DECUMATES AGRI. Territoire d'une étendue de près de trois cents milles, placé entre la rive droite du Rhin et le Danube. Abandonné par les Marcomans 1, il fut occupé par des colons gallo-romains 2, puis concédé à des vétérans et annexé partie à la Germanie supérieure ou intérieure, partie à la Vindélicie, vers la fin du premier ou au commencement du deuxième siècle de notre ère. Il dut être considéré comme une dépendance du domaine de l'État, publicatns 3, et colonisé moyennant une redevance, stipendium ou tributum, ou vendu aux enchères 4 Suivant cer• tains auteurs, le nom des agri decumates leur viendrait d'une dîme, decuma, à laquelle les colons auraient été assujettis 5, mais en pareil cas, on dit agri decumani. Suivant une autre opinion qui paraît préférable, cette expression dérive de la ligne appelée decumanu.s limes, employée dans l'arpentage des terres des colonies' [AGRIMENSOR, COLONIAj. Ce territoire fut protégé par des travaux de défense, limites, de 70 milles allemands d'étendue ; au nord du Danube, un mur régnait de Regensbuch jusqu'à Lorch; plus loin, il y avaitun retranchement nominé encore Pfalelgraben, vallum, traversant l'Odenwald, Wetterau, le Taurus et Ems jusqu'au Rhin à Hàningen entre Linz et Neuwied. Ce territoire' comprenait une partie de l'ancien cercle de Souabe, ou du duché de Bade et du Wurtemberg actuels. L'ensemble des ouvrages défensifs paraît avoir été le résultat de travaux faits à diverses époques. Drusus et Germanicus commencèrent à fortifier le Taunus mais le limes dut beaucoup à Tibère et surtout à Trajan qui paraît avoir relié les divers postes 10, en formant une enceinte consolidée encore par Hadrien 11 et vaillamment défendue jusqu'au règne d'Alexandre Sévère contre des attaques incessantes. Ensuite elle fut franchie, après le règne d'Aurélien, plusieurs fois par les Alemanni 12 et autres Germains, et défendue sous les tyrans Posthumus et Lollianus 13 Probus la reconstitua, vers 276, au moyen d'une muraille garnie
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de tours, allant de Neustadt ou Ratisbonne jusqu'à Wimpfen sur le Necker 14; elle fut détruite par les barbares quelques années après la mort de Probus 13. La plus récente inscription romaine de cette contrée est du temps de Gallien 1G Trébellius Pollion cite un dux du limes transrhenanus'', Postumius, en 256. Mais, en 369, Valentinien et Gratien prirent la ligne du Rhin pour défense de l'empire et les derniers colons durent abandonner ce territoire dévasté, où l'on trouve encore cependant, à côté des restes du mur du diable, Teufelsmauer, et du retranchement appelé Pfahl-graben, des restes nombreux de monuments romains, qui ont fait l'objet de travaux considérables de la part des sa
vants de la contrée. G. HUMBERT.