AGONOTIIETES, ATIILOTIIETES (il;mvoO tirs;, AA),oOé g;).-1. Noms donnés : I° à ceux qui instituaient ou qui faisaient célébrer, pour la première fois, des jeux et concours publics; 2° à la personne, à l'état ou à la réunion d'états au nom duquel la fête était annoncée et célébrée, qui faisait distribuer des prix et qui pourvoyait aux frais ; 3° enfin à ceux qui dirigeaient les concours et décernaient les prix au nom des précédents.
Une même personne pouvait réunir ces trois rôles : c'est ce qui se voyait communément dans les jeux funèbres. Ainsi, dans l'Iliade 1, Achille convie les chefs achéens aux jeux célébrés en l'honneur de Patrocle, il propose et décerne les prix. Dans les temps historiques, on peut citer comme exemple une fête du même caractère donnée après la mort d'Évagoras, roi de Salamine, et dont son fils Nicoclés fut l'agonnthète°. Il n'en pouvait être de même quand c'était au nom d'un peuple entier ou même de plusieurs peuples que se donnaient les jeux, comme aux grandes MIA]. C'était alors le peuple sur le territoire duquel les jeux étaient célébrés qui en avait la présidence, ou bien elle appartenait en commun aux représentants des différents états, par exemple dans les jeux pythiques, aux amphietyons [AMPHICTYONES]. Al'agonothésie («(mvolisaia)était attachée, dans l'opinion des Grecs, l'idée de suprématie, soit qu'il s'agît d'un peuple, si un seul entre plusieurs en retenait le privilége ou pouvait se substituer à celui à qui elle revenait naturellement; soit qu'un homme, roi, tyran, chef d'armée, s'en arrogeât l'honneur. Ainsi Pheidon, roi d'Argos, en faisant célébrer les jeux Olympiques en son nom 3,
I dans la vine olympiade, se posa comme le véritable chef de tout le Péloponèse. Le décret des amphictyons, qui permit à Philippe de Macédoine de présider les jeux Pythiques (en 338 av. J.-C.), impliquait la reconnaissance de ce prince comme chef de tous les États appartenant à la ligue amphietyonique'. Et quand la Grèce eut perdu son indépendance, ce fut le général romain Titus Quinctius Flamininus que désignèrent les Argiens pour présider aux jeux néméens
De cette présidence honorifique appartenant à un personnage ou à un peuple se distinguent les fonctions de ceux qui dirigeaient effectivement les concours, exerçaient la police, décernaient les récompenses et au besoin prononçaient des peines contre quiconque contrevenait aux règles. On trouvera de plus amples explicationssur ce sujet dans les articles consacrés aux jeux des grandes fêtes de la Grèce, et particulièrement sur les agonothètes des Jeux Olympiques, qu'on appelait HELLANODIIÇAI. Le même nom paraît avoir été donné aux magistrats qui dirigeaient les jeux Néméenss; aux jeux Pythiques, ils s'appelaient E7.119.e),r;-raC 7; on ne sait pas précisément quel était leur nom aux jeux Isthmiques.
A Athènes, il y avait, au temps de Périclès et de Démosthène, des athlothètes élus par le peuple au nombre de dix, un pour chaque tribu (pv).,j)°, qui présidaient dans les Panathénées [PANATHENAIA] aux luttes équestres, aux concours de musique et de gymnastique, et à la distribution des prix. Leurs fonctions duraient quatre ans, depuis une célébration des grandes Panathénées jusqu'à la suivante
Ils recevaient soit des HELLANOTAMIAI, soit des trésoriers de la caisse sacrée de Minerve Polias, l'argent nécessaire aux frais de leur charge '°. Trente jours après qu'ils l'avaient résignée, ils étaient obligés de rendre compte de leur administration. Ces fonctions furent remplies par Périclès 11. Les mêmes magistrats avaient-ils le soin des sacrifices? Cela n'est pas probable. En effet, on voit dans une inscription de l'an 415 avant notre ère 12 les athlothètes et les sacrificateurs mentionnés simultanément comme ayant reçu de l'argent des hellanotamiai. Sans doute aussi les athlothètes athéniens ne supportaient pas les frais de leur charge, mais ils devaient avancer les sommes nécessaires à la célébration des fêtes panathénaïques 13
Le nom d'agonothète est encore donné, par divers textes ou inscriptions 16, aux magistrats chargés de la surveillance des concours, soit aux Panathénées, soit aux Dionysies; mais ces inscriptions et ces textes sont tous relativement récents. Le nom d'athlothètes est le seul qui leur fût donné officiellement dans les beaux temps d'Athènes 15,
Les inscriptions grecques qui se rapportent à d'autres pays qu'Athènes, et surtout celles qui sont postérieures à Alexandre, nomment fréquemment des agonothètes, mais bien rarement des athlothètes '6. Comme les gymnasiarques-liturges athéniens [c.YMNASIARCHOS], ces agonothètes avaient presque toujours des fonctions qui se rapportaient à quelque fête spéciale : ainsi nous connaissons des agonothètes des jeux Pythiques et Néméens, des HERAIA, etc.;
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assez souvent aussi on voit un seul homme remplir simultanément ou successivement les fonctions d'agonothète dans plusieurs fêtes 17, ou même dans plusieurs villes 18. De même que pour les gymnasiarques, il est souvent impossible de déterminer si tel agonothète est un liturge ou un fonctionnaire. Ainsi, dans plusieurs inscriptions, l'agonothésie est évidemment rangée parmi les liturgies [LEITOUIGIAI]. Nous sommes disposé à croire, par exemple, que P. Cornelius Priscus, dont il est question dans une inscription de Philadelphie en Lydie 19, et qui se présenta dès la première jeunesse pour remplir une liturgie, était un agonothète : ce serait une ressemblance de plus entre les agonothètes et les gymnasiarques, surtout ceux d'Athènes, au temps de Démosthène. D'un autre côté, nous voyons assez souvent les agonothètes occuper une place dans les listes de fonctionnaires "0. Il est souvent dit aussi des agonothètes, qu'ils se sont acquittés à leurs frais des charges incombant à leur emploi "1 ; d'où il résulte qu'ils n'étaient pas obligés de le faire, et que, par conséquent, ces agonothètes n'étaient pas des liturges. Mais, semblables encore en cela aux gymnasiarques, les agonothètes dépassaient souvent de beaucoup les dépenses que la loi leur imposait ou pour lesquelles des sommes leur étaient allouées "2. Les agonothètes remplissaient souvent en même temps d'autres fonctions se rapportant au culte : ainsi nous en connaissons qui furent chargés de celles de grand prêtre [AxcnnEREUS] "3 ou de sacrificateur [HIEnoPotos]24 ; d'autres qui remplirent celles de STEPHANEPIIOROS n. On prenait les agonothètes parmi les personnages de grande famille ou occupant des positions élevées Y8. Les fonctions d'agonothète et de gymnasiarque ne s'excluaient pas : on connaît des personnages honorés à la fois des deux charges"; mais il arriva bien plus souvent que le même homme les remplit successivement 28.
Nous savons peu de chose sur la durée des fonctions des agonothètes. A Mitylène9° nous trouvons un agonothète annuel, et il est probable que les inscriptions qui parlent d'individus ayant rempli plus d'une agonothésie dans le cours de leur vie 3° se rapportent à des agonothètes annuels. A Ténos, les fonctions des agonothètes, comme celles des gymnasiarques, ne duraient que six mois n; mais il y avait aussi des agonothètes à vien.
La plupart des inscriptions où il est question d'agonothètes n'en nomment qu'un; on en trouve cependant aussi deux fonctionnant ensemble 31, et d'autres fois trois 34. L'agonothésie n'était pas exclusivement réservée aux hommes : il y avait aussi des femmes agonothètes. Nous en trouvons, par exemple, à Élée, dirigeant le concours des jeunes filles qui luttaient à la course dans les IIERAJA 3s; d'autres dans la Laconie, dans la Messénie, à Phocée, à Thyatira n. Dans cette dernière ville, on trouve le mari et la femme chargés ensemble de l'agonothésie 37
Les inscriptions font aussi connaître des agonothètes héréditaires, c'est-à-dire à qui leur père avait transmis régulièrement cette dignité et qui la remplissaient jusqu'à leur mort. Les fonctions de ces agonothètes héréditaires se rapportaient à des fêtes instituées soit par le testament de
quelque riche particulier, soit par un don fait pendant sa vie 38 A propos d'une fête de ce genre instituée à Sparte, en l'honneur de l'empereur Nerva et des noms d'athlothète et d'agonothète donnés, dans l'inscription qui y est relative 39, le premier aux deux personnages qui ont fait don du capital destiné à la célébration de la fête, le second à trois autres hommes désignés conjointement avec eux, Bôckh établit la distinction que le premier de ces noms signifie celui qui institue une fête ou qui en fait les frais, et le second celui qui dirige les concours et qui distribue les prix. Nicandre 60 fait encore une autre différence entre les mêmes noms; d'après lui, les fonctions des agonothètes se rapportaient uniquement aux concours de musique, et celles des athlothètes aux concours de gymnastique. Nous sommes disposé à croire que la différence établie par Nicandre entre les fonctions des agonothètes et des athlothètes, était justement celle qui distinguait les fonctions des gymnasiarques de celles des agonothètes ou athlothètes : en effet, sauf une seule exception [GYMNASIARCaos], les fonctions des gymnasiarques se rapportaient uniquement aux concours de gymnastique, tandis que les agonothètes ou athlothètes s'occupaient aussi bien de tous les autres.
L'agonothésie n'était pas toujours, à ce qu'il paraît, une fonction spéciale ; au contraire, elle ne formait quelquefois qu'une dignité transitoire et accidentelle attachée à un autre emploi : ainsi, d'après Pollux 41, le polémarque [POLEMAxcnos] était l'agonothète des jeux célébrés en l'honneur des soldats morts pour la patrie. Une inscription attique du temps de Caracalla énumère les agonothètes pour chacune des fêtes célébrées alors à Athènes S8. Nous y voyons que le cosmète et les sophronistes [GYMNASIUM] furent agonothètes pour la fête des Antinoées; le cosmète le fut seul pour les Athénées, et les éphèbes pour les Germanicées.
Il y avait encore une autre classe d'agonothètes exerçant des fonctions plus bornées non pas au nom d'une ville, mais d'une corporation de musiciens ou d'artistes dramatiques. D'après une des deux inscriptions qui s'y rapportent'i3, ils étaient nommés à vie. Homère 44, en parlant des jeux célébrés par les Phéaciens, appelle les magistrats qui y présidaient AISYMNETES, mot qui ailleurs a une signification différente. D'autres synonymes du mot agonothète sont sv«pw)ç et , v3lix2;ç ; on trouve aussi ceux de (3pz a ç et puteu'n ç. Les fonctions des panégyriarques et des irénarques ont aussi beaucoup d'analogie avec celles des agonothètes. Ces dignités ne s'excluaient pas; nous les voyons souvent réunies sur une seule tête 4J. Comme les agonothètes, les panégyriarques [PANEGYRIS] remplissaient souvent en même temps des fonctions relatives au culte : nous en connaissons plusieurs qui furent grands prêtres 46 et un qui fut prêtre héréditaire d'Esculape f7. Les fonctions des panégyriarques se rapportaient souvent à une fête spéciale dont le nom est ajouté au leur 48. A Cnide'"9, une femme remplit les fonctions de panégyriarque aux frais de son mari. Il nous est difficile de dire en quoi les panégyriarques différaient des agonothètes; si on pouvait s'en rapporter à l'étymologie, les fonctions des agonothètes
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se rapportaient surtout au concours et à la distribution des prix, et celles des panégyriarques aux processions et aux autres parties de la fête. Quant aux irénarques, nous trouvons des dignitaires de ce nom à Aphrodisias, en Carie, à Euménie et à Aezané, en Phrygie '10; l'irénarque d'Euménie était en même temps prêtre, gymnasiarque et lampadarque [LAMPADEUaOMIA] ; et celui d'Aezané, néocore [xcocoaus] de Jupiter à vie. Bôckh pense °' que ces dignitaires tiraient leur nom de celui de quelque impératrice appelée Irène. A.-C. BUSSEMAKER.
II. Des agonothètes, des athlothètes ou des personnages remplissant les fonctions analogues dont il vient d'être parlé, sont fréquemment représentés, particulièrement sur les vases peints : on en verra parmi les figures qui accompagnent les articles relatifs aux jeux et aux luttes gymnastiques et agonistiques; mais il est malaisé de distinguer parmi eux ceux qui exerçaient les plus élevées de ces fonctions et ceux qui veillaient au bon ordre ou dirigeaient les luttes sous l'autorité des premiers. Les uns et les autres portent un vêtement de même apparence : c'est, à ce qu'il semble, un manteau de pourpre et brodé (7COppupis). La pourpre brodée d'or fut vraisemblablement de bonne heure, et en tout cas, dans la période romaine, un insigne des agonothètes u. Les uns et les autres aussi tiennent ordinairement le bâton qui leur valait les noms de pagSovfol et aêloveipot. Cependant on paraît s'accorder à reconnaître plus particulièrement des agonothètes dans ces personnages qu'on voit dans les peintures des vases grecs, noblement drapés, le plus souvent assis, ne prenant aucune part à l'action, mais regardant et écoutant, dans l'attitude moins de spectateurs que de juges. Avec plus d'assurance encore , on peut donner ce nom à ceux qui décernent des prix aux vainqueurs comme dans la figure 182, d'après une coupe de la collection de Luynes 58. Ce sont aussi des agonothètes que l'on voit (fig. 183) siégeant derrière une table où sont déposées des couronnes, dans un bas-relief détaché d'un calendrier figuré découvert
à Athènes "Al paraît y mar
s
!u~ll mi muü ,.!.tnu i' . .„ ,n quer l'époque de l'année où
avaient lieu les combats de
coqs. Deux de ces animaux sont représentés devant la table dans le bas-relief.
La figure 484 reproduit un siége de marbre trouvé également à Athènes u, sur le côté duquel on voit sculptés
une table chargée de couronnes et portant une amphore, et, à côté, un des oliviers sacrés dont l'huile était destinée à remplir les amphores
données en prix aux vainqueurs. Le devant des supports est orné de chouettes sculptées, attribut ordinaire d'Athéné : ce siége est certainement celui d'•un agonothète des Panathénées.
Les peintures et les bas-reliefs des tombeaux de l'Étrurie témoignent du goût de ses habitants pour les luttes en usage dans les jeux publics de
la Grèce. Nous reproduisons un bas-relief d'un cippe trouvé à Chiusi (fig. 485)58, dans lequel on voit trois personnages
assis sur une estrade; deux tiennent des bâtons; celui qui est le plus en avant considère avec attention des tablettes sur lesquelles son doigt est fixé. Un homme armé, sans doute un pyrrhichiste [PYRRICIA], seul ici figuré, mais suivi d'autres personnes qui ont pris part aux jeux, se présente devant ce tribunal. Les personnages assis sont évidemment ceux qui président aux jeux, tandis que l'homme debout derrière eux, armé d'un bâton, doit être un simple surveillant. Au pied de l'estrade sont déposées des amphores ou des outres, sans doute destinées à être données en prix.