Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article EKKLESIA

ElLESTA ('Exx' uiv).-Mot qui, à l'époque classique, désigne dans les cités grecques l'assemblée du peupla. Tantôt cette assemblée n'a pas d'autre nom, comme à Athènes et dans les cités ioniennes ; tantôt on appelle ekklesia, par analogie, une assemblée qui, officiellement, porte un autre nom, comme l'Apella de Sparte et I'Clalïa des villes doriennes, L'origine de l'ekklesia est dans l'AGORA de l'lliade et de l'Odyssée. Dans les siècles épiques, le peuple, convoqué par le roi, rassemblé par les hérauts 1, vient s'asseoir par terre sur la place publique', à quelque distance de la partie réservée3, où, sur des bancs de pierre polie, siègent le roi et ses 7ipa's tç Les simples citoyens n'ont pas le droit de parler. Ils ne sont Ià que pour assister aux délibérations des nobles, qui seuls ont qualité pour donner leur avis, parce que, seuls, ces fils de Zeus peu EKK -~12Eh Ki vent prendre en main le sceptre des hérauts °. On ne peut pas en-,pêcher la foule d'accueillir les opinions émises par des cris de joie ou un morne silence' ; mais si on les a réunis, ces hommes si humbles qu'ils se laissent battre par leurs chefs', c'est pour leur annoncer et leur faire exécuter des décisions prises en dehors d'eux'. On continua plus tard d'appeler âyopi, au moins chez les Athéniens, les assemblées des associations particulières, dèmes, phratries. yévrl, eranes, thiases, orgéons. C'est dans ces àyopx( qu'étaient rendus tant de décrets qu'ont révélés les inscriplionse. Quant à l'assemblée du peuple, à la suite de la révolution qui brisa la toutepuissance des chefs de famille et de tribu, elle changea nécessairement de caractère, et, avec de nouveaux droits, prit un nom nouveau i0. Les ÈxxX716iat remplacèrent les «yop«i dans toutes les villes grecques, parce que toutes traversèrent cette phase politique oil les nobles furent contraints de laisser la plèbe se tailler sa part dans l'État. Mais la démocratie ne fit point partout les mêmes progrès. Dans nombre de cités, l'ekklesia rappelle, par bien des traits, surtout par ses attributions restreintes, l'antique agora: ce sont, pour la plupart, des cités doriennes, et presque toujours l'assemblée y porte proprement un autre nom que celui d'ekklesia n. Ailleurs, principalement chez les Ioniens, l'assemblée a des pouvoirs si étendus, qu'elle annihile presque les magistrats, héritiers de l'ancienne royauté, et le sénat qui représente t'ancienne aristocratie. Là encore, comme partout dans l'histoire grecque, on remarque l'opposition de deux systèmes politiques : on retrouve toujours, l'une en face de l'autre, dominant les cités secondaires, ces deux éternelles rivales, Sparte et Athènes. cités oligarchiques, l'ekklesia n'est qu'un de ces moyens, énumérés par Aristote 12, à l'aide desquels une politique d'astuce et de trompe-l'oeil parvient à leurrer le peuple. Ici, on limite le nombre des citoyens : ils forment un corps fermé à Massilie, à Istros ; à. Héraclée, il faut une révolution pour qu'ils soient huit cents i3; à Épidaure, ilssont cent quatre-vingtst`. Là, on accorde au plus grand nombre le droit d'assister à, l'assemblée; mais on a soin de frapper d'une peine pécuniaire les riches qui ne s'y rendent pas, tandis qu'aux pauvres on fait grâce ou à peu près. Ou bien on impose aux absents une amende si forte, que ceux de la basse classe se gardent bien de se faire inscrire sur les registres civiques. Ailleurs, on laisse venir tout le monde à l'assemblée ; mais on ne lui soumet que des résolutions arrêtées d'avance par les sénateurs ou les magistrats, on lui donne l'illusion du pouvoir sans puissance réelle, on lui demande une sanc fion inutile'. En Crète, sa souveraineté se borne à confirmer pour la forme les décisions des gerontes et des eostnes : les citoyens sont, en quelque sorte, les témoins instrumentaires des actes officiels ; c'est devant eux qu'on proclame, du haut d'une pierre, les adoptions et que les ambassadeurs étrangers remettent leurs lettres de créance 1G. A Rhégium, àAgrigente, à Corcyre, à Mylasa, à Delphes, à Gythion", le sénat lui-même ne semble pas un frein suffisant : pour plus de garantie, une commission recrutée parmi les vieilles familles exerce un droit de censure sur les projets en discussion ou un droit de veto sur les projets adoptés. Toutes ces restrictions dans le recrutement et dans les attributions de l'assemblée, on les constate dans bien des cités oligarchiques; on ne les connaît avec quelque détail qu'à Sparte. Sparte. A Sparte, l'assemblée se nomme officiellement Apelle18, et, si les auteurs anciens la désignent souvent sous le nom de Haliez" ou d'Elcklesia20, c'est qu'elle est une variété de la balla dorienne, qui elle-même est une espèce du genre ekklesia. L'apella est formée, selon la constitution de Lycurgue, des citoyens âgés de trente ans 21. Or, comment est-on citoyen? Trois conditions sont requises. 1° II faut être de naissance spartiate, être rattaché par les liens du sang, du côté paternel et maternel, aux héros de la conquête dorienne. Le signe visible de cette descendance, c'est l'admission aux sociétés politiques et religieuses (aux tiu)ai et aux tilôat) que Lycurgue avait créées sur un ordre venu de Delphes 22. Quant à la naturalisation, c'est une faveur bien rare et tellement entourée de restrictions qu'elle ne confère que des droits civils 23 Sont donc exclus de l'apella les étrangers, les hilotes, les périèques. `211 Il faut avoir reçu cette fameuse éducation (dywyr'I) prescrite par les lois 26 : le citoyen doit avoir été formé par l'État plus que par sa famille. Cette condition est tellement importante, qu'elle fait quelquefois passer sur la première, et que des mothaces, vôtot issus de Spartiate et de femme hilote, comme Gylippe et Lysandre, obtiennent les droits politiques, s'ils ont reçu l'éducation commune de la jeunesse spartiate. 3° 11 faut prendre part aux repas publics [svssmTIA]. Or, les âvSpeia ytS(Tta25 ne sont pas, comme ceux de Crète, défrayés par le trésor, mais par les convives eux-mêmes, qui fournissent leur quote-part, non pas en argent, mais en nature. C'est une précaution prise par le législateur pour empêcher les Spartiates de vendre ou de partager au moins ce lot primitif (eyza(a Loipa), cette portion de terre conquise qui doit rester inaliénable et indivisible 2". En somme, de génération en génération, les fils des conquérants doivent EKK 513 EKK conserver le monopole de la vie politique ; mais. ils n'y ont part que si, à l'âge de sept ans, ils ont été enlevés à leurs parents pour être conduits chez le pédonome, et si, à l'âge de trente ans, ils possèdent par hérédité ou se font reconnaître le minimum légal de biens fonciers. Un peuple guerrier et aristocratique comme les Spartiates demande à être composé de purs Doriens, soldats et propriétaires. Combien sont-ils, ces privilégiés? A l'origine, ils sont encore assez nombreux. Plutarque 27 parle de neuf mille Spartiates, mais avoue que d'autres historiens n'allaient pas au delà de quatre mille cinq cents. Tout en admettant que ce dernier chiffre est encore exagéré, et sans essayer de préciser, on peut dire que, dans les premiers siècles, l'apella comptait beaucoup plus d'assistants qu'à l'époque classique. En effet, « de toutes les villes qu'il y a eu sur la terre, Sparte est peut-être celle où l'aristocratie a régné le plus durement et où on a le moins connu l'égalité" ». La propriété foncière étant la base de la puissance politique, on se disputa les terres avec acharnement. Bientôt, tandis que quelques centaines de Spartiates détenaient toute la richesse, le reste fut chassé du corps politique par la pauvreté. Ce furent d'abord les fils cadets, à qui leur père, possédant tout juste le cens fixé par la loi, ne pouvait rien léguer, et qui traînaient leur misérable vie auprès du frère aîné, seul citoyen. Ce furent ensuite même des chefs de famille, obligés pour vivre de renoncer aux frais des phidities, de grever d'hypothèques et d'abandonner jusqu'à l'âo/a(x uoTpa. Ils étaient bien d'origine spartiate, tous ceux-là, et, à ce titre, on leur laissa leurs droits civils et leurs devoirs militaires ; mais ils n'avaient plus la fortune requise : ils cessèrent d'être citoyens. Ils formèrent la classe des in fe'rieurs, des û7ro(sE(ovec 29, et, par opposition, les vrais Spartiates, les seuls citoyens, ceux qui formaient le peuple légal (6 Stjuoç30), prirent le nom d'égaux, de pairs (ôsotot). Le nombre des Spartiates diminua de plus en plus. On eut beau accorder des primes aux chefs des familles nombreuses, autoriser la libre disposition du bien patrimonial : on ne put guérir un mal que les grands avaient intérêt à faire durer. Il n'y avait plus que mille Spartiates au Ive siècle ; au IIIe, vers 2.44, il n'y en eut plus que sept cents, et encore, sans la mesure libérale due à Épitadée, il n'y en aurait eu que cent31. Il fallut les lois révolutionnaires rêvées par Agis III et exécutées par Cléomène III pour hausser le nombre des citoyens au chiffre de quatre mille cinq cents n; mais la secousse fut si rude, que Sparte en mourut. L'oligarchie était sa raison d'être. Même parmi ces riches qui paraissaient à l'apella s'établirent des distinctions forcées. Les 6p.otot n'étaient égaux que de nom. A la longue, la plupart des citoyens possédaient à peine de quoi conserver le droit de cité, et les plus opulents, les xaaoi xaiyaOoi n, formaient une élite dans cette élite. Or, l'apella étant une réunion d'aristocrates, l'aristocratique constitution de Lycurgue lui reconnaissait de grands pouvoirs. La haute noblesse fut III. donc amenée à lutter contre la majorité des ô osisst, qui ne voulait pas se laisser opprimer, et contre les rois, qui voulaient fortifier leur autorité. Elle l'emporta par un coup d'État. Cent trente ans après Lycurgue, entre les deux guerres de Messénie, sous le règne de Théopompe, en même temps qu'elle contint la royauté par l'institution de l'éphorat n, elle prit le parti de ne plus consulter l'apella que pour la forme, lui substituant pour toute la réalité du pouvoir une réunion restreinte, la « petite assemblée » (utxpâ Exx),71a(a 3'). Il y a donc lieu de considérer deux périodes différentes dans l'histoire des assemblées spartiates : la première, où l'apella est relativement importante, parce qu'elle est un corps oligarchique et n'a ses droits limités que par le sénat ; la seconde, où l'apella est impuissante, parce que les affaires sont traitées en dehors d'elle, au sénat et dans la gtxpâ îxx)ra(a, D'après une rhetra de Lycurgue, l'assemblée des Spartiates devait se tenir entre le pont Babyca et leCnacion3s c'est-à-dire dans une petite plaine située sur la rive gauche de l'Eurotas, un peu en amont de Sparte, où l'on accédait en suivant au delà du pont la route de Tégée. On était là « au milieu de la résidence propre des Doriens.., d'où il ne fallait jamais écarter le centre de gravité de l'État n ». On délibérait en plein air. Pas de monument. Plutarque raconte qu'on ne voyait en ce lieu ni statues, ni peintures, ni lambris artistiques, ni décorations théâtrales ; on petit en croire Plutarque, et pour cause. A l'exception des rois et des gérontes, qui avaient certainement leurs sièges, les Spartiates devaient, dans les premiers temps, s'entasser sur des bancs ou s'asseoir sur le sol, comme le Slps; homérique. Une fois par mois, au moment de la pleine lune (tipaç éç (4zç âre x~Fta 38), les Spartiates se réunissaient de droit en assemblée ordinaire. Il pouvait y avoir des assemblées extraordinaires, sur convocation spéciale des rois. Peutêtre le cas se présentait-il assez souvent; car l'apella ne manquait pas de besogne. Les simples citoyens n'avaient pas le droit d'initiative ; mais ils avaient le droit d'amendement (âpaipeatç xui 7rp6alaatç). Les rois et les sénateurs présidaient, fixaient l'ordre du jour, proposaient les droits et décrets (Eia;pipen ,E rai di?itaranOat 39). Tout membre de l'assemblée pouvait demander la parole. Quand les débats étaient clos, on votait par acclamation (poil). Si la majorité n'apparaissait pas avec évidence, les assistants se séparaient en deux groupes que l'on comptait"o Les attributions de l'apella étaient très variées. En somme, elle exerçait d'une façon réelle les pouvoirs qui, plus tard, ne lui appartiendront qu'en apparence. Elle élisait les sénateurs 4f, les magistrats n, réglait les questions de succession au trône 43. Elle déclarait la guerre", désignait le roi qui devait prendre le coinmandement de l'armée 'n, avait la haute main sur le plan de campagne 46, recevait les représentants des cités étrangères 47, concluait des traités d'alliance 48 et de paix 45. Elle disposait aussi du pouvoir législatif; mais dans une cité aussi attachée à ses vieilles traditions, l'assemblée EKK ,14 EKK n'eut, de ce chef, pendant longtemps qu'à autoriser la conservation de For et de l'argent dans le trésor royal so. Dans l'apella siège une oligarchie disciplinée, qui ne fait rien d'elle-même, mais une oligarchie puissante, qui ne laisse rien faire sans son consentement. « La souveraineté et la force » que Lycurgue avait données à l'apella (S«Nst fi xup(av'ig.ev xai xpxroç) lui furent enlevées au milieu du vue siècle. Quand les nobles du sénat eurent tué le roi Polydore et maîtrisé le roi Théopompe, ils voulurent aussi dompter à jamais ces g.otot mécontents qui avaient fait cauae commune avec la royauté. Ils démembrèrent l'apella. Elle fut conservée, mais faible, sans sic. Quelques changements suffirent pour tout changer. Comme s'il fallait un siège nouveau à une nouvelle assemblée, Lape/la ne tarda vraisemblablement pas à se réunir dans le Strias 61. Cet édifice fut construit, vers la fin du vite siècle, par le Saurien Théodore. Attenant à l'agora, où résidaient les éphores et où venaient régulièrement les sénateurs 62, il permettait aux chefs de la cité de surveiller l'apeura sans se déranger. D'ailleurs, combien de citoyens se seraient rendus, comme jadis, sur les rives du Cnacion, maintenant qu'on ne s'occupait plus guère que de formalités? Comme les ôgotut étaient de moins en moins nombreux et se réunissaient dans un espace fermé, on put leur offrir plus de commodités : ils eurent des sièges sa Laprésidence effective appartint désormais aux éphores plus qu'aux rois. Ils convoquaient les assemblées extraordinaires, déclaraient la discussion close et mettaient l'affaire aux voix si. l,'apelle garda ses droits théoriques de corps électif mais le système des élections fut combiné d'une façon si habilement bizarre, qu'en pratique ces droits furent annulés. L'assemblée réunie, quelques hauts personnages s'enfermaient dans une maison voisine, d'où ils pouvaient tout entendre, sans voir ni être vus. Tour à tour, dans un ordre fixé par le sort, les candidats traversaient, silencieux, les rangs du peuple, et les électeurs affirmaient leurs préférences par des cris plus ou moins forts. Les arbitres désignés notaient chaque fois sur leurs tablettes 1'intensité des acclamations, et déclaraient, d'après les numéros, quel candidat devait être proclamé élu ' Aristote s' tracte de puériles de telles pratiques, et, en effet, P. n'y a de sérieux dans cette procédure que la proclamation de l'élu par quelques privilégiés. Si les xe) i xxyaào( étaient seuls éligibles au sénat'', ils étaient aussi les grands électeurs, ou plutôt l'élection des sénateurs par Capella était, au fond, un recrutement par cooptation, «un choix dynastique58 ». Le titre de sénateur est « un prix de vertu'9; mais « on peut deviner ce qu'il fallait de richesse, de naissance, de mérite, d'àge, pour composer cette vertu f0 ». II n'y a aucune raison pour admettre que, dans les élections de magistrats, les droits ie l'apella lussent plus efficaces. 11 y =.'n a, au contraire, pour croire que les éphores, et arot,ablement d'autres fonctionnaires, étaient désignés par les mêmes procédés". Ceux-là pouvaient être choisis dans tout le ô,g.oç, dans le millier de citoyens qui formaient le peuple spartiate. Mais, quand ils n'étaient pas pris parmi les xaù.oi xxyaâoi, ils étaient certainement achetés d'avance : il fallait être partisan de la haute noblesse par naissance ou par corruption 62. L'apella avait beau soutenir le roi Agis dans ses projets de réforme; les éphores élus étaient favorables au parti oligarchique63. Comme corps délibératif, l'apella vit également son pouvoir mutilé. Le droit d'initiative lui manqua plus que jamais : les éphores s'en emparèrent. Les rois, sénateurs et éphores (peut-être d'autres magistrats) eurent seuls part aux discussions qu'ils ouvraient et présidaient. Les simples citoyens n'eurent plus le droit de prendre la parole 65. Il n'est même pas prouvé qu'ils pussent solliciter l'autorisation de le faire à titre de faveur exceptionnelle. Dans la grande délibération dont Thucydide nous présente le tableau" et d'où doit sortir la guerre entre Athènes et Sparte, nous ne voyons en présence que le roi Archidamos et l'éphore Sthénélaïdas. Le droit d'amendement était donc supprimé. A supposer quun magistrat ou un sénateur proposât un retranchement ou une addition, qu'un roi (ce qui dut arriver souvent) voulût s'opposer à la mesure projetée, la loi dite de Théopompe avait prévu le cas : « Si le peuple rend un vote de travers, dit-elle avec un manque de précision qui prête exprès aux interprétations les plus larges, sénateurs et rois s'en écarteront » (ai ff 6xo).tv é Voilà le dernier terme de l'impuissance où est réduite l'apella. On la consulte ; mais ses avis ne s'iMposertt pas. Au moment de prendre une résolution grave, les chefs de l'aristocratie spartiate ont besoin de s'éclairer sur les dispositions de leurs subordonnés, de se renseigner sur le moral de ceux qui sont chargés d'exécuter les décisions prises. Ils tiennent à connaître l'opinion publique à la veille d'entrer en campagne ou de signer un traité. Ils laissent volontiers au gros des Spartiates le choix d'un général, parce qu'un général doit avoir la confiance de ses troupes. Mais la majorité de l'apella ne peut jamais prétendre à dicter des ordres. Si les sénateurs et les éphores sont d'accord, ils réunissent les citoyens pour leur faire des communications qu'ils jugent utiles : c'est une manière de publier la loi. Si les autorités ne s'entendent pas, naturellement il y a plus de chance pour qu'on se rallie aux désirs populaires; plais même quand le sénat est divisé, quand un roi et un éphore se disputent les suffrages de l'assemblée, même en temps de révolution, c'est le sénat seul qui décide et ne craint jamais de décider contrairement aux voeux du peuple 87. Ainsi l'apella est tombée dans une profonde décadence. Cependant le sénat ne peut pas concentrer toutes les affaires qui, dans les cités antiques, relèvent du corps législatif. Il ne suffit pas à représenter tous les xcmyoi xâyailo(. Il est composé de vingt-huit membres nommés EKI( ._ bIb EK à vie, et ce nombre fixe, immuable, n'admet pas tous les nobles à faire entendre leur voix. D'ailleurs, plusieurs des grandes familles n'y figurent point parce qu'elles ne renferment personne qui ait les soixante ans requis. D'une part, l'idée bien arrêtée de ne pas traiter les questions importantes au grand jour, en collaboration avec tous les citoyens ; d'autre part, l'impossibilité absolue de faire entrer au sénat toute la caste aristocratique : voilà la double nécessité d'où résulta la création d'une assemblée restreinte, intime, d'un conseil étroit, Quelle est la composition de ce comité? Quel est le lieu de ses séances? Dans quelles occasions se réunit-il? Quelles sont ses fonctions précises'? Autant de questions qui restent sans réponse. L'antiquité hellénique n'a laissé qu'un texte où l'existence de la µtx ixxAt,,alx soit signalée' , et ce texte se borne à nous en révéler le nom. Toutefois, si l'on songe à la place que cette assemblée tient logiquement dans les institutions de Sparte, on est fondé à rejeter les deux hypothèses les plus accréditées. D'après Schoemann G°, l'assemblée restreinte coinprendrait tous les ouotot, et, par suite, les fo ogi(ovi; auraient accès à l'apella. Mais jamais les t ou_(ove, n'ont joué de rôle politique, et dès lors pourquoi les ôµotot se seraient-ils réunis dans deux assemblées distinctes? D'après Lachmann 70, dont l'opinion est courante, l'assemblée restreinte ne serait autre chose que la, réunion des vingt-huit sénateurs, des deux rois et des cinq éphores. Mais, puisque les rois et les éphores avaient en tout temps leurs entrées au sénat 77, pourquoi ce nom étrange donné à la •7Epou71x? Xénophon connaissait sa langue et le sens toujours si net du mot ixx):,a(x, et il ne pouvait lui venir à l'idée, surtout dans un récit rapide, de s'attarder en une périphrase aussi ridicule que fausse. Au reste, il dit formellement µtxpà xO.oupa€vr, ixx)ar,a(a. Sont-ce les Spartiates qui se sont avisés d'affubler leur sénat d'un surnom si peu laconique? Non, la µtxpâ ixxAActi. a eu son existence propre, et elle a sa raison d'être, si on la considère comme moins nombreuse que l'apella, comme plus nombreuse que le sénat. Aux rois, aux éphores, aux sénateurs venaient se joindre ou les personnages les plus riches ou les principaux magistrats, peut-être les uns et les autres. ll n'y a pas apparence que dans ce conseil, où se débattaient les questions les plus graves, il n'y eût point place pour ces hauts fonctionnaires sortis des plus belles familles de Sparte et qu'on désignait du nom collectif de 't r€),-q ou oi iv raaet' . Que les historiens ne nous donnent aucun renseignement sur cette assemblée, il n'y a point là de quoi s'étonner. C'est le contraire qui serait étonnant. Les oligarchies puissantes ont toujours cherché à s'entourer d'ombre. Pour agir avec force, leurs ressorts doivent agir dans les ténèbres. Thucydide 73 avait bien remarqué cette politique de mystère. flous en avons une preuve de plus dans cette assemblée au petit pied, où les épho res, maîtres des rois et du peuple, venaient se concerter avec leurs propres maîtres, dans ce conseil qui a dirigé la république des Spartiates cinq siècles durant" saris laisser deviner les secrets de son organisation. que les assemblées des villes oligarchiques réunissent très peu d'assistants et voient continuellement se restreindre le cercle de ieurs attributions, les assemblées démocratiques présentent le spectacle d'une foule considérable, mêlée, et agrandissent pair (le perpétuels empiétements leur place dans l'État. Ces droits politiques qui, à Sparte, appartiennent nominalement à quelques centaines d'hommes et réellement à moins de cent, sont ailleurs exercés par plusieurs milliers. La puissante Éphèse a au. moins vingt clailiastyes, vingt circonscriptions de raille citoyens"; Méthymne en a au moins trois"; Samos en a, neuf ''. Au ve siècle, Th.espies compte deux mille cinq cents citoyens 70, et l'infime bourgade d'tasos en contient huit cents 70. Au Ive siècle, cinq mille habitants d'Olvnthe 80 peu vent se rendre à l'assemblée, et à grèse, dans une ekklesiia constituée en tribunal, sont exprirnés huit cent quatre-vingt-trois suffrages 31. Au me siècle, à Halicarnasse, un décret honorifique est rendu par quatre mille voix a3. Plutôt que d'être noyés clans la multitude, les riches s'abstenaient souvent de remplir leurs devoirs civiques 83. Les pauvres accouraient, au contraire, attirés pal' l'appàt d'unie solde (µmôn ix.x'kriataartxg, ou ir.x'imataartxôv) : c'est le cas pour Rhodes et lasos", aussi bien que pour Athènes. A lasos, la somme destinée à cette paye était fixée à l'avance pour toute l'année, puis tenue prête par les magistrats chaque mois; à la, nuits elle hune. Au début de la séance, dès le lever du soleil, les trois présidents qui représentaient les trois tribus remettaient aux citoyens des jetons de présence, et cette distribution se faisait tant que coulait l'eau d'une clepsydre ; mais le payement n'avait pas lieu tout de suite, il était probablement remis jusqu'à la fin de la séance. Tout était combiné pour décider bon nombre de citoyens à venir à l'heure et à ne pas s'en aller avant la clôture. Dans certaines villes, l'assembléese reinio dans un local approprié à cet usage (ixxkgataariptov "1; dans d'autres, au théàtre 3e. Le droit de convoquer le peuple appartient généralement au sénat", Le sénat s'occupe aussi de préparer les lois ou décrets. Parfois, mais rarement, c'est un comité de magistrats qui est chargé de cette mission (au' pytxt), et alors l'ekklesia se contente d'un simple droit de ratification, parce que Ies magistratures sont temporaires et que tout le monde peut y arriver à tour de rôle as. Mais, dans presque toutes les démocraties, le peuple accapare le gouvernement, et, s'il demande que le sénat ou les magistrats lui facilitent la besogne par une étude préalable (7tpoavaxo(vatv), il se réserve de décider en dernier ressort. A lui ia souveraineté , cette xup(a dont il est si fier et si EKK 516 EKK jaloux °J. Or, la xup(a, selon la définition qu'en donne Aristote 00, comprend le a droit de paix et de guerre, le droit de conclure les alliances et de rompre les traités, de faire les lois, de prononcer la peine de mort, l'exil et la confiscation, de recevoir les comptes ». A lui donc de décider de la paix et de la guerre : c'est ce que fait, par exemple l'ekklesia des Épirotes 91. A lui de recevoir et d'entretenir Ies ambassadeurs étrangers : c'est le cas à Rhodes, en Épire 99. A lui la haute justice, il l'exerce à Érèse, à Iasos, en Épire", partout. Partout il légifère 9°, partout il nomme les magistrats et surveille leur gestion. It prend quelquefois des précautions contre ses propres excès : à Halicarnasse, on exige, pour le vote des privilèges et distinctions honorifiques, un nombre très élevé de suffrages". Mais rien ne montre mieux cette usurpation universelle que ce simple fait : les séances régulières, celles qui se réunissent aux termes de la loi, à jour fixe, ruée«) ne suffisent plus à l'absorbante activité du peuple; il lui faut des séances supplémentaires (ixx).rla(a cûyx) 'roç). Il siège en permanence. Pour se mêler de tout, il se condamne à s'en mêler toujours. Athènes. C'est l'ekklesia d'Athènes qui servait de modèle aux villes démocratiques. Tous les traits qui dans les autres assemblées apparaissent isolés se retrouvent ici réunis. Composition de l'ekklesia. Quelle était la composition de l'assemblée athénienne? Il faut bien distinguer le droit théorique et le fait. En théorie, pour faire partie' de l'ekklesia, il faut : 1° être Athénien; 2° être majeur; 3° avoir conservé la complète jouissance de ses droits politiques. 1° Est Athénien quiconque est né de père et mère ayant droit de cité et mariés légitimement°°, ou quiconque, ne remplissant pas cette condition de naissance, esclave, étranger, métèque, isocèle ou bâtard (v606c), a reçu le droit de cité par décret spécial du peuple athénien. Pour être majeur, il faut avoir dix-sept ans révolus et avoir obtenu son inscription sur le registre du dème. La majorité de l'Athénien ne commence pas du jour même où il atteint sa dix-huitième année, mais du jour où, après avoir fait valoir ses droits dans l'assemblée du dème, convoquée à cet effet une fois l'an, il est inscrit sur le ar,tap-,(txôv ypaµµaTr. ov "7. Dès lors il peut s'inscrire lui-même sur une seconde liste, sur le tableau des citoyens admis à l'assemblée (6 7(va b LxxnrlataaTe)eéç), dont l'original est conservé dans chaque dème, peut-être affiché sur l'agora du dême, et dont un double sert au contrôle exercé sur les personnes entrant à l'ekklesia33. En général, cette inscription ne se fait pas avant que le jeune homme ait atteint l'âge de vingt ans, parce qu'il passe les deux premières années de sa majorité dans le corps des éphèbes. Mais il n'y a point de raison juridique qui empêche le nouveau citoyen d'être reçu dans l'ekklesia dès le moment où il est reçu dans l'agora du dème. Que pour cause d'infirmité, par exemple, le nouveau citoyen de dix-sept ans révolus soit dispensé de s'enrôler parmi les éphèbes, de prendre le bouclier et la lance des aa,iirnaoc ; souvent il se tiendra à l'écart de l'assemblée, par crainte du ridicule" ; mais, s'il se présente, il est impossible de le chasser comme intrus. Le seul titre qu'il ait à établir est celui de démote, et, pour l'établir, il lui suffit d'invoquer, à défaut du ),-dtapycxôv ypa;.rµaTeiov ou du 7r(va; ixOrnataa-tx6ç qui ne font point foi, le témoignage du démarque ou des démotes qui l'ont reçu dans leur association. De dix-huit à vingt ans, ou l'ors ne vient pas à l'assemblée, ou l'on se contente d'y faire un stage; mais légalement on peut y faire oeuvre de citoyen 10U. 3° Une fois acquis, ce droit de siéger à l'ekklesia ne peut se perdre que par l'atimie [ATIMIA]. Cette déchéance est momentanée et provisoire pour les débiteurs du trésor public, qui transmettent leur incapacité à leurs descendants jusqu'à extinction de la dette 10f, mais qui sont réintégrés dans leur capacité civique (istrTtu(a) par le seul fait de leur libération. Au contraire, la dégradation est définitive, quand elle est entraînée par certaines condamnations au criminel. On exclut à jamais de l'assemblée ceux que, dans les siècles primitifs, on mettait hors la loi, les meurtriers (?6voç) et les voleurs (x).o7nj), les traîtres (trpooa(a) et les révolutionnaires (h .mou xaTd),uatç), les déserteurs (aatao'r rov) et les lâches (Sera(«), les fils ingrats (xdxtoatç yovérev) et les faux témoins (rIsuiop.apTUpia), bien d'autres condamnés encore, et souvent les fils de ces condamnés. Ainsi, en droit, est admis à l'ekklesin tout habitant d'Athènes ou de l'Attique, tout clérouque, d'abord inscrit au registre de la phratrie, c'est-à-dire fils légitime (yvrato;) de parents athéniens, ensuite inscrit aux registres du dème et de l'ekklesia, c'est-à-dire majeur, à la seule condition de n'avoir pas perdu par atimie le bénéfice de cette triple inscription. De cens, il n'y en a pas. Une seule fois, un Athénien, Phormisios, proposa de prendre la propriété foncière comme fondement et condition des droits politiques : la motion fut rejetée comme oligarchique f35, Le plus pauvre des Athéniens doit pouvoir entrer à l'ekklesia. En réalité, ce n'étaient pas seulement les citoyens qui entraient à l'ekklesia. Une foule d'étrangers, voire d'atimoi et d'esclaves, parvenaient à s'y glisser 103. Ils s'exposaient à des poursuites criminelles ; mais la ypaytr evix;, arme a double tranchant qui pouvait blesser l'accusateur, fut bientôt une arme usée qui n'effrayait plus personne. On ne songeait guère à écarter du Pnyx tous ces usurpateurs (7rapéyypa7CT0t) qu'au moment d'une distribution de blé ou d'argent, lorsque les vrais citoyens étaient intéressés à voir diminuer le nombre des partagéants. En 445, une enquête révéla que sur dix-neuf mille prétendus citoyens, quatre mille sept cent soixante, le quart, étaient des intrusf'h. Les troubles favorisèrent à tel point ces fraudes, qu'en 403 la loi dût consacrer le fait'''. En 346, il fallut se décider à une revision générale des registres dans tous les dèmes (Starl3j EKK Mats). Cette fois on frappa fort, à tort et à travers : on obtint la radiation (â7co,l7zt(s) de tant de noms, que les exclus « formèrent presque une classe à part "G. 1) Mais ce ne fut qu'un accès de colère. Durant le ve et le Ive siècle, jamais on ne trouve dans l'ekklesia d'Athènes ce qu'Aristophane appelle « le froment pur »; il y pénètre toujours « des métèques, paille des citoyens '07 ». Métèques ou citoyens, en 1145 plus de vingt mille hommes lu avaient ou se donnaient le droit de paraître à l'assemblée. Au début de la guerre du Péloponnèse, l'Attique comptait trente-cinq mille hommes jouissant des droits politiques'0'. Mais, au siècle suivant, avec la prospérité de la cité, diminua le nombre des citoyens on constata au recensement de 309, sous Démétrios de Phalère, qu'ils n'étaient plus que vingt et un mille Évidemment, il n'y eut jamais dans Athènes aucune assemblée qui réunit une pareille multitude. Sans doute, les chiffres fournis par les auteurs anciens ne comprennent pas les dix mille clérouques établis hors de l'Attique 11, qui de Bréa ou d'Oréos, de Scyros ou de Lemnos ne pouvaient venir au Pnyx. Mais parmi les citoyens de l'Attique « il en était beaucoup que les travaux des champs ou les exigences d'un commerce de détail retenaient dans les plaines d'Éleusis ou de Marathon, dans les ravins du Parnès, ou dans les petits ports de la côte 112. » On peut évaluer leur nombre à cinq mille pour le ve siècle "'. Dans Athènes même, les riches aimaient mieux rester chez eux que de se mêler à une foule tumultueusel'''; les marchands n'avaient nulle envie de laisser là leurs affaires pour s'occuper de politique. Et puis, la place publique, avec ses platanes qui donnaient une si bonne fraîcheur, avec ses beaux édifices, ses boutiques de barbiers et ses tables de changeurs, son animation et ses cris, ses tribunaux, son sénat où les badauds regardaient entrer de grands personnages, avait d'irrésistibles attraits pour un peuple naturellement curieux et sensible au pittoresque. Enfin, en temps de guerre, il fallait partir comme hoplite ou comme matelot pour des expéditions lointaines. Quelle que fût l'importance de la question à traiter; il semble que jamais assemblée ne réunissait cinq mille votants". e Quand il n'y avait à l'ordre du jour... que des objets sans conséquence, il devait arriver souvent que les prytanes n'eussent autour d'eux... qu'un ou deux milliers, parfois même que quelques centaines de citoyens'''. » C'est pour lutter contre ce fléau politique, l'abstention, que la démocratie athénienne fut amenée à distribuer un salaire aux citoyens présents. Cette pratique, qui devait puissamment modifier la composition et l'aspect de l'ekklesia, a été bien souvent critiquée. Ii faudrait cependant, pour juger équitablement le utaOlu iiuddlataertxds, ne pas prendre pour d'invincibles arguments les boutades passionnées d'un poète cornique EKK doublé d'un aristocrate. 11 faudrait surtout, pour comprendre à quelles nécessités répondait cette institution, savoir à quel moment de l'histoire elle fut imaginée. On a longtemps répété, sur la foi d'une glose qui a eu la bonne fortune d'être accueillie par Boeckh 117, (lue le créateur de ce salaire fut Callistratos d'Aphidna, contemporain et peut-être auxiliaire't8 de Périclès. La gratification aurait été d'une obole au ve siècle ; supprimée pat' les Quatre-Cents et les Trente, elle aurait été rétablie après l'archontat d'Euclide et portée à trois oboles par Agyrrhios. On doit renoncer désormais à cette hypothèse 119. D'abord, comment ne pas se défier d'un parémiographe assez mal renseigné pour faire de son prétendu Callistratos le promoteur de la solde accordée aux héliastes? Ensuite, le proverbe qu'il cite est susceptible d'une explication plus simple, pour peu qu'on le rapproche d'un passage d'Aristote 120. Enfin, les premiers documents qui fassent mention de l'_xis gctac71xdv12f sont les deux dernières pièces d'Aristophane, l'Assemblée des femmes, qui date de 391/390, et le Plutus, dont la seconde édition date de 389/388 '2a ; et cependant, si jamais occasion se fût présentée au génie d'Aristophane de tourner en ridicule cette rétribution, c'était bien, en 425, cette parodie de l'ekklesia qui ouvre les Acharniens. Les textes mêmes qui prouvent qu'en 391/390 le p.tcOds venait à peine d'être élevé à trois oboles par Agyrrhios font aussi présumer qu'il n'avait pas été inventé depuis bien longtemps. Or, c'est en 395 que le même Agyrrhios avait rendu au peuple la gratification du théorikon. Il est vraisemblable que le pu?-017 'xx),rlc,'eTtxds date de la même époque, et il y a lieu de s'en tenir au témoignage du scoliaste 123 qui attribue positivement à Agyrrhios, non seulement l'augmentation, mais l'institution première de cette indemnité. Ainsi cet usage s'est introduit dans l'ekklesia quelques années après le rétablissement de la démocratie. Dès lors il s'explique par des raisons d'ordre matériel et politique. Après tant de défaites et de troubles, la vie dans Athènes était devenue dure, et bien des pauvres gens seraient morts de faim s'il leur avait fallu à chaque instant déserter leur travail pour courir au Pnyx. C'étaient précisément ces artisans gênés qui prêtaient le plus ferme appui aux défenseurs de la constitution, et il ne faut pas oublier que les partisans de l'oligarchie ne désespéraient pas de leur cause, même après l'échec des Trente, qu'ils avaient remplacé la violence par l'hypocrisie, et que, la grande bataille perdue, ils engageaient encore des combats d'arrière-garde. La création du p.teOds fut donc une véritable nécessité. Certes, c'est été un déplorable expédient, si, pour sauver la démocratie, on avait ruiné l'État. Mais les conséquences financières de cette libéralité politique ne pouvaient pas être si graves. Comment Schoemann 124 a-t-il pu dire que l'ixx),7)atactitxdv « engraissait » le peuple EKK 518 EKK et qu'il était, selon le mot de Dérnade sur le lhéorikon, la « glu » de la démocratie? Trois oboles, ce n'était même pas assez pour les frais de voyage, quand on venait de la banlieue'' ; c'était le cinquième du salaire payé à l'ouvrier libre, le tiers de ce que gagnait un manoeuvre ; c'était ce qu'on payait par journée et par tête pour la nourriture des esclaves'2'. Cependant, si tous les assistants avaient reçu leur triobole, étant donné le grand nombre des séances, la dépense eût encore été forte. Mais il n'en était rien. Si Boeckh estime que la paye de l'assemblée coûtait annuellement de trente à trente-cinq talents, si Schoemann porte ce total à vingt talents 17, c'est qu'ils calculent à raison de huit mille ou au moins de six mille assistants et d'autant de trioboles par séance. Mais la somme distribuée ne variait pas selon le nombre des citoyens présents. Elle était fixée à l'avance dans le budget arrêté par le peuple, répartie entre les ixxava(at de l'année et représentée par un nombre limité de jetons (auu.eoaa). Ces jetons, probablement analogues à ceux qu'on remettait aux sénateurs [Voy. la fig. 871] et dont quelques-uns se trouvent peut-être parmi les plombs parvenus jusqu'à nous '26 [fig. 2308 et 2309], étaient distribués, au moment de l'entrée, par les trois prytanes 12" qui présidaient les auAi,oyeTs Tou h uou i3". Il fallait se hâter pour en avoir un. II ne fallait pas seulement être là avant l'ouverture de la séance, mais encore se présenter au bureau avant les autres, accourir « au second chant du coq », « sans avoir souvent rien pris que de la saumure à l'ail]", ». Les premiers arrivants avaient seuls chance de recevoir une indemnité parcimonieusement répartie. C'est donc à peu de frais que, grâce au uta9ôç exx%r;at3t airtxs, on obtint de grands résultats. Évidemment les Athéniens aisés n'allaient pas se bousculer à l'entrée du Pnyx pour toucher un jeton 132. C'étaient les gens de métier qui profitaient de la subvention : c'étaient « des foulons, des cordonniers, des maçons, des ouvriers sur métaux, des laboureurs, des revendeurs, des colporteurs, des brocanteurs133 ». Les jours d'ekklesia, on mettait sa plus belle tunique et ses chaussures laconiennes 134, et l'on n'était pas fâché de revenir avec un triobole. Aussi l'ekklesia eut-elle désormais son personnel. Les démagogues y trouvèrent leur compte, mais aussi la vraie et bonne démocratie. Quand on ne s'occupait que d'affaires courantes, l'ekklesia ne devait pas être indécemment déserte, et, aux grands jours de lutte, les exigences de la vie matérielle ne devaient pas empêcher les plus pauvres de faire valoir leurs droits. Siège de l'ekklesia. Le lieu de réunion avait été, à l'origine, la place du marché, l'AGORA. Il s'agit de l'ancienne agora, de celle qui était située dans le voisinage du temple d'Aphroditê Pandèmos, au sud-ouest de l'Acropole, à l'endroit où devait s'élever plus tard l'Odéon d'Hérode Atticus 13'. L'emplacement était vaste. Lorsqu'il fut abandonné pour d'autres, on y revenait chaque fois qu'on tenait une de ces assemblées plénières où l')n exigeait un minimum de six mille votants'''. Toutes les autres séances se tinrent au Pnyx, au moins depuis la guerre du Péloponnèse 137. Où était le Pnyx? La question est controversée. Les uns, avec Leake, ont reconnu « l'emplacement du Pnyx sur une colline située à l'ouest de l'agora, où se voient les traces de grands travaux d'appropriation exécutés à une époque assez reculée ; il y a là toute une estrade taillée dans le roc, avec ses larges degrés où les scribes pouvaient se grouper aux pieds de l'orateur; il y a des murs de soutènement construits en appareil polygonal. L'ensemble paraît avoir formé une demi-circonférence, dont la convexité était tournée vers la ville, tandis que la tribune occupait à peu près le milieu de la ligne droite où venaient s'appuyer les deux extrémités de l'arc que décrivait la muraille '3B. » Les autres, avec E. Curtius, veulent voir dans ce demi-cercle rocheux un sanctuaire de Zeus et prétendent que le Pnyx se trouvait sur les hauteurs situées au nord du Musée17'. Tout ce qu'on peut affirmer, c'est que le Pnyx, un peu plus commode que l'ancienne agora en temps ordinaire, était trop étroit pour les assemblées plénières, qu'il avoisinait et dominait l'agora moderne, qu'une rue partant de l'agora y menait, que de là on apercevait les propylées de l'Acropole, que tout y était d'une simplicité antique, qu'un rocher dégrossi servait de tribune et qu'on y remarquait à peine quelques sièges taillés dans le roc parmi de nombreux bancs de Comme le peuple aimait ses aises, il ne tarda pas à tenir les assemblées extraordinaires dans le théâtre de Dionysos, achevé par Lycurgue, au sud de l'Acropole, à l'est de l'Asklépeion''''. Tandis qu'au Pnyx on était serré sur des banquettes trop rares, au théâtre on était au large et bien assis. Déjà pendant la guerre du Péloponnèse on s'y était réuni une fois. Cette première assemblée convoquée au théâtre n'était encore qu'une exception, qui s'explique par des circonstances extraordinaires, comme les assemblées organisées au même moment par les Quatre-Cents dans le temple de Poseidon à Colone et par le parti démocratique dans le théâtre de Munychie 142. Mais, au milieu du ive siècle, les assemblées y furent de plus en plus fréquentes "3. L'assemblée solennelle qui suivait la fête des grandes Dionysies y siégea constamment "4. C'est là qu'à partir de l'époque de Démosthène (vers 332) se tinrent toutes les assemblées ordinaires dites xup(at'42, « Phocion, Démétrios de Phalère, ceux qui acceptèrent la tâche d'habituer le peuple à son abaissement et de lui faire une âme au niveau de sa fortune nouvelle, l'engagèrent à oublier le chemin du Pnyx, où le moindre mot imprudent aurait pu réveiller trop de cruels et dangereux souvenirs f10, » EKK 5'19 EKK Bientôt on ne monta plus au Pnyx que le jour des élections; mais encore à l'époque romaine on y allait une fois par an pour élire le stratège des hoplites Dans la seconde moitié du Ive siècle, on commença aussi de tenir des assemblées extraordinaires au Pirée. On s'y rendit d'abord quand on mettait à l'ordre du jour des questions d'armements maritimes' u. Puis, de même qu'on avait peu à peu délaissé l'agora pour le Pnyx, le Pnyx pour le théàtre, on s'habitua si bien à siéger au Pirée, qu'au ser siècle avant Jésus-Christ les assemblées du théàtre et celles du Pirée semblent alterner Époques des séances de 1'ekklesia. La constitution de Solon accordait si peu d'autorité à l'elcklesia, que tout d'abord ses séances durent être rares. Chargé seulement d'élire quelques magistrats et de recevoir leurs comptes à l'expiration de leur mandat (râç épyatpEaiaç rât râç EipCuaç 150), le peuple ne devait guère s'assembler en temps normal qu'un ou deux jours par an. Encore la tyrannie des Pisistratides dut-elle convertir ces réunions en cérémonies insignifiantes. Ce sont probablement les réformes de Clisthène qui décidèrent les citoyens à se donner rendez-vous une fois par prytanie. Il fallait bien qu'à intervalles rapprochés la souveraineté populaire pût arrêter ses résolutions définitives (xupe,v) dans les affaires traitées provisoirement par le sénat et les magistrats. Ces assemblées régulières, qui siégeaient de plein droit, s'appelèrent xupiat =xxara(at. Bientôt l'ordre du jour fut tellement chargé, qu'il ne suffit plus d'une ekklesia par prytanie. Il y en eut successivement deux, trois et quatre. Extraordinaires au début, ces séances supplémentaires furent peu à peu consacrées par la loi et appelées sé;.ttuot ÉxxAr,a(at, éxiû appliqua indifféremment le nom de xupiat isx) sîst à la véritable xupia xxkga(a et aux trois autres assemblées ordinaires. Ce sont, d aune part, cette distinction théorique entre la maîtresse assemblée et les trois assemblées légales; d'autre part, cette facile confusion de nom entre les quatre assemblées ordinaires, qui nous expliquent pourquoi les grammairiens et les lexicographes nous parient tantôt d'une seule xupia rxiùisia, tantôt de quatre ou même de trois ". Mais, dans l'état actuel de la science épigraphique, il n'y a point d'exemple de plusieurs xup(at ixzArlaiat par prytanielsz Il semble bien, par conséquent, qu'officiellement, constitutionnellement, on réservait la dénomination de xupia éxxagaia aux dix assemblées annuelles qui dataient de Clisthène. Ce qui amena fatalement les Athéniens à grouper toutes les assemblées ordinaires sous un nom commun, c'est le besoin de les distinguer des assemblées extraordinaires. En effet, quand il arrivait un événement imprévu et qu'il y avait à prendre une mesure urgente; quand on avait à terminer une délibération qui n'avait pu aboutir en une séance, on n'attendait pas une des quatre assemblées régulières. On convoquait au plus tôt une atéyxaricoç pxx) e(a "'. C'est ainsi que, par exemple, au mois d'élaphébolion de 1'01. CVIII, 2 (mars-avril 346), dans l'assemblée ordinaire du 5, Démosthène demanda la réunion d'une avyxa-lroç iixx)da(a pour le 8, et dans l'assemblée du 8 la convocation de nouvelles asiyxa'rat ixxX aiat pour le 18 et le 1915 De ce que quatre assemblées se succédaient par prytanie, on a cru pouvoir conclure que d'une prytanie à l'autre elles se suivaient à intervalles identiques. On a prétendu qu'elles se tenaient les 10, 20, 30 et 33 de chaque prytanie. C'est une conjecture sans valeur 155, Ni dans la prytanie ni dans le mois, ni pour la xupia Exx),rla(a ni pour les autres assemblées, il n'y avait de jour fixe. D'après les inscriptions, le jour de la xupia variait infiniment, et il n'est guère de jour dans le mois qui n'ait eu, une année ou l'autre, son assemblée ordinaire. C'est qu'il fallait compter avec les jours fériés et les jours néfastes [APOPIIRADES HEMERAI]. « Les plus religieux des hommes » se seraient bien gardés d'irriter les dieux en s'occupant d'affaires publiques pendant la hiéroménie, pendant les Panathénées, pendant les Dionysies, le jour des Plyutéries, etc. lss. Il faut entendre de quel ton indigné Eschine reproche à Démosthène d'avoir fait convoquer le peuple pour le jour consacré à AsclépiosOn ne connaît que deux décrets"' qui aient été votés le septième jour d'une décade. En somme, n'y a que deux assemblées que l'on retrouve à une date constante. La première ekklesia de l'année se tenait toujours le 11 de hékatombeon 159: les pouvoirs du sénat expirant à la fin de l'année et ses décisions n'ayant plus d'effet, il fallait bien laisser quelques jours au sénat renouvelé pour se mettre au courant ; mais, comme déjà les trois derniers jours de l'année écoulée étaientnéfastes, on ne pouvait pas retarder indéfiniment les délibérations. De même, après les grandes Dionysies, on se réunissait tout naturellement dans le temple du dieu pour s'occuper des incidents survenus pendant la fête, et cette s'xxA~e(a iv ®tovéaou avait lieu (sauf quelques années au use siècle) te 21 d'élaphébolïon 166. Ces exceptions s'expliquent par la règle même que suivaient les Athéniens : ils étaient trop pratiques à la fois et trop pieux pour sacrifier leurs intérêts temporels et spirituels au seul plaisir de trouver plus de symétrie à leur calendrier politique. Mais si toute fixité de dates semble démentie par les documents, s'il est faux que la première ekklesia de chaque prytanie fût toujours la xupia, on n'est pas autorisé161 à récuser le témoignage de Pollux, lorsqu'il déclare que chacune des quatre assemblées ordinaires avait son ordre du jour particulier 162. Ces quatre programmes (zepoyp«lt,uara) sont parfaitement d'accord avec le développement historique de l'ekklesia. Dans l'un il y a de tout, parce qu'il fut longtemps le seul, de même que longtemps le roi concentra en sa seule personne tous les pouvoirs de la cité. Dans les trois autres, on retrouve cette vieille distinction des trois pouvoirs poli EKK 520 EKK tiques qui en s'isolant se personnifièrent dans l'archonte éponyme, le polémarque et l'archonte roi : justice, guerre, religion. Quel que fût le jour choisi pour la xop(a ixx)-gc(a, on la consacrait normalement à contrôler la gestion des magistrats pour les continuer dans leur charge ou les en suspendre (ilityatpo7oa(e), à vérifier si toutes mesures étaient prises pour assurer la sécurité publique (7apl a(7ou 16''), à entendre la publication des bien confisqués et des procès d'héritage engagés depuis la derniere xup(a ixx)ra(a, à recevoir les accusations d'aicayya)(a. De plus, au ve siècle, la xup(x gxx)•ga(a de la sixième prytanie rendait un vote préalable (7tpoyatpsTooia) sur la question de savoir s'il fallait ou non recourir à l'ostracisme. Dans une seconde assemblée ordinaire, les citoyens étaient autorisés à introduire la procédure compliquée qui devait rendre aux ârigot et aux débiteurs de l'État leurs droits perdus. Dans une troisième, le peuple donnait audience aux ambassadeurs et hérauts présentés par les prytanes, et, d'une façon générale, s'occupait de politique extérieure. Enfin, dans une quatrième, on traitait les affaires d'ordre religieux (iapâ xxi Satu 185. Ces quatre programmes n'étaient pas limitatifs : ils ne s'excluaient pas les uns les autres et n'excluaient nulle question. Le peuple fixait à ses travaux un certain ordre qui n'avait rien de rigoureux. On se conformait à la règle pour les affaires courantes. Ainsi, la formule Eiç fréquemment dans les décrets athéniens quand les prytanes ou proèdres sont chargés de mettre une motion à l'ordre du jour, ne signifie pas « à la prochaine ekklesia mais « à la première ekklesia réservée aux affaires similaires 166 ». Ainsi, quand les décrets de proxénie octroient le privilège d'entrer au sénat et à l'assem qu'on usera de ce droit après la séance religieuse (N.ET Tz iapà'°7). Ainsi, des députés doivent parfois attendre longtemps avant de se présenter devant le peuple'''. Mais il est certain que dans la xueia ixx)r,a(a on ne se bornait pas toujours aux discussions réglementaires, que dans les trois vdu.iJ.ct ixx)ys(at on empiétait souvent sur le domaine de la xup(a ixx)■Actu. Pourvu qu'une affaire eût été portée dans les délais légaux au programme officiel, elle pouvait être mise en délibération. L'assemblée suspendait même quelquefois le cours ordinaire des affaires et se défendait à elle-même, plusieurs séances durant, de sortir d'une question urgentef69. Le programme régulier de l'ekklesia était donc pour les Athéniens un mémento, non une gêne. Ils savaient prendre les avantages qu'offre la division de travail, sans les inconvénients. Procédure de l'ekklesia. Les formalités de la convocation sont les mêmes, que les assemblées soient ordi naines ou extraordinaires (si toutefois, dans ce dernire cas, les circonstances laissent le temps nécessaire). La seule différence, c'est que les atirtItTot ixx)ria(tet se réunissent soit en vertu d'une décision arrêtée en séance ordinaire par le peuple, soit sur la demande des stratèges 170. Mais ni les quatre assemblées légales, ni les assemblées provoquées par les puissants stratèges ou le peuple lui-même 171, ne peuvent avoir lieu sans le concours du sénat représenté par les prytanes 772. Au milieu du Ive siècle, les prytanes, à leur tour, délèguent probablement leurs pouvoirs à trois d'entre eux, à ceux qui au début de l'année ont été désignés par le sort pour entrer dans la commission des eu))oTc'ç Tot Se,gou et qui président cette commission tant que leur tribu exerce la prytanie i73. Seuls les prytanes, qu'ils soient cinquante ou trois, ont qualité pour dresser l'ordre du jour (7cpdypapua), et il faut que l'ordre du jour soit affiché depuis quatre jours pleins pour que l'ekklesia puisse siéger 174. La proclamation de l'ordre du jour équivaut si bien à la convocation, que convoquer une assemblée se dit 7rpoypd4rat ixx).ga(av. Cependant il est des cas exceptionnels où l'on n'a le temps ni de publier un programme 172 ni surtout d'observer les délais légaux. Pour ces assemblées a d'épouvante et de tumulte 176 », les prytanes convoquent le peuple comme ils peuvent : le signal est donné à ceux de la ville par les sons de la trompette, à ceux de la campagne par un grand feu allumé sur l'agora f77. La séance commençait de bon matin 178 et se prolongeait quelquefois jusqu'à l'heure où il était impossible de distinguer les mains levées179. La grande difficulté était de faire venir à heure fixe ces Athéniens bavards qui avaient peine à se détacher de leur chère agora. La prime allouée aux premiers arrivants attiraient quelques pauvres; les autres continuaient à flâner. Il fallait recourir à la police. A l'aide de claies ('éppa) où étaient ménagées d'étroites ouvertures, on barrait toutes les rues donnant sur l'agora, excepté celle qui conduisait au Pnyx. Quand venait l'heure d'enlever ces claies pour permettre aux marchands étrangers d'aller à leur boutique, les archers scythes prenaient une corde enduite de minium (ayotv(ov ILEp.t)Te)paVOV) 160 ; la promenant le long de l'agora, dans toute sa largeur, ils séparaient les étrangers des citoyens et rabattaient sur le Pnyx les retardataires 1'f. Gare à la tache rouge! Elle exposait aux quolibets de la foule et peut-être à une légère amende 682. L'ekklesia eut d'abord pour bureau les prytanes et pour président (d7rtd'TeRTr)ç) l'épistate des prytanesf83. Mais au ive siècle, on trouva que les sections du sénat qui représentaient le corps tout entier pendant plus d'un mois avaient trop d'influence. A partir de 378/377181 dans les intitulés des décrets conservés l'iittaTtfrtIs, n'est EKK 521 EKK plus de la tpuai) 7rpuTavEtouaa f8'. Avant chaque séance, l'épistate des prytanes, qui conservait le droit de convocation et la présidence provisoire, tirait au sort neuf sénateurs, un pour chacune des tribus qui n'avaient pas la prytanie : c'étaient les neuf proèdres; ils formèrent le bureau de l'ekklesia. Un second tirage au sort désignait l'épistate des proèdres (6 i7rl6TRT91ç Tb)V arpoéépwv : ce fut le président de l'ekklesia. Entouré de ses collègues ou euuocpdeIpotf86, il dirigea désormais toutes les délibérationsfn. Il n'y a exception que pour les assemblées électorales (aipxxtpuV(at.) chargées de nommer les chefs militaires, et pour les assemblées plénières qui votent sur la question d'ostracisme : ces jours-là, la présidence est aux neuf archontes'''. Le président est assisté d'un héraut, qui fait en son nom les communications à l'assemblée, et d'un secrétaire, le ypap.u«TEUç Tnç 'MeVtaç, qui donne lecture des pièces officielles fB9. Rangés au pied de la tribune, sur les sièges réservés, sont groupés les prytanes et plus tard, avec eux, les proèdres. Les prytanes aident le président à maintenir l'ordre. Ils ont à leur disposition des archers commandés par six lexiarques n0. Au Ive siècle, quand les proèdres ont enlevé aux prytanes leur prérogative, le bureau, formé de neuf personnes au lieu de cinquante, ne suffit plus à la tâche. On charge alors de l'ordre matériel les trente nuaaoyEtç TOÛ L oou, qui se joignent aux lexiarques 191. C'est cette commission mixte de surveillance qui préside à la distribution des jetons de présence, qui peut-être frappe d'amendes les retardataires, qui vérifie au besoin sur une expédition des rrivaxeç ixxar(atu,a txo( si tel ou tel assistant a le droit de cité, qui expulse les intrus ou les perturbateurs. Mais ce ne sont plus des archers qui exécutent leurs ordres. On ne veut pas sans doute que des esclaves soient mêlés aux délibérations publiques et puissent mettre la main sur des citoyens exerçant leur plus noble fonction. Ce sont les citoyens eux-mêmes qui sont chargés de la police. Au milieu du Ive siècle, c'est une tribu tirée au sort(tiua;.j rrpotreIpet'i.uaa 192) ; au 11° siècle, ce sont les éphèbes en corps et tout armés 19a. Pour déclarer la séance ouverte, on abaissait probablement le s o.ttov, drapeau qui, déployé, appelait le peuple à l'assemblée 131. Comme tous les actes publics, l'ekklesia commence par une cérémonie religieuse. Les -tEptariapxot immolent des porcs et avec le sang du sacrifice, qu'ils versent à terre, tracent le cercle sacré autour des assistants f9J. Puis, le secrétaire lit et le héraut répète une prière accompagnée d'imprécations contre quiconque chercherait à tromper le peuple f96. Enfin (au moins à une époque assez récente), un des prytanes s'avance, couronne en tête, pour déclarer que l'offrande a été agréable aux dieux et que l'assemblée peut délibérer sous des auspicesfavorables19'. Cependant l'ekklesia 39. 186 Corp. inscr. ait. t. Il, 1, 187, 193, 222, 230, 236, 244, 245, 336, 371. Phiioch. fr. 79 b. (Müller, Fr. hist. gr. t. 1, 396). -189 Thuc. Vll, 10; Poll. VIII III. est dissoute de droit, en cas d'orage, de tempête, de tremblement de terre, d'éclipse, lorsque les exégètes ont déclaré que ces phénomènes sont des signes (6totrziulat) de la colère céleste 198. Après ces formalités (et, depuis le 1v° siècle, quand le bureau était définitivement constitué par le tirage au sort des proèdres et de l'épistate), le président charge le héraut de lire le projet de décret préparé par le sénat (rpoe0tiaeuua 199). Dans les cas urgents, les prytanes remplacent, semble-t-il, cette lecture par un exposé oral 200. Toujours est-il qu'on observe en tout temps la vieille loi de Solon 201 qui défend au président d'introduire (tk ptty et de mettre en délibéré (xprw.«T(4ty) aucune proposition sans que le sénat ait donné son avis (tznpoGotiaeuTov). Avec les progrès de la démocratie, cette censure politique ne fut plus que de pure forme, mais ne cessa point : le droit d'initiative se transforma en droit de visa. A l'origine, une proposition rejetée par le sénat n'était pas présentée au peuple. A l'époque où le sénat a perdu son droit de veto préalable, il reste un souvenir authentique du passé dans ce fait que les rrpoPouati tata ne concluent jamais au rejet d'une proposition : ce sont des rapports à conclusion favorable ou sans conclusion 202 Les premiers sont de beaucoup les plus fréquents; car, la plupart du temps, les propositions émanées de l'initiative privée ne vont au sénat que si l'ekklesia les y renvoie, et ce renvoi est déjà une approbation officieuse. Par suite, quand le sénat conclut à l'adoption d'un projet, il arrive souvent que le vote du peuple est certain. C'est un cas que prévoit la procédure de l'ekklesia. Après la lecture d'un rrpoGouaiuux favorable et avant tous débats, on procède à un vote préalable (7rpoXEtpo7Ov(a) qui décide ou l'acceptation pure et simple du 71poGoeaeuu0t et de la proposition, ou le passage à la discussion203. Dans les affaires secondaires, qui sont les plus nombreuses, la majorité adopte généralement le projet. Mais quand la question est tant soit peu importante, comme dans la 7tpoxntpotov(a on vote sur les paragraphes séparés du apoGoti),EUUa, l'ekklesia se décide presque toujours pour une discussion intégrale ou partielle. Ainsi, quand le sénat propose au peuple de recevoir en séance publique un ambassadeur et d'adopter à son égard telle ou telle ligne de conduite, par la 7rpoyEtpoTOVia on autorise l'étranger à se présenter devant l'assemblée, et, lorsqu'il est là, on délibère sur l'objet propre du 7rpoGoûaeuua 2114. Il va de soi que les débats s'ouvrent immédiatement, sans rrporrxetpOTOV(a, dans le cas où le 7rpoeoûaeuua n'a pas de conclusion positive 20', mais déclare que ce qui agréera au peuple sera le mieux » (6Tt âv o' ri eOxEIV elptTTOV aivat) ÊÔ0. La délibération commence. Le héraut s'adresse à l'assemblée : « Qui demande la parole 207 ? » Jadis, d'après une loi de Solon, il disait : « Qui demande la Aristocr. 07; Aeschin. C. Tim. 23-26; Dinarch. C. Dens. 47. 197 Theophr. 66 EKK i22 EKK parole parmi les Athéniens âgés de plus de cinquante ans, et ensuite parmi les autres'"? » Mais cette formule disparut de bonne heure, avec la déférence des jeunes pour les vieiilards. Sans distinction d'âge, tout Athénien (6 50uAdp.mvoç) peut exposer ses idées O,ôyov, y vwgaç apoziOÉVat 265) Il est cependant des citoyens qui peuvent assister aux délibérations, mais ne sont pas admis à y prendre une part active. Les soldats restés dans Athènes pendant la tyrannie des Trente furent frappés d'une atimie partielle, l'incapacité de parler devant le peuple et le sénat'. Outre cette interdiction exceptionnelle, il y en a une autre, qui est générale: les mêmes citoyens qui sont exclus des magistratures doivent aussi s'abstenir de monter à la tribune. C'est que l'orateur est encore un magistrat et peut être appelé à subir l'épreuve de la docimasie. Daprès une loi qu'Eschine attribue à Solon, le silence est impose à tous ceux qui se sont rendus coupables d'un acte passible d'atiinie : aux fils qui ont frappé leurs parents ou ne leur ont pas fourni les aliments et le domicile 'xaxwirt; Twv yovtwv), aux citoyens qui n'ont pas rempli leur devoir militaire («6TpaTmia) ou ont jeté leur bouclier (Smt),(a), à ceux qui se sont prostitués ou ont vécu de la prostitution (rropvaéauiat, €Tatpeiv), à ceux qui ont dissipé leur patrimoine 21i. Qu'un de ceux-là prenne le parole, immédiatement tout membre de l'assemblée peut demander au président de la lui retirer. Il suffit de réclamer la docimasie (Sox'N.z ieit ê,ra(yz'aoiruo 'AOrlvaiwv g 3ouaouavoç 2121, de s'engager à exercer une poursuite (Erayym),iav nayyE),aety 213). Un grave procès commence alors devant les héliastes. Si l'accusé succombe, il est condamné à la dégradation civique 214, éloigné non seulement de la tribune, mais de l'assemblée, frappé p, eut-être d'une forte amende ou de l'exil. C'est par une action de ce genre qu'Eschine coupa net et à jamais la parole à Timarque. Mais si l'accusateur n'obtient pas la cinquième partie des suffrages, il doit lui-même payer une amende de mille drachmes, e D'ailleurs, le défendeur, s'il se croyait lésé par les attaques dont il avait été l'objet, était toujours maître de poursuivre à son tour celui qui avait commencé les hostilités; fort du premier verdict, il avait chance de faire condamner son adversaire comme calomniateur. On n'engageait donc pas à la légère une pareille partie 21', » Cette procédure de 1'F7rxyymgia était donc assez bien comprise pour éloigner de la tribune les indignes, tout en protégeant la liberté des orateurs contre d'odieuses manoeuvres. Tous avaient le droit de parler; mais peu usaient de ce droit. C'étaient presque toujours les mêmes personnages qui intervenaient dans la discussion. C'étaient surtout les chefs de parti, les orateurs de profession 7jTopmi). Dans une ville où l'ekklesia distribue tous les pouvoirs, le don de la parole est la première des nécessitespolitiques. Par cela même que l'éloquence jouait un si grand rôle, les timides restaient à l'écart. Le plus grand nombre pensait comme ce jeune homme que Socrate essayait vainement d'envoyer à la tribune'!'. Pour affronter les regards d'une multitude toute-puissante. il fallait une grande confiance en soi-même. Le Pnyx est une vaste scène où se déroule toute l'histoire d'Athènes et de l'éloquence athénienne, et où n'osent passer que des démagogues sans vergogne et des hommes de génie. Voilà les orateurs « élevés sur le marché 217 », « maîtres passés eu l'art du tumulte et des cris 2i8 », Cleon le corroyeur et Eucrate le marchand d'étoupes, Lysiclès le maquignon et le charcutier Hyperbolos, et Larnias qui s'appuie sur son énorme bâton de bouvier en des poses déhanchées, et Timarque ivre, jetant bas sa tunique avec un geste de lutteur, tout nu à la tribune219. Mais voici ceux qu'il ne faut pas oublier non plus, ceux dont toute la jeunesse s'est passée dans de pénibles études d'art oratoire, qui ont été chercher dans une longue fréquentation du Pnyx les meilleures leçons de politique, ceux dont les discours ont fait la grandeur d'Athènes. Meneurs de foule ou hommes d'État, « on ne comptait guère à la fois, en un moment quelconque de la vie d'Athènes, qu'une trentaine, tout au plus qu'une cinquantaine de personnes qui abordassent habituellement la tribune ; encore, sur ces cinquante, y en avait-il une dizaine qui, plus éloquentes et plus écoutées que les autres, absorbaient à elles seules presque toute l'attention et jouaient toujours les premiers rôles 230 Quand le citoyen a répondu à la question du héraut en demandant la parole, quand il a posé sur sa tète la couronne de myrte, qui fait de lui un personnage sacré, quels sont ses droitsdd1?? Il a d'abord le droit d'initiative, qui s'exerce de deux façons différentes. L'auteur d'un projet, celui qui est désigné dans les actes publics par la, formule Feiva mi7rmv, peut soutenir sa proposition dedant l'ekklesia, lorsqu'elle y arrive apportée par ie sénat sous forme de zrpo6oû),mugn. H peut aussi, surtout s'il prévoit que le peuple lui est favorable et le sénat hostile, surtout si c'est un fonctionnaire proposant des mesures administratives dans le cercle de ses attributions 222, présenter et soutenir sa motion directement devant l'ekklesia et lui faire adopter un décret invitant le sénat à dresser un 7rpo6oû séance ultérieure, si le xcpoeoé1mu,aa est favorable à la mesure proposée, elle passe par voie de 77poxetpornvlz: Si le 7pofoé],mupa ne conclut pas, elle est adoptée par un vote ordinaire 22'°. Tout citoyen exerce encore le droit d'amendement. 11 peut proposer tout changement au texte du 7tF.0e0 2._uµ«, et, s'il triomphe, son nom prend place dans cette formule : Ii peut aussi opposer au projet un contre-projet, pourvu qu'il y traite la question examinée dans le zepogoGamup.a2'0. C'est ce qui doit arriver souvent quand le apoeoUzuua ne conclut pas, c'est-à-dire est au fond défavorable au projet. L'intervention obligatoire du sénat n'est donc pas une entrave à la libre souveraineté de l'ekklesia. Les limites imposées aux droits des orateurs sont insignifiantes. On exige que toute motion, tout amendement ou contreprojet, avant d'être mis en discussion, soit formulé par écrit, et remis au secrétaire qui le transmet au président221. Le secrétaire peut collaborer à la rédaction de EhK 523 EKK l'acte 2''. Il est défendu à l'orateur de sortir de la question, et le président peut l'y ramener. Dans un seul cas, le citoyen est privé de son droit d'initiative par une atimie spéciale : c'est dans le cas où une triple condamnation pour propositions illégales (rra pxvôµou ypaq,7) a prouvé qu'il abuse de ce droit'''. Quand personne ne demandait plus la parole, on passait au vote. C'est aux prytanes et aux proèdres de mettre la question aux voix (int'laly(Etv). Ce faisant, ils engagent leur responsabilité. Par conséquent, ils refusent de procéder au vote ou même à la discussion, du moment qu'ils jugent le projet illégal. L'opposition d'un seul prytane ne suffit pas toutefois à empêcher le vote 231. D'ailleurs, l'arme remise aux mains des présidents est dangereuse à manier : ils s'exposent à une eviEttç, au moins à une forte amende, et craignent assez de pareilles poursuites, pour que les menaces des citoyens les forcent plus d'une fois à renoncer à. toute opposition 231. On vote à mains levées (ymtpo-cov(a). Le héraut demande aux partisans de la proposition de lever la main, puis fait la contre-épreuve. S'il y a doute, on recommence, jusqu'à ce que le bureau constate une majorité manifeste''' Le scrutin secret est pratiqué surtout dans les assemblées plénières pour l'octroi de l'â~Eta ou de la bourgeoisie et pour l'ostracisme, mais aussi à l'ekklesia ordinaire, dans certaines affaires spéciales, par exemple, les accusations de haute trahison 233. Pour le scrutin secret, les suffrages pour ou contre la proposition (q;IYot) sont déposés dans deux urnes (xxStsxoO différentes. Le vote terminé, le président en annonce le résultat («vayopEGety) 23a et, si l'ordre du jour est épuisé, congédie l'assemblée par la voix du héraut ()ins :,v lxxar6(Uy) 23'. Si l'on n'a pas eu le temps de terminer la discussion ou de passer au vote, il prononce le renvoi à une séance ultérieure 236 Attributions de l'ekklesia. Les attributions de l'ekklesia étaient aussi variées que sa puissance était grande. On peut les ramener à trois catégories : le peuple conserva toujours le droit, que déjà Solon lui avait reconnu, d'élire et de surveiller les magistrats ; il mit la main sur le pouvoir législatif ; il garda la partie politique de la prérogative judiciaire donnée aux tribunaux jurés. Il y avait peu de fonctionnaires à élire; mais c'étaient les plus importants, ceux qui étaient chargés des commandements militaires et du contrôle financier : les dix stratèges, les dix taxiarques et les deux hipparques 237, dant du théorikon et les hellénotames 239 enfin des magistrats extraordinaires, comme les ânoaroaE'i; et les yBTr~Ta( 272. Les assemblées électorales [AHCHAIHESIAI] tou jours réunies sur le Pnyx et présidées tantôt par les archontes, tantôt par les prytanes ou les proèdres, se tenaient un jour déterminé de l'année. Mais quel jour? D'après un décret du ne siècle''"°, c'était le 22 munychion, environ deux mois et demi avant le jour (1°r hékatombéon) où les nouveaux magistrats devaient entrer en fonction. On a voulu, d'après quelques mots très vagues de cc décret, assigner la même date aux élections des ive et ve siècles '41. Mais la conclusion est téméraire. De même, toutes les hypothèses tirées des textes classiques 242 sont fondées ou sur des erreurs manifestes ou sur des interprétations incertaines 243. Les ip xatpaelat avaient-elles lieu durant tout le mois de skirophorion, ou du 20 au 23 thargélion, ou le 22 munychion ? Pures conjectures, dont aucune ne s'impose. Il faut s'en tenir à. la prudente conclusion de Schoemann, qui déclare impossible toute détermination exacte 2b4. Tout ce qu'on peut dire, c'est, d'une part, que la désignation de tous les magistrats se faisait à la même époque et qu'il n'y a pas lieu d'établir d'exception pour les stratèges"; c'est, d'autre part, que, l'année politique coïncidant avec l'année civile, les âpxatpas(at devaient avoir lieu assez tôt avant le ter hékatomibéon, pour qu'on eût le temps, entre l'élection et l'entrée en charge, de procéder à la docimasie. Sont éligibles, depuis le v° siècle 246, tous les citoyens, pourvu qu'ils ne soient ni frappés d'une atimie quel conque, totale ou partielle, ni atteints d'une infirmité 2'"Le cumul semble interdit"' ; mais les magistrats sortant de charge sont généralement rééligibles 249. A l'époque classique, les charges sont conférées par l'ensemble du peuple. Lors même qu'il y a dix magistrats à élire, ils ne sont pas élus chacun par sa tribu 2J0. L'assemblée n'est jamais divisée par tribus, pas plus pour les élections que pour toute autre affail'e e3?. Généralement, aux Ive et ve siècles, les dix stratèges sont de tribus différentes ; mais plusieurs d'entre eux peuvent être pris dans une même tribu 252, et tous sont toujours choisis par tout le corps électoral. Ce n'est pas à dire que chaque collège de magistrats soit nommé en bloc au scrutin de liste. Chacune des charges a ses candidats, qui donnent leur nom aux présidents avant ou pendant la séance. Chacune est conférée par un vote spécial, et les candidats évincés ont la ressource de postuler l'une des charges non encore pourvues : c'est ce qui explique comment on trouve dans la même année deux stratèges d'une même tribu. On a cependant le droit de lever la main en faveur d'un citoyen qui n'a point fait acte de candidat. Avant et pendant le vote, le Pnyx était le théàtre d'intrigues compliquées. La brigue était savante. Les mêmes mots signifient « briguer » et « flatter » («pxat piataEty, a noslapxtâv)'-53. On allait de l'un à l'autre (lits-n€-vat arnbire) « esclave de la popularité » 254. On comptait comme acquises d'avance les voix de l'hétairie à laquelle on était affilié 2"05. Au dernier moment, on recourait auz moyens pathétiques : le candidat à la stratégie se découvrait pour montrer ses cicatrices 2G6 On achetait longtemps d'avance les sympathies des gens influents 2J7. Ces manoeuvres réussissaient parfois. On dut réagir par des poursuites criminelles ('pc9il Spolox(aç ou Saxnauoû) qui pouvaient entraîner la confiscation des biens ou la mort'-88. Mais il ne faudrait pas exagérer l'influence qu'avaient dans Athènes ces menées inévitables. Quand le peuple votait mal, il trouvait moyen de se déjuger. Il avait nommé Eschine pour le représenter à Délos; il permit à l'Aréopage de remplacer Eschine par Hypéride 269. Sans s'être présenté, Phocion fut nommé stratège quarante-cinq fois, il fut nommé malgré les amateurs de désordre, et Plutarque, qui note le fait, remarque que le peuple d'Athènes en usait avec les démagogues comme les rois avec leurs fous, pour se distraire, mais que pour les postes sérieux il savait toujours choisir les vrais hommes d'État 260 Entrés en charge, les fonctionnaires n'étaient pas indépendants de l'ekklesia. Miltiade est destitué pour avoir trompé le peuple ; Thémistocle, pour avoir reçu des présents de Sparte ; bien d'autres tombent du pouvoir dans le cours du v" siècle, mais toujours sous le coup d'accusations criminelles. Dans les dernières années du ve siècle 26', on voit apparaître un contrôle régulier, constant. Une fois par prytanie a lieu l'intyetpotov(a. Les archontes viennent demander si le peuple est content de est contraire à l'un d'eux, il est suspendu provisoirement (â7coyetpotov(a) et déféré par les archontes devant les héliastes. Une condamnation entraîne la révocation, sans préjudice de la pénalité encourue. Les exemples de destitution sont nombreux. En 373 Timothée, en 360 Autoclès, puis Céphisodote 282 sont dépouillés de la stratégie. « Démosthène parle en passant de la révocation d'un archonte comme d'un événement insignifiant 26". » Philoclès, dix fois stratège, se vit enlever le cosmétat des éphèbes 265. L'assemblée exerçait sur tous les magistrats une surveillance minutieuse et continue. Disposer des fonctionnaires, c'est disposer de tous les droits qu'impliquent les fonctions. En fait, l'i7ttyetpotoV(a était une mainmise sur le pouvoir exécutif. Démosthène reproche souvent à l'assemblée d'intervenir dans les moindres détails d'une campagne et de faire peser sur les généraux un tel sentiment de leur responsabilité qu'ils n'osent plus agir 266. L'ekklesia avait, comme de juste, le droit de paix et de guerre. Elle en profitait pour s'occuper des moindres négociations et de toutes les questions militaires. En temps de paix, elle se fait rendre compte de tout ce qui concerne la défense des frontières (tpu),, axs 'r ç'dpaç) et l'état de la flotte : il faut un décret du peuple pour déclarer hors de service un vieux vaisseau 267. En temps de guerre, elle fixe le nornbre des soldats, spécifie la proportion des citoyens et des métèques, des esclaves et des mercenaires qui doivent entrer dans l'armée, désigne les chefs, reçoit leurs rapports, règle les opérations, dirige les moindres marches jusqu'en Sicile. Elle n'admet pas qu'on batte en retraite sans un décret 268. Elle condamne à l'exil ou à la mort, souvent des généraux vaincus, une fois au moins des généraux vainqueurs 269. On a calculé que de 36'2 à 3â7 elle envoya en Thrace huit stratèges qui furent désavoués, rappelés, condamnés 270. Elle nomme les ambassadeurs, leur donne ses instructions, reçoit leurs comptes rendus pendant leur absence et à leur retour. Chaque fois qu'un envoyé vient à Athènes, il est mené devant le peuple qui règle le cérémonial de la réception : les accords ébauchés au sénat ne sont pas pris au sérieux tant qu'ils ne sont pas approuvés, on peut dire conclus à nouveau, par le peuple. Pas un traité d'alliance, de paix, qui ne dépende de lui, et, le traité signé, il nomme encore les représentants d'Athènes qui doivent prêter serment ou recevoir le serment des étrangers. L'administration financière, si compliquée dans la république athénienne, est soumise, comme le reste, au vote de l'ekklesia. Les dépenses extraordinaires pour la guerre, pour les députations, pour les édifices publics, ne peuvent être faites que de son consentement. Elle prépare les lois de douanes, les règlements relatifs à la monnaie, aux poids et mesures 27i. Elle ouvre des crédits spéciaux de quelques drachmes pour faire graver ses décrets; elle fixe le prix des journées d'ouvrier dans les contrats qu'elle passe avec les entrepreneurs 272 et alloue une indemnité aux agents qu'elle charge de surveiller les entreprises. Athènes était une de ces démocraties où le peuple, selon le motd'Aristote 272, «a la loi en sa puissance» . Depuis Solon, l'ekklesia avait envahi le domaine de la législation, réservé d'abord aux thesmothètes, aux sénateurs, aux nomothètesV7`. Cependant elle eut toujours la sagesse de laisser debout quelques-unes des barrières morales opposées à ses empiétements. La loi ne peut pas se faire sans le peuple ; mais le peuple seul ne fait pas la loi, il la prépare. A la première séance de l'année, il vote sur la question de savoir. si la législation existante est suffisante et bonne, ou s'il faut y réaliser quelque amélioration, y combler quelque lacune. C'est une i7ttyiapoTOV(a des lois "', analogue à celle qui se fait à chaque prytanie pour les magistrats. Si, après une épreuve et une contre-épreuve (StayetpoTOV(a), le parti de la révision l'emporte et obtient la suspension provisoire (a'7to7mleoto5t (a) d'une partie de la législation, le vote de l'ekklesia confère à tout citoyen le droit de proposer la substitution d'une loi nouvelle à une loi existante (7tapetap:p6mv) et le droit d'entrer au sénat pour y soutenir sa proposition276. Le rapport du sénat sur les projets de loi doit être déposé à l'ekklesia dans la troisième séance qui suit l'i7ttyetpotov(a, dans la quatrième de l'année. Dans l'intervalle, le projet de loi et, au cas échéant, la loi existante dont le projet demande l'abrogation ou la modification, restent affichés, à l'agora, sur les piédestaux des héros éponymes. De plus, ils sont lus devant le peuple, à chacune des deux séances intermédiaires, par le secrétaire du sénat 277. Enfin, à la troisième séance, après lecture du 7tpogms mum.a, la discusssion s'engage sur le fond, et cette fois le projet de loi est rejeté définitivement ou reçu à condition, c'est-à-dire admis à EKK. EKK suivre la filière de la procédure. Dans ce dernier cas, l'ekklesia envoie l'affaire par-devant les nomothètes, fixe la durée de leur session (TObç vouoelTaç xaeietv278), leur alloue un traitement. Puis on élit un certain nombre de euviyopot 279, avocats officiels de la loi existante, chargés de la représenter dans le procès qu'elle engage contre la loi nouvelle devant le tribunal des NOMOTHÈTES2A'. Lit se borne le rôle de l'ekklesia. Que la loi soit acceptée ou non, c'est désormais l'affaire des juges. Le pouvoir législatif de l'assemblée n'a donc rien d'exagéré. C'est un droit de docimasie qu'elle partage avec le sénat et les tribunaux 28'. Sans doute les démagogues trouvèrent moyen de glisser plus d'une loi irrégulière à travers les mailles serrées des restrictions constitutionnelles : ils faisaient voter les lois sous forme de décrets 28'. Démosthène s'élève contre « ces puissants du jour qui s'investissent eux-mêmes du droit de légiférer » et choisissent leur heure et la procédure qui leur agrée 283. « Un étranger qui quitterait Athènes pendant trois mois, dit Platon le Comique, ne reconnaîtrait pas les lois à son retour28'. » Mais si la législation athénienne était un chaos où même les commissaires extraordinaires (clvaypaweiç) avaient peine à se reconnaître, la faute en est, non pas aux aux usurpations de l'ekklesia, mais au défaut de codification. Et si les citoyens ne respectent pas toujours les obstacles légaux, ils savent du moins qu'ils s'exposent à une terrible accusation. La ypap l 7rapnvôp.wv est une action qui tout ensemble protège les institutions démocratiques et limite la souveraineté du peuple. Elle porte en elle la sanction de cette maxime athénienne : « Nul décret ne peut prévaloir contre ia loi 285. » Elle doit empécher toute réaction oligarchique et tout excès révolutionnaire. Pour dominer la république, les Quatre-Cents nomment dix commissaires avec mission spéciale de les débarrasser de ce fâcheux obstacle 286. Mais le plus souventlaypxcpil7rnpan L'ev est intentée contre ceux qui essayent d'entraîner l'ekklesia au delà des bornes fixées à sa puissance législative. Non seulement les présidents peuvent refuser de donner suite à toute proposition illégale ; mais encore tout Athénien peut, soit avant soit après le vote de l'ekklesia487, attaquer l'auteur d'une loi contraire à la constitution pendant un an, et la loi elle-même après un an écoulé 288. Il suffit de s'engager par serment (l7r«luoaia) à poursuivre le législateur téméraire, pour suspendre la délibération sur la loi proposée ou l'exécution de la loi votée; et si les héliastes condamnent l'homme, ils condamnent définitivement son oeuvre. On comprend que la ypap~ 7rapavdµwv a di' mettre un frein généralement efficace à l'initiative et aux usurpations de l'ekklesia en matière législative. Les attributions judiciaires de l'ekklesia étaient d'un genre assez particulier, pour qu'elle ne fît pas concurrence aux juridictions ordinaires. Elle intervenait dans des cas particuliers où les intérêts de l'État étaient en jeu; elle intervenait par des votes préjudiciels ou des décrets plutôt que par de vraies sentences , comme 289 Hem. in Lept. 88-95; in Tim. 17-18, 24-26, 33-38. 281 Poli. VIII, haute cour politique plutôt que comme tribunal. Quiconque avait troublé la paix publique et rompu la trêve de Dieu (izs/o1 mns) pendant la célébration des mystères aux Dionysies et peut-être aux autres fêtes 289; quiconque avait par haine personnelle porté contre un citoyen une accusation calomnieuse 290; quiconque avait commis une infraction à la loi sur les mines 291 ; tout fonctionnaire qui avait commis un abus de pouvoir202 était dénoncé devant l'ekklesia par voie de 7cpoeo)oi 293. Le peuple était saisi de l'affaire par l'intermédiaire des présidents. Il écoutait l'accusateur, puis le prévenu, que soutenaient ses amis. Sans enquête, on allait aux voix 2n. Le vote n'avait que la valeur morale d'un préjugé dépourvu de sanction. Vainqueur ou non, le plaignant restait libre d'engager le véritable procès suivant les voies régulières, et l'avis du peuple ne liait pas les héliastes. Le pouvoir de l'ekklesia était bien plus considérable dans les causes d'eiaayya) ia. II vient d'être commis un crime flagrant; il n'est prévu par aucune des lois existantes, et cependant la répression n'admet point de retard : la sûreté de l'État est compromise'''. C'est à l'ekklesia qu'on s'adresse. De là des précédents assez nombreux durant le ve siècle, pour qu'au début du Ive on les rassemble dans un texte de loi (4oç stoayys?.uxôç) qui sert à déterminer par le passé, sans les limiter dans l'avenir, les applications de l'siaayye),ia [EISAGGELIA]. Dans toute affaire de ce genre, l'assemblée, soit qu'elle siège comme chambre de mise en accusation, soit qu'elle statue ellemême sur le fond, s'en tient toujours strictement à sa procédure accoutumée. Quand elle a déclaré dans une xupia 'Eloy lcfa la plainte recevable, elle renvoie l'affaire aux Cinq-Cents, et c'est en discutant le projet sénatorial qu'elle la reprend dans une séance ultérieure 296 Pas plus dans l'ti7ayye).ia que dans la 7rpoeo)s , l'assemblée ne dépouille les juges naturels à son profit. Dans des procès qui sont en même temps des affaires politiques, l'assemblée politique se contente le plus souvent de donner son avis. S'il lui arrive de trancher la question, c'est qu'elle croit devoir, non pas rendre une sentence, mais prendre une mesure de salut public. Rien ne prouve mieux à quel point le peuple athénien multipliait les précautions contre ses propres caprices, que la défense qu'il s'était faite à lui-même d'adopter certaines résolutions avant qu'elles fussent approuvées par une majorité vraiment forte. I1 est des circonstances où l'intérêt de l'État peut couvrir des intérêts privés, ou un particulier, une coterie peut entraîner le petit nombre des citoyens présents, abuser de leur faiblesse, obtenir un vote de surprise 297. Pour éviter ce danger, la loi athénienne institua pour des affaires déterminées des assemblées solennelles. En règle générale, les membres de l'ekklesia, si petit que fût leur nombre, étaient censés agir au nom du peuple entier. Dans des cas particuliers, cette fiction tombe, et le vote du peuple n'est valable que s'il est rendu à l'agora par une assemblée plénière (ôr,uou 7t),7lO ovîoç) 298. .293 Ilarpocr, Suid. s. v. apoôo7,d;. 291 Dem. in Mid. 1-3, 7-12, 175-180, 206, EKK 5266 -EKK Un minimum de six mille suffrages est requis pour trois sortes de propositions : lorsqu'il s'agit d'enlever les droits civiques, par un coup d'État, à un citoyen qui n'a point mérité d'en être dépouillé par un verdict judiciaire; lorsqu'il s'agit de donner ou de rendre les droits civiques à telle personne qui en est privée de naissance ou par suite de condamnation. A ces trois cas les grammairiens, fabricateurs de textes apocryphes 3", en ajoutent un quarième, celui d'une motion tendant à conférer des privilèges personnels (vésot ê7c' évèpi). Mais à Athènes on ne fait pas rie lois (vdu.ot) en pareille matière, on fait seulement des décrets (err;Lioticoro), et la confection de ces décrets, à part ceux qui donnent ou rendent le droit de cité, reste dans les attributions de Pekklesia ordinaire 300. Le peuple athénien est donc tenu de siéger en ses grandes assises, lorsqu'il doit :appliquer la loi d'ostracisme ; 2° octroyer 1° Depuis l'époque de Clisthène jusque vers la fin du ve siècle, chaque année, dans la xup(a iax .yoix de la sixième prytanie 30f, le peuple votait sur cette question : y a-l-il lieu de frapper un citoyen d'ostracisme? On a prétendu 3°2 que l'ekklesia devait être consultée par un 776000 suyz du sénat, ce qui n'arrivait pas tous les ans. Mais cette hypothèse est fondée sur une apparente contradiction entre deux textes qui se concilient fort bien. Il faut donc admettre qu'en cette circonstance le sénat n'avait pas à prendre d'initiative. Comment imaginer, d'ailleurs, que le réformateur démocratique eût subordonné l'exercice du droit populaire au consentement des Cinq-Cents? On a soutenu aussi307 que l'ekklesia n'allait aux voix qu'après une discussion dans laquelle seraient intervenus tous les chefs de parti. Autre conjecture qui invoque pour tout témoignage un passage d'un discours apocryphe composé par un ignorant 30'`. En réalité, quand les prytanes posaient la question, chaque citoyen avait son opinion faite, et toutes les harangues d'un Aristide n'auraient pu convaincre ceux qui étaient fatigués de l'entendre appeler le Juste. Le rôle de l'ekklesia consiste dans la seule opération de l'ântyetporav(a. Comme on vote dans la première prytanie sur la question de la revision hegisfativc, comme on votera plus tard à chaque prytanie sur la gestion des magistrats, de même on vote une fois par an sur I'application de l'ostracisme. Dans ces trois cas d 'i 1ïsiroToo a on vote sans débats. Quinze Athéniens ont été bannis par l'ostracisme, et l'histoire ne cite pas un seul orateur qui ait appuyé ou combattu une mesure aussi grave, et la littérature ne cite pas un seul mot qui ait été prononcé dans des circonstances aussi émouvantes. Pourquoi? C'est que Clisthène voulait un vote muet, anonyme, inexorable, expression spontanée de la conscience universelle. Mais, par cela même, il devait exiger une confirmation de ce vote, qui en prouvât la sincérité. Cette garantie décisive devait être donnée par les suffrages secrets de six mille citoyens réunis en assemblée plénière 3°°. 2e L'assemblée plénière se réunit pour cause d'ostra cisme de 509 à 41-i"9. Dans cet intervalle, la même formalité fut imposée à une certaine espèce d'ADEIA. En plusieurs cas, l'ekklesia ordinaire est compétente pour conférer à titre définitif cette assurance d'impunité. Pour investir quiconque n'a pas le droit de cité, esclave ou étranger, d'une capacité spécifique et momentanée, pour suspendre la rigueur des lois en faveur d'un criminel qui dénonce ses complices 307, pour permettre aux agents des finances d'opérer un virement sur les fonds sacrés 308, il suffit d'une autorisation votée à mains levées au Pnyx. Mais en matière de dette contractée envers l'État, l'âétia ne peut être accordée que par six mille suffrages secrètement exprimés à l'agora. La loi athénienne interdit au débiteur public, sous les peines les plus sévères, de solliciter du peuple soit la réhabilitation qui le remettrait en possession de ses droits civiques invrig(a), soit la remise de la dette (piotç Twv ôf)'ggéTav) ou même un délai de payement (T«tç) au delà du terme fixe de la neuvième prytanie. La loi frappe même les tiers qui feraient une pareille demande, même les proèdres qui la mettraient en délibéré. Il y a rupture complète de rapports entre l'État et le débiteur de l'État : celui-ci est légalement en dehors de la citéPour demander grâce, il a besoin d'un sauf-conduit. Il n'a chance d'obtenir l'É7rtTtµ(z que si un tiers obtient d'abord pour lui l'è6tta 309. Comme ce privilège ne doit pas être banal, la procédure a suivre est particulièrement compliquée, hérissée de précautions 310, Il faut d'abord s'adresser à l'ekklesia. Le solliciteur se met sous la protection divine en déposant un rameau d'olivier sur l'autel du Pnyx. Il demande qu'un décret du peuple provoque la réunion et fixe la date d'une assemblée plénière. Seule, cette assemblée plénière, saisie de l'affaire par le programme des prytanes, peut concéder l'âlstu au postulant, le délier des obligations de la loi commune et le mettre à même de présenter à la seconde ekklesia de la prytanie suivante une supplique en forme'. 3° Enfin, au 1v° siècle, quand depuis longtemps l'assemblée plénière avait cessé de se réunir pour voter l'ostracisme, elle commença de se réunir pour accorder le droit de cité. C'est que, parmi les autres distinctions, menue monnaie qu'Athènes prodiguait pour récompenser les citoyens qui lui rendaient service et les étrangers qui lui faisaient la cour, le droit de cité brillait d'un singulier éclat. En tout temps, ce fut assez d'un décret ordinaire pour donner le titre de bienfaiteur ou le privilège de l'éloge, l'isotélie ou la proxénie, pour élever une stèle commémorative, décerner pendant les Dionysies ou les Panathénées une couronne de feuillage ou d'or, accorder une exemption de charge ou un don en argent, conférer le droit d'entrer au Prytanée, dresser une statue 312. Même le droit de cité fut d'abord accordé par simple décision de l'ekklesia ordinaire. Mais par la suite on jugea qu'il y fallait plus de précautions. A partir de l'an 369 313, les inscriptions ne parlent plus de 7tx'tTE(a sans signaler le chiffre de six mille suffrages. On peut 1887, p. 3)7-426. 300 Cette dernière date d'après iteloch, Die ait. Polit. seit. EKK 52'7 EKK donc croire que, peu après l'archontat d'Euclide 314, il fut décidé, que pour recevoir les droits civiques, il fallait se faire agréer par un minimum de six mille citoyens. Désormais cette a belle et auguste faveur » devait être le salaire réservé aux plus braves soldats, aux médecins les plus dévoués, aux banquiers les plus généreux'''. Durant un siècle et demi (jusque vers 260-260) le peuple athénien n'a pas appelé dans ses rangs un seul citoyen adoptif (7tocr,-dç, il cortotIvros) sans que cette mesure eût été arrêtée en assemblée plénière. S'il y eut des abus, si plus d'un indigne obtint et avilit un honneur envié, on n'en peut pas accuser une législation qui permettait à tout venant de protester par la ypat Il napavd;t.mv ou par la docimasie contre une nomination faite par sis mille citoyens. Les assemblées plénières, convoquées par les prytanes, se réunirent toujours sur l'agora. Cela est certain pour le vote de l'ostracisme 3'6, probable pour la collation des droits civiques 3i7, et il est vraisemblable que, de 417 à 369, la tradition se serait perdue, si les affaires d'accu n'avaient arrêté la prescription. Quels sont les jours assignés à ces assemblées? Les décrets qui chargent les prytanes de la convocation sont rendus dans une ekklesia ordinaire et fixent pour date du scrutin secret le jour de la prytanie suivante où se réunit l'ekklesia similaire 3f8. Du moins il en est ainsi dans les textes épigraphiques où la grande assemblée est invitée à conférer le droit de bourgeoisie. Nous ne savons rien de précis sur le moment où se tenaient les assemblées plénières chargées de voter sur l'ostracisme ou sur l'âôsta. Nous pouvons à la rigueur admettre par analogie que là encore on ménageait l'intervalle d'une prytanie entre l'intketpo-ovia et le vote solennel. Le scrutin de l'ostracisme coïnciderait avec la xup(a rxx)nla(a de la septième prytanie et aurait lieu, par conséquent, dans le courant d'anthestérion. Quand certains auteurs 31' demandent que la date de l'ostracisme soit rapprochée d'une de ces grandes fêtes qui attiraient dans Athènes les citoyens de la campagne, ils ont parfaitement raison mais cette fête serait bien plutét celle des vieilles Dionysies ou Anthestéries (atovéata âpat.repu) que les grandes Dionysies d'eiaphébolion. Les inscriptions prouvent que l'assemblée plénière se tenait un jour d'elcklesia sans se confondre avec l'ekklesia. II y avait donc successivement deux réunions : l'une à l'agora pour le vote, l'autre au Pnyx pour la proclamation des résultats. En effet, l'assemblée plénière de l'agora est exclusivement réservée au scrutin. Les prytanes publient dans l'ordre du jour la question posée au peuple. Les archontes et sénateurs qui (au moins pour l'ostracisme) président l'assemblée plénière n'autorisent les citoyens qu'à déposer leur suffrage. Point de délibération. Avant de jeter dans l'urne son caillou ou son tesson, chacun a est son maître et ne consulte que soius C'est ce caractère spécial de l'assemblée plénière qui en explique l'organisation matérielle. Le jour de l'batpaxoTtop a, une partie de l'agora était entourée de barrières en forme de cercle 321 et coupée en dix parties par d'autres barrières allant de la circonférence au centre Chacun de ces dix compartiments avait son entrée, réservée à l'une des dix tribus. Chacun avait son urne. Les citoyens passent, déposent leur tesson de poterie et s'en vont au Pnyx attendre les résultats du scrutin. A quelles conditions le citoyen est-il banni, l'atimos réhabilité, l'étranger admis aux droits civiques ? Il faut six mille suffrages, disent les textes écrits ou épigraphiques. Mais faut-il une majorité relative sur un total de six mille suffrages exprimés, ou six mille suffrages réunis sur un seul nom ? La première interprétation est donnée par Plutarque 323 ; la seconde, par Phitochore 3"3. Aujourd'hui la plupart des érudits 32'' se rangent du calte de Plutarque. Mais Il faut bien reconnaître qu'ils remplacent les arguments par des subtilités savantes. Si l'en revient à une saine critique, il faut bien préférer le témoignage de Pbilochore à celui d'un auteur comme Plutarque, si éloigné de l'institution qu'il décrit. D'ail-. leurs, dans l'hypothèse contraire, ne voit-on pas que les adversaires de la motion se seraient abstenus forceavent, puisque leur vote, même hostile, aurait pu contribuer à la faire adopter en contribuant au quantunlnêcessaire ? En fait, ennemis et indifférents ne votaient pas. Dès lors, il fallait bien six titille suffrages réunis contre un homme pour le frapper d'ostracisme. Enfin tt'assemblée plénière n'a de raison d'être que si on lui demande une quasi unanimité. Dans les circonstances graves, à Sparte, quelques privilégiés forment un conciliabule secret et se décident loin de l'impuissante ;).;a ; à Athènes, c'est le peuple entier qui se concerte et se proclame collectivement responsable. G. GLoTZ.