Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article DÉMOS

DÉMOS (9Ÿ,µ's). Le mot 9r µos en grec, particulièrement à Athènes, a des sens divers 1. Il signifie d'abord le peuple, c'est-à-dire l'ensemble des citoyens, de ceux qui jouissent du droit de cité, c'est-à-dire la cité, l'État'. Il est aussi employé pour désigner une partie des citoyens, les pauvres, le petit peuple opposé aux riches, aux nobles'. Comme c'est à l'assemblée ou ixxaila(a que se réunissent les citoyens, il signifie l'assemblée du peuple, l'ixx)r,aice même'. Enfin, comme l'assemblée du peuple est une des institutions propres à la démocratie, le mot Sijuos signifie aussi le régime démocratique et, pour Athènes par exemple, ce que nous appellerions la constitution : dans la langue du droit athénien, les mots xara).uat; roû ïaigw, n'ont pas d'autre sens que celui de renversement de la constitution'. Toutes ces significations, que l'on ne distinguait pas avec autant de précision, le Grec, et surtout l'Athénien, les confondait et les réunissait dans l'idée plus large de foyer, de patrie : c'est à ce dernier sens que se rattachent les verbes i,zt5-1w.aïv, ivSrlµaiv, âaoirlgaiv si souvent employés par les Attiques s. Peuple ou partie du peuple, assemblée du peuple, démocratie et par extension patrie, tels sont les sens du mot S~µos dans la langue grecque. Il est une dernière signification, sinon particulière, au moins familière aux Athéniens, celle de bourg ou dème. L'Attique était divisée en un certain nombre de dèmes, et bien qu'on en rencontre en d'autres pays, c'est surtout par les textes athéniens que les nous sont connus. Pour l'assemblée du peuple [EICHLESIA] et la démocratie [DEMORRATIA], nous renvoyons aux articles spéciaux. D. nous reste à parler : I du Peuple, II des Dèmes. 1. Si l'on veut savoir quelle idée les anciens Grecs se faisaient du Peuple et comment leurs artistes le représentaient, il est clair qu'il faudra de préférence étudier les auteurs et les monuments des cités qui ont été régies par le gouvernement démocratique. Bien que nous devions, même dans les cités qui, comme Sparte, ont été le plus acharnées contre la démocratie, rencontrer des images du Peuple, c'est surtout à Athènes que nos recherches pourront être fructueuses. D'Athènes nous passerons aux autres cités de la Grèce ancienne. A Athènes. On sait l'admiration des Athéniens pour la forme de leur gouvernement, qu'ils croyaient originale 7. L'admiration de la démocratie n'allait pas sans le respect du peuple qui en était l'élément essentiel. Si l'on étudie les auteurs attiques, on est frappé du double sentiment qu'inspirait aux Athéniens du ve siècle surtout, le peuple dont ils faisaient partie. Ils ont d'abord conscience de sa force et de sa puissance : il est «le souverain de la Grèce et de cette contrée », « que tous craignent comme un tyran » ; il est « le roi des Grecs » 8. Ces expressions sont d'un poète comique, mais elles rendent bien le sentiment intime de l'Athénien d'alors : l'éloge d'Athènes que Thucydide a mis dans la bouche de Périclès ne donne pas une moindre idée de la puissance du peuple'. De ce sentiment en découlait un autre, celui de la reconnaissance. Toute cette gloire et tous ces avantages, les Athéniens les devaient surtout à leurs institutions, à leurs lois, à ce régime politique dont le peuple était le maîtref0. Ce double sentiment, si profond et si souvent exprimé", a donné naissance au culte du Démos. Le Peuple athénien eut son sanctuaire et son prêtre. Nous n'avons sur le culte du Démos athénien que très peu de renseignements. Nous savons certainement que le Démos n'était pas adoré seul, mais avec les Charites. Le sanctuaire commun du Démos et des Charites est, dans deux décrets, désigné par les mots Téuovo; Toû Svju.ou xai Trou yaptvav 12 : il était placé sous la garde d'un prêtre, qui Cette réunion des Charites et du Démos dans un sanctuaire commun nous montre précisément l'origine du culte du Démos. Si les Charites sont associées au Démos, c'est parce qu'elles personnifient la reconnaissance (yxptç)''. Quand les cités de la Chersonèse veulent témoigner leur reconnaissance à Athènes qui les a sauvées de la conquête macédonienne, elles décrètent d'élever un autel à la Reconnaissance et au Peuple athénien (y«proç (3wpôv l3péovTat xal b1u.ou A(bra(wv) 1S. La reconnaissance (yàptç) et les Charites ne figurent sur l'autel des Chersonésitains et dans le sanctuaire des Athéniens que pour préciser l'intention des donateurs et la rendre évidente : ce n'est pas un simple hommage que les uns et les autres ont voulu rendre au Peuple, c'est un témoignage de reconnaissance. Les Grecs comprenaient aisément ce langage figuré Aristote, dans l'Éthique à Nicomaque, nous dit qu'on plaçait le sanctuaire des Charites à l'endroit le plus fréquenté de la ville, pour donner de sa reconnaissance une preuve plus éclatante i6. Enfin quand plus tard les Athéniens eux-mêmes voulurent témoigner leur reconnaissance aux Romains leurs bienfaiteurs, Rome fut assimilée au Démos, et la déesse nouvelle prit place dans l'ancien sanctuaire du Démos et des Charites : le prêtre prit alors le titre de 1E12E14 ,Rots rat Xxp(Twv xui Puiurç u. Si l'origine du culte du Démos nous est connue, il n'en est pas de même de l'époque à laquelle il fut institué. Des inscriptions qui mentionnent le prêtre de Démos et des Charites, la plus ancienne est de la première année du 1`'r siècle avant notre ère 18, mais du décret des Chersonésitains qui remonte au Ive sièclef9, on peut conclure que déjà ce culte existait à Athènes : il est vraisemblable en effet que les Chersonésitains ne firent que suivre l'exemple des Athéniens en associant la Reconnaissance et le Démos. Nous savons que le culte des Charites à Athènes remontait à une haute antiquité 20, mais ces déesses avaient deux sanctuaires dans la ville et nous ignorons s'ils étaient aussi anciens l'un que l'autre". Nous savons que dans le Prytanée, centre politique de la cité depuis Thésée, à qui les Athéniens attribuaient l'institution de la démocratie22, on sacrifiait sur le foyer commun du peuple (£ni Tr;ç xoiv9ç €a'(uç -ce; èl'(xou) ; mais on n'y offrait pas de sacrifices au Démos, on y sacrifiait à Hestia 24, dont la statue était placée dans le prytanée à côté de celle d'Eiréné 26, et aux autres dieux que l'on invoquait précisément pour le Conseil et pour l'Assemblée du peuple26. Il est cependant permis de penser que le culte du Démos existait à Athènes dès le ve siècle, qui a été l'époque la plus brillante de la démocratie. Nous ignorons l'emplacement du sanctuaire du Démos et des Charites. Le bas-retief mentionné plus haut et qui est un ex-voto au Démos et aux Charites a été découvert à l'extrémité nord-ouest de la ville, dans un endroit appelé Ku ràce", mais il serait téméraire d'en rien conclure. Existait-il d'ailleurs un sanctuaire, un temple? Les inscriptions nous parlent d'une enceinte sacrée (Té envoq) 28 et les Athéniens, de même que les Chersonésitains, n'y avaient peut-être élevé qu'un autel. On y plaçait des ex-voto, tels que ce bas-relief déjà cité : les Charites y sont seules DEM 78 DEM représentées, mais l'inscription c4r,p.tot rai yénoty, dont la restitution semble certaine, précise le sens de l'offrande 29. Le peuple y élevait des statues à ses bienfaiteurs : ainsi dans la première partie du ne siècle avant notre ère, il y élève une statue à un personnage inconnu qui avait rendu de grands services au peuple athénien, et qui s'était également attiré la reconnaissance des vieilles familles sacerdotales des Eumolpides et des Kéryces 36; plus tard, vers le milieu du 1" siècle av. J.-C., il y dresse une statue en bronze au roi des Juifs Hyrcan II, qui avait bien mérité d'Athènes 32. Cet usage confirme ce que d'autres textes et d'autres monuments nous avaient appris sur l'origine du culte du Démos. Du culte même nous ne savons rien. Il n'avait évidemment ni grande importance ni grand éclat. Le prêtre de Démos et des Charites siégeait au théâtre de Dionysos entre deux personnages de rang secondaire, le iepeûç atup les cérémonies où il figure, à notre connaissance, sont les sacrifices et les fêtes qui marquaient l'entrée des éphèbes dans le collège. Ces sacrifices (a Elatrrpta) avaient lieu dans le prytanée, sur le foyer commun du peuple, et sans doute ils étaient suivis de la prestation solennelle du serment par les éphèbes". Le cosmète avait la présidence de la cérémonie : aussi est-il toujours nommé le premier. En seconde ligne est cité le prêtre du Démos et des Charites : c'est du moins le rang qu'il occupe dans toutes les inscriptions sauf une, où les exégètes, sans doute par erreur, sont nommés avant lui34. On sait d'ailleurs que dans leur serment les éphèbes prenaient à témoin, entre autres divinités, les deux Charites athéniennes, Auxo et I{égémoné 30. Puisque Démos était l'objet d'un culte et qu'il avait son rang au milieu de toutes les divinités athéniennes, loin du sommet et des grands dieux, plus près de ces vertus morales que l'Athénien avait personnifiées et qu'il honorait d'un culte, telles que la Bonne réputation, le Bon Ordre, la Pudeur b6, la personne du Peuple devait commander le respect, et, s'il faut en croire l'auteur de la République des Athéniens, les lois la protégeaient contre les attaques. Il dit en effet37 : Kosi,,tlniv xal xceabik Mana en, ei giç riva (30à1t rat. Cette affirmation parait singulière dans la bouche d'un homme qui avait pu assister aux comédies d'Aristophane et de Platon le comique 33. Qu'il ait été permis de mettre le Peuple sur la scène comique, c'est ce que prouvent et la comédie des Chevaliers, et des fragments de Platon 39 et un passage de Pollux, corrigé par Raoul Rochette. Parmi les personnages allégoriques que les poètes anciens mettaient en scène, Pollux cite : xal Ildat, xal .3iï~un; Y0. It ne peut donc ètre question de la personne du Peuple dans ce passage de la République des Athéniens et la seule interprétation du texte est celle qu'a proposée M. F. Leo 41 : les mots lai« xi»uto3SEiv n'ont d'autre sens que celui de lht6Sraç xtsp.g1SEiv, et à ces particuliers s'opposent, non le peuple, mais ceux des citoyens qui remplissent des fonctions publiques, les magistrats, les archontes par exemple. Nous savons en effet qu'il était défendu de les attaquer : les rendre ridicules c'était rendre ridicule le Peuple même 42'. Aristophane était donc dans son droit, quand aux Lénéennes de l'année 424, it relit Démos sur la scène dans sa pièce des Chevaliers. On sait comment il en usa : Démos est un vieillard affaibli que le Paphlagonien, c'est-à-dire Cléon, domine et mène à sa guise, à grands renforts de flatteries et de mensonges. « Notre maître, dit l'un des esclaves au début de la pièce, est d'humeur désagréable, grand mangeur de fèves, irritable c'est Démos, du dème de Pnyx, fâcheux petit vieillard à l'oreille dure 43 ». Le scoliaste ne nous apprend pas comment se présentait Démos, quel était son costume, ni s'il portait quelque attribut : il avait évidemment le masque d'un vieillard", à la bouche grande ouverte 4", et il était assez pauvrement mis, comme un vieux mal soigné L6. Le contraste n'en était que plus saisissant avec la dernière scène où Démos rajeuni, régénéré, faisait son entrée solennelle : ce n'était plus le vieillard imbécile, c'était l'homme dans la force de l'âge. L'acteur avait changé de masque et de costume : « Le voici qui s'avance, une cigale d'or à la chevelure, et dans tout l'éclat du vêtement d'autrefois 1 » 47 Il était vêtu d'une longue tunique de lin 48 ; un jeune garçon le précédait, portant un okladias ou siège pliantL9. Démos reprenait sa vie d'autrefois"0. La pièce se termine sur la scène qui suit, sur cette sorte de confession du Dérnos, sur sa contrition et ses bonnes résolutions. La comédie eut un vif succès et nous savons qu'elle remporta le premier prix. Du Démos d'Aristophane, on a plus d'une fois rapproché le Démos du peintre Parrhasios d'Ephèse 51. Parrhasiosvivait au temps de la guerre du Péloponnèse " et il habita longtemps Athènes 53 : un de ses tableaux les plus célèbres était la figure allégorique du Démos athénien. Elle ne nous est connue que par ce texte de Pline l'Ancien : pinxit Demon A theniensium, argumento ' quoque ingenioso ostendebat namque varium, iracundum, iniustum, inconstantem, eundern exorabilem, clementem, misericordem, gloriosum, excelsum, humilem, ferocem, fugacemque et omnia pariter fit. Le Démos de Parrhasios est un des problèmes de l'archéologie figurée, et le texte de Pline une véritable énigme que l'on n'a pas encore expliquée ". Bien des solutions ont été proposées par les savants : les uns, les plus timides, ont admis toute une série de figures exprimant successivement les sentiments divers énumérés par Pline; les autres, plus ingénieux, ont su, dans une seule figure, placer toutes ces qualités différentes : il n'est pas, dans leur restauration, un seul trait du visage, une seule partie du corps qui n'ait son rôle et sa signification 56 ; d'autres enfin, plus hardis, « mettent sur le compte de l'hypercritique spéculative ou de la fine satire d'un sophiste postérieur, la découverte de toutes les qualités disparates réunies dans cette peinture n ». C'est évidemment entre ces deux dernières solutions et bien plus près de la troisième que se trouve la vérité : le Démos de Parrhasios était bien une figure unique, et le peintre qui, dans son entretien avec Socrate, reconnaissait que l'art peut exprimer les passions dans le regard, dans le visage, dans le geste, dans l'action et dans le repos', a bien su représenter quelques-unes des passions du Démos athénien. Les critiques vinrent plus tard : l'oeuvre était célèbre et ils s'y acharnèrent, enrichissant le commentaire, toujours ouvert, de quelque qualité nouvelle. Mais l'ceuvre de Parrhasios n'était certainement ni une caricature ni un rébus. Quoi qu'il en soit, le Démos de Parrhasios occupe une place à part dans la série des représentations figurées du Peuple athénien. C'était une conception originale, différente de toutes les figures dont les auteurs nous ont gardé le souvenir, ou dont les originaux subsistent aujourd'hui. Dans la première catégorie nous classerons les monuments, peintures et sculptures, que nous ne connaissons cille par les auteurs anciens. Tableau d'Euphranor l'Isthmien (Ive siècle) dans le portique de Zeus Éleuthérios à Athènes, au Céramique intérieur. Sur le long côté Euphranor avait peint la bataille de Mantinée, sur l'un des petits côtés les Douze Dieux et sur l'autre Thésée, (la) Démocratie et Démos u. Pausanias ajoute : « la peinture montre que c'était Thésée qui avait fondé à Athènes l'égalité politique ». Les trois figures n'étaient donc pas détachées : c'est un groupe dont il est assez facile de se faire une idée en se reportant aux bas-reliefs politiques d'Athènes où figurent plus d'une fois trois personnages GO. D'ailleurs il faut admettre qu'Euphranor et Parrhasios avaient désigné leurs personnages par des inscriptions. C'était un usage presque général en Grèce. Sans parler des dieux, la poésie grecque avait célébré tant de héros et l'artiste se souciait sauvent si peu de leur donner un attribut, diffi cile à trouver, plus difficile encore à comprendre, que le spectateur se serait perdu dans cette foule où perçaient seulement quelques types universellement connus. Pausanias et bien d'autres avant lui auraient, sans le secours des inscriptions, éprouvé un singulier embarras à nommer tous les personnages que Pol.ygnote avait peints sur les murs de la Lesché de Delphes. Quand l'inscription fait défaut, Pausanias ne donne aucun nom, ou bien il hasarde une conjecture 6'. Pour les figures allégoriques, les inscriptions étaient plus utiles encore et presque indispensables 62. Statue de Démos, oeuvre de Lyson, dans le Bouleutérion d'Athènes'. A côté se dressaient des statues de dieux, de Zeus Bouau`oç et d'Apollon, mais sur le mur étaient peints les Thesmothètes et Kallippos, général athénien. Groupe de Zeus et de Démos, oeuvre de Léocharès d'Athènes (Ive siècle), au Pirée, derrière le Long Portique 64. étaient debout et l'on peut supposer que le dieu serrait la main du Peuple 65. J. Stuart a supposé sans raison que Léocharès avait représenté, non le Peuple athénien, mais le dème du Pirée es De ces peintures ou statues que Pausanias a vues à Athènes ou au Pirée, nous rapprocherons : Tableau d'Aristolaos, fils et disciple de Pausias. Il représentait le Peuple athénien (imago atticae plebis) 67. Groupe du Démos athénien couronné par le Peuple de Byzance et le Peuple de Périnthe. Le groupe fut élevé sur le Bosphore, par les cités de Byzance et de Périnthe, en 339 av. J.-C. Les trois statues devaient avoir une hauteur de seize coudées, soit près de 7 m. 40; mais peut-être ce chiffre est-il contestableGB. Dans le choix de ce motif il ne faut nullement voir l'influence de l'art athénien : des scènes de ce genre ont été souvent traitées par les artistes anciens 69, et nous verrons plus loin que le Peuple avait été personnifié dans bien d'autres cités qu'Athènes. Dans la seconde catégorie des représentations figurées du Démos, celles qui nous ont été conservées, nous ne comptons pour Athènes que des bas-reliefs et des plombs. Nous écartons, en effet, les vases peints où l'on a voulu reconnaitre la figure du Démos 70. L'erreur est évidente et il semble qu'après s'être refusés longtemps à voir Démos là où il était vraiment, les savants l'ont rencontré partout et l'ont trop vite nommé. J. Meursius'75 et après lui R. Chandler72, sans se soucier de la chronologie, voulaient que les statues du Démos mentionnées par Pausanias fussent des portraits de l'athénien Démos, fils de Pyrilampès, ami de Périclès et célèbre par sa beauté. D'un excès on tomba dans l'autre. L'étude des bas-reliefs athéniens montre au contraire avec quelle prudence il faut nommer les figures allégoriques. Les bas-reliefs athéniens où l'on peut reconnaître le Démos appartiennent à la série de plus en plus riche des bas-reliefs politiques, sculptés en tète d'actes publics, traités d'alliance, décrets honorifiques, comptes de finance 73. Tous ont des traits communs : dans ces petites compositions, toujours très simples, le nombre des personnages est restreint. La scène est toujours très calme : ou le Démos prend part à l'action, ou il figure en simple spectateur. Tantôt il est assis, tantôt il est debout. 11 n'est sur aucun de ces bas-reliefs désigné par une inscription 7w; c'est donc la seule interprétation du texte épigraphique, quand il est. conservé", et de la scène même, qui permet de le reconnaître. Dans tous ces bas-reliefs sans exception, Démos est représenté sous les traits d'un homme dans la force de l'âge. Il est barbu et vêtu d'un seul manteau qui laisse le plus souvent une partie du torse à découvert (fig. 2305) 1e. S'il est assis (fig. 2306), c'est sur un rocher qui rappelle sans doute le Pnyx, ou sur un siège 77. S'il est debout, il s'appuie le plus souvent sur un bâton (fig. 2307) 78; encore ce bâton n'est-il pas un attribut : il est porté par tous les hommes d'âge mûr [BACULL'M, t. I. p. 640]. Quelquefois Démos a une couronne en tête 7". Dans aucun de ces bas-reliefs, Démos n'est représente seul. La figure qu'on rencontre le plus souvent à côté de lui est celle de la déesse tutélaire d'Athènes, d'Athéna. De même que dans plusieurs de ces bas-reliefs politiques, la divinité tutélaire de sa patrie assiste le personnage qui est l'objet du décret 80 ou même représente la cité à laquelle, il appartient de même le Démos athénien est accompagné d'Athéna. Ou la déesse est le témoin et comme le garant de l'acte qui s'accomplit B3, ou bien, si elle est seule avec son Peuple, elle lui tend la main 83 ou semble converser avec lui 8'. La figure d'Athéna dans ces basreliefs a comme une double signification : la présence de la déesse ajoute à la gravité de la scène et à la solennité de l'acte. En même temps elle en rend l'intelligence plus facile et plus claire. C'est un moyen dont se sert le sculpteur pour faire plus sûrement saisir sa petite composition. Démos est le plus ordinairement représenté de même taille que la déesse 85, tandis que les étrangers ou les citoyens en l'honneur de qui est rendu le décret, les divinités mêmes qui parfois les représentent sont de taille inférieure 85 : Démos et Athéna les dominent. Parfois même la déesse est représentée debout à côté de Démos assis 87. Comme il converse avec Athéna, Démos converse avec les cités ou les personnages qui sont l'objet du décret 8a; parfois il est représenté les couronnant de sa main Le plus souvent il est simple spectateur 90 Entre ces figures allégoriques du Démos plus remarquables par leur noblesse et leur gravité que par leur précision, puisqu'elles sont ordinairement dépourvues d'attributs et pourraient, transportées dans une autre composition, en tête de documents d'un autre ordre, convenir également à d'autres types 91, entre ces figures et le culte que nous avons mentionné plus haut, il ne faut pas chercher le moindre rapport. La plupart de ces basreliefs proviennent de l'Acropole92 ou du versant méridional de l'Acropole 93, en un mot de l'endroit où étaient exposées les stèles qu'ils décoraient. Que la figure du Démos sur les ex-voto consacrés dans le téménos des Charites ne fût guère différente de celle que nous font connaître ces bas-reliefs politiques, cela est vraisemblable, mais ces derniers néanmoins n'ont aucun rapport avec le culte que les Athéniens rendaient au Dé. mos. Les sculpteurs ont personnifié le Démos, comme le Conseil'', comme le Bon Ordre 50, auxquels jamais culte n'a été rendu. L'allégorie était familière aux artistes anciens, et le Démos n'est ici qu'une figure allégorique : ce n'est pas l'image d'un dieu. Sur les jetons en plomb (fig. 2308 et 2309), la figure du Démos est encore plus incertaine et plus vague 96. On peut la reconnaître sur des jetons de présence de l'assemblée du peuple, où se voit une simple tête barbue et couronnée de laurier, mais la représentation qui est au droit, les trois Charites (fig. 2309), ne laisse aucun doute ITT. sur la désignation du type H7. L'inscription OHM doit être lue 7 ur)ctov. On peut au contraire hésiter à la reconnaître dans une figure debout, tenant de la main droite une patère, et de la gauche un caducée 9s En dehors d'Athènes. Les personnifications et les figures allégoriques n'étaient pas fami lières aux seuls Athéniens : aussi retrouvons-nous en dehors d'Athènes des représentations du Démos. Celles qui nous sont mentionnées par les auteurs sont les suivantes : A Sparte, statue colossale du Peuple spartiate. Elle était non loin de l'agora et du choros 99. Le peuple spartiate, c'est ce petit nombre de privilégiés que leurs armes seules suffisent à distinguer des périèques et des hilotes 160 A Byzance, sur le Bosphore, groupe élevé au ive siècle et représentant les peuples de Byzance et de Périnthe couronnant le peuple d'Athènes 101 A Rhodes, groupe élevé au me siècle, et représentant le peuple de Rhodes couronné par le peuple de Syracuse. Il fut élevé après le tremblement de terre qui renversa le colosse en 224, et placé en avant de la Halle ou DEIGMA de Rhodes 162 Ces deux derniers monuments sont des monuments commémoratifs destinés à perpétuer le souvenir reconnaissant des cités de Byzance, de Périnthe et de Syracuse f03. Ce sont en quelque sorte des monuments politiques et, pas plus que la statue du Démos spartiate, ils ne nous autorisent à penser que dans les villes qui les élevèrent, le Démos était l'objet d'un culte. L'étude des représentations qui nous ont été conservées nous conduit à la même conclusion. Les deux seuls bas-reliefs où l'on a cru reconnaître le Démos de Mélos et celui d'une cité inconnue sont des basreliefs funéraires 9''. La scène est la même : un personnage enveloppé dans son manteau pose une couronne sur un hermès 103. Les inscriptions gravées sur ces bas-reliefs apprennent que le conseil et le peuple couronnent ou honorent Eurythmos et Kallimachos 100 On a pu en conclure que le sculpteur avait représenté le peuple même déposant sur l'image du mort la couronne qu'il avait votée. Il y a en effet, entre l'inscription et la représentation, un rapport évident, mais le nom de Démos n'est pas le seul qui convienne au personnage qui dépose la couronne. Quelque vraisemblable que soit l'explication proposée, surtout pour le bas-relief de Mélos (car nous retrouverons sur des mon 11 DEM 82 DEM haies de la méme cité l'image du Démos), il se peut que l'artiste ait simplement représenté quelque magistrat. II est donc permis d'hésiter. 11 n'en est pas de même pour toute une série de monnaies ou nous sommes certains de retrouver l'image de Démos : le nom de auaioC est en effet gravé à côté de la figure. Toutes ces monnaies ont des caractères communs : elles surit, à quelques exceptions près, de l'époque impériale et la plupart proviennent des cités de l'Asie Mineure. On sait combien étaient goûtées sous l'empire les figures allégoriques et comment par flatterie d'abord, ensuite par habitude, les Grecs en vinrent à les grandir : Rome et le Peuple romain personnifiés107 devinrent des dieux, comme les empereurs romains 106, et eurent leur culte 109. La numismatique nous apprend combien ces figures allégoriques ont été familières aux cités de l'Asie Mineure. Elles les ont multipliées, les soulignant d'une épigraphe qu'accompaene souvent l'épithète Tepic ou Oedg. Les figures qu'on rencontre le plus souvent sont celles de la lep ou Osèç aGvx),rioc"o, de la iepit (3ou)ni, du i psç ou leptn t eo;111. Jamais on ne rencontre la légende Oeè; i~go;. Il n'y a d'ailleurs aucune différence, dans le cas présent, entre ces épithètes banales qui n'impliquent nullement l'existence d'un culte du Démos. Voici, par régions, la liste des cités qui ont frappé des monnaies au type du Démos 12. ebéia du Méandre. Harpasa. Séhastopolis. Tabac. Trapézopolis. -Lydie. Aninétos. Bagis. Brioula. Daldis. Dioshiéron. Hiérokaesaréia. Maeonia. Magnésie du Sipyle. Mosténoi. Saittae. Phrygie. Akmonia.zanoi. Attouda. Blaundos. Kadoi. Kérétapa. Kibyra. Kotiaeon. Dionysopolis. Dokimion. Eukarpéia. Euménéia. Gryménothyrae. Hiérapolis. Hyrgaléia. Laodicée. Lysias. Philomélion. Prymnessos. Sala. Siblia. Stektorion. Synnada. Synnaos. Téménothyrae 11''. Tibériopolis. Tripolis. Pisidie. Sagalassos. L'image du Démos gravée sur les monnaies de ces difrentes cités peut être rapportée à trois types : téte, torse drapé, ou figure entière du Démos. Le dernier type est beaucoup plus rare que les deux autres. La tête est toujours nue : tantôt elle est jeune et imberbe 113, tantôt elle est barbue et a un caractère de maturité 10. Parfois elle est laurée ou diadémée 117. Les attributs sont si rares que, sans la légende, il serait impossible de nommer la figure : sur une monnaie de Laodicée (fig. 2313), au type de la tète laurée imberbe, on distingue une main qui paraît tenir une massue couchée sur l'épaule gauche 118. Sur une monnaie d'Hadrianoi, au type de la figure entière, Démos assis tient de la main / droite deux épis et un pavot : la gauche . est placée sur la poitrine 119. De toutes les autres monnaies on ne saurait absolument rien dire. En dehors de cette longue série de F; g. 2313, Manmonnaies dont les types sont si peu cas haie de Laodicée de ractérisés qu'ils ne peuvent nous aider Phrygie' à retrouver l'image de Démos sur celles où la légende l'ait défaut 12o il est une série moins riche, mais beaucoup plus ancienne et plus remarquable, où l'on a cru, sans le secours d'une légende aussi précise, reconnaître le type du Démos. C'est une série de monnaies de la Grande-Grèce, de Rhégion et de Tarente''-'. La légende fit comprendre le type : on lit sur une monnaie de Rhégion du ve siècle l'adjectif RECtNOS 134 et l'on supplée Px Tvoç it'iµoç'8". comme pour l'adjectif féminin on supplée 7tôatç 12'. Le type qu'accompagne ordinairement 125 cette légende semble convenir au Démos. C'est un homme d'âge mùr, assis sur un siège (fig. 2314). Il a le torse nu et de la main droite s'appuie sur un bâton : il est barbu ou imberbe et sa tète est parfois diadémée. Le tout est dans une couronne de laurier 726. Les attributs ordinairement placés dans le champ, à côté ou ait-dessous du siège, Fig 2314. Mann chien, canard, corneille, conviendraient de Rhégion. plutôt, comme le remarque Barclay V. Headf27, à quelque divinité de la nature d'Agreus ou d'Aristée, patron de la vie rurale 738, mais on peut à la rigueur admettre que ces symboles n'ont aucun rapport avec la figure principale f2s Les monnaies de Tarente présentent un type tout à fait analogue, qui apparaît précisément avec l'établissement de la démocratie, au ve siècle 130 et des numismates n'ont pas hésité à lui donner le même nom 931. Le personnage est assis sur un même siège et vêtu d'un même manteau ; il s'appuie d'une main sur un bâton et de l'autre tient un eanthare ou plus souvent une quenouille, objets qui font allusion au commerce de Tarente 132. Sur d'autres monnaies, un personnage plus jeune et presque entièrement nu est représenté assis et jouant avec une petite panthère 133 Mais le nom du héros éponyme de la cité, de Taras, qui est plus d'une fois gravé à côté de ces personnages ne leur convient pas moins que celui de Démos, bien que Taras figure généralement au revers, assis sur un dauphin, et tenant une fleur, ou même un canthare 135. Le doute est donc permis. Il en est de même pour des monnaies des cités crétoises, Phaestos 136 et Tylissosf37, que Raoul Rochette rapproche avec beaucoup de raison des monnaies de Tarente au type du personnage assis qui joue avec la petite panthère. Au lieu du Démos, nous y reconnaîtrions plutôt un héros éponyme tel que Kydon 18 et Taras, ou même une divinité. Il en est de même enfin des monnaies impériales des nomes d'Égypte. Au revers figure un personnage debout, vêtu du pallium et tenant sur sa main soit l'animaI sacré adoré dans le nome,soit quelque autre symbole local. Raoul Rochette y reconnaît l'image du Démos du nome 139. Il faut plutôt y voir une divinité fie II. Les dèmes. Le dème (Sr,u.oç, en latin pagus 1'e1) est une partie déterminée du territoire d'un État : c'est une commune, ayant le double caractère d'une association et d'une division administrative. Ce premier caractère, elle l'eut dès l'origine, dès que plusieurs familles se furent groupées en un même endroit pour y vivre en commun u2; le second, elle l'acquit dans la suite, il lui fut imposé. L'organisation des dèmes, dans certains des états où nous les rencontrons, peut être attribuée à une époque déterminée, parfois même à tel réformateur dont le nom nous est connu : c'est ainsi que pour l'Attique nous savons qu'elle date de l'année 509 et qu'elle a pour auteur Clisthène. D'une manière générale, on peut dire qu'elle coïncide avec l'établissement définitif de l'unité politique, à laquelle elle contribue puissamment743. C'est à partir de cette époque seulement que le mot dème a tout son sens : il ne signifiait auparavant que bourg, village, de même que le mot r.G,p..q, et les deux mots étaient indifféremment employés l'un pour l'autre'64 ; ii a désormais une signification officielle, en quelque sorte, parce que, sans cesser de désigner un bourg, il répond à une division administrative. Nous n'étudierons le dème qu'à partir de cette époque, d'abord dans l'Attique, ensuite en dehors de l'Attique. Ex ATTIQUE. Il existait des dèmes avant Clisthène; il en existait au temps de Solon 145 et sans doute bien avant lui. Ce fut Clisthène qui leur donna le rôle et l'importance qu'ils gardèrent, sans le moindre changement, dans toute la suite de l'histoire grecque. Un texte important de la Politique des Athéniens d'Aristote 1i' nous apprend qu'il institua les dèmes à la place des naucraries et les démarques à la place des naucraresY47. Les dèmes ont donc remplacé les naucraries, comme circonscriptions administratives 148. Il fallut d'abord leur assigner des limites précises, aussi bien dans Athènes, puisqu'elle fut également divisée en un certain nombre de dèmeslk9, que dans la campagne : les limites des dèmes urbains étaient inscrites sur des registres publics'ti0. II est clair que tous les dèmes n'avaient pas lnème étendue : aussi les anciens distinguaientils, en se fondant bien plus sur la population que sur la superficie du dème, les grands et les petits dèmes''`. Le plus grand de tous était celui d'Acharnes qui dans la première année de la guerre du Péloponnèse fournit au moins 300 hoplites 132; parmi les petits sont Halimonte dont l'assemblée, clans une séance importante, en l'année 346/5, ne compte que 73 membres153, et Myrrhinonte qui fixe à 30 membres le quorum nécessaire pour la validité des décisions de l'assemblée it'. Les limites déterminées, des noms furent donnés aux dèmes et ce fut Clisthène qui les nomma105 les uns d'après les lieux qu'ils occupaient, les autres d'après les familles quiy résidaient 1aG. Ces noms, parfois empruntés à d'antres circonstances 757, ne changèrent pas clans la suite. Enfin les dèmes furent répartis clans les dix tribus (lfl2?,xi) que créa Clisthène 1L6. D'un texte d'Hérodote 159 que l'on a vainement attaqué 160, il résulte qu'à chacune des dix tribus Clisthène assigna dix dèmes : il y eut donc cent dèmes à l'origine. Le nombre s'accrut dans la suite, soit que l'on en vint à dédoubler d'anciens dèmes, comme cela s'était fait dès l'origine 461, soit que de nouveaux centres se fussent créés : au ne siècle av. J.-C., il y avait 174 dèmes '". Les textes et surtout les inscriptions nous en font connaître un plus grand nombre, dont on trouvera la liste à la fin de cet article. Fixés au sol, pourvus d'un nom et rattachés à une tribu, tous les dèmes, bien que devenant des circonscriptions administratives et faisant désormais partie intégrante de la cité, demeurèrent des associations indépendantes, vivant de leur vie propre et s'administrant elles-mêmes. La vie municipale en Attique n'eut pas désormais d'autres foyers. L'association formée par le dème n'a rien d'essentiellement original. Elle est organisée comme la cité même, qui embrasse tous les dèmes, et le principe fondamental est celui des institutions démocratiques dont Clisthène a poursuivi le développement : l'assemblée des dèmes est souveraine. Ou elle exerce directement le pouvoir, ou elle contrôle incessamment ceux auxquels elle l'a confié pour un temps. De plus, comme nulle association ne peut exister sans un lien religieux, le dème a ses sanctuaires, ses prêtres et ses prêtresses. Nous étudierons ainsi l'assemblée, les magistrats et les cultes du dème'''. L'assemblée du dème (réyopci) 164 ne comprend que des citoyens et parmi eux les seuls démotes (lu;µdrat). Ceux-là seuls peuvent être démotes, c'est-à-dire faire partie d'un dènle'66, qui sont ou les fils légitimes d'un démote, ou ses fils adoptifs188, ou les fils adoptifs de la cité, c'est-àdire les étrangers auxquels a été conféré le droit de cité'67. Ces derniers seuls peuvent choisir leur dèmei68, le jour où ils deviennent citoyens : les Athéniens de naissance appartiennent nécessairement au dème de leur père, naturel ou adoptif 163 Nul ne peut se dire démote, ni joindre à son nom le démotique, ou adjectif désignant son démef70, ni par conséquent fréquenter l'assemblée, avant que ses droits à ce titre n'aient été solennellement reconnus dans l'assemblée et que celle-ci n'ait ordonné l'inscription de son nom sur le registre de l'état civil. L'admission des nouveaux démotes figure une fois par an à l'ordre du jour de l'assemblée. Cette importante séance avait sans doute lieu dans le dernier ou dans le premier mois de l'année athénienne : nous savons en effet que la désignation des nouveaux magistrats du dème était inscrite à l'ordre du jour de la même session 171 et il importait que ceux-ci fussent désignés dès le début de l'année; mais les textes ne nous permettent pas de préciser et nous ne pouvons admettre une même date pour tous les dèmesf72. Devant l'assemblée se présentaient les jeunes gens qui avaient atteint l'âge légal, dix-huit ans 173. Ordinairement ils étaient introduits par leur père, ou, à son défaut, par le démote qui avait autorité sur eux (nsiptoç)175 : mais le jeune homme pouvait aussi se présenter seul175 et même, s'il était absent, il suffisait que son père ou qu'un démote, prenant la parole au nom de l'intéressé, requît son admission dans le dème 178. On procédait aussitôt à une enquête (Soxtpt.ae(ce) 177, qui portait sur la légitimité du jeune homme, légitimité de sa naissance ou de son adoption 178, et sur son âge. Cette enquête avait pour base les témoignages des phratrres, qui tenaient eux-mêmes un registre'79, mais ni ces témoignages, ni l'inscription sur le registre de la phratrie n'emportaient en quelque sorte l'admission dans le dèmef80. Bien que les seuls citoyens fissent partie des phratries, tout était remis en question dans cette assemblée du dème. L'enquête terminée, il était procédé au vote. Les démotes prêtaient serment avant de déposer leur bulletin181 et le vote avait lieu au scrutin secretf82. S'il était favorable, le jeune homme était admis dans l'association et son nom inscrit sur le registre civique ou ArlZtapXtxôv ypŒ LŒTe'ov 183. Il avait désormais le droit de fréquenter l'agora. Quand le résultat du vote était défavorable, l'exclu pouvait faire appel au tribunal des Héliastes : il s'exposait seulement, au cas où la sentence des jurés confirmait le vote des démotes, à être vendu comme esclave. C'est du moins ainsi que les choses se passaient, lors de la révision des registres civiques 18'. L'assemblée du dème, ainsi composée de ceux qu'elle admettait dans son sein par une sorte de cooptatio, pouvait, dans certaines circonstances, perdre quelqu'un de ses membres. Sans parler de ceux qui succombaient devant les tribunaux sous l'accusation d'usurpation du droit de cité (ypatpaj ;ev(aç) 185 et qui perdaient du même coup les titres inséparables de citoyen et de démote, ni de ceux qui étaient frappés d'atimie pour un temps ou pour toujours 156, il se présentait des circonstances extraordinaires où l'assemblée du dème avait l'occasion de revenir sur ses votes, soit en vertu d'une loi, soit en vertu de ses décisions mêmes. Ainsi lorsque le registre civique avait été détruit, l'assemblée devait le refaire : les démotes décidaient alors de voter les uns sur les autres (La4dlltpietr@ae), DEM 85 DEM comme ils votaient chaque année sur les jeunes gens de dix-huit ans, et l'inscription sur le registre nouveau dépendait du résultat du vote. Les exclus avaient le droit d'en appeler au tribunal des Héliastes qui pouvait les rétablir dans leurs titresf87. Une loi pouvait également ordonner une révision générale de tous les registres, dans tous les dèmes. Cette révision générale eut lieu deux fois, à un siècle d'intervalle, en 445/4 et en 346/5 sous l'archontat de Lysimachidés et sous celui d'Archias Y88. On comprend aisément quels abus avaient pu les motiver : les démotes n'étaient pas incorruptibles et tel dème, celui de Potamos, par exemple, accueillait les faux citoyens avec un empressement que raillèrent plus d'une fois les poètes comiques z89. Il fallut d'ailleurs un prétexte à ces mesures importantes et ce fut, semble-t-il, en 445 une distribution de blé 152, en 346 une distribution d'argent'''. Nous n'avons, sur la procédure suivie en 445, que très peu de renseignements 192, mais les textes sont beaucoup plus nombreux pour l'année 346. La révision eut lieu dans l'assemblée de chaque dème, en vertu d'un décret 193. L'assemblée vota sur tous les inscrits : le décret lui ordonnait de ne maintenir que ceux qui seraient nés d'un athénien et d'une athénienne. Ceux qu'elle effaçait et qui s'en tenaient à la décision rendue contre eux devenaient métèques. Ceux qui ne l'acceptaient pas avaient un recours (iptat;) devant les tribunaux : s'ils étaient une seconde fois condamnés, ils étaient vendus; s'ils obtenaient gain de cause, ils étaient réhabilités 594. Ainsi l'assemblée du dème n'était pas absolument libre d'admettre ou d'exclure qui elle voulait : au-dessus d'elle était l'autorité judiciaire, le tribunal des héliastes qui jugeait sans appel des accusations lancées contre ceux qu'elle admettait sans titres, des recours déposés par ceux qu'elle excluait sans raison. L'organisation de cette assemblée ne diffère pas de celle des autres assemblées athéniennes Y3'. Il y a des séances ordinaires (etyopat xupfat)196 et des séances extraordinaires. Celles-ci ont lieu soit en vertu d'une décision du peuple, en cas de ata'Hptate, par:exemple, ou des démotes euxmêmes 197, soit en vertu d'une convocation du démarque 198. L'assemblée se réunit ordinairement sur la place publique ouâyaprl du dème199, parfois peut-être dans son théâtre", Enfin les habitants d'un dème rural peuvent se réunir à Athènes même'. L'assemblée est présidée par le démarque 202 et la séance s'ouvre par un sacrifice 203, L'ordre du jour est fixé à l'avance, et le démarque doit veiller à ce qu'il soit épuisé204. Le même magistrat fait prêter serment aux démotes203, avant de leur remettre un bulletin de vote 200, et le vote a lieu au scrutin secret207. Encore le démarque ne doit-il procéder au vote que si la réunion comprend le nombre de membres présents qui a été fixé par l'assemblée même 208 : il est d'ailleurs à croire que l'assemblée se réunissait rarement et qu'elle était peu fréquentée log. Ses décisions prenaient la forme de décrets 710 qu'elle faisait graver sur des stèles et qu'elle exposait dans un temple, dans son agora ou son théâtre2". L'assemblée du dème est surtout une assemblée d'affaires. Sa besogne courante consiste dans la désignation de ses magistrats et dans l'administration de ses finances. Ses magistrats sont désignés dans la séance où il est procédé à l'admission des nouveaux démotes°f2 : les uns sont élus 213, les autres tirés au sort". Le nombre des candidats est sans doute peu considérable, et de nombreux exemples nous apprennent qu'ils appartiennent le plus souvent aux mêmes familles 2''. Tirés au sort ou élus, tous les magistrats sont soumis à une enquête (Soxtp.acia) qui a lieu dans l'assemblée 216, et tenus de prêter serment 217 L'assemblée administre ses finances, Elle dresse son budget. Les dépenses ordinaires peuvent être rangées dans deux chapitres : 1° frais du culte, sacrifices et fêtes"., u° gravure des décrets et contrats; couronnes et sommes d'argent à titre de récompense219. Le premier chapitre est beaucoup plus lourd que le second". Les dépenses extraordinaires sont occasionnées par des événements imprévus, tels que la guerre". Toutes ces dépenses sont couvertes par les revenus du dème 222 Les principaux revenus sont : 1° le produit de l'impôt appelé éyxTATtxdv. Tout Athénien qui possédait un immeuble sur le territoire d'un dème autre que le sien était tenu d'acheter en quelque sorte le droit de pro priété au dème, en lui payant l'iyxrrirtxdv 223. L'assemblée du dème pouvait d'ailleurs accorder, à titre de faveur, l'exemption de 1'iyxirttxdv 224 ; 2° le loyer (gta9Waett) des biens de la communauté et du théâtre. Ces biens sont le plus souvent des terres attenant aux sanctuaires (reaévai) et considérées comme la propriété des dieux du dème'. L'assemblée les afferme et les contrats de location sont gravés sur des stèles où sont inscrites les clauses du bail et les garanties fournies par les deux parties 226. Les grands dèmes, qui possédaient un théâtre, pouvaient également l'affermer 227; 3° le bénéfice des opérations financières, des prêts. L'assemblée pouvait décider de consacrer à des prêts les excédents de ses revenus. Ces opérations, elle les réglait elle-même, fixant les conditions du prêt et le taux de l'intérêt, ou elle laissait à ses magistrats le soin de les régler, leur recommandant seulement de prêter à ceux qui offraient le taux le plus élevé et qui fournissaient en même temps les garanties les plus sûres u • Quand tous oes revenus ne suffisaient pas, le dème avait recours à des mesures exceptionnelles, frappant tous ses magistrats, par exemple, d'une contribution extraordinaire (inapis) 229. Enfin c'est dans l'assemblée du dème, à la première session, qu'avait lieu la reddition des comptes. L'assemblée assistait aux opérations si compliquées de la reddition des comptes : elle formait comme une cour d'appel à laquelle pouvaient recourir les magistrats condamnés en première instance par ceux de leurs collègues qui étaient chargés du contrôle et par une commission de finances 2s0 A cette besogne courante s'ajoutaient parfois des occupations extraordinaires. L'assemblée pouvait être appelée à former un tribunal et à faire fonctions d'arbitre, en cas de contestation, par exemple, entre le dème lui-même et l'un de ses fermiers 231. Sur la demande du fermier, elle avait à se prononcer entre lui et le dème, représenté par le démarque 232 Magistrats civils (âpyovreç) du dème. Il faut distinguer : R° ceux que leurs fonctions n'appellent jamais en dehors de leur dème; 2° ceux qu'elles appellent à Athènes et mettent en relations avec les magistrats de la cité, dont ils sont souvent les auxiliaires. Le plus important de tous, le démarque, est de ces derniers. Le démarque est probablement élu 233, et reste une année en charge 231. Ses fonctions sont multiples : il en est qu'il tient des démotes, dont il est le représentant dans le dème et dans Athènes ; il en est que lui impose la cité dans le bourg même. Enfin, comme le dème est une division administrative, c'est au plus important de ses magistrats que s'adresseront les magistrats de la cité, quand ils auront besoin de renseignements précis sur l'âge, les ressources, l'état civil des démotes. Le démarque convoque l'assemblée aux jours ordinaires d'abord, aux jours fixés par les démotes et la cité, enfin toutes les fois qu'il le juge nécessaire z35. Il la préside, offre le sacrifice par lequel elle s'ouvre n6 et dirige les délibérations, mais il est tenu, sous peine d'amende, de suivre l'ordre du jour fixé d'avance 237. Il fait prêter serment aux démotes avant d'ouvrir le scrutin 238 et remet à chacun d'eux un bulletin. Le démarque a la garde du A'q tap-txô. I'pagavToiov qu'il conserve sous scellés dans sa demeure 238 et qu'il apporte à l'assemblée, une fois l'an, pour y inscrire les noms des démotes nouvellement admis 2''0, ou en cas de révision, pour effacer les exclus. Le démarque lève 1 iyxrrirtxov 2'r1, touche les fermages des biens qu'a loués l'assemblée du dème 2'i2 et les intérêts de l'argent qu'elle lui a confié pour des prêts 243. D'une manière générale, il veille au patrimoine du dème, à l'intégrité des biens de l'association (xotvS') 244: c'est ainsi qu'il défend le dème quand ses fermiers en retard choisissent l'assemblée pour arbitre 245. Comme il le représente sur le territoire mérite du bourg, le démarque représente le dème à Athènes, devant les tribunaux des Héliastes, quand celui-ci est poursuivi 246, ou quand il poursuit un adversaire 247 ; dans ces circonstances le démarque est ordinairement assisté de auvsryyopot ou de attAutot 248. Tant de fonctions lui assurent dans le dème une situation considérable : c'est le personnage le plus influent et le plus en vue, celui qui occupe le premier rang dans les fètes, au théâtre 2'9. Les fonctions que le démarque tient de la cité sont des fonctions de police, civile et religieuse. Il saisit, à la requête des créanciers, les débiteurs qui n'ont pas acquitté leurs dettes à l'époque fixée 2'0. Si le créancier est l'État, le démarque agit sans requête, mais assisté des membres du Conseil qui appartiennent au dème 201 De même il doit, comme d'ailleurs tout citoyen, veiller à l'intégrité du domaine de l'État, et remettre aux magistrats compétents un état (âroypx.ps) des biens soustraits au domaine 252. Comme la cité est intéressée à l'ensevelissement des morts et à la purification des dèmes, c'est elle qui ordonne au démarque, sous peine d'amende, de prendre les mesures nécessaires pour l'ensevelissement de ceux à qui leurs parents négligent ou refusent de rendre les derniers de voirs''3. Enfin, c'est en vertu de lois que le démarque doit veiller avec les prètres au maintien de l'ordre clans les temples et les enceintes sacrées 254. Il a, dans l'exercice de toutes ces fonctions, le droit, que les magistrats athéniens tiennent de leur titre même, d'infliger des amendes Le démarque rend aux magistrats de la cité des services considérables. Outre que ses fonctions l'obligent à connaître mieux que personne tous les habitants du dème, il est gardien de deux registres que les magistrats de la cité peuvent avoir besoin de consulter et dont ils ont peut-être des doubles, le Ar, tapxtxèv Fecy.µxrelov et le cadastre. Chaque dème a son cadastre comme il a sa liste civique, et c'est le démarque qui le tient au courant 2'0. Le registre civique sert de base au tableau des citoyens ayant le droit de paraître à l'assemblée du peuple (itivaiî FxxnlataaTtx(ç), qui était conservé dans le dème 257 et aux catalogues (xoTdnoyot) ou listes des citoyens appelés à servir dans l'armée ou sur les flottes 2a8. Le démarque entrera donc en relations avec les ar,(upzot et les TptTTdapX.ot, qui étaient chargés d'examiner ceux qui venaient à l'Assemblée du peuple "9. Pour les catalogues, nous savons qu'en 362/1, les démarques furent chargés, de concert avec les membres du Conseil qui appartenaient à leur dème, de dresser les catalogues des démotes et de fournir des gens de mer u0. C'était une mesure extraordinaire puisqu'auparavant les triérarques levaient eux-mêmes leurs matelots 261, mais dans la suite, après la réforme de Périandros, 357/6, ce fut l'État qui se chargea de l'enrôlement des matelots '262 et il est probable qu'il eut, comme en l'année 362/1, recours aux démarques. Pour l'armée de terre, le registre civique conservé dans la demeure du démarque permettait de constater l'âge des hommes appelés sous les armes 203. Le cadastre, sans servir de base à l'impôt, pouvait néanmoins être utile aux ôtxypapeiç 26' par exemple, qui, s'ils s'en remettaient le plus souvent aux déclarations faites dans la symmorie par les contribuables eux-mêmes, avaient certainement le droit d'estimer à leur tour les biens des membres de la symmorie : le démarque les aidait. C'est encore parce que le démarque, détenteur du cadastre, connaît les biens de chacun des démotes, qu'il est tenu, en cas de confiscation, d'indiquer aux magistrats de la cité les terres à confisquer ou les maisons à détruire 2"; et qu'il est chargé de faire chaque année la levée des prémices dues, sur les récoltes, aux deux déesses d'Éleusis 286. Lui-même les apporte à Éleusis et les remet aux teponoto( 2f7. Enfin, lorsque les juges des dèmes parcouraient l'Attique 208, c'était sans doute au démarque que revenait le soin de les installer et de les guider. Nous n'avons sur les autres magistrats du dème que très peu de renseignements. Les plus importants après le démarque étaient les trésoriers (rai.(at). Il n'y a qu'un trésorier à Éleusis 269 ; dans les autres dèmes dont nous avons conservé des inscriptions, nous trouvons a les trésoriers 270 „ et l'emploi du duel dans deux textes L71 semble prouver qu'ils étaient deux. Ils fournissent, ordinairement avec le démarque 272, quelquefois seuls 273, l'argent nécessaire à la gravure des stèles 27', ou aux sacrifices 275. Le contrôleur (nvTtypa^s,,euç), nommé dans une inscription de Myrrhinonte 276, fournit avec le démarque 277 les trente drachmes nécessaires à la gravure de la stèle. Enfin nous avons quelques détails sur les magistrats ou commissaires chargés de la vérification des comptes. L'euthyne (ciÔuvoç) 278 était assisté de parèdres 279, sans doute au nombre de deux '-8Q. II recevait les comptes vérifiés par le logiste O,oytaT:4ç) 70t et les examinait en présence de ses parèdres et des synégores (auvtiyopot) 282, défenseurs constitués des intérêts du dème. Euthyne, logiste et synégores avaient prêté serment dans l'assemblée du dème 233. L'euthyne, après avoir écouté les synégores et pris connaissance de leur vote, rendait sa sentence 284. Dans le dème de Myrrhinonte, nous voyons que cette sentence n'était pas définitive : elle était portée à une commission de dix membres élus qui rendait un premier jugement 285. Les magistrats condamnés pouvaient en appeler à l'assemblée tout entière 280. Des magistrats appelés Mepalpy'21 nous savons seulement qu'ils ont à s'occuper des sacrifices et des intérêts communs du dème 287. Les `OptaT7s(, nommés dans un décret du Pirée à côté du démarque 288, ne nous sont pas autrement connus. Mentionnons encore deux EtoypovtaTŒ( qui clans le dème d'Aixoné semblent avoir été chargés de la surveillance d'une fête 289 et en dernier lieu le héraut (x-iicu,) 200 Cultes des dèmes (tep« ? yoTtxé). Ces cultes étaient bien distincts des cultes publics (£111.tors),îl' iepé) 291. Les cultes du dème sont ceux qui lui appartiennent exclusivement, et qui sont célébrés dans ses sanctuaires par les prêtres et prêtresses qu'il a nommés lui-même. Sacrifices et fêtes sont à ses frais. Un seul culte était à la fois pratiqué dans tous les dèmes, celui du héros éponyme 292, auquel se rattachaient des légendes et des traditions toutes locales dont les démotes étaient jaloux293 Il est clair que le sanctuaire du héros éponyme n'avait, dans les différents dèmes, ni la mérite importance, ni le même aspect. Il en était de même des sanctuaires des dieux qui étaient si nombreux dans les dèmes 29'' et donnaient tant d'éclat à l'Attique 298. Les prêtres et prêtresses qui avaient la garde de ces sanctuaires, les sacrificateurs (tepo7cotoO qui les y assistaient 290 DEM db aDEM étaient désignés par les démotes. Ils étaient tirés au sort 297 mais, semble-t-il, parmi ceux que l'assemblée avait d'abord élus candidats 298. Désignés pour un an, les uns et les autres avaient à prêter serment et à rendre leurs comptes 299. De leurs fonctions, fonctions de police 300 fonctions liturgiques 391, et fonctions administratives, les seules qui soient à signaler sont les dernières. Le prêtre du dème, à la différence des prêtres de la cité 302, prend part à l'administration des revenus sacrés : il est tenu de consacrer la part qui lui est remise par le démarque 303, à des prêts dont les bénéfices grossiront le trésor du dème 304. C'est là un détail nouveau. Le prêtre est assimilé au magistrat civil : il a d'ailleurs droit aux mêmes honneurs, à la proédrie par exemple dans les fêtes du dème 305 Des fêtes du dème, qui devaient être si différentes les unes des autres, nous ne connaissons que l'organisation. Les revenus ordinaires du dème ne suffisaient pas à en couvrir les frais, et il fallait lever des contributions ('réarl) qui pesaient sur tous les démotes, sur tous les iyxsrTg,gévot 306 et même sur les métèques 307, L'assemblée pouvait, à titre de récompense, accorder aux métèques 308 et aux yxexTr,glsot l'immunité de ces charges. Pour les iiyxaxrr u,'vot, elle leur était sans doute rarement accordée, car c'était pour eux un honneur que de vivre la vie des démotes et d'assister à tous les sacrifices et banquets auxquels assistaient ces derniers, et il était juste qu'ils en supportassent les frais pour leur part". Payer leur part, être admis dans une de ces subdivisions du dème ou groupes de trente démotes (Tptax«ç) 3i0 qui formaient sans doute des sortes de symmories 311, c'étaient là des titres pour les iyxexTrlpa:'sot et tous ne les avaient pas 312, Quant aux démotes, leur répartition en groupes de trente 313 avait sans doute pour objet de faciliter la levée des Téarl : il leur appartenait d'ailleurs de décréter, dans l'assemblée, l'immunité pour les démotes eux-mêmes. Dans un décret du dème de Plothéia, une somme de 5000 drachmes est inscrite au chapitre de l'«Téaeta, et la suite de l'inscription nous apprend que les démotes se déchargent des contributions (TRI)) qu'ils payaient auparavant : c'est sur le trésor même qu'elles seront désormais levées 314, Les Ta-il pesaient sur tous les démotes, riches et l pauvres : les liturgies, comme dans la cité, pesaient sur les seuls riches. La plus importante était la chorégie 315, dans les dèmes qui possédaient un théâtre en pierre316 ou qui élevaient, à l'occasion de fêtes, une scène provisoire 317. Il n'y avait pas de concours («ytéa) entre les chorèges : la représentation était un simple spectacle Ma) 318. Les choeurs étaient ou des choeurs comiques 3t9, ou des choeurs tragiques 370. Nous pouvons encore citer la gymnasiarchie 321, l'hestiasis 322 Toutes les fêtes du dème avaient lieu sous la présidence du démarque 323 dans le théâtre, c'est lui qui introduit au premier rang les prêtres, les autres magistrats, et tous ceux à qui l'assemblée a accordé la proédrie 324. C'est au théâtre que sont solennellement proclamés les éloges et faveurs décernés par le dème à ses bienfaiteurs 32', ordinairement par la voix du héraut, quelquefois aussi par la voix du démarque 32s Telle était l'organisation commune à tous les dèmes. Entre toutes ces associations qui avaient reçu les mêmes institutions, il y avait pourtant de notables différences s'il en était d'obscures et d'effacées, il en est d'autres dont la figure nous est bien connue. Ce sont autant de personnes morales dont les Athéniens avaient bien saisi le caractère particulier et que raillent souvent les poètes comiques. Tels étaient les gens d'Acharnes, célèbres par leur rudesse et leur grossièreté 327 d'Aixoné, moqueurs et médisants 328 ; de Dioméia, vantards 329 ; de Thymaetades et de Prospalta, connus pour leur esprit de chicane et leur amour des procès 330; de Palamas, faciles à corrompre et empressés à accueillir les faux citoyens 331 ; de Tithras, célèbres par leur méchanceté On disait encore : riche comme un habitant de Sounion'. Enfin plusieurs comédies qui ne nous sont pas parvenues ont pour titre un démotique 33', et il est à croire que ce titre était justifié par quelque allusion à des moeurs locales, connues de tous. On remarquera que tous ces dèmes, sans excepter Dioméia33', sont des dèmes ruraux. Ceux-ci eurent en effet plus d'importance que les dèmes urbains 336 ; attachés au sol, et menant de père en fils la même vie, les démotes de la campagne gardèrent mieux leur originalité. C'est dans la campagne surtout que le dème fut une association vivante et que se développa la vie municipale, Ill DEM -89 -D EM Le dème athénien n'était pas seulement une association. C'était en même temps une division administrative, comme l'avait été la naucrarie, qui semble disparaître dès la première partie du ve siècle 337. Le dème rendait ainsi à la cité des services considérables. C'est dans le dème qu'étaient dressés l'état civil des Athéniens et le cadastre. Pour l'état civil, l'admission dans le dème conférait en même temps tous les droits civils et tous les droits politiques 773fl. Aussi la cité s'est-elle réservé le droit d'intervenir en cas d'abus. Elle ne souffre pas que l'état civil des Athéniens soit à la merci d'un vote des démotes : elle donne à tout citoyen la ypscp çev(aç contre ceux qui usurpent le titre d'Athénien; elle ouvre l'appel au tribunal des liéliastes à ceux qui sont injustement écartés ou exclus. L'autorité judiciaire est supérieure à l'assemblée du dème, comme elle l'est à l'assemblée du peuple 333. Le A-4fourttxôv Ppag;AaTe'iov, ainsi protégé par l'Etat, ser vait de base aux catalogues militaires et aux levées faites par les taxiarques 3'`° : les hommes du même dème marchaient et combattaient les uns à côté des autres L'ordre était le même à la procession des Grandes Panathénées : les citoyens y figuraient rangés par dèmes, sous la conduite du démarque'. Ils étaient également rangés par dèmes, quand ils recevaient, après les sacrifices, leur part des victimes 3c3 Le théorikon était distribué par dèmes, et dans l'agora du dème, aux seuls démotes présents3''4. Enfin c'est par dèmes que sont tirés au sort les prytanes qui représentent au conseil (P,ou)d) leur dème et leur tribu. Des inscriptions récemment découvertes34' nous apprennent, en effet, que le tirage au sort ne se faisait pas indistinctement entre tous les citoyens de la même tribu, mais séparément entre les divers candidats de chaque dème. A chacun des dèmes était assigné d'avance un nombre déterminé de prytanes. Ce nombre variait selon l'importance du bourg et selon le plus ou moins d'empressement des démotes 3h8. Il se pouvait même que de petits dèmes ne fissent pas usage de leur droit à être représentés : leurs sièges étaient alors occupés par d'autres, plus actifs et mêlés de plus près à la vie politique. Tel dème n'a qu'un représentant au conseil, tel autre en a jusqu'à vingtdeux 349. Puisque les membres du conseil représentent à la fois leur dème et leur tribu, on comprendra qu'ils soient souvent associés au démarque 377. Tels étaient les services que rendait, en temps ordinaire, la division de l'Attique en dèmes. Elle en rendait parfois dans des circonstances extraordinaires. En temps (le guerre, par exemple, les dèmes recevaient du Peuple l'ordre de désigner des magistrats ou plutôt des commissaires chargés d'organiser la défense du pays 343. Lors de la restauration de la démocratie, en 403, les assemblées des dèmes furent chargées, par décret du peuple, d'élire une importante commission, celle des cinq cents nomothètes qui devaient, avec le conseil, procéder à la révision générale de la législation athénienne 331'. Sur les noms des dèmes, voy. plus haut p. 83. Le démotique a le plus souvent la forme d'un adjectif, quelquefois aussi la forme d'un adverbe. Plus rarement il comprend deux mots, le nom du dème au génitif précédé de la préposition éx. C'est dans les inscriptions attiques qu'il faut chercher l'orthographe exacte des noms de dèmes et des démotiques 351. Le démotique y est souvent abrégé 3'4 13EpEvtx(2at. BepevtxiEr,ç. BEpavaix(gç. 13Epvstx(ôri;. I' xi 13Ÿau. Br,catEÛ;. B•gcasvç. 'Lx Br,autéwv, 'Ex Brieeiwv. I'apyr,TTÔç. I'aoyrTuoç. 'Ex Pupyr,rcûov. AXtôa1(ôut. AXtiX1%àzç. 'Ex V. Anp«ôE;. AEtpuSt1STr,ç. 'Ex AEtpuôtw'r v. AtpaôuSTrç. AExc1ECa. Aex,EÀe ç. As..., de la tribu Antiochide (Corp. hase. alt., III, 1138). A!Op.Etx. Atote EUÇ. AtopEtnÛç. AtoaVuut ç. ipsc(Scet. EipEaiôr;. 'E; EIpeut3ôiv. Hpsciôr,ç. Ei;sa. -I:t' Ex'oq. 'ITEd'oç. 'ITaioç. 'IraOEv. Elatoü;. 'E),utoûaccç. 'EnE6uato;. Laeoulc. 'E).EUeivtoç. 'E),suusivtoç. I rastx(Sat. 'Ernix(iY,ç. 'E,CEtxCSr,;. E-txryparlu E-txr?ictoç. 7?pyaôE7ç. 'Epya3EV'ç. 'Ep(xnta. 'Eptxsa ç. 'EpECxEu;. 'Eptxatz' ;. Lp,uoç. CEppi.Eto;. 'E; `E.pµEiwv. 'Lpotâ3ac et 'Epu ut. -'Epotâôr ç. 'F.pwxôr,ç. 'Epyt i. 'Epiteûç. 'LeTtuiu. -Erraateûç. 'Ecrisi OEv. Erlvoa'diu . EbvoaTii ç. Eûnupi3ut. -Eû-upiôr,;. 'El; Eu' rzuptaelv. Edûrvuuov. -EuwvuuaÛç. 'E; Eùeevup.iwv. @opxi. -Oopatsûç. [OopEÛç es']. 06pa0EV. Oop,xcç. Oopixtoç. Opia. Optâatoç. 'Ex Optacio»v. OupatTC't3at et Oup.otrâaC. -OuuatTâô ç. OoueeT 3n,ç. Oupywviôat. 'Ixap(a. -lxupio ç• Etxap.EU;. I-nnravâôat et `Innosouâôat. 'Innorup.~sr,ç. `la-Drop. lorviôac. 'Itou(yç. Katptxôut. -KEtptâr,;. 'Ex Klpa'iôely. lispxu"r,ç. 'Ex KEpa;ASwv. ICEUa1r',. Ke' ,lr,0er. KElals~ç. Krô,i. -'Ex. K-OSeav. Kr {tctx. ICr,rnsv;. KrcpEtastsSç. '9'.r. K•grotctsorv. 'Ex K•,?Et K(xuvva. 1 xu'ivo ç. 'Ex Ktxuvv_wv. Klw..., de la tribu Ptolémaïde (Corp. anse. alt., Ill, 1121). KoOwr.i3at. Ko1c xill ç. Ksi)rq. -'Ex Koilrlç. KotXe ;. Ko11u-Eûç. 'Ex Ko1luTïwv. Kolwvrlç. Ko)se'dOsv. 'Ex Koltovoû. Kolwvs, , Kcrpoç. KÔnp,no;. Kônptoç. 753 Cu dernier démotique cc boute sur une dec inscriptions dOntr ise..pui,liôes Kptoh. Kpuoeû;. 'Ex Kpuoiwv. KptGGOEV. Kpto-tâ. Ksw-io'r,ç. Ex Kpw-tôtôv. KuôaOiwatov et KuctOi,,vxtot. Ku3xOr,vatcc;. Ku3uOv,vv;. 'Lx Ku3a0rvutcwv. Ku6uvticat. KûOripoç. -D'abord KuOr'pptr, plus tard Ku'icp:o; (IC ihler, Corp. hase. ait., II, 1038). Aaxteut et Aaxxtol ut. Axrtâôr,;. Auxxtâôriç. 'Ex Aaxtse,'V. Aapaopol xuCropOEv et ûoivEoOEV. A aut'r u ;. AaurpuÛç. 'Ex Au x tTpiwv. AEuxovO%i. AeuxovoCU;. 'Ex AuuxovoEw). AEuxorûpx. Aouetoi. Aouecsû;. Mupu6oiv. -Mapulôwto;. 'Ex Mapolwvtwv. M s),.utVxi. MEÀaty EÛç. ME)(Tr,. MS),tT£V;. 'EX lŸ1EACTE(rV. MupptvoûoTa. 'Ex MupptvoûtTr,ç. 'Ex .luptvoûtrr,;. 'Ex Muptvo' o'ro ç. Zu7CETŸi. Zo ' ctiwv. '17.ÿU7rETa(wy. "Oa ou "i a. "OuOs3. 01'cOov. "SPxOEV. `Oasvç. '03e'. 'Or,. '0 0cv et '07,0EV. (Ii~,0ev. 'SP" OEV. Oivn. Oivuioç. 07ov. OldOEv (= 07.ov AExul.EtxOv). 0iov. 'E Oiou (= Otov KEpusntxv). 01... (Corp. iaase. alt., III, 1093). '0'r uv'4. 'OTOUVEÛ;. llatavtol xcoù COEv et aocvEpOEv. Ilutuvto';, 'Ex llatavtiwv. Hatovlôat. Hutov(ôryç. 'Ex Hatovt3eiv. nuxzlr,l1. HaxalaÛ; (L. Ross., n° 147, p. 89). i1e ooo c. Hx.patsûç. 'Ex [Iotpxté ev. Hetpoovç. llsapEÛç. 'Ex Ilopyocer, xa0 ropOEv et inivoplos. HEpyuc7i0sv. HETalo..., de la tribu Ptolémaïde (C. anse. alt., 11I, 1124). ❑',X xoç. 11r',l•4. Hiîoç. H,OEVç. HtOssvç. HtoOEÛç. 'Ex Ht'OCwv. llo) de la tribu Hippothontide (C. inv. ait., I[1, 1121). Ilo'apô; xcOûbupOEv, (.n vsor)Ev et l1o'cuwt AEtpuôt~TUt. Pauvo'iç. 1'XUVOVCm;. 'Ex `Pc,cvoua(wv. (C. in a). att., Ill, 1101 et la note de Dittenberger). DEM 91 "Œt. Voy. 'Ou. Dans cette liste dressée d'après les textes épigraphiques, nous avons omis à dessein les dèmes qui ne nous sont connus que par les auteurs : Aypt«lut M11Y, PEqupEtç 366 Xaetteiç 361, XEàtôwvtx 302. Tous ces auteurs ne méritent pas, en effet, la même confiance. Le même nom étant plus d'une fois porté par plusieurs dèmes 363, on ne saurait se fonder sur notre liste pour retrouver le nombre des dèmes connus. C'est à l'article TRIBUS (PHYLÉ) que seront traitées les questions du nombre des dèmes et de leur répartition dans les tribus. EN DEHORS DE L'ATTIQUE. Le dème, avec son double caractère de division territoriale et d'association, n'était pas une institution particulière à Athènes. On peut dire au contraire qu'elle était, sous des noms différents ou sous le même nom, commune à toutes les cités grecques. Sous quelque nom qu'ils se présentent, ces bourgs ont partout le même caractère que dans l'Attique : la cité, en les réunissant et les absorbant, leur a enlevé tout pouvoir politique. Il n'y a en effet de cité (rcd)etç) que le jour où les bourgs ont dû renoncer, en faveur d'un centre commun, à leur organisation politique 38ç. Comme ils étaient fixés au sol, ils ont tout naturellement formé des divisions territoriales; comme ils avaient leurs sanctuaires et leurs fêtes, leurs biens et leurs intérêts, ils sont demeurés des associations. Nous mentionnerons seulement les cités où ces divisions territoriales portent le même nom qu'à Athènes : Egine 366, Naxos 366 Kos 367,Kalymna3G0,Milet 366 Rhodes "0. Nous n'avons que très peu de détails sur ces dèmes, dont l'organisation devait peu différer de celle des dèmes athéniens. Ils dépendaient des tribus, ils rendaient des décrets, surtout des décrets honorifiques; enfin, à Kos, ils avaient un démarque à leur tête 37t. B. HA0ssour. IER.