Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article FRONTALE

FRONTALE. I. Fronteau de cheval, partie du hart nais de tête qui passe au-dessus des yeux et réunit l'un à l'autre les deux montants de la bride. Dans ce sens frontale traduit exactement les mots grecs 4.7ru'i et Dès le temps d'Homère le harnais du cheval comportait un fronteau; dans les attelages des grands cette pièce se composait parfois d'une plaque d'or, d'où l'épithète de ypuo-4.7toxeç donnée par le poète aux coursiers des dieux'. Par sa forme et par les matières précieuses dont les riches se plaisaient à l'orner, le fronteau ressemblait beaucoup au bandeau qui ceignait le front des femmes2 [AsIPYx, fig. 296, 297 et 298]. Il resta toujours en usage chez les anciens 3 ; il figure comme une partie essentielle du harnais sur la plupart des monuments qui représentent des chevaux bridés [EQUITATIO, EQUITES, EQUUS, FRENUM, etc.]. Tantôt la courroie dont il est formé est dépourvue de tout ornement ; tantôt elle est couverte de bossettes [PUALERAE] 4 plus ou moins rapprochées ; souvent aussi elle est reliée à la muserolle par une autre courroie, qui suit le milieu de la figure et à laquelle sont adaptés divers accessoires décoratifs. Nous savons par les auteurs qu'on enchâssait sur le fronteau de véritables bijoux s; les rois d'Orient, qui, dans l'antiquité comme de nos jours, paraient leurs montures avec un grand luxe, fixaient en cet endroit des pierres précieuses d'une grosseur exceptionnelles. Mais le fronteau pouvait être aussi un vrai diadème entièrement en métal ; on en connaît un en argent, qui est orné de stries figurant des rangées de crins '. Le mot grec qui sert à désigner le fronteau a quelquefois été appliqué par extension à la bride tout entière 3 II. Chanfrein, pièce d'armure destinée à protéger la figure du cheval dans les combats (7Cp4J.ET(Oni;, 77po(I.ET017t( ôiov) 9. Xénophon veut qu'on en munisse le cheval de guerre ; il considère le chanfrein comme aussi nécessaire que le poitrail, 7po6TEpv(Ôtov, PECTORALE, et les garde-flancs, 7rapa7r),EUpta 10. On peut avec certitude conclure de là que la cavalerie athénienne en faisait usage de son temps. Les troupes perses en étaient également pourvues ". Un chanfrein, au milieu d'autres armures asiatiques, est représenté sur la balustrade du temple d'Athéna Polias12, édifié à Pergame par les Attales. Plusieurs chanfreins en bronze, de fabrication grecque, ont été retrouvés dans l'Italie méridionale; le musée de Naples en possède trois i3 ; sept autres ont été acquis par le musée de Carlsruhe 14 ; tous remontent à peu près au ve siècle avant Jésus-Christ. Le plus simple rappelle beaucoup le chanfrein sculpté sur le bas-relief de Pergame; on observe tout autour, sauf en haut, de petits trous destinés à fixer la doublure ; quatre autres, plus grands, percés de chaque côté, à la hàuteur du front et des naseaux, devaient recevoir les courroies du fronteau et de la muserolle. Le chanfrein qu'on voit (fig. 3299) porte une ornementation repoussée et gravée; dans la figure casquée, qui en forme le sujet principal, les yeux sont en ivoire. Une tête de Gorgone décore un autre chanfrein; ses yeux sont aussi en ivoire, ainsi que la langue et les dents; la même matière remplissait encore les cavités qui imitent à la surface de l'objet les yeux du cheval placés au-dessous. Sur un autre exemplaire de la collection de Carisruile, ces cavités sont remplies par une pupille en verre. Plusieurs chanfreins, découverts dans des tombeaux scythiques de la Russie méridionale, doivent être rapprochés des précédents; la figure 3300 en reproduit un 's où est manifestement empreinte l'influence hellénique; il est en or, et, comme ceux de la Grande Grèce, décoré d'ornements en partie repoussés, en partie cise FR0 1343 FRU lés 1. Une peinture d'un tombeau de Paestum (fig. 3301) 2 nous montre de quelle manière le chanfrein s'ajustait au harnais ; le modèle représenté par le peintre offre avec les pièces découvertes dans la même région une ressemblance frappante. Le chanfrein n'excluait pas toujours le fronteau; deux pièces de ce genre, la première en or, la seconde en argent, ont été retrouvées en Russie sur la tête d'un même cheval On conjecture queleschevaux des troupes romaines sous la République étaient protégés par un chanfrein et par une armure semblable à celle qui était en usage chez les Grecs à la même époque 4. En tout cas on doit les avoir abandonnés bientôt après ; car on n'en trouve plus l'image sur les monuments de l'Empire qui se rapportent à la vie militaire ; Arrien mentionne encore le chanfrein et les garde-flancs; mais il ne dit pas que la cavalerie romaine en fût pourvue de son temps Il est probable qu'on y renonça, par suite de cette tendance toujours plus accentuée qui porta les Romains de l'Empire à alléger autant que possible le poids de leurs armes'. Toutefois, dans les exercices, on continua à couvrir la figure du cheval avec un chanfrein, pour qu'il n'eût pas les yeux blessés par les javelots que les soldats apprenaient à lancer'. Les éléphants de guerre, dans certaines armées, eurent, comme les chevaux, le front couvert d'un chanfrein. Tels étaient ceuxqu'Antiochus mit en ligne contre les Romains, en 190, à la bataille de Magnésie a. On peut voir une armure de ce genre, à l'article ELEPans (fig. 2625), sur une tête d'éléphant enbronze, qui a fait partie de la collection Gréau9. Cette pièce semble se composer d'une plaque de métal attachée par des courroies et ornée, sur le devant, d'une bossette surmontant une arête en saillie ; à la naissance de la trompe, elle se continue par un tablier, formé de lamelles de cuir ou de métal. La partie supérieure du chanfrein était quelquefois garnie de panaches (cristae) 10, qui rendaient l'aspect de l'animal encore plus redoutable, en ajoutant à sa hauteur [ELEPHAS, fig.2626] 11. On voit aussi sur un médaillon (Ibid., fig. 2628) une sorte de corbeille, qui couronne le front de l'éléphant et forme une balustrade, derrière laquelle le cornac se tient accroupi 12. Des fronteaux décoratifs, rappelant plus ou moins le chanfrein par leur forme et leurs dimensions, furent en certains cas appliqués à d'autres animaux que le cheval. En 283, dans la fameuse procession organisée à Alexandrie par Ptolémée Philadelphe, en l'honneur de tous les dieux, on vit défiler des ânes et des taureaux portant sur le front des plaques d'or et d'argent13. Les victimes représentées sur les monuments ont souvent le front couvert d'ornements, dont certaines parties, faites sans doute de métal ou de matières solides, peuvent être comparées à Enfin les Grecs désignaient aussi sous le nom de apol1.eTw7tfôtov un médaillon enchâssé à la partie antérieure d'une couronne [CORONA, p. 1523, fig. 1977 et 1986] 15. III. On a, par comparaison, appelé frontalia l'extrémité de l'hélépole, machine de siège analogue au bélier FItUCTUS [usus FRUCTUS].