Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

COTTABUS

les matières sèches et pour les liquides. Chez les Grecs elle est équivalente à la moitié du ï.atrlc, et chez les Romains à la moitié du sEXTARIUS. En latin elle est plus souvent exprimée par le mot HEMINA, auquel nous renvoyons pour les textes et les monuments relatifs à cette mesure. En grec, le mot xoré)co, et non xd-ru),oc, est seul employé pour la désigner'. En latin, on trouve des orthographes très diverses : cotyla et cotyle 2, cotula et cotila3, cotilla et cotille4. II. Vase à boire et à puiser ou à verser. Dans ce sens, on trouve indifféremment en grec xétu),oç et xoni),r 5. Les deux formes sont employées dans les poésies homériques 6 qui le représentent comme un vase à boire de capacité médiocre et en usage chez les pauvres gens. Il était en argile 7, et en Attique fait avec l'argile du cap Kolias 8, si réputée pour la céramique de cette région. Nous savons par les inscriptions qu'on en faisait aussi en métal et que des cotyles d'argent figuraient au nombre des offrandes déposées dans les temples 9. On en faisait usage dans tous les pays grecs, chez les Etoliens et chez les Ioniens 10, à Sicyone et à Tarente "Al était très employé dans les repas et dans les banquets pour boire le vin pur 12 ; Eratosthène appelle les cotyles « les plus beaux de tous les vases et les plus commodes pour boire 13. n De là le proverbe connu : « Il y a loin entre la coupe et les lèvres, n oit le mot coupe est exprimé en grec par xozu)s i". Mais il avait aussi sa place dans le culte religieux; c'était un vase de sacrifice, et le prêtre le prenait pour faire des libations de vin i6. Pamphilos et Pollux s'accordent même à dire que ce genre de vase était en particulier celui de Bacchus 16, et nous verrons plus loin qu'il offre, en effet, une analogie très grande avec le CANTHARUS qu'on voit ordinairement dans la main de cette divinité. On y mettait aussi du miel, offrande religieuse qui était très usitée". Le même caractère religieux est à noter pour le xotuX(axoc qui est sans doute un cotyle de moindre dimension; Athénée dit qu'il avait la forme d'un petit cratère (xpagepiaxoc) et que les initiés (ot !micmac) s'en servaient comme d'un vase sacré (tspéztn) ; on dit aussi On s'en servait, non seulement pour boire, mais pour puiser le vin, et pour cette raison il est souvent cité à côté du CYATHUS qui était spécialement destiné à cet office". Pollux le mentionne également comme vase à puiser le vin", ainsi que le scholiaste d'Aristophane 23. Dans une fête en l'honneur d'Apollon, les Athéniens offraient au dieu des gàteaux ronds (xuxnovlp il 7t€µµaga) ayant la forme d'une lyre, d'un cep de vigne, et aussi d'une xo'ûXrl ; ils donnaient à ces offrandes le nom général de Stexôvtov 24 Comme il arrive souvent dans l'étude très délicate et très obscure des noms de vases, on n'est pas d'accord sur la forme qu'il convient d'attribuer au cotyle. Ussing, dont O. Jahn partage l'avis, propose de le reconnaître dans certains vases analogues par la forme au cyathus, munis d'une seule anse longue, et il insiste sur ce détail de l'anse unique, qui est à son avis caractéristique pour ce genre de poterie 2'. Krause y voit plutôt une ressemblance avec le scYPHus, mais avec une panse plus ventrue 26; d'autre part il admet l'analogie avec le cyathus, comme le prouvent les formes de vases qu'il donne pour exemples 27 ; en tout cas il ne pose pas en principe que le cotyle ait eu une seule anse plutôt que deux. Avant eux, Winckelmann avait donné le nom de cotyle à une sorte de canthare (coupe de Bacchus) à une seule anse " ; Panofka 23 et Gerhard 30 COT 55o' COT avaient adopté une forme voisine du scyrphus, opinion que Birch a approuvée n. Letronne doute qu'on puisse savoir rien de précis sur la forme, sinon que c'était un vase profond ". Dans les ouvrages plus récents, on donne ce nom à des types très différents, depuis la forme du scyphus ou de l'oxybaphon jusqu'à celle du cyathus 33 Toutes ces divergences d'opinions s'expliquent par la variété des descriptions que nous donnent les auteurs et par les comparaisons qu'ils établissent entre le cotyle et d'autres vases très différents comme le scyphus, le cyathus, le cratère et la eaux. Il est certain qu'on doit être frappé, comme l'a été Ussing, de l'insistance que mettent les auteurs à ranger le cotyle et le cotyliscos dans la catégorie des vases à. une seule anse; Alcée3°, Diodore et Pollux" sont d'accord sur ce point. L'analogie avec le eyathus, qui a été mentionnée plus haut 36, amène à la même conclusion. Cependant le même Diodore compare ailleurs le cotyle à un Àourrjptov profond et sans anses 37. D'autre part, on doit tenir compte des analogies qui sont indiquées, avec le cratère 3s et avec la calix 39, vases à deux anses. En somme, toutes ces indications des auteurs nous sont d'un faible secours et jettent une certaine confusion dans l'esprit, plus qu'elles ne l'éclairent. Elles laissent dans l'obscurité des détails importants, comme la forme de la panse, la présence ou l'absence du pied. On a déjà insisté (p. 851) sur les difficultés parfois insolubles que présente l'assimilation des formes de vases que nous possédons avec les termes antiques qui variaient souvent d'acception $9. Dans cette incertitude, nous croyons que la méthode la plus sûre est de se reporter aux monuments eux-mêmes et de rechercher si parmi les vases conservés dans les musées il n'en est pas quelques-uns qu'on puisse désigner sûrement par le nom de cotyle. Nous en connaissons deux exemples importants, Le premier a été signalé par Birch"; c'est un vase en forme de scyphus à deux anses, couvert d'un vernis noir et portant l'inscription HEMIitOTvAION (demi-cotyle) ; il a été trouvé à Corfou. Le second provient de Thespies et faisait partie de la collection de M. O. Ray et"; il se trouve actuellement au musée du Louvre. Il a la forme d'un canthare noir à deux anses et à long pied (haut. 0,15) ; sur un des côtés est gravée à ia pointe une inscription de quatre lignes, en caractères archaïques femme Eucharis, fille d'Eutrétiphantos, ce cotyle pour qu'elle boive à longs traits (fig. 2033). Nous n'avons pas à douter du nom qu'on donnait a ces vases au temps de leur fabrication, puisqu'ils portent tous deux le mot cotyle, Sans doute on pourrait objecter pour le premier que l'inscription fait peut-être allusion à la capacité seule du vase, et non à sa forme. En tout cas, pour le second, nous sommes certain, par la teneur mémo; de l'inscription, que c'est bien un cotyle qu'il représente. Nous avons donc là un monument authentique et d'une époque grecque très ancienne pour la forme de ce vase. On voit d'ailleurs que celle-ci n'est pas en contradiction avec les principaux textes cités plus haut. Nous comprenons pourquoi Pamphilos et Pollux en parlent comme d'un vase spécialement consacré à Bacchus °3 puisque la forme du canthare lui était propre, pourquoi Athénée compare le cotyliscos à un petit cratère6°. Il est vrai qu'il a deux anses, et non point une, comme le disent expressément certainsauteurs°S. Mais il est légitime de supposer que le cotyle admettait quelques variantes de forme ou que ce nom s'appliquait à plusieurs vases, un peu différents dans les détails, car nous constatons à chaque instant que cette terminologie antique n'avait rien de bien fixe ni d'arrêté. Pour le xote},(cxo;, nous ne voyons pas sur quelles raisons on s'appuie pour lui attribuer d'ordinaire la forme d'un petit lécythe à une anse°6. Le texte d'Athénée°7 est formellement contraire à cette opinion, et il eSt en effet rationnel de supposer qu'il offrait dans des dimensions plus petites une forme analogue à celle du x6-ruaoç. Il est vrai que dans le xEBNOS Polémon voit une réunion de xoTUdicxsi soudés ensemble °B, et que dans les musées nous avons des vases de ce genre composés de petits pots réunis autour d'une base commune'", qui n'ont pas de ressemblance avec le cotyle en forme de canthare ou de cratère. Mais ceci prouve seulement que le cotyliscos admettait aussi une variété de formes assez grande ; d'ailleurs, dans ces exemples mêmes, le lécythe ne figure pas comme une forme fréquente. Il n'y a donc aucune raison de se figurer sous cet aspect le cotyliscos luimême. Ajoutons que le scholiaste d'Aristophane en fait, comme du cotyle, un vase à puiser le vin, analogue au cyathus ou à I'èpûort;to;, sorte d'oenochoé G° III, Outre la signification spéciale de mesure et de vase à boire ou à puiser, le mot xo't DAxl désigne encore toute espèce de creux, comme le dit Apollodore"; par exemple,le creux formé par les deux mains jointes pour recevoir un objet ou pour porter un fardeau. On sait que cette attitude avait donné naissance à un mot spécial, syxozDAll52, qui désignait un jeu très usité dans l'antiquité et reproduit par de nombreux monuments, où le vaincu portait sur son dos le vainqueur, en soutenant le genou de celui-ci dans le creux de ses deux mains jointes [EricoTVLû]. On appelait encore xorukt le creux formé à la naissance de la hanche°3. Par métaphore, Eschyle appelle les cymbales « des cotyles d'airain 54 ». COT 1551 Coy IV. Enfin le nom de vase est devenu, comme il arrive souvent, un nom propre et un surnom chez les Grecs35 et chez les Latins °°. E. POTTIER.