I:OLIAS (Kwat). Déesse dont le culte était célébré, en Attique, au.promontoire du même nom'; quant à ce promontoire lui-même, on s'accorde à le reconnaître dans le massif rocheux qui ferme à l'est la baie de Phalère, et il parait certain qu'il faisait partie du dème d'Ilalimus 2. La déesse y avait un temple qui contenait sa statue 3. On expliquait l'origine de ce culte et le nom même de Kolias par l'aventure d'un jeune Athénien, qui,
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enlevé par des pirates tyrrhéniens et chargé de chaînes, fut aimé et délivré par la fille de son ravisseur; de retour dans son pays, il aurait consacré à Aphrodite un sanctuaire sur le rivage qui avait été témoin de sa capture
et le nom de Kolias aurait rappelé les liens dont ses membres (xwax) avaient porté le poids'. Ce récit, qui se trouve rapporté avec de légères variantes par divers commentateurs anciens 2, suppose que Kolias n'est qu'une forme locale d'Aphrodite. I1 semble pourtant qu'à l'origine ce fut une divinité indépendante; Aristophane en deux passages et Denys le Périégète l'appellent tout simplement Kolias 3 ; mais de bonne heure elle fut assimilée à Aphrodite, à laquelle son nom est souvent lié comme épithète Cette identification, jointe à certains témoignages 5, nous renseigne sur le caractère de cette divinité
c'est une déesse de l'amour et de l'union conjugale. Les expressions qui encadrent son nom dans deux vers des Andes d'Aristophane 6 évoquent surtout des images libertines.
Kolias est souvent associée à une autre divinité, PEVETu),),(ç, qui préside aux naissances 7, et qui, elle aussi, apparait parfois comme une des formes ou un des surnoms d'Aphrodite'. Les textes mentionnent tantôt une Génétyllide 9, tantôt un groupe de Génétyllides 10 de même qu'il y a soit une, soit plusieurs Ilithyies [ILITIIYIA] . Pausanias rapproche ces déesses des I Evvxt tç, qui sont l'objet d'un culte à Phocée". Les deux cultes de Kolias et de Génétyllis, quoique associés, sont distincts : car un vers de Lysistrata, nommant à la fois les deux divinités, implique, à n'en pas douter, qu'elles avaient deux sanctuaires 12; mais ceux-ci étaient
voisins, car Pausanias les situe ensemble au cap Kolias ' Cette association avec les Génétyllides explique proba
blement que l'on rencontre l'expression Kto) il , qui parait désigner à la fois Kolias elle-même et les Génétyllides ses compagnes1l.
La prètrise d'Aphrodite Kolias était exercée par une femme, qui avait son siège marqué au théâtre de Dionysos On a conjecturé que ce sacerdoce était héréditaire dans le 7Evo; des KmattF;76.
Sans aucun doute, les femmes seules prenaient part aux cérémonies de ce culte". Ce culte était-il lié à la célébration des Thesmophories? Il y a de sérieux indices pour le penser ". Nous savons en effet qu'au second jour des Thesmophories les femmes Athéniennes se rendaient
au cap Kolias; c'est là que différentes anecdotes historiques nous les montrent célébrant la fête de Déméter 19 et c'est en raison de cette circonstance que, dans un oracle rapporté par llérodot.e, elles sont appelées Km),;x,ôsç yuvxixEç ZO. Il est vrai qu'il y avait précisément au cap Kolias un temple de Déméter 21; l'existence de ce sanctuaire su [tirait à expliquer la visite que faisaient dans ces parages les dévotes des Thesmophories. Mais il n'est pas vraisemblable qu'il n'y ait pas eu, à cette même occasion, quelque cérémonie en l'honneur des divinités voisines, Kolias et les Génétyllides. Cette hypothèse d'une fusion de ces différents cultes paraîtra d'autant plus plausible que Déméter Thesnlophoros est, comme Kolias, une déesse du mariage ; d'autre part, le cinquième jour des Thesmophories, consacré aux Kr)3;y€vmtr, c'est-à-dire à Déméter Kx20tyl9E(x ou protectrice des naissances 22; s'inspire des mêmes idées que le culte des Génétyllides 23"
Le culte de Kolias se retrouve peut-être à Égine, si l'on veut tirer argument du nom de Kmadôxt que donne une inscription de cette île 24. On a également rapproché de la déesse attique une Aphrodite Kxa(a, qui était adorée sur l'Hymette 23, et une Aphrodite Kai,txç, mentionnée dans une dédicace de l'île de Samothrace 2s : cette dernière identification, appuyée par la légende sur l'intervention des pirates tyrrhéniens qui aurait donné naissance au culte du cap Kolias, est alléguée par quelques savants pour induire que la déesse a été importée sur ce point de la côte attique par les Pélasges Tyrrhéniens des îles thraces 27, F. DUxxsxca.
ROME (Kfip.,), bourg, bourgade. Dans les pays grecs et hellénisés, ce terme correspond aux mots PAGus et virus usités dans les pays de civilisation latine.
1. Dé/inition et rôle de la /Miné dans la /ornlation des États grecs. Au sens concret, xniia'ri désigne une
agglomération rurale d'importance secondaire, par opposition à r~atç, l'agglomération urbaine principale. Au sens abstrait, ce même mot désigne la communauté constituée par les habitants de la bourgade, c'est-à-dire tantôt une unité politique d'ordre primaire, tantôt une fraction de la cité souvent intime, dépourvue, sinon d'une organisation politique personnelle, du moins de souveraineté
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et placée sous la dépendance collective de l'État (r.6).t;). Par conséquent, la kômé, comme le dème [nÈMos] est à la fois un morceau de territoire, un habitat et une association d'hommes. On peut distinguer, dans la langue politique des Grecs, trois séries corrélatives de termes servant à désigner l'État et ses éléments constitutifs, suivant qu'on les envisage au point de vue de la nationalité, de l'habitat ou de la communauté. Les voici par ordre d'importance, dans chaque série, du plus restreint au plus compréhensif :
L'absence de termes concrets correspondant àla notion de tribu et de phratrie prouve que ces dernières fractions de l'€Ovos n'eurent pas de caractère temporel ' ; leur domaine est surtout spirituel et religieux ; les membres de ces associations sont unis par le lien moral du culte et de la parenté réelle ou fictive plutôt que par la communauté des intérêts matériels ; elles sont indépendantes de l'idée de lieu : ce ne sont pas (les agglomérations parquées sur un point déterminé du sol en vue de l'exploitation agricole. (L'histoire d'Athènes offre quelques faits qui paraîtraient démentir cette théorie : on sait que les tribus attiques avaient part à peu près égale dans la répartition du territoire, depuis Clisthène, et dans l'allotissement des clérouchies. Mais c'était là une application d'un principe démocratique assez récent, celui de l'égalité des tribus dans l'administration de l'État.) En revanche, dans le domaine abstrait de la ttoatTE(x, leur rôle, en tant qu'associations religieuses et civiques, est très actif. Au contraire, les notions de / MW et de dème apparaissent en liaison intime avec les lots du sol possédé et cultivé: Les auteurs anciens eux-mêmes, particulièrement Thucydide2, Platon', Aristote' et Strabon 6, ont esquissé la théorie de ces groupes embryonnaires de l'État, et soupçonné l'évolution qui avait conduit les sociétés helléniques du régime de la famille patriarcale à celui des républiques centralisées. Au début, la peuplade installée dans un canton vivait à l'état sporadique (a-opxS-riv) : les peuples pasteurs ou chasseurs formaient des clans nomades toujours en quête de pàturages ou de gibier 7; chez les peuples cultivateurs, plus sédentaires, chaque famille (sixo;) exploitait en commun son lot de terre, dans des habitations isolées, sous l'autorité du plus
ancien8. A mesure que la famille se développe, les habitations se multiplient et se groupent en bourgades (r.e;tu.xt) ; ce sont, au dire d'Aristote, les plus anciennes associations (xotvmv(xt qui aient existé entre les hommes, et la kômé est « une colonie de la famille »9. En effet, un lien de parenté réelle (cuyydvstx unissait, à l'origine, tous les membres de cette communauté, qui n'est autre que le .y vo; [voir GENs], ensemble de tous ceux qui ont sucé le même lait bu.oyzXxx:m.; ie, sont soumis à l'autorité patriarcale du même chef et participent au même culte. La kômé est donc bien la forme concrète du yÉvo; ; il en est de même du dème, qui est ou bien une amplification de la kômé primitive ou bien la réunion, sur un même district, (le plusieurs Urnes apparentées et issues des démembrements successifs de la famille incessamment accrue.
Primitivement, il n'existait entre les divers Tin répartis dans leurs kômes ou leurs dèmes respectifs aucun lien politique : chaque clan vivait à sa guise, à la manière des Cyclopes dont parle Ilomère '. Sauf conventions spéciales, on ne se mariait pas d'un clan à l'autre. Aucune autorité collective ne réunissait en faisceau ces communautés isolées t2. Thucydide13 a bien caractérisé cet état de choses dans sa description de l'Attique avant Thésée : « Sous Cécrops et les premiers rois, la population de l'Attique fut toujours, jusqu'au règne de Thésée, morcelée entre plusieurs villes ayant chacune son prytanée et ses magistrats. Quand on n'avait rien à craindre, on ne s'assemblait point chez le roi pour délibérer, mais chacun se gouvernait et délibérait chez lui et à sa guise. » Cette description pourrait s'appliquer à tous les autres peuples de la Grèce primitive, car tous paraissent avoir également débuté par le régime du morcellement. Les auteurs anciens sont, en effet, d'accord sur l'ancienneté et la généralité de cet état de choses, qu'ils désignent tous par les mêmes expressions consacrées, cixaiv xxT raki.x; ou
expressions xz'Z rtb;,.x; ou xaT limu; sont entrées dans la langue à une époque où l'on opposait déjà le régime des peuples vivant en bourgades isolées à celui des États centralisés. Mais, à l'origine, on ne faisait aucune distinction entre toutes ces agglomérations indépendantes, parsemées sur le territoire d'un canton ; c'étaient autant de petites cités formant chacune un tout : tel était alors le type normal de l'État. Toutes ces agglomérations portaient alors indistinctement le nom de -(l)su; et vivaient sur le rhème pied, quelle que fût d'ailleurs leur importance relative''. C'est pourquoi Thucydide emploie l'expression xzTZ ; 6amt;, pour indiquer que les anciennes bourgades de l'Attique étaient autant d'États indépen
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dants. Les guerres et les conquêtes modifièrent les conditions de cette société patriarcale. La première idée d'une distinction d'espèce entre les établissements naquit sans doute de la construction des chêteaux forts installés sur les hauteurs à l'époque des migrations primitives et de la piraterie', soit par les habitants anciens en vue de se défendre, soit par les conquérants en vue d'asseoir leur domination. A ces résidences aristocratiques et princières
furent réservés les termes de rTd),t;, nToa(EOpov, ),u.; ou
rru 2, qui désignent originairement laville haute, garnie de remparts. Comme ces citadelles étaient, en fait, maîtresses de la région circumvoisine, ces termes s'identifièrent peu à peu avec l'idée de chef-lieu. Ce sont, en effet, ces chàteaux qui représentaient les capitales des royautés préhistoriques, à laCadlnée de Thèbes, à l'Acropole d'Athènes, à Mycènes, Tirynthe, Argos, Lycosoura, etc. Les lieux non fortifiés de la basse campagne, qui se trouvaient
que peuplaient les sujets O,xo() des rois homériques, furent, par opposition, exclusivement appelés rtûu.xt, de xeiu.at, c'est-à-dire les résidences gisant dans la plaine, ou 't'iu.ot (de ô«, partager?), c'est-à-dire les portions du territoire. Puis, les habitations se multipliant au pied de la forteresse, où demeuraient les chefs et les dieux, des villes basses se constituèrent qui prirent pour elles le titre de n),Et;, ce qui obligea à distinguer la ville haute par le terme plus récent d'c.xpdno),tç. La polis, comme chef-lieu du canton, devint le symbole de la cité tout entière; ce terme, pris dans un sens étendu, s'applique à l'ensemble du territoire occupé par tous les membres de la cité, ruraux ou citadins, bref à l'État tout entier.
Un second stade contribua à faire sortir de leur isolement les bourgades primitives et à préparer leur absorption par les villes. Il débuta par ce que Strabon appelle des aua 4wrx 8p,p.w', 3, associations de dèmes. La communauté de race qui unissait les membres de dèmes voisins, politiquement autonomes, se manifestait par la réunion des habitants, à certains jours de fête, autour d'un même sanctuaire. Les nécessités de la défense contre un ennemi commun poussèrent aussi à l'union les dèmes d'un même canton. Chacun d'eux conservait son autonomie pour les affaires intérieures, s'administrait lui-même sous l'autorité de son démiurge, probablement assisté d'un Conseil; mais tous se concertaient en vue de la défense du territoire, participaient aux expéditions communes ou aux travaux publics intéressant toute la région ; les cantons voisins les désignaient sous un ethnique collectif. Ainsi se constituèrent des tripales, des létrapoles, des pemltapoles, des tri/Mmes, des téira
kô,nes. Il faut classer parmi ces cuti' p.«Ta l u.wv les
groupes de bourgades dont la concentration devait donner naissance aux villes de Mantinée, de Tégée, d'Iféraia, d'Élis, d'iEgion, de Patras, de Dymé, de Mégare, etc.4.
.En Attique, on tonnait l'association de la Tétrapole ionienne, réunissant les dèmes de Marathon, d'OEnoé, de Trikorythos, de Probalinthos '. Les dèmes de Pélékès, Kropidai et Eupyridai formaient une TEtxtnu.ia' avec un
TEtxo',t,.«pzoç; ceux de Phalère, du Pirée, de Xypété et de Thymoitadai, une TETpaxtou,la autour d'un sanctuaire
d'Ilercule7; de même, on connaît la tétrakôme primitive des bourgs de Tanagra 8.
L'étape décisive dans la voie de la centralisation était
accomplie, quand le auarr,u.x ôrlv.wv se donnait des chefs
communs, se reconnaissait un chef-lieu oit résidaient les magistrats et où se tenaient les assemblées communes, et un dDOit de cité collectif qui annulait le droit de cité personnel à chaque dème. La fusion politique et religieuse des dèmes se manifestait par l'abandon des prytanées locaux et leur remplacement par un prytanée unique, sis au chef-lieu. C'est ainsi qu'à Athènes Thésée substitua le prytanée collectif de la capitale à ceux des douze cités', que les cinq dèmes de Mantinée adoptèrent 1'EnTi« xotvs située sur la place de cette ville 10, que les neuf dèmes de 'l'égée groupèrent leurs autels sur l'agora de leur capitale autour de celui de Zeus Klarios ". Cette absorption en un État unique des petites cités antérieures se faisait par voie de s/Jmpolitie ou de syncecisme politique. Elle consistait surtout dans la substitution d'une souveraineté centrale et collective à la souveraineté multiple et individuelle des dèmes. D'ordinaire, des magistrats des dèmes, au lieu d'administrer isolément leur commune respective, se réunissaient en collège pour gérer les affaires de la nouvelle république 12; de même les citoyens se réunissaient en assemblée générale sur l'agora du chef-lieu; les ethniques locaux disparaissaient pour faire place à un ethnique unique. Sauf la réunion des assemblées et des magistrats au chef-lieu et la création d'un prytanée central, la transformation d'un système de dèmes en une rd) ç centralisée n'entraînait pas de mesures concrètes. Les dèmes conservaient leur population et restaient intacts. Par suite, dans le canton ainsi centralisé, le régime xatà
xd,u.a; ou x«Ti ôtiuouç ne disparaissait que de l'organisa
tion politique, mais il subsistait matériellement, au point de vue de la topographie et de la répartition des habitants13. La kômé (ou le dème) qui devenait capitale et qui était choisie pour son importance, ou pour les avantages stratégiques ou commerciaux de sa position, ou parce qu'elle était voisine d'un sanctuaire renommé, ne se distinguait guère matériellement de ses congénères, et, sauf peut-être son acropole, n'était pas plus qu'elles garnie de remparts : mais elle devenait la ndat;, tandis qu'elles gardaient le nom de kômes ou de dèmes.
D'ordinaire, on ne s'en tint pas à cette sylnpolitie abstraite, à ce syneocisme du premier degré. L'éparpille
ment de la population (atEan«pu.€v-fi oïr.-fi5aç 14) dans des
bourgades ouvertes avait de graves inconvénients pour
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la sécurité : impossibilité de rassembler rapidement les citoyens armés et de secourir les localités que l'isolement laissaità la merci d'une surprise'. Si la dispersion dans les bourgades ouvertes était, en temps de paix, avantageuse aux cultivateurs, qui demeuraient à portée des domaines à exploiter, en cas de guerre la cité restait vulnérable et sans abri. Il en résultait un genre de vie spécial, une absence de quiétude qui obligeait les gens à vivre constamment armés2. Dans l'esprit des anciens, le port d'armes est la conséquence du régime xxrl X(k.cx;. On en arriva ainsi à la conception des capitales fortifiées, véritables camps retranchés, où la population fût concentrée à l'abri des remparts, prête aux sorties en masse ou à la résistance durable, où les organes essentiels de la cité fussent protégés, où l'on pût vivre avec des provisions, même en cas de dévastation du territoire. Ces grandes villes garnies d'une enceinte se développaient d'ordinaire en plaine ou sur un terrain en pente, soit sur un site encore inoccupé, soit à la place de la kômé centrale, transformée et agrandie pour la circonstance. La population était constituée tantôt par le dépeuplement total des kômes rurales, d'ordinaire par des prélèvements sur la population de ces dèmes. Tel est le synœcisnne proprement dit, opération concrète, qui suppose forcément la centralisation politique par sympolitie.
A partir (les guerres médiques, la république centralisée, avec capitale fortifiée, devint le type normal de l'État grec. C'est, par rapport à l'ensemble du territoire de la Grèce, la période d'autonomie et de séparatisme communaux, qu'on pourrait appeler rz'r 76),stç. La dernière étape devait réunir en États fédératifs les cités autonomes d'un même corps de nation : c'est le régime qu'on pourrait appeler xzr' iOvr ou xa'rz xotv, (lui fait l'objet d'un précédent article [Éolnox]'. La Grèce antique n'est pas allée plus loin dans la voie (le l'unité.
il. Condition politique des l ômes dans les États centralisés de la Grèce propre. Après la construction des grandes villes par syneecisme, le régime xatâ xcâu.z; ne subsiste plus en Grèce au ve et au Ive siècle que comme une exception, chez les peuples attardés des régions montagneuses, en Arcadie 4, en Étolie en Acarnanie 6, chez les Locriens-Ozoles' et les Épirotes'. Ce régime apparaît alors aux historiens comme une survivance de la barbarie archaïques et comme l'antithèse de l'État plus moderne. Dans ces pays, la kômé subsiste comme unité politique ; au contraire, dans les États syncecisés, quand elle ne disparaît pas complètement de la surface du territoire, elle tombe, ainsi que le dème, au rang infime de l'organisme dépourvu de souveraineté, satellite de la communauté tout entière, et politiquement impuissant. Après avoir été, à l'origine, l'embryon de la cité et avoir formé un petit État par elle-même, du jour où les villes capitales eurent confisqué à leur profit l'idée et les rouages de l'État, la kômé fut considérée comme un membre inactif, où la vie politique ne circulait plus :
V.
à la toute-puissance, à l'activité de la ville s'oppose
l'inertie de la bourgade, et le mot x( 'p.-ri prend alors un
sens presque péjoratif. Ce qui distingue donc essentiellernent la kômé de la Polis État , c'est l'absence de souveraineté. Elle n'a plus d'existence morale propre, puisqu'elle est absorbée par la cité; sa survivance matérielle, après le syneecisme, dépend des circonstances et du milieu; quand la kômé n'en meurt pas, elle en sort toujours appauvrie, car on se tromperait si l'on s'imaginait que tous les synoecismes, même les plus rigoureux, avaient pour effet ordinaire de convertir en désert inhabité la banlieue des grandes villes à qui ils donnaient naissance. Dans les territoires de quelque étendue, il était impossible de supprimer les centres d'exploitation agricole 10. On sait qu'en Attique, par exemple, même après le synoecisme de Thésée, la vie rurale dans les dèmes fut toujours active et chère aux habitants de l'Attique"; Périclès éprouva beaucoup de difficultés à leur imposer le synoecisme strict, c'est-à-dire l'abandon effectif de leurs domaines et la concentration de leurs personnes dans l'enceinte de la capitale 12 : encore n'était-ce, dans son esprit, qu'une mesure provisoire commandée par les nécessités de la guerre. En fait, la ville était un lieu de refuge, le marché central et l'agora politique : on pouvait donc n'y séjourner que par intermittence, pour sa sécurité, ses affaires ou ses devoirs civiques. En fait, les paysans et propriétaires de l'Attique s'acquittaient dé ces derniers avec un certain sans=gêne : leur abstention aux assemblées inquiétait les hommes d'État'3. De même dans la Mantinique, dont le territoire était pourtant bien plus exigu, la plaine ne fut jamais complètement dépeuplée après la création de la capitale. Pausanias nous a laissé les noms de plusieurs des 1:ômes du pays ; si elles étaient en ruines de son temps, c'est parce que la dépopulation était alors générale 74. Mais au ve siècle, on avait dû imaginer une constitution savante permettant aux citoyens cultivateurs de ne pas délaisser leurs cultures pour la politique, et Xénophon affirme que les propriétaires mantinéens accueillirent avec satisfaction le démembrement de leur ville par Agésipolis en 333, parce qu'il les rendait à leurs bourgades et à leurs fermes i5. La Tégéatide et l'Élide ne furent pas non plus dépeuplées par les syncecismes ; du temps de Polybe, il y avait des propriétaires éléens qui ne mettaient jamais les pieds à la ville f6. Parmi les petites villes arcadiennes (zo?icu.arx) mises à contribution pour peupler Mégalopolis, plusieurs semblent avoir été complètement vidées, mais les autres n'eurent sans doute qu'à envoyer une partie de leurs habitants résider à la villei7. Les synoecismes, à l'exemple de celui de Thésée'', respectaient les droits de propriété. Or, la résidence à l'intérieur de la ville n'offrait que peu d'inconvénients pour les propriétaires des domaines de la banlieue immédiate ; elle était presque impossible à. ceux (les domaines lointains, de la -srtotxta ou de l'EC7x.fx. Aussi, d'ordinaire les synoecismes ne dépeuplaient-ils
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que la zone circulaire contiguë à l'enceinte; là, les villages étaient rares, et l'on ne voyait guère que des villas ou des fermes isolées. Mais au delà, à mesure qu'on gagnait les recoins et les confins du territoire, les agglomérations rurales reparaissaient : c'est pourquoi le terme de 7reptotx(ôeç est devenu, en grec, synonyme de
D'une manière générale, ces villages étaient surtout peuplés de fermiers, d'esclaves et de bergers. Notamment dans les États doriens du Péloponnèse et en Thessalie, où existaient des classes de serfs, hilotes, gymnètes, pénestes, ou de demi-citoyens, comme les périèques, les kômes oui-ieptotx(ôeç renfermaient peu de citoyens de plein droit. De là, l'antithèse de plus en plus marquée entre la kômé, séjour de rustres et de vilains, et la ville, où rési
dent, avec le peuple souverain, les (ié),T: st, «otcTC:, É7vt?avlaT3ir t2. Mais la disparition des kômes était si peu consécutive au synoecisme qu'Aristote et Pollux définissent la -6) tç une association (xotvwv(a) de plusieurs Urnes 1.
La conséquence ordinaire du synoecisme pour les localités annexées, c'était donc moins leur suppression matérielle ou leur destruction en tant qu'agglomérations que leur dissolution (xaTxXuatç) comme cités autonomes et aûTOaoa(Tat. Cette dissolution entraînait la perte du prytanée local; car la possession du prytanée était le symbole de la cité' ; la kômé ne pouvait battre mounaie 6 ; enfin, elle perdait son ethnique propre, qui disparaissait ou ne gardait plus que la valeur secondaire d'un démotique, dans les actes intérieurs de la cité. C'était donc la déchéance politique, plus que les conditions matérielles, qui déterminait la situation de la kômé 7. Bien des villes répugnaient à se laisser englober dans un synoecisme ou dans un koinon, par peur d'être ravalées au rang de kômes ou de dèmes et de perdre leur souveraineté et leur ethnique. Dans son projet de synoecisme de l'Ionie, Thalès propose aux villes ioniennes de se donner un gouvernement commun, de choisir Téos pour capitale et, sans diminuer en rien leur population, de se considérer elles-mêmes comme des dèmes °. Les villes annexées à Olynthe ne furent plus, malgré leurs remparts, que des kômes ou des dèmes 2. De même, les villes et les ports de la Magnésie thessalienne tombèrent du rang de 7;61et; autonomes à celui de kômes de Démétrias, après le synoecisme opéré par Démétrios Poliorkétès" A la dissolution des gouvernements locaux dans les villes englobées par un synoecisme s'ajoutait la plupart du temps le démantèlement des remparts. Les exceptions n'étaient admises que pour les localités trop éloignées de la capitale et exposées aux incursions des voisins : Olynthe n'eut garde de désarmer toutes les places de son
vaste territoire. Ces démantèlements expliquent certaines expressions des auteurs qui pourraient être interprétées, à tort, comme signifiant des destructions totales des villes syncecisées" : il ne s'agit, en fait, que de la dissolution politique souvent complétée par le démantèlement. En principe, une kômé est un lieu ouvert (xc5p'
7ta'ro;)12; toutefois, les nombreux castella échelonnés sur rûoYcc, i~upx /wp(a, sont des kômes 13.
Les effets politiques de la sympolitie et du synoecisme étaient équivalents : il y avait toujours absorption d'une cité par l'autre, et la cité absorbée tombait au rang de kômé et perdait son ethnique. Il arrive souvent à Pau-. sanias de répéter la formule qu'il emploie à propos de Gortys d'Arcadie, « kômé aujourd'hui, ville autrefois». De très grandes villes devenaient, sans aucune modification matérielle, par simple déchéance politique, kômes d'une autre ville. Mantinée devint ainsi kômé d'Argosf3, et le même sort faillit être réservé à Corinthe16
La contre-opération du synmcisme, ce que les Grecs appelaient le itotxtrNtç, c'est-à-dire le démembrement d'une ville fortifiée en plusieurs bourgades ouvertes, n'avait pas toujours des conséquences politiques diamétralement inverses de celles du syncecisine. Le vainqueur cherchait surtout à anéantir par le dimeisrne un foyer de résistance et une place forte ; il imposait aux habitants la démolition des remparts et celle des maisons, et les obligeait à aller s'installer dans la campagne, soit dans les anciennes bourgades d'oti la ville détruite était issue par synoecisme, soit dans des établissements nouveaux isolés les uns des autres. Telle fut la conduite d'Agésipolis en 385 à l'égard de Mantinée". Ce démembrement concret assurait l'impuissance militaire de la population dispersée. Chacun des bourgs ainsi formés était qualifié
de kômé et l'expression consacrée était i;ox(;ety eiç xwp.aç1B ou x.acâ xc~uxç'3. De fait, comparées à la ville détruite, les
agglomérations nouvelles n'étaient plus urbaines, mais rurales : matériellement, elles étaient bien des kômes, et la population était retournée à l'état xaTx, xd r; antérieur au synoecisme. A la fin de la deuxième guerre sacrée en 346, le conseil des Amphictyons prononça la destruction et le démembrement des villes des Phocidiens et leur conversion en groupes de kômes qui ne (levaient pas compter chacune plus de 50 maisons ni être à une distance les unes des autres moindre d'un stade (185 mètres)20. Le dimcisme était donc une opération matériellement plus rigoureuse que le synoecisme, en ce sens qu'il y avait destruction effective de la ville démembrée. Mais, moralement, elle pouvait être moins stricte et laisser
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intacte la personnalité politique de la cité. Autrement dit, le vainqueur pouvait tolérer que la population dispersée en kômes continuât à former un État unique, avec magistrats et assemblées communes. La dislocation matérielle de la communauté pouvait lui suffire sans qu'il lui imposât par surcroît la décentralisation politique. Mais, dans le cas oà il prenait ce parti aggravant, l'effet du dicecisme était de créer plusieurs cités avec les morceaux d'une seule : matériellement, il morcelait la -oats en plusieurs xt~u.xt; moralement, il faisait de chacune de ces ao-i!txt une -d),tç autonome, avec son ethnique propre : il recréait le séparatisme'. Ainsi, dans le premier cas, le dioecisme faisait retourner l'État à capitale fortifiée au régime des dèmes unis par sympolitie, à ce que nous avons appelé le synoecisme du premier degré; dans le deuxième cas, il imposait le retour au régime primitif xce rd'p. ç. Un troisième cas pouvait se présenter, quand le vainqueur, après avoir prononcé le dicecisme, s'annexait le territoire : alors, les bourgades issues du démembrement de la ville changeaient de cité et devenaient des kômes de l'État vainqueur : un acte de sympolitie complétait ainsi le dioecisme.
S'il arrivait à des villes de retomber à l'état de kômé, le contraire avait également lieu. Une kômé pouvait devenir
cité autonome (7cdXtç auTo7oa(Tr,;1 et battre monnaie. C'est
ainsi qu'un dème obscur d'Arcadie, celui des Élisphasiens, détaché de Mégalopolis par Philopoemen, fit partie de la Ligue achéenne comme cité autonome 2, et d'autres avec lui 3. Les anciennes xwp.xt 77Ertotx(8E; de la Laconie furent détachées de l'État spartiate pour former une association
7iav 'E),Eu0spo),ax éù'i à l'article holxov) ; de même certains
dèmes d'Argos et de Mégare, dont on possède des monnaies autonomes'.
On voit par ce qui précède que les anciens opposaient nettement la xt à la Tdatç. Ils ne semblent pas l'avoir distinguée, avec une précision égale, du Duos. Les deux termes semblent équivalents : Aristote' et Étienne de Byzance écrivent que le mot xdp.rl désignait dans le Péloponnèse la même chose que 87ip.0; en Attique. Toutefois, contrairement à cette assertion, on relève dans le Péloponnèse l'emploi officiel du mot er,u.oç pour désigner les mêmes localités que les historiens appellent tantôt xWp.a;, tantôt ô-r,p.ot. Ainsi, à propos des bourgs mantinéens, les plus anciens auteurs, Éphore et Xénophon, se servent du mut xwp.ats; de même Diodore et Pausanias9, tandis que Strabon emploie ii'teot'0. Or, on sait par le texte du traité de 011 et par une inscription du ve siècle i2 que les magistrats mantinéens s'appelaient démiurges (82p.(oayot) ; ils étaient au nombre de cinq 13, comme les anciens dèmes ou kômes de Mantinée. Si l'on se rappelle qu'IIésychius" assimile les démiurges péloponnésiens
aux démarques attiques, on peut conclure que le collège des cinq démiurges mantinéens, dans la constitution postérieure au synoecisme des cinq dèmes, n'était que la réunion des magistrats antérieurement individuels de chaque dème, par suite que les kômes mantinéennes, avant le synoecisme, s'appelaient officiellement des dèmes. En fait, les auteurs anciens emploient presque indistinc
xia, Tdao;, yw?x et ,wp(Ovf5. Cependant le mot xtiiu.rl est, dans ce sens, d'un emploi plus général et plus commun que celui de BT,u.oç 16. Sans vouloir introduire dans leur vocabulaire une précision que les anciens n'ont ni connue ni recherchée, il semble pourtant qu'on puisse discerner entre ces équivalents certaines différences de nature. Dans 8'r, i.oç, l'idée dominante est celle de la communauté répartie sur le district. Plusieurs noms de dèmes, comme on l'a remarqué en Attique ", à Tégée ", à Téos i9, dérivent des noms des y€v.ri primitifs qui détenaient le sol ; leur terminaison patronymique en tlxt ou abat indique la filiation par rapport aux ancêtres éponymes. A Xanthos, les noms des dèmes ont trait au culte des héros locaux 20. Dans xey ri, l'idée dominante est celle de l'habitat dans ses rapports avec la nature du sol. Beaucoup de noms de xwp.at rappellent, comme ceux des lieux-dits, une particularité physique, par exemple
Nostané (de vocT(a, retour), kômé de Mantinée située au débouché de la route d'Argos 21 ; Mélangeia (les Terres Noires), kômé de Mantinée 22, dont on peut rapprocher Mélainai en Attique; Karyai (les Noix), kômes de Laconie et d'Arcadie 23 ; Limnai (les Marais), quartier excentrique d'Athènes 25 ; Alôpéké (la Renardière), dème attique ; Leucé Kômé, Iliéra Bômé, etc., bourgs de Stratonicée, en Carie ; la kômé Aphésis (le Débarcadère) dans le quartier du port à Rhodes 25 ; Kyanéai (les Roches Noires) en Lycie, etc. 2'. Ce n'est pas d'ailleurs une règle générale, et beaucoup de noms de kômes, en Asie Mineure, en Syrie, en Thrace, etc., paraissent se rapporter plutôt à des groupes ethniques qu'à des détails topographiques. IIENtotx(; est un terme de nature qui désigne les localités de l'extrême banlieue de la ville ; Td7coç, yw1(ov sont des termes plus vagues qui s'appliquent surtout aux petits groupes d'habitations, aux hameaux, simples annexes d'un dème ou d'une kômé, et dépourvus de toute constitution ou organisation personnelle 27.
Si le dème ou la kômé ne faisaient pas une cité à eux seuls, il ne s'ensuit pas qu'ils fussent dépourvus de toute constitution municipale. En effet, tous deux formaient une communauté non souveraine, une association, un xotvdv. On connaît l'organisation intérieure des dèmes attiques [DÉnos]. On la retrouve ailleurs, par exemple dans les villes dépendant de Démétrias et qualifiées de rip.at par Strabon 28. Un décret de Spalauthra 29 montre
KOM sas KOM
que les dèmes de Démétrias avaient une assemblée locale
(b eu.oç 5 .■.:aaaaulpLwv) ; il y avait à Spalauthra, comme magistrats locaux, deux démarques, sans doute élus par 1 es démotes. Il est fait aussi mention d'un hypostratège, qui semble avoir été, dans chaqu e dème, le subordonné du stratège de Bémétrias préposé àlapolice du territoire, par conséquent un agent du pouvoir central, qui contrôle l'initiative des magistrats locaux'. Les anciens ethniques des villes soumises à Démétrias sont devenus de simples démotiques.
La phrase d'Aristote citée plus haut pourrait faire croire qu'en Attique la kômé se confondait avec le dème et n'avait aucune existence personnelle. Or, une inscription de l'Acropole, récemment publiée par M. Keehler 2, atteste l'existence officielle de la kômé attique, comme dépendance ou subdivision du dème. Elle forme, elle aussi, une communauté, administrée par un ou plusieurs ma
gistrats (xui iT cip'Lovro;) 3, dont le nom est suivi du dé
motique du dème (ici le Phalère) dont dépend la kômé : ces archontes président à la vente d'immeubles sur la valeur desquels est perçu un droit du 100' au profit de la kômé ou du dème. Ces magistrats équivalent aux xwu,zrzat des autres pays, comme à Rhodes 4 et à Lampsaque 3, Les habitants de la kômé s'appelaient xwu.Tizat, comme ceux du dème s'appelaient démotes G.
La kômé, aussi bien que le dème, avait ses sanctuaires ruraux et ses fêtes. Platon? conseille de conduire les en
fants aux lEpû xa•rx xt,iu.aç. Si l'on en croit certains étymo
logistes anciens, la comédie serait issue des fêtes des Dômes 8. Les cultes des kômes remontaient à une très haute antiquité, et, de l'avis même de Thucydide 3, à une époque antérieure au syncecisme. Les paysans de l'Attique ignoraient souvent le nom et le caractère des dieux et des héros épars sur le territoire 10. Tite Live" a vanté le charme des sanctuaires rustiques qui faisaient l'ornement de la campagne d'Athènes et dont quelques bas-reliefs alexandrins peuvent donner une idée 72. Thucydide 13 et Tite Live 14 sont d'accord pour noter l'attachement des Athéniens à ces petits sanctuaires.
De même qu'il y avait des dèmes urbains à Athènes ta et que le terme de vices s'applique à des quartiers de ville 16, les sections de certaines villes étaient appelées xcô(1.2t ".A Rhodes, la kômé de l'Embarcadère (xwua "Aportç), quartier du Port (p.ÉOoç A(p.r,v), avait à sa tête un rmu.4yaç
III. Les kômes hors de la Grèce propre et dans l'Empire romain. Dans les pays barbares où les espaces cultivables étaient plus étendus qu'en Grèce, les grandes villes étaient plus rares, parfois inconnues, et les villages plus nombreux. En Égypte, en Syrie, en Asie Mineure, en Thrace, la kômé resta longtemps l'unité politique la plus vivace, comme le vices et le pages dans les Gaules, en Espagne, dans la vallée du Danube, en Germanie. On a vu, à l'article précédent, l'importance des kômes dans les petits xotvz de Carie, puisque chaque koinon avait à l'assemblée du s)c-er t Xpueaopiwv un nombre de suffrages proportionné à celui des kômes de son territoires. Les prêtres des (lieux locaux semblent avoir été les personnages les plus considérables de ces dèmes 20. Dans le koinon lycien, les principales villes comptaient aussi de nombreuses kômes21 ; des contrats de sympolitie groupaient autour d'un bourg central, choisi comme siège du cûc7ru.a, un certain nombre de bourgades22. Dans le centre et le nord de l'Asie Mineure, en Lycaonie, en Cappadoce, au dire de Xénophon 23 et de Strabon 23, il n'existait presque pas de grandes villes ; en Cappadoce, toutes les localités étaient des kômes sans constitution urbaine ni magistrats 25. Les rois macédoniens, et, à leur exemple, les généraux de la République romaine, puis les empereurs, appliquèrent à tous ces pays, ainsi qu'à ceux de l'Occident qui se trouvaient dans des conditions analogues'', les méthodes de sympolities et de synmcismes que les États de la Grèce propre avaient inaugurées. Le système le plus répandu consistait à réunir en une même circonscription administrative et financière (it)(xrrtç, titi, regio) autour d'une ville chef
lieu un certain nombre de ;do' t, de /wc(a et de ciçoupta (castella) 27. Ces kômes, souvent aussi désignées dans les inscriptions d'Asie Mineure par le ternie de xa otx:a 28, étaient, dans la langue administrative des Romains, appelés pagi ou vici contributi ou attributs (au'.ToattitutN.Evot) par rapport à la cité (rt)c1TE(a), ville, municipe ou colonie, dont ils dépendaient, dont ils subissaient la juridiction et à qui ils payaient impôt". Les kômes et x .rotx(at possédaient en général une certaine autonomie pour le gouvernement de leurs affaires locales ; elles formaient une association (rotvôv) qui rendait des décrets honorifiques 30, avait ses magistrats propres (xw;,.xpzat) 31, pour
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voyait à l'entretien des sanctuaires' et des édifices, et administrait la caisse du village alimentée par des revenus propres et le produit de certaines amendes 2. Les habitants d'une kômé ou x(op.-q.at pouvaient faire parvenir leurs doléances. par l'intermédiaire d'un defensor de la cité, au gouverneur de la province et à l'empereur. Une importante inscription contient une pétition des habitants de la kômé de Skaptoparéné, en Thrace, dépendance de la 7;o),t2E:a de Pautalia. Ce village possédait une station thermale qui avait le don de détourner de leur route les soldats, officiers et fonctionnaires de passage: ceux-ci venaient prendre les eaux et se faire héberger sans mission officielle. De plus, une panégyrie célèbre avait lieu dans les environs de la kômé; des postes militaires empruntés aux deux camps voisins étaient détachés pendant quinze jours pour faire la police de la fête ; mais, au lieu de rester à leur poste, ils venaient vivre à la kômé et la ruinaient par leurs exigences. C'était un vrai désastre pour les habitants, qui déclarent à l'empereur Gordien être prêts à émigrer s'il ne met pas un terme à ces abus. La pétition, résumée par l'avocat, homme d'affaires (7rpayu.x-ro,Àç) de la cité fut présentée d'abord au gouverneur, puis portée à Rome par un habitant de la kômé, qualifié de convicanus et mil. compossessor. Le plus important des bourgs d'un canton portait parfois le nom de
xwp.dreoats 4 ou de ur,'rpor(ou.(z ; ce dernier titre était celui des chefs-lieux de toparch.ies en Judée
Les Romains, comme les Grecs, modifièrent parfois la situation respective des villes et des kômes, faisant déchoir les unes et monter les autres 6.
L'organisation de l'Égypte et de la Judée était spéciale. Les Unies d'Égypte sont des subdivisions des toparchics, qui elles-mêmes sont des arrondissements des nomes. De même qu'il y avait à la tète du nome un stratège assisté d'un nomograinmate, à la tête des toparchies un toparque assisté d'un topogramDtate, il y avait à la tète de la kômé un kdnlarque assisté d'un kômogrammate : ce dernier tenait les archives et les registres cadastraux, bases de la répartition de l'impôt. Les papyrus font aussi mention, dans la kômé, de 7rpECÔJTEpot, notables qui sont responsables de l'impôt'. Ces fonctionnaires dépendaient du stratège, commandant le nome. Mérode introduisit en Judée une organisation similaire 8. Le tribut y était perçu dans les kômes au nom des magistrats et du conseil de Jérusalem'.
Les lexicographes donnent aussi au mot rtdp.71 le sens des mots latins nlansio, /nutatio, gîte d'étape, relai, en
ICOMlRIA KGU.uptz . Komyros est un surnom de
Zeus à Halicarnasse'. Jusqu'ici le culte de cette divinité n'est connu que par les inscriptions trouvées au sanctuaire de Zeus Panamaros, à Stratonicée de Carie, par MM. Cousin et Deschamps 2. Il y avait à Panamara un sanctuaire, appelé Kou.éptov, qui était sans doute le temple particulier de Zeus K(iu.upo;; les lioMYBIA étaient, à côté des IIERAIA et (les PANAMAREIA, une des grandes fêtes de Stratonicée. Ces fêtes duraient deux jours ; une procession solennelle quittait Stratonicée, et se mettait en marche par les chemins de montagne qui séparent Panamara de la métropole. On portait la statue du dieu; il semble résulter d'un texte que le dieu était porté par un cheval que les riches citoyens se faisaient gloire de consacrer au service divin. Des tentes étaient dressées autour du Komyrion de Panamara pour abriter les pèlerins. Pendant la procession, on distribuait aux fidèles des aliments, en particulier du vin. A Panamara même, avaient lieu les sacrifices, avec les festins accoutumés; puis (les distributions générales de vin, de viande, de bois. Les pèlerins consacraient leur chevelure à Zeus, dans le Iomyrion 3. Enfin des mystères, sur lesquels nous n'avons aucun détail, étaient célébrés dans le Komyrion ; peut-être y avait-il un lien entre ces mystères et la consécration des chevelures. Nous voyons que ces consécrations de chevelures sont toujours faites par des hommes ; d'autre part, il semble résulter de quelques textes que les femmes n'étaient pas admises dans le Komyrion ; il est donc vraisemblable qu'à Panamara Ies KOSIVRIA étaient essentiellement la fête des hommes, comme les IIFRAIA étaient la fête des femmes. Au moins pour les Cariens, cette fête devait avoir une grande importance; car nous voyons quo les prêtres qui la célébraient pendant l'année de leur exercice ne manquent
pas de le marquer par ces mots : iECEirÿ iv Kou.upiot; 4.
L. Couve.
1.0XEION xdvE(ov)1, Ciguë. Les naturalistes ne
sont pas d'accord sur la variété de ciguë que les Grecs désignaient sous ce nom. Le plus grand nombre tient
pour la grande ciguë, ciguë officinale ou ciguë tachetée (coniunl lnaculalum L. ; mais la ciguë vireuse (cicuta virola L.) a ses partisans2.
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La description fragmentaire que donnent du xd'inov les auteurs anciens est insuffisante pour imposer une solution. Voici ce qu'en disent Théophraste, Pline et Dioscoride. Les racines sont creuses'. Le poison qu'elles renferment n'est pas très actif 2 : elles restent à peu près sans usage 3 ; exceptionnellement, elles servent en droguerie'. La tige, charnues, glabre, noirâtre, articulée à la façon du fenouil ° ou du roseau, et rameuse au sommet, atteint une hauteur de deux coudées «environ 0 m. 90). Elle ne présente pas de toxicité appréciable ; elle est même comestible et d'un emploi courant, crue ou cuite s. La feuille ressemble à celle du persil des montagnes °. Elle rappelle encore celle de la férule10 ou de la coriandre", mais est plus étroite que l'une, plus molle que l'autre, et dégage une odeur fétide. Elle contient un toxique d'une' virulence extrême au moment de la floraison. A plus forte raison en est-il ainsi de la fleur ellemême, qui s'élève en ombelles blanches". Mais c'est dans la graine surtout, un peu plus grossei3 et plus blanche" que l'anis, que réside le principe dangereux u, Il sort, quand on pile les parties vénéneuses, sous la forme d'un liquide laiteux qui s'épaissit au soleil lis
Selon Théophraste ", la ciguë la plus active pousse dans les endroits les plus froids, à l'ombre. Mais il est permis de voir dans cette remarque, non pas le résultat d'observations sérieuses, mais une déduction théorique de l'hypothèse sur les propriétés réfrigérantes de la plante. En réalité, on constate aujourd'hui que la ciguë est inerte dans les contrées septentrionales 18. D'ailleurs, dans l'antiquité grecque et romaine, la ciguë la plus réputée provenait de Suse1°, c'est-à-dire d'une région que Théophraste lui-même 2° déclare « en feu ». En pays grec, les espèces les plus estimées étaient celles de l'Asie Mineure 2t et de la Cilicie 22, de Crète 23 et de Chio 2', de Mégaride et d'Attique". En Attique, si elle était très violente 26, elle était très rare, à tel point qu'on considéra comme un mauvais présage de la voir pousser dru autour des autels élevés à Démétrios et à Antigone 27. Les plus grandes quantités étaient fournies par la Laconie
Les naturalistes et les médecins de l'antiquité étudièrent avec soin les propriétés diverses de la ciguë L0. Ils firent des observations sur les animaux. Ils accueillirent cependant des préjugés populaires ou répandirent des préjugés scientifiques. On disait que la ciguë engraisse les porcs 30 et les chèvres qu'elle sert d'aliment aux étourneaux32. Par contre, elle passait pour nuisible aux cygnes" et aux abeilles 36.
En thérapeutique, la ciguë était d'un emploi très fré
gtlent : Dioscoride la déclare 7oaûXF-r16'rov ûyfacrtx•.]v
yP5'iaty. On pourrait supposer, d'après les récits mythologiques, qu'il en allait ainsi dès l'époque la plus reculée; mais le breuvage de ciguë offert par les Péliades à leur père malade35 est un détail ajouté à la légende après coup, comme le suicide de Sthénéboia par la ciguë". Pour l'usage interne, Hippocrate et Galien prescrivaient la ciguë dans des cas très rares et en recommandant les plus grandes précautions : celui-ci la faisait broyer et étendre d'eau37; celui-là ne voulait pas qu'en purge la dose dépassât la prise de trois doigts78. Ce n'est que dans les potions abortives qu'on faisait entrer souvent le dangereux poison. Mais pour l'usage externe il est indiqué à profusion. Pline le recommande longuement et à maintes reprises : « On s'en sert, dit-il", au lieu d'eau pour délayer certains médicaments. On en prépare un emplâtre pour rafraîchir l'estomac. II est spécialement bon en topique pour arrêter les fluxions des yeux qui surviennent pendant l'été et pour calmer la douleur de ces organes. Il entre dans les collyres «0.... Les feuilles aussi calment toute tuméfaction, toute douleur, toute fluxion des yeux''. Anaxilaos prétend que les mamelles frottées de ciguë avant la puberté demeurent stationnaires 42; ce qui est certain, c'est qu'en topique sur les mamelles, cette substance tarit le lait des nouvelles accouchées 43. » Les feuilles pilées ou l'extrait incorporé à de la farine et du vin étaient indiqués pour le traitement de l'érysipèle, de l'herpès, de l'ulcère rongeant ou putride''. Les graines macérées dans le vin étaient utiles pour la fistule'•. Surtout avec l'axonge, la ciguë était bonne contre les (luxions'°, les luxations47, la gouttes. La graine en solution était regardée comme le meilleur hémostatique pour l'hémorragie nasale'. Cu qui montre bien quelle confiance les patients pouvaient accorder à toutes ces recettes, c'est que la semence de Gigue passait pour un épilatoire '30, et la racine pour un remède contre l'alopécie'. Enfin, la ciguë, à cause de la vertu réfrigérante qu'on lui attribuait, servait d'anaphrodisiaque. « Appliquée vers l'époque de la puberté, à cc que dit Pline, elle éteint tout désir vénérien52, » L'hiérophante d'Eleusis, qui était tenu à la chasteté, se réduisait à l'impuissance, non pas à l'aide d'une potion, comme le dit saint Jérôme o3, mais au moyen d'un onguent à base de ciguë J4.
Malgré tout, la ciguë était encore plus connue comme poison mortel. Sur la préparation de ce poison, nos sources sont vagues et obscures'. A l'époque de 'Méo
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phraste, à ce qu'il semble, on n'employait encore la ciguë qu'en potion 1. Mais les modes de préparation variaient. Suivant la vieille méthode, on broyait le fruit, tel quel, dans un mortier2. Cette méthode, qui fut longtemps d'une pratique universelle, servait au supplice des condamnés athéniens dès le ve siècle et était encore usitée en 397 3. Pour que la mort fât certaine, il fallait boire de cette préparation pour une valeur marchande de douze drachmes'. On ne préparait jamais que la quantité nécessaire sur le moment : on disait que la ciguë, soumise à une forte chaleur, n'a plus d'efficacité', et, en effet, la cicutine, comme on l'a observé de nos jours, perd sa force à l'air au fur et à mesure qu'elle se résinifie7. Mais, vers la lin du Ive siècle, on obtint, par une méthode nouvelle, un produit purifié et plus actif. La graine était épluchée; l'amande, débarrassée du tégument, était pilée et passée au tamis fin avec un peu d'eau e. Thrasyas de Mantinée eut l'idée de composer une solution oft il mêla au suc de cigué toutes sortes de substances toxiques, narcotiques et calmantes, telles que le suc de pavot'. On avait ainsi un poison inaltérable10, dont les effets étaient certains, rapides, sans douleur. Il suffisait d'en absorber le poids d'une drachme (1 gr. 363). Après Théophraste, la pharmacie grecque fabriqua des trochisques de ciguë : on se servait, à cet effet, de la pâte malléable que formait le suc de la graine figé à l'air 11
L'action physiologique de la ciguë fut observée minutieusement. On était d'accord sur ce point que la ciguë tue par le froid'''. Elle ne peut agir que si le patient présente assez de chaleur naturelle et n'en présente pas trop. Voilà pourquoi on engageait les condamnés athéniens à se promener doucement après l'ingestion du poison13, mais à ne pas s'agiter auparavant par une conversation animée : sinon, il aurait fallu, pour obtenir l'effet, une dose massive, et Socrate, avant de s'échauffer sur la question de l'immortalité de l'âme, donna l'ordre de doubler ou tripler la dose 1'. Il nous reste plusieurs descriptions de l'empoisonnement par la cigué, avec des détails très circonstanciés. La plus fameuse est celle de la mort (le Socrate, dans le l'héclon. « Il se promenait, lorsqu'il dit qu'il sentait ses jambes s'appesantir, et il se coucha sur le dos ; ainsi l'avait ordonné l'homme. En même temps s'approcha cet homme qui lui avait donné le poison : un moment, il lui inspecta les pieds et les jambes, puis il lui serra fort le pied et lui demanda s'il le sentait. Il dit que non. Après, il lui serra les jambes et, remontant, il nous fit voir que le corps se glaçait et se raidissait. Il était seul à le toucher, et il nous dit que
dès que le coeur serait pris, ce serait fini. Déjà le basventre était glacé. Se découvrant, car il était couvert, il dit, et ce furent ses dernières paroles : « Criton, nous («lev ons un coq à Asclèpios : acquittez cette dette, n'ou« bliez pas. » « Ce sera fait, répondit Criton ; vois si
tuas encore quelque chose à dire. » Il ne répondit pas; au bout d'un instant, il fit un mouvement. L'homme le découvrit entièrement : ses regards étaient fixes. A cette vue, Criton lui ferma la bouche et les yeux 1a. » Cette description est confirmée par la plupart des auteurs anciens, qui s'accordent à déclarer que l'engourdissement commence par les extrémités inférieures, pour atteindre le coeur en dernier lieu 16, et que la mort vient vite, sans convulsion, sans souffrance17. Elle est en parfaite harmonie avec les données de la science contemporaine qui admet que «la copine et son bromhydrate agissent en paralysant les nerfs moteurs » 18 et que « le coeur est l'ultiinnnt Inoriens" ». Mais la description donnée par Nicandre2o, très précise, quoiqu'en vers, est toute différente. Elle ne reconnaît pas l'empoisonnement par la ciguë une marche aussi régulière et douce. Tous les symptômes se présentent à la fois : la tête est prise de vertige, l'intelligence s'obscurcit, la vue se trouble et se voile 21, les yeux roulent hagards, les genoux fléchissent et les mains ont peine à soutenir le corps affaissé, la gorge se serre, les extrémités s'engourdissent; quand la circulation et la respiration se sont ralenties, la mort vient comme un évanouissement. Ces périodes successives, l'une de surexcitation, l'autre de dépression mortelle, se retrouvent aussi dans les ouvrages de nos savants". Enfin, d'après Pline, le suc épaissi n'aurait pas la même action que le suc liquide : « Il donne la mort en coagulant le sang ; aussi ceux qu'il tue ont-ils le corps parsemé de taches 23 » Toutes ces affirmations laissent subsister bien des obscurités sur les effets physiologiques de la ciguë. Mais la question n'est guère plus élucidée aujourd'hui21, et peutêtre trouverait-on de précieuses indications dans les traités de médecine grecque encore inédits 2''.
L'antiquité citait des cas où l'organisme humain s'est montré réfractaire à la ciguë 26. Le cicutisme constitutionnel, croyait-on, peut être acquis par une absorption progressive ou causé par un affaiblissement général. Galien27 raconte qu'une vieille femme d'Athènes était arrivée, par doses de plus en plus fortes, à ingérer impunément la ciguë par masses. D'après Tacite 28, Sénèque avala vainement la ciguë qu'il avait obtenue de son médecin : son corps étique n'avait plus assez de chaleur vitale. Si le premier exemple semble présenter toutes
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garanties d'exactitude, l'explication donnée pour le second se fonde sur une théorie fausse. Nous voyons, au contraire, par la mort du Philopoemen, qu'un corps épuisé n'offre aucune résistance au poison'. Il est donc vraisemblable que Statius Annwus remit exprès à son ami une préparation anodine, à moins qu'à Rome on se procurât difficilement de la ciguë manipulée selon la formule athénienne ou en bon état de conservation.
Les hommes de l'art ne connaissaient pas de contrepoison pour la solution de Thrasyas 2. Mais ils croyaient en posséder un grand nombre pour les autres cas d'empoisonnement par la ciguë 3. Si l'on essayait parfois de débarrasser l'organisme par un vomitif ou un clystère
le principe général était que, le toxique agissant par le froid, on doit le combattre par le réchauffement 6. L'antidote appliqué ordinairement était le vin pur par grandes quantités6. Préjugé? En tout cas, préjugé solidement établi. Les ivrognes prenaient de la ciguë, pour se forcer ensuite à ingurgiter du vin 7. On voit des voleurs, sur le point de tenter un coup dans un temple, absorber de la ciguë et emporter une bouteille de vin, décidés à éviter la torture par la mort en cas d'arrestation et à boire le vin en cas de réussite 8. La neutralisation de la ciguë par le vin semblait donc un fait acquis. Tout s'explique peut-être par l'énorme proportion de tannin que devait contenir le vin épais des anciens : le tannin est le contrepoison classique des alcaloïdes. Cependant on disait qu'avalée dans le vin même, la ciguë est infailliblement foudroyante et que peu de vin en exaspère la virulence10: les médecins ne pouvaient donc jamais être pris en défaut. Outre le vin, l'huile d'olive", surtout mêlée au moût noir '2, et le lait1', surtout le lait d'ânesse14, passaient pour de puissants réactifs. La rue et la ciguë étaient pour les homéopathes de l'antiquité des poisons opposables, des venenorunt venena' S. On mêlait au vin des feuilles pilées de rue quelconque '6 mais plutôt de la racine de rue sauvage, et la potion était souveraine, lorsqu'elle était bue en plein air''. On vantait pour leur efficacité le poivre 1', la semence d'ortie10, de coriandre et de psyllium 20, l'absinthe 21, le daphné 22, l'ornithogale, le muscari, la centaurée 23, le silphium 24, l'oliban n, l'iris 26, le styrax", etc. Les moyens ne manquaient donc pas pour combattre les accidents causés par la cigué.
Mais souvent les empoisonnements par la ciguë étaient volontaires : une fin si prompte et si douce tentait les désespérés. C'était toutefois un suicide de luxe, que ne s'offraient guère les pauvres gens, vu le prix 28. La mode en fut répandue dans le monde grec par Céos. Là, au milieu d'une population trop dense 29, le pessimisme
devait naître spontanément et pousser à sa conclusion pratique, le désir de la mort33. Là aussi semblent avoir été inventées diverses manipulations de la ciguë 3t. Avec cette propension morale et ces facilités matérielles, à Céos le suicide par empoisonnement fut endémique. Si le philosophe Prodicos, qui était Céien 77, but le poison, ce ne fut pas en vertu d'une condamnation, comme l'affirme Suidas 7', que hante le souvenir de Socrate, mais tout simplement par dégoût de la vie 3'P. « Heureusement que je me souviens de nia patrie, » dit un autre Céien, le médecin Erasistratos, vieilli, malade ; et il but la potion libératrice", Valère Maxime 36 raconte longuement une scène dont il fut témoin à Céos : une vieille darne de la haute société, pour échapper aux maux dont l'âge la menaçait, vida la coupe en public, solennellement. Ainsi la tradition est établie dès le ve siècle et se perpétue au moins jusqu'au ter siècle de l'ère chrétienne. C'est cette tradition qu'on a voulu maladroitement transformer en loi positive. Ménandre n avait fait allusion à une « coutume» (vdu.tµov); Iléraclide du Pont" avait raconté que les habitants de l'lle, « surtout les femmes », préviennent les infirmités de l'extrême vieillesse au moyen de pavot ou de ciguë. Mais voici Strabon n qui se rappelle que dans une circonstance extraordinaire, un siège, les vieillards de Céos en masse burent de la ciguë, pour débarrasser les combattants de bouches inutiles. C'est assez pour que Strabon, après avoir cité le mot vfp.tu.ov, de Ménandre, y substitue pour son compte le mot vf.ros, et fixe à soixante ans l'àge où les Céiens étaient légalement tenus de boire la ciguë. D'ailleurs, il dit que cette loi existait « jadis » et n'en est pas trop sûr (toril, tIs '✓otxsv). il n'empêche : désormais la légende fait son chemin. Éliend0 mentionne la loi céienne, comme si elle était e11 vigueur de son temps ; mais il ne fait que mêler à l'assertion de Strabon les détails pittoresques du suicide narré par Valère Maxime. Or, Valère Maxime parle d'une femme plus que nonagénaire, à qui l'on déconseille de se donner la mort. L'existence de la loi céienne n'a donc d'autre garant que Strabon, qui ne garantit trop rient', Les magistrats n'interviennent ni pour ordonner ni même pour autoriser le suicide. Celui qui se prépare à mourir les avertit pour les mêmes motifs qui lui font boire la ciguë en présence de témoins et couronne en tète, comme à un banquet ou un sacrifice" : il assure l'exécution de ses dernières volontés et veut qu'on n'accuse personne de sa mort.
Les Céiens firent école. Leur nom fut partout associé au suicide par la cigué '3. C'est en cherchant l'origine d'une coutume pratiquée à Massilie que Valère Maxime est amené à raconter sa célèbre anecdote. Mais il croit
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que les Massaliotes avaient un dépôt officiel de ciguë, où venait s'approvisionner quiconque avait obtenu du Conseil des Six Cents l'autorisation de mourir en justifiant d'un motif valable'. Encore la prétendue loi des Céiens, avec une nouvelle déformation ! Si vraiment on a jamais demandé aux Six Cents la permission de boire la ciguë, cette demande n'a pu ètre faite que pax des condamnés à mort qui voulaient échapper à toute souffrance2.
Nous pouvons maintenant nous tourner versAthènes. On n'y connut la mort par la ciguë que dans la dernière partie du ve siècle. Les sophistes, particulièrement les Céiens Prodicos3 et Théramène', enseignèrent la théorie du suiçide et indiquèrent la manière la plus simple de l'appliquer. Quelques-uns de leurs élèves, fils de familles ruinés, se réunirent en un symposion pour boire la coupe suprême 5. Il y avait là, aux yeux d'un Euripide, un beau geste, et bien vraisemblable en ce temps, pour une grande amoureuse à faire mourir au dénouement 6. Les rhéteurs prétendirent plus tard qu'à Athènes aussi existait une autorisation de suicide légal, qui devait être sollicitée de l'Aréopage'. Mais, même si l'on réduit cette autorisation à une dispense des pénalités posthumes s, l'hypothèse est plus insoutenable encore pour Athènes que pour Céos et Massilie 9.
Du moins est-ce au nom de l'État que la ciguë était apportée dans la cellule des condamnés à mort. Les exemples abondent dans l'histoire d'Athènes, depuis Théramène 10 et Polémarchos" jusqu'à Phocion " en passant par Socrate. En dehors des personnages connus, une multitude de comparses furent tués ainsi par les Trente 13 ; autour de Socrate, au moment fatal, on rappelle ce qu'ont fait « beaucoup d'autres » qui ont passé par là14. Aussi la ciguë figure-t-elle dans l'attirail ordinaire du bourreau t5. Lorsque Pline 16 écrit : Cicula publica Atheniensiunt poeua, il reproduit une opinion incontestée de son temps 11 et qui depuis semble s'imposer i8.
Est-il certain cependant qu'une disposition formelle déclarât l'empoisonnement par la ciguë mode légal d'exécution et déterminât les catégories de condamnés auxquelles il s'appliquerait? Ou le tribunal spécifiait-il, dans le prononcé de la sentence capitale, la manière dont la ciguë serait donnée ? Ni l'une ni l'autre de ces conjectures ne parait confirmée par les documents.
En fait, que voit-on? C'est sous les Trente que pour la première fois des Athéniens périrent en prison, empoisonnés. Mais la loi n'y était pour rien, ni le juge. Une scholie prétend bien que Théramène fut l'auteur d'un décret aux termes duquel la ciguë fut introduite dans le système pénal d'Athènes f9. Qu'en faut-il retenir? Que Théramène fit accorder aux victimes de ces collèges la
V.
faveur de mourir sans douleur, à l'aide du poison qu'il connaissait bien. Ce qu'un Théramène proposa par modération, un Critias le fit par politique. Ne voulant ni éclats ni cruautés inutiles, pour supprimer un ennemi, il le faisait arrêter et lui envoyait l'ordre de boire la ciguë. C'était commode: pas de jugement à intenter, pas de défense à craindre, pas le moindre prétexte à fournir, et l'on évitait l'appareil odieux du supplice public20. Les Trente employaient le poison sans plus se soucier de légalité qu'Olympias, lorsqu'elle sommait Eurydice de choisir entre « les trois genres de mort n, la ciguë, le lacet et l'épée 2i, ou que les Messéniens, lorsqu'ils envoyaient à Philopoemen sans autre formalité un esclave porteur de la coupe funèbre", ou encore que ce tyran d'Héraclée, Cléarchos, qui faisait un si large emploi de la ciguë que l'usage des antidotes était devenu la seule ressource de l'opposition 23.
Après la chute des Trente, tandis que le condamné pour crime de droit commun était mis à mort au BARATIIRON par la main du bourreau, on laissa au condamné pour crime politique" la faculté de mourir tranquillement, non pas dans sa maison, mais pourtant en famille. Les Onze, chargés de veiller aux exécutions comme représentants de la République, font ôter les fers à Socrate et le préviennent que le jour fatal est arrivé 25; mais aussitôt ils se retirent, et le condamné ne trouve plus en sa pré
sence que leur ûtrripETTiç26 [11ENDEKA]. Il s'entend avec cet
homme sur la dose nécessaire 27. Il est libre de choisir son heure. « Beaucoup d'autres n'ont bu le poison que longtemps après que l'ordre leur en a été donné 28 ; tant qu'ils ont voulu, ils ont pu manger, boire, se livrer à leurs amours 29. Lui-même il prend un bain, embrasse femme et enfants, s'entretient toute la journée avec ses amis 30 et alors seulement reçoit la coupe. Est-ce là une exécution légale? Non, mais un suicide toléré. Ainsi l'entendait Platon ; car, lorsqu'il examine la question du suicide, il en admet la légitimité morale dans le cas où il est la conséquence d'un jugement rendu par la cité 3'. Sinon, comment s'expliquerait-on que tous les condamnés à mort pour crime politique n'aient pas également bu la ciguë? Comment Phocion aurait-il été obligé de payer sa dose de poison32? Le bourreau qui ne voulait pas la lui remettre gratis était-il donc en droit d'empêcher ou même de suspendre l'effet de la sentence rendue? Si l'on recule devant cette conclusion, évidemment insoutenable, il n'en reste qu'une: c'est que, faute d'acquitter le prix d'une mort douce, le condamné aurait été mené à une mort plus cruelle. La ciguë est achetée aux frais de Phocion, comme elle l'est aux frais de Socrate, qui en commande une dose double ou triple, comme elle l'est aux
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frais de tous ceux qui dans la prison d'Athènes devancent le supplice par le suicide.
Et ce n'est point là un chef-d'œuvre d'ironie féroce, mais une suprème concession faite par un peuple dont la mansuétude habituelle n'a pas su aller jusqu'à la suppression de la peine capitale en matière politique. Dans ce détail des institutions attiques, on a vu quelque chose ab hunaanitate attica alienum 1 ; il vaut mieux y voir avec Grole the minimum of pain as well as the mi
nimum of indignity2. GUSTAVE GLOTZ.
IiORKIA (K6pctx). Fêtes et sacrifices en l'honneur de Koré t. Il ne s'agit pas ici de faire l'histoire du culte de Koré, qu'on trouvera aux articles CURES, PROSERPIr A, ni
d'étudier toutes les fêtes qui étaient célébrées en l'honneur de cette divinité; la plupart de ces fêtes, portant des dénominations spéciales, sont étudiées dans des articles
DEMETRIA, EPIDAURIA, etc. 11 s'agit simplement ici d'indi
quer les villes où se célébraient des têtes plus particulièrement appelées KdpEtx.
1. C'est d'abord à Syracuse, un des grands centres du culte des Grandes Déesses. A côté des DEMETRIA, consacrées à Déméter, et célébrées au moment des semailles, il y avait les KOREIA, consacrées à Koré-Perséphone, dont elles commémoraient l'hymen avec Hadès-Pluton C'était une fête d'été, coïncidant avec la maturité des grains. Si
correspondaient aux Grandes Eleusinies [ELE1)SiNIA] ; en Sicile même, elles avaient leur pendant dans les 'HEOGAMIA d'Agrigente. Comme la fête rappelait la descente de Perséphone aux Enfers, elle portait aussi le nom de xxTxytuy-Il Kdp~ç'; elle se composait de cérémonies mystérieuses, où les initiés descendaient dans le temple souterrain de la déesse, pour y prêter le serment le plus redoutable ; cela se passait près de la fontaine Cyané, où les Syracusains prétendaient montrer la place à laquelle Pluton s'était englouti dans les entrailles de la terre en emportant Perséphone La légende voulait que cette fête annuelle eût été instituée par Héraklès, en reconnaissance de sa victoire sur Géryon A l'occasion de la fête, et en manière de sacrifice, on faisait submerger des taureaux ; c'est Héraclès, disait-on, qui avait enseigné aux Syracusains ce mode de sacrifice a.
II. Les textes signalent des fêtes analogues, commémorant également laxciTaynrir Kprlç, à Alexandrie d'Égypte et à, Cyzique 8. Celles de Cyzique devaient avoir une grande importance ; on nous parle de spondophores et de théores
allant dans tous les pays grecs, et ,jusqu'en Égypte, annoncer la trêve sacrée et les jeux 0. Les xoREIA de Cyzique, dont parle Strabon, se confondent peut-être avec les PIIERREPHATTIA dont parle Plutarque 10.
III. Dans la Grèce propre, l'Arcadie était un des centres les plus importants du culte de Koré 11. Une scholie de Pindare signale une fête des IioREIA en Arcadie ; Foeckh a supposé qu'on pouvait rapporter cette fête à la ville de Cleitor, qui avait un sanctuaire fameux de Déméter 12 Il faudrait alors identifier les 1OREIA avec les KoRIASIA de Cleitor, que nous connaissons par des inscriptions t3, et qui comportaient des concours gymniques. C'est très vraisemblable. 11 faut pourtant remarquer que Pausaijias signale à Cleitor un temple d'A.théna Kop(x 14, et qu'un autre texte parle d'Artémis Kopia, adorée également en Arcadie 16. En supposant même qu'il faille confondre Artémis et Athéna Kopfz' 6, nous ne savons pas si les FORIAsIA de Cleitor se rapportent à Perséphone ou à Athéna.
IV. A Mantinée, où il y avait un temple de Déméter et Koré dans lequel était entretenu un foyer sacré 17, il y avait une fête que nous connaissons par un texte épigraphique et qui s'appelait KORAGIA (xopzyta) 16, La fête avait lieu dans le temple commun des deux déesses, le Kopxytov. Mais il est à remarquer que l'inscription en question ne mentionne qu'une seule divinité, 9E6ç, qui est évidemment Koré. Si les deux déesses n'avaient qu'un temple, elles avaient chacune son culte particulier. Les KORAGIA, fête propre de Perséphone, étaient organisées et célébrées par les soins d'un collège de prêtresses, appelées Kdpxyot. Le nom même de la fête en indique la signification (xopxymiv) ; c'était la célébration de l'âvoloç, du retour de Koré. La déesse était censée remonter ce jourlà des enfers ; on transportait la statue, hors du temple, chez une personne (lui lui donnait l'hospitalité. Puis c'était le retour solennel au sanctuaire, avec une 7op7 r'. La fête était accompagnée d'un sacrifice, offert à la déesse par le collège des Kdpayot, et d'un repas sacré après le sacrifice. Les prêtresses offraient à la déesse un péplos, dont elles paraient la statue. Enfin, venait la célébration des mystères. Le jour des KoRAG1A, le temple des déesses était ouvert à la foule. Il est probable que Mégare possédait aussi un culte et des jeux en l'honneur de Koré". L. Couva.
I ORYIIOS [coRVcus).
essentiellement des individus armés de la massue 1. C'est le nom que portaient par exemple les gardes de Pisistrate et de ses fils 2, et encore, à la fin de l'Empire romain, dans l'Orient, les agents des magistrats de police appelés
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eïprvoaar.Eç1. A Sicyone, il y eut aussi une classe de korynéphores; plusieurs auteurs anciens2, suivis par la plupart des auteurs modernes, les assimilent aux hilotes de Sparte et aux serfs de l'Argolide; cette assimilation est cependant douteuse; car nous savons d'autre parti qu'il y avait à Sicyone sous les tyrans, et à Athènes sous Pisistrate, une classe de la population qui, habillée de la x c owixri, c'est-à-dire d'un vêtement de laine bordé d'une peau (le mouton, s'appelait pour cette raison les z r ovaxo:(dpol; Théopompe 4 les compare aux Epeunaktes de Sparte et dit qu'ils étaient esclaves ; par conséquent les Korynéphores de Sicyone étaient plutôt soit des gardes des tyrans, d'origine servile, analogues à ceux de Pisistrate, soit des paysans qui servaient, comme infanterie
ll_OSMÈTÊS (hocpT,riiç). Nom du magistrat qui, à partir du 1110 siècle avant notre ère, semble avoir occupé, à Athènes, le premier rang parmi les fonctionnaires éphébiques [Ennui]. Nous ignorons la date de son apparition dans l'histoire du collège. Pour Krause, qui ne connaissait l'éphébie que par des documents de basse époque, le cosmète n'était pas antérieur à l'Empire romain 1. Pour Grasberger, il serait du commencement du In« siècle avant J.-C.'. A. Dumont, se fondant sur les rares allusions au cosmétat que contiennent les textes littéraires, pense qu'il faut voir dans cette fonction une magistrature d'origine ancienne 3. Le plus vieux témoignage d'auteur qui nomme le cosmète d'une manière certaine est aujourd'hui un passage de la Constitution d'Athènes par Aristote, où le premier éditeur, M. Kenyon, avait d'abord déchiffré E7r1D.EarTw, et où d'autres ont proposé (cette conjecture s'est trouvée complètement confirmée par un nouvel examen du papyrus) de lire xoep.-ritrv'. Or la Constitution d'Athènes est, selon toute apparence, des dernières années d'Aristote ; la plupart des critiques s'accordent à en placer la composition entre 330 et 3256. Une inscription nous permet de remonter un peu plus haut : c'est une dédicace récemment découverte à R,hamnonte et qui débute ainsi : [OE]oc9 vrç `IEpop(ôl)vT05
la forme ordinaire (oi kT ot oi É7ti...), de trois années éphébiques consécutives, depuis 333 jusqu'à 3317.
Tel est, sur le cosmète, le plus ancien texte épigraphique que nous possédions. Cela ne veut pas dire que ce fonctionnaire date seulement de 333. L'emploi du mot xocti.rr7iç par Platon dans son dialogue des Lois, écrit peu de temps avant sa mort, qui est de 347 ; la mention du cosmète des éphèbes dans l'Axiocltos, s'il était prouvé que cet opuscule est bien d'Eschine le Socratique, nous reporteraient à des temps plus anciens encore 6. En réalité, il est possible que le cosmète soit contemporain des commencements mêmes de l'éphébie, dont on sait combien les
origines sont obscures. Peut-être, si l'on songe que cette institution fut, pendant longtemps, exclusivement militaire, trouvera-t-on naturel le rapprochement de rocprmiq et du verbe xocp.éw, qui désigne dans Homère l'action de disposer une armée en batailles; de là le nom de
xorti.-fropE ),xr:vv donné aux Atrides f0. En Crète, les cosmes avaient dans leurs attributions la conduite des opérations
mète aurait été ainsi, primitivement, le chef militaire des éphèbes, et c'est par une fausse interprétation de son titre que les savants modernes lui auraient attribué sur les jeunes gens une sorte d'autorité morale 12. Cette autorité, c'étaient, comme leur nom l'indique, les sophronistes qui l'exercaient[EPIIEm, sOPIIR0MSTA],etce qui semble justifier cette manière de voir, c'est le fait, aujourd'hui attesté par l'inscription de Rhamnonte et par l'ouvrage récemment découvert d'Aristote, de la coexistence des sophronistes et du cosmète ; celui-ci eût fait double emploi avec ceux-là, s'il eût été chargé comme eux de la bonne tenue du collège.
La Constitution d'Athènes nous montre le cosmète choisi, pour s'occuper des éphèbes d'une même année (izi 7zvTxq), parmi les citoyens de toutes les tribus; il est élu par le procédé de la zEtporov(a. Malgré l'importance des fonctions des sophronistes, il parait avoir le pas sur eux; c'est du moins ce qui résulte du rang que lui assignent la dédicace de lihamnonte et le décret de 305 4, qui était, jusqu'à ces dernières années, la plus ancienne inscription qui nous le fit connaître 13. Il ne nomme pourtant pas, au temps d'Aristote, comme il en aura le droit plus tard", les maîtres qui doivent instruire les éphèbes : ceux-ci sont désignés par le peuple, à mains levées15. Une fois les jeunes gens réunis, secondé par les sophronistes, il
et l'inscription de-llhamnonte prouve que ce pèlerinage n'était pas borné aux sanctuaires d'Athènes et du Pirée ; il est probable que le temple visité, dans ce dème, par le collège, était le temple de Némésis 16. Au me siècle, les sophronistes disparaissent des marbres éphébiques, et le cosmète, dont les fonctions se sont sans doute modifiées au cours du siècle précédent, dont l'autorité a grandi, parait seul être responsable de la direction de l'éphébie. Sur ses attributions et son rôle à partir de cette époque,
nom un magistrat de Locres (colonie des Locriens Opontiens, dans la Grande Grèce qui avait la mission d'interpréter dans les cas douteux les lois civiles attribuées à Zaleucus. Si l'une des parties en appelait de cette interprétation, la décision dernière appartenait au Conseil des Mille. On n'a pas d'autres renseignements sur ce magistrat. On a conjecturé qu'il était le principal magistrat de Locres. Ca. LxcntvAlx.
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