Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

HAERETICI

IIAEIE'I'ICI. Les empereurs chrétiens s étaient réservé, depuis Constantin, la haute police des cultes', qui avait toujours appartenu à leurs prédécesseurs. Ils l'exercèrent soit dans les conciles auxquels ils prirent souvent une part prépondérante, soit en usant de leur pouvoir législatif pour frapper ceux qui s'écartaient de la foi orthodoxe, haeretici. Les orthodoxes seuls jouirent d'une capacité civile et politique complète'. Il arriva dès lors que, sous ce prétexte, les empereurs ariens ou hérétiques eux-mêmes persécutèrent les orthodoxes. Nous renvoyons aux articles JUTAEI, PAGANI, APOSTASIA, l'exposé des mesures prises contre ces hétérodoxes, pour ne parler ici que de ce qui concerne les hérétiques proprernent dits, c'est-à-dire ceux qui interprétaient faussement ou bien modifiaient les dogmes admis par l'Église catholique, « qui vel Levi argumento a judicio catholicae religionis et tramite detecti fuerint deviare 3 o. Déjà Constantin avait, en 326, interdit toute réunion à ces sectaires, en les dépouillant des privilèges réservés aux catholiques Cet exemple fut suivi par ses successeurs jusqu'à Justinien, notamment par Théodose Pr, qui 3 HAE ordonna en 380 à tous les sujets de t'empire de pratiquer la foi que le divin apôtre Pierre a transmise aux Romains', et par Arcadius et Honorius 2. Dans des constitutions trop nombreuses pour être analysées ici, les prohibitions antérieures furent souvent renouvelées et confirmées par des sanctions pénales plus sévères. Du reste, celles-ci variaient avec la nature des hérésies, et selon le caractère de l'empereur, ou les circonstances politiques 3. Ainsi l'anabaptisme fut proscrit, et les prêtres qui délivraient une seconde fois le baptême, frappés de déposition par une loi de Valentinicnl°r rendue en 373 '. Honorius prononça la confiscation des propriétés de ceux qui recevaient chez eux les anabaptistes pour les baptiser de nouveau' ; les complices encouraient une amende ". Plus tard, la pénalité s'éleva jusqu'à la déportation pour les prêtres, et la confiscation pour les propriétaires qui avaient prêté leurs maisons 7. En 413, Ionorius frappa le ministre et le baptisé du dernier supplice peine remplacée en 428 par l'exil et une amende, en vertu d'une constitution de Gratien, Valentinien III et Théodose 9, laquelle étendit le même châtiment au juge trop indulgent. Un grand nombre d'autres sectes sont mentionnées dans les constitutions impériales, notamment les suivantes : Ariani, A pollinariani, Apotatictae, Donatistae, Eucratitae, Eunomiani, Eutychiani, il ydroparastae, DTanicfiaei, Macedoniani, Dlontanistae, Nestoriani, Novatiani, Phryges, Priscillianistae, Pneumatomachi, Sabbatiani, Saccophori, Valenti niani10. Quelques-unes d'entre elles étaient plutôt schismatiques, c'est-à-dire qu'elles s'écartaient moins du dogme que des règles du culte ou de la discipline ecclésiastique. Néanmoins, les empereurs traitèrent les schismatiques avec une égale rigueur''. L'arianisme fut une des hérésies les plus persécutées par la plupart des empereurs chrétiens, et les plus persécutrices sous Constantin, Valens et Valentinien II. Il est nominativement frappé 12 dans un grand nombre de constitutions impériales. Voici un résumé des dispositions qui sont généralement appliquées aux hérétiques par ces lois du bas-empire. 1° Le séjour de Rome ou de Constantinople et des villes leur est interdit; ils doivent demeurer dans leur lien de naissance (autre qu'une cité), sans pouvoir y posséder d'église, ni former aucune assemblée religieuse 13 ; 2° ils sont atteints d'une espèce d'infamie, entraînant la déchéance de plusieurs droits civils, et particulièrement de la testamenti factio''', et même, en certains cas, du jus commercii 15 ; 3° en général, ils sont incapables de toute fonction publique, ainsi que du service militaire 16 ; 4° leurs réunions illicites entraînent une amende 17 qui varie de 5 à 100 livres d'or, avec confiscation du lieu de l'assemblée, et châtiment sévère pour le propriétaire du IIAL local 18; 5° l'hérétique qui ne se conforme pas à l'ordre de bannissement des villes, encourt la peine de mort et la confiscation; il en est de même pour ceux qui, persévérant dans leur erreur, cherchent ensuite à se réunir 19; 6i° les prêtres subissent le bannissement ou la déportation 40, et leurs complices sont punis sévèrement2t; enfin on frappe d'une amende ou même d'un châtiment plus grave les gouverneurs, juges ou fonctionnaires23 qui négligent d'appliquer les lois aux hérétiques. En général, les manichéens [MANICIIAEI] étaient l'objet des plus rigoureuses pénalités 23, et Justinien lui-même prononça contre eux la peine de mort 2', mais il confirma ou renouvela la plupart des dispositions antérieurement édictées contre les hérétiques en général 25 C'est ainsi notamment qu'ils demeurèrent incapables de tester26, et d'être institués héritiers ou de recevoir un legs, même dans le testament d'un militaire, exclus de tout emploi public et du service militaire27, etc. G. HLSIIERT.