Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article HIPPODROMOS

IIIPPODROIIIOS (`I7ttdipoi.os). Hippodrome, carrière pour la course des chars et des chevaux. logique nous fournit un exemple de ce qu'on appelle l'hippodrome simple, celui dans lequel on va d'un point à un autre, en droite ligne et sans revenir au point de départ. D'après Diodore ', la célèbre course qui devait décider du mariage d'Hippodamie et du sort de Péloponnèse, et qui fut courue par le père de la jeune fille, Oenomaos, et par son prétendant Pélops, commença à Pise pour finir à l'isthme de Corinthe, près de l'autel de Poseidon. C'est Oenomaos qui l'avait ainsi réglé, et il se tua quand il vit Pélops sur le point d'arriver à l'autel. Si cet autel avait fait office de ;nela, autour de laquelle les concurrents devaient tourner pour revenir au point de départ, si les deux adversaires, qui se suivaient de très près, avaient eu encore la moitié de la course à faire, Oenomaos n'aurait pas désespéré si tôt et ne se serait pas tué. Cet hippodrome simple, sans avoir jamais eu naturellement la longueur fabuleuse de celui d'Oenomaos, a dû certainement exister; on peut même admettre que tel a été le champ de courses primitif. Xénophon rapporte que le roi de Perse s'exerçait avec les grands de sa cour sur un hippodrome de ce genre, qui avait une longueur de cinq stades2. Mais cet hippodrome simple avait le défaut d'être trop long; il demandait trop de place, ce qui le rendait toujours plus difficile à établir; enfin, par ce même défaut d'être trop long, il dérobait aux spectateurs un des deux moments les plus intéressants de la course, ou le départ, ou l'arrivée. De bonne heure, cet hippodrome simple dut être abandonné et remplacé par l'hippodrome double. C'est dans Homère que nous trouvons, pour la première fois le mot hippodrome, ainsi que la description la plus ancienne d'un champ de courses. Le chant XXIII de l'Iliade, les 'Ana Ittl IIar1dxa ?, est consacré, comme son titre l'indique, au récit des jeux célébrés à l'occasion des funérailles de Patrocle. Dans ce récit, les jeux équestres sont les premiers, non seulement par le rang, mais encore par l'importance; c'est l'épisode le plus long et le plus beau de ce chant; à elle seule la description de la course des chars remplit deux fois plus de vers que la description des sept autres concours'. Cette course présente quelques particularités qu'il est bon de noter. Il ya cinq concurrents : Eumélos, Diomède, Ménélas, Antilochos, Mérionès; ces concurrents courent eux-mêmes et 25 LIIP -9 9 HIP avec les chars attelés de deux chevaux qui leur servent dans les combats. Quant à l'hippodrome, il consiste simplement en une grande plaine, à un point de laquelle on a marqué une borne; les chars doivent tourner cette borne et revenir au point de départ; Achille la montre au loin, dans la plaine unie ; il place près d'elle Phénix en observation, pour surveiller les concurrents et dire s'ils ont bien rempli les conditions du concours'. Cet hippodrome s'étend de la mer vers les remparts sur une longueur de cinq stades; c'est assez peu, si l'on pense que les Grecs restés au point de départ n'embrassent pas de leur regard tout le champ de course' ; ils n'ont vu ni Eumélos tomber, ni les concurrents tourner la borne. La course comprend donc l'aller et le retour; c'est ce que les Grecs appelaient, pour les courses à pied dans le stade, un diaulos. Nous avons donc ici un hippodrome double, avec deux pistes parallèles, rattachées l'une à l'autre par un court circuit autour d'une borne. Cette borne est décrite par Nestor dans les recommandations qu'il adresse à son filsAntilochos : « Un bois desséché s'élève d'une coudée sur le sol.; c'est le tronc d'un chêne ou d'un pin; la pluie ne peut le pourrir. Deux pierres blanches sont appuyées de chaque côté, à l'endroit où les deux pistes se rejoignent' ; à droite et à gauche s'étend l'hippodrome aplani. C'est le tombeau d'un homme mort autrefois, ou bien une borne faite par les anciens hommes; et maintenant le divin Achille, aux pieds légers, l'a donnée comme terme. Quand tu l'auras atteinte, pousse tout auprès les chevaux et le char; toimême, sur ton char bien construit, penche-toi à gauche des deux chevaux; excite le cheval de droite du fouet et de la voix, lâche-lui les rênes. Que le cheval de gauche effleure la borne, de façon que le moyeu de la roue semble monter sur le sommet de la borne ; mais gardetoi de la toucher, de peur que tu ne blesses les chevaux et que tu brises le char, ce qui ferait la joie des autres et ta propre honte. Enfin, ami, sois sage et prudent ; car si tu es le premier à franchir la borne, il n'est pas possible qu'on te dépasse désormais. » Nous avons là, au milieu de ces conseils que Nestor donne à son fils, une description animée et poétique d'un des moments les plus dramatiques de la course. Franchir la borne devint plus tard, nous le verrons, l'opération la plus importante et la plus difficile ; il fallait serrer cette borne d'aussi près que possible, l'effleurer même sans la toucher. La difficulté consistait à faire le plus rapidement possible un circuit le plus court possible autour d'un point. Mais cette difficulté existait-elle véritablement pour les chars à deux chevaux de l'époque homérique, nous voulons dire une difficulté capable d'entratner fréquernment des catastrophes, comme ce fut le cas plus tard, lorsqu'on courait avec des chars à quatre chevaux? Cela ne semble pas probable. D'ailleurs, sauf ce passage du discours de Nestor, il n'est pas question de ces difficultés dans la longue description qui suit ; la course n'est qu'un concours de vitesse; il n'y a pas, à un endroit quelconque, un obstacle ou plutôt un passage difficile à franchir. Enfin, ces recommandations de Nestor à son fils au sujet de cette borne, la description des dangers qu'elle présente ne peuvent être, au point de vue littéraire, qu'une préparation à une description plus animée et plus pathétique, la description du danger réel, les concurrents arrivant à ce passage redoutable, le franchissant ou venant y briser leur char. Mats c'est précisément cette description qui manque; de toutes les parties de son récit, le poète a négligé celle qui est la plus dramatique, celle que l'on attend avec le plus d'impatience. Toutes ces raisons, jointes à d'autres qu'il ne convient pas de rappeler ici s, nous font considérer comme une addition postérieure le discours de Nestor ; nous ne croyons pas que, dans l'hippodrome homérique, la borne, placée à l'extrémité opposée au point de départ, présentât à franchir des difficultés et des dangers sérieux'. Nous avons dit qu'il y avait cinq concurrents. Ils tirent au sort les places qu'ils doivent occuper au départ. Se mettaient-ils les uns à côté des autres en ligne droite? Cette disposition aurait donné l'avantage aux concurrents placés à gauche; ils auraient eu moins de chemin à faire pour arriver à la borne. Certains critiques de l'antiquité ont prétendu que les concurrents étaient placés en file, aupye, v, x c la g0os, de telle sorte que, pour le spectateur qui les regardait de front, le premier, à droite, était seul visible et cachait tous les autres'. Une telle disposition aurait été trop favorable aux concurrents placés à droite. Des savants modernes ont pensé que les concurrents sont sur une ligne formant un arc de cercle, décrit par un rayon égal à la distance comprise entre le point de départ et la bornes. La composition du mot 1.1E7as'rotzt, dont se sert Homère (v. 358), peut permettre cette explication ; mais ce même mot se trouve employé au vers 757, dans le récit de la course à pied, et là il ne peut avoir qu'un sens : « placé à côté ». Il faudrait donc, comme le veut M. Pollack, considérer ce vers 757 comme interpolé. Ce qui est sûr, c'est que certaines places devaient être meilleures que d'autres; sans cela on n'aurait pas tiré au sort les places que chacun des concurrents doit occuper 10. Ajoutons enfin que déjà l'on ne se fait pas faute d'employer la ruse pour nuire à un rival ; c'est ainsi qu'agit Antilochos contre Ménélas" ; dans ce cas, lorsqu'un des concurrents se croyait lésé par la fraude d'un autre, il pouvait l'obliger à jurer solennellement qu'il s'était conduit loyalement Ainsi l'hippodrome de l'époque homérique est un hippodrome double à deux pistes, l'une pour aller, l'autre pour revenir; les deux pistes se rejoignent, en faisant un léger circuit, derrière un objet élevé, visible de loin et qui fait l'office de borne, sans que cette borne offre aucun danger particulier à courir. Il n'y a pas de borne au point de départ, parce que la course ne comprend qu'un tour ; quand les chars sont revenus au point de départ, ils s'arrêtent ; la course est finie. Le sol de l'hippodrome est sablonneux, et il en sera ainsi pendant toute l'antiquité. Dans les descriptions des jeux équestres qui nous sont parvenues, nous voyons toujours les hommes, les chevaux, les chars enveloppés par un épais nuage de poussière". Les termes pour désigner le champ de HIP 195 HIP course, sont : 17zadSpolt.oç, une fois (v. 330), et dans un passage suspect; Spoll.oç, une fois (v. 321), passage encore suspect (aux v, 373, 375, 526, ce mot désigne la course de chevaux); aet., qui est le mot le plus usité (v. 330, 393, 419, 421, 424, 427). Dans l'Iliade les jeux ne sont célébrés que dans une seule circonstance, les funérailles d'un homme riche et puissant. Achille, qui en fit de si belles à son ami Patrocle, reçut des honneurs semblables quand il fut tué par Pâris; Agamemnon, qui raconte les grands jeux institués alors par la déesse Thétis, ajoute que c'était l'usage d'honorer ainsi les rois à leur mort' ; Nestor rappelle, dans un autre passage 2, qu'il a obtenu des prix aux jeux par lesquels les Épéens honorèrent le puissant Amaryncée à sa mort. D'après Pausanias 3, les jeux funèbres Ies plus anciens furent célébrés en l'honneur d'Azan, fils d'Arcas, l'ancêtre éponyme des Arcadiens; on n'était pas d'accord sur la composition de ces jeux ; un point seul était sûr, c'est qu'ils avaient compris une course de chars. Minos aussi institua des jeux funèbres en l'honneur de son fils Androgée Les jeux néméens et les jeux isthmiques étaient considérés comme des jeux funèbres 6 ; il en était de même des jeux olympiques et des jeux pythiques Cet usage persista encore dans l'époque historique ; il nous suffira de rappeler les jeux institués à Amphipolis en l'honneur de Brasidas 7,; et ceux qu'Alexandre fit célébrer avec tant de pompe en l'honneur d'Héphestion 8. Il faut encore observer qu'une idée, qui plus tard sera répandue dans toute la Grèce, a déjà pris naissance à l'époque homérique; c'est que cette institution des jeux est un des caractères particuliers de la civilisation grecque ; les Barbares ne les connaissent pas. Sans doute, cette idée n'est pas formulée expressément dans les deux poèmes; mais jamais ils ne font mention de pareils jeux chez les Troyens ou chez les peuples qui leur sont alliés, quoique bien des occasions se soient présentées ofi des fêtes de ce genre pouvaient être célébrées, par exemple les funérailles d'Hector, de Memnon, chez Homère ; les funérailles de Pâris et de Penthésilée, chez les Cycliques°. Cependant, déjà dans l'Odyssée et chez les Cycliques, les jeux n'ont pas exclusivement lieu à l'occasion des funérailles ; ils peuvent aussi être célébrés pour charmer et honorer un hôte qu'on aime, comme le fait, par exemple, Alcinoüs pour Ulysse 10 ; ils le sont plus souvent encore par un prince puissant qui veut trouver pour sa fille un époux digne d'elle; le meilleur moyen pour cela est d'instituer un concours; la jeune fille sera le prix du vainqueur. C'est ainsi que la mythologie raconte le mariage de Marpessa", celui d'Hippodamie avec Pélops, mariage célèbre dans l'histoire des jeux équestres" Cette pratique se constate encore à l'époque historique. Clisthène, le tyran de Sycione, trouva ainsi pour sa fille Agariste un mari dans l'Athénien Mégaclès, de la famille des Alcméonides, famille que ce mariage plaça parmi les premières de la Grèce S3. Cette description des jeux par le poète de l'Iliade fut imitée souvent dans l'antiquité. Nous parlerons plus loin de la plus belle de ces imitations, celle qui se trouve dans l'Électre de Sophocle. Nous voulons à présent relever quelques détails particuliers que deux poètes épiques de l'époque postérieure, Nonnus et Quintus de Smyrne, ont insérés dans leur description. Ces deux poètes imitent Homère; mais ils appartiennent l'un et l'autre au Ive et au ve siècle ap. J.-C. ; venus après un si long intervalle de temps, ils doivent donc présenter des différences avec le poète qu'ils imitent. Dans Nonnust, les jeux funèbres sont institués par Dionysos en l'honneur d'Opheltas. L'hippodrome a deux bornes, l'une intérieure, l'autre extérieure; les chars sont attelés de deux chevaux, sauf celui de Phaunus, qui est un quadrige 15. On ne peut dire comment sont placés les concurrents au départ ; le mot aotxeiS6v, dont se sert Nonnus(v. 237), n'est pas assez précis. Dans Quintus de Smyrne 16, c'est la déesse Thétis qui célèbre par des jeux les funérailles de son fils Achille ; les jeux équestres, qui ouvraient la fête dans l'Iliade et dans Nonnus, sont cette fois les derniers; enfin ils comprennent, non plus seulement des courses de chars, mais des courses au cheval monté. Pour cette dernière innovation, peut-être Quintus a-t-il imité un poète cyclique, probablement Arctinus, qui parait avoir été le premier épique qui ait décrit des combats de guerriers montés sur des chevaux, quand il a chanté les guerres des Grecs contre les Amazones 17. ÉPOQUE HISTORIQUE. Si nous comparons l'hippodrome homérique à l'hippodrome de l'époque historique, nous voyons que celui-ci diffère en somme assez peu de celui-là. Il ne consiste guère, lui aussi, qu'en une plaine unie, un champ ouvert dans lequel il suffit de planter deux bornes pour le transformer en hippodrome. Dans l'intervalle d'une fête à l'autre, il peut être loué comme terrain de pâture18. Une seule condition paraît nécessaire, c'est qu'il y ait une source dans le voisinage de ce champ. C'est aussi peu que possible un édifice. 11 n'y a aucune construction disposée pour recevoir les spectateurs; ils se placent le long de la piste, surtout au voisinage d'une des deux bornes; assez souvent l'hippodrome s'appuie sur une légère hauteur ou sur un remblai qui offre un lieu bien disposé pour voir 19. Ce qui distingue surtout le nouvel hippodrome, c'est qu'il a deux bornes, l'une intérieure, au point de départ, l'autre extérieure, à l'extrémité opposée. C'est donc aussi un hippodrome double, à deux pistes, mais avec cette différence, que les deux pistes se rejoignent aussi autour de la borne intérieure, tandis que dans l'hippodrome homérique, elles ne se rejoignaient qu'autour de la borne extérieure. On pourra donc tourner l'une après l'autre la borne extérieure et la borne intérieure ; en un mot, la course pourra consister à faire plusieurs fois le tour de l'hippodrome. Cette disposition permettra de ménager le terrain, d'avoir des hippodromes moins grands. Elle permettra aussi de donner plus d'intérêt à la course. HIP 196 HIP En effet, ces deux bornes prendront dans les jeux équestres une importance capitale. Pour les tourner rapidement et sans danger, il faudra une habileté consommée: c'est là surtout que les cochers pourront le mieux montrer leur science et leur sang-froid. Le seul hippodrome grec qui soit encore conservé aujourd'hui, au moins en partie, se trouve sur le mont Lycée en Arcadie. II a été mentionné par Pausanias Il y a, dit cet auteur, sur le Lycée un temple de Pan, et autour un bois sacré, un hippodrome et au-devant un stade. Cet hippodrome a été dessiné et décrit par les savants français de l'expédition de Morée'. Il est orienté du nord au sud ; à l'extrémité nord se trouve un terrain uni qui a pu être le stade. De ce même côté, on remarque des constructions antiques composées de murs, partie en polygones irréguliers, sur d'autres parties construites par assises régulières, faites avec le plus grand soin, et probablement exécutées ensemble. L'hippodrome a environ 105 mètres de largeur sur 240 mètres de longueur. Cette dernière mesure peut être décomposée ainsi : 192m+48m un stade olympique plus un quart de ce stade. hippodrome d'Olympie. En somme, pour connaître dans les détails l'hippodrome grec, nous n'avons aujourd'hui guère plus d'informations que n'en avaient au siècle dernier Nie. Gedoyn et de La Barre, ou, au commencement de ce siècle, de Choiseul-Gouffier, Alexandre de Laborde, Visconti et God. Hermann. C'est presque exclusivement de l'hippodrome d'Olympie que tous ces savants se sont occupés, parce que c'est sur cet hippodrome que les auteurs anciens nous ont laissé le plus de renseignements; mais ces renseignements, si précieux qu'ils soient, n'en sont pas moins insuffisants et obscurs très souvent; aussi aucune des tentatives faites pour reconstituer le célèbre hippodrome n'est à l'abri de la critique. On a pu espérer un moment, quand les Allemands ont entrepris de fouiller le sol d'Olympie, que le problème serait résolu; mais les fouilles n'ont pas été poussées jusqu'à cette partie du territoire consacré à Zeus Olympien. Dans ces dernières années, divers savants ont encore abordé la solution du problème; l'hypothèse joue toujours un rôle trop grand dans ces tentatives. Tant que les fouilles ne nous auront pas mis en possession de quelque document positif, il faudra se résigner à ignorer bien des choses. L'hippodrome d'Olympie 3 était situé au sud-est de l'Altis, entre le Stade et l'Alphée; il était parallèle au stade et dirigé de l'ouest à l'est. « Du Stade, un chemin qui longeait la tribune des Hellanodices conduisait à l'hippodrome... On peut évaluer à 600 pieds la largeur du champ des courses hippiques, à 1200 pieds ou 2 stades la longueur de la piste proprement dite, à 4 stades la longueur totale de l'hippodrome. Au nord, l'hip podrome était limité par le talus méridional du stade, qui se profilait également en talus du côté de l'hippodrome. Plus loin, au bord de l'arène, s'étendait une colline, un contrefort du Kronios. On y apercevait le temple de Déméter Chamyne, élevé à l'endroit où s'engloutit le char de Hadès, et qui renferma longtemps les vieilles statues de Korê et de Déméter. Hérode Atticus trouva à ces statues bien piteuse mine et les remplaça par des sculptures en marbre pentélique 4. A l'ouest, l'hippodrome était annoncé par une vaste construction triangulaire appuyée au portique d'Agnaptos; de ce côté, il communiquait à l'Agora par deux chemins, l'un au nord, l'autre au sud du portique d'Agnaptos. Vers le sud, une chaussée plus longue que le talus opposé protégeait les champs de course et l'Altis contre les inondations de l'Alphée. A l'est, dans la direction de la colline de Pise, s'arrondissait un talus demi-circulaire percé d'un chemin par où arrivaient les chars ° ». Les mesures données ici pour l'hippodrome ne sont pas certaines. D'après Adler °, il y aurait, à l'endroit indiqué, place pour un champ de courses ayant 4 stades de longueur totale, soit 2 stades pour la distance entre les deux bornes. C'était là, d'après Pausanias', la longueur de l'hippodrome de Némée; on ne suppose pas que l'hippodrome d'Olympie fût moins grand. D'ailleurs, cette mesure de 4 stades paraît consacrée pour la course équestre, l'ï=n.os ipôi.os8. Mais, d'autre part, Pindare dit, à plusieurs reprises', que les chars tournaient douze fois la borne. Si l'on accepte tel quel ce témoignage, il en résulte que les chars, faisant douze fois le tour d'un hippodrome de 4 stades, fourniraient une course de 48 stades ou de 9228m,96 10. Certains savants ont accepté cette explication et ont cru qu'entre les deux bornes il y avait en effet une distance de 2 stades". D'autres, au contraire, se sont récriés contre la longueur d'une telle course et ont essayé diverses explications. On a supposé 12 que la distance entre les deux bornes n'était que d'un stade. Mais, comme il est difficile d'admettre que la largeur de l'hippodrome ait été inférieure à un stade, il s'en suivrait que l'hippodrome aurait été aussi large que long, ce qui n'est pas admissible. Une autre explication a été présentée par de La Barre13. Il pense que les chars ne faisaient en réalité que six tours; ils franchissaient bien douze fois la borne, mais six fois la borne intérieure et six fois la borne extérieure 14. La course serait alors de 24 stades, soit 4614m,18, ce qui n'a rien d'exagéré. Cette explication est acceptée par Wernicke". Nous avons vu que les côtés de l'hippodrome étaient formés au nord par une hauteur, au sud par une chaussée. Quelques savants ont pensé, au contraire, que la chaussée était au nord, la colline au sud f6. Cela paraît moins probable. Rien n'indique qu'il y ait eu sur les MP -'197IIIP deux talus des gradins ou des sièges pour les spectateurs; en tout cas, s'il y en a eu, c'est seulement à l'époque romaine'. Sur le talus circulaire, qui fermait l'hippodrome à l'est, pouvaient aussi se placer des spectateurs. C'est à l'ouest que se trouvait l'entrée d'honneur de l'hippodrome; elle était formée par un portique à colonnes, dit portique d'Agnaptos, du nom de celui qui l'avait fait construire. C'est par ce portique qu'entraient les Ilellanodices et les hôtes que l'on voulait honorer; c'est par là que sortaient les vainqueurs, avec leur cortège, pour se rendre dans l'Altis. Ce portique occupait-il tout le côté ouest? Nous ne pouvons l'affirmer2. Il n'est pas vraisemblable que les chevaux et les chars aient passé par ce beau portique; nous savons du reste par Pausanias 3 qu'il y avait une autre entrée, du côté du remblai et près de l'autel du Tarasippos. Cette entrée se trouverait donc sur le côté sud, à peu près en face de la borne extérieure. La construction la plus originale de l'hippodrome d'Olympie était l'édifice appelé ?-ECt; r v hrtwv. Pausanias nous en a laissé une description détaillée 5. Cette aphésis avait la forme d'une proue de vaisseau; l'éperon était tourné du côté du drome : la partie large, la base de la proue était contiguë au portique d'Agnaptos. Il faut observer que, dans un autre passages, Pausanias distingue les autels qui sont dans l'aphésis en deux classes : les trois premiers sont en plein air, iv u.tv 'rw ûaa:Bpi 'r-7,q âïécEwç; les autres se trouvaient donc sous un toit 7 ; il y avait donc, dans l'aphésis, deux parties : une, à ciel ouvert, qui était contiguë au portique ; l'autre, couverte, qui avait la forme d'une proue de vaisseau, et qu'on appelait l'embolon, l'éperon (fig. 3843). Les trois autels en plein air étaient ceux de Poseidon Hippios (N), d'Héra Ilippia (O), au milieu; celui des Dioscures (L), près de la colonne 8. A l'entrée de l'embolon étaient, d'un côté, l'autel d'Arès Ilippios (J), de l'autre, l'autel d'Athéna Hippia (K) ; dans l'intérieur même de l'embolon, Ies autels de la Bonne Fortune (G), de Pan (H), et d'Aphrodite (1), enfin au fond, i vioTx2w 'ro N.Geou, l'autel (F) des Nymphes Acmènes ou Nymphes qui président au moment décisif de la lutte °. Tout au sommet de l'éperon10, il y avait un dauphin en airain sur une colonne. Chaque côté de l'aphésis avait plus de 400 pieds de long. Des stalles y étaient construites; chacun des concurrents tirait au sort la stalle qu'il devait occuper; au-devant des chars ou des chevaux était tendue une corde. Un autel, en briques crues, enduit de chaux à l'extérieur, était élevé à chaque olympiade, tout au milieu de la proue. Un aigle d'airain était sur l'autel, les ailes largement déployées. Le magistrat préposé à la course faisait agir le mécanisme qui était dans l'autel ; ce mécanisme, mis en mouvement, faisait descendre le dauphin et monter l'aigle qui était alors vu par les spec tateurs. Il semble que ce mécanisme avait simplement pour objet d'avertir le public du commencement de la course; peut-être le signal du départ était-il donné, à Olympie comme à Delphes, par une trompette". On enlevait alors la corde devant les deux stalles qui, de chaque côté, étaient les dernières, qui se trouvaient les plus proches du portique d'Agnaptos; les chars, qui étaient dans ces deux stalles, partaient; quand ils arrivaient devant la seconde stalle, on enlevait de nouveau la corde; de chacune de ces deux stalles sortait un char qui courait à côté du premier; on faisait de même pour la troisième, la quatrième stalle et ainsi de suite, jusqu'à ce qu'on Mt arrivé aux deux stalles qui étaient tout à fait au sommet de l'éperon. De cette façon, tous les chars arrivaient en ligne et en pleine course devant l'éperon. C'est à partir de ce moment que pouvaient se montrer la science des cochers et la rapidité des chevaux. Chaque côté de l'aphésis a plus de 400 pieds de long. Nous savons que, à Delphes, quarante chars ont été mis en ligne pour une course; on doit admettre qu'on pouvait en faire autant à Olympie, tout en reconnaissant qu'un tel nombre de chars n'a pu être atteint que par exception 12. Si donc il y avait vingt stalles sur chaque côté, ces stalles devaient avoir 20 pieds sur leur face oblique et environ 10 à 12 pieds sur la face parallèle àla base de la proue; cela donne pour chaque char de 3 mètres à 3m,50 ce qui est bien suffisant, si l'on compte 0`u,-15 par cheval. La description de l'aphésis par Pausanias est en somme assez claire ; nous voyons bien comment fonctionnait l'appareil ; ce que nous comprenons moins bien, c'est à quoi il servait. Pausanias ne dit qu'une chose, c'est que l'aphésis avait pour objet de permettre des départs successifs, de telle sorte que tous les chars en pleine course se présentaient en ligne près de l'embolon13. On se demande alors s'il n'était pas plus simple de mettre la ligne du départ près l'embolon 1 . M. E. Pollack, qui a étudié avec le plus grand soin cette question, pense que tous les concurrents, se dirigeant vers la borne située à leur gauche, tendaient à incliner sensiblement de ce côté ; qu'un des objets de l'aphésis était d'éviter cette poussée vers la gauche qui aurait pu devenir dangereuse. ➢lais nous ne voyons pas pourquoi cette poussée ne se serait pasproduite quand les chars se trouvaient en ligne devant l'embolon ; est-ce parce qu'ils étaient en pleine course? Ce n'est certes pas cela qui aurait empêché la poussée. Supposons quarante chars en ligne droite, soit cent soixante chevaux, ce qui donne un front de 120 mètres; il est certain que les concurrents placés à l'extrême droite auront un désavantage marqué ; il leur faudra faire, pour arriver à la borne, sensiblement plus de chemin que les concurrents placés à gauche.lll.Pollack a consacré de longues pages à montrer que le créateur de l'aphésis s'était ingénié à trouver les plus minutieuses combinaisons pour ( '''\:\ n HIP 198 IIIP que les chances fussent rendues égales entre tous les concurrents. II suppose que l'aphésis, au lieu d'être tournée vers la droite, comme on l'avait cru jusqu'ici, était tournée vers la gauche (fig. 3844), et que sa base AA' était formée par un arc de cercle décrit du point M' pris comme centre, avec un rayon égal à la distance de ce point M' au point A ; tous les points de la ligne AA' se trouvent donc à égale distance du point M' ou de la borne. De même, Ies chars quand ils arrivent sur les côtés de l'embolon, décrivent, non une ligne droite, mais une ligne courbe formée par un rayon égal à la distance de la borne M' au point B de l'embolon; seulement cette ligne BB' est plus courte que la ligne AA' de tout l'espace que prennent les parois des stalles; tous les points de cette seconde ligne BB' sont donc encore à égale distance de la borne. Enfin, à la hauteur de la borne M, les chars décrivent une longue ligne MD plus courte que la ligne BB' de toute la largeur de l'embolon, et dont tous les points sont encore à égale distance de la borne M''. Le défaut capital de cette explication c'est qu'elle ne vise qu'un seul cas, celui où les quarante stalles de l'aphésis sont occupées. Or ce cas était sôrement l'exception; nous pouvons affirmer qu'on a vu rarement un si grand nombre de chars entrer dans l'arène. Le chiffre ordinaire était dix. Comment alors étaient placés les chars? Une seule disposition était possible : les stalles voisines de l'embolon étaient seules occupées, celles du fond étaient vides. Mais, même avec cette disposition, qui est la moins défavorable au système de M. Pollack, il s'ensuivrait que les chars de gauche, pouvant tout de suite prendre position près de la spina2, auraient eu sur les chars de droite un avantage marqué. Cette seule objection suffit pour ruiner tout le système. Sur cette question de l'aphésis, comme sur la plupart des questions relatives à l'antiquité, nous devons nous estimer heureux si nous pouvons saisir la vérité dans son ensemble, sans avoir l'ambition de tout expliquer. Examinons l'aphésis d'après la description de Pausanias. Ce qui nous frappe d'abord, c'est que les deux côtés de cette proue de vaisseau ont exactement la même disposition; ils doivent donc avoir le même objet. Cet objet, pour les chars qui sont placés sur le côté droit, est très clair. Ces chars, étant Ies plus éloignés de la borne qui se trouve sur leur gauche, tendront à incliner à gauche. Le signal du départ. est donné; la corde est enlevée devant la dernière stalle du fond; un char sort; le conducteur veut aller à gauche; il est arrêté d'abord par la paroi de la stalle supérieure; puis, quand il est arrivé devant cette stalle, par le char qui en sort; il en est de même pour le char de la seconde, de la troisième stalle, etc.; si bien que tous les chars placés sur le côté droit de la proue arrivent en ligne sur le côté droit de l'embolon. Il faut supposer que les choses se passent du côté gauche comme elles se passent du côté droit : les conducteurs veulent incliner sur un côté, mais ils sont arrêtés dans ce mouvement et obligés de s'avancer en ligne droite. Il est vrai que nous ne pouvons pas dire exactement pourquoi ils agissent ainsi. Un règlement obligeait-il les concurrents placés sur le flanc gauche de la proue à incliner vers la droite? Établissait-on, à chaque course, sur le côté gauche à partir de la dernière stalle occupée, une barrière mobile pour empêcher les chars d'aller à gauche ? Quelque explication que l'on accepte, il faut de toute façon admettre, comme le dit expressément Pausanias, qu'à un moment donné tous les chars arrivaient à l'embolon, non seulement en ligne, mais, pour ainsi dire en contact les uns avec les autres. Avec le système de M. Pollack, au contraire, si nous supposons une course courue par dix chars, quand ces chars arriveront à l'embolon, ils seront divisés en deux groupes cinq à droite de l'embolon, cinq à gauche de la spina ; et, comme des deux côtés de l'embolon, il y a place pour vingt chars, il se produira entre les deux groupes que nous supposons, un vide égal à l'espace qu'occuperaient quinze chars, ce qui serait très disgracieux aux yeux des spectateurs, et ce qui constituerait pour les concurrents placés près de la spina un avantage considérable sur ceux qui seraient placés à droite de l'embolon. Nous n'acceptons donc pas le système de M. Pollack; ce que nous serions tenté de retenir de ses explications, c'est que l'aphésis inclinait, non à droite, mais à gauche, et que les chars arrivés devant l'embolon devaient former une ligne courbe, un arc de cercle décrit avec un rayon égal à la distance de l'embolon à la borne extérieure; tous les points de cette courbe se trouvaient à égale distance de la borne, les chances étaient rendues plus égales entre les concurrents. Et encore ne pouvonsnous affirmer qu'il en ait été réellement ainsi. Nous ne trouvons chez les anciens rien qui nous autorise à dire qu'ils ont eu une préoccupation de ce genre'. Le seul témoignage que l'on puisse invoquer, c'est une disposition, peut-être accidentelle, du cirque de Maxence à Rome, une légère inclinaison de la spina et d'un des côtés [dutcos]. Supposons une dizaine de concurrents en ligne, c'était, nous l'avons vu, le cas le plus fréquent. Ces dix concurrents sont placés au milieu de la piste de droite, cinq de chaque côté de l'embolon; on ne voit pas qu'il y ait pour certains d'entre eux un avantage appréciable ; quand le nombre des chars était plus nombreux, le sort décidait; et pour les anciens c'était la voix des dieux, il fallait s'y soumettre. HIP 199 HIP Quel était donc l'objet de cette construction? Il y avait d'abord une raison pratique. On peut admettre que l'aphésis devait réduire le nombre des faux départs ; nous ne pensons pas cependant qu'elle ait pu les supprimer complètement. Il y avait ensuite, croyons-nous, un motif d'ordre esthétique. Ce ne devait pas être un spectacle ordinaire que ce départ si habilement ménagé des chars et des chevaux : du fond de l'aphésis sortent deux chars, l'un de la dernière stalle à droite, l'autre de la dernière stalle à gauche; ils se mettent en course; quand ils sont devant la seconde stalle, ils rencontrent chacun un second char, qui court à leur côté ; ils arrivent devant la troisième stalle, là encore un nouveau char entre en ligne; et ainsi ces deux rangées de chars s'allongent et se rapprochent graduellement jusqu'à ce qu'enfin elles se réunissent et ne forment plus qu'une seule et longue ligne de chars et de chevaux lancés en pleine course et qui se déploient de front devant l'enzbolon. Il y avait certainement là de quoi charmer les spectateurs, de quoi rendre célèbre dans toute la Grèce l'aphésis des chevaux à Olympie. Si une raison d'équité, si le souci de rendre les chances égales pour tous les concurrents, avait réglé certains détails dans la disposition de l'aphésis, nous pourrions affirmer que des dispositions semblables avaient été prises dans les autres villes où se célébraient des grands jeux. Or, à Olympie, l'aphésis est une construction d'un caractère exceptionnel, unique en son genre. A Delphes, à Athènes, à Corinthe, on pouvait accepter qu'il y eût à Olympie un monument d'un genre particulier, ayant sa beauté propre; chacune de ces villes pouvait offrir à l'admiration des étrangers des monuments ayant aussi leur genre propre de beauté; mais il nous semble que ni à Delphes, ni à Athènes, ni à Corinthe, ni dans tant d'autres villes où l'on faisait des dépenses si considérables pour les jeux, on ne se serait pas résigné facilement à paraître avoir un moindre souci de l'équité qu'à Olympie. Quoi qu'il en soit, cette construction fit la gloire de son inventeur, l'Athénien Cléoitas, fils d'Aristoclès; c'était un de ces sculpteurs qui s'occupaient aussi d'architecture. Sur la hase d'une de ses statues', placée sur l'Acropole d'Athènes, il avait fait graver une inscription où il rappelait avec fierté sa création de l'aphésis. Plus tard, un certain Aristide perfectionna l'appareil inventé par Cléoitas'. Jusqu'à ces dernières années on plaçait la date de la construction de l'aphésis vers le milieu du ve siècle. Pollack, à l'aide d'un rapprochement dont l'importance est peut-être exagérée, essaye de faire descendre cette date jusqu'au milieu du rue siècle '. II y avait enfin, dans l'hippodrome d'Olympie, un autel qui, dans l'imagination des anciens, était enveloppé d'une sorte de mystère ; c'était l'autel appelé b Tapx;tn7oc, celui qui trouble les chevaux. Il était de forme circulaire, et se trouvait placé près de la sortie ménagée dans la chaussée « Sans aucune cause évidente, dit Pausanias, quand les chevaux arrivent devant cet autel, ils sont pris de terreur; ils courent en désordre ,brisant les chars et blessant les conducteurs. Aussi ceux-ci font des sacrifices au Taraxippos et le prient de leur être favorables. » Les Grecs racontaient de nombreuses légendes à propos de cet autel. On croyait généralement que c'était un tombeau, et on nommait comme enterrés en cet endroit, ou bien OIénios, un autochthone, qui avait été passionné pour les chevaux, ou Daméon, compagnon d'Héraclès dans sa lutte contre Augias, ou bien Myrtile, le cocher infidèle d'Oenomaos, ou encore Oenomaos luimême, ou une de ses victimes, Alcathoos. Le Taraxippos, étant du côté de la chaussée, d'après le témoignage de Pausanias, se trouvait donc sur le côté méridional de l'hippodrome. Nous avons vu qu'il y avait des savants qui plaçaient la chaussée au nord. Pollack est de ce nombre : s'il place ainsi cette chaussée, c'est qu'il a aussi un système pour expliquer le mystère du Taraxippos. Les courses ont lieu de grand matin; le soleil est à l'est, assez bas sur l'horizon ; l'hippodrome étant orienté de l'ouest à l'est, les chevaux courent d'abord vers l'est; mais, arrivés à la borne, ils tournent autour d'elle et courent vers l'ouest ; leur ombre apparaît alors subitement devant eux, et d'autant plus allongée que le soleil est plus bas; c'est l'apparition brusque de cette ombre qui les trouble et les effraye. L'explication nous paraît vraiment trop simple 5. Nous avons peine à croire que les écuyers et les cochers grecs ne soient pas venus à bout d'une telle difficulté. On doit se rappeler que les concurrents s'exerçaient longtemps à l'avance à Olympie même, et, d'ailleurs, on doit bien penser que n'est pas seulement à Olympie que les chevaux ont pu être exposés à voir leur ombre courir devant eux. L'histoire d'Alexandre domptant Bucéphale, telle qu'elle est racontée par Plutarque montre que l'attention des Grecs était éveillée sur le danger auxquels étaient exposés les chevaux ombrageux; et les écuyers de profession, qui couraient à Olympie, devaient sûrement connaître l'art de se prémunir contre ces dangers. On peut supposer que le Taraxippos n'était pas bien éloigné de la borne ; peut-être ce voisinage nous fournit-il l'explication de cette crainte mystérieuse. C'est à propos de cet autel qu'on peut constater l'existence chez les Grecs de ces superstitions dont nous avons de si nombreux exemples chez les Romains au sujet des jeux du cirque7. Ainsi, après avoir cru que l'autel du Taraxippos était consacré à un héros ou à un dieu hostile aux chevaux, on finit par supposer' que la raison de ce trouble venait de ce qu'on avait enterré sous cet autel des objets dont l'action était funeste. Pour les gens raisonnables comme Pausanias, le Taraxippos n'était autre que Poséidon pios 9. Ce n'est pas seulement à Olympie que le Taraxippos était redouté, nous verrons qu'il l'était aussi à Delphes, à l'Isthme et à Némée. Les anciens ne pratiquaient pas, dans les courses de chevaux, les sauts de fossés et d'obstacles, comme c'est l'usage aujourd'hui ; le char ne se prêtait pas à de tels exercices. C'est un autre genre de difficulté qu'ils avaient imaginé pour fournir aux cochers l'occasion de montrer leur habileté. Cette difficulté consistait à tourner une Tépp.z, TÉpiusv.11 yen avait deux : la borne intérieure, près du point de départ; la borne extérieure, à l'extrémité opposée. La borne intérieure était à la fois au point de HIP 200 HIP départ et au point d'arrivée; c'est près d'elle que. siégeaient les Hellanodices, qui proclamaient le vainqueur'. C'est probablement pour cela qu'il y avait sur cette borne une statue en airain qui représentait Hippodamie, une bandelette à la main, s'apprêtant à couronner Pélops après sa victoire'. Cette borne est souvent figurée, dans les peintures de vases, sous la forme d'une colonne dorique ou ionique'. Sur quelques vases, cette colonne n'est pas fi xée dansla terre (fig. 3845), et quelquefois elle est renversée 4 ; on suppose qu'alors la colonne est mobile ; qu'ainsi elle ne présente aucun danger; probablement on avait, dans les manèges et dans les hippodromes, de ces colonnes mobiles pour permettre aux cochers de s'exercer, en toute sécurité, à opérer ce mouvement difficile. On peut tourner la borne de deux façons. La première consiste à commencer la conversion dès que la tète des chevaux arrive à la hauteur de la borne. Si, dans ce mouvement, on prend deux points, l'un à la tête du timon, l'autre au centre du char, ces deux points décriront deux cercles concentriques, dont l'un, le cercle décrit par le centre du char, est extérieur, et beaucoup plus grand que l'autre. On voit aussitôt le danger de ce mouvement : pendant que les chevaux font un très court circuit, le char doit, dans le même temps, en faire un très grand, et cela, rapidement, brusquement; les anciens savaient que de tels circuits sont très dangereux 6. Si, au contraire, on attend, pour opérer la conversion que les chevaux aient dépassé la borne, si on ne commence la conversion que lorsque le char est à la hauteur de la borne, ce sont les chevaux qui décriront le cercle extérieur ; et, comme ce cercle est relativement très grand, on peut, sans avoir à craindre pour le char les dangers que présente toujours un long circuit fait trop brusquement, on peut, disons-nous, laisser les chevaux continuer à courir à. toute vitesse; il suffit de modérer un peu ceux de gauche; la conversion se faisant à gauche, c'est la droite qui marche. C'était là le grand avantage de ce second mouvement.Les chevaux avaient plus de chemin à faire; mais, comme ils étaient lancés à fond de train, ils le faisaient très rapidement. Cependant ce mouvement présentait aussi un grand danger. Le char se trouve tout près de la borne, il l'effleure pendant toute la durée de la conversion; il suffit du moindre oubli, de la moindre négligence, d'une fausse manoeuvre, pour que le char heurte la borne et se brise, pour que le conducteur lui-même soit en danger. C'est ainsi que, dans l'Électre de Sophocle, le pédagogue raconte qu'Oreste, arrivé presque à la fin de la course, a lâché trop tôt la bride aux chevaux de gauche ; aussitôt le char heurte la borne, l'essieu casse, Oreste tombe enveloppé dans les courroies, est traîné dans l'arène par ses chevaux emportés et meurt d'une façon lamentable'. On sait qu'à Olympie le jeu le plus ancien était la course au stade'; pendant longtemps cette course forma à elle seule tout le concours ; en 724, dans la 14e Olympiade, on y ajouta le diaulos, ou course comprenant l'aller et le retour. La course des chars ne fut introduite dans la fête qu'en 680, dans l'Olympiade 24°; le Thébain Pagondas fut vainqueur'. Dans la 33' Olympiade, en648, eutlieu pour la première fois la course au cheval monté, i'77:11 Xé),riTt (fig. 38115)9; le Thessalien Crauxidas fut vainqueur. En 500 et en 496, on institua deux courses, l'une avec attelage de mulets, â7tfiv~, l'autre pour jument, x07nl, qui furent abolies en 444. Enfin les autres courses sont ajoutées sur le programme des jeux d'Olympie, dans l'ordre suivant : En 408, 01. 93, course pour char à deux chevaux en pleine croissance, uvw(it TE),E(a, vainqueur l'Éléen llvagoras. En 384, 01. 99, course pour quadrige attelé de poulains, apt,.a'rt ou c lyut 7cwatxw, vainqueur le Lacédémonien Eurybiadès '0. En 268, 01. 128, course pour char à deux poulains,' uvwP(i; 4Twatxn, Belistiché, femme macédonienne remporte le prix. En 256, 01. 131, course pour poulain monté, x€Xr,Tt Ttw),txw, vainqueur le Lycien Tlépolémos. Ainsi en 256, les jeux équestres à Olympie comprennent six courses réglementaires : Ce sont ces six courses qui constituent proprement l'itr'ov istatxç, non seulement à Olympie, à Delphes, à l'Isthme, à Némée, mais à Athènes, à Aphrodisie , en Béotie 11, partout enfin en Grèce où des jeux équestres sont célébrés. C'est à Olympie fut inauguré, quand on institua en 680 la course des chars; mais ce n'est pas toujours Olympie qui a eu l'initiative dans le développement que prit ce concours ; plus d'une fois le mouvement est parti de Delphes; et encore ne pou IIIP 201 11IP wons-nous pas assurer qu'à Olympie et à Delphes on n'a pas imité telle ville grecque; Athènes, par exemple, dont la fête était, depuis les temps les plus anciens, rehaussée par une hippodromie. A ces accroissements successifs de l')u v t7ssaol; à Olympie correspondent dos accroissements semblables la fête qui, jusqu'en 472, ne durait qu'un jour, finit par en prendre cinq Comment les cérémonies, les sacrifices, les processions, les jeux étaient-ils distribués entre ces cinq jours? On n'a pas encore pu l'établir sûrement pour toute la fêtez. Le premier jour avaient lieu de grands sacrifices d'inauguration, 7rooriXst9l. Ce même jour, ou plutôt le lendemain, les juges qui devaient examiner les enfants et les chevaux, prêtaient serinent, devant la statue de Zeus llorkios, dans le bouleutérion3, de juger selon la justice et de ne pas recevoir de présents. Après ce serment, ils examinaient les enfants et les chevaux ; cet examen ne portait pas sur les hommes faits et sur les chevaux en pleine croissance : les enfants pouvaient concourir avec les hommes faits s'ils étaient jugés assez forts, et les poulains avec les chevaux en pleine croissance'. C'est là tout ce que nous savons sur cette dokimasie des enfants et des chevaux à Olympie. Les concurrents aussi prêtaient serment de lutter loyalement. Peut-être aussi à ce moment tirait-on au sort les places, ou plutôt les stalles que les concurrents devaient occuper dans l'aphésis. A Delphes c'étaient les juges qui tiraient au sort et immédiatement avant la courses ; il en était peut-être de même à Olympie. C'est le quatrième jour qu'avaient lieu les courses de chars et de chevaux, l't77roioop.(a. Ce point est aujourd'hui parfaitement établi. Les courses commençaient de grand matin 6. Les concurrents entraient par l'entrée pratiquée dans la chaussée, au côté sud de l'hippodrome ; ils allaient se ranger dans une des stalles de l'aphésis. Les chars sont petits, portés sur des roues basses à quatre rayons [unaus]. Les quatre chevaux du quadrige sont attelés de front, deux de chaque côté du timon, dytot, jugales; deux en dehors, cctc dot, funales; chacun de ces quatre chevaux est aussi nommé Biao; ou «ç:c epoç, selon qu'il est à droite ou à gauche 11 n'y a qu'un cocher sur chaque char [cincus] ; il est debout; il tient les rênes de la main droite, de la main gauche un aiguillon, xivTrov, ou un fouet, i1ac: ; e. Le signal du départ était-il donné par l'aigle et le dauphin dont nous avons parlé à propos de l'aphésis? On ne peut l'affirmer. La trompette donnait le signal à Delphes; à Olympie, elle était aussi employée, mais il semble qu'elle ne servait qu'à avertir les concurrents sur le nombre de tours qu'il leur restait à faire°. Nous ne voyons pas mentionnés, dans les hippodromes grecs, ces dauphins ou ces oeufs qui dans les cirques romains, étaient placés sur des colonnes et traité cette question. 3 Paus. V, 24, 9,_4 Le Lacédémonien Lychnis, dont un des poulains avait été refusé, fait courir tout l'attelage avec les chevaux en pleine crois sance et est vainqueur; Paus. VI, 2, 2. 6 Soph. Bled. 709-710; cf. art. mucus, p. 1195. 6Soph. El. 699. -7Eurip.Iph. Aul. 220; Soph. Electr.722; Krause, Cyme. p. 561, n. 8. 8 Iliad. XXIII, 384, 387, 390, xéxx2xe et e4 -O paraissent identiques; cf. encore Soph. Elect. 716 et 737; Krause, Gymn. und Ag. p. 575, n.11.Cf. la note 6, p. 200, sur un autre détail du costume des cochers. -0 Voir dans Pausanias, VI, 13, 9, l'histoire de la cavale du Corinthien Pheidolas; son écuyer étant tombé aie commencement de la course, elle continua à courir seule, redoubla de vitesse quand elle entendit la trompette, arriva la première et se présenta devant les juges. 10 Pyth. V, 50. Ce nombre de chars parait bien extraordinaire; quarante chars ou cent soixante chevaux donneront un front de 120 mètres; et, comme tous V. qu'on enlevait au fur et à mesure qu'un tour de la course était fait [uraeus]. Il n'est pas question non plus, dans les hippodromes grecs, d'une spina; les deux côtés de la piste étaient probablement séparés par un mince talus, une palissade ou simplement une corde ; en tout cas, il n'y avait rien de comparable à cette spina des cirques romains, ornée de statues et d'oeuvres d'art de toutes sortes. Le nombre des concurrents n'était pas fixé; Pindaret0 dit qu'une fois à Delphes quarante chars descendirent dans l'arène ; mais Sophocle 11 ne fait courir que dix chars dans la course qu'il décrit dans son Electre. Les chars n'étaient attelés que de deux ou de quatre chevaux ; Néron seul descendit dans l'arène avec un char attelé de dix chevaux 12. Quand les concurrents avaient fait le nombre de tours réglementaires, ils se présentaient devant les Hellanodices, qui siégeaient près du point d'arrivée et qui proclamaient le vainqueur ; la course était finie par cette proclamation t3 L'hippodromie était le moment le plus brillant de la fête olympique. On a dit '4 que l'introduction des courses de chars dans les concours d'Olympie, avait été, au milieu du vile siècle, un triomphe de la réaction antidorienne ; dans bien des villes du Péloponnèse, il y avait encore des familles achéennes qui étaient riches et qui aimaient à faire étalage de leurs richesses. Pour entretenir pendant de longues années des attelages de chevaux et de mules et les dresser en vue des concours, il fallait une très grande fortune ; c'était là un luxe qui n'était ni dans le gottt ni à la portée des Doriens. Il y a certainement de l'exagération dans cette appréciation. Les Doriens ont de très bonne heure su et pu élever des chevaux pour les courses; et à Sparte, en particulier, les vainqueurs aux jeux équestres des grandes fêtes de la Grèce ont été peutêtre plus nombreux que dans aucune autre cité grecque. Ce qu'on ne peut contester cependant, c'est que l'introduction de l' .' v izwd; donna aux jeux d'Olympie un caractère aristocratique qu'ils n'avaient pas jusqu'alorsls. Les courses équestres se distinguent des concours de gymnastique et de musique par une différence essentielle. En effet, chez les anciens, et l'usage est le même chez les modernes, ce n'est pas celui qui a dirigé le cheval ou le char victorieux, ce n'est pas l'écuyer ou le cocher qui est proclamé vainqueur, ruais le propriétaire du cheval ou du char ; pour obtenir la victoire, il n'est pas nécessaire de descendre soi-même dans l'arène. Assurément dans cette foule de concurrents qui ont disputé le prix à Olympie, il s'en trouvera qui, aussi bons cochers qu'éleveurs habiles, tiendront à honneur de conduire euxmêmes les chevaux qu'ils ont dressés. Pindare félicite le Thébain Théodote, vainqueur aux jeux Isthmiques, de n'avoir pas confié son char à des mains étrangères is. Dans une vieille inscription de Laconie, un certain Damonon a fait inscrire fièrement, à ]a fin de la liste de ses ces chars sont rangés dans un seul des côtés de l'hippodrome, il s'ensuit que la largeur de l'hippodrome serait au moins de 240 mètres, ce qui parait exagéré. Ne peut-on pas admettre que, dans les jeux équestres, comme dans certains jeux gymniques, la même course pouvait être courue plusieurs fois par des concurrents différents, quand ces concurrents étaient trop nombreux. Supposons, par exemple, que le nombre maximum des chars qui peuvent courir ensemble soit dix; s'il y a quarante concurrents, on fera quatre courses; un fait semblable parait bien attesté pour les jeux équestres des Panathénées (Corp, inscr. att. Il, 2r partie, n°966 11; cf. plus loin, notre discussion sur cette inscription, et pour Aphrodisie, C. iriser. gr. 2758, G D, 1 et 4). 11 j lect. v. 708. 12 Suet. Nero, 22; voir une pierre gravée représentant un char attelé de vingt chevaux, art. onces. 13 Voir le texte cité 26 victoires, la mention : «tire; zvto'(tov 1. Parmi ces cochers même, qui conduisent les chevaux d'un autre, il s'en trouve à qui on a élevé des statues', qui ont été chantés par les poètes, qui appartiennent aux plus grandes familles'. Mais ces statues, ce sont les propriétaires des chevaux ou des chars, qui, dans leur reconnaissance, les ont élevés à un serviteur qui leur a donné la victoire. Le nom du cocher n'est pas prononcé dans la proclamation des prix. La couronne d'olivier n'est plus la récompense de la force, de la valeur personnelle; il suffit maintenant d'être riche. On verra la victoire décernée à des tyrans, qui peut-être n'auraient pas osé se montrer dans la fête, ou, ce qui est encore plus grave, à des femmes, elles qui ne sont pas même admises à regarder les jeux ; et la première des femmes grecques qui a remporté une telle victoire, c'est une Lacédémonienne, la soeur du roi Agésilas, Cynisca `. Aux jeux gymniques, on pouvait avoir pour adversaires un cuisinier ou un marchand de poissons; à la course des chars, les concurrents étaient les plus riches citoyens de la Grèce, même des tyrans et des rois; c'était à qui étalerait le plus grand luxe ou ferait les plus grandes dépenses; tous ceux qui venaient disputer la victoire aux jeux équestres ne se contentaient pas d'avoir les plus beaux attelages ; ils arrivaient suivis d'un cortège nombreux et ils dépensaient des sommes extravagantes pour l'orner et lui donner le plus d'éclat. Parmi les victoires les plus brillantes, on citait celles du Lacédémonien Évagoras et celle de l'Athénien Cimon Coalémos, tous deux vainqueurs à la course des chars, durant trois Olympiades différentes, avec le même attelages. La victoire d'Alcibiade eut un immense retentissement dans toute la Grèce et fut regardée comme un grand événement politique' ; et lui-même se félicitait d'avoir rendu un service signalé à sa patrie par son luxe insensé qui avait montré à la Grèce étonnée qu'Athènes, après une longue et ruineuse guerre, était toujours la ville aux inépuisables ressources 8. Tout ce que nous savons des hippodromes des trois autres grands jeux de la Grèce, les jeux Pythiques, les jeux Isthmiques et les jeux Néméens, nous le devons à Pausanias, mais ici les notices du Périégète sont encore plus courtes et plus incomplètes. Delphes.« La route qui mène de Delphes à Cirra, le port de Delphes, est de 60 stades, dit. Pausanias 2. Quand on descend dans la plaine, on trouve l'Hippodrome; c'est là qu'aux Pythia on célèbre l'«yiov i,.7rtxdç. En parlant de l'Élide, nous avons parlé du Taraxippos d'Olympie; l'hippodrome dédié à Apollon semble, lui aussi, tourmenter les chevaux, car un ô«(t.wv y distribue à propos de toutes choses le bien et le mal; ce n'est pas cependant ni l'hippodrome lui-même, ni un héros, ni aucune autre cause qui inspire cette terreur aux chevaux ». Nous aurions encore quelques renseignements sur cet hippodrome dans une inscription de Phocidef0; malheureusement cette inscription est mutilée, et surtout 202 IIIP là où elle serait intéressante pour nous : l'hippodrome est mentionné deux fois (1. 36 et 42) sous le nom de ôpôuo; : dans la plaine où il se trouvait coulait une source, romnémons de mettre le drome en bon état avant la fête : s'ils ne le font pas, ils seront passibles d'une amende. L'ancienne fête d'Apollon était célébrée à Delphes tous les neuf ans; elle ne comprenait qu'un concours de musique et de poésie. Quand la grande fête Pythique fut instituée, du temps de Solon, on ajouta à cet âyiw ta.ouctxd; des jeux gymmiques et des jeux équestres. La façon dont on procéda est caractéristique. C'est dans l'Oympiade 48, 3 (586 av. J.-C.) que la fête fut célébrée d'après la nouvelle organisation 11. A cette époque il n'y avait que deux courses équestres à Olympie : celle des chars, xpli.urt, instituée en 680, et celle du cheval monté, r,Éaèrt, instituée en 648. Au contraire, l'âyiuv yuI.vtxdç était alors presque au complet; il n'y manquait que la course avec la lourde armure, b7aarriç ôpdu.oç, qui fut instituée en 520, et le 7t«yxp.'rt6v des enfants, qui ne fut exécuté pour la première fois que l'an 200. Quand on institue la grande fête Pythique et qu'on dresse le programme des jeux", on y comprend tout le spvtvbç â.'dv d'Olympie qui était presque complet; on y ajoute même deux nouveaux exercices pour les enfants, la course du dolichos et du diaulos; et, au contraire, de l'âyd v i7t ;xç qui n'était représenté que par deux jeux, on retranche le plus brillant, le concours des quadriges; on inaugure la fête par une seule course équestre, celle du cheval monté. On s'aperçut tout de suite, il est vrai, que l'on était allé trop loin ; dès la seconde fête, en 582, la course au quadrige fut inscrite sur le programme des jeux et Clisthène, le tyran de Sicyone, fut vainqueur. Ces deux courses constituèrent pendant près de deux siècles tout l'ây(lw iii't;xdç des jeux Pythiques. C'est seulement en 398 qu'on ajoute au programme la course des chars à deux chevaux, ;uvn d;; Exékestide, le Phocéen, fut vainqueur. Vingt ans plus tard, en 378, eut lieu pour la première fois la course des quadriges attelés de poulains, séyet tnX;xq') ; Orphondas le Thébain fut vainqueur. Enfin la course du poulain monté, x€ -rrt awatxw, fut courue pour la première fois en 338; la course du char attelé de deux poulains, 'uvsip(.ôt 7rw),txr, le fut en 314; Lycormas de Larisse, Ptolémée le Macédonien furent vainqueurs. Il faut observer que ces deux dernières courses furent courues pour la première fois à Olympie, l'une seulement en 256, l'autre en 268. Parmi les vainqueurs qui furent proclamés dans l'hippodrome de Delphes, ii suffira de citer Arcésilas, le tyran de Cyrène 13, Hiéron, tyran de Syracuse', l'Athénien Mégaclès, de la famille des Alcfnéonidesis, enfin le stratège Chabrias16 Sophocle a fait, dans son Électre, une description détaillée de la course des chars aux jeux Pythiques; nous avons cité d'assez nombreux passages de ce récit célèbre pour qu'il soit inutile d'y revenir encore. nappe IIIP 203 IIIP Ions seulement que, d'après le témoignage de ce poète, l'hippodromie venait après les jeux gymniques et le lendemain de ces jeux, au lever du soleil'. Némée. Les jeux Néméens 2 étaient célébrés sur le territoire d'Argos, dans un vallon qui se trouve entre Cléone etPhlionte. La tradition en attribuait l'institution à Adraste et aux sept chefs. Quand ils allaient assiéger Thèbes, le jeune Opheltès fut tué par un serpent; dans le malheur survenu à cet enfant, Amphiaraos vit un présage de sa propre mort et de celle de ses compagnons; les héros résolurent alors d'instituer des jeux funèbres, un cl'tr'ov E7rtrzYtoç, en l'honneur de l'enfant. Dans les jeux qu'ils célébrèrent, il y eut une course équestre dans laquelle Adraste fut vainqueur. Pausanias 3 parle de l'hippodrome de Némée à propos du Taraxippos d'Olympie; là, on comprenait très bien pourquoi les chevaux étaient subitement effrayés; à l'endroit où se trouvait la borne, il y avait une roche rouge toute luisante et qui faisait sur les chevaux le même effet que si l'on eût apporté subitement du feu près d'eux. Il est probable qu'à la fête Néméenne les jeux se développèrent comme dans les autres grandes fêtes de la Grèce ; les trois catégories de concours furent sûrement comprises dans le programme des jeux. La réorganisation ou peut-être plutôt la création de la fête est de l'Olympiade 51, 4 (573). Alcibiade fut un des vainqueurs proclamés dans l'hippodrome de Némée ; un tableau placé sur l'Acropole rappelait le souvenir de cette victoire Isthme. A l'Isthme c'était encore un ê'ç v T;iz-4ioç qu'on célébrait. Poseidon l'avait institué en l'honneur de Dlélicerte6. Lors de la première fête, Phaéton fut vainqueur au cheval monté, Nélée à la course des chars. D'après Pausanias, le Taraxippos de l'hippodrome de l'Isthme était Glaucos, fils de Sisyphe 7. C'est tout ce que nous savons de cet hippodrome. Hippodrome d'Athènes. Les Athéniens eurent très longtemps l'ambition, d'élever une de leurs grandes fêtes au rang où étaient arrivées les fêtes d'Olympie et de Delphes. Ce désir ne fut jamais accompli. Jamais ni les Eleusinies, ni les Dionysies, ni les Panathénées ne furent reconnues par les Grecs comme fêtes nationales; elles restèrent véritablement des fêtes locales, mais qui n'en furent pas moins parmi les plus belles et les plus célèbres de toute la Grèce. Chacune de ces trois grandes fêtes avait un genre d'attraction particulier: les Ileusinies avaient les mystères, les Dionysies avaient les représentations théâtrales, les Panathénées avaient la grande procession et l'hippodromie. Les Athéniens regardaient même cette hippodromie des Panathénées comme la plus ancienne de la Grèce : en effet, à Olympie, c'est l'zyô)v yui.vtxdç qui est le plus ancien; à Delphes, c'est l'âyôiv i,.ouctxdç; les jeux équestres, nous l'avons vu, ne furent ajoutés à chacune de ces deux fêtes qu'assez longtemps après qu'elles furent instituées; aux Panathénées, au contraire, c'est l'âyc_v àrinxdç qui était le plus ancien, il remontait jusqu'aux origines même de la fête'. Les jeux équestres des Panathénées étaient célébrés dans l'hippodrome d'Athènes ; nous en sommes sûrs pour le ne siècle 9; tout indique qu'il en était ainsi auparavant. Ce champ de courses était situé dans la localité appelée les Echélidai; d'après le témoignage d'un grammairien, il aurait été plus grand que tous les autres hippodromes grecs qui nous sont connus; il aurait eu huit stades 10. On l'a placé tantôt près des marais qui s'étendaient entre Athènes et le Pirée, tantôt àl'ouest du Pirée 71; le véritable emplacement est encore incertain. Nous avons, sur les jeux équestres des Panathénées, une série d'inscriptions qui nous permettent d'en suivre le développement pendant plus de deux siècles. Ces jeux, comme ceux de toutes les fêtes d'Athènes, comprenaient très probablement une partie fixe, une série d'exercices réglementaires qu'on peut considérer comme le programme régulier de la fête ; mais ce programme pouvait être, selon les circonstances, plus ou moins riche, plus ou moins varié; de là certaines différences dans nos inscriptions. En général, ce programme est toujours allé en augmentant. Il était réglé par un décret du peuple12. Nous possédons dans une inscription attique" probablement un décret de ce genre ; elle contient une liste des prix pour les concours des Panathénées, avec l'indication de la valeur de chacun d'eux. Cette inscription nous fait connaître en partie l'hippodromie des grandes Panathénées pour le commencement du Ive siècle. Elle mentionne deux sortes de concours. 1° Il y a d'abord cet ensemble de courses dont nous avons étudié le développement à Olympie et à Delphes; elles ont ceci de particulier qu'on y tient compte de l'âge du cheval qui doit courir. Il y a des courses avec le poulain, 17:tn 7tco),lxiw,,, et avec le cheval arrivé à sa pleine croissance, hutm TE),E(t) ; et, comme les courses peuvent se faire avec le cheval monté, avec le char à quatre chevaux, et avec le char à deux chevaux, le concours arrivé à son complet développement comprendra six courses. Ces six courses constituaient véritablement l'yc''ov t-.rtxd; de tous les jeux dont nous connaissons la composition; elles en étaient la partie la plus brillante, la plus importante. A Athènes, nous verrons des rois puissants y disputer les prix; c'est à ce concours que sont réservées, dans notre inscription, les récompenses les plus élevées. A Athènes, comme dans les autres Êtats grecs, il était ouvert aux concurrents sans différence de patrie : aussi le trouvons-nous souvent désigné sous la rubrique ix 7t vTtnv. L'inscription, étant mutilée, ne donne aujourd'hui que deux courses de ce concours : les TEÀE(W. On peut admettre cependant qu'au commencement du Ive siècle, l'yiov Ex 7r1vTO)v devait comprendre encore les deux courses i7r.77t;1 XDiTir; et ÿuvwpG; TE),E4, inaugurées à Olympie, l'une en 648, l'autre en 408. 2° Il y a enfin, en laissant de côté l'exercice du javelot à cheval, trois courses qui se distinguent des précédentes en ce que l'on y tient compte, non pas de l'âge, mais de HII' HIP la qualité du cheval. Ces courses sont : Y t't x),-qTt distinguait deux espèces différentes de chevaux : les uns plus brillants, plus souples, exécutant avec grâce des mouvements difficiles, ce sont les i--ot -ou-txol, les autres plus forts, plus solides, ayant davantage l'air martial, ce sont les i ts; to) its-r 1. Nous verrons que ces courses, courues au moins dès l'époque d'Aristophane, étaient réservées aux seulshabitants d'Athènes; elles sont désignées, dans quelques inscriptions, sous la rubrique ix Tô')v -oatTiiv. Il faut observer que l'inscription ne présente pas de lacunes sur ce point; nous avons donc au complet ce concours Ér. Tira, -o)r,'iv, tel qu'il était pratiqué au commencement du iv siècle. Nous avons dit que les prix les plus élevés étaient réservés aux courses de l'xy~ tv ix -zvroty. Deux de ces courses sont mentionnées : 1° -atntxep ESYEt ; premier prix : 40 amphores 2; deuxième prix : 6 amphores; 2° ~ESyo; â871?zyt(,; premier prix : 140 amphores ; deuxième prix : 40. Dans les concours ix Tcôv -o),rtôv, quatre courses sont indiquées : P avec le cheval de guerre, premier prix : 16 amphores ; deuxième prix : 4; 2° avec le char de guerre, premier prix : 30 amphores ; deuxième prix: ti ; 3° avec le E"uyoç Itou-txo'v, premier prix : 4 amphores ; second prix : 1; 40 jet du javelot à cheval, premier prix : u amphores; second prix : 1. Ce qui frappe le plus dans cette liste, c'est l'importance attribuée au concours EUyEt «ôrlpiyw. Il n'y a, dans l'inscription, des chiffres aussi élevés ni pour les jeux gymniques ni pour les jeux équestres. On est, en revanche, étonné de la modicité du prix pour le concours Eéyzt -ou-txcû. Nous ne pouvons pas dire si l'inscription comprenait, dans l'âyàty trtxôç, deux exercices qui étaient considérés comme nationaux par les Athéniens, les jeux de l'â-oUyTr,ç et de l'-rv(o7oç 3. Ce qui permet cette incertitude, c'est qu'une autre inscription qui donne le commencement de l'«yôov ittxç, ne mentionne pas ces jeux. Ils ont dû cependant faire partie de la fête. Peut-être doit-on supposer qu'ils étaient exécutés, non dans l'hippodromie, mais pendant la procession, par exemple sur l'agora. Cette opinion pourrait s'appuyer sur ce fait que le jeu de l'apobate se trouve représenté sur la frise de la cella du Parthénon ; et cette frise reproduit, non pas comme on l'a cru, les concours, mais la procession des Panathénées 5. Au commencement du lie siècle av. J.-C., nous constatons G que les jeux de l'apobate font partie de l'hippodromie; ils sont suivis de deux courses de char, un diaulos et un acampios; ces quatre courses sont réservées aux Athéniens. Les jeux équestres des Panathénées, si l'on ne considère que la nationalité des concurrents, comprennent donc alors trois sortes de concours : un premier concours ix -e),râty, un concours ix -ivre» un second concours ix Tfty -o),rôjv. Peu de temps après l'année à laquelle se rapporte ce catalogue (966 A), peut-être même l'année suivante (Catalogue 966 B), les jeux équestres des Panathénées ont eu un éclat extraordinaire; à l'zywv i'x -zvTwv, dont le chiffre normal de courses est alors de six, onze courses au moins sont indiquées; peut-être y en avait-il douze; on aurait donc donné deux fois les mêmes exercices; il y aurait donc eu un double âycùv i'x -svro v7. Plusieurs rois ont concouru et ont remporté des prix. Enfin, pour la première fois d'après nos catalogues, les jeux équestres sont célébrés à deux emplacements différents et durent deux jours. Quoique l'inscription soit très mutilée, nouss pouvons nous rendre compte de la façon dont on a procédé pour remplir ces deux journées. Le premier jour, les jeux sont célébrés clans un endroit que nous ne connaissons pas, mais qui était indiqué sur cette inscription, comme elle l'était dans l'inscription 968, où la copie de Peyssonel s'arrête, ligne 16, après les mots Ev -aie On peut supposer que cet endroit était le Stade, le Lycée, l'Académie 8. L'inscription 966 A nous a montré que les jeux équestres des Panathénées, si l'on tient compte de la nationalité des concurrents, comprenaient trois sortes de concours. On réserva pour la première journée le premier concours ix T(ov ro),v iv en le composant ainsi : d'abord les deux courses d'â-oôzr-r,ç et ;v(oyoç; deux courses de biges, un diaulos et un acampios; une course de quadrige, un diaulos; à ces cinq courses de chars, on ajouta trois courses au cheval monté. On prit la course °l-7:m zi),riT; -o),EurTŸl9 qui, dans l'inscription 963, se trouvait dans le groupe des courses avec les chars -oÂEutGT-ota et 70117:n 'A.; à cette course avec le cheval de bataille, on ajouta une course à l'aeampios, une autre au diaulos avec le cheval ordinaire. On constitua ainsi un groupe de trois courses qui pouvaient alors être courues par tous les citoyens athéniens, qui pouvaient porter la rubrique ix Tfw -o)rwv. Ces huit courses furent jugées suffisantes pour la première journée. Le second jour, les jeux eurent lieu à l'Hippodrome ; cette fois, l'indication de l'emplacement est donnée par l'inscription, ligne 28. A l'Hippodrome se fait le grand âywv ï'x 7:,'i sn qui, nous l'avons dit, a eu, cette année-là, une importance exceptionnelle; il est suivi de l'rty)v i=x 'r v -o),rmv avec les chars de guerre et de procession. L'inscription est trop mutilée en cet endroit pour donner matière à une discussion. L'inscription 968, ou inscription Peyssonel i°, nous montre, vingt-cinq ans après, les jeux équestres des Panathénées arrivés à leur plein développement. De toutes nos inscriptions concernant ces jeux, c'est la seule qui soit complète. Le développement a surtout porté sur les courses de la première journée. Jusqu'ici, comme nous HIP -205 -IIIP venons de le voir, il y avait ce jour-là, huit courses, cinq de chars, trois au cheval monté, toutes Ex tiéev G7:Ttôv. L'inscription 968 nous apprend qu'on porta à six le nombre des courses de chars : deux courses d'apobate ; un diaulos et un acampios pour le quadrige', un diaulos et un acampios pour la bige. Quant aux trois courses au cheval monté, on les attribua au corps des cavaliers athéniens. En agissant ainsi, on ne fit peut-être que donner une consécration légale à ce qui était l'usage ordinaire. En effet, des courses comme l'Yrra, .o)n trTf avaient surtout un caractère militaire. On institua deux mier groupe aux phylarques, le second aux cavaliers. On eut ainsi, pour le premier jour, douze courses : six lx second jour, ont lieu l'ây )v y, rzvr ov et le second y,liv ix TWv 7to),tTCÔV. Le premier de ces deux concours est complet avec ces six courses réglementaires. Quant à 1'. v x Te')v rontst-a, nous pouvons à présent voir comment il fut organisé ou plutôt modifié. Au commencement du lv° siècle (inscr. 965), cette partie des jeux ne comprenait que quatre courses; l'exercice du javelot à cheval fut supprimé, au moins à ce moment de la fête, à une époque que nous ne connaissons pas ; la course au cheval ro),Eu.teT-ii fut transférée parmi les jeux de la première journée; il ne restait donc plus que les courses avec le char de guerre et le char de procession. On conserva ces deux courses, on en ajouta même une troisième, la course ;uvo)pfôt 7M).EV.tcT-,?(z. Ces trois courses, que les Athéniens considéraient comme des exercices nationaux, restèrent la partie la plus brillante, la plus originale des concours réservés aux seuls habitants d'Athènes. On compléta ce concours en donnant une seconde fois les trois courses vtop(ôt âxzll.rtov qui étaient déjà sur le programme des jeux de la première journée. A ces six courses de chars, on ajouta une course au cheval monté, hntn ro)iucdN.on. Le concours ix Ttôv ro),tTâ)v comprend alors sept courses. Il en comprendra huit, peu d'années après (inscr. 969 A) ; la série des courses avec le char ordinaire est devenue complète par l'addition qu'on y a faite de la course EÛyEt âxip,rtov. Le concours ix Twv ro),trtov comprend donc alors huit courses ; et, comme l'â yt;w ix rxvrori en compte six, nous avons un total de quatorze courses pour les jeux de la première journée. L'inscription 969 A nous donne encore un renseignement important : les concours qui ont lieu à un endroit autre que l'Hippodrome, ceux que nous avons cru devoir appeler jeux de la première catégorie, ont été terminés cette année-là par une lampadodromie, qui a été très probablement courue par les cavaliers. Comme une course aux flambeaux ne peut être courue que le soir, quand la nuit est tombée, nous avons là une preuve certaine que les jeux duraient deux jours, et que, la première journée, ils avaient lieu, non de grand matin, comme c'était l'usage ordinaire, mais dans la seconde partie de la journée'. DEUXIÈME JOURNÉE (Dans l'Hippodrome). Ainsi, pour résumer cette discussion, les jeux équestres des Panathénées avaient lieu d'abord seulement à l'Hippodrome; ils ne prenaient alors qu'une journée ; au moins à partir des premières années du II° siècle, ils peuvent durer deux jours et se faire à deux endroits différents. Le premier jour, les jeux sont célébrés à un endroit que nous ne connaissons pas ; ils comprennent trois sortes de concours : 1° un concours ix ,r )v T.GÂLTbJV composé de deux jeux de lapobate et de quatre courses avec le char ordinaire ; 2° un concours composé de trois courses pour les phylarques; 3° un concours composé aussi de trois courses pour les cavaliers. Le second jour, les jeux ont lieu à l'Hippodrome ; ils comprennent le grand xywv ix r vT ov et l'yci)v ix TtJV roXrr v avec les chars de guerre et de procession. Ce qui constitue véritablement l'âyinv :rrtxdç des Panathénées, ce sont les jeux de la deuxième journée, ou pour s'exprimer d'une façon plus générale, de la deuxième catégorie; on les trouve toujours sur les catalogues, que la fête équestre dure deux jours, ou qu'elle ne dure qu'un jour; les jeux de la première catégorie manquent, au contraire, assez souvent. Si nous comparons l'hippodromie des Panathénées à l'hippodromie d'autres fêtes athéniennes, par exemple à celle des TBÈSÈIA 3 que nous connaissons aussi par des inscriptions, nous remarquons que, aux Théséia, il n'y a guère que des courses au cheval monté, tandis que, aux Panathénées, ce qui domine, ce sont les courses de chars. Seule l'hippodromie des Panathénées possède cet «ycôv ix 7txvTWV qui forme à. lui tout seul les jeux équestres à Olympie, à Delphes, et qui partout est la partie la plus brillante de la fête; en outre, dans l'hippodromie des Panathénées, les concours réservés aux citoyens athéniens comprennent toujours des courses avec les chars dé guerre et de procession, ce qui n'arrive que rarement dans les autres fêtes athéniennes. Ces deux concours, l'yiev i x rxvTCOV et l'xywv i x Ttûv oXvrG)v avec les chars de guerre et de procession, qui HIP 20G IIIP étaient toujours célébrés à l'Hippodrome, donnaient aux jeux équestres des Panathénées un caractère particulier. On peut supposer que, à l'origine, ou au moins au moment où Pisistrate réorganisa la fête, ces concours, avec les jeux de l'apobate, constituaient seuls les jeux équestres. En tous cas, les transformations que nos catalogues nous permettent de constater ont consisté en ce qu'on a ajouté à ces deux catégories de concours : 1° les courses avec le char simple, pour laquelle la distance est indiquée, 7aov; l° les courses 'tr. tp 7roaep.taTf,; en un mot, les courses qui constituent les jeux équestres d'autres fêtes comme les Théséia. Au moins à partir du ne siècle, l'â-ywv isstxdç des Panathénées peut donc comprendre une catégorie de concours qui lui est commune avec d'autres fêtes; de plus, il en comprend toujours une autre qui n'appartient qu'à lui seul, ce sont les concours qui ont lieu à l'Hippodrome. Aux Théséia, l'âywv t7777txoç n'est pas ouvert aux étrangers; il est réservé aux seuls citoyens athéniens. Les jeux gymniques, au contraire, aussi bien aux Panathénées qu'aux Théséia, sont des concours Éx s«vtov; aux Théséia, ce sont presque toujours des Athéniens qui sont vainqueurs; aux Panathénées, ce sont presque toujours des étrangers; quant à l'âyuv ix s«vTwv de l'hippodromie de cette dernière fête, nous ne trouvons, dans tous les catalogues que nous possédons, qu'un unique exemple d'une victoire remportée par un Athénien'. Les jeux des Théséia sont donc exclusivement athéniens; ceux des Panathénées sont, au contraire, devenus véritablement des jeux helléniques. Il semble cependant que les jeux équestres des Panathénées n'ont pris une telle importance qu'à une époque relativement récente. Au commencement du Ive siècle, les concours àx 7t«VTwv et ix Tti)v 7Z9),tT(JV de la deuxième catégorie, seule partie que nous connaissions des jeux équestres, ne comprennent que huit exercices ; vers l'an 168, ils en comprennent treize. En 191, l'yd)v isstxéç, que nous connaissons alors dans son ensemble, ne comptait que douze courses; en 168, il en compte vingtcinq. Ces renseignements fournis par les inscriptions sont confirmés par le témoignage des auteurs. Nous ne remarquons pas que, au v° et au Ive siècle, on se fasse gloire de victoires remportées aux jeux équestres des Panathénées. C'est surtout à Olympie, à Delphes, à l'Isthme, ou à Némée que veulent être couronnés les hommes qui, comme Alcibiade, cherchent à éblouir leurs contemporains C'est donc seulement après la grande époque d'Athènes que les jeux équestres des Panathénées sont enfin arrivés à ce haut rang, à cette renommée que les Athéniens ont tant ambitionnée pour eux. Parmi les vainqueurs qui ont été couronnés dans l'Hippodrome d'Athènes pour des victoires à l'âyd,v ix 7r .vTwv, nous pouvons citer le fils du roi Attale, Eumène', qui est luimême qualifié du titre de roi et ses trois frères Attale, Philétairos, Athénaios; Mastanabal, fils du roi de Numidie, Massinissa, et père du célèbre Jugurtha '; Ptolémée Philométor°, alors roi d'Égypte avec son frère Physcon; enfin Antiochus Eupator, vainqueur deux fois dans le même concours. La ligne il consigne une victoire remportée la première journée des courses par le roi d'Égypte Ptolémée à un concours ô:au),ov i lt.a.Tt, c'est à-dire à un concours réservé aux seuls citoyens d'Athènes; aussi est-ce en qualité d'Athénien que le roi a concouru; il est désigné, comme le sont les citoyens athéniens dans Athènes, par son nom, le nom de son père et celui de sa tribu; naturellement Ptolémée appartient à la tribu Ptolémaïs. En se rangeant ainsi au milieu des concurrents athéniens, le roi d'Égypte faisait une flatterie délicate au peuple d'Athènes. En dehors de l'â.ydni E7rstxéç, il y avait aux Panathénées un exercice de cavalerie qui faisait l'objet d'un concours, c'est l'âventriaa(a. Xénophon a décrit cet exercice à propos des revues de cavalerie passées par le Conseil des Cinq-Cents [EQUITES GRAECI]. Voici, en résumé, en quoi elle consistait : les dix escadrons de la cavalerie athénienne se divisent en deux troupes qui se chargent et se croisent, puis, après avoir fait plusieurs fois cette manoeuvre, se réunissent en phalange et s'avancent vers le Conseil. A l'époque de Xénophon, l'anthippasia ne paraît être qu'une manoeuvre ou une parade de la cavalerie athénienne ; au commencement du Itte siècle, elle était l'objet d'un concours à deux des grandes fêtes d'Athènes, les Panathénées et les Olympiéia7. Xénophon mentionne, comme emplacements où s'exécutait cette manoeuvre, le Lycée et surtout l'Hippodrome ; il fallait, en effet, à la cavalerie, pour opérer les mouvements qu'il décrit, un vaste champ de courses. Il est probable que, aux Panathénées et peut-être aux Olympiéia, c'est aussi àl'l-lippodrome qu'avait lieu ce concours. Nos catalogues ne le mentionnent pas, parce que, à l'exception du Catalogue 965 qui est d'une époque où l'anthippasia n'était pas encore un concours, ils donnent seulement la liste des prix individuels, des xOAa de l'âydv ïssixdç; la partie réservée aux prix collectifs, aux vtxz,Tilew., comme l'FUavôpia, l'EÛT z, l'Eios)(a, manque, et l'anthippasia est un prix collectif. A quel moment de la fête doit-on placer ce concours? U. Kiihler croit que c'est avant l'zyiov i7t7txéç ; ce serait donc après l'âydhv yuu,vtxd; ; mais nos catalogues ne mentionnent rien à cet endroit. Peut-être était-ce après l'~yâv isr. xdç. La question est incertaine. La fête des Panathénées n'est pas la seule fête athénienne dont l'éclat ait été relevé par des jeux équestres. Nons avons vu que, aux Olympiéia, il y avait une anthippasia; aux Théséia, il y avait un éytlly i7ratxdc, dont nous connaissons exactement la composition; il y en avait un aussi aux Éleusinies et nous savons à quelle époque il avait été institué"; c'est en 3`19/8. Peut-être avonsnous un fragment de la liste des prix de ce dernier concours dans le Catalogue 969 B ; ce fragment donne les prix du jeu de l'apobate et cette partie des concours qui comprend les courses avec les chars de guerre et de procession. Dans quel endroit ces diverses hippodromies étaient-elles exécutées? Pour l'anthippasia des Olympiéia, c'était peut-être l'Hippodrome. Pour l'âyd,v 17;rtxç des Théséia, au contraire, il semble que, puisque il est composé exclusivement des jeux que nous avons appelés de la première catégorie, cesjeux devaient être faits, comme ceux des Panathénées, au Stade, au Lycée, non àl'Hippodrome. Pour les Éleusinies, si le Catalogue 869 B se rapporte à cette fête, il faudrait plutôt penser à l'Hippodrome. r• 19, H1P 207 HIP L'hippodrome d'Athènes n'était pas, comme ceux d'Olympie, de Delphes, exclusivement réservé aux fêtes et aux jeux ; c'était aussi un champ d'exercices pour la cavalerie athénienne. Nous avons déjà vu qu'il servait pour l'anthippasia, qui était d'abord seulement une manoeuvre de la cavalerie. 11 servait souvent aussi pour les revues ou les dokimasies de la cavalerie. Chaque année, quand les hipparques nouvellement élus avaient constitué le corps de cavalerie, le Conseil des Cinq-Cents le passait en revue ; c'était une revue d'inspection, une sorte d'examen d'entrée [EQUITES, p. '761] ; mais il y avait aussi, dans le courant de l'année, des dokimasies qui n'étaient véritablement que des revues; une se passait à l'Hippodrome, une autre à l'Académie, ou au Lycée ou à Phalère'. Il semble que l'Hippodrome permettait de faire pour ces revues des manoeuvres particulières : a Quand la revue se fait à l'Hippodrome, dit Xénophon, il sera beau de disposer tout d'abord la troupe de front, de façon à remplir toute la largeur de l'Hippodrome et d'en faire retirer la foule 2. » hippodrome de Délos. La fête des Délia [DBLIA], célé brée dans Pile de Délos, peut être considérée comme une fête athénienne, au moins à partir de l'an 4126 av. J.-C. A cette époque, les Athéniens purifièrent Pile et célébrèrent pour la première fois la fête pentélérique Celte fête comprenait des jeux gymniques, équestres et musicaux. Dans l'ancienne fête délienne, il n'y avait pas de jeux équestres; l'hippodromie fut une création de l'an 4426 ; elle comprenait des courses de chevaux et de chars '. Une inscription nous apprend que, dans l'intervalle des courses, l'Hippodrome était loué comme terrain de pâture Hippodrome de Constantinople. Cet Hippodrome, b `Iaa6ôFouo;, est célèbre, non seulement par les jeux et les fêtes qu'on y célébra, mais encore par l'importance politique qu'il prit pendant une longue période de l'histoire de l'empire d'Orient. Cette importance de l'Hippodrome se manifesta, on peut dire, dès les premiers jours de la fondation de la ville ; elle était visible à la simple inspection des lieux. Lorsque Constantin entreprit la construction de sa nouvelle capitale, l'Hippodrome, commencé par Septime Sévère, était le monument le plus considérable de l'ancienne Byzance. Constantin conserva ce monument et le termina. La configuration de l'Hippodrome décida de la disposition qui fut donnée au palais irnpérial, construit dans son voisinage, et c'est d'après la disposition donnée au palais que fut construit le reste de la ville. Ainsi c'est le plan de l'Hippodrome qui aréglé le plan de la ville entières. On alla même jusqu'à enfreindre les prescriptions religieuses, toujours si respectées par les Byzantins. Quand Justinien fit construire Sainte-Sophie, le plan de la nouvelle église fut adapté au plan général de la ville, et cela ne put se faire qu'en détournant un peu le grand axe de l'église de la direction qu'il devait prendre ; SainteSophie n'est pas tout à fait tournée vers l'Orient'. L'hippodrome de Constantinople, construit par des empereurs romains, diffère essentiellement des hippo dromes grecs et se rapproche des cirques romains; c'est véritablement un édifice ; il ne peut guère servir qu'à des courses et à des fêtes : il comprend toute cette série de constructions, gradins, tribune impériale, spina, stalles, qui distinguent le cirque romain de l'hippodrome grec. L'emplacement de l'Hippodrome (fig. 38447) est un des points les plus certains de la topographie byzantine. La place actuelle de l'Atmeidan, au sudouest de Sainte-Sophie, conserve encore aujourd'hui la forme d'un grand cirque. La spina, qui donne la direction du grand axe, est indiquée par des monuments.qui sont encore debout, l'obélisque de granit de Théodose (A) et la colonne de pierre de Constantin VII (B) ; la colonne Serpentine de Platées 6 (C),qui décorait aussi la spina, était encore, en 1855, debout,entre ces deux monuments [DONA atum, fig. 2629]. L'hippodrome fut commencé par SeptimeSévère, qui, après avoir ruiné Byzance, avait entrepris de la relever de ses ruines. Il n'était pas facile de trouver sur ce sol accidenté une surface plane suffisamment étendue: entre les collines sur lesquelles la ville était bâtie, il n'y avait pas de dépression naturelle comme celle qui s'étend à Rome entre le Palatin et l'Aventin. Septime-Sévère dut créer pour une partie de l'hippodrome un sol artificiel reposant sur des voûtes et des piliers ; c'est la partie qui s'étendait vers le sud, depuis l'endroit où fut élevée plus tard la colonne de pierre jusqu'à la Sphendonè. On fit arriver de l'eau sous ces voûtes, et on forma une grande citerne à laquelle on donna le nom de citerne froide 9. Sévère construisit aussi, au nord, le côté rectiligne formant la tête du cirque et , une grande partie des gradins qui s'élevaient à droite et à gauche de l'arène. Constantin termina les gradins et la partie demi-circulaire de l'extrémité méridionale, qui porta le nom de Sphendonè'0. Il fit aussi construire la spina et la tribune impériale qui fut établie au-dessus du mur rectiligne, au nordfl. Sous Théodose le Grand, en 390, on plaça sur la spina, au centre de l'Hippodrome, _ un obélisque de granit qui fut rapporté d'I;gypte1z ; un peu plus tard, sur la même ligne, vers l'extrémité sud de la spina, on éleva une colonne de pierre qui était entièrement revêtue de plaques de bronze i3. Ces deux menu HIP 208 FilP ments, fort dégradés, subsistent' encore aujourd'hui; l'obélisque, au nord, la colonne de pierre à plus de 50 mètres au sud; la colonne Serpentine était au milieu. Les dimensions de l'hippodrome de Constantinople semblent avoir été celles que nous avons trouvées pour plusieurs hippodromes grecs, entre autres celui d'Olympie : 2 stades de long sur 1 de large'. Les gradins couvraient les deux grands côtés latéraux et la Sphendonè; ils furent brûlés en 40G et en 498 et alors reconstruits en marbre 2. Au-dessus des gradins s'étendait une galerie à colonnes qui servait de promenoir, 7re (aaroç, et d'où la vue s'étendait sur la Propontide et la côte d'Asie'. Les gradins de la faction des bleus, à laquelle appartenait ordinairement l'empereur, étaient à à droite de la tribune impériale, ceux de la faction des verts étaient à gauche'. Nous avons dit que l'extrémité septentrionale était rectiligne et que la tribune impériale s'élevait sur le mur qui fermait le cirque de ce côté. Dans ce même mur, à droite et à gauche de la tribune impériale, étaient construites, de plain-pied avec le sol de l'arène, des loges, séparées par des arcades, où les chevaux et les chars étaient réunis avant la course. Ces loges G, nommées carceres par les Romains, portaient à Constantinople le nom de Tb Dlzyyavov ; elles étaient sous la surveillance d'un magistrat particulier nommé b Mayyxvsiptos. La tribune impériale (a, b) portait le nom de Tb KO:Tp.xG. L'Hippodrome étant devenu le centre de la vie mondaine et de la vie politique à Constantinople, on avait de bonne heure pensé qu'il était nécessaire de le rattacher au palais impérial. Constantin éleva non seulement la tribune impériale, mais encore, derrière elle, un palais qui fut aussi appelé Cathisma (c, d), dans lequel l'empereur faisait des réceptions avant les jeux. Il construisit enfin près de ce palais et dominant comme lui l'Hippodrome, une église dédiée à saint Étienne (e), des fenêtres de laquelle l'impératrice, avec les dames de la cour, cachées derrière des voiles d'Asie très minces, pouvaient voir' les jeux sans être vues; on sait qu'à Constantinople les femmes ne siégeaient jamais avec les hommes dans les cérémonies publiques ni dans les églises. La tribune impériale se composait de deux parties : le Cathisma proprement dit et le Stama'. Le Cathisma (a) consistait en une plate-forme, sur laquelle était placé le trône impérial; à droite et à gauche de cette plate-forme se trouvaient deux loges où se tenaient les grands dignitaires qui accompagnaient l'empereur. Le Stama (b), qui s'appelait aussi Pi de sa ressemblance avec la lettre H, faisait saillie sur l'arène; il était placé sous le Cathisma, et l'on y descendait des deux loges situées à droite et à gauche de la plate-forme; dans le Statua se plaçaient les soldats de la garde de l'empereur, les scholares, les hétairistes, avec leurs bannières et leurs étendards. Les jours de représentation', l'empereur, pop_ tant le sagion brodé d'or, accompagné des chefs des eubiculaires, traverse la galerie du Triconque, l'Abside et Daphné; il allume des cierges dans les oratoires, comme il a coutume de le faire; passant ensuite par l'Augustcos, il entre dans l'église Saint-Étienne ; de là il monte, par l'escalier secret, dans la chambre du palais du Cathisma, et là il regarde les préparatifs des jeux. Bientôt le dignitaire nommé b Triç ra..yarâscwÿ vient annoncer au préposé, b 7cpatr.osrro;, que les cochers sont prêts et à leur poste avec leurs chars, que les chefs, o ie xpirat xx: rE ôu.xo ot, des bleus et des verts sont à leur poste aussi derrière les factions; que l'armée est en ordre avec ses étendards, et que le peuple remplit tous les gradins. Le préposé transmet cet avis à l'empereur. Alors l'empereur descend par l'escalier de pierre et entre dans sa chambre. Le préposé ayant appelé les valets de chambre (5cTriTcoxç), ceux-ci revêtent l'empereur de la chlamyde et sortent; l'empereur est alors couronné par le préposé ; il sort de sa chambre, accompagné des chefs des cubiculaires, et se tient dans le petit triclinium 1°; il fait signe au préposé et celui-ci à l'ostiaire, qui introduit les patrices, le silentiaire soulevant la portière de la porte. Les patrices étant entrés avec les stratèges, tous se prosternent; et, lorsqu'ils sont relevés, l'empereur, accompagné par eux, entre dans le triclinium. Là, les sénateurs sont introduits et se prosternent. Alors le dignitaire T°r,s x7tT117Tâ6co;, prenant le bout de la chlamyde de l'empereur, y fait un pli!' et le donne à l'empereur pour qu'il bénisse le peuple. L'empereur, suivi de tous ces dignitaires, entre dans la tribune impériale. L'immense cirque est rempli jusqu'au faîte. De grands voiles de soie, couleur de pourpre, se déploient dans les airs et protègent toute cette foule contre les rayons du soleil. Par les soins de l'éparque, une poussière de cèdre a été mêlée au sable de l'arène; des fleurs ont été disposées partout. L'empereur est entré dans la tribune; il s'avance devant le trône, et là, debout, bénit trois fois le peuple : d'abord au centre, ensuite à droite, la faction des bleus; enfin à gauche, la faction des verts. Le peuple et l'armée répondent par des acclamations. Les jeux commencent. Nous possédons, sculptées sur le même monument, quatre représentations du Cathisma. Ce monument est le piédestal élevé par Théodose le Grand sur la spina pour porter l'obélisque de granit12. Chacune des quatre faces de ce piédestal est décorée d'un bas-relief qui représente l'empereur assistant aux jeux de l'Hippodrome dans le Cathisma. Dans trois de ces bas-reliefs, l'empereur est figuré assis sur son trône ; dans le quatrième, il est debout et tient à la main une couronne qu'il va décerner au vainqueur. On voit, par ces bas-reliefs, que la tribune impériale est divisée en deux étages. Au centre de l'étage supérieur se trouve la plate-forme sur laquelle est placé 27 11I1' 209 le trône de l'empereur; à droite et à gauche, il y a une loge où sont des dignitaires revêtus de la toge. L'étage inférieur est le Statua; il est occupé par divers personnages. Cet étage inférieur est encore assez élevé au-dessus du sol de l'Hippodrome. Sur le stylobate du piédestal est reproduite laspina avec les principaux monuments qui la décoraient à l'époque de Théodose. Dans le bas-relief que nous reproduisons (fig. 3848), celui qui est sculpté sur la face méridionale, existe un escalier qui indique, autant qu'une sculpture en bas-relief pouvait le faire, qu'on descendait du Cathisma dans le Stagna, et que cette partie inférieure de la tribune faisait une saillie en avant. Les deux loges placées de chaque côté du trône n'auraient pu contenir tous les sénateurs qui accompagnaient l'em pereurlorsqu'il présidait les jeux. Marcellinus nous apprend que Justinien reconstruisit la tribune et qu'il fit de chaque côté des galeries oit les sénateurs prenaient place 1. L'Hippodrome était magnifiquement orné. Nous avons déjà parlé des deux obélisques et de la colonne Serpentine qui se trouvaient sur la spina. D'autres colonnes ou statues étaient encore disposées sur cette spina. Les deux bornes qui la terminaient portaient chacune le nom d'une des deux factions du cirque. La borne des bleus (D) était au nord, du côté de la loge impériale ; celle des verts (E) était au sud. Près de la borne des bleus, il y avait un bassin décoré par une statue de l'impératrice Irène, élevée sur une petite colonne 2. Le promenoir, le pourtour de l'Hippodrome, la loge impériale et ses dépendances étaient ornés de magnifiques statues d'empereurs, parmi lesquelles on remarquait les statues équestres de Gratien, de Valentinien, de Théodose', de Justinien °. On admirait aussi, dans l'Hippodrome, l'Hercule de Lysippe, la Louve de Romulus, l'Aigle d'Appollonius de Tyane, une statue d'Auguste rapportée de Rome, une de Dioclétien rapportée de Nicomédie 6. Sur la loge impériale étaient placés les quatre chevaux dé bronze que Théodose II avait enlevés à Chios, et qui ornent aujourd'hui la façade de l'église Saint-Marc à Venise'. Le peuple de Byzance racontait sur tous ces monuments de merveilleuses légendes; il leur attribuait à tous des vertus secrètes; il n'y avait peut-être pas dans tout l'empire d'endroit où les pratiques de la magie fussent plus en faveur qu'à l'Hippodrome. Par une disposition qui ne laisse pas de nous surprendre et qui est contraire à celle qui était usitée dans les cirques romains, il semble que les portes de l'hippodrome de Constantinople étaient peu nombreuses; lors de l'insurrection de 532, les généraux de Justinien, Bélisaire et Mundus, s'emparent de deux entrées et bloquent ainsi les insurgés; une de ces entrées, celle qui était située au Sud-Est (I), s'appelait la « Porte de la Mort n, Necra; c'est par cetteporte que Mundus entra avec ses soldats; une autre entrée se trouvait au nord-est (G), c'est par là qu'entra Bélisaire'. Il faut alors supposer qu'il y avait en regard deux autres portes à l'ouest (F et Il). On sait quelle passion les Byzantins avaient pour les jeux du cirque. Ils étaient une institution de l'État e t peut-être la plus importante. L'Hippodrome était devenu le centre de la vie politique, le foyer des troubles et des agitations. La ville était divisée en deux grandes factions, p.ép'i;, 8~u.ot, les Bleus, B.:vscot, et les Verts, IIpxrtvot 8. Ces deux factions jouissaient d'une existence officielle ; elles étaient organisées en véritables corporations; elles avaient leurs présidents, ôrlp.dxpaiat, 8ripapxot, leurs ge'itoniarques ou chefs de quartier, leur caisse, leurs cochers, leurs poètes, leurs musiciens, leurs chanteurs. La lutte était toujours très vive entre les deux partis, et souvent elle éclata en émeutes sanglantes. La plus terrible de ces émeutes fut l'insurrection appelée Nica °, qui, en 532, faillit précipiter du trône Justinien ; une partie de la ville fut incendiée ; plus de 35 000 hommes, Bleus et Verts, furent massacrés sans distinction dans l'Hippodrome et enterrés près de la porte Nécra 70. Une grande partie de l'histoire de Byzance, souvent la plus émouvante, s'est accomplie dans l'Hippodrome. Les empereurs y ont été tour à tour glorifiés comme des dieux ou maltraités comme les plus vils criminels. C'est là que Justinien II fut mutilé aux applaudissements du peuple, et c'est là aussi que, plus tard, ayant réussi à ressaisir le pouvoir, il put, aux applaudissements de ce même peuple, poser ses pieds sur la tête de ceux qui l'avaient outragé". Michel Calaphate, victime d'une insurrection déchaînée dans l'Hippodrome, eut les yeux crevés et fut renversé I1IP 210 I-IIS du trônes. Andronic Comnène y fut longuement torturé Jusqu'à ce qu'il rendît l'âme 2. L'Hippodrome servait aussi aux couronnements et aux triomphes des empereurs. C'est là que le roi des Vandales, Gélimer, fut amené devant Justinien et qu'il se dépouilla de la pourpre en disant : « Vanité des vanités 3 ». C'est à l'Hippodrome que Basile I, Constantin VII, Nicéphore, Phocas, Jean Zimiscès, Basile II triomphèrent des Arabes, des Bulgares et des autres ennemis de l'empire `. Ajoutons enfin qu'on rendait aussi la justice à l'Hippodromes, et qu'on y faisait des exécutions capitales'. Les empereurs finirent cependant par comprendre qu'il était de leur intérêt de résister à cette passion que le peuple de Byzance avait pour les jeux du cirque; ils s'appliquèrent peuà peu à les ruiner, et ils y réussirent facilement. A partir du mie siècle, l'Hippodrome paraît avoir été délaissé. Alexis I' fut le dernier empereur qui présida aux jeux du cirque. En 1204, les croisés ravagèrent impitoyablement l'Hippodrome; quand les Turcs entrèrent dans Constantinople, il n'était plus qu'une ruine. Il y avait encore à Constantinople, à l'ouest du grand Hippodrome, un petit hippodrome, 'I7.7roipdp.toç,qu'on appelait aussi l'hippodrome du Palais ou l'hippodrome couvert'. C'était un vaste espace abrité par une toiture. Depuis Constantin, qui l'avait construit, jusqu'à l'impératrice Irène, femme de Léon IV, il servit aux exercices hippiques des empereurs'. Sa destination avait changé depuis ; c'est là que les personnages, qui arrivaient au palais par la porte Daphné, descendaient de cheval et laissaient leur monture 3. Nous avons très peu de renseignements sur les hippodromes des autres villes de la Grèce. Nous savons qu'à Sparte il était situé près du temple de Poseidon Gaiéoeu es 10 ; un savant français a vu près de cette ville les restes d'un hippodrome de l'époque romaine : « C'est un cirque de forme rectangulaire, construit probablement sous les derniers empereurs; il me rappelle celui de Romulus, à Rome. Les murailles, bien conservées dans la longueur, sont tombées aux deux extrémités. On voit encore une partie de ces loges appelées carceres, d'où s'élançaient les chars " ». A Alexandrie, l'Hippodrome était situé à l'extrémité de la voie Canopique "; celui de Mantinée était surla gauche de la route qni mène à Tégée i3. Des hippodromes sont mentionnés à Tamines en Eubée 1", à Séleucie", à Sardes 1°; dans l'île de Délos, un x-r17roç faisait partie de l'hippodrome 17. Ce dernier renseignement est donné parune inscription du ive siècle av. J.-C. Six siècles plus tard, à l'époque des Antonins, on donnait la forme et le nom d'hippodrome à des promenades ou jardins entourés de portiques à colonnes, avec tricliniuin et exedra, et décorés de bassins, de statues et d'oeuvres d'art. Pline le Jeune fait une description détaillée d'un hippodrome de ce genre, qui se trouvait dans sa villa de Toscane f8. Un savant allemand a émis tout récemment l'opinion que le prétendu stade du Palatin, à Rome, était un hippodrome