Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

EQUITIUM

EQUITIUM (`I777[GUa pôtov 2, i oooT~oYe)4v) 3, troupeau de chevaux 4, haras. Dès une haute antiquité, lorsque les Grecs menaient encore la vie pastorale, il dut y avoir chez eux des pàturages, entourés de clôtures, où l'on pourvoyait là. la reproduction des chevaux et où on les laissait errer dans un état de demi liberté. Chez Homère nous voyons un cheval, s'échappant de l'écurie où on l'avait enfermé pour l'isoler de ses compagnons (cTsrôç `irr7c0ç) prendre sa course vers les pacages et les cours d'eau qui lui sont familiers : c'est ce que le poète appelle vop.oç 'bnnesv °. Plus tard certaines peuplades barbares, qui avaient conservé les moeurs primitives, par exemple les Scythes, laissaient encore leurs chevaux en plein air toute l'année 6. En général ceux que les Grecs et les Romains nourrissaient à la campagne étaient retenus à l'écurie pendant la mauvaise saison ; certains propriétaires ruraux, ayant voulu imiter la coutume barbare, s'en étaient, parait-il, mal trouvés; Végèce les blâme d'avoir soumis à cette épreuve des animaux dont la race était depuis longtemps habituée à un régime plus doux'. Des haras spacieux et bien entretenus devinrent chaque jour plus nécessaires en raison des progrès de la civilisation grecque, lorsque le goût du luxe et des voyages se répandit, lorsque la cavalerie montée fut appelée à jouer un rôle dans les batailles, enfin lorsque d'un bout à l'autre du monde antique on se passionna pour les EQU -792EQU courses ; l'élevage des chevaux, l'i7caoTpolp(z, devint alors une des charges principales et en même temps une des distractions favorites de l'aristocratie ; noble et iaaovedtaoç sont désormais synonymes [EQuITES]. Tous ces besoins nouveaux supposent des haras considérables établis dans les domaines des riches particuliers ; à plus forte raison y en eut-il aussi dans ceux des États ou des souverains. Après une expédition heureuse en Scythie, Philippe enleva à l'ennemi vingt mille juments de belle race et il les envoya en Macédoine pour les accoupler aux chevaux indigènes, dont les formes étaient un peu plus lourdes Plutarque cite des haras royaux, (3acl),ixà irc7cofoeeOlx, établis, au temps d'Alexandre, près du mont Ida en Asie ; ils étaient surveillés par des intendants responsables (€7n(t.c),r;TxO qui devaient fournir au monarque des comptes d'administration et ne pouvaient laisser sortir, à moins d'avoir reçu un ordre écrit, une seule bête qui ne fût pas destinée à son service'. Vers le même temps, et plus tard encore sous les Séleucides, Apamée en Syrie possédait un haras royal, qui contenait plus de trente mille juments, avec trois cents étalons au moins f °. D'autres établissements semblables ont encore été signalés par les historiens en Médie; au témoignage de Polybe ils étaient assez florissants pour pouvoir suffire à la remonte de toutes les provinces asiatiques de l'empire d'Alexandre; ils devaient cette richesse à la fertilité exceptionnelle du pays ". La Thessalie, la Sicile, l'Espagne, l'Afrique, en un mot toutes les contrées qui étaient fières de leurs races de chevaux, eurent aussi des haras renommés12. Ainsi nous voyons Symmaque, dans ses lettres, s'adresser à différents propriétaires d'Espagne, qui possédaient des greges equorum, pour négocier avec eux l'achat des chevaux destinés à figurer dans des jeux publics; certains de ces animaux devaient être transportés par mer jusqu'à Antioche ". Les haras de l'Asie cependant conservèrent jusqu'au bout leur antique réputation; quelques-uns étaient exploités directement par les empereurs d'Orient, notamment en Phrygie et en Cappadoce ; ils faisaient partie de ce qu'on appelait les greges dominici et la direction en était confiée à des praeposili placés sous les ordres du cornes rerum privatarumi4. Deux des haras de l'Asie ont laissé un souvenir prédo EQU 793 EQU minant dans les écrits du bas-empire. Au temps de l'emreur Valérius (253-260) il y avait à Césarée un propriétaire nommé Palmatius, qui possédait un haras magnifique près de Tyane, à l'endroit que les itinéraires appellent Andavilis; ses biens ayant été confisqués, cet établissement passa avec le reste de sa fortune dans le domaine impérial et les chevaux qui en provenaient continuèrent longtemps encore après sa mort à s'appeler equi Palmatii. L'autre haras est celui d'un certain Hermogénès, que Godefroy identifie avec un préfet du prétoire tué à Constantinople au milieu d'une sédition en 373. Nous ne savons par suite de quelle circonstance ses chevaux devinrent la propriété des empereurs. Mais prescription, renouvelée sans doute de celles qui avaient été établies bien des siècles auparavant par les rois de Perse", nous explique pourquoi les magistrats d'Antioche, ayant à donner des jeux, faisaient venir des chevaux d'Espagne 1° : les haras d'Asie leur étaient fermés : tous les animaux qu'on y élevait étaient réservés au chef de l'État; ils étaient dits sacra ou divina, comme tout ce qui lui appartenait". Jusqu'au temps de Grégoire le Grand, l'Église romaine posséda en Sicile des haras immenses qu'elle avait évidemment hérités des empereurs; par ordre de ce pape on vendit tous les chevaux sauf un petit nombre ; « on ne garda plus que quatre cents juments 18 ». On peut juger par là de ce qu'é au Ive siècle les equi Ilermogeniani sont cités avant tous les autres, à côté des Palmatii, comme les plus fins et les plus beaux que l'on puisse donner en spectacle au peuple. Les poètes les célèbrent à l'envi; seuls parmi tous leurs concurrents ils continuent à être entretenus aux frais du fisc, quand l'âge, une maladie ou un accident les a mis hors de service; même alors il est interdit aux agents de les vendre, comme ils le font par exemple pour les chevaux d'Espagne, cependant très estimés aussi. Personne dans l'empire, si ce n'est l'empereur luimême, ne peut s'en servir, sous peine de payer une amende, qui est deux fois plus forte que si le délit a été commis dans quelqu autre des haras impériaux. Cette taient ces établissements au temps de leur splendeur. Parmi les auteurs anciens qui nous sont parvenus, plusieurs ont exposé les principes de l'élevage des chevaux; on peut voir dans leurs écrits comment on entendait les soins qu'exigent les étalons (iyEéTrlç, i u oa, equus admissarius) et les juments ('ibr7roç A7,),Eïx, equa) au mo ment de la reproduction 19. Columelle définit ainsi la situation qui convient à un haras : « Il faut choisir des pâturages étendus, marécageux et sans accidents de terrain; ils devront être toujours bien arrosés, plutôt découverts que coupés par des arbres, et produire en abondance des herbes plus flexibles que hautes. » La figure 2750 reproduit une mosaïque romaine trouvée III. 100 EQI -79'i-EQU en Afrique, que l'on peut sans invraisemblance considérer comme la représentation d'un de ces haras privés, où les éleveurs entretenaient des troupeaux de chevaux, spécialement pour les besoins des jeux publics; les édifices qu'on observe au dernier plan donnent l'idée d'un établissement bien plus considérable qu'une simple écurie30. Une autre mosaïque récemment mise au jour sur le territoire de l'ancienne Hadrumète (fig. 2751) représente aussi des juments errant en liberté avec leurs poulains au milieu d'un paysage semé de bouquets d'arbres ; au fond apparaît une tour de garde, et à côté un bâtiment plus vaste qui doit être l'écurie23. Enfin sur une troisième mosaïque de même provenance l'artiste a figuré des chevaux, parés des attributs du cirque, qui semblent avoir appartenu à un certain Sobothius ; une inscription nous fait connaître le nom du domaine où ils sont nourris Campus dilectus, et aussi celui du chef du haras : Palets On appelait equitial lus tout employé d'un haras 23.