Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article HEKATOMBAIA

IIEILLTOMBAIA (`ExxrolAxi«). Ce nom s'applique en général à toutes les offrandes d'hécatombes. Les principales fêtes grecques, comportant une solennité de ce genre, sont les suivantes : 1. Les Ilelcatorrtbaia apolliniens [APOLLO], qui se célé braient à Athènes pendant le crois hékatombaion, auquel ils ont donné leur nom en l'honneur d'Apollon 'Exzrs .Gaioç 2. De la nature de ces fêtes, on ne sait rien. A l'imitation des Ilekatombaia athéniens, des sacrifices solennels à Apollon Hékatombaios étaient offerts à Myconos, où l'on immolait un taureau et dix agneaux 3; à Amorgos, sans doute au temple d'Apollon Délien de Minoa, où le sacrifice était accompagné de concours musicaux `; enfin chez les iEnianes, où l'on offrait une hécatombe à Apollon en même temps qu'un boeuf à Zeus 5. 11. Les Helcatombaia athéniens, en l'honneur d'Athéna Polias. Ce n'était point une fête distincte, mais une partie de la fête des Panathénées, au mois héka tombaion [MINERVA, PANATHÈNAIA] 6. L'hécatombe était offerte à la fois aux grandes et aux petites Panathénées ' ; le sacrifice, qui suivait la grande procession, avait lieu au grand autel d'Athéna Polias, où toutes les génisses étaient sacrifiées, sauf une qui était réservée pour l'autel d'Athéna Niké 0; un repas religieux suivait le sacrifice, et les viandes étaient alors distribuées au peuple. Les colonies d'Athènes participaient aux frais des hécatombes o. III. Les Ilekatombaia argiens. Ici encore nous n'avons pas affaire à une fête indépendante ; l'hécatombe solennelle n'était qu'une des parties importantes de la grande fête de la Héra d'Argos, les nERAIA 10 ; les textes marquent le lien étroit qui unissait les différentes solennités : processions, sacrifices, jeux 11. A une certaine époque même, les deux termes, Bernin et Ilekatombaia, ont été synonymes'. A l'imitation d'Argos, Égine avait aussi ses Helcatombaia, fêtes d'Héra 13. Enfin Strabon signale une fête analogue, portant le même nom, annuelle, à Lacédémone'`. Lorris Couve. IIEli1TOMPIIONIA ('Ex2Tot.t.,dvt«). Fête célébrée en Messénie, et consistant en un sacrifice solennel : elle avait été instituée par Aristoménès', vainqueur des Lacédémo 51 BEK niens. Les auteurs anciens, interprétant le mot, y voyaient un sacrifice offert pour cent ennemis tués, et admiraient qu'Aristoménès l'eût célébré jusqu'à trois fois. Il paraît plus vraisemblable, suivant l'explication de Clément d'Alexandrie, qu'il s'agissait du sacrifice de cent victimes'. Ainsi les Ilekatomphonia, qui n'ont laissé aucune trace dans l'histoire, auraient le même sens et le même caractère que les cérémonies célébrées dans différentes parties de la Grèce, sous le nom de BOUPIIONIA et d'HEKATOMBAIA. Suivant Pausanias, les Helcatomphonia étaient dédiées au grand dieu de Messène, Zeus Ithomatas, en l'honneur de qui se célébrait aussi la fête annuelle des On retrouve en Crète, et peut-être à Athènes, des solennités analogues, portant le même nom, sur lesquelles on n'a aucun détail; c'étaient des fêtes guerrières, consacrées à Arès L. COUVE. IIE11ATOSTÉ (`Exxrocrr)). Le mot Éra-coar-,i désigne, en droit grec, un impôt, une taxe, une contribution de 1 p. 100, perçus à l'occasion de certains actes; il correspond assez exactement à ce que nos anciens auteurs appelaient le centième denier. Aristophane présente comme une source féconde de revenus pour l'État les centièmes qu'encaissait le Trésor athénien '. Malheureusement, nos renseignements sur ces lxxrosrx( sont bien incomplets. Il est probable que, indépendamment du droit d'octroi [DIAPYLTON], que payaient les marchandises introduites dans Athènes, il y avait un droit de marché payé par toutes les marchandises vendues sur la place publique [AGORAIA TEL1]. D'après Ilarpocration et Suidas, ce droit aurait été d'un cinquième (Il 7c€u.7crT1), c'està-dire de 20 p. 100. Une pareille taxe nous semble bien peu vraisemblable. Lorsque, dans des circonstances très critiques, les Byzantins exigèrent la dîme du prix des objets vendus, l'opinion publique jugea cette prétention exagérée Comment aurait-elle accepté avec résignation une taxe normale deux fois plus forte? Mieux vaut s'en tenir à la définition de l'un des lexiques de Séguier, qui dit que les sacwiz étaient des Éxarorra( 3. Xénophon parle d'un centième qui était perçu dans le Pirée (Éxxrorr7. Ev IIecpacez) '. Ce centième, dit-il, donne des recettes plus fortes depuis que les alliés sont obligés de venir plaider devant les tribunaux athéniens. Était-ce un droit d'entrée ou de sortie frappant sur les personnes? Pesait-il sur les bagages ou autres objets que les voyageurs portaient avec eux? Sans aller jusqu'à soutenir qu'il y eut à Athènes de véritables livres fonciers sur lesquels un fonctionnaire mentionnait toutes les mutations de propriété, on est au moins forcé de reconnaître que les Athéniens donnaient une certaine publicité aux ventes ayant pour objets des immeubles, ou des esclaves 6. Non seulement l'aliénation était annoncée par voie d'affiches, apposées, soixante jours à l'avance, dans les lieux où siégeaient IHEK les principaux magistrats', mais encore elle était enregistrée par un fonctionnaire. Il y avait certainement, à Athènes, comme dans toutes les républiques bien organisées, un magistrat qui inscrivait sur ses livres les conventions des particuliers et les jugements des tribunaux 8. Ce magistrat recevait de l'acheteur un droit égal à la centième partie du prix de la vente, et mentionnait sur ses tablettes ce payement d'un centième. il constatait par cela même que le bien avait changé de maître, qu'une mutation venait de s'opérer. On a retrouvé, sur l'Acropole, quelques inscriptions du Ive siècle avant notre ère, relatant ces enregistrements : « Léontios, fils de Kalliadès, du dème d'Épikephisia, a vendu un fonds de terre situé dans le dème de Cothocides; l'acheteur est Mnésimaque, fils de Mnésochos, du dème de Cothocides; le centième est de deux drachmes et trois oboles 0 ). Nous avons ainsi le nom du vendeur, celui de l'acheteur, la désignation de l'objet vendu et, indirectement, le montant du prix, deux cent cinquante drachmes. Sans doute, l'énonciation relative à l'immeuble vendu est bien sommaire; pour éviter toute confusion, on aurait pu, comme on l'a fait dans d'autres pays, indiquer plus soigneusement ses abornements. Mais, si succinct qu'il fût, l'enregistrement suffisait pour éveiller l'attention des tiers et pour leur inspirer quelque prudence, s'ils traitaient avec l'aliénateur 10. D'un autre côté, le payement de l'lxxrosrrl était pour l'acheteur une preuve de son acquisition; la mention sur les registres du versement de ce centième denier était, en quelque sorte, un certificat de propriété 11. L'acquéreur était Il est naturel de supposer que l'Éxarocrétait perçue par un représentant du Trésor public. Cependant M. Kaler 13 et après lui M. Fraenkel f4 sont portés à croire que les centièmes de prix de vente versés par les acheteurs, d'après plusieurs de nos inscriptions '" relatives à des ventes d'immeubles par des communautés ou par des associations, appartenaient à un temple ou à une divinité. On lit dans une inscription que les trésoriers de Minerve ont fait fabriquer des vases d'or, en consacrant des Éxxroarx(à cet usage f6 ; c'est bien, dit-on, la preuve que ces centièmes étaient devenus la propriété du temple. La conclusion ne s'impose pas nécessairement; il pouvait très bien y avoir des Éxaroara( perçues par les temples et très distinctes des lxxrosrxi payées par les acheteurs 17. Le droit perçu à l'occasion des ventes a-t-il toujours été exactement de 1 p. 100? M. Ktihler croit que, à l'origine, le droit, au lieu d'être rigoureusement proportionnel, fut gradué 'R. Le receveur percevait : de un à cinq drachmes, une obole ; de six à cinquante drachmes, trois oboles; de cinquante et une à cent drachmes, une drachme 13. A d'autres époques, sous l'empire de nécessités budgétaires analogues à celles qui font augmenter nos droits de mutation, l'impôt fut élevé de 1 à `? p. 100. HEK -55HEL Ainsi, après la guerre du Péloponèse, la vente d'un bien valant quatre cent dix drachmes donna lieu à la perception d'un droit de neuf drachmes'. Dans l'exposé qui précède, nous avons considéré l'kxlToc'ni comme un droit régulier de mutation, comme une espèce d'h7onvtov, l'i vtov tarifé à 1 p. 100, par opposition à la TEVTrxocTr OU 7tdv;ov de 2 p. 100. Nous devons toutefois reconnaître que plusieurs des récents historiens du droit grec, M. Kuhler 2, M. Lipsius 3, M. Frænkel établissent une ligne de démarcation très nette entre l'ixarocrr d'une part et l'E7odvtov d'autre part. Ce seraient, à leur avis, deux droits tout à fait indépendants l'un de l'autre, ayant chacun une sphère d'application particulière et calculés d'après des règles différentes. Mais cette thèse, qui va à l'encontre du témoignage très précis d'un ancien lexicographe, repose uniquement, à cette heure, sur de simples inductions tirées d'inscriptions assez vagues. Jusqu'à ce que de nouvelles découvertes nous aient mieux renseigné, l'ixaTOCT't reste pour nous une taxe perçue au profit de l'État sur les aliénations à titre onéreux, taxe correspondant à nos droits de mutation E. CAreuimul. IIEIl"TÉ ("ExTr). Pièce d'or grecque (fig. 3746) valant 1/6 du statère et équivalente en poids à deux oboles d'argent' [sTATER]. F. LENORMANT. IIERTÉMORO1(`ExT-N.opct'). Dans un rapide exposé des institutions d'Athènes antérieures à Dracon, Aristote dit que la propriété foncière était alors concentrée dans quelques familles privilégiées de la fortune. Les citoyens pauvres, non seulement n'avaient pas de terres, mais encore vivaient, eux, leurs femmes et leurs enfants, dans une véritable servitude à l'égard des riches(Ebo6),Euov ToT; r),oua(otç), obligés qu'ils étaient, pour gagner leurs moyens d'existence, de cultiver les immeubles de ces derniers. On les appelait ttt),xTat ou i'r.Tu.opot. Ce dernier nom fait allusion à la redevance moyennant laquelle ils travaillaient aux champs des riches2. Ces ix.Tilu.opot étaient-ils des tenanciers payant un sixième au propriétaire, ou bien ne gardaient-ils pour eux qu'un sixième ? La question est depuis longtemps controversée. Le texte d'Aristote que nous avons cité ne la résout pas aussi explicitement que le laisseraient supposer les traductions françaises de M. Reinach et de M. Ilaussoullier : Les Eret-ilJ.Q?Oi cultivent les champs des riches « à la condition de leur payer les cinq sixièmes de la récolte3 », Gu bien « à la condition de ne garder pour eux qu'un sixième des fruits 4 ». La phrase originale, beaucoup plus ambiguë, ne précise pas si la t.t:cOn»etç d'un sixième, qui a donné son nom aux pauvres, est le fer de Berlin, 1865, p. 541 et s. 3 Jahresbericht de Bursian, t. I, p. 1403 et s.; cf. 5 Plutarch. Sol. 13 ; cf. Ilesych., s. v. 'Er5) opte;, éd. Alberti, p. 1369. 6lsocr., Areop., § 32, Didot, p. 93. 7 Voir en ce sens Pastoret, Histoire de la Btickh avait primitivement enseigné cette opinion (Kleine Schriften, t. IV, p. 43); mage de la terre, ou le prix des services du cultivateur. Plutarque dit expressément que les thètes devaient payer aux maîtres des fonds par eux cultivés le sixième des fruits : ix' Twv ; Evo.t vwv TEloÛvrs 5. Redevance modique, sans doute ! Mais précisément Isocrate' vante la modération de l'aristocratie foncière dans la détermination du loyer des immeubles 7. Schumann a, dès 1819, très justement fait observer que, si les ix.rieopot avaient gardé pour eux les cinq sixièmes des fruits, il n'y aurait pas eu de bonnes raisons pour s'apitoyer sur leur sort. Quand bien même ils auraient dû se procurer à leurs frais tous les instruments aratoires nécessaires pour l'exploitation des fonds, leur condition aurait été bien meilleure que celle de la plupart de nos fermiers 6. Il est beaucoup plus probable que' les cultivateurs pauvres étaient appelés ixT-t p.opot parce qu'ils ne gardaient pour eux qu'un sixième des produits 0. C'est bien là ce que disent, en effet, plusieurs rhéteurs. Aussi la plupart des historiens contemporains adhérent à l'opinion de Schumann 10. Plutarque se trompe, dit M. Ernest Curti us ; Sch(imanna donné l'explication vraie" Plutarque a été induit en erreur par l'ambiguïté des sources qu'il avait à sa disposition et il suffit de lire en entier le texte d'Isocrate « pour se convaincre que l'auteur parle en rhéteur plutôt qu'en historien12 ». LesixTrv.opct, qui ne payaient pas au maître du sol la redevance à laquelle ils étaient astreints, étaient contraignables par corps, eux et leurs enfants (y«tyip.O; z 2l aûTOi xat oi 7rziisç). Les réformes de Solon eurent précisément pour but d'améliorer leur condition13 Pour beaucoup d'entre eux, la terre qu'ils exploitaient en qualité de colons partiaires devait avoir une valeur d'affection, parce qu'elle leur avait appartenu autrefois en pleine propriété. Il arrivait souvent, en effet, qu'un citoyen, grevé de dettes qu'il lui était impossible de payer, était obligé, pour désintéresser ses créanciers et échapper à leurs redoutables voies d'exécution, de leur abandonner tout ce qu'il possédait, sauf à reprendre ensuite comme simple tenancier les biens dont il s'était dessaisi. E. CAILLEMER.