Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

DUUMVIRI PERDUELLIONIS

DUUMVIRI PERDUELLIONIS.Deux magistrats chargés à Rome, sous la royauté, suivant l'histoire tradition III. nelle', de juger les crimes d'attaque directe contre l'État [PERDUELL10] et même d'autres crimes notoires qui y furent assimilés'. De nombreuses controverses se sont élevées entre les savants modernes relativement à la nature ou aux attributions et relativement au mode de nomination de ces fonctionnaires. Après mûr examen des textes peu nombreux d'ailleurs et des autorités, nous nous attachons à la définition précédente, qui est celle du judicieux Walter 3, dont les critiques récents s'écartent trop souvent, à notre avis. Ainsi nous admettons, contre eux, que les duumviri perduellionis étaient nommés sur la présentation du roi, par les comices curies; mais le roi permit qu'on pût appeler de leur sentence devant ces comices [PROVOCATIO]. Il est permis de conjecturer, ne effet, d'après Cicéron 4, que la provocatio fut possible sous la royauté, mais avec le consentement du roi seulement', et, notamment, en ce qui concerne les duumviri délégués pour exercer la juridiction criminelle en matière de perduellio. Faut-il confondre ces magistrats avec les quaestores parricidii ? C'est une question depuis longtemps débattue entre les interprètes et qui a fait naître trois opinions différentes. Remarquons préalablement que, dans un système, on identifie les quaestores parricidii avec les questeurs de l'aerariunl, mais ce n'est pas ici qu'il convient de résoudre cette difficulté particulière, sur laquelle nous admettons avec T. Mommsen 6 la négative [QUAESTOR PAR Quoi qu'il en soit, Niebuhr 8 soutenait l'identité des duumviri perduellionis avec les anciens quaestores parricidiz, désignés par le roi et confirmés par les comices curiates, pour juger les crimes de parricide9. Mais, indépendamment même de l'opinion qui rejette l'existence de toute questure sous la royauté 10, d'autres auteurs, en admettant cette existence 1l, repoussent absolument l'identité alléguée". Au contraire, Geib adopte un système intermédiaire et considère les duumviri perduellionis DUU comme des questeurs d'une nature spéciale et extraordinaire". Mais on doit préférer le système de Walter, d'après lequel les duumvir; n'ont rien de commun avec les questeurs du parricide ni avec aucun questeur; en effet, les premiers sont encore indiqués vers la fin de la république ", alors que les quaestores parricidit ont disparu depuis Iougtemps. En vain objecte-t-on la présence de questeurs mentionnés dans une affaire de perdueliiolo, mais ce sont des questeurs spéciaux qu'on suppose y avoir joué le rôle d'accusateurs. Or les duumviri perduell'ionis apparaissent dès l'origine comme de véritables juges. Ceux qui regardent le procès d'Horace comme légendaire et l'existence de duumviri perduellionis, sujets a Keewatin, comme une invention des jurisconsultes ou historiens romains postérieurs, qui reportaient dans le passé Ies institutions de l'ancienne république, admettent ces jugea sous home libre pour statuer sur les crimes politiques30. Mais ce genre d interprétation, purement conjecturale et trop ingénieuse, substitue trop facilement des hypothèses modernes et hardies à la tradition même des an Biens. Il semble très vraisemblable, au contraire, que la base des institutions républicaines se retrouve, dans tes légendes de la royauté, chez un peuple excessivement conservateur et archiviste comme les Romains. Appliquons ces idées aux dtuunluiri perduellionis. II parait, en effet, résulter des textes, en notre matière notamment, que la procédure de perduellio fut employée très rarement sous la République : ainsi peut être dans le procès de Manlius i7 et, d'une façon toute extraordinaire, dans la prétendue perdaeiiio imputée à Rabirius et contestée par Cicéron, soit i= raison du fond, soit à cause du caractère exceptionnel et rapide de la procédure et de la cruauté, contraire au droit public moderne dos Romains, du mode d'exécution''. Presque tous les procès de haute trahison étaient portés devant les comices; donc la juridiction et la procédure de la perduellio n'étaient qu'une réminiscence de la royauté. G. 'HUMBERT. uIèUUMVIRI QUINQUENNALES. -[cessoR MUNICIPALIS. DUU 1VIRI, puis UECEMVIR1, puis QUINIIEClMVIRI SACRIS lE ACIUNDIS, le plus récent, si l'on excepte les Sirl'I'E:\1vmRi F Uïcvato, et nabi le iIIS )rmit30rtant deS quatre collèges sacerdotaux que les Romains appelaient les miroita ou amplissieia rellepie1. L'institution des duuvnt''iri sacras faciundts est une date dans l'histoire religieuse de Rome, La religion nationale avait reçu de Numa sa ferme définitive et ses organes essentiels. Il avait créé les pontifes [eoN1'tl'Evi pour préserver la pureté des cultes publics et privés. Il avait confié à leur zèle l'avenir des 1)UU dia patet du rites patrius. 's côte d'eux les augures interprétaient les manifestations de la volonté divine conformément aux règles traditionnelles dont le dépôt leur était commis. L'époque caractérisée par les noms des Tarquins vit nature des besoins nouveaux, Une dynastie d'origine étrangère sut les favoriser et les exploiter-. C'était le temps où Rome entrait en communication avec le inonde grec, le temps oit la plèbe se formait en dehors de la cité patricienne, également embarrassée pour l'admettre dans son sein ou l'en tenir exclue. A tous les points de vue, en religion comme en politique, un mouvement, commençait qui allait faire éclater les cadres rigides où la société romaine s'était jusqu'alors enfermée. L'introduction des Iivres sibyllins, la consécration officielle accordée aux prophéties qui s'y trouvaient consignées, fut une première victoire remportée par l'hellénisme et qui devait être le point de départ de beaucoup d'autres. Les hommes préposés à ce recueil, avec mission de le conserver et de l'expliquer, ne purent manquer de se considérer comme les représentants naturels de l'esprit grec, et l'on ne se trompera pas en attribuant, pour une large part, à leur action la transformation profonde qui, à partir de ce jour, s'opère dans les vieilles croyances du Latium. Sans doute les dieux de l'Olympe auraient toujours fini par s'imposer avec la civilisation brillante qui marchait à Ieur suite, mais on peut croire qu'ils auraient eu plus de peine à forcer les portes de la place s'ils n'y avaient eu d'avance des alliés en mesure de leur assurer le bénéfice d'une situation légale. HISTOIRE DU COLLÈGE, La ville de Cumes elait un des principaux foyers de la culture grecque en, Italie et celui qui entretenait avec Rome les relations les plus fréqueutes 2. Les colons de Chalcis en Eubée et de Eyme en Éolie avaient transplanté sur ce rivage le type de la Sibylle, éclos sur les côtes de l'Asie Mineure, et dont l'unité primitive s'était brisée de bonne heure et dissoute dans la multiplicité des représentations locales. La sibylle de Cumes, détachée à son tour de celle d'Erythrae, avec laquelle elle s'était d'abord confondue, devint la Sibylle italique 3. Ses prédictions pénétrèrent à Rome. Elles y obtinrent droit de cité, Les historiens sont d'accord pour rapporter au règne de l'un ou de l'autre Tarquin cet événement fécond en conséquences. La légende s'en était emparée et l'avait entouré de circonstances merveilleuses qui sont les m@mes, sauf quelques variantes, dans tous les récits. Le plus complet est celui de Denys d'Halicarnasse ' : a Une femme étrangère vint trouver Tarquin le Superbe dans l'intention de lui vendre neuf livres remplis d'oracles DUIT -427 DUt' sibyllins. Tarquin ne jugeant pas à. propos d'acheter les livres au prix qu'elle eu demandait, elle s'en alla et en brûla trois. Peu de temps après elle rapporta les autres et en exigea le même prix. Comme on la tenait pour folle et qu'on se moquait de ce qu'elle demandait pour un moindre nombre le prix qu'elle n'avait pu obtenir pour la collection complète, elle s'en alla de nouveau, brêla la moitié des volumes restants et revint offrir les trois derniers au même prix, Tarquin, surpris de cette persistance, manda les augures et, leur ayant exposé le cas, leur demanda ce qu'il fallait faire. Ceux-ci, ayant appris par certains signes que l'on avait repoussé un bien envoyé par les dieux et ayant déclaré que c'était un grand malheur que le roi n'eût pas acheté le tout, ordonnèrent de compter à la femme l'argent qu'elle demandait et de prendre ce qui restait. Or donc, la femme ayant donné les livres et recommandé qu'on les gardât avec soin, disparut d'entre les hommes. Tarquin choisit alors deux citoyens considérables et leur confia la garde des oracles. Denys ne donne pas le nom de la mystérieuse bienfaitrice, mais il n'est pas douteux que dans la pensée des Romains ce ne fût la Sibylle de Cumes en personne. Ce qui est certain, c'est qu'ils n'attribuaient à nulle autre le don qui leur avait été fait. Les livres sibyllins ont toujours passé pour avoir été écrits sous son inspiration et pour ainsi dire de sa main En présence de cette révélation importée et de provenance suspecte, il était naturel que la vieille Rome hésitât. La fable qu'on imagina plus tard traduit fort bien ce sentiment complexe où il entrait plus de méfiance que d'enthousiasme. Pourtant la superstition fut la plus forte, et dès le principe on s'assura l'usage exclusif du précieux document, Une anecdote, authentique ou non, mais intéressante de toute façon, montre avec quelle rigueur on y veillait. Au temps même des Tarquins, un des duumvirs, M. Atilius, pour avoir laissé prendre copie des pages sacrées au Sabin Peironius, fut puni du supplice des parricides, autrement dit cousu dans un sac et jeté à la mer 6. Sur le régime du collège nouvellement créé les textes ne fournissent presque aucun renseignement. On voit seulement qu'il témoigne des mêmes dispositions réservées et médiocrement sympathiques. Ce n'était pas à proprement parler un collège, s'il est vrai qu'il fallait être au moins trois pour former une association de ce genre ayant le caractère d'une institution permanente'. C'était une simple commission viagère, indéfiniment renouvelable. Le titre même des hommes qui la composaient est significatif. Ce qui distingue en effet les dignités régulièrement inscrites parmi les offices publics, c'est qu'elles ont un titre qui leur est propre et qui est suffisamment clair par lui-même, tandis que les membres des commissions ne sont distingués que par une expression banale indiquant leur nombre et suivie d'une définition de leur compétence'. On retnarqueraqu'ici la définition est grosse de promesses, car la compétence qu'elle suppose est extensible k volonté duumviri sacris faciundis, les deux hommes chargés de vaquer aux cérémonies sacrées. Quelles cérémonies? Il est évident qu'il s'agit des cérémonies du culte étrsngela les autres ayant leur personnel attitré. La formule ne le dit point. peut-être par égard pour les dieux de la patrie, mais quand même elle eût ajouté, pour être plus explicite, situ igraecoelle n'en demeurerait pas moins singulièrement indéterminée. Lit réalité elle ouvre au corps institué pal les deux Tarquins un domaine illimité. Elle autorise en fait d'innovations religieuses tout ce que les livres dont il est le gardien et l'interprète lui suggéreront. Et ainsi ces deux hommes nous apparaissent comme les artisans d'une religion à faire plutôt que comme les ministres d'une religion fa La révolution de 509, en introduisant dans les collèges sacerdotaux le principe de la cooptation, devenu la base même de leur organisation et la garantie de leur indépendance, eut sans doute pour effet, d'émanciper du même coup la commission duumvirale. Il est probable qu'à partir de cette époque elle acquit le droit de se recruter elle-même. En fait nous ne voyons lias qu'aucun magistrat ait hérité des crois le droit de nommer à un sacerdoce quelconque, et quant au pontifèx rrta.xiiulte, s'il est vrai qu'il avait recueilli de ce droit quelques restes, c'était sur le terrain et dans l'étroite enceinte du cuite national. Les sacerdoces dont les titulaires tenaient de lui leurs fonctions n'étaient et ne pouvaient être que des sacerdoces romains. Les dunrrtviri sacris faciuttdis, placés en dehors de ce cercle, échappaient à son action 70. Toutefois le collège proprement dit ne date que du milieu du quatrième siècle de Rome. Le droit de cooptatio s'exerçait dans des conditions anormales. Il conférait au survivant un pouvoir excessif, sans compter que le choit, pat un individu n'était une cooptatio qu'en faussant le sens du mot. D'ailleurs les duumvirs, bien qu'exempts du service militaire et soustraits aux chances de la guerre L1, pouvaient disparaitre tous les deux à la fois, et c'est bien un malheur de ce genre qui parait avoir été l'occasion, sinon la cause déterminante de la réforme. II est remarquable en effet que, lorsqu'au duumvirat on substitua le décemvirat, on dut pourvoir du même coup aux dix sièges. Ce fut en l'an 367 avant, J. C. =387 de Renie. Tite Live, qui mentionne le fait, rie dît pas clairement comment on s'y prit le. Il emploie l'expression meure qui n'apprend rien. Il est probable que les nouveaux décemvirs sacris faciundis furent élus par les comices trihutes, après quoi on en revint au principe de recrutement du collège par lui-même. Les comices centuriades étaient réservés pour l'élection des magistrats supérieurs. D'aitleurs ce sont les comices tributes que l'on voit intervenir plus tard dans le recrutement des collèges sacerdotaux. La loi qui fut votée et appliquée en 367 av. J.-C. = 387 de R. avait été proposée deux ans plus tôt et elle avait rencontré une résistance énergique " Elle contenait une clause et émanait d'une initiative qui n'étaient pas pour plaire au patricial. Cette question de la réorganisation du collège sacris faciundis, soulevée au plus chaud de la lutte entre les deux ordres, était devenue pour la plèbe un nouveau moyen d'agitation. Parla bou DUU 428 DUU che de ses deux grands tribuns, Licinius et Sextius, elle réclama le partage des places. Sa victoire sur ce point fut le prélude du triomphe beaucoup plus important qu'elle allait remporter l'année suivante par l'adoption des lois Iiciniennes. Le collège sacris faciundis fut donc le premier forcé par les plébéiens. Il leur fallut attendre encore soixante-sept ans pour se faire une place parmi les pontifes et les augures ". On n'en sera pas surpris si l'on considère à quel point ces deux corporations différaient de la précédente par leur origine, leurs fonctions et leur esprit. Elles étaient nées avec le patriciat. Elles faisaient corps avec lui. Elles furent le dernier asile où il se retrancha dans sa défaite. Au contraire, entre la plèbe et le collège sacris faciundis, indépendant de la religion officielle, indifférent et presque hostile, il y avait comme une affinité secrète. Pourtant, telle était alors la violence des passions que les patriciens, en subissant le voisinage de leurs nouveaux collègues, n'allèrent pas jusqu'à se fondre avec eux. Ils devaient être de meilleure composition dans les collèges des pontifes et des augures. Quand les plébéiens y entrèrent, ce fut sans en troubler l'unité. Le rapprochement entre les deux éléments y fut tout de suite complet. C'est qu'en l'an 300 avant J.-C. les préjugés étaient bien émoussés, tandis qu'en l'an 367 ils avaient encore toute leur force. Le règlement des X viri s. f. en porta longtemps la trace. La mention des jeux séculaires de l'an 518 av. J.-C. = 236 de Rome, jetée au bas des fastes consulaires capitolins, nous apprend qu'ils furent célébrés par les deux magistri, M. Aemilius et M. Livius Salinator. Le premier est patricien, le second plébéien. I1 résulte de là, non seulement que les X viri s. f. avaient deux magistri, mais encore qu'ils étaient pris chacun dans l'autre ordre et servaient de chefs de file, l'un aux cinq plébéiens, l'autre aux cinq patriciens'". La période qui s'ouvre dans l'histoire du collège à partir de 367 av. J.-C. est celle où il déploie sa plus grande activité, exerce sa plus grande influence. C'est la période où Rome aspire les idées grecques par tous les pores. Les décemvirs firent de leur mieux pour accélérer une évolution dont ils profitaient. En effet, les cultes nouveaux, admis sur leur proposition, tombaient sous leur surveillance. Ils se taillaient ainsi, sur un autre terrain, une compétence analogue à celle des pontifes et non moins étendue. Rien d'étonnant si leur importance a crû en proportion. Ils occupaient dans la hiérarchie sacerdotale une situation tout à fait éminente. Tacite les nomme immédiatement après les pontifes et les augures10. Varron les place au même rang". Le collège en était là, et l'on peut dire qu'il avait à peu près achevé son oeuvre quand il fut porté à quinze membres et acquit son effectif et son titre définitifs : quindecimviri sacris faciundis, La date de cette mesure ne peut être fixée que par une conjecture. Il est vrai qu'elle atteint presqu'à la certitude. Julius Obsequens mentionne encore les decemviri pour l'an 98 av. J.-C. = 638 de R. fe. Caelius, dans une lettre à Cicéron, est le premier qui parle des quindecimviri, en l'an Si = '703 de R. 19. Or on sait que Sylla avait renforcé jusqu'au même chiffre les pontifes et les augures20, et d'autre part il eut à s'occuper du collège sacris faciundis pour reconstituer le matériel prophétique, détruit par un incendie 21. La réorganisation du collège doit donc se rattacher à cet événement 22. On remarquera la parité qui s'établit alors pour la première fois entre l'effectif du collège sacris faciundis d'un côté et celui du collège pontifical et augural de l'autre. Ces deux derniers, dans leur effectif initial, comme dans leurs augmentations successives, n'avaient cessé de reproduire la triple division de la cité des trente curies et des trois tribus. On les avait vus composés de trois membres, puis de six, puis de neuf 23. Ils en comptaient maintenant quinze. Au contraire, le collège sacris faciundis, n'étant pas sorti de la cité patricienne, n'eut rien de commun avec le système tripartite sur lequel elle était fondée. Jusqu'à ce dernier remaniement le nombre de ses membres n'avait jamais été un multiple de trois. Ces distinctions avaient depuis trop longtemps perdu leur intérêt pour qu'on ne s'empressât point, à la première occasion, d'établir entre ces trois grands corps la symétrie numérique que leur équivalence en dignité semblait appeler. Est-il besoin d'ajouter que cette mesure offrait, entre autres avantages, celui d'introduire là comme partout les partisans du dictateur. Antérieurement à Sylla, une réforme, où le collège sacris faciundis fut enveloppé, avait modifié le mode de recrutement des sacerdoces. La démocratie par la loi du tribun Cn. Domitius Ahenobarbus, en 104 av. J.-C. = 650 de Rome, avait substitué l'élection par le peuple au procédé aristocratique de la cooptation m. On sait du reste par quel compromis elle avait imaginé de satisfaire ses ambitions sans rompre entièrement avec les usages consacrés. Les collèges conservaient un droit de présentation, de nominatio 2', analogue à celui du magistrat présidant à une élection politique. Chaque membre, sur la foi du serment et devant le peuple réuni en assemblée 26, in contione, pouvait pour chaque place vacante présenter un candidat, sous cette réserve toutefois qu'un candidat ne pouvait pas être présenté par plus de deux membres, de manière que le peuple demeurât libre de choisir 27. Il choisissait donc sur la liste ainsi composée. Mais il n'élisait pas l'homme de son choix. Il le désignait simplement à la cooptatio de ses futurs collègues 2e, et afin qu'il fût bien entendu que l'autorité sacerdotale n'émanait pas du suffrage populaire, afin que le DUU 4429 DUIJ vote n'eût pas le caractère d'une élection véritable, les comices qui y procédaient étaient des comices restreints, ne représentant que la minorité des citoyens. C'étaient les comices tributes, mais formés de dix-sept tribus tirées au sort surfiles trente-cinq 29, les comitia sacerdotum, tenus à la même époque que les autres comices électoraux, entre les comices pour l'élection des consuls et les comices pour l'élection des préteurs, et sans doute tous les ans, sinon en droit, du moins en fait, car les vacances étaient fréquentes depuis que le personnel des collèges était devenu plus nombreux 30. Telles étaient les combinaisons qui sauvaient les apparences et rassuraient les consciences inquiètes. La loi Domitia, emportée par la réaction syllanienne en 673 = 81 av. J.-C. 31, rétablie en 63 av. J.-C. = 691 par le tribun. T. AG us Labienus (lex Atia) 3a, confirmée par César (lex Julia de sacerdotiis (vers 45 av. J.-C. = 709) u demeura en vigueur, à part cette interruption de dix-huit ans, jusqu'à l'empire. Elle ne fut pas abrogée sous le régime nouveau. Les comices continuèrent de fonctionner sous Auguste, à moins qu'ils ne fussent exceptionnellement suspendus 34, et il n'y a pas lieu de croire qu'ils aient été supprimés pour les élections aux sacerdoces, alors qu'ils étaient maintenus pour les élections aux magistratures. Mais d'un autre côté, on n'admettra guère que l'empereur n'ait pas désiré se réserver la haute main sur les premières comme sur les secondes. On sait par quel moyen, renouvelé de César, il se rendit maître des magistratures. Il s'arrogea le droit de présentation, la nominatio, concurremment avec le magistrat présidant à l'élection, et à la nominatio, dont l'effet était purement moral, il ajouta au besoin, la recommandation ou commendatio, qui avait un caractère impératif et obligeait tous les suffrages35. Il dut se passer quelque chose d'analogue pour les sacerdoces, avec cette différence que l'empereur, membre de droit des quatre grands collèges, comme des sodalités les plus importantes 36, n'avait pas eu à revendiquer le droit de nominatio. 11 l'exerçait au même titre que ses collègues et, il n'est pas besoin de le dire, avec une tout autre autorité. Lorsqu'en l'an 14 ap. J.-C. Tibère transféra les pouvoirs électoraux des comices au sénat u, il lui attribua les élections sacerdotales comme les autres, et les dix-sept tribus ne se réunirent plus que pour entendre proclamer les noms des élus (renuntiatio). C'est à cela que servaient les comitia sacerdotiorum dont il est fait encore mention au premier siècle après J.-C. 38. Les écrivains de l'empire, plus attentifs au fond qu'à la forme, nous montrent le plus souvent l'empereur comme disposant à son gré des sacerdoces 3°. Il y a pourtant quelques textes qui nous renseignent plus exactement. Tacite dit de Tibère : « Caesar auctor senatui fuit Vitellio atque Veranio et Servaeo sacerdotia tribuendi40. » Claude, dans le discours au sénat, dont l'ori ginal a été conservé par le bronze de Lyon, sollicite pour les enfants de son ami L. Vestinus les sacerdoces, en attendant qu'ils soient d'âge à. s'élever dans l'échelle des honneurs: « Cujus liberi fruantur quaeso primo sacer dotiorum gradu, post modo cum annis promoturi dignitatis suae incrementa41. » On a cité plus haut les passages de Suétone où il nous apprend que le même Claude ne nomma, c'est-à-dire, ne présenta personne pour les sacerdoces sans avoir au préalable prêté le serment d'usage. « In cooplandis per collegia sacerdotiis neminent nisi juratus nominavitsd. » Cette phase pourrait faire croire au premier abord que les collèges avaient à cette époque reconquis le droit de se recruter eux-mêmes. Mais il faut se rappeler que la cooptatio avait toujours été maintenue en droit,les collèges étant censés coopter ceux que le suffrage des électeurs compétents leur avait imposés i3. Au reste les collèges dont il question ici sont de deux sortes et l'observation de Suétone ne vise pas plus ceux dont le recrutement avait été réglé par la loi Domitia que ceux dont le droit de cooptatio était intact. On remarquera seulement que la marche à suivre différait suivant qu'il s'agissait des premiers ou des seconds. Pour les premiers l'empereur devait faire ses présentations devant le Sénat. Pour les autres il s'adressait directement au collège. Un procès-verbal d'une séance des frères Arvales, tenue en 118 ap. J.-C., mous montre comment les choses se passaient dans le deuxième cas. 11 nous fait assister à la cooptation d'un candidat : « ex litteris imp (eratoris) Caesarisl'rajani Badriani Augusti. » II nous donne même le texte très bref de la lettre impériale: « Imp (erator) Caesarr Trajanus Iladrianus Auguslus fratribus arvalibus collegis suis salutem. In locum P. Metili Nepotis coilegam nabis mea sententia coopta L. Jalium Catum 44. » Un fragment des fastes des sodales Antoniniani 47, un autre fragment de fastes sacerdotaux que l'on ne peut rapporter à aucune corporation déterminée S6 signalent chacun, parmi les cooptations successives dont ils présentent la liste, une cooptation effectuée conformément à une lettre de Septime Sévère, l'une en 198 ap. J.-C., l'autre en 207". On voit que les empereurs de cette époque, moins scrupuleux que Claude, se contentaient d'une communication écrite d'où la formalité du serment paraît absente, mais en somme, ils ne faisaient qu'user de leur droit de présentation dans la mesure où ce même droit était reconnu à tous leurs collègues, sachant bien d'ailleurs que la simple expression de leurs préférences équivalait à un ordre sans réplique. Il y a deux lettres de Pline qui prouvent bien que les membres des collèges n'avaient nullement été dépouillés du droit de nommer des candidats. Dans l'une, devenu augure à la place de Julius Frontinus, il rappelle avec attendrissement que ce personnage n'avait cessé de le nommer plusieurs années de suite, le désignant hcs ~a eso'erdol s perce, La ilienv, J'eut' avait le vœu du défunt. Ce prend en (mus lue les presen tatamis se lc. MIS, à brie e Lee. ti Mommsen relève, qui farito 7 eiit J'a placer, pour .e preii uuoïs de mars, àpart les il t, : Is tin constances". stil en est t ei Vie, qu'il. eût ou noie dressait listai de candidats en membre pouvait avoir le sien qui atm: lt devant celui de 1 ente ée'c r. :tapi le p aif a topos d'in tervenir, fin.ue J'en ,ont_e ,tes Sade . ,CES comme octet :LUS tit'OL CI1erti-la -I lu.r caner.. , l le est rem, :l s tt t t,=foïs action inca equee dans la loi aiomittr était are admise en ce qui cond'er'nzat~ et {tua, ~: grand Quoi. qu'il en eut, 1E V J'7, Reï3 et le r en générai, la présentiatimn comme ana t tires, ✓mettait, une e gardait, pt S9ntant autant de es q y avait de vacances, i ouie-.er toute initiai ou même aux corporations coop tantes, u 10°' un e se serait pas prévalu ie culte 're.110ri.niutdation quand tin atait obtenue'''. ll semble arts;, que te droit de ntin10n00CVV laisse a:., .t1C,ges r t t l ,i i tomber en désuétude il avait été absolument lrouf trace, Enfin Ilion Cassius nous lit que l'empereur, investi lui-même de tous les sacer toces, conférait encore la plu phrase est, trial fait.;, .ais il est évident que IM.m..i Cassius entend, non la plupart. des sacerdoces, errais la plup.. ,'es ee es dans les sace,rdores, sans 'e V -t il faudrait crin_ .,,.osait d -i_ -ciuteme, i del; st ri . c, ç, Les, honneurs 'lutte Plaines ,étaient ceux qui se conféraient pat` des brevets émanant de la, chancellerie impériale r_l ré,stillait de là que l'empereur créa dorénavant les pontifes, les quindécimvirs, les augures, et probablement aussi les sepi( envié epulonurn de sa propre autorité, trcit' illt 'impie diplôme, au lieu de s'amuser à les faire pat le sénat. La seille concession qu'il fit à la hante ce fut de, lui communiquer ses décisions matière'i'. On est surpris qu'une mesure de ce c soit l'aeu.vre d'un prince dont la politique consista i cu'ist,incnt à réagir contre les tendances antisénatot.ales du fondateur de la dynastie. Ii se peut que la deuxième partie seulement de la mesure lui appartienne, en ce sens que les promotions par diplômes ayant été instituées avant lui, il voulut du moins qu'elles fussent notifiées au sénat. On rencontre quelquefois la formule oopiatus ex•senelus-consuilo. n Mais il suffit de parcoui ir les textes épigraphiques ou numismatiques où elle est employée pour reconnaître qu'il s'agit de cas tout spéciaux v0. ils concernent des princes de la famille impériale, des héritiers présomptifs pour lesquels 1" empereur faisait mine de s'abstenir, s'en rapportant à la libre initiative et à l'entltousiasm.e spontané du sénat. Comme ce zèle n'attendait pas qu'une vacance se fût produite, il fallait créer une place supplémentaire, et M. Mommsen suppose que le srnatusennsuite en question n'avait pas un autre objet. En d'autres termes il émanait du sénat, en tant qu'assemblée législative, et non en tant que corps élecor°ai 'da Cette distinction est, bien subtile. li est plus probable que la décision prise était double et visait à la fois :a piaee it créer et le titulaire destiné à la remplir. II est vrai que Dion Cassius attribue à l'empereur seul le droit d'augmenter le personnel tics collèges : îsptac vi avz~v x»s 5°sp -c®v épteuùu, Ô:9UL mu âei fit,%ïisv 79poxtpeialot7epoax0recr1qorattio rz Mais il lui attribue de même le droit de nommer les membres ordinaires''., en sorte que pour ceux-là comme pour ceux-ci l'affirmation de l'historien ne prouve nullement que, régulièrement, un vote du sénat ne fût pas requis. Quand l'empereur n'avait pas été introduit dans lE collèges avant son avènement, il l'était peu après, ,is cett : Cois sans qu'il y eût lieu d: créer une place 11', car il prenait celle de sein prédécesseur à 1'em est ainsi par exempte qu'Z;lagabale fut coopté pale ii les soiladiesrliato 0iani, le 24 juillet. 2123, o ex senaîusev.a5uitc3, » et non pas supra numer°um, comme ii appert d'un fragment des fastes de cette corporation 6J. li était iiéce.ssaire de rappeler et d'élucider ces dispostfT s e?mmunes aux quatre grands collèges afin de DU T rendre compte aussi nettement que possible du recrutement du gtiindécïmvirat". Pour en ieveuir â cc (fui touche spécialement ce dernier, il faut signaler dans son organisation la particularité suivante. On se souvient qu'il comptait deux magistri alors qu'il comprenait dix membres. Il n'en compta pas moins de cinq ;.lors que les dix membres eurent été portés quinte. C'est au moins ce que _"on constate pour les premiers temps de empire, et c'est encore aux fastes consulaires capitolins que l' n doit cette information. On a lu qu'ils donnent en i rii-'e la série des jeu .séculaire: avec les noms dies f saeris jaciandis alors en fonctions. Ils en nom. cinq pour les jeux de 17 av. J,-C. = étai de 1{. et clans le nombre Auguste lui-même quise trouve placé con te'e "-, Tacite, à propos d'un fait qui se passa sous Tibère, parle encore des reagistri des . V vïri au plus " On ignore à quels besoins répondait cette multiplication, tout, àô fait anormale, du personnel administratif. Il se réduisit bientôt à un seul magister qui ne fut autre que l'empereur 69 suppléé, comme dans le collège pontifical', par un promagisteapour l'expédition des anTaires courantes", On comprend fort bien que l'empereur, arbitre souverain des rites nationaux en sa qualité de pontifes eraiei;nus, ait tenu à prendre officiellement la infirme position à l'égard des rites étrangers dards un temps où ils accaparaient les consciences en pleine fermentation religieuse. Cotte concentration des pouvoirs nous apparaît comme un fait accompli sous Domitien. Les fastes le nomment sent en mentionnant les jeux séculaires célébrés sous son régne en 88 api J.-fer. ". Peut-être fut-elle décidée par ce prince, très prétceepé, tomme on sait. de ces questions. Il semble qu'après lui on soit allé plus loin dans la même voie. Comme s'il ne suffisait pas de soumettre les pontifes et les quindécimvirs à une direction unique, on voulut le rapprocher et peut-être les fondre en un môme corps, En l'an 2â0, au milieu d'une crise provoquée par une invasion des \larcomans, Aurélien ordonna qu'on c'encul' 'il , les livres sibyllins. Son biographe `ropiscus noce a conservé la lettre qu'il écrivit au sénat à ce sujet et procès-verbal de la délibération qui s aientrit '. On remarque qu'il n'est question des quindécirrvi °s aucun de ces deux documents. Ce sont les pontifes qu voit chargés, et par l'empereur et par te sénat, d'ouvrir k recueil sacré afin d'y chercher le secret des destinées de l'empire Les écrivains de l'histoire auguste ne sont pas toujours très cxat,t', dans leurs affirmations ni très corrects dans leur langage. Toutefois ils savent très bien distinguer entre les divers collèges et donner à chacun son vrai nom I'.h De plus nous avons ici des pièces officielles où une confusion sur ces matières paraîtrait encore moires vraisemblable qu'ailleurs. D'un autre côté on verra tout à l'Heure que les quindécimvirs, Lien loin d'avoir été supprimés dans le courant du troisième siècle, prolongèrent leur existence jusqu'au commencement dit cinquième. Comment donc expliquer la substitution. des 60 tïoy. sur cette question qui reste malgré tout ('ore ;semai: , Lc-,zofaph. a pas lieu de corriger le nie et de mettre le singulier, con-une l'art. Nippe,dey. 2bé-Leeiereq, Les ed:,fes lit `a.ieieaz_n. laine p. 3GO. . 4 Ürelli i'29i f 3_;.. C pontifes aux. quindeciuu dans les hi i avaient été la propriété ettelusty e de ces i. 'a raison 'nèu'e de leur izl titul,ioi. W. llc . ci une sorte ale fission entre les deux clin. le I1ni.i" ainsi qu'il sui t. ", A. cette époque de syl leu dans le vaste pèle-mêle despratiques ligue rte démarcation entre la cum'n et celle des quindécimvirs lev, flottante D'un autre côté les pc; pet il aojoio r'o M5 gniadé_ioti'n ire s a. ppul:. à sur l'autorité di xic.,._ient leur influence ci ,hotte en n, succombait la veille religion rtimaipe. lis religions grecques elles-mêmes mena dénient des superstitions r 2s, 'plie ineï d'une part la connexité -s questio; ibunai respectif, dc' ,. le en mune, [Ontl,it' COitli'.Ya2t r„101), ' plus facile quits avaient t.. ime pi .: l'empereur, .ales plus souvent gracie ian munit i0Cmblies, ils formèrent donc; un. seul corps toutes les exigences de 1 administration retira:, aller l,ourtantjusqu'à une assimilation cnrnpl te. du plus important des deux eu-lièges devint , deux ta dénomination commune, mais ils ne lièrent pas l'un dan l'autre, ils conserve rut leur c Taifière propre, leur organisation particulière, Mut, alts'ibutions spé"iales, et c'est, ainsi que le collège suer aeparaitre avec son individualité lorsque ta scission s'opéra. D tilleul de cette hypothèse, itieinarquant (pie de l'an `Yi a l'ai dctlt aucune inscription s c elntic';rie le titre de quindéc:imvir, pense -` e la drill' a duré, environ un demi-siècle, de fa. Pr, fit depuis Alexandre Sévère qrti la réorganisation complète de toi ptliiiie accomplie par Dioclétien. Lete ,r le Servius soulève une autre difficulté ennemi' lège. Ce commentateur nous appr quinze membres fut dépassé et r bien que le nom sil^nit; quine, la.fin ' . On t ode nuire les ui r ,nr'n_C ttr" es ou surnuméraires, Cl''' t mite '^. Pourtant il ne semble pas qu'en monté aussi hait, il est permis de raisonner „lie. Ln fragment de fastes sacerdotaux édiudie sais " et qu'il rapporte aux scit7ales montre qu'on ne créait de places ,lori d'absolue nécessité., Le collège en question éi ci iglnaireralent vingt-cinq. On en. ajouta rime sixième lorsque le deuxième lis de Germanicus ,itït-'Il eu 33 api J. -C. le, mêmes honneurs que son frère :aire; lequel, suivant toute vraisemblance, aval succéd?, dans le collège a son père. On en ajouta une .nr l -ser t_t tint pour Néron en 'il, iule v ngt-huitittue pour Titus en 71 et cette dernière, ayant été supprimée api" _a o tirtt de ~S 1s-21. Agita iodur et easari_0niii ptutiiicual c er mouiectoue soiietr.. mil=le jnvato principen, cranter Pari. Oit ,irnus duos, P. !.1., oui fluons Oeestrcnvo, et A1 1,100u ,rincipis liftera.. , :. Agite igiiur P~mtdicas... vcter¢nis ma,-:bus oioii: .,a, fusa reipnttüca'„ q t' =,urt i terne acrtsa rite, ~~ Lamprid. Ali e. , i " Les Pontifes, p. 390-39L Il tant dira que M riel: `',, Y_'t it.-ut pa.[i hr,inlt,l' 'u1s Ille tDO ';tge 'aik._ rèeernt D I J U '132 DUU cet empereur, ne fut rétablie qu'en 107 par Caracalla. Quand Pline sollicite de Trajan le double titre d'augure et de septeincir epulonum, il ne lui demande pas de créer en sa faveur une place nouvelle, mais simplement le le faire profiter d'une vacance "0. Il y a donc tout lieu de croire le renseignement de Servius erroné. On a supposé une faute dans le texte : au lieu de LX il faudrait lire XVI 81. Dion Cassius nous dit en effet que César renforça d'un membre les quindécimvirs comme les augures et les pontifes". Ce fut sans doute un des articles de cette loi Julia de sacerdotiis dont il a été parlé plus haut. Mais l'expression employée par Servius « crevit numerus » s'applique mal à une augmentation aussi insignifiante, outre que l'erreur attribuée au copiste n'est pas très explicable au point de vue paléographique. Il parait plus juste de supposer une confusion avec les haruspices qui précisément étaient au nombre de soixante, depuis qu'ils avaient été constitués par Claude en corporation officielle B3. Les quindécimvirs étaient, comme il convenait à l'importance du collège, de très grands personnages, d'anciens consuls, d'anciens préteurs. Rarement on voyait parmi eux des jeunes gens, à moins que ce ne fussent des princes de la famille impériale u. Ils apparaissent avec le même caractère dans l'épigraphie du quatrième siècle S3. Ils y sont même assez nombreux. L. Aurelius Avianius Symmachus, le père de l'orateur, le préfet de la ville en 364-365, fut quindécimvir"6, L'empire chrétien essayait donc ou affectait de tenir la balance égale entre les deux cultes, et l'antique collage sacris faciundis vivait à l'ombre de cette tolérance relative. Peut-être même dut-il à l'abstention dédaigneuse des empereurs une liberté d'action qu'il n'avait pas connue depuis longtemps, et d'autant plus large que les événements l'avaient rendue plus inoffensive. Les livres sibyllins dormaient d'un sommeil qui ne fut pas souvent troublé. Julien cependant était un païen trop zélé pour ne pas tenter de remettre en honneur cet oracle suranné. Il le fit consulter à propos d'un tremblement de terre survenu à Constantinople, à la veille de son départ pour la campagne contre les Perses, mais il ne poussa pas la déférence jusqu'à suivre des avis pusillanimes le détournant d'une entreprise aussi nécessaire que dangereuse S7, Enfin Claudien montre encore ].'Italie, dans la terreur où l'avait jetée l'invasion (les Goths vers 402, sollicitant a le lin qui garde dans ses plis fatidiques le dépôt des destinées romaines S8 ». C'est pourtant Stilicon, le héros de Claudien et le vainqueur de cette guerre, qui ordonna de brûler le vénérable recueil "°. Cette exécution ne passa pas inaperçue. Elle transporta de joie les chrétiens ardents et porta un coup douloureux aux derniers sectateurs de l'ancienne foi. Elle fit pousser des cris de triomphe et-de colère dont l'écho est arrivé jusqu'à nous. a Il n'y a plus, s'écrie Prudence, de fanatique essoufflé qui, l'écume aux lèvres, déroule les destins tirés des livres sibyllins, et Cumes pleure ses oracles morts 90. » II charge évidemment les couleurs du tableau. 1,es quindécimvirs avaient beau se porter les héritiers de la sibylle virgilienne. C'étaient des gens rassis qui n'imitaient pas ses fureurs, De son côté Itutilius Namatianus, qui n'était qu'un Gaulois, mais qui parle en Romain de la vieille roche, ne peut se consoler de ce qu'il considère comme un malheur public. Écrivant après la disgrâce et la mort de Stilicon, il l'accuse dans son invective, non seulement d'avoir ouvert Rome aux barbares, mais de l'avoir voulue d'avance enchaînée et désarmée. COMPÉTENCE. La compétence du collège était très vaste et très variée. Tite-Live la représente assez bien sous son double aspect quand il appelle les décemvirs sacris faciundis les interprètes des oracles de la Sibylle et des destinées du peuple romain, les ministres du culte d'Apollon et de plusieurs autres cérémonies a carminum Sibyllae ac fâtorum populi /verjus interpretes, nntistites eosdem Apollinaris sacri caerimoniarumque aliarum ". » Pour ramener cet aperçu général à une classification plus méthodique, on peut dire que le collège créé par Tarquin réunissait des fonctions que les Romains, en principe et malgré certaines confusions et certains empiètements inévitables, s'attachaient à partager entre plusieurs corporations-ou plusieurs hommes alors qu'il s'agissait du culte national. En d'autres termes, les quindécimvirs étaient des devins comme les augures, des prêtres comme les flammes, des administrateurs comme les pontifes. Ce développement de leurs pouvoirs, plus ou moins conforme aux intentions du fondateur, était en germe dans leur institution même. Il ne s'est pas opéré au hasard, ni par l'intervention de volontés extérieures. Il a suivi une marche logique, une évolution naturelle, et en quelque sorte nécessaire, et c'est ce qu'il importe de bien démontrer. L'office propre du collège et le point de départ de ses attributions ultérieures est la garde et l'interprétation des livres sibyllins. Le temple de Jupiter Capitolin, devenu le centre religieux de la Rome nouvelle, les avait reçus en dépôt et les conservait à l'abri de tout regard indiscret, enfouis sous le sol et enfermés dans une cassette de pierre 93. Ce dépôt primitif ne tarda pas à s'enrichir d'acquisitions nouvelles. Le monde ancien, le monde étrusque et en particulier le monde latin retentissaient de voix prophétiques. Les unes s'étaient fixées sur les villes assez avisées pour leur offrir un asile °a. Les autres, à l'état errant, semblaient en quête d'une hospitalité qu'elles se chargeaient de récompenser par d'utiles révélations. Les Romains, trop superstitieux pour les repousser toutes indistinctement, et en même temps trop sensés pour ne pas limiter leur superstition même, se DUU 433 DUU contentèrent de tenir leur porte entrebâillée au lieu de l'ouvrir toute large. Ils enrichirent la collection aussi prudemment qu'ils en avaient accepté le don, procédant par additions successives longuement espacées, pratiquant un triage sévère, écartant tel morceau, admettant tel autre, sans qu'on puisse toujours assigner de raisons à leurs préférences ou à leurs exclusions. C'est ainsi que les oracles de la pseudo-sibylle de Tibur, Albunea'', prirent place à côté des documents plus anciens dont ils étaient sans doute une sorte de contrefaçon. Plus tard Varron l'inscrivit la dixième dans le canon sibyllin. On racontait qu'on avait trouvé sa statue dans un gouffre de l'Anio avec un livre à la main u. Les sentences fatidiquesde la nymphe étrusque Begoe furent jugées dignes du même accueil". En l'an 213 av. J.-C. = 541, au milieu de la deuxième guerre punique, le sénat dans sa ferme raison crut nécessaire de calmer les esprits excités par le danger et livrés en proie aux charlatans. Il chargea le préteur M. Atilius de faire main basse sur la multitude des écrits divinatoires dont la ville était infestée. Dans cette littérature malsaine un seul ouvrage trouva grâce. Ce furent les deux volumes du devin Marcius. Tite-Live en a conservé deux extraits : dans l'un on annonçait le désastre de Cannes, tandis que l'autre réclamait, pour chasser les Carthaginois, des jeux en l'honneur d'Apollon 96. La prédiction n'avait pas grand mérite à être exacte, l'événement étant antérieur de trois ans. Mais les Romains n'y regardaient pas de si près. De plus les perspectives encourageantes ouvertes au nom d'Apollon convenaient à la politique du sénat, comme l'appel à ce dieu flattait les prédilections bien connues du collège sact'is faciundis. Les carrnina Marciana, forts de ce double appui, allèrent rejoindre l'ensemble des libri fatales 93, dont les livres sibyllins proprement dits ne formaient plus qu'une partie, la plus importante. Ce récit se rapporte à une époque qui ne permet pas d'en contester l'authenticité, mais il ne nous apprend rien sur la personnalité du devin Marcius, auteur des livres auxquels s'est attaché son nom. Réduite à une figure unique par la plupart des écrivains latins 100, dédoublée par d'autres en deux individus, ou même morcelée en trois10i, placée en dehors de toute chronologie positive, cette personnalité ne correspond en somme à aucune réalité historique. Pline est dans le vrai quand il la met sur le même plan que la Sibylle elle-même avec Melampus, le plus ancien des devins grecs', et d'ailleurs la tradition rapportée par Symmaque et suivant laquelle Marcius aurait écrit sur des écorces d'arbres103 montre bien dans quel lointain l'opinion le rejetait. Le devin Marcius représente donc une conception purement mythique dérivée du dieu Mars et dont le premier pontife à Rome, le confident et le parent du pieux Numa, l'aïeul du roi Ancus Marcius, Numa Marcius, offre comme le prototype 404. C'est sans doute à ces souvenirs qu'une fraude pieuse, consciente ou non d'elle-même, rattacha quelques-unes des pro III. phéties mises en circulation au lendemain de Cannes, et I'on voit par là quo la vieille légende était encore assez vivante pour en engendrer d'autres et se reproduire sous des formes nouvelles'°'. L'instrument prophétique ainsi constitué fut détruit par l'incendie qui, en l'an 83 av. J.-C. =671, dévora le temple de Jupiter Capitolin i0C II ne manquait pas à cette époque d'esprits forts très capables de se consoler de cette perte, mais il s'en fallait que la majorité pensât de même et surtout le collège dont l'existence était compromise par cette catastrophe. Sylla montra qu'il n'entendait ni le supprimer ni le diminuer, en portant le nombre de ses membres à quinze, et peu de temps après, en l'an 76 av. J.-C. = 678, sur la proposition du consul C. Scribonius Curio, le sénat nomma une commission de trois membres avec mission de reformer, autant qu'il était possible, le trésor anéanti. On n'avait que l'embarras du choix. Les feuilles volantes de l'inspiration sibylline étaient répandues sur tout le littoral méditerranéen: Les particuliers mêmes se vantaient d'en posséder de nombreux échantillons. Le difficile était de reconnaître les vrais d'entre les apocryphes, et l'étonnant, c'est qu'on crut y avoir réussi. On s'adressa d'abord à la ville d'Érythrée. C'était remonter aux sources mêmes de la révélation, puisque la sibylle de Cumes était partie de ce point et que le type sibyllin en général s'était élaboré sur ces rivages. Au reste les recherches ne se bornèrent pas à cette ville, On en fit à Ilion, à Samos, en Sicile, en Italie, en Afrique, et le résultat fut une collection de mille vers environ que l'on déposa, après examen des quindécimvirs, dans le temple restauré par les soins de Lutatius Catulus 101. Les instincts superstitieux, frais en branle par cet incident et stimulés sans doute par la cupidité, eurent peine à rentrer dans le repos. Les livres fatidiques continuèrent à affluer à Rome. Auguste, devenu grand pontife à la suite de la mort de Lépide, en l'an 12 av. J.-C. = 742, dut faire comme le sénat deux siècles plus tôt, après la bataille de Cannes. Il fixa un terme pour porter ces écrits chez le préteur urbain, et défendit à tout particulier d'en garder en sa possession. Plus de deux mille, dont il jugea l'autorité insuffisante ou nulle, furent brillés par ses ordres. Parla même occasion, il soumit à une révision attentive les livres sibyllins euxmêmes, puis les fit recopier, pour assurer le secret, de la main des quindécimvirs et transporter dans le temple d'Apollon Palatin où ils furent enfermés, non plus dans un coffret de pierre, mais dans une sorte de tabernacle doré au pied de la statue du dieu 10'. C'est là que nous les trouvons encore sous le règne de Julien 109. Ce déplacement était significatif à plusieurs égards. Le chef nouveau de la religion romaine faisait montre de sa science théologique en accusant le lien qui unissait la Sibylle à Apollon lto Le fils et l'héritier du divin Jules payait une dette de famille en abritant sous son patronage immédiat l'oracle, artisan de la légende qui avait consacré la grandeur de sa maison 111. Enfin l'empereur, en instal 55 les une partie rémais il n. , -i e i ieri li puisse nous e CaraCtère U0 Cette notation, Connue ier,_i; pour 1a plupart de la (irèce, !.'rte =e fat an grec it' C'est que, dès t principe, un adjoignit à la lit ti nviraledeu, esclaves de nationalité het (cours desquels el.. pouvait ni ne devait rani, la le :ma te n'était pas exclue, devin Havé _ rt r4 e,t latin. On le DU: '.ire dans le temple dépositaire vies desti nent que désormais elles rpeee et à celles de s Tibère, le qu'Inde lait, par l'inter a; t'l'e Qulnt'li?.:lus, et, réussit à. ir un nouveau livre sibyllin. Tibère i d_ zèle, en cette matière moins li se méfiait assez justement des manis ralates et esprit p=apll tique It trou ent propres à, troubler les esprits et iecasiou, couvrir des insinuations rl tl. e iib uttcs contre sa personne et son gouvernement. Il avait été fort irrité, treize ans plus tôt., en 19, de (ter -édictions lancées au titi .ctentde ses démêlé avec +l avait protide cuite circonstance pour i:cécution or(i -mis le règne précédent, mentant de quelques textes inoffensifs le recueil (-Int.i ï 'tif acquis le droit de supprimer les autres "'. ii ta 'lemenf, les auteurs de la proposition et le v l3' rhème qui 1 avait v( teeIl rappela les ordonnances d'Auguste et tailla la marche suivie en cette affaire. lut de ta porter devant 'e sénat, il aurait fallu s'étire assuré de approbation du collèges Toute nous dit qu'il renvoya lui l ; document en u(estion, mais il ne nous apprend e t-, lllel est le parti a a .e' ''r s'arrêta défit, mitent il v a tout lieu de ,aire qu'il flet con entions (t . l i Tables , tremant exprie.: matie. ( n.' e .s ta c,c?,csisib.5'lllin est close -non qu'il n' pu en:-ire être amplifie par ita sui s'il , neus n'en savons rien. Saur la 10rroc t es et ,;urLeur contenta, nous ne pou vons é;-ue r iiilir les ocunées assez peu cohérentes i;;diseril;titt ,, Ch1 cr'liti w ai^_ls, citant it• ta ils can i titi( i Mailles de pale sans tinette des pale, ter: de l'Afrique un t'u r côté, i''• et Sian lent que 1 on, employait le liv. I'ati.it e lors Mire après l'in :mes ,l'arbre t 1, voit par les extraits s__Men donne Tite-Live ". Il parait évident qu'if in était de même des prophéties de la sibylle T'iburtîne. Et rien n'empêche de croire que celles de la nymphe Begoe fussent en étrusque. Le vers était de règle pour ce genre littéraire. fies textes sibyllins étaient donc versifiés let "Tibulle nous dit qu'ils l étaient en hexametres'2a. Il veut parler probablement des textes grecs, les -Plus nombreux. M. D. navet a, restitué en vers saturnins les deux cm-mina Marciana "'. Cicéron donne un détail curieux. Il remarque en souriant que les vers improvisés par la sibylle dans le délire de l'enthousiasme dénotent un. esprit singulièrement maître de lui-même, car on y rencontre ce raffinement que l'on appelle acrostiche, c'est-à-dire que la suite des premières lettres de chaque vers reproduit .i.e premier vers du morceau 921. Denys d'Halicarnasse confirme ce renseignement en faisant observer que, dans la compilation exécutée aprte» la destruction du premier dépôt, les acrostiches permettent de reccmuaitre les parties interpolées '6. On se demande, il est vrai, comment avec ce critérium les interpolations ont été possibles. Cette difficulté a conduit à une autre interprétation du texte de Denys. Denys aurait voulu dire que les morceaux interpolés se reconnaissaient à ce qu'ils étaient acrostichés, niais dans ce cas il faudrait rejeter l'affirmation de Cicéron et c'est, à, quoi l'on ne se résoudra. pas volontiers '2'. Quant au mode de consultation, nous sommes réduits aux conjectures. I.-e seul. fait positif, la savoir que les quindécimvire n'approchaient de leur trésor que les mains voilées 10, est insignifiant. Varron''r et Tibulle t3' se servent de l'expression sortes pour désigner tes oracles sibyllins. Ce terme, s'il est pris à la lettre, fournit une indication. Les sorites étant un procédé divinatoire très répandu en Italie et même ailleurs. II avait ceci de particulier que, sollicitant l'écriture et non la parole, il provoquait la réponse, non pas par interpellations, mais au moyen d'un acte mécanique 121.0n e retrouvé, dans les environs de Padoue, quelques tablettes de bronze sur lesquelies sont inscrits des sorts'.' et l'on sait que ceux de Préneste étaient agités au fond d'un coffret avant d'en être tirés 11 , I, est ,probable que ia consultai on. sibyllin's'insirait des mêmes principes, appliqués au matériel dont. elle disposait. Niebuhr suppose que l'on ouvrait au hasard un des livres en prenant pour la réponse cherchée le passage aussi amené sous les yeux du consult7ant'R4. On sain que de tout temps cette façon de faire parler les textes sacrés a, été en honneur auprès des dévots. M Delaunay croirait, plutôt que les livres étaient battus et mêlés comme on faisait d Préneste, attendu qu'ils formaient des paquets de feuilles détachées dont chacune portait une sentence indépendante et très courteDans l'une et dans l'autre hypothèse, il reste bien des points de détail obscurs. Klausen a, essayé d'en éclaircir quelquesuns `as, Il imagine deux systèmes dans lesquels l'acrostiche figure comme l'élément principal. Mais il parait mnu reste, et bien que +.. ° .; lien t puissance vaticinante, déi ,iont qu'on attendait du dé en ne in mémo qui ie.a dira^.t imposé .,.t tarée autre de ui rie doit elles en défaut, ces profJh=_'ii Fgg'l te1i:15 file de le suivre dans ces cornbirrai i.ii on D'esprit te plot fécond en ressources u' peut que iiver«ier Ce qui est certain, c'est que les mi . aient en. effet très brefs. On en peut juger par les 'e (forum', L'équivoque était, au même titre que la r nei pion, une des lois du genre, toutes deux cou,:' mies par une prudente réserve autant qu'imposées par la nature de l'inspiration. On a vu la réponse à Maxence, Quelque temps avant la mort de César le bruit se répandit que, pour vaincre les Parthes, il fallait proclamer roi celui qui l'était de fait '1°. On prêtait cette déclaration au collège suris fticiunddis. On annonçait qu'il la porterait devant le sénat. Le sens en était clair; mais elle avait été'legagee d'une formule ambiguë dont Cicéron se moque de manière à en détruire l'autorité. Il sou tientuue, applicable aux cas les plus divers, elle ne l'est pas plus à la circonstance présente qu'à tonte autre tasil appartenait aux quindécimvirs de tirer des conclusions précises de textes qui l'étaient fort peu, et afin d'éviter les controverses dangereuses, ce n'éfaient pas les textes, maïs l'interprétation proposée que l'on communiquait généralement au pu blic Leur compétence n'allait pas au delà de ce t'ôte d'exégètes. C'est un point sur lequel il peut être bon d'insister. L'État avait une trop haute idée de ses droits pour abdiquer entre les mains du sacerdoce, ou, pour mieux dire, l'État n'avait pas à s'incliner devant un pouvoir qui n'était qu'une délégation et une émanation de lui-même. Jamais on n'oublia à Rome que la religion, née avec la cité, n'existait qu'en elle, et qu'ainsi les prêtres n'étaient que les auxiliaires des magistrats, sans autre mission que de mettre leur science spéciale au service des vrais représentants du peuple dans ses rapports avec les dieux comme les hommes. Si l'on ajoute qu'ils ne ressemblaient en rien à un clergé, qu'ils étaient eux-mêmes des sénateurs, des magistrats, des hommes d'État, cumulant les fonctions sacerdotales avec les fonctions publiques, on comprendra que la pensée même d'un conflit eût paru absurde. Les qui ndécimvirs, pas plus que 1.es augures et les pontifes, n'avaient d'initiative d'aucune sorte. h ne pouvaient ni ouvrir les livres (erdïre, Lise, eae libros), sans l'invitation du sxl,t, ni, _. pli: , l'otite raison, conférer par eux-mêmes une valeur i 'mire aux décisions que cette lecture leur avait s. Ils n'étaient pas davantage, comme on 1'a val, les maîtres d'introduire dans la collection une pièce nouvelle. La divination grecque, transportée à Rome, y connut donc les mêmes entraves que la divination italique, et s'il faut avouer que ce système de compression appliqué au plus puissant Peut-être et au plus spontané des instincts religieux trahit une imagination assez pauvrement douée, il faut convenir d'un autre côté qu'il était dicté par une profonde sagesse, par un sens très sûr des nécessités du gouvernement. Ce ne fut pas seulement sous un tyran soupçonneux comme Tibère qu'une sy"bille indiscrète put être considérée comme un danger public. On avait eu sous la république plusieurs exemples des abus ou aurait pu entraîner une divination mal contenue. On avait vu des extraits plus ou moins authentiques des ci ar"Nitr--r° 1 r.n. 1i:.an lins, entre, eu., , e',iI q.r'e, relie ' l a v o i r f i( i, 1 t1t à. i -rancie, la lei ', dit Taurus '. Cornelius I, ''mlus, tin des principa de Catilina,, allait répétant xr une guerre civile ait prédite pour cette année, et que l'empire promis a' trois `;orneiii n' pouvait u'a.igitel' de lui échoir à lui troisième, après les deux premiers, Sylla et Cinna, i,a, Ln 56 av. J. -C= 695, le roi d'Égypte, Ptolémée tutete), e trouvait a. Rome, intriguant pour se mire rétablir si'r .éon trône et ne s'interdisant pour ai!r:per i o., lin ni ta corruption ni la violenee. avait obtenu uni 5(3, tu consi ]te 'rme ses i ux Cette même année on eut i ii?-ter le, livres sibyllins. Le tribun thi ;= Prend "Mit, ne Laissa pais aux q ,inrléeime ii's le 1. i en i ,Sérier au sénat, 11 les conduisit devant le peuple ei, leur fit dire qu'il fallait sontenir ie souverain proscrit, mais sue ailler jusqu'à un concours arme. il voulait, en divulguant. Lora.. cle, soulever l'opinion et arrêter a haute assemblee sur la voie on elle s'était laissé entraîner. l' g réussit, ruais. l'illégalité était flagrante et la pentue daribecAse. La supereberie n'était pas moins évidente et Cicéron n'en est pas dupe. il est clair, en effet, que la réponse publiée était Pro précise et trop `tiers adaptée aux circonstances pour qu'on y pût voir antre chose qu'une tsaelucttuu tr;,'s libre d l'original ' Le même Cicéron, dams le passage -'in De 2ai➢inanconc un il _21outS' a Sibylle n: " 11' rJ „ré mal gré, parmi les partisans de la monarchie renclut par une réflexion qui est d'un homnl d'État alitant que d'un sceptique et qui résume admirablement la pen sée du législateur : I'cl`ennt ad depco-. nenrlccs /intrus quant ad s.tscipiendas rift 'ones i«a o En d'autres ternies, le dépôt sibyllin a été orzsti ue par I'Éta€; note pour fournir un. nouvel aliment à l,, superstition, irais, au :oul''ièi°e, pour'a, ré.driire, au minirnuni. T' endigue le torrent -pour l'empilai . de déborder. ..._ 'liement une prophéties honneur. Le prouve assez qu'il ta Embarrassantes pour le col s=pmalent de mettne la clairvoyance es ne l'eussent glas été moins Pour les pouvoirs pul.utaes dont elles auraient p r Wlysé 1' action, Ce qu'on demandait a,uxquinidec'nesirs,c é aient des recettes pour apaiser la colère des 'li:"nx` ' Mieux que les prophéties, elles commandaient par = confiance qu'elles inspiraient, Les cri consi. ''.. es. oit l'on devait tes ,inciter étaient assez ma' spécifié s. Il fallait un pros' de ce mot était fort vague. Cin enter,-_' use lia rue sis.lement une contravention aux los na t p étri:, i le; e se tes figuraient les anciens, mais moins que cela, un phénomène simplement bizarre, extraordinaire, ou bien encore quelque a,laniit+ quel Ça [' e , t I' 4 et ut. Mc, 144 I 4d t , 7. m cette antre, ` ; ant, hc n ! e h. q 35 et s iJ.me f. nit! :te p. n t', r 313-315, i loir 059 t L_ dés , 54 note 147 Va,. P s, : usf. 5 t . .. ad culas f ti ils," lil+.r... publi ' so-ennui r:'die, quum des-devamu_ qutd fasiend'cn sit n-'bis ex xtiquo porcentn. Vopiscus Apure. 'S; DieL IV, , c,.. L iv. REci, _. DUU 436 -DUU que fléau, comme il s'en présentait rarement, enfin, tout événement, grand ou petit, où l'on pouvait reconnaître l'intervention divine, le doigt de Dieu, comme on dirait aujourd'hui 146. Les Romains n'avaient pas attendu les révélations de la mantique grecque pour inventer la procuratio prodigiorum, c'est-a-dire pour apprendre à détourner par le sacrifice et la prière le malheur présent ou à venir. La science des pontifes tenait en réserve pour les cas de ce genre tout un arsenal de cérémonies expiatoires ou piacula. Les haruspices étrusques, tout étrangers qu'ils fussent au sacerdoce romain proprement dit, et quoiqu'on leur témoignât parfois une défiance injurieuse, étaient aussi consultés. Rome eut donc, avec le collège sacris faciundis, trois autorités compétentes en ces matières, sans qu'on pût fixer à la compétence d'aucune d'elles des limites précises. Il appartenait au sénat de leur faire leur part en tenant compte des études et des aptitudes spéciales de chaque corporation. Sans doute c'était là un critérium beaucoup trop flottant pour qu'on en pût tirer des règles absolues, et l'on voit que, dans la pratique, on s'en rapportait plus d'une fois au hasard et aux impressions du moment. C'est ainsi qu'en 207 av. J.-C. = 547, la foudre étant tombée sur le temple de Juno Regina, le prodige fut procuré en même temps par les décemvirs sacris faciundis et les haruspices, bien qu'il rentrât plutôt dans le domaine de ces derniers 149. En 181 av. J. -C. = 573, les pontifes s'étant reconnusimpuissants à triompher d'une sécheresse, on s'adressa aux décemvirs 250. Souvent les cas étaient assez variés et complexes pour exiger le concours simultané de toute la divination officielle'`". Toutefois ily avait certains principes généraux que les auteurs ont formulés et dont les faits permettent d'ailleurs de vérifier l'application. II résulte des déclarations du dictateur Q. Fabius Maximus devant le sénat, 217 av. J.-C. = 537, que la sibylle était mise en réquisition uniquement ou surtout pour les prodigia tetra, pour ceux dont la nature ou l'intensité frappait de terreuri" . Denys d'Halicarnasse précise cette indication. 11 signale, parmi les cas soumis au collège sacris faciundis, les séditions, les désastres à la guerre, les monstruosités physiologiques, les apparitions "; mais dans cette liste, où figurent des phénomènes de caractère mixte, ne relevant d'aucune compétence spéciale, il a le tort d'en omettre qui dépendent exclusivement des quindécimvirs, tels que les tremblements de terre t t., les épidérnies 155. 11 était juste de s'en remettre aux ministres d'Apollon pour tout ce qui touchait à la santé publique. Il était naturel aussi, dans un autre sens, et profondément humain de se tourner de préférence, dans les grandes calamités, vers la divination étrangère. Elle disposait pour en triompher de ressources d'autant plus sûres qu'elles étaient plus mystérieuses. Elle avait pour les esprits crédules et affolés tout le prestige du lointain et de l'inconnu 156 C'est par la procuration des prodiges que les quindé cimvirs arrivèrent à helléniser la religion romaine. Leur action dans ce sens est tellement considérable qu'il faut se borner à en donner une idée générale, sans quoi il ne s'agirait de rien moins que de refaire, à un point de vue particulier, toute l'histoire religieuse de Rome. On renverra donc pour le détail aux articles spéciaux et l'on se contentera de caractériser, par leurs traits essentiels et leurs conséquences les plus importantes, les innovations dues à l'initiative du collège sur le terrain de la liturgie ou de la théologie. Elles consistent, d'une part, dans l'importation des rites étrangers ou la transformation à leur contact des rites romains, de l'autre, dans l'introduction des divinités étrangères ou l'assimilation à ces divinités des divinités romaines. Les expiations ordonnées par les livres sibyllins ne sortaient pas toujours des habitudes reçues. Non seulement elles pouvaient être offertes aux dieux nationaux, mais, de plus, elles ne comportaient pas nécessairement des pratiques qui fussent de tout point inconnues à ces derniers. Camille fait dicter par les décemvirs saéris faciundis les formules à employer pour la purification des temples après l'expulsion des Gaulois1". En 217 av. J.-C. = 537 de R., ils prescrivent d'immoler les grandes victimes à Juno Regina sur l'Aventin, et à Juno Sospita à Lanuvium. Ils exigent qu'on fasse hommage à Junon et à Minerve de dons en argent, à Jupiter d'un foudre d'or du poids de cinquante livres15B. Ni les dieux ainsi honorés n'étaient nouveaux, ni les honneurs qu'on leur rendait ne s'écartaient de la tradition. Jamais à Rome on n'avait ignoré les vertus des offrandes et des sacrifices sanglants 159 Toutefois, jusque dans les présents consacrés par l'usage, l'intervention du collège sacris faciundis se traduit par un luxe dont les vieux Romains n'étaient point coutumiers 160. Leurs offrandes avaient été des plus simples. Les fruits de la terre en faisaient tous les frais f61. II y avait aussi une différence dans les rites. Le sacrificateur, au lieu de se voiler la tête, l'avait découverte et couronnée de laurierfG2. C'était le rite grec, lequel présidait à toutes les cérémonies réglées par les quindécimvirs. Mais c'est surtout dans les supplications, dans les leetisternes, dans les jeux, que le culte dont ils sont les promoteurs déploie toute son originalité. La splendeur de la mise en scène, la pompe antique et théâtrale, les démonstrations bruyantes et pathétiques, tout dans ces solennités rappelle la Grèce et l'Orient, tout fait contraste avec la froide austérité du culte indigène. Les quindécimvirs n'avaient pas inventé la supplicatio. Nous voyons qu'elle figurait dans le rituel pontifical 163 Mais elle prit, grâce à eux, un éclat extraordinaire. Ce qui distingue cette supplicatio renouvelée et transformée, indépendamment de la musique et des danses, c'est le caractère populaire et démocratique de la fête. Les sanctuaires romains étaient fermés au public, ou bien n'étaient accessibles qu'à certains jours et à certaines catégories de citoyens '^4. Pour la supplicatio, les portes DUU -437-_ DUU qui n'étaient pas rigoureusement condamnées s'ouvraient toutes grandes. Une foule les assiégeait, foule bigarrée, composée non seulement de citoyens, hommes et femmes, mais d'affranchis, d'étrangers, d'esclaves, les laïques comme les prêtres couronnés de laurier ou tenant une branche de cet arbre à la main f65. Une quête, stips collecta, aidait à couvrir les frais. Les subventions volontaires étaient indispensables pour les sacra peregrina, auxquels l'État ne s'intéressait point. Mais le même usage s'établit pour ceux auquels il accordait une reconnaissance officielle et un concours pécuniaire 166. Macrobe nous dit, à propos d'un lectisterne organisé pendant la deuxième guerre punique, qu'il le fut avec une collecte à laquelle on admit pour la première fois les femmes affranchies 167. En 217 av. J.-C. = 537, les décemvirs sacris faciundis recourent aux générosités des matrones romaines pour offrir un don à Juno Regina' fié. En 211 av. J.-C. = 532, le préteur qui doit célébrer pour la première fois les jeux Apollinaires récemment institués, publie un édit portant que pendant ces jeux le peuple apportera son offrande à Apollon, chacun selon ses moyens 4G9.Laquête autorisée par les pouvoirs publics était faite vraisemblablement par les décemvirs sacris faciundis. On lit dans Apulée, à propos d'une anecdote dont il emprunte le récit à Varron, que Caton le Jeune avait reçu des mains d'un de ses esclaves une pièce de monnaie pour faire une offrande à Apollon'7". Caton faisait partie du collège sacris faciundis 171 Dès lors on a pu supposer que l'argent versé l'avait été pour une de ces quêtes dont. il vient d'être parlé'''. Le collège n'avait pas, du reste, ou ne parait pas avoir eu comme les pontifes une caisse permanente 173 Les lectisternes, auxquels on a fait allusion plus haut, étaient un élément ordinaire de la supplicatio. On décidait généralement qu'elle devait se faire adomnia pulvinaria 174 c'est-à-dire auprès des lits où les dieux étaient couchés contemplant le festin dressé devant eux. Nous rencontrons ici encore un premier fonds d'idées romaines singulièrement enrichi par l'imitation de la Grèce. C'était un vieil usage chez les Romains de servir des mets en guise de sacrifice (dapes), non seulement aux Lares, mais à des dieux plus personnels, Jupiter, Pilumnus, Picumnus 1 Toutefois, et quoi qu'en disent certains auteurs dont l'imagination complaisante ou trop pauvre se représente le passé sous les couleurs du présent 1", le lectisterne proprement dit a une origine exotique qu'il est impossible de méconnaître f17. Ces mannequins, qui sont censés banqueter accoudéssur les coussins du pulvinar, ressemblent à des Grecs, non à des Romains. Ce sont les Grecs qui de bonne heure ont cessé de manger assis f18, et i1 est bien probable qu'à l'époque où fut décrété le premier lectisterne, en 399 av. J.-C. = 355, ces habitudes de mollesse n'avaient pas encore pénétré dans les moeurs romaines 179. Nous savons d'ailleurs que ces repas divins étaient fréquents dans les villes grecques 180, et nous voyons qu'à Rome ils étaient prescrits par les livres sibyllins, organisés par les quindécimvirsf81 et primitivement offerts à des divinités purement hellé niques ou foncièrement hellénisées 'g', Le lectisterne participe du même caractère que la supplicatio. Ces dieux, visibles à tous, dans leurs temples ou au dehors, sur les places, faisaient naître dans le peuple la cordialité et la joie. La fête publique se répétait dans chaque maison. Tite-Live décrit ainsi l'aspect de Rome lors du premier lectisterne : « Les particuliers accomplirent aussi la même cérémonie. Dans toute la ville les portes restèrent ouvertes, l'usage de toutes choses fut libre et commun à tous, connus et inconnus, les étrangers étaient invités et traités en hôtes; pour ses ennemis mêmes chacun n'eut plus que des paroles de bienveillance et de douceur ; plus de querelles, plus de procès ; on ôta même les chaînes aux prisonniers pour la durée de la fête, puis on se fit scrupule de remettre aux fers ceux que les dieux avaient ainsi délivrés 183. » Le tableau est flatté à coup sûr, et l'historien qui l'a tracé fait preuve d'une crédulité un peu naïve, à moins qu'il ne compte un peu trop sur celle du lecteur. Il n'en doit pas moins renfermer une part de vérité. Aux traits dont il se compose, Preller 1" reconnaît l'influence d'Apollon, présente ici, comme ailleurs, partout où se manifeste l'action du collège. Les supplications et les lectisternes étaient des cérémonies accidentelles, comme les circonstances qui y donnaient lieu ; les jeux tendaient à s'inscrire à époques fixes dans le calendrier et à prendre place parmi les solennités régulières. II y avait des jeux spécialement romains. Tels les EQUIRRIA, dédiés à Mars, les CONSUMA, à Cousus 185L'appareil plus compliqué des LUDI MAGNE 00 romani, avait été importé d'Étrurie par les Tarquins 186 Néanmoins, sur ce terrain comme sur les autres, la part du collège sacris faciundis reste très large, soit qu'il fasse décider l'institution de jeux nouveaux, soit qu'il se borne à remanier et à féconder des éléments préexistants. Le syncrétisme religieux, qui caractérise la plupart de ses créations et qui préside à son oeuvre entière, n'est nulle part plus apparent que dans l'histoire des uni SAECULARES. Un culte tellurique indigène, renouvelé par l'intervention d'idées en partie étrusques, en partie grecques, aboutit à une fête nationale sur laquelle plane la plus brillante figure de l'Olympe hellénique. On racontait qu'à l'époque des rois, pendant une peste, un certain Valesius ou Valerius avait découvert au fond d'un trou du champ de Mars (teretum), un autel consacré à Pluton et à Proserpine et avait fait à cet endroit des sacrifices. Plus tard, un autre Valerius, le fameux consul P. Valerius Publicola, avait, dans des circonstances analogues, répété les mêmes dévotions et cette fois sur l'ordre des livres sibyllins 187. Comment ce sacrum gentilitium est-il devenu un sacrum publicum? Comment l'influence des théories sur le renouvellement des àges, théories professées d'une part par les orphiques grecs, de l'autre par les haruspices étrusques, a-t-elle transformé les ludi terentini en ludi saeculares? Comment, enfin, une cérémonie expiatoire, visant exclusivement les puissances infernales, a-t-elle fini par comprendre dans le même hommage des dieux essentiellement différents et, par DUC 138 [)UU dessus tous, le dieu de la lumière, Apollon? Ce sont des questions dans lesquelles nous n'avons pas à entrer'". Ce qu'il faut rappeler, c'est que vers 249 av. J.-C. = 50é, après un ouragan dont la violence avait frappé les esprits déjà surexcités par la crise de la première guerre punique, les décemvirs sacris faciundis prescrivirent des sacrifices au teretum pendant trois nuits consécutives et, de plus, décidèrent qu'ils seraient renouvelés tous les siècles'"'. La nécessité de déterminer exactement la période ainsi dénommée s'imposa dès lors au collège 190, mais la variété des doctrines sur ces matières était telle qu'aucune solution n'arriva à prévaloir définitivement. La date des jeux resta, donc flottante et livrée aux préférences des pouvoirs publics, du sénat d'abord, et ensuite des empereurs, ces derniers se prononçant d'ordinaire pour le système qui leur permettait d'illustrer leur règne par ces solennités dont la rareté rehaussait l'éclat. Les quindécimvirs n'en étaient pas moins les grands ordonnateurs de la fête 101. On a vu que les jeux séculaires, dont la commémoration forme une sorte d'appendice aux fastes consulaires capitolins. ne sont pas rappelés à leur date sans qu'on y ajoute les noms des magistri du collège dans la même année, et c'est en cette qualité que les empereurs conduisaient la cérémonie, ainsi qu'ils ont soin de nous le faire savoir par leurs monnaies et par d'autres documents 102. Auguste, qui présida aux jeux séculaires en 17 av. J.-C. = 737, s'adjoignit comme collègue Agrippa, bien qu'il ne fût pas au nombre des cinq magistri dont l'empereur était le premier. Mais il était membre du collège'93, et si le collège pouvait choisir pour la présidence entre les magistri, il pouvait de même conférer cet honneur à un membre qui ne fût pas un magister. M. Mommsen remarque en outre que la célébration des jeux séculaires par Auguste se liait dans sa pensée à la réforme morale dont il était l'auteur, et cette reforme se rattachait à l'exercice de la puissance tribunitïenne qu'il partageait avec Agrippai'', Une inscription de Rome nous fait connaître deux fragments de sénatus-consultes, gravés bout à bout. Le premier, qui doit être de l'an 47 ap. J.-C., décrète l'ouverture des jeux séculaires. Il s'agit des jeux célébrés par Claude en cette année. Pour les dispositions générales, pour les fonds imputables à l'entreprise, pour la location de l'entreprise même, il invite les quindécimvirs à s'en référer à un sénatus-consulte antérieur. Ce sénatus-consulte, qui vient à la suite du précédent, a rapport aux jeux séculaires du règne d'Auguste. Il nous apprend que les consuls avaient fait afficher une table de marbre et une autre de bronze contenant le règlement (commentarium) des quindécimvirs sur la matière 105. Leur rôle pendant la cérémonie nous est connu au moins en partie par la description de Zozime 196. Au commencement de la moisson, ils vont s'asseoir au lieu le plus élevé du Capitole et distribuent au peuple convoqué à cet effet les objets nécessaires aux expiations et offrandes particu fières, les saffimenta, c'est-à-dire les torches, la poix, le soufre. Ils reparaissent à la seconde heure de la première nuit des jeux, l'empereur immolant avec eux trois agneaux sur trois autels dressés au bord du fleuve. Après les jeux séculaires, il faut mentionner les ludi 7'aurü, beaucoup moins importants, et méme parmi les moins importants qui se célébrassent à Rome, mais également ordonnés par les livres sibyllins pour apaiser les dieux infernaux 19', et consistant en une course de chars au cirrus Flaminius 190. On en rapportait l'institution à Tarquin le Superbe 199, mais sans bien s'expliquer le nom qui leur avait été donné 200. Quant aux autres jeux institués sur l'initiative du collège, ils l'ont été en l'honneur des divinités helléniques ou hellénisées dont il a peuplé le panthéon romain. On aura occasion d'en dire un mot en retraçant cette partie de son oeuvre àlaquelle nous arrivons maintenant. Tite-Live donne aux décemvirs sacris faciundis le titre de prêtres d'Apollon201, et nous verrons qu'ils empruntaient leurs insignes aux attributs de ce dieu. Ce culte d'Apollon, totalement ignoré de l'ancienne Rome et dont il n'y a pas trace dans les indigitarnenta de Numa, est en effet le premier qu'ils aient introduit, et il est resté comme le point central de leur activité religieuse. On n'en sera pas surpris si l'on considère l'étroite parenté de la Sibylle avec le dieu, organe principal de la mantique grecque. Soeur, femme, fille, amante ou prêtresse d'Apollon 20e, elle s'oppose à lui dans l'origine, comme une sorte de double féminin, comme une figure aux traits moins déterminés et aux allures plus libres, parce qu'elle est émancipée de la tutelle des corporations sacerdotales 2. Tibulle, dans une invocation à Phoebus, ne manque pas de rappeler le don précieux des livres sibyllins 20'. Dès Tarquin le Superbe on voit une députation envoyée pour consulter l'oracle de Delphes 2r°, et ces missions se répétèrent souvent par la suite 106, très évidemment sur la proposition du collège sacris faciundis. On ne sait au juste à quelle époque on s'avisa de circonscrire, pour la consacrer à Apollon, une portion des prata Flaminia, en dehors du pomerium, mais Tite-Live nous dit que c'était chose faite eül'an 449av.J.-C._ 30320'. C'est là que, seize ans plus tard, en 433 av. J.-C. = 321, au milieu d'uné épidémie dont les décemvirs sacris faciundis furent chargés de détourner le fléau, on voua, pour le dédier deux ans après, un temple « à la santé publique 0Uo », le temple d'Apollo Mec/écus, mentionné ailleurs par TiteLive 20n, et d'où il fait partir la procession ordonnée par les décemvirs en 207 av. J.-C. = 547, au moment où llasdrubal allait fondre sur l'Italie 2"0. Ce temple fut longtemps le seul que le dieu possédât à Rome. II dut attendre, pour en obtenir un autre plus magnifique, cette nouvelle floraison de la religion apollinéenne, qui était dans le programme d'Auguste et dont profita naturellement la dévotion de la Sibylle 211. Ce n'est pas à dire qu'il n'ait point grandi pendant ce temps dans la véné X189 --D li lis ration publique. Ise collège voué à. sa gloire ne laissait passer aucune. occasion d'attirer° à lui les hommages ponuiaii ti s Il associait son nom à. toutes les cérémonies dont ii prenait l'initiative. II rendait ce nom de plus en plus familier aux oreilles romaines, Apollon figura parmi les convives du premier lectisterne, institué en 399 av. J.-C. 3è3 "', et c'est à lui que les cm-mina Ji'xrc,'aea, adoptes par les interprètes des livres sibyllins, renvoyèrent les consciences avides d'expiations au lendemain de Cannes. Les jeux Apollinaires célébrés en 212 av. J.-C.= 542, furent renouvelés dès l'année suivante et devinrent dès lors annuels. Un sénatus-consulte décida, que les décemvirs y sacrifieraient conformément au rite grec 213 Apollon ne pouvait manquer d'amener â sa suite les dieux qui gravitaient dans son orbite° C'est ainsi qu'Aisclèpios, sous la Corme latine Aesculapius, fut installé officiellement sers la fin dr troisième siècle av. J.-C. En 293 av. J.-C. = MIL, pendant une peste, le Sénat, ayant fait consulter les livres, décida qu'on enverrait chercher le dieu d'Tpidaure et qu'en attendant, on lui adresserait une suppl2 catin pendant un jour 'i 1. La. députation, expédiée l'année suivante, rapporta du sanctuaire grec un de ces serpents qu'on entretenait dans l'enceinte sacrée 710, et, un an après, en 291 av. J.-C. = 463, s'éleva lie temple d'Esculape dans l'lle du Tibre 2J6. Pline dit, il est vrai, qu'un autre temple avait précédé celui-ci en dehors de la ville, car il. s'agissait d'un dieu étranger; mais on remarquera que file sacrée était elle--même extérieure à home à l'époque où elle fut choisie pour servir de domicile au fils d'Apollon i17, La mère du Dieu, Lento, devenue Latone, était naturalisée depuis plus longtemps. Elle prendra place à côté de son fils an lectisterne de 399 a v. J. C. e, Esculape, Apollon, gardèrent leur physionomie étrangère. Les deux premiers étaient, pour en changer, de trop minces personnages. Le iroisi -me ne trouva point peut-être dans le sévère panthéon italique de figure assez brillante pour se fondre avec elle. Peut-être aussi étaitil arrivé trop tôt, dans un temps où le contact entre les deux civilisations n'était pas encore assez intime pour' abouti= à l'assimilation de leurs dieux, il i''en fut pas ème (Fun autre membre de le mille d'Apollon, 'a propre fille de Zeus et de L '° nïs, qui prêta à la paisible Biaisa ses grâces virginales. ! sauvages. La part du collège sncris fnciundis dans ce phénomène de transsubstantiation mythologique se devine plus qu'elle ne se constate, mais elle se montre nettement dans l'identification des divinités chtoniennes. Les entités vagues dans lesquelles les Romains adoraient l'énergie du sol nourricier s'animèrent tout à, coup et revêtirent, sous leur nom latin la personnalité vivante des divinités grecques similaires. Elles eurent une histoire. Elles furent entraînées dans les mystérieuses aventures où se jouait la fantaisie hellénique. Cérès «la terre qui crée », Proserpine « la végétation qui rampe vers la lumière o, se confondirent avec Déméter et Perséphoné. Le Liber' des Indigitcoserita, et son équivalent féminin Libera, qui veillent ', la fécondité de la semence chez l'homme et chez la femme "', empruntèrent leurs traits à. Dionysos et à Coré. Tout ce groupe nous apparaît entièrement constitué sous son aspect nouveau, dès la fin du cinquième siècle air, J. C, En l'an 496 av. J.-C. 253, le dictateur A. Postumius, le vainueur° du 1_c Ré„ilte, ayant fait consulter les livres sibyllins pour y chercher les moyens de con-jurer la stérilité et la disette, y trouva l'ordre d'élever un temple à Cérès, Liber et Lihera, autrement dit à Déméter, Dionysos et Coré X30. C'est la triade qu'on rencontre dans les villes de l'I-Iellespont, dans la patrie même de la. Sibylle '2'. Les Romains, sous les noms latins dont ils avaient affublé cris nouveaux venus, ne méconnurent jamais leur origine et leur vrai caractère. Le temple, dédié trois ans après 202, fut le premier d'art purement grec que Rome eût possédé, et le culte qui s'y pratiquait répondait au style et à la décoration de l'édifice, II était grec par les rites, par la langue, par le m . '-'I, sr la nationalité des prêtresses qu'on faisait venir ,acore au temps de Cicéron de la Campanie 2'3. Aussi resta-t-it classé parmi les sacra per'egrina. II n'est pas jusqu'aux cEBl'lin, ou lundi C'eoeales, contemporains, d'après Denys, de la construction du temple 2"1., mais passés plus tard seulement à l'état de solennité périodique, qui ne fussent conçus sur le modèle des fêtes helléniques et placés aux mêmes époques de l'année "6. Il en fut de même d'une autre cérémonie en l'honneur de Cérès, le sacrum 113818iversee'rum Generis, établie peu de temps avant la deuxième guerre punique 26 Elle était considérée comme un sacrum pu7ilicurn ?27, ce qui prouve bien qu'elle avait été proposée pal' le collège sacras faciitndzs'"2. En ce qui concerne le jejunii€n. C ea -ris, décrété en 191. as. J,-C = 563, à l'instar des 'l`hesmophv'rres, c'est Tite-Live qui eu' attribue l'institution aux livres silbyilins2''. Enfin, dans iris temps orageux qui suivirent la mort de T. Gracchus, sous le coup des terreurs superstitieuses qui vinrent s'ajouter en ce moment a.ux anxiétés la' mies per les événements politiques, les décemvirs sue :°s e..°'.redis répondirent au sénat qu'il fallait apaiser Cérès, et ce ne fut pas dans sou temple de Rome qu'on l'invoqua. Une députation du collège alla let chercher jusqu'à Enna, en Sicile, où elle avait !7n sanctuaire renommé "0. Les dhinités chtoniennes sont proches parentes des puissances infernales, L'association de Dis pater et de Proserpiné, a l'imitation du couple grec Faciès et Perséphonè, est attestée de bonne heure par l'autel qui. leur est élevé en commun au tereturn gaz et l'on sait que le culte pratiqué en cet endroit est un des plus anciennement organisés par la commission duumvirale "'. Bien des siècles plus tard on retrouve l'Hadès romain recevant avec Déméter et Perséphoné une expiation ordonnée par les livres sibyllins 23:i. Les hommages adressés aux maîtres des régions souterraines prenaient souvent un caractère de barbarie qui contraste avec les rites ordinaires des Romains. II faut rendre cette justice à ce peuple, qu'il avait de bonne heure rompu avec l'usage des sacrifices humains, De temps immémorial. les pontifes avaient trouvé moyen d'en éluder la nécessité. Aux malheureux réclamés par DUU 440 DUU te Tibre ils avaient imaginé de substituer des mannequins d'osier, qu'ils jetaient dans le fleuve du haut du pont Sublicius 231. Fraude pieuse, qui fait honneur à leurs sentiments d'humanité plus encore qu'à leurs ressources en casuistique. Les apôtres du rites graeeus n'eurent pas de ces scrupules. Il faut mettre à leur compte l'immolation de Curtius 235 et l'ensevelissement en plein Forum Boarium, après le désastre de Cannes, de quatre créatures vivantes des deux sexes, choisies parmi les ennemis de Rome 27a, atroce cérémonie qui n'était pas la première de ce genre et qui fut renouvelée depuis'-R7. Était-elle commandée par les libri fatales des Étrusques, ou bien suggérée par le mysticisme sanglant de l'Asie Mineure2R8? On ne sait au juste, Ce qui est certain, c'est que le sacrifice était présidé par le magister du collège sacris faciundis"' et adressé à des dieux étrangersY40. TiteLive en repousse la solidarité au nom de la religion romaine 251. Il faudrait parcourir d'un bout à l'autre le domaine de la mythologie classique pour signaler toutes les identifications où se reconnaît la main des quindécimvirs, sans compter celles où leur intervention, pour n'être pas constatée par les documents, n'en paraît pas moins incontestable. Elles reposaient quelquefois sur des analogies purement verbales. Sans doute on ne saurait méconnaître certaines affinités secrètes entre la Proserpine latine et la Perséphoné grecque. On peut admettre néanmoins que ces deux figures ne seraient pas arrivées si vite à se confondre si la ressemblance des noms n'y avait aidé. Entre l'Hercule romain, sorte de dieu champêtre, gardien des enclos 2'2, et l'Héraclès grec, une des Incarnations variées de la lumière solaire, l'observation la plus pénétrante ne saurait découvrir aucun rapport pour le fond. C'est une pure homonymie, habilement exploitée, qui a déterminé le rapprochement. On ignore depuis quand l'habitude s'établit de sacrifier ritu graeco à l'ara maxima, mais il faut croire qu'elle était très ancienne puisqu'on ne craignait pas de la faire remonter à Romulus 213. Et cette fois, la physionomie indigène avait si bien disparu sous le masque étranger que les Romains eux-mêmes l'avaient oubliée. Hercule prit à leurs yeux, dès l'origine, les traits d'une divinité grecque 2'". En 399 av. J.-C. = 355, il partage au premier lectisterne le pulvinar de Diane Artémis'''. En 188 av. J.-C. = 566, les décemvirs lui font élever une statue 24° dans son temple, près du cirque, lequel avait été bâti lui-même sur la recommandation des livres sibyllins'''. La déesse Juventas, une des innombrables abstractions dont la série monotone défraye le vieux rituel u8 échange sa froide personnalité contre celle d'Hébé ou de Ganymède, échansons de Jupiter''''. A ce titre elle passe avec Hercule sous le patronage spécial du collège sacris faciundis. En 248 av. J.-C. = 563, il prescrit pour elle un lectisterne spécial en même temps qu'une supplicatio à l'adresse de son compagnon divin 25°. Mercure, dieu du négoce, trouve dans le moindre et le plus récent des attributs d'Hermès une raison ou un prétexte pour s'identifier avec lui; mais, d'autre part, le commerce du blé avec Cumes et la Sicile, entretenu sous ses auspices lof, lui assure avec Cérès une sorte de parenté dont il n'y a pas trace dans la mythologie grecque. Le premier temple de Mercure est dédié en 495 av. J.-C. = 259, un an après qu'on a décidé d'en construire un à cette déesse 252, et il fait couple avec elle au lectisterne de 217 av. J.-C. = 537 253. De Neptune, divinité aquatique, à Poseidon la transition était facile. Le dieu, rajeuni, est admis au lectisterne de 299 av. J.-C. = 355, qui nous apparaît de plus en plus comme un fait capital dans l'histoire religieuse des Romains 25'. Il était plus difficile de faire de Vénus, protectrice (les jardins, une Aphrodite. Il y fallut un concours de circonstances spéciales, la rencontre de l'une et de l'autre sur un terrain commun, à Lavinium'''. La combinaison qui s'en suit prend droit de cité au commencement du nie siècle avant J.-C. En 217 = 537, après Trasimène, les livres sibyllins ordonnèrent la construction d'un temple à Vénus Erycine, épithète significative et qui laisse entrevoir derrière le vocable latin la grande déesse gréco-phénicienne 256. En mème temps ils prescrivent un lectisterne où elle figure aux côtés de Mars, identifié par là avec Arès 257. En 140 av. J.-C. = 614, après un prodige provoqué par l'immoralité de trois Vestales, sur l'avis des même conseillers, on élève un nouveau temple à Vénus, qualifiée cette fois de Verticordia : « quo facilius virginum mulierumque mens a libidine ad pudicitiam converteretur. o Verticordia répond au grec 'Aa06Tppma 248. Au culte de Vénus hellénisée se rattache la légende d'Énée. L'étrange fortune de cette légende peut être expliquée de diverses façons, mais quelque système qu'on adopte (et ils sont tous vrais par certains côtés) on s'accordera pour reconnaître tout ce qu'elle doit à l'action décisive, bien que latente, du collège sacris faciundis. Que le fils de Vénus ait immigré de Lavinium à Rome en compagnie de sa mère, sous le patronage du collège, c'est un point qui n'est pas à démontrer, mais, d'autre part, on n'ignore point que les plus anciens témoignages sur son compte le montrent installé dans les régions mêmes où était née la révélation sibylline, en sorte que là fut contractée entre la Sibylle et le héros troyen l'alliance qui devait porter ses fruits sur la terre d'Italie 209. Telle fut, au bout de trois siècles environ, t'oeuvre accomplie par la commission instituée sous Tarquin. Ce résultat nous apparaît dans son ensemble au lectisterne de 217 av. J.-C. = 587. Un Olympe composite, l'Olympe des douze dieux, formé d'éléments grecs et romains, s'y produit pour la première fois au complet, réparti par couples sur les six pulvinaria : Jupiter et Junon, Neptune et Minerve, Mars et Vénus, Apollon et Diane, Vulcain et Vesta, Mercure et Cérès'''. Mais déjà, sous la même direction, la conscience romaine se préparait à une évolution nouvelle. Elle allait franchir le cycle purement hellénique pour se jeter dans les su DUU 441 DUU perstitions orientales. C'est en l'an 205 av. J.-C. = 549 que la sibylle, ramenée par un irrésistible attrait vers sa première patrie, promit aux Romains l'expulsion d'Hannibal à condition qu'ils feraient venir de Pessinunte, en Asie Mineure, la Mère de l'Ida, la Cybèle phrygienne2f1. Celle-ci fit son entrée en grande pompe l'année suivante, sous les espèces d'une idole informe, d'une pierre noire, que l'on déposa provisoirement au temple de la Victoire, sur le Palatin 262, en attendant celui qu'on devait lui consacrer au même endroit et qu'on dédia treize ans plus tard 263 On lui offrit un lectisterne et l'on fonda en son honneur les jeux Mégalésiens dont le nom grec rappelait celui de la grande déesse 26'. Ce fut là l'origine d'une religion qui devait plus tard prendre un grand empire sur les âmes et balancer même le triomphe du christianisme. Les Romains lui montrèrent d'abord de la méfiance. Ils crurent avoir assez fait en autorisant les exercices des sectateurs de Cybèle sans s'y associer pour leur propre compte. Un sénatus-consulte leur défendit formellement d'y participer autrement qu'en spectateurs 2f2. L'impulsion n'en était pas moins donnée dès à présent, et il n'est pas indifférent de remarquer qu'elle partait du collège sacris faciundis. Ainsi, par deux fois, nous le voyons présider au mouvement qui renouvelle la religion nationale, d'abord au contact de la Grèce, ensuite à celui de l'Orient. La compétence administrative des quindécimvirs était déterminée par la nature de leur propagande religieuse. Ils étaient les chefs du rite extra-national comme les pontifes l'étaient du rite romain. Ace titre ils exerçaient sur les cultes étrangers une sorte de haute magistrature dont il existe divers témoignages. Malheureusement les documents dont nous disposons ne sont pas assez nombreux pour donner de cette compétence une idée suffisamment exacte, c'est-à-dire pour permettre d'en fixer le caractère et d'en mesurer l'extension. Nous voyons que le collège embrassait dans sa sollicitude, non seulement les cultes étrangers à l'Italie, mais encore les cultes italiotes pratiqués dans la ville ou au dehors, non seulement les cultes officiellement admis à Rome sur sa proposition, mais encore ceux dont on pouvait avoir besoin dans l'avenir et qu'il était prudent d'invoquer à l'occasion. Naturellement, suivant qu'il s'agissait des uns ou des autres, son intervention était plus ou moins directe ou continue. La députation au sanctuaire de la Cérès sicilienne, dont il a été question plus haut 261, était un fait exceptionnel et qui ne prouve aucune main mise sur ce culte lointain. Il en est de même des sacrifices ordonnés en 108 av. J.-C. = 616 dans File de Cimolie, une des Cyclades, à une divinité dont nos sources ne disent pas le nom 267. Des sacrifices du même genre prescrits par le collège ou même accomplis par lui dans le rayon italien étaient plus fréquents. Les textes signalent les hommages qu'il rendait à Feronia 268, à laFortune de l'Algide 269 à la Vénus d'Ardée270, à la Juno Sospita de Lanuvium 271, à la Juno Regina de Rome 277. Les dévotions à cette dernière s'expliquent par ce fait qu'elle avait été amenée de Ili. Véies après la chute de la grande ville étrusque et installée sur l'Aventin, en dehors du pomerium 273. Nous savons aussi qu'il veillait à la conservation des édifices religieux en Italie. Une inscription du temps de Caracalla (213 ap. J.-C.) nous apprend qu'avec l'autorisation de l'empereur, et sur un décret des quindécimvirs, le promagister du collège avait procédé lui-même à la reconstruction et à la dédicace de l'autel de Circé, à Circei 27'.. Toutefois c'est par une simple hypothèse, fondée sur l'analogie, qu'on croit pouvoir subordonner au collège sacris faciundis le personnel des cultes étrangers 270. En fait cette subordination n'est visible que pour les ministres de Cérès et de Cybèle. En ce qui concerne les premiers, elle résulte d'une inscription dédiée à la déesse par une prêtresse s'intitulant quindecimviralis, c'est-à-dire nommée ou plutôt intronisée par les quindécimvirs276. Les exemples sont plus abondants pour le culte de Cybèle. Il était devenu à la longue la principale affaire du collège, au point de reléguer au second plan la figure d'Apollon, moins populaire parce qu'elle répondai t moins aux tendances mystiques de l'époque. Pour les écrivains de l'empire les quindécimvirs sont avant tout les ministres de la grande Mère Phrygienne277. Ils président maintenant à ces cérémonies d'où la loi écartait autrefois les citoyens romains. Ils surveillent, le 29 mars, le bain du fétiche dans le ruisseau de l'Almo 278, et quand s'introduit la mode des tauroboles, ils administrent euxmêmes le baptême sanglant qui doit enfanter les âmes purifiées à une vie nouvelle. Plusieurs inscriptions de Rome les représentent dans cette fonction, sinon en corps, du moins comme individus'-79. Ce n'est pas que Cybèle n'eût un personnel spécialement affecté à son service, galles et archigalles, prêtres et prêtresses, mais ils tenaient des quindécimvirs leurs investiture accompagnée de leurs ornements sacerdotaux, du collier, occabus, et de la couronne à trois fleurons 280. On rencontre ces sacerdotes quindecimvirales en Italie 2B' et même ailleurs 282 Une inscription taurobolique du musée de Lyon nous fait connaître un certain Q. Samius Secundus « ab xv vins occabo et corona exornatus 283. „Les mots qui suivent : «cul sanctissimus ordo Lugdunens(iuni) per pet uitatem sac erdotii decrevit, » nous apprennent de plus que si les prêtres étaient consacrés par les quindécimvirs, ils Tenaient leur nomination de l'autorité locale. La même procédure ressort d'un document très curieux daté de l'an 289 de notre ère 28'. C'est une inscription de Cumes rappelant la nomination d'un prêtre de la grande Mère dans cette ville. Elle donne en premier lieu un procès-verbal relatant l'élection du candidat Licinius Secundus par le conseil des décurions, sur la proposition des duumvirs ayant le titre de préteurs; puis viennent les lettres patentes expédiées de Rome par le président du collège quindécemviral et conférant à l'élu jouissance des droits attachés à sa nouvelle dignité, dans le rayon où il est appelé à l'exercer. Voici la teneur de cette dernière pièce : « Les quindécimvirs sacris faciundis aux prêtres 56 vL DV et aux mage lits de Cumes, salut. Ayant appris par votre m que vous avez créé Licinius Secundus r' t±ie l'. l ee tes dieux en remplacement de Cl; udrus 116 titutus décédé, conformément : votre volonté, nous lui avons permis de porter l'occabvs et la couronne, mais seulement dans les limites dia territoire de votre colonie. Nous désirons que vous vous portiez bien. Moi. Pontius û. vius iilaximus, prontagister°, ai signé, ce seizième jour des kalendes de septembre, M. Dudit-lus l'rimue et T. Flavius Coelianus étant consuls. Une autre inscripti+n, de Inèale pros-enance et un peu aiitériecii dhl ep. ,1.-C.. "", a rapport à l'institution d'une confrérie de dendropheres. On sait, que les confréries ainsi nommées jouaient un rôle important dans les fêtes de Cybèle et d'Atis. Nous voyons, par ce texte, qu'elles devaient être autorisées par le sénat, comme toutes les associations, et, de plus, qu'elles étaient placées sous la surveillance (sui) cura) des quindécimvirs "cd 'Encore une fois, il ne faudrait pas tirer de ces faits des conclusions qu'ils ne comportent pas, Se figurer le collège des pontifes et celui des quindécimvirs comme investis à eux deux, à l'époque impériale, d'une sorte de ministère des cultes, le premier pour le culte purement romain, le second dans le domaine sans cesse élargi et renouvelé des religions étrangères, ce serait, d'une part, s'exagérer fort le rôle et les moyens d'action de ces deux corps; ce serait, de l'autre, méconnaître la, force spontanée et la diversité infinie des manifestations élu sentiment religieux jans cette période de crise qui aboutit au triomphe du carisi:ianisme. Les institutions léguées par la république dans n'importe quel ordre n'étaient pas à la taille des destinées que ttorie s'était faites, et., de môme ru ie-s pontifes ne surent pas étendre leur sphère au delà de la ville et de ses environs, de môme les quindécimvirs se trouvèrent débordés par l'afflux des superstitions égyptiennes et syriennes. L'autorité qui leur revenait sur ce terrain alla à l'empereur, seul représentant de l'État et seul héritier des corporations sacerdotales comme des magistratures civiles, mais toutefois sans se traduire pet un contrôle attentif et une ingérence régulière. C'est à l'Église catholique qu'il était réservé de faire prévaloir, dans le domaine des choses sacrées et jusque dans le fond de ia conscience, les traditions de discipline et de hiérarchie puisées a l'école du génie romain -' INsse a,, -On voit au musée du Louvre m représenté sur une base en marbre à trois faces, qui a dû servir de support à, un trépied, un quindécimvir sacrifiant (fig. 2591). Il a la tete nue, couronnée de laurier, et il est vêtu du costume grec"; il répand de l'encens sur un petit autel allumé. Dans le fond on aperçoit deux lauriers, avec un corbeau qui en picote les haies : ce sont des at tributs d'Apollon. Sur une autre face est figuré, entre: deux lauriers, le trépied de ce dieu, surmonté du chaudron (eoctino) sur lequel un corbeau est perché. D'autres emblèmes sculptés sur le môme monument. se rapportent à, Urie) et à Bacchus, est--à--dire à de-. dieux étrangers dont e culte incombait au cote lège sacr°is f'aeiun-dis. Les textes signalent ceux d'Apollon parmi les (signe, desquindécimvirs et on retrouve sur les mounaiessignées des membres du collège la cou ronne de laurier, le trépied avec le chaudron (cor^tine) posé sur le support, le dauphin qu'on promenait la veille du sacrifice, quelquefois le corbeau "0. Voici (fig. 2592) une monnaie de C. Cassius Longinus, le meurtrier de César, Au revers on voit un trépied surmonté de la cortine et orné de bandelettes (infuiae) 29'. Voici encore (fig. 2593) une monnaie de L. Manlius Torquatus, triumvir monétaire, vers 54 av. ,L-C. -= 700 : ,fête de la Sibylle ceinte d'un bandeau et tournée à droite, dans une couronne de laurier, Revers, TOR VAI..Iii V1R. Trépied surmonté d'un vase à verses' entre deux éloiles, le tout dans une couronne de laurier. Les deux étoiles sont Phebuset Diane "2. Le corbeau appar-ait sur une monnaie de Vitellius 193. G. fîtacu.