposition du temple de Baalbek 12,). La plupart des sanctuaires syriens ont une disposition IX. spéciale qui n'est ni grecque ni romaine; ils sont distribués en vue d'un culte sémitique et leurs principales caractéristiques sont : 1° Une très forte enceinte de murailles fermant complètement le téménos et protégeant les richesses qui y sont entassées. A Palmyre, le mur «aencore par endroits 21 m. de hauteur 13 » et ses angles N.-O. et S.-E. simulent des tours carrées; à Baalbek, l'enceinte a pour soubassement, dans une zone dangereuse, trois pierres nommées trilithon, qui ont lt m. de hauteur, et 18 m. 5, 19 m. 3 et 19 m. 8 de longueur respective 14. 2° Des parvis ou cloîtres entourés de portiques; l'un est extérieur au hiéron, au lieu sacré proprement dit, et répondait au parvis hiérosolymite des Gentils ; c'était moins une area qu'un 77soiTdÀlov habité par les prêtres et leurs serviteurs 16 ; celui du temple du Soleil à Palmyre est carré et « n'a pas moins de 227 mètres de côté 16 » ; ses quatre murs sont orientés selon les points cardinaux, l'entrée étant à l'ouest; mais le temple ayant son grand axe sur le méridien nord-sud, sa porte, naturellement en ligne avec celle du péribole, ne se trouve pas sur sa grande façade prostyle méridionale ; elle est sur le long côté occidental, « non pas au milieu de la muraille, mais à plusieurs mètres sur la droite, vers le nord 17 ». D'autres parvis, également bordés de portiques, se trouvaient à l'intérieur même du temple. A Jérusalem, après avoir franchi le parvis des Gentils, on traversait le parvis des femmes avant d'entrer dans le parvis d'lsrael ; à Baalbek, quand on est dans la cour de l'Acropole, il faut gravir un escalier d'une vingtaine de marches, passer par l'une des trois portes des propylées, puis traverser la cour hexagonale « de 60 mètres de diamètre i8 », avant d'entrer dans la grand'cour intérieure sur laquelle donne la façade du naos13. Dans cette cour, dont le prototype esL peut-être antérieur aux monuments sacrés de la Perse 20, et dont l'analogue formera le harem des grandes mosquées asiatiques, on voyait souvent des piscines, des bassins sacrés où les fidèles jetaient leurs offrandes 21. 30 Le naos est prostyle et périptère 21, mais il ne semble pas qu'on ait placé des colonnes entre les antes du pronaos bien que l'espace fût considérable" ; le temple de Diane,àPalmyre24, fort bien conservé, n'en apas(fig.6800). TEM -1144TEM Tout l'édifice est exhaussé sur une haute plate-forme ; l'escalier par lequel on monte au temple du Soleil, à Baalbek, forme deux paliers et un perron ; celui du temple de Jupiter (fig. 6801) semble avoir eu une trentaine de marches. 4° L'intérieur du naos est divisé en trois parties : le vestibule ou pronaos, qu'on appelait ullam à Jérusalem ; la grande salle ou hé/cal 2 ; puis, au fond de l'édifice, le chœur ou saint des saints, débir 3, où se trouvait l'emblème de la divinité ; c'est la partie du temple que Lucien nomme Ox.?,ap.oç 4, par allusion sans doute à ces mariages mystiques dont il est parlé à propos du dieu Elagabal d'Émèse [ELAGABALUS]. Ce débir n'est jamais de plain-pied avec le reste de l'édifice ; à Baalbek, dans le temple de Jupiter, il est précédé d'un perron et de dix-huit marches que divisent deux paliers. 5° La construction, surtout dans la Syrie du nord et du centre, où les bois et les argiles plastiques font défaut, est exclusivement lapidaire; l'ornementation est sculptée dans la matière constructive, généralement formée de blocs considérables ; dans le petit temple de Baalbek, il y a, près de la porte, un escalier dont seize marches sont taillées dans la même pierre. La résistance des calcaires employés est assez grande pour qu'on ait pu faire des poutres lapidaires d'une portée de près de 7 mètres. 6° La couverture du temple formait une voûte ; à Baalbek, le temple du Soleil, d'une largeur de 9.3 mètres, était recouvert d'un berceau en pierre de taille ; le temple circulaire 6, d'une coupole. Les matériaux ne sont pas en en corbellement, comme dans les trésors grecs, mais clavés. 7° La toiture des monuments oblongs suivait la l'orme du fronton et constituait deux versants, comme l'indiquent les monnaies impériales de Syrie «fig. 6801). 8° Les ordres sont l'ionique, qu'on trouve encore à Palmyre', et le corinthien, qui est très usité. Le feuillage des chapiteaux était en bronze, parfois doré'. La plupart des colonnes de Palmyre portent au tiers inférieur de la hauteur des consoles simples ou doubles, sur lesquelles se dressait une statue honorifique'. 9° La décoration est toujours d'une prodigalité inoule et concourt à atténuer, dans ces édifices colossaux, l'impression du démesuré. La plupart de ces murs, immenses dans leur longueur et leur hauteur, sont ornés de colonnes engagées qui encadrent deux étages de niches ; celles d'en bas sont à sommet cintré ; les autres à fronton triangulaire 10. A Palmyre, la pierre, naturellement jaune, était couverte d'un stuc coloré en rouge, jaune, vert ou bleu turquoise l'. 10° Le style est celui de l'école d'Antioche ; il dérive de l'école de Mausole qui servit de modèle à Vitruve " et aux architectes d'Alexandrie et de Pergame. L'école alexandrine semble n'avoir donné à la Grèce que le petit temple de Santorin, dédié à la Mère des Dieux, à l'Italie, que quelques édifices du culte d'Isis. L'école des Attalides produisit des portiques, encouragea la statuaire monumentale et parait n'avoir voulu travailler que le marbre. Seule, l'école d'Antioche eut un développement considérable ; elle sut profiter des procédés indigènes, combiner les` formes grecques et orientales, créer de nouveaux types de construction. Alors que la Grèce appauvrie et incrédule transformait en musées d'art les plus saints de ses hiérons ", les Syriens, enrichis par le commerce de transit, étaient restés dévots et continuèrent à bâtir de vastes sanctuaires où se développait la science des constructeurs. Le plus habile ingénieur et le meilleur architecte que rencontra Hadrien était de Damas. La splendeur de l'école d'Antioche continua jusqu'à la fin de l'Empire et l'art byzantin ne fut qu'une de ses créations. II. En charpenterie, poutre de la toiture" [TECTDM]. Smilax DomGNy. TEN 115 TEN