Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

HOSTIS

IIOSTIS. Dans l'ancienne langue latine 1, le mot hostis désigne un étranger; mais tout étranger n'est pas un hostis. L'hostis est le citoyen appartenant à un État souverain (qui suis legitus utitur) 2, à un État qui est sur le pied d'égalité (pari jure)' avec le peuple romain. Boslire, dit Festus, ponebialur pro aequare'. Que cet État soit en guerre avec Rome, cela n'est pas nécessaire. L'hostis n'est pas forcément un ennemi (perduellis) 5. La condition de l'hostis varie suivant qu'on l'envisage au point de vue du droit ou d'après l'usage. En principe, l'étranger qui pénètre sur le territoire de Rome peut être saisi et retenu comme esclave ; ses biens sont res nullius et appartiennent au premier occupant °. L'étranger ne saurait invoquer la protection de la loi. La loi, à cette époque, est un contrat par lequel les citoyens s'engagent réciproquement à protéger leurs personnes et leur patrimoine. Celui qui ne fait pas partie de la communauté politique et religieuse qu'on appelle la cité, est par là même hors la loi. Extrarius est qui extra focum, sacramentum jusque sit'. En fait, l'étranger qui venait à Rome se plaçait sous la sauvegarde d'un citoyen à titre d'hôte (hospes) ou de client (cliens). A mesure que Rome développa ses relations avec les cités voisines, elle conclut avec elles des traités pour régler la condition de leurs nationaux de passage ou en résidence à Rome et réciproquement. A côté de l'hospitium prioatum, il y eut l'hospitium pu D'après Servius, certains auteurs anciens employaient le mot hostis pour hospes°. Divers textes supposent que cet étranger appartient à un peuple qui a un traité avec Rome, qu'il jouit du commercium, de la reciperatio. La disposition bien connue des Douze Tables, qui déclare imprescriptible l'action en garantie pour cause d'éviction dans le cas où un étranger est en cause (adversus hostem aeterna auctoritas) 10, prouve que l'hostis pouvait ester en justice à Rome. Cette conclusion est confirmée par un passage de Festus : Status dies cum hoste vocatur qui judicii causa est constitutus cura peregrino" L'hostis, à l'époque antique, se distingue du peregrinus. Le peregrinus est l'étranger qui habite dans le voisinage de Rome, mais en dehors de rager Ilomanus. Ici l'on n'envisage plus l'étranger au point de vue de la situation politique de l'État auquel il appartient. Rictus peregrinus a pergendo, dit Varron f2, id est progrediendo : eo enim ex agro Romano peregre progrediebatur. Aux derniers siècles de la République, l'acception du mot hostis s'est modifiée, en même temps que celle du mot peregrinus a été étendue. Désormais, le mot peregrinus désigne une condition juridique 13. Cette condition sera exposée au mot PEREGIIINUS. Quant au mot hostis, il s'applique à deux classes de personnes : 1° à celles qui appartiennent à un État qui est en guerre avec les Romains ; 2° aux ennemis de la République, ceux que la loi des Douze Tables punissait pour crime de perduellio 1'. 1. Sont hostes ceux à qui le peuple romain a publiquement déclaré la guerre, ou qui l'ont eux-mêmes déclarée aux Romains 1J. A défaut de cette déclaration, ce ne sont plus des ennemis, mais des brigands (latrunculi, praedones 16). Au temps de Cicéron, on citait comme exemple d'ennemis les Lusitaniens 17 ; au temps d'Auguste Sa comme au temps des Sévère19, les Germains et les Parthes. La distinction de l'hostis et du praedo est importante : le citoyen romain qui est au pouvoir de l'ennemi est assimilé à un esclave (servi loto), mais en revanche, s'il rentre sur le territoire de Rome, il jouit d'un privilège, le postliminium 20. Dans l'intervalle, l'état de ses enfants, s'il était chef de famille, reste en suspens 2t. Rien de pareil pour celui qui tombe aux mains des brigands 22. Dès le commencement du vile siècle de Rome, la jurisprudence s'est efforcée de définir la condition du citoyen romain prisonnier de l'ennemi 23. Elle eut de nombreuses questions à résoudre au double point de vue des droits de famille du captif et, le cas échéant, des droits relatifs à son patrimoine. La doctrine qui s'est formée à cet égard a son point de départdans une loi Cornelia 2' qui a confirmé le testament d'un citoyen mort chez l'ennemi (perinde ac si in hostium potestatem non pervenisset 25). Cette doctrine est en grande partie l'oeuvre des jurisconsultes du siècle des Antonins [PosTLIMINIun]. II. La seconde acception du mot hostis apparàît entre HYA. l'époque où vivait Plaute et le temps de Cicéron 2. A partir du vne siècle de Rome, dans les périodes de troubles, le Sénat, au lieu de recourir à la dictature, proclamait une sorte d'état de siège au moyen du Sena tusconsultum ultimunt 3 [TUMULTUS, JUSTITIUM]. Les ci toyens séditieux ou rebelles étaient déclarés ennemis de la République à moins qu'ils ne fissent, dans un certain délai, acte de soumission 5. Tantôt cette déclaration était faite en forme comminatoire 6, tantôt les consuls et plus tard le Sénat 8, désignaient par leurs noms les ennemis publics. Cette désignation les mettait hors la loi. Étaient-ils arrêtés, le magistrat les traitait comme des prisonniers de guerre : ils étaient mis à mort 9, ou tout au moins jetés en prison 10. Tant qu'ils n'étaient pas sous la main. de justice, tout citoyen avait le droit de les arrêter et de les tuer impunément ". Dans tous les cas leurs biens étaient confisqués au profit du Trésor 12 Sous l'Empire, le Sénat conserva, au moins en la forme, le droit qu'il s'était attribué de déclarer certains citoyens ennemis de l'État. On en rencontre des exemples jusqu'à la fin du Ive siècle13. Énouaitn CuQ. Fêtes qui se célébraient à Amyclées, en Laconie, en l'honneur d'llyakinthos, et passaient pour les plus importantes des fêtes laconiennes'. 1. Iyakinthos était un héros laconien, fils d'Amyclas2. Son tombeau était placé sous la statue du grand Apollon Amycléen, au milieu du trône sculpté par Bathyclès de Magnésie 3. Pausanias' nous donne des détails sur ce monument d'llyakinthos, qui était à la fois le tombeau (f.vti. ), l'autel ([3wnu.d;) du héros, et le piédestal ([31Opov) de la statue d'Apollon. Cet autel, dont M. Tsountas croit avoir retrouvé les vestiges', avait une forme demicirculaire. Il était censé recouvrir une fosse où l'on supposait le héros enterré. Une porte de bronze, pratiquée dans le côté gauche, permettait d'y introduire des offrandes destinées au mort. Sur la face antérieure, le sculpteur Nicias, fils de Nicomède (deuxième moitié du Ive siècle) 6, avait représenté Hyakinthos et sa soeur Polyboia conduits au ciel par un cortège de divinités où figurent Déméter, I{oré, Pluton, les Parques, les Heures, Aphrodite, Athéna et Artémis. La figure du héros, d'une éclatante beauté, était barbue. A ces détails sur le p.v7;13.x d'Ilyakinthos s'ajoutent de précieux renseignements sur le culte du héros. La fête des `Tax(vOta se célébrait tous les ans7, quelque temps après les jeux Isthmiques 6. C'était une solennité nationale d'une extrême importance aux yeux des Lacédémonien$ en général et des Amycléens en particulier, puisque, à plusieurs reprises, au cours d'une expédition militaire, ils quittèrent lé théâtre de la guerre pour rentrer dans leur patrie afin de célébrer cette fêtes. Celle-ci, d'après la description d'Athénée 1', empruntée à l'historien Polycratès, durait trois jours. Le premier jour était un jour de deuil, consacré à des cérémonies d'où était exclue toute réjouissance. C'était comme la commémoration funèbre de la mort du héros. Le sacrifice offert à Hyakinthos précédait celui d'Apollon 1l. Dans les banquets, qui devaient suivre ce sacrifice, il n'y avait ni couronnes, ni pains, ni gâteaux, ni friandises d'aucune sortet2. On ne chantait pas de péan. Tout se passait dans la plus grande réserve, après quoi on se séparait. Le second jour, au contraire, était un jour d'allégresse, égayé par des divertissements et des spectacles variés : des enfants en tuniques relevées jouaient de la cithare et chantaient avec accompagnement de flûte, en parcourant avec le plectre toutes les cordes de la cithare, sur un rhythme anapestique. Ils entonnaient un hymne en l'honneur du dieu, sur un ton aigu. D'autres, montés sur des chevaux caparaçonnés, traversaient le théâtre. Des choeurs nombreux d'adolescents s'avançaient et chantaient quelque poème national, des danseurs entremêlés à eux exécutaient au son de la flûte une danse antique, tout en chantant. Des jeunes filles défilaient sur des charrettes légères (xâvv«Oa) richement ornées, d'autres sur des chars attelés pour la course. Sparte entière était en liessef3. On célébrait d'innombrables sacrifices et l'on invitait aux festins toutes ses connaissances et même ses esclaves : personne ne négligeait le sacrifice et il arrivait que Sparte était déserte au moment du défilé et des courses de chars. A ces renseignements d'Athénée, s'ajoutent quelques traits fournis par d'autres textes. Euripide" parle de choeurs de femmes, d'une fête nocturne et d'un xcb'p.o; où assistaient les femmes, et l'on a voulu rapprocher de ce passage le récit de Plutarque relatif à des mystères nocturnes célébrés par les femmes de Sparte '°. Deux inscriptions de Laconie 16 mentionnent une âp rliç xai devait être chargée de la direction de ces choeurs et des concours de chars conduits par les jeunes filles. Ces courses de chars devaient avoir lieu sur la voie sacrée qui reliait l'Amycloeon à Sparte, et qu'on appelait la voie Hyacinthienne (bôb; `Y «xtvA(ç) 17. Macrobe 16 rapporte qu'aux Hyacinthia (in sacris quae Apollini celebrant) les Lacédémoniens se couronnaient de lierre, bacchico rite. Athénée mentionne ailleurs un repas, appelé xosds, qui avait lieu à Amyclées aux fêtes d'Apollon ; on y mangeait force gâteaux, pains et un S(eli,ds TG; ,1.x),« â'35; 19. D'après HYA 305 IIYA Xénophon', Agésilas, après avoir forcé l'isthme de Corinthe, revint à Sparte célébrer les Hyacinthia, prit dans les choeurs la place que lui assigna le zopo77otdç et chanta le péan 't O. Enfin, le scholiaste de Pindare cite un passage de la Azzddvicev 7toat.ol d'Aristote, d'après lequel on promenait aux Hyacinthia la cuirasse de Timomachos, le héros qui conduisit une troupe d'1Egides thébains au secours des Lacédémoniens contre les Amycléens Ajoutons, d'après Pausanias3, que les femmes de Sparte tissaient tous les ans un chiton neuf pour la statue d'Apollon Amycléen, et que, par conséquent, la cérémonie du renouvellement du vêtement sacré devait trouver place dans les fêtes du dieu. H. Il résulte de ces témoignages que, sous le nom général d'llyacinthia, on comprenait des fêtes en l'honneur d'Hyakinthos et d'Apollon Amycléen. Il reste à déterminer le rapport mythologique qui unissait ces deux divinités. La description du pvrlpa d'Hyakinthos par Pausanias, et celle des fêtes par Athénée n'ont aucun rapport avec la gracieuse légende d'Hyakinthos telle qu'on la trouve chez les poètes de l'époque hellénistique et chez leurs imitateurs '. Hyakinthos, aimé d'Apollon, fut tué involontairement par le dieu, dont le disque, détourné par la jalousie d'un autre amant, Zéphyros ou Borée vint le frapper à la tempe : des gouttes de son sang naquit la fleur qui portait son nom. La mort par le disque est un détail qu'on trouve déjà dans Euripide 7, et qu'Apollodore a rappelé 8. Mais la mention des tendres sentiments qui liaient le héros au dieu, la jalousie de Zéphyros ou de Borée, enfin la métamorphose en fleur paraissent être des additions postérieures dues à la fantaisie des poètes alexandrins. En réalité, dans le culte local d'Amyclées, la fleur hyacinthe ne joue aucun rôle; en ce qui concerne l'épisode de la jalousie de Zéphyros et de la métamorphose, il est notable que Pausanias exprime formellement son scepticisme 9. Ce n'était donc pas un élément du mythe amycléen. Il est, d'ailleurs, très frappant que la légende poétique n'a plus aucun caractère local ; elle présente la banalité et la mièvrerie décadente des contes mythologiques fabriqués par de beaux esprits. Cela est si vrai que les noms des amants d'Hyakinthos varient suivant les auteurs 10. Il faut donc s'en tenir aux données positives de Pausanias et d'Athénée sur le monument et sur les rites locaux, pour comprendre la vraie nature du héros amycléen. Il est bien probable qu'llyakinthos représente un vieux dieu local, de caractère chthonien, antérieur à l'arrivée en Laconie de l'Apollon amycléen f 1. Celui-ci le relégua au second plan, et au rang de héros, mais sans en abolir ni le souvenir ni le culte. Une preuve de la priorité chronologique d'Hyakinthos subsistait dans le fait qu'on lui sacrifiait avant Apollon 12 et que c'est lui qui a servi d'éponyme à toute la fête célébrée en l'honneur du héros et du dieu i3. Quant à la nature chthonienne d'Hyakinthos, son autel en forme de monument funé Y. raire (miel), le caractère lugubre de la première journée des fêtes qui ressemble tout à fait à un banquet funèbre, l'assimilation de Polyboia, soeur d'Hyakinthos, avec Perséphone et Artémis-Hécate et, ailleurs, le rôle funéraire de la fleur hyacinthe dans le culte de Déméter la démontrent suffisamment. Cet ancien dieu infernal, après l'arrivée d'Apollon, qui coïncida soit avec l'installation des Doriens soit avec celle des tlsgides thébains en Laconie, devint un simple génie souterrain subordonné au dieu de la lumière. Les rites de son culte furent tant bien que mal associés à ceux du dieu nouveau, et les deux fêtes combinées en une seule. Mais ces éléments étaient trop disparates pour produire une fusion complète. Le rapprochement cultuel d'Hyakinthos et d'Apollon, dû originairement à des raisons de fait, d'ordre historique et politique, plutôt qu'à un système mythologique, donna naissance à la légende de la mort accidentelle du héros par le disque du dieu solaire : cette légende était déjà formée au ve siècle. llyakinthos devint la personnification de la brillante et éphémère végétation printanière tuée par l'ardeur du soleil d'été. Ce thème primitif fut, comme on l'a montré plus haut, enjolivé à l'aide d'éléments où l'on peut retrouver l'influence des rites et du mythe d'Adonis. Quant à l'origine première d'Hyakinthos et à son introduction en Laconie, on ne peut guère affirmer qu'une chose : c'est qu'il y fut apporté par une des races antérieures à l'installation des Doriens 16. Mais les difficultés surgissent si l'on essaye de déterminer cette race. Deimling17 range le culte hyacinthien parmi ceux que les Lélèges importèrent en Laconie et firent adopter aux populations achéennes, ce qui équivaut à lui attribuer une origine sémitique. Cette hypothèse paraît plus vraisemblable que celle d'une origine aryenne. Il resterait à la justifier par une étymologie sémitique, qu'on substituerait à l'étymologie indo-germanique que plusieurs savants ont adoptée d'après Brugmann 18, et d'après laquelle llyakinthos serait un diminutif ayant le sens d'adolescentulus. De fait, il ne paraît pas qu'à l'origine llyakinthos ait été considéré comme un adolescent. Nicias l'avait représenté en homme môn, avec de la barbe, et certaines légendes le font père de plusieurs enfants 19. III. La fête des Hyacinthia donne matière à controverse sur plusieurs points. La question la plus délicate est celle de la répartition du programme général entre les deux divinités qu'on y célébrait. Quelle était la partie consacrée à Hyakinthos et celle qui constituait la fête propre d'Apollon ? Nous ne connaissons réellement le programme que desdeuxpremièresjournées, carDidymos, dans la bouche de qui Athénée a placé sa description, après avoir annoncé que les fêtes duraient trois jours, a omis de nous parler du troisième jour. Certains savants ", frappés du contraste entre le caractère lugubre de la première journée et l'allégresse quasi orgiastique du jour suivant, ont supposé que la première journée était seule consacrée à Hyakinthos, et la seconde à Apollon : 39 HYA 306 HYB ils admettent que les chants dont parle A thénée (p.Er' nec); ÔÉ tdvou r v OEÔv xôouat) et le péan auquel Xénophon fait allusion dans l'Agésilas et les _Helléniques étaient le péan d'Apollon. Cependant, il ne me semble pas que le contraste de ces deux journées soit un motif suffisant pour les attribuer à deux fêtes différentes. On sait que les fêtes d'Adonis, après des lamentations sur la mort du dieu, se terminaient par des réjouissances orgiastiques. Bien qu'il ne soit pas question, à propos d'IIyakinthos, d'une résurrection, il me paraît que son entrée au ciel, représentée sur son tombeau par le sculpteur Nicias, constituait une manière d'apothéose capable de justifier un festival. Ces rites sont communs aux divinités chthoniennes dont on célébrait tour à tour la disparition s7rtrrpocK) par un simulacre de deuil suivi de réjouissances'. Il n'y a donc pas de raison pour enlever à la fête propre d'llyacinthos la deuxième ni même la troisième journée et pour les attribuer à celle d'Apollon. Quant aux hypothèses fondées sur un remaniement du texte d'Athénée, la fragilité de leur base nous interdit de les discuter ici La question de l'époque des Hyacinthia a été brillamment discutée par Unger 3. D'après Hésychius', la fête tombait dans le mois laconien Itécatombeus, qu'on assimilait au mois attique Hécatombaion (juillet), uniquement à cause de la similitude des noms Unger a démontré que ce nom de mois signifie : le mois des Hécatombes; il doit donc correspondre, dans chaque pays où il existe, à la célébration des grands sacrifices qui accompagnaient la fête principale, et, par suite, il ne peut occuper la même place dans les divers calendriers. Or, pour la date des Hyacinthia, un texte décisif de Xénophon prouve qu'elle suivait de peu la célébration des jeux Isthmiques, qui avait lieu dans la première moitié de mai 7. Les Iyacinthia avaient donc lieu vers le milieu ou dans la deuxième moitié de mai : c'était une fête de printemps, et le mois `Y'xx(vetoç qui existait dans plusieurs calendriers doriens équivalait à mai-juin. Reste la question de la durée totale des fêtes. Si Unger a eu tort de méconnaître le caractère de gaieté de la deuxième journée et d'attribuer en bloc aux trois jours dont parle Athénée un air de deuil, il a eu raison de supposer que ces trois journées ne représentaient pas la fête tout entière, mais seulement le début, la fête propre d'Hyakinthosà laquelle succédait celle d'Apollon. En effet, les Hyacinthia passaient pour la plus importante des fêtes laconiennes. Or, les KARNEIA duraient neuf jours 3. On ne saurait attribuer une moindre durée aux Ilyakinthia, qui devaient prendre au moins onze jours. C'est, en effet, pendant dix jours que les éphores, en 479, retinrent à Sparte les envoyés d'Athènes en refusant de leur donner audience, sous prétexte qu'on célébrait les Hyacinthies 9. Pendant le siège d'Ira, c'est une trêve de quarante jours qui fut nécessaire aux Lacédémoniens pour célébrer la même fête 10. De plus, le septième jour du mois Ilécatombeus était jour de sacrifice à Apollon". Unger pense avec raison que la fête d'Apollon devait coïncider avec ce sacrifice, et peut-être aussi unpéan et des réjouissances en l'honneur d'Apollon. Mais il n'est pas nécessaire de brouiller, comme il l'a fait, le programme général de la fête, en reportant de parti pris sur les journées consacrées à Apollon tout le festival dont pouvait très bien s'accommoder le culte spécial d'Hyakinthos pendant la deuxième et la troisième journée, ni d'établir un contraste systématique entre la tristesse des fêtes du héros et la gaieté des fêtes du dieu. Unger a heureusement identifié avec les Hyacinthia, prises en bloc, la fête lacédémonienne des `ExztO . xia mentionnée par Strabon 12 et par une inscription 13. De même à Argos, les HECATOMBAIA s'identifiaient avec la fète principale, celle des Héraia. Ainsi, sous le nom général d'llyacinthia, on doit entendre une fête commune à Hyakinthos et à Apollon Amycléen, d'une durée d'au moins onze jours, et comprenant deux parties : d'abord la fête propre d'llyakinthos qui durait trois jours, puis, peut-être après un intervalle d'un ou deux jours non fériés, la fête propre d'Apollon ; celle-ci pouvait durer de cinq à huit jours, et comportait le sacrifice à Apollon Amycléen, le péan à Apollon, la xo7r(ç et le renouvellement du chiton sacré. IV. On doit reconnaître une personnification de l'union cultuelle d'Ilyakinthos et d'Apollon dans l'ApollonHyakinthos adoré à Tarente'', qui rappelle la combinaison du Poséidon-lrechtlleus d'Athènes. Certains savants15 ont même voulu retrouver, en Laconie même, une combinaison analogue dans l'Apollon binaire, à quatre bras et à quatre oreilles, l'Apollon 'rerpxyetp et 'reT n)T0;, surnommé aussi xoua(Sto; 16 : ce dieu, à la façon du Janus romain, représenterait la fusion de deux divinités, Hyakinthos et Apollon Amycléen. Toutefois, il est possible d'expliquer ce dieu tétrachire, dont la figure avait un caractère féminin prononcé, par l'accouplement de deux divinités sémitiques, Reseph-Mikel et Anat 17. Le culte d'llyacinthos porté à Tarente par les émigrés laconiens appelés Parthénies 18 s'était propagé dans plusieurs autres pays doriens, à Théra, Byzance, Ibos, Kalymna, Rhodes, Syracuse, Géla 1s, G, Foau:mEs.