Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

HERMAE

IIERMAE, IIERMULAE (`EpNai, soI,,($la.').-Avant que les Grecs aient commencé à donner à leurs dieux une figure humaine, alors qu'ils les représentaient par des symboles, Ilermès était vénéré sous la forme tantôt d'un tas de pierres ramassées dans les champs et amonce lées sur le chemin, ce qu'on appelait Épu.aio, ad?oç', Ëp(,.aiov ou Ëpueov 3, tantôt sous la forme d'un énorme phallus. Homère signale un ipu«ioç i,ecIt'o, près d'Ithaque4; Stra bon parle d'ipp.siiu en Élide 3 ; on en trouve aussi mentionnés en Laconie G. C'étaient là les vestiges d'un temps où, à défaut de chemins tracés, le voyageur n'avait pour se guider que ces pierres entassées de distance en distance, auxquelles à son tour il ajoutait la sienne'. Quant au phallus, Pausanias dit nettement qu'à Cyllène, en Élide, Hermès était représenté sous cette espèce, et son témoignage est confirmé par Artémidore G. Les monuments de ce genre, les phallus-hermès, ne pouvaient être que les symboles de la fécondité des plantes et des animaux, et sur ce point on conçoit difficilement deux avis, puisque c'est aussi le caractère primitif du dieu Hermès, tel que permettent de le concevoir les textes écrits, et non plus les monuments figurés [n1ERCURIUS] 9. Le phallus de Cyllène était bien un véritable un hermès, au sens particulier qui nous occupe; mais le terme a pris seulement toute sa valeur lorsque ce genre de monuments, qui tenait plus de la pierre non travaillée [ARGOT LITIIOI], du bétyle si l'on veut [BAETYLA;, que de l'oeuvre d'art, subit une essentielle transformation. Une tête à forme humaine surmonta la colonne phallique qui s'équarrit et devint quadrangulaire15. Le symbole se transforma en idole à demi anthropomorphe, et seulement, pour en rappeler l'origine et le sens, la figure de l'organe générateur s'érigea à mi-hauteur de la stèle t'. 11 est difficile de dire à quelle époque exactement s'opéra la transformation du phallus en hermès, et par quelles étapes successives la pensée et l'art grec arrivèrent au type \ K définitif et clas sique que nous venons de décrire (fig. 3811) 12. Mais il est très probable qu'il y eut là un travail parallèle à celui qui fit sortir des dieux poutres ou colonnes, vestiges eux-mêmes des arbres sacrés [valions SACRAS], les raides et informes ébauches appelées xoana, et des xoana les images qui méritent enfin le nom de statues [xoANON]. Toujours est-il que déjà des peintures de vases archaïques nous montrent (fig. 3812) des spécimens d'Hermès, auxquels il ne manque rien, pas même les deux tenons saillants à droite et à gauche du sommet de la stèle, à la place où se seraient trouvés les bras, et peut-être en guise de bras13, A mesure, semble-t-il, que le type de la colonne hermaïque se précisa, l'usage des hermès se répandit de plus en plus, et devint tout à fait envahissant. Le grand nombre d'hermès retrouvés, le nombre plus grand encore d'hermès représentés sur les vases peints, sont des témoignages probants de l'extension du culte de FIER 131 IIER ces stèles symboliques, et surtout de celles qu'on pourrait appeler ilerlnhermès, pour bien marquer qu'elles représentent le dieu Hermès, et non point tel ou tel autre. On faisait difficilement un pas en Grèce, et surtout en Attique, à l'époque classique, sansrencontrer quelqu'une de ces bornes pittoresques, si bien que les Athéniens passaient pour avoir imaginé ce type, que les autres peuples leur auraient emprunté '. Dans les villes, au coin des rues 2, devant les portes des maisons 3, un hermès se dressait à côté ou à la place d'Apollon Agyeus. A Athènes, la rue qui conduisait du Poecile au Portique-Royal était bordée de rangées d'hermès érigés par les soins de citoyens pieux ou de corporations, et c'est pour cela qu'on nommait aussi le Portique-Royal Portique des hermès'. Nous ne savons pas si toutes ces stèles étaient des Hermhermès ou si, dans le nombre, se trouvaient des hermès d'autres divinités, mais la première hypothèse est la plus vraisemblable, étant donné le rôle d'Hermès protecteur des rues (ato ou Évôoç) 6, des marchands et du commerce, dieu de l'agora (âyop«ïo;)6, dieu des heureuses rencontres et des rapides fortunes'. Hors des villes, c'est le dieu des voyageurs dont on se plaît à multiplier les images sur les grandes routes; il rassure contre les embûches celui qui parcourt la campagne et l'empêche de s'égarer. Les faces du pilier indiquent les différentes directions 8, et souvent la stèle sert de borne milliaire. En Attique, Hipparque, fils de Pisistrate, avait fait dresser des hermès sur les routes qui allaient des dèmes à Athènes, à mi-chemin ; et pour que le voyageur, s'arrêtant pour vérifier le nombre de stades qui le séparaient de la ville, tirât encore quelque profit de sa halte, sur le marbre était aussi gravé une sentence, une énigme, un précepte de bonne morale, concentré en un vers rapide 1° Comme autrefois les amas de pierres rejetées hors des champs, les hermès servaient de bornes aux frontières ou à la limite des propriétés. Pausanias a mentionné plusieurs fois ceux qui, au sommet du mont Parnon, séparaient les territoires de Lacédémone, d'Argos et de Tégée. Hermès n'était-il pas le dieu E7tttiio(nsç 11? On trouvait encore des hermès en bien d'autres lieux, devant les temples 12, près des tombeaux 13, dans les gymmnases, les palestres 1'', les bibliothèques15, et jusque dans les cours des maisons 1f. Sous cette forme d'un symbolisme naïf, Hermès était l'objet d'un culte plutôt populaire. Nous savons que dans la campagne on déposait auprès du dieu de menues offrandes, par exemple des fruits, en particulier des figues sèches, d'où l'expression a ixov €n' `Ep i. 17. Ces épµ«ï«, c'était le nom de ces présents, servaient à apaiser la faim des passants. Le mot qui les désignait en était venu, d'ailleurs, à désigner toute heureuse et fortuite trouvaille 18. On couronnait aussi les hermès de fleurs ; même Xénocrate orna l'un d'eux d'une couronne d'or 19. Les deux tenons très souvent placés ou figurés à droite et à gauche, sur les côtés de la stèle, servaient à suspendre des guirlandes20 (fig. 3811). Il faut ajouter les libations et les sacrifices sur les autels que l'on voit si souvent représentés à côté des hermès2f, sans parler des prières et des menues dévotions que nous révèlent les peintures de vases". A Pharae, en Achaïe, on entretenait des lampes et on brillait de l'encens devant l'hermès de l'agora, on déposait une pièce de monnaie sur l'autel et on le consultait comme un oracle 23. D'autre part, si l'on s'en rapporte aux vases peints, les hermès auraient été l'objet de fêtes et de cérémonies plus régulières et plus importantes, ayant un caractère bachique très nettement marqué. Parmi les dessins que Gerhard a recueillis dans son important mémoire sur les Représentations d'hermès, ce sont des personnages du thiase de Dionysos qui figurent le plus souvent autour des stèles, des satyres et des ménades portant quelquefois le thyrse, qui font des libations, apportent des offrandes, on dansent en faisant résonner le tympanon 24. L'histoire de la mutilation des hermès à Athènes, et le procès qui s'ensuivit, célèbre sous le nom de procès des Hermocopides (`Epuoro7t%î), prouve, quelque expli cation que l'on en donne, que dans cette ville du moins, le culte des Hermès tenait fort au coeur du peuple 23 L'industrie desspp.o y),6:pot 26 ou sculpteurs d'hermès (ipp.oy),ucp(«, Épy«(«v8) était très floris sante à Athènes en particulier. Les vases attiques en témoignent aussi bien que les textes. On voit un de ces artisans à son travail, sur une coupe (fig. 3813), et à côté de lui l'inscription "I7;-zpzo; x«Xil; L2. Tous les hermès n'étaient pas absolument pareils; il y en eut de types assez différents ; on pourrait cependant HER -132 HER former, des représentations connues, deux groupes principaux. Dans l'un figureraient les hermès barbus, dans l'autre les hermès imberbes. C'est du reste, et cela se conçoit sans peine, la division naturelle de toutes les représentations du dieu; les hermoglyphes n'ont pu que suivre les transformations déjà adoptées par les statuaires. Dans le premier groupe rentrent les hermès les plus anciens, car à l'époque archaïque le dieu est toujours figuré avec la barbe abondante et taillée en pointe, en coin, comme disaient les Grecs (d'où l'épithète a~rivo7cbywv) '. C'est probablement vers le 1v° siècle, sous l'influence d'artistes amoureux, comme Praxitèle, des grâces molles de l'adolescence, qu'hermès apparut d'abord avec une figure plus jeune, sans le grave ornement de sa longue barbe symétriquement bouclée. La plupart des hermès où le .dieu est figuré ainsi rentrent dans le second groupe ; mais il serait téméraire de vouloir établir entre les deux séries une démarcation chronologique trop tranchée, car le type d'Hermès barbu n'a pas cessé d'exister concurremment avec le type d'Hermès imberbe. Lessoi.ad eurent une grande vogue, non pas seulement comme idoles populaires d'Hermès, mais aussi comme oeuvres d'art. C'est ce qui explique que cette forme de stèle surmontée d'une tête ait été donnée à plusieurs autres divinités. Pour Dionysos la chose s'explique d'elle-même, étant donné le caractère orgiastique du culte d'Hermès, étant donné aussi qu'à l'époque archaïque les têtes barbues d'Hermès et de Dionysos sont très semblables les unes aux autres, et que les deux dieux ne se distinguent plastiquement, lorsqu'ils se distinguent, que par les attributs. Notons d'ailleurs que Dionysos fut souvent représenté sous un aspect qui a quelque rapport de forme et sans doute aussi d'origine avec le pilier hermaïque, nous voulons parler de ces troncs d'arbres ou de ces poutres qu'on surmontait d'une tête ou d'un masque du dieu, que l'on recouvrait de vêtements et enguirlandait de pampres, et qui étaient l'objet de rustiques bacchanales [BAC vient qu'il est en somme assez difficile d'affirmer qu'on est en présence d'un Ilermhermès et non d'un hermès de Dionysos lorsque ne sont pas figurés les attributs distinctifs de l'un ou de l'autre dieu, surtout quand autour du simulacre des satyres, des ménades célèbrent l'orgie. Dans certaines peintures de vases, le caducée figuré sur un des flancs de l'hermès(fig. 38U 3, ou le pétase qui le coiffe' ne permettent pas la confusion. Ailleurs les pampres désignent clairement Dionysos (plus haut, fig. 3812, BACCIUS, p. 626, 627) 5 C'est aussi lui qu'il faut reconnaître sur un vase archaïque (fig. 3815) oit son buste est uni à un autre qui ne peut être que celui de Cora Plus naturellement encore que Dionysos on comprend qu'llerma phrodite ait eu ses hermès [IIERMAPIIRODITOS]. Beaucoup d'autres divi nités ont été représentées sous cette forme abrégée. Les écrivains latins ou grecs de l'époque romaine ont créé pour elles les noms de Ilermathéna de Ilermarès 8, de Herméros' (fig. 3816), de Hermhéraclès 10 [HERCULES, fig. 3802], Hermopan1l, IIermanubis 72, etc. On sait que Cicéron fit acheter en Grèce, par Atticus, des Ilermathénae destinées à sa bibliothèque, lui expliquant que, en tant qu'hermès, ces oeuvres d'art étaient partout à leur place, et que, en tant qu'Athénae, elles s'assortissaient très heureurement à sa bibliothèque. Mais c'est une rig.3816.-H°r question de savoir si ces noms composés venaient tout simplement de la forme de stèles surmontées de têtes, donnée aux divinités, ou de ce que le pilier quadrangulaire supportait deux têtes, dont l'une était toujours celle d'Hermès. Il est probable que l'un et l'autre type se rencontrait. Les hermès de Poseidon et de Zeus Téleios en Arcadie70, d'Aphrodite Ourania à Athènes", des dieux 'P, y7-yt à Mégalopolis 1J, avaient la forme d'hermès à une seule tête ; un hermès semblable d'Apollon a été retrouvé en Grèce ii. y a peu d'années" Mais les exemples de stèles hermaïques à plusieurs têtes ne manquent pas : on en connaît un assez grand nombre qui en ont deux". Il en existe qui représentent le même dieu soit avec deux têtes semblables, soit avec des visages différents 18. C'est ce que l'on pourrait appeler un hermès bicéphale, par analogie avec les hermès tricéphales et té tracéphales. Il y avait au Céramique d'Athènes un hermès de ce dernier type et Photius, qui le mentionne ainsi qu'Hésychius, parle aussi d'un hermès à trois têtes". Une épigramme de l'Anthologie concerne un hermès tricéphale oit étaient réunies les têtes de Pan, d'Iléraclès et d'Hermès 20. Les monuments de ce genre nous sont parvenus en assez grand nombre; tels sont par exemple, quelques Ilecateia [HÉCATE, fig. 3743] " et l'hermès dont une face est ici figurée (fig. 3817) conservé au Vatican, où Gerhard a voulu reconnaître l'assemblage de Dionysos-Liber, Cora-Libéra, l;rosCadmilos, la trinité de Samothrace [CABIRI] 22. Parmi ces hermès dérivés, pour ainsi dire, les lier draperie, et LIER -133 LHER mopans et les lermhéraclae nous semblent avoir eu la préférence. Les monuments qui représentent les premiers sont assez nombreux; le dieu s'y reconnaît aisément à ses cornes. ll est d'ordinaire ithyphallique, quelquefois aussi «xuAor 1.11 lais les Hermhéraclae sont beaucoup plus répandus encore; ce sont, d'ordinaire, des oeuvres de l'époque gréco-ro maine [HERCULES, fig. 3802]8. Les monuments de ce genre n'ont pas, d'ailleurs, gardé la pureté de la forme primitive. Au lieu de la tête seule, c'est tout le torse, avec les bras, qui surmonte la stèle. L'her mès devient ainsi une sorte de statue hybride, dont les jambes seules sont enfermées dans la gaine 3. Les artistes évitaient de cette ma nière l'uniformité, tout en restant fidèles aux traditions religieuses, car il leur était loisible de varier non pas seulement le type de la tête des divinités, mais les gestes des bras et les draperies. La fantaisie pouvait d'ailleurs se donner carrière sur ce thème comme sur bien d'autres; dans un grand nombre d'hermès non seulement la tête est remplacée par le torse entier, y compris même le ventre (voy. plus loin, fig. 3819), ou par le buste seul, mais la stèle même affecte des formes exceptionnelles, et par exemple se bombe en avant ou sur les côtés, se creuse en arrière, se décore de moulures, s'implante sur un ou plusieurs degrés`'. , D'ailleurs la forme d'hermès n'a pas tardé non plus à perdre dans certains cas sa signification symbolique. Sans parler du phallus, qui souvent disparaît, on connaît un très grand nombre de stèles où la tête de divinité est remplacée tout simplement par la tête de quelque personnage plus ou moins illustre ; le pilier devient le support d'un portrait authentique ou conventionnel. Il n'est pas de musée qui ne possède de ces monuments Quelquefois les deux tenons destinés à pendre des couronnes aux côtés des hermès primitifs sont aussi sculptés de part et d'autre des hermès portraits, et l'on en voit même où les couronnes sont figurées °. Un des meilleurs arguments pour affirmer que les Hermathénae, par exemple, étaient formées de deux têtes accolées par la nuque, c'est que beaucoup d'hermès portraits sont aussi des portraits doubles. Deux grands hommes, par exemple deux écrivains, rapprochés par leur génie ou simplement par leurs études, des poètes comme Archiloque et Homère, des philosophes comme Bias et Thalès, des historiens comme Hérodote et Thucydide, sont joints dans l'honneur d'un même monumentI.11 y a de plus des exemples d'hermès servant à représenter quelque type général quelconque, comme une prêtresse 8. Il est enfin une forme abrégée de la stèle hermaïque qui s'adapte aussi bien aux hermès des dieux qu'aux hermès portraits, et qui n'est, pour ainsi dire, qu'un hermès en raccourci. Nous voulons parler de ces bustes de divinités ou d'hommes qui sont composés seulement de la tête et d'un fragment de stèle quadrangulaire dont seule la face antérieure est modelée à l'instar d'une poitrine [t. II, fig. 2678]. Les tenons qui souvent sont fixés de part et d'autre ne laissent aucun doute sur l'origine de ce type plastique. M. P. Bienkowski, qui a récemment étudié l'histoire de la formation et du développement du buste dans l'antiquité, a cru pouvoir démontrer que les bustes d'hommes ou de divinités n'étaient à l'origine que des hermès réduits et allégés, de façon à s'accommoder à la technique de marbre, et à devenir plus aisément transportables. Et cela serait exact non pas seulement des bustes-hermès, mais de tous les bustes, quelle que soit leur forme °. Parfois les copistes de statues antiques, ne voulant reproduire que la tête de leur modèle, ont adopté cette disposition ; c'est ainsi que nous sont parvenues, par exemple, deux têtes d'Herculanum, l'une, oeuvre de l'Athénien Apollonios, fils d'Archias, imitée du Doryphore, l'autre imitée de l'Amazone de Polyclète i0. Les Étrusques n'ont pas fait, à ce qu'il nous semble, grand usage des hermès. Le Cabinet de France possède une double tête en hermès de bronze, imitation d'un type grec 11; un petit hermès ithyphallique, gravé sur un miroir, entre deux bacchantes, et qui représente sans doute Dionysos, est visiblement aussi la reproduction d'un modèle grec ". Il en est vraisemblablement de même pour une figure singulière où Gerhard veut reconnaître un dieu du Soleil. C'est un pilier haut et mince, divisé en deux parties superposées. La partie supérieure figure un torse surmonté d'une tête et couvert d'un vêtement que simulent des plis; un bras s'étend à droite, portant une patère; une main, à gauche, sort de la gaine à hauteur de la taille, et porte un brille-parfums. La partie inférieure est toute simple; quelques stries transversales indiquent une le bout des pieds fait saillie tout au bas 13 (fig. 3818). Quant aux Romains, ils ont très facilement emprunté aux Grecs la forme de la stèle hermaïque, non seulement pour quelques-unes des divinités qui s'assimilèrent de bonne heure aux divinités helléniques, mais pour les dieux qui conservèrent leur individualité propre. Ainsi, les Hermhéraclae, nous l'avons dit, sont le plus souvent d'époque romaine, et on en a trouvé partout dans le HER -434 IIER monde romain; d'autre part les dieux termes, dieux proprement indigènes, sont figurés sous la forme d'hermès. Jupiter Terminalis était représenté ainsi, avec une tête très frisée et de la barbe. On a aussi voulu le reconnaître dans un hermès androgyne trouvé aux environs de Ravenne et portant une dédicace Jov(I), TER(MINALI) ; mais la dédicace ne suffit pas à établir le nom du dieu représenté Ce n'est plus Jupiter Terminalis, mais Silvanus, que représente un hermès avec l'inscription Silvano D. D. (fig. 3819) ; la couronne de pin qui ceint la tète ne peut laisser subsister aucun doute 2. Mais ce qui est plus spécialement romain, ce sont les simples ou doubles petits bustes en forme d'hermès que l'on rencontre si souvent dans les musées et qui sont précieux, parce vir à donner une idée des dieux latins populaires. En voici un (fig. 3820) qui porte réunies les deux têtes de Faunus et de Tulanus, la première couronnée de lierre, la seconde ailée et diadémée 3. Les musées d'Espagne semblent particulièrement riches en ce genre de petits hermès, curieux souvent par leur style archaïsant, mais tous inédits malheureusement, ou peu s'en faut. Sous l'Empire, la forme d'hermès, soit encore primitive, soit compliquée du torse et des bras, est devenue, à ce qu'il semble, tout à fait banale; les hermès arrivent à jouer une sorte de rôle architectural. Plusieurs bas-reliefs nous les montrent servant à accrocher les draperies dans l'intérieur des maisons'. Nous rappellerons aussi ces représentations du grand cirque de Rome, où, entre les portes des carceres, appuyés au mur comme les colosses à l'entrée de certains temples d'Égypte, on voit figurer des hermès «le choix de l'ornement s'explique ici par l'intérêt que le dieu portait aux jeux et aux exercices du corps), et d'autres plus légers (hermulae) 6 qui formaient les supports verticaux des barrières [CANCELLI, fig. 1069, 1070]. PIERRE PARIS. neur d'Hermès, considéré surtout comme le dieu des athlètes, le protecteur des gymnases. C'étaient essentiellement les fêtes de l'adolescence ; elles se célébraient dans les gymnases et les palestres, et elles étaient l'occasion de grandes réjouissances pour la jeunesse i. Les jeux consistaient en luttes gymniques, et, presque partout, la course aux flambeaux [LAMPADEDROMIA] était l'attrait principal de la fête. Les textes, qui mentionnent souvent les Hermaia, ne nous donnent pas de grands détails sur la nature et l'organisation de ces jeux qui paraissent pourtant avoir joué un rôle important dans la vie grecque. Es nous apprennent en tout cas que les fêtes d'Hermès étaient en honneur à travers tout le monde hellénique, et que souvent Héraklès y était associé à Hermès Les principales régions et villes où on célébrait annuellement les Hermaia étaient les suivantes : 1° En Attique, Salamine' où il n'y avait pas d'autre concours que la course du stade [cuRsus], et Athènes3 où la lampadédromie était le centre de la fête. C'était la fête des jeunes garçons, des 7caïlE;, des N.EtFxrta 4 ; une loi, citée par Eschine, ordonnait aux gymnasiarques des Hermaia d'en exclure les jeunes gens plus âgés : ,roûc év ra;x( 4 ; mais, au moins du temps de Platon, les vEav( lcot étaient autorisés à y prendre part avec les tsïlE;6. Nous savons mal, au moins pour Athènes, en quoi consistait la gymnasiarchie des Hermaia, dont les textes font mention, si c'était une liturgie, ou une véritable magistra 2° En Béotie, le centre du culte d'Hermès était Tanagre. Pausanias raconte qu'il était d'usage à Tanagre, chaque année, au moment des fêtes d'Hermès, vraisemblablement dans le mois Hermaios, que le plus bel éphèbe de la ville fit le tour des murs, portant un agneau sur les épaules 8. Le seul concours que les textes signalent est la course de chars 3. 3° En Achaïe, à Pellène, où les textes associent en général les Hermaia aux THÉOxENIA, non pas sans doute que les fêtes d'Apollon et d'Hermès fussent confondues, niais parce que les vainqueurs aux concours de l'une et l'autre fête recevaient une même récompense, à savoir une tunique d'honneur, 7),aï'v2v, yttimvaf0. 4° En Arcadie, à Phénée" et à Iiyllène ". 5° En Laconie, où on célébrait en blême temps les sacrifices et les jeux en l'honneur d'Iléraklès, des Dioscures et d'Hermès âyrévto; i3 6° A Argos, dans le mois Hermaios, les fêtes d'Her IIER -135IIER mès avaient lieu trente jours après celles d'Apollon 7° A Délos. Les inscriptions du gymnase de Délos 2 nous enseignent que là, comme ailleurs, l'éphébie était sous le patronage d'Hermès et d'Héraklès, et que les Hermaia étaient célébrées annuellement en grande pompe. Le seul concours dont les textes fassent mention est la lampadédromie; les 7:aï6o; seuls y prenaient part. Rien ne permet d'affirmer que les éphèbes aient eu des fêtes analogues. Nous avons des listes de ^aiâs; ayant exercé différentes fonctions aux llermaia; ce sont des chargés sans doute d'accomplir les sacrifices qui précédaient les jeux ; des agonothètes, qui pourvoyaient aux dépenses des prix ; des lampadarques, et des gymnasiarques; ceux-ci avaient pour fonction essentielle de fournir l'huile pour les concours gymniques. On pouvait être à la fois lampadarque et gymnasiarque. Le vainqueur consacrait sa torche à Hermès ou à Héraklès. S° A Téos, les Hermaia étaient les fêtes des vioc ; les Muses et Héraklès y étaient associés à Hermès [IIERAKLEIA]. Les jeux consistaient en concours gymniques et musicaux, avec lampadédromie, tir à l'arc et au javelot ". 9° A Pergame 5. 10° En Chersonèse de Thrace, à Sestos 5, en l'honneur d'Héraklès et d'Hermès yolvto;, protecteurs des gymnases. Les jeux, qui se célébraient au mois Hyperberétaios, comprenaient différentes variétés de courses : ôi4to;, µxxpb; ôsdu.o;, ôtaôpouai et des concours de caractère militaire : i ?oua~ia, To;sïat, xovTtri.oi. Les récompenses consistaient, d'une part en argent, OÉti.rTs, d'autre part en armes d'honneur, a),a i'7c(criu.7., Les 7:a1ôs;, les U?gigot et les vioc prenaient part aux concours. 11° A Hermaion, sur le Bosphore : lampadédromie en l'honneur d'Hermès et d'Iléraklès7. 12° A Odessos (Varna) 3. II. A Kydonia, en Crète, les Hermaia avaient un caractère différent ; ce n'était plus une fête éphébique, mais une fête populaire, que les maîtres offraient à leurs paysans et à leurs esclaves; pendant les jours de fêtes, les esclaves jouaient le rôle des maîtres 3. Louas Cotivc.