AGER VECTIGALIS. Terrain donné à bail, en général à long terme, et moyennant une redevance (vectigal).
1. Cette expression a été appliquée, dès l'origine, à une partie du domaine de l'État [AGER PUBLICUS] composée de terres cultivables mesurées ' et cédées par les agents du trésor à des particuliers, en jouissance indéfinie, contre un loyer annuel'. La partie de rager publicus affectée à la dotation et à l'entretien des temples, du culte et des prêtres, dut être également affermée par eux et compte certainement au nombre des agri vectigales; mais ces terres ellesmêmes pouvaient être reprises (revocatio) pour être affectées à une autre destination ou vendues par les questeurs'. Les cités italiques, les colonies et même toutes les villes municipales eurent aussi, dans leur domaine privé communal, outre les landes et pâtis (saltus, pascua publica, silvae), etc., des portions de terres en culture cédées aux temples' ou non, et, dans tous les cas, affermées ordinairement à long terme. Les corporations, en général, devaient préférer ce mode d'exploitation, supérieur à la mise en régie, et cet usage subsistait encore sous l'empire, suivant le témoignage de Gains '. Jadis les vestales et les prêtres avaient loué parfois leurs terres pour un lustre ou pour une annéee; mais le terme de cent ans, et même la perpétuité', devint la règle et fut usité même chez les particuliers. Le propriétaire, à l'exception de l'État', ne pouvait déposséder le preneur ou son héritier (conductor perpetuus), tant qu'il payait sa redevance. Cette particularité avait fait douter que ce contrat fùt un bail (locatio) plutôt qu'une vente (emptio venditio) ; la première opinion prévalut au n' siècle de l'ère chrétienne. Cependant le préteur protégea le concessionnaire au moyen d'une ordonnance au possessoire [INTERDICTUM] et même d'une action réelle utile" (actio vectigalis). Le droit à rager vectigalis devint alors une sorte de droit réel prétorien ou de domaine utile, qui a précédé la formation du
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droit réel d'emphytéose [EMPnYTEUSxs] ; au bas-empire, alter vectigalis devint synonyme d'ager emphyteuticarius10
II. On appelait aussi agri vectigales, ager privatus vectigalisve, les fonds provinciaux", par cela même non susceptibles de propriété romaine [DOoIINlUM, PRAEDIUM], praedia provincialia, stipendiaria vel tributaria12, et qui, en signe de vassalité13, étaient assujettis, quel qu'en fût le possesseur, à payer au trésor romain, ou à son concessionnaire, un impôt direct ou redevance, vectigal, vel stipendium, vel tributant ", en argent ou en nature.
Mais cette distinction, encore mentionnée au temps de Dioclétien G, commence à s'effacer, et on donne déjà le nom de propriétaire (dominos) au maître ou possesseur des fonds provinciaux 18. Sous Justinien, les fonds provinciaux sont mis sur la même ligne que les fonds italiques 17, en même temps qu'il abolit la distinction des choses mancipi et nec mancipi. Dès lors les mots ager vectigalis ne s'appliquent plus qu'aux biens emphytéotiques , quelle qu'en soit la situation. G. HUMBERT.