Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article HASTIFERI

IIASTIFERI. Mot qui se rencontre sur certaines inscriptions trouvées en Gaule ou dans les confins germaniques, Vienne en Dauphiné', Castel près Mayence 2, Cologne 3. On n'est point d'accord sur la nature 4 de ceux qui sont ainsi désignés. Certains voient dans les hastiferi une corporation religieuse. Dans l'une des inscrip tions qui les signalent', disent-ils, on lit : Monteur Vati canum vetustate conlabsum restitueront hastiferi civitatis Mattiacorum; or le Mons Vaticanus était propre au culte de la Bellone de Comama 6. Dans une seconde inscription 7, ces hastiferi sont appelés hastiferii (sic) sive pastores; de même dans les cultes orgiastiques de l'Asie Mineure, il est question de (3o' xo),ot [BouxoLol]. Enfin, ce qui est peut-être plus caractéristique encore, la dernière de ces inscriptions est dédiée le 24 mars, qui est le jour le plus important des fêtes de Cybèle, jour du sang'. I1 semble donc bien que les hastiferi aient eu quelque attache avec le culte de la Mère des Dieux, ou avec celui de divinités asiatiques de même famille. Leur nom ne serait peut-être que la traduction latine du mot grec a dendrophore [DENDROpnoBIA]. Mais, d'autre part, M. Mommsen' a émis l'idée que cette corporation formait une milice municipale; c'est ce que concourent à prouver différents détails : la latinisation du mot hastiferi, qu'on a substitué avec intention évidemment au terme habituellement employé « dendrophore », l'idée d@ gens armés, que le terme choisi fait naître intentionnellement, et la présence de cette corporation surtout aux confins de l'empire, sur le limes germanique. D'autres que M. Mommsen ont admis cette conclusion 19 et il n'y a guère moyen de la repousser. Les hastiferi auraient donc eu un double caractère : corporation religieuse et milice armée. L'un n'est point incompatible avec l'autre. M. Mommsen lui-même a rappelé, à ce sujet 11, que les corporations romaines étaient utilisées dans tout l'Empire, par l'État comme par les municipalités, surtout à partir du nie siècle, pour des services publics 12 ; c'est ainsi que les centonarii et les (abri auxquels les dendrophori sont très souvent associés [l'ABRI] étaient presque partout chargés de l'extinction des incendies. Il ne serait pas surprenant donc que dans des villes frontières, ou même ailleurs, on eût eu recours à un collège religieux pour la police locale. On a remarqué même que celles IIEB 44 IIEB des inscriptions relatives aux hastiferi, qui sont datées (années 224 et 236 de notre ère), se placent dans une période où les empereurs se préoccupaient d'assurer la garde des frontières germaniques 1. R. CAGNAT.