Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

DIAITÉTAI

niens aux arbitres chargés de juger les procès privés. S'il est incontestable que « l'arbitrage est le moyen le plus raisonnable de terminer les contestations entre les citoyens»), on ne doit pas être surpris de trouver de bonne heure des arbitres à Athènes. Mais, à côté de l'arbitrage tel que nous le comprenons aujourd'hui, juridiction privée, choisie librement par les parties, nous rencontrons àAthènes l'arbitrage obligatoire, c'est-à-dire une juridiction normale, ordinaire, imposée aux plaideurs. De Ià deux espèces de diaetètes les diaetètes publics et les diaetètes privés. 1. DIAETÈTES PUBLICS. Si grande que fût la bonne volonté d'un magistrat chargé de recevoir les demandes des citoyens, mème dans un État aussi restreint que l'était l'Attique, il devait lui étaie souvent impossible d'examiner lui-même et de résoudre toutes les questions de droit ou de fait que soulevaient ces demandes. Au lieu de juger personnellement, il renvoyait l'affaire à un diaetète ou arbitre public, qui, dans une certaine mesure an moins, peut etre comparé à l'ai'Iitei' ou Panier de la procédure ordinaire à Rome'. A quelle époque renqontel'institution des arbitres publics? Schoemann est convaincu que ces juges arbitres figuraient dans la constitution athénienne dès le temps de Solon Mais nous croyons que l'on serait fort embarrassé si l'on était obligé de fournir une preuve positive de l'existence des Sturr'cu( au commencement du vie siècle. D'autres, s'appuyant sur un fragment d'un discours de Lysias contre Archébiade'', pensent que l'apparition des arbitres est contemporaine de l'orateur Lysias, et parmi eux quelques-uns rattachent expressément l'origine de cette juridiction aux réformes d'Euclide'. Mais on peut leur objecter que Lysias ne parle pas de création; il cite une loi relative aux diaetètes, n=_pi rinv 3tatT71rmn, ce qui peut aussi bien s'entendre d'une loi qui régla la compétence de cette juridiction'. Le parti le plus sage est de s'abstenir de toute affirmation et de toute contradiction formelle'. La seule chose certaine est l'existence des arbitres publics à la fin du ve siècle et pendant les siècles suivants. Les arbitres publics étaient désignés chaque année par un tirage au sort; de là vient le nom de x)cgpolroi CcudaI'rai, qui leur est donné quelquefois par opposition aux arbitres élus par les parties, aipsroi Stat-vrai. Le tirage au sort ne portait que sur les citoyens qui, par leur àge, (tiraient des garanties de sagesse et d'expérience. Fallait-il avoir soixante ans pour participer au tirage ? Cinquante ans suffisaient-ils °? Les témoignages des grammairiens sont en désaccord sur ce point. L'opinion généralement admise aujourd'hui est que toutes les vraisemblances sont pour l'àge de soixante ans, auquel les citoyens étaient libérés du service militaire 10. Quel était le nombre des arbitres publics ? Comme il n'y avait pour chaque affaire qu'un seul arbitre, il semble qu'un petit nombre de diaetètes eîrt suffi pour donner satisfaction aux plaideurs. Et cependant on lit dans le scholiaste de Démosthène" qu'il y avait quarante-quatre ce qui fait un total de quatre cent quarante arbitres! Ce chiffre de quatre cent quarante arbitres a paru hors de toute proportion avec le nombre des procès à juger, et quelques historiens ont proposé une légère correction an texte d'Ulpien. Il suffirait de lire : raav ol Srat .rail p.', S' xa0' sxécrgv tfu),r',v, pour avoir un sens raisonnable et pour dire : il y avait à Athènes quarante arbitres, à raison de quatre par tribus, Mais cette correction est devenue insoutenable depuis que l'on a découvert des listes authentiques de diaetètes athéniens, sur l'une desquelles figurent beaucoup plus de quatre arbitres par tribu 13. Nous connaissons aujourd'hui trois inscriptions, plus ou moins mutilées, sur lesquelles ont été gravés les noms d'arbitres publics, qui ont exercé leurs fonctions à des époques bien déterminées. La première, relative à l'olympiade 112,3 (330-3291, ne contient que neuf noms d'arbitres appartenant aux tribus Érechthéide (3), Égéide (3.), Pandionide (2), Léontide (4) ". La seconde, relative à l'olympiade 112,4 (329-328), donne cinq noms d'arbitres appartenant à, la tribu Léontide et cinq noms d'arbitres appartenant à la tribu Acamantide 1J. La troisième, la plus intéressante, se rapporte à l'olympiade 113,4 (325-324) 7fi. Elle ne contient pas moins de cent trois noms 17, fort inégalement répartis entre les dix tribus, d'arbitres, qui, à titre de récompense, ont été couronnés parle peuple. Dans celle liste, la Cécropide est représentée par seize de ses membres, tandis que la Pandionide n'a que trois représentants. Les autres tribus offrent les nombres suivants : Égéide, I4 ; Érechthéide, 13 ; Léontide, 12; Oenéide, 11 ; Acamantide, 9; Hippothontide, 9; Aeantide, 9; Antiochide, 7"8. Nous voilà bien loin des quatre par tribu dont parlait Hérauld et aussi des quatre cent quarante du scholiaste de Démosthène. Mais les cent trois arbitres mentionnés dans l'inscription composaient-ils à eux seuls le collège des diaetètes, tel qu'il exista en l'année 325? La couronne fut-elle attribuée à tous les arbitres, sans exception ? Ne la restreigniton pas à ceux des diaetètes qui avaient eu à juger des procès et même à ceux qui s'étaient signalés dans l'exercice de leurs fonctions? Comment expliquer la grande inégalité entre les diverses tribus? Plusieurs de ces questions sont pour nous insolubles. Mais l'inégalité ne nous embarrassera pas si nous disons que le tirage au sort avait lieu, sans acception de tribu, entre tous les citoyens qui remplissaient les conditions requises 19. Si ton admet ce mode de désignation, (in trouvera tout naturel que le nombre des représentants d'une tribu soit notablement inférieur à. celui des représentants d'une autre tribu. On ne devrait mème pas être surpris si, par les hasards du tirage, une tribu n'avait pas eu un seul de ses membres dans les arbitres de l'année. Lorsque le tirage avait été ainsi effectué sur l'ensemble des citoyens réunissant les conditions d'aptitude, on pouvait sans inconvénient, comme l'ont fait nos inscriptions, dresser la liste générale en prenant comme base de classification les tribus. Cette classification n'avait rien que de très conforme aux habitudes des Athéniens. et, si elle mettait en relief les inégalités du sort, les vrais intéresses y attachaient peu d'importance. Tous les arbitres d'une même année formaient un collège unique. Ce qui le prouve bien, c'est que les diaetètes nous apparaissent plusieurs fois agissant en commun. Ils votent des résolutions et décernent des récompenses : P30ZE)i rroiç artirl-,aïg 20. Nous les trouvons aussi réunis, sous la présidence de l'un d'entre eux (rpu'ruvautnv), pour examiner les accusations d'improbité dirigées contre l'un des membres du collège 21. Était-ce sur l'ensemble du collège tout entier qu'avait lieu, par voie de tirage au sort, la désignation de l'arbitre appelé à statuer sur un litige déterminé 29? Le collège était-il, malgré son unité d'origine, divisé en dix sections, dont chacune, spécialement affectée à une tribu, fournissait les arbitres chargés de juger les contestations des membres de cette tribu? Cette dernière opinion, qui s'appuie sur un texte de Démosthène, est généralement admise; l'orateur dit, en effet, que les arbitres qui jugent pour la tribu Oenéide et pour la tribu Érechthéide siègent Ne résulte-il pas de ce texte qu'il y avait des diaetètes spéciaux pour chaque tribu? Ce qui est certain, c'est que pour la désignation d'un arbitre en vue d'un procès déterminé, on tirait au sort, suit sur l'ensemble, soit sur la section, sans s'inquiéter ni de la tribu du demandeur ni de celle du défendeur. L'arbitre était souvent étranger à l'une et à l'autre. Ainsi, lors du procès de Démosthène contre Midias, Démosthène, du dème de Péanie, par conséquent de la tribu Pandionide, et Midias, du dème d'Anagyre, dépendant de la tribu Érechthéide, furent jugés par Straton de Phalère, c'est-àdire par un citoyen de la tribu Aeantide 2'', Il n'y avait lias à. Athènes de locaux spécialement affectés aux arbitres publics. Un diaetète pouvait donc siéger partout où il trouvait un lieu disponible approprié à sa séance. Aussi voit-on des arbitres siéger dans tes temples 23, ou dans les bàtiments consacrés aux Iléliastes, quand ces bâtiments étaient libres. Nous avons déjà dit que les arbitres des deux tribus Oenéide et Érechthéide siégeaient dans l'Héliée 2"; nous rencontrons d'autres arbitres dans le Poecile 27 et dans le Delphinion 23 Aucun texte ne nous dit que les arbitres publics, avant d'entrer en 'barge, fussent tenus de prêter le serment de bien remplir leurs fonctions. Mais presque tous les historiens 29, appuyés sur les analogies qui existent entre les diaetètes et les ldéliastes, croient qu'il y avait une prestation de serment, L'arbitre n'était pas rétribué par le Trésor public; l'indemnité à laquelle il avait droit lui était payée directement par les plaideurs. Le demandeur, au moment où il soumettait au diaetète ses griefs contre son adversaire, lui donnait une drachme ; c'est ce que les grammairiens appellent la napdetaca . De son côté, le défendeur, au moment où il contestait les allégations du demandeur (cevitiorzocla), remettait également une drachme à l'arbitre so Lorsque l'une des parties sollicitait un renvoi de l'affaire (treaiuoalu), il y avait encore lieu au payement d'une drachme, et cette prestation devait étre renouvelée chaque fois qu'un second ou subséquent renvoi était demande31. II y avait donc entre les héliastes et les arbitres cette différence que les Héliastes étaient indemnisés par l'État du dérangement causé par l'exercice de la juridiction, tandis que c'étaient les plaideurs qui indemnisaient les arbitres. Les honoraires d'un arbitre, quoique supérieurs à première vue au triobole de l'heliaste, ne devaient pas au fond s'élever à une somme bien forte. Pour deux ou trois drachmes, le diaetète était obligé de réunir tous les éléments nécessaires au jugement d'un procès, L'arbitre, à moins de circonstances exceptionnelles, siégeait d'ailleurs moins souvent que l'héliaste. Presque tous les historiens 32 admettent, avec Hudtwalcker et sur la foi d'un passage de Démosthène '3 et de la scholie correspondante3', que les arbitres publics, vers la fin de l'année de leurs fonctions, étaient ou tout au moins pouvaient être obligés de rendre compte de la manière dont ils s'étaient acquittés de leur mandat. Hudtwalcker expose même assez longuement la procédure qui aurait éié organisée à net effet n. Mais, si l'on fait abstraction des renseignements presque toujours suspects donnés parle scholiaste, on reconnaîtra que Démosthène ne parle pas d'une reddition de comptes à laquelle auraient été soumis les diaetètes. Ce qui résulte du discours de Démosthène contre Midias, tel qu'il est interprété par les critiques les plus récents n, c'est que, lorsqu'un arbitre avait gravement manqué à ses devoirs, cet arbitre pouvait aussitôt être l'objet d'une eiaayyeMa. La partie lésée par l'injustice de l'arbitre avait le droit, immédiatement et sans attendre la fin de l'exercice, de remettre une plainte au collège des diaetètes, qui, à certains jours, se réunissait sous la présidence de l'un de ses membres 37. Démosthène parait dire que l'arbitre accusé devait avoir été préalablement assigné à comparaître devant le col lige:18; mais les faits mêmes qu'il expose prouvent que cette assignation n'était pas nécessaire '9. Le collège examinait si l'accusation était bien fondée. Lorsque sa réponse était affirmative, le diaetète reconnu coupable était dépouillé de ses fonctions et frappé d'une atimie complète". Il avait toutefois la faculté de ne pas s'incliner devant la décision de ses collègues et d'interjeter appel devant un tribunal d'héliastes". Voilà seulement tee que dit Démosthène. Mais, d'une prétendue reddition decomptes à la fin de l'année d'exercice des diaetètes, on ne trouve aucune trace ailleurs que dans le scholiaste, dont le témoignage doit être rejeté. Pourquoi, en effet, les arbitres auraient-ils été soumis à cette obligation, alors que les juges, avec lesquels ils ont tant de similitudes, en étaient exemptésl2? Suidas'l3, dont le témoignage est corroboré par l'auteur des A€get7 Fr,Toeutul "4, dit expressément que les arbitres publics ne jugeaient que les contestations entre citoyens; ils n'étaient pas compétents pour juger les procès intéressant les étrangers. L'affirmation des deux grammairiens est d'une netteté parfaite, et cependant la thèse contraire a été vivement soutenue par Hudtwalcker ". Ce savant s'est d'abord efforcé de montrer que la distinction faite par Suidas entre les étrangers et les citoyens, non seulement n'as-ait pas de raison d'être en législation, mais encore aurait, dans la pratique, en dépit des intentions de ses auteurs, fait à Athènes aux étrangers une situation privilégiée. Beaucoup de citoyens pauvres auraient pu hésiter à agir contre un étranger, s'ils n'avaient pas eu à leur disposition la procédure simple et peu coûteuse de l'arbitrage. Pollux 26, d'ailleurs, parlant de l'archonte polémarque, c'est-à-dire du magistrat compétent pour les étrangers et pour les métèques, dit que ce magistrat renvoyait beaucoup de procès devant les arbitres; ce qui prouve bien la compétente des diaetètes même en ce qui concerne les étrangers. Cette démonstration faite, Hudtwalcker écarte l'argument en apparence décisif que fournit Suidas, en traduisant ainsi le texte du grammairien : « Les citoyens seuls avaient la capacité requise pour être arbitres; il n'était pas permis aux étrangers d'entrer dans le corps des diaetètes. » Cette traduction d'Hudtwalcker est vraiment inadmissible; mais les autres raisons sont plus sérieuses, Cependant elles n.'ont pas prévalu. Les historiens les plus récents font remarquer que le passage de Pollux semble corrompu, ce qui diminue beaucoup son autorité. Ils ajoutent qu'un simple argument tiré des inconvénients de la solution affirmée par les grammairiens ne doit pas suffire pour faire tomber leur affirmation b7. Les arbitres auraient donc été incompétents, lors même que le plaideur aurait été un métèque ou un isotèle, puisque, malgré les faveurs dont ils jouissaient, métèques et isotèles n'étaient pas des citoyens. Démosthène parle bien d'une poursuite en justice devant un arbitre, poursuite dirigée contre un esclave nomme Callaros"3. Mais il ne faut pas oublier que, bien que l'esclave fût personnellement en cause, c'était le maître de l'esclave que le demandeur avait en vue, puisque le maître était obligé d'exécuter la condamnation ou au moins d'abandonner au demandeur l'esclave condamné. Le maître a grand soin de faire remarquer qu'on sait qu'il tient beaucoup à son esclave et qu'il aimera mieux exécuter la sentence arbitrale que de se séparer d'un bon serviteur. Limitée quant aux personnes, la compétence des arbitres publics était également limitée quant aux actions. Ils ne pouvaient juger que des procès privés (lalat ôixat). Les arbitres, dit l'auteur des AE stç (521TOptxal, sont les juges des contestations privées, Tiw 1SttottxWv Xprral A9. Encore fallait-il, pour qu'ils fussent compétents, que l'intérêt du litige dépassât dix drachmes E°. Car, si l'intérêt du procès était inférieur à cette somme, c'étaient les juges des dèmes, ot ace ôs ouç Stxo -rcd, qui statuaient. Mais, sous le bénéfice de ces réserves, et peut-être aussi exception faite pour les affaires commerciales, les arbitres avaient la plénitude de juridiction. Toutes les actions privées, quelle que fût leur cause ou leur importance, pouvaient être jugées par eux. Nous savons notamment qu'ils pouvaient statuer sur la Oasien.; ôfxil ", action privée tendant à la réparation du préjudice causé par un vol. Les historiens du droit attique enseignent généralement que, à l'époque des orateurs, le magistrat saisi d'une action privée ne renvoyait l'affaire à un arbitre public que lorsque les deux parties étaient d'accord pour solliciter ce renvoi, ou au moins lorsque le demandeur le réclamait expressément. S'il n'y avait pas de réclamation, l'affaire était portée directement devant les Héliastes. Il en résulte que les arbitres n'étaient pas nécessairement juges de première instance a2. Quelques historiens, M. Gilbert entre autres, arrivent à peu près au même résultat, tout en modifiant complètement la règle; ils disent que les parties pouvaient bien exiger leur renvoi immédiat devant un tlikinal d'héliastes; mais que, cessant cette exigence, le magistrat tirait au sort le nom d'un diaetète ou laissait les parties choisir elles-mêmes leur arbitre. Les plaideurs pouvaient donc se soustraire à la juridiction des diaetètes S3. Pollux dit cependant que toute action privée devait autrefois être soumise aux arbitres avant d'arriver aux tribunaux 5'`. Autrefois, axaat I Schoemann s'est efforcé d'échapper à l'objection en disant que le droit de repousser l'arbitrage et de soumettre directement l'affaire aux Héliastes n'a été reconnu aux plaideurs que vers le 17' siècle ; mais ils en ont joui à cette époque, tandis que, antérieurement, 7tdÀnt, par opposition au temps des orateurs, l'usage et peut-être même la loi imposaient l'arbitrage aux deux adversaires 55. La réponse n'est pas décisive; nous allons essayer de montrer que la juridiction des arbitres, qui était peut-être facultative au v° siècle, est précisément devenue obligatoire au nt' siècle, qui est bien pour Pollux le temps ancien. Un autre grammairien, l'auteur d'un lexique dit de Cambridge, qui paraît avoir écrit en ayant sous les yeux le Ire?? Trç 'AAr'ivy6t 201J.00E61ŒÇ de Démétrius de Phalère, dit, comme Pollux, qu'il faut que les diaetètes jugent toutes les contestations, quand l'intérêt en litige est de plus de dix drachmes ; et il ajoute : « Une loi a été votée, d'après laquelle une affaire ne doit pas être portée devant les Héliastes, si elle n'a pas été préalablement soumise aux arbitres". L'un des scholiastes de Démosthène indique fort justement la raison pour laquelle les procès ne doivent pas être jugés en première instance par les Héliastes. Il ne faut pas.. dit-il, que les tribunaux siègent en permanence et occupent. constamment les juges; leurs séances coûtent fort cher et il convient d'être économe des deniers de l'État "7. On avait donc voulu décharger les tribunaux en obligeant les plaideurs à s'adresser d'abord aux arbitres, avec l'espérance que la plupart des procès ne dépasseraient pas ce premier degré de juridiction. La loi à laquelle le grammairien fait allusion, cette loi qui défendit d'arriver aux Héliastes avant de s'être présenté devant les diaetètes, n'est-elle pas précisément la loi dont Lysias e parlé dans son discours contre Arcliébiade 58 ? Un plaideur, jeune et inexpérimenté, a t'ait tout ce qu'il a pu pour désarmer son adversaire ; il lui a offert un compromis, il l'a supplié de recourir k la juridiction d'un arbitre, DatTav ii7tTp4'Lat; toutes ses supplications ont été inutiles jusqu'au jour où les Athéniens ont eu voté la loi Le sens ne veut-il pas que l'on traduise : jusqu'au jour où vous avez mis un terme à la résistance de mon adversaire en rendant l'arbitrage obligatoire? Nous croyons donc que tout procès devait être d'abord soumis à un arbitre 59, dont la mission était de résoudre simplement et à peu de frais la question qui divisait les plaideurs. Les Athéniens voient en lui, non pas précisément un pacificateur, comme notre juge de paix, devant lequel une tentative de conciliation duit avoir lieu, mais un juge dont l'abord est facile, protégé par son âge et par son isolement contre les entraînements auxquels obéissent trop souvent les Héliastes, et qui, bien que juge en premier ressort seulement, jugera définitivement la plupart des contestations. Pollux parle de magistrats, nommés Eirayo yeiç, qui auraient été désignés par la voie du sort et auraient servi d'intermédiaires entre les plaideurs et le collège des diaetètes pour la désignation d'un arbitre et la remise de la demandeG°. Mais il est plus raisonnable de croire qu'il n'y avait pas de magistrats spéciaux pour cette mission très simple. C'étaient les magistrats ordinaires, ceux. dans l'hégémonie desquels rentrait le procès qu'il s'agissait de faire juger, qui étaient eux-mêmes les ni eïtOye'tç, c'est-àdire qui tiraient au sort le nom de l'arbitre et lui remettaient le dossier de l'affaire. Nous venons de dire que le magistrat compétent désignait l'arbitre par la voie du sort. Quelques historiens enseignent que les parties pouvaient choisir elles-mêmes leur juge, et que c'était seulement lorsqu'elles ne s'accordaient pas que le magistrat tirait au sort °f. Mais le seul argument sérieux sur lequel repose cette opinion DIA 128 DIA (Drog:vouç ôtnt-r1rilo) est un témoignage inséré dans le discours de Démosthène contre Midias n, pièce justement suspecte aux yeux des critiques les plus autorisés. 11 faut s'en tenir à l'opinion de Pollux " : les procès à juger étaient répartis entre les arbitres par la voie du sort. L'arbitre public est un xnlpwr6e St«tr~rrç 6i, non seulement parce qu'il est pris sur une liste résultant d'un tirage au sort, mais aussi parce que c'est le sort qui l'impose aux plaideurs fl3. Si l'on admet avec nous que le collège des arbitres était divisé en dix sections dont chacune était spécialement affectée à une tribu, il faut nécessairement en conclure que le tirage au sort n'avait pas lieu sur le collège tout entier. Il était limité à la section spéciale correspondant à la tribu dont le demandeur et le défendeur étaient l'un et l'autre membres. Si les deux adversaires appartenaient à deux tribus différentes, le tirage au sort avait-il lieu dans la section compétente du chef du défendeur ou dans la section compétente du chef du demandeur? Nous ne saurions le dire ; mais la première des deux solutions nous parai trait aujourd'hui la plus raisonnable, parce qu'elle est plus conforme a.u principe que le demandeur doit subir le juge du défendeur 68. Le magistrat ne désignait jamais qu'un seul arbitre. L'unité du diaetète public paraît avoir été une règle absolue et sans exception. On cite bien quelques cas dans lesquels les orateurs parlent de plusieurs arbitres". Mais it arrivait parfois qu'un plaideur, défendeur dans une instance, était en méme temps demandeur dans une autre instance, connexe ou distincte, avec le mème adversaire. Pour chacune des deux demandes un arbitre spécial était désigné °fl Il y avait alors deux arbitres. Mais chacun de ces deux arbitres était indépendant de son collègue et statuait isolément. Si l'arbitre désigné par le sort ne s'acquittait pas de sa mission et ne jugeait pas le procès, on pouvait dire de lui qu'il se rendait coupable d'un déni de justice. Mais ce délit constituait-il une faute suffisante pour justifier l'application de l'atimie? Un passage de Pollux répond affirmativement : a L'atimie était édictée contre l'arbitre qui ne statuait pas sur l'affaire que le sort lui avait attribuée 69, » Les critiques les plus récents écartent ce témoignage, parce qu'ils estiment qu'il manque aujourd'hui un mot au texte du grammairien. Pollux, disent-ils, a en vue, non pas l'arbitre qui n'a pas jugé, mais l'arbitre qui n'a pas jugé conformément à la justice, gd ôt«tr a«vrt ôtx«fwç, et qui est exposé à une eia«yyeài« ayant pour suite l'atimie 70. A la différence de l'héliaste, qui était simplement juge et auquel l'affaire n'arrivait qu'après que l'instruction avait été terminée, le diaetète filait tout à la fois chargé de l'instruction et du jugement du procès. C'était lui qui réunissait tous les documents dont, plus tard, en cas d'appel, les orateurs faisaient usage devant les tribunaux, textes des lois ou des contrats, actes écrits, témoignages, etc. Les pièces produites par les deux parties étaient déposées dans deux boites, l'une pour le demandeur, l'autre pour le défendeur. Ce sont ces boites auxquelles les Athéniens avaient donné lenomd'Éit". les hérissons, que rappellent les sacs de procédure qui sont encore en usage dans quelques villes. L'instruction close, ces boîtes étaient scellées et probablement remises au magistrat en même temps que la sentence arbitrale. Tout devait d'ailleurs se passer simplement devant l'arbitre. Les discussions entre les parties n'avaient certainement ni l'ampleur ni la solennité que l'on rencontre devant le tribunal des Héliastes. Il est vraisemblable que les logographes étaient très rarement appelés à rédiger des discours pour les parties en instance devant un diaetète. Lorsque l'arbitre se trouvait suffisamment éclairé par l'instruction, il rendait sa sentence. Cette sentence n'était pas exécutoire par elle-mème. L'arbitre la remettait au magistrat qui avait l'hégémonie de l'affaire 72, et c'était ce magistrat qui lui donnait la force obligatoire. Deux voies de recours étaient ouvertes contre les sentences arbitrales, l'opposition et l'appel. Quand la sentence arbitrale avait été rendue par défaut, soit parce que le défendeur avait été condamné sans avoir été entendu, soit mème parce qu'il y avait eu défaut-congé, le demandeur (6 6tdlxwv) ayant été débouté de sa demande pour n'avoir pas comparu 13, on disait que l'arbitre avait jugé une action déserte (r},v spr,ur xar«èiatrâv). Le défaillant pouvait former opposition à la sentence arbitrale, en employant une procédure à laquelle les orateurs et. les grammairiens font souvent allusion : tirv g', cûa«v 2tx-r,v cîvada v1iv. C'est par erreur qu'Iludtwalcker a limité l'application de la g.1 63a« Etr.-1 au cas où le défaillant s'était excusé et avait sollicité un renvoi sans pouvoir l'obtenir"'. Les textes rhèmes sur lequels il s'appuiera prouvent que la s'oie de l'opposition était ouverte même à une partie qui n'avait pas donné signe de vie à l'arbitre". L'opposition devait être formée dans les dix jours qui suivaient la sentence arbitrale. Elle était sans doute remise au magistrat dans l'hégémonie duquel rentrait l'affaire. L'opposant devait d'ailleurs fournir des cautions, qui garantissaient que la première sentence serait exécutée, si l'opposition était reconnue mal fondée". Le magistrat saisi de l'opposition tirait alors au sort le nom d'un nouvel arbitre. Ce second diaelète devait préalablement examiner si l'absence de la partie avait quelque explication légitime, telle qu'une maladie ou un voyage. Il demandait à l'opposant d'affirmer, sous la foi du serment, que le défaut n'avait pas été volontaire de sa part. Si ce serment n'était pas prêté ou si l'excuse alléguée était reconnue mal fondée, l'opposant était débouté de son opposition. Peut-être mème était-il, à titre de peine pour la témérité de cette opposition, condamné à une amende envers le Trésor public 18. La sentence frappée d'opposition recouvrait toute la force dont elle avait été provi contraire le défaillant établissait qu'il avait eu de justes raisons de ne pas paraître devant l'arbitre, la première sentence arbitrale était considérée comme non avenue (;.a;j osa«). et un nouveau débat, cette fois contradictoire, s'engageait devant le second arbitre. Les sentences des arbitres publics, après un débat contradictoire, n'étaient pas rendues en dernier ressort. Sans I)IA 129 DIA doute, dans la pratique, les plaideurs acceptaient le plus souvent la décision de l'arbitre (EN.uÉvu'i .toiç ymo.8eïvty) R0, et, soit par économie, soit à raison du peu d'importance du litige 81, soit par crainte des débats judiciaires, ils n'usaient pas de la faculté de porter l'affaire devant un second degré de juridiction. Mais, en droit, l'arbitre était seulement juge de première instance. La partie qui avait succombé, le demandeur aussi bien que le défendeur, avait la faculté d'interjeter appel et de demander à un tribunal d'héliastes la réformation de la T9 ptov) 82. Pour les affaires privées, les Héliastes étaient donc, à l'égard des diaetètes, une sorte de Cour d'appel. Nous l'avons vu plus haut, un tribunal d'héliastes ne statuait sur un procès privé que lorsque ce procès avait été déjà jugé par un arbitre. L'appel était formé devant le magistrat dans l'hégémonie duquel rentrait le procès, le plus ordinairement à l'heure même où l'arbitre venait lui remettre la sentence et les E~ivot scellés contenant les pièces justificatives. Les plaideurs étaient-ils déchus du droit d'appeler, faute d'avoir immédiatement usé de cette faculté? Un délai plus ou moins long, analogue au délai d'opposition, leur avaitil été accordé"? Les textes 84 paraissent faire entre le demandeur et le défendeur une distinction 85, qui, à la rigueur, peut être rationnellement justifiée. Le demandeur, dont la réclamation avait été rejetée par l'arbitre, pouvait plus tard exiger que le débat fût rouvert devant un tribunal d'héliastes; il n'y avait pas pour lui de fin de non recevoir tirée du silence gardé devant le magistrat. Mais le défendeur condamné par l'arbitre, s'il laissait, sans protester aussitôt, le magistrat donner l'exequatur à la sentence de condamnation, ne s'exposait-il pas à entendre dire qu'il avait acquiescé à la sentence de l'arbitre et que la voie de l'appel lui était fermée? L'appelant, au moment où il interjetait appel, devait consigner ce que nous appellerions aujourd'hui l'amende de fol appel. Pollux nous dit que le nom de cette consignation a varié; Aristote l'appelait rap'. oàov; au temps de Pollux, on disail r,2paèé).tov 86 Quand l'appel avait été régulièrement formé, le magistrat portait l'affaire devant un tribunal d'héliastes. Il n'avait pas d'instruction [ANAKRISIS] à faire, comme dans les procès qui étaient directement soumis aux tribunaux. L'arbitre s'était chargé de ce soin, et les pièces par lui réunies se trouvaient dans les Wyat 87. Il. DIAETÈTES PRIVÉS. NOUS aurons peu de chose à dire de la faculté accordée aux plaideurs de se soustraire, pour le jugement de leurs procès, aux juridictions ordinaires et de s'adresser à des juges de leur choix. La loi athénienne avait, en cette matière, comme en beaucoup d'autres, laissé aux intéressés la plus grande liberté. En tout état de cause, deux plaideurs pouvaient convenir que la solution de leur litige appartiendrait à des arbitres privés, appelés alperot Stuerr,'ra[, arbitres choisis, par opposition aux arbitres publics imposés par le sort, xinrlparioi Scat TITai 88. Ils le pouvaient Iors même que leur procès était déjà porté devant un tribunal d'héliastes 89. Réciproquement, deux adversaires, qui s'étaient mis d'accord pour recourir à l'arbitrage, pouvaient renoncer à cette convention O.ûaui Tw èrtrp0 39)90, donner congé à leurs arbitres (tt?:évca -mû: Statrrrâç) 9L, et revenir aux juridictions ordinaires. Le compromis (i7rttip7f1i), c'est-à-dire la convention par laquelle les parties soumettaient leur différend à un arbitrage privé, était habituellement rédigé par écrit, et déterminait les conditions suivant lesquelles la sentence arbitrale serait rendue. Le nombre des arbitres privés dépendait entièrement de la volonté des parties. Souvent il n'y en avait qu'un seul, élu d'un commun accord, commun aux deux parties (xocvèç 21ta1T71T'ç)92. Quelquefois il y en avait deux; chacune des parties en désignait un. Mais un partage d'opinions était alors à craindre, et, pour prévenir ce danger, on adjoignait habituellement à ces deux arbitres, isolément désignés, un troisième arbitre, le tiers-arbitre, tantôt choisi d'un commun accord par les deux parties93, tantôt élu par les deux premiers arbitres94. On trouve même quatre arbitres, deux pour chacun des plaideurs, sans que les textes nous disent qu'on ait cherché à éviter le partage par l'adjonction d'un cinquième arbitre93. On discute chez nous la question de savoir si les plaideurs peuvent prendre pour arbitres des étrangers, et la négative compte de nombreux partisans. Nous avons pour Athènes l'exemple d'un arbitre choisi parmi les étrangers isotèles 06, et nous ne voyons pas de raisons pour que la même solution ne soit pas applicable aux métèques et même aux simples etrangers97. Ces étrangers peuvent, pour le jugement de certains procès, offrir des garanties de savoir et d'aptitude professionnelle qu'on aurait inutilement cherchées parmi les citoyens B8. Nul n'était obligé d'accepter les fonctions d'arbitre privé. Même après les avoir acceptées et quand l'instruction du procès était déjà fort avancée, l'arbitre pouvait encore renoncer à juger, sans que l'on pût lui demander compte des raisons qui le faisaient agir. Démosthène parle d'un arbitre qui se dépouille de sa qualité parce qu'il ne peut pas se résigner à prononcer contre l'un de ses amis la condamnation qu'exige la justice ". Les arbitres privés étaient-ils tenus de prêter serment de bien remplir leurs fonctions? Quelques textes font allusion à des arbitrages sans serment, âveu ôpxou, et à des arbitrages avec serment, µe8' ôpxou f0°. D'autres semblent supposer qu'un arbitre insermenté aura des pouvoirs plus larges, au point de vue de l'équité, que l'arbitre qui a prêté serment10'. D'autres parlent de la crainte qu'un arbitre privé doit avoir de se parjurer102. On a plusieurs fois déjà essayé de concilier ces divers textes en déterminant des cas dans lesquels le serment devait être prêté et d'autres cas dans lesquels il n'était pas obligatoire 1°3 ; mais ces tentatives ne nous paraissent pas avoir été couronnées de succès, peut-être parce qu'il n'y avait sur ce point ni loi ni coutume,tout étant abandonné àl'appréciation des intéressés foi. DIA 130 DIA Aucun délai n'avait été imparti aux arbitres pour rendre leur décision ; il leur était permis d'avoir autant de séances (aévolot) '" qu'ils le jugeaient nécessaire pour s'éclairer mutuellement. Plusieurs textes nous disent qu'ils statuaient avant tout ex aequo et bond, se préoccupant moins de conformer leur sentence au droit strict que d'arriver, si cela était possible, à concilier les parties 'os Il y a, dit Aristote, cette différence entre un arbitre privé et un juge que l'arbitre doit chercher ce qui est équitable (Tl i7ttetxés), tandis que le juge doit statuer d'après la loi f67. Les arbitres privés sont moins des juges que des conciliateurs et voilà pourquoi, au lieu de les appeler è, srr,Tai, on les appelle quelquefois ètaal,ax-a('e l La sentence des arbitres privés était habituellement rédigée par écrit ; on en trouvera un exemple, pour une hypothèse singulière, dans le discours attribué à Démosthène contre Néaera166. Parfois cependant elle restait verbale, et alors, si plus tard les parties étaient en désaccord sur le contenu de la sentence, on était obligé de recourir à la preuve par témoins. Les arbitres privés jugeaient en dernier ressort, au moins à l'époque classique. Aucune voie de recours n'était possible soit devant les magistrats, soit devant les tribunaux 416 Quelques auteurs ont récemment proposé d'assimiler, en quelques cas, à un arbitre privé le fkeaavtaT1s, chargé d'infliger ou de faire infliger la torture à un esclave 111, 11 n'y a évidemment aucune impossibilité à ce que deux plaideurs aient choisi pour arbitre de leur différend une personne à laquelle ils livraient, comme élément unique d'information, un esclave à interroger, suivant les modes plus ou moins barbares autorisés par le législateur. Mais nous ne voyons là aucune particularité juridique qui nous paraisse digne d'être notée. Nous ne croyons pas non plus que l'on doive attacher beaucoup d'importance à une espèce particulière d'arbitrage que les historiens appellent S(atra e'7ei ~r,TOic 12. Deux personnes font un contrat et y insèrent une clause pénale pour le cas où l'une des parties manquera à son engagement; une contestation s'élève sur le point de savoir si la clause pénale est encourue. Un tiers est chargé de mettre fin au débat en disant si, oui ou non, la convention relative à la clause pénale doit être appliquée. Ce n'est encore là qu'une extension pure et simple des règles que nous avons exposées sur l'arbitrage privé. E. Gommait. Spartiates à une épreuve à laquelle étaient soumis, à Sparte, les jeunes gens, arrivés à un âge que nous ne pouvons actuellement préciser. Plutarque, dans sa Vie de Lycurgue', nous dit , en effet, que la Stagaeairsats était imposée aux éphèbes (trpr,èot), tandis que, dans son traité des Institutions lacédémoniennes 2, il parle des enfants (aaiêes), Chaque année, au jour fixé pour la ôtaµaa'riyutats, les jeunes gens qui devaient y prendre part se plaçaient près de l'autel d'Artémis Orthia ou Orthosia [PIANA, p. I36], peut-être même se couchaient sur cet autel, et subissaient une flagellation sans pitié. Celui d'entre eux qui recevait les coups le plus longtemps et avec le plus de courage, était proclamé vainqueur du concours et prenait le titre de 13e,p.0v(xrs, rappelant sa victoire remportée sur l'autel Il arrivait assez fréquemment que des concurrents, désireux de triompher, enduraient la souffrance pendant si longtemps qu'ils finissaient par succomber sans avoir exhalé une seule plainte. Cette coutume bizarre, dans laquelle, à l'époque classique, on voyait seulement un moyen de s'assurer que les jeunes gens n'étaient pas sensibles aux douleurs physiques et qu'ils pouvaient supporter patiemment les misères inhérentes à la vie des camps, se rattache probablement aux sacrifices humains dont les anciennes légendes de la Grèce nous offrent d'assez nombreux exemples'. Ces sacrifices, sous l'empire de la maxime « in sacris simulata pro verts accipiuntur », furent, dans quelques localités au moins, remplacés par l'offrande d'une quantité plus ou moins grande du sang des victimes. Au lieu d'immoler à Artémis de jeunes Spartiates, on se contenta do les flageller jusqu'au sang. Peu à peu, le sens religieux s'effaça et l'on ne vit plus dans l'ancien sacrifice offert sur l'autel de la déesse qu'une épreuve applicable à tous les jeunes gens'.