IîATALOGEIS (KTaaoye'ç). I. Lorsque, au mois de
mars 411 av. J.-C., la démocratie fut renversée à Athènes, par Pisandre et ses amis, pour faire place à un gouvernement oligarchique, les auteurs de la révolution, voulant ménager les susceptibilités du peuple, lui offrirent une constitution, qui, en apparence au moins, ne se différenciait pas trop de l'ancien régime. Le sénat des Cinq Cents serait remplacé par un conseil de quatre cents membres, et ce conseil aurait à côté de lui, représentant l'ancienne EKIiLESIA du peuple tout entier, une assemblée de cinq mille citoyens'. Ces cinq mille citoyens, dans la pensée des novateurs, devaient être pris parmi les plus riches et les plus dévoués au nouveau régime 2, et leur désignation était confiée à une commission spéciale de cent membres, élus, à raison de dix par tribu, dans les citoyens qui avaient dépassé leur quarantième année 3. Ces électeurs spéciaux, chargés de dresser la liste des Cinq Mille, furent appelés KaTrXIOyECç.
Thucydide affirme, à plusieurs reprises, que la désignation effective des Cinq Mille n'eut pas lieu. Les Quatre
Cents, dit-il, exercèrent souverainement le pouvoir, sans être contrôlés par l'assemblée; mais ils laissèrent le peuple dans l'incertitude si cette assemblée existait ou n'existait pas. Un personnel si nombreux leur rappelait trop l'ancienne démocratie qu'ils avaient en horreur. D'un autre côté, l'incertitude sur l'existence des Cinq Mille entretenait la crainte parmi les citoyens ; nul n'osait tenir des propos compromettants à un voisin qui peutêtre faisait partie de l'assemblée oligarchique4.
Dans son traité de la Constitution d'Athènes, Aristote dit, au contraire, que les Cinq Mille furent immédiatement désignés par les IirTr)Aoyeiç, puisque ce furent ces Cinq Mille qui choisirent dans leur sein la commission de cent membres chargée de rédiger la nouvelle constitution 8, cette constitution dont il a reproduit les principales dispositions.
Ce qui est vrai seulement, et Aristote le reconnaît luimême, c'est que, à dater de la mise en vigueur de la nouvelle constitution, les Cinq Mille n'existèrent que pour la forme ()dm udvov) (. En fait, le gouvernement fut exercé uniquement par les Quatre Cents la convocation des Cinq Mille dépendant uniquement du bon vouloir du conseil.
Thucydide lui-même, dans plus d'un passage, reconnaît que l'on parlait des Cinq Mille comme d'une assemblée existante et que les oligarques s'en faisaient un argument près des indécis pour les rallier à la nouvelle constitution. « Ce sont cinq mille citoyens et non pas seulement quatre cents qui sont à la tête des affaires; or, les Athéniens, distraits par les guerres et les occupations, n'ont jamais été si nombreux dans l'Ekklesia, quelle que fût l'importance de la délibération 8... Tous les citoyens, à tour de rôle, feront d'ailleurs partie des Cinq Mille.
Alcibiade déclare, au nom de l'armée de Samos, qu'il ne fait pas d'opposition au gouvernement des Cinq Mille, mais qu'il exige la démission des Quatre Cents9, etc., etc.
Nous savons d'ailleurs qu'un des clients de Lysias, Polystratos, avait été nommé xxTc r1'ei;. et, lorsqu'il fut poursuivi pour attentat contre la démocratie, il allégua pour sa défense qu'il avait agi, non pas en oligarque, mais en parfait démocrate. Il avait, en effet, inscrit sur sa liste, non pas seulement cinq mille noms, mais bien neuf mille, admettant tous ceux qui se présentaient, n'éliminant que ceux qui lui exprimaient le désir de rester à Pécari". Il ajoute même que, comme ii se refusait à faire un choix et à prêter le serment dont parle précisément Aristote", on lui infligea peine sur peine, si bien qu'il fut obligé de se soumettre 12. N'est-ce pas la preuve que les K«Tr),oyeiç ont bien réellement été nommés et qu'ils se sont acquittés du mandat qui leur avait été donné '3 `'
II. Aristote nous a récemment appris que, au moins à l'époque où il écrivait, il y avait un corps de fonctionnaires, composé de dix citoyens, élus par le peuple, à mains levées, dont la mission était de dresser la liste des Athéniens aptes à servir dans la cavalerie. Les membres de ce corps étaient appelés KXTaaoyeiç14
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Leur liste, lorsqu'ils l'avaient arrêtée, était remise aux hipparques et aux phylarques, qui la transmettaient au Sénat, chargé d'établir le tableau définitif des cavaliers.
Il parait bien résulter du texte d'Aristote que, malgré son inscription sur la liste des I:a7x),oyeiç, le citoyen avait un moyen assez simple pour se faire exempter du service militaire. Il lui suffisait d'affirmer, sous la foi du serment, que, soit pour raison de santé, soit pour insuffisance de fortune, il était hors d'état d'être un bon cavalier. L'examen du sénat portait seulement sur ceux qui n'avaient pas fait cette déclaration solennelle. Pour ces derniers, c'était le sénat qui décidait souverainement s'ils étaient ou non propres au service, les inscrivant sur les contrôles dans le premier cas, les libérant dans l'autre.
M. Albert Martin 1 s'était d'abord refusé à regarder comme véritablement décisoire le serment prêté par l'intéressé. La présomption de capacité résultant de l'inscription sur la liste des Iix7x,oyeiç pouvait-elle être ainsi détruite par une affirmation dénuée des preuves ordinaires? Il estimait que le sénat avait le droit d'ordonner une enquête pour vérifier si le serinent avait été prêté conformément à la justice. Les tribunaux, en cas de contestation, auraient eu à juger si le bon droit n'était pas du côté des KxTx),oyeiç. Mais le texte d'Aristote se prête peu à de telles restrictions et presque tous les commentateurs se bornent à le reproduire, en attribuant au serinent une force libératoire 2. M. Albert Martin s'est [voir IurhtRenos'] rallié à l'opinion générale. E. C:ÀILLEMER.