Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

LAPHRIA

LAPHRIA (Aacppta.). Fètes célébrées, en divers points de la Grèce, en l'honneur d'Artémis Laphria [DIANA, Il, p. 143 A]. C'était Artémis chasseresse qu'on adorait sous le nom de Laphria, en Messénie, en Étolie, en Achaïe, et ailleurs 1. Pausanias rapporte les différentes légendes par lesquelles les anciens essayaient d'expliquer ce nom. Il paraît accepter celle-ci : le culte d'Artémis Laphria aurait été fondé par un Delphien, appelé Laphrios, fils de Castalios, qui aurait consacré une statue de la vierge chasseresse, en or et en ivoire, oeuvre des statuaires Ménaichmos et Soidas, à Calydon d'Étolie Dans cette ville, le culte d'Apollon était associé à celui d'Artémis La mention d'un mois laphrios dans le calendrier de plusieurs villes grecques, en Phocide, en Étolie, à Erinéos, à Gythion, est un témoignage de l'extension de ce culte . D'après des textes relativement récents, le culte d'Artémis Laphria aurait été apparenté à celui de la Britomartis crétoise, et on en trouverait des traces à Corcyre 3e Les Messéniens l'empruntèrent aux Étoliens et ils eurent, à Messène, une statue de la déesse faite par Damophon s. Mais c'est à Patras que le culte d'Artémis Laphria fut particulièrement florissant et vivant, à partir du jour où 117 LAP 926 LAP Auguste fit transporter d'Étolie en Achaïe le vieil êyaÀga de la déesse '. C'est à Patras que se célébrait la fête annuelle des LAPRRUA, décrite par Pausanias Elle consistait essentiellement en une procession solennelle et un sacrifice. Dans les jours qui précédaient la cérémonie, on préparait l'autel de la déesse, en y entassant le bois qui devait servir au sacrifice, en réparant la voie sacrée par où devait se développer la procession. Le jour venu, la ville tout entière prenait part aux cérémonies, les magistrats au nom de la cité, et les simples particuliers. Le moment le plus solennel était celui où, à la fin de la pompe sacrée, la prêtresse d'Artémis apparaissait debout, sur un char attelé de cerfs. On sait qu'Artémis est souvent représentée ainsi dans l'art (fig. 2376) Puis venait le sacrifice, étrange et d'espèce rare. On mettait le feu au bûcher préparé sur l'autel, et dans ce brasier on jetait pêle-mêle, pour honorer la déesse, toute sorte d'animaux vivants, domestiques ou sauvages : des oiseaux et des quadrupèdes, des sangliers, des cerfs, des louveteaux, des ours, d'autres bêtes encore '. Aucune hécatombe ne pouvait mieux plaire, semblest-il, à la déesse de la chasse. Ce même caractère se retrouve, comme on sait, dans d'autres solennités analogues, également consacrées à Artémis, par exemple dans les ELAPIIEBOLÏA, où l'on sacrifiait des cerfs sur l'autel de la déesse Dans certaines villes, comme à Hyampolis de Phocide, les textes signalent la célébration annuelle de deux fêtes distinctes : les LAPIinait et les ELAPUEBOLIA s Peut-être alors les deux fêtes n'avaient-elles pas tout àfait le même objet ; on peut admettre que le sacrifice des LAPHnA s'adressait à Artémis, déesse de la chasse. Par la fête des lELAPREBOLIA. on reconnaissait plus particulièrement la protection qu'Artémis accordait aux animaux : Pausanias raconte que les animaux qui lui étaient alors consacrés devenaient plus gras que les autres, et n'étaient jamais malades 0° L. COUVE. de pierres. Ces termes, et quelques autres par lesquels on désignait les ouvriers qui travaillaient la pierre, n'ont pas toujours été rigoureusement appliqués à telle ou telle catégorie de travailleurs les acceptions, d'abord très étendues, ont été restreintes dans le :murs du temps, de plus, les langues anciennes, comme les modernes, ont souvent confondu sous le même nom l'artisan et l'artiste. f Anciennement, les termes de latiidarii opiràces l'apidcarii 2, lapicidae' Ailoupyol', signifiaient les ouvriers qui 1 s'occupaient des pierres après leur extraction par les carriers (exeeaptores 5, lapicidinarii°, )xTdf.oi 7) [SIETALLA] et les préparaient pour la bâtisse ; de leurs mains, elles passaient à celles des maçons (str°actor'es 3, )sloÀé-yot 0), qui les assemblaient pour faire le construction [STRUCTURA]. A Rome, oïl les tailleurs de pierres étaient soit des esclaves", soit des hommes libres ", nous trouvons la dénomination de lapidarius appliquée aussi à un entrepreneur regardé comme capable de bien faire exécuter un monument en pierre 42 La signification de lapicida s'est aussi modifiée et ce mot a servi pour désigner le graveur sur pierre " [IcsCRIPTroxES]. Le même phénomène e eu lieu en grec où AtOotioaoç a pris le sens gérieral d'ouvrier de la pierre " et AtOoup ydç celui de statuaire 1°, ou simplement de sculpteur" que nous trouvons aussi exprimé Mettre les blocs extraits par les carriers en état d'être employés dans la construction où ils entraient sous forme de moellons 19 (eaementa) ou de pierres de taille '0 (lapides quadrati), telle était la besogne 'Y' des tailleurs de pierres. L'ouvrier qui travaillait spé cialement à la pierre de taille finit par être appelé r 0eadratarius 24, Les pierres tendres se sciaient avec une scie à dents 22 (serra dentata) [SERRA] ; il est Vraisemblable que les pierres dures fSJ., rient sciées de la même manière ,'lue le marbre es [MAnmoal )i~ant 'i le l'aille proprement dite, elle devait passer, comme de pos jours, par dlicases phases et s'effectuait au moyen d'instruments spéciaux en fer (a:ô pex A,fi.uo°ix. ),x ettrelptx) " qui ive sent à peine .on7ius. Quelques noms seulement sont parvenus jusquà nous, mais ae LAP --927 compagnes d'indications si vagues et de définitions tellement insuffisantes que nous ne pouvons presque rien affirmer relativement à la forme et à l'usage îles outils qu'ils désignent', Pour amener la pierre à la forme voulue, il fallait natus rellement commencer par la dégrossir, par faire tomber toutes les portions inutiles ou gênantes, puis enlever les plus fortes aspérités de la surface, Cette première taille paraît s'être effectuée au moyen d'une espèce de marteau courbe et tranchant appelé ASCIA, que l'on identifie avec Re grec vi;'.ooç' on employait encore à cet usage d'autres outils dénommés xonETç, iyoossfç qui paraissent être aussi des marteaux tranchants ou non, et une sorte de DOLABRA. Une terre cuite du musée du Vatican représente (4341) deux ouvriers en train de façonner un bloc de pierre avec des espèces de masses à deux pointes fi. Il fallait ensuite planer et unir les surfaces ; cette deuxième, façon se donnait, semble-t-il, avec divers genres de ciseaux x)iupaïa uec5peç16) que l'on chassait devant soi sur la pierre à l'aide d'un maillet11. C'est ce qui paraît représenté (fi g. 4342) sur une miniature du Virgile du Vatican oit se voit un tailleur de pierres tenant de la main gauche un ciseau et de la droite un maillet levé''. A. JI,scor. LAOfD1.T1O (f£txcr eho).Lapidation. Guère. -1;a lapidation, dans les soclé.és primat it sert à châtier en fait des actes dont ia répression n'est pas encore assurée en droit.-: formel. Partout où règne le système de la vengeance privée, si la partie lésée est, non pas un individu, mais un ycvoç, une tribu, une cité, tous les membres de ce yévoç, de cette tribu, de cette cité concourent à la vengeance sociale. Sur-le-champ, par ordre du chef ou par consentement universel, le coupable est mis hors la loi : chacun court sus à l't%Tti o;, chacun a sur lui droit de vie et de mort. Toutes les armes sont bonnes, javelots, flèches ou pierres. Tant que la peine de mort, sans être légalement prononcée par personne, est infligée par tout le monde dans un accès de fureur tumultuaire, tant que la répression est « diffuse », le mode d'exécution ordinaire, c'est la lapidation. Et le crime typique qu'elle punit, c'est la trahison ou, plus généralement, l'attentat contre la sûreté commune ou les intérets communs. « Les Troyens sont des lâches, dit Hector à Pâris dans J'Iliade a , autrement, tu serais déjà habillé d'un chiton de pierre pour tout le mal que tu leur as fait 5, » Dans l'Odyssée `, apparaît un malheureux, traqué par une fouie oui veut « le tuer et lui arracher le coeur » il passe pour traître, comme Palamède, qui périt sous une grêle de pierres 3. Durant ce moyen âge hellénique, dont les débuts sont connus par les récits encore légendaires des wos•roi et dont la fin se soude à l'époque historique, on voit se préciser d'abord, se compléter ensuite la jurisprudence spontanée de la lapidation. L'étranger qui offense un ou plusieurs membres d'une société se met en état de guerre contre la société tout entière. Elle peut donc se venger sur lui par les voies rapides, quelle que soit l'offense. Politès, compagnon d'Ulysse, est lapidé à Témésa en OEnotrie, pour cause d'outrage à une jeune fille° ; Hècabè est lapidée « comme une chienne », pour avoir invectivé les meurtriers de ses enfants". Même à l'égard d'un citoyen, une foule exaspérée ne raffine pas sur une définition juridique. Lorsque les légendes de la Lycie, de l'Attique et de la Laconie, nous montrent la défaite 3, la concussion en temps de guerre9, ou même la pro-position d'une loi impopulaire '0, assimilées à la trahison et punies à coups de pierres, il n'y a là qu'une extension naturelle donnée aux idées de la période précédente". Mais une coutume sans racine dans le passé, c'est celle de la lapidation pour offense à un dieu ou à un simple particulier. Il y e une vérité rétrospective dans tous ces passages des tragiques athéniens où il est parlé de lapidation à propos de sacrilège 1', de meurtre 13 et paricale i , d inceste 1" et adultère 13, voire pour ensevelisse LAP 928 LAP ment d'un criminel privé de sépulture'. On pourrait croire à des erreurs de couleur locale, si l'on n'avait pas pour éléments de contrôle les vieilles légendes et les fragments des poèmes cycliques. C'est que dans la Grèce du vm° siècle, des idées nouvelles s'étaient répandues, sur la souillure, la contagion et la purification. Quand le droit divin ou humain était violé par une lésion grave, la laisser impunie c'était, pour la société, en accepter la solidarité. En présence d'un attentat énorme et flagrant, le peuple vengeait sa propre cause en vengeant celle de l'offensé, homme ou dieu. Et, tandis qu'il élargissait ainsi son droit de répression, il trouvait dans sa conscience transformée une raison de plus pour l'exercer spécialement àcoups de pierres. De cette façon, on ne tuait pas le misérable, on le faisait mourir, et nul ne contractait ni la souillure d'un contact impur, ni la souillure du sang versé. A l'époque historique, le progrès de la juridiction sociale n'alla pas jusqu'à supprimer tout à fait la lapidation. De loin en loin les générations nouvelles appliquèrent les principes primitifs sur la trahison et les principes plus récents sur le sacrilège. Mais ces crimes, à plus forte raison les autres, ne furent plus capables de soulever une fureur homicide que dans des circonstances extraordinaires de flagrant délit et de gravité. Pour que les Arcadiens lapident Aristocratès le Jeune, il faut qu'exaspérés par la défaite, ils le surprennent recevant de l'ennemi le prix de la trahison 2. C'est à Salamine, quand ils sont chassés de leur ville incendiée, quand il leur faut maintenir l'unanimité par la terreur, que les Athéniens lapident, avec sa femme et ses enfants, le bouleute Lykidès, coupable d'avoir voulu accepter les propositions du Mède'. Désormais, on ne trouve plus rien de pareil qu'aux extrémités du monde hellénique. Vers la fin du v° siècle, les Agrigentins lapident encore quatre de leurs stratèges, pour avoir laissé échapper une occasion de victoire', et les Syracusains en auraient fait autant des leurs, au nombre de dix, s'ils avaient écouté Denys, qui les excitait « à ne pas attendre le vote légal, mais à faire justice sur-le-champ, de leurs mains ° 11, Cette mesure aveugle de vengeance et de salut public est prise exceptionnellement en temps de révolution comme en temps de guerre : à Athènes, on lapide les partisans de Cylon 6; à Mitylène, le tyran Coès 7. En dehors de la haute trahison, l'homicide est le seul des crimes reconnus par le droit séculier qui ait un jour, dans les siècles historiques, poussé une foule à se faire justice à coups de pierres. Mais cette foule se trouvait en face d'un fait atroce : l'athlète Cléomèdès venait, à Astypalée, d'ensevelir une soixantaine d'enfants sous les ruines d'un gymnase e. On ne saurait donc prendre à la lettre le mot Acta-r', lancé à la tête d'un ennemi 9 : il ne faudrait pas croire les Athéniens de la belle époque capables de lapider un homme pour avoir vendu un citoyen comme esclave70 ou pour avoir malversé ". Il est même très significatif qu'après les guerres médiques on n'ait plus lapidé personne dans les villes grecques au nom de la justice séculière. Il arrive, beaucoup plus tard, qu'une populace lance ou menace de lancer des pierres contre un personnage détestét2; ce n'est plus une exécution sommaire. Si la lointaine Agrigente fait exception, c'est qu'elle a sous les yeux l'exemple des Carthaginois, grands amateurs de lapidation'. Mais la même année (406), dans les mêmes circonstances, à l'encontre des mêmes magistrats, les Syracusains se refusaient à tout acte de violence, et la vindicte des Athéniens respectait les formes légales. Le sacrilège fut bien plus longtemps que la haute trahison puni par la lapidation. Sans doute, on ne saurait croire qu'Eschyle faillit être lapidé pour outrages aux cultes officiels ou divulgation des mystères: l'anecdote est apocryphe. Mais quand les Thessaliennes assommèrent Lads à coups de pierres et d'escabeaux, le sacrilège servit de prétexte à leur jalousie'. Encore .au 1v° siècle, le peuple d'Ephèse, pour lapider le chef de l'oligarchie et sa famille, fit semblant de venger Artémis' 6. L'Arcadie semble avoir gardé une prédilection particulière pour cette tradition de pieuse cruauté. Aristocratès l'Ancien fut lapidé pour avoir souillé la prêtresse d'Artémis dans son sanctuaire" • des enfants, pour s'être amusés à étrangler une statue de déesse à Kaphyes'8. Plutarque raconte que de son; temps encore quiconque pénétrait volontairement dans le Lykaion était lapidé73. C'était assurément la peine portée par les vieux règlements; peut-être était-elle toujours inscrite sur le programma affiché à la porte du temple; mais il est douteux qu'elle eût trouvé une seule application depuis des siècles. Il ne faudrait donc accorder aucune créance au récit d'une lapidation ordonnée par Apollonius de Tyanes2e, même s'il ne se terminait point par un miracle 21. Si, hors le cas de sacrilège, les citoyens s'interdirent l'usage de la lapidation dès le premier quart du ve siècle, il n'en fut pas de même des. soldats en campagne. Les Athéniens trouvaient vraisemblable qu'on leur parlai sur la scène de guerriers lapidant un des leurs 22. Que voiton dans la réalité'? Les Argiens, furieux contre leur général LAP 929 LAP Thrasyllos, qui a traité quand la victoire semblait certaine, se mettent à le lapider'. Avec quelle légèreté une troupe indisciplinée, une troupe de mercenaires surtout, pouvait se laisser aller à la folie de la lapidation, c'est ce que nous montre l'Anabase. Les Grecs commencent à faire périr sous une grêle de pierres trois députés indigènes' ; aux cris de « Frappe, frappe, lance, lance 3 e, un grand nombre, sans savoir pourquoi, courent sus aux agoranomes et pourchassent l'un d'eux « comme un sanglier ou un cerf » ; enfin, peu s'en faut que leur rage séditieuse ne s'attaque aux généraux Naturellement, dans les armées, les javelots venaient en aide aux pierres ou les remplaçaient : il n'y a pas de différence essentielle entre xara)n)e;v et xaraxovriEty 3. Au milieu du Iv° siècle, dans la même guerre, presque en même temps, les Phocidiens en déroute tuent à coups de javelots leur chef Onomarchos, qu'ils considèrent comme l'auteur responsable de leur désastre 7, et les Béotiens vainqueurs percent leurs prisonniers jusqu'au dernier sous prétexte de sacrilège 3. Les soldats d'Alexandre mettent en croix l'assassin de Darius avant de tirer sur lui Jusqu'ici, la lapidation n'apparaît pas une seule fois comme une peine prononcée régulièrement par un tribunal10. Sans doute, tel n'était pas l'avis des Grecs au '. siècle, lorsqu'ils parlaient des temps mythiques. Dans les tragédies d'Eschyle" et d'Euripide 12, il est souvent question de lapidation infligée en vertu d'une sentence rendue froidement ii' U. Une légende représente les dieux lapidant un coupable avec leurs tablettes de juges 13 C'était un exercice habituel, dans les écoles de rhéteurs, de composer des plaidoyers pour ou contre Palamède 14. Mais il n'y a pas à tenir compte de détails inventés après coup. Dans les temps mythiques comme dans les temps historiques, la lapidation est fréquemment punie par les dieux' ~'. L'oracle de Delphes ne se lasse pas de demander des réparations pour les victimes 16, même quand ce sont de grands coupables devant les hommes, même quand ce sont des impies. Ainsi l'odieux Cléomédès en réchappa et y gagna encore le titre de héros 17 ; le zèle fanatique des Kaphyens fut jugé criminel (ot nàv Ux-n) et dut être expié par des sacrifices périodiques 16. Ajoutez à cela que les bourreaux volontaires ne donnent pas à leur victime le temps de parler 19, mais qu'ils lui laissent la vie sauve si elle leur échappe sur le moment 20, qu'assez fréquemment le supplice est infligé par des femmes 21 ; n'est-il pas évident que le peuple en Grèce a toujours vu dans la lapidation un acte de vengeance (ti tap(a)22 ? On pourrait être tenté de faire une exception pour la justice militaire. Pour lapider leur général, les Argiens se gardent bien d'attendre qu'ils soient revenus en ville, et pourtant ils attendent d'être arrivés aux portes de la ville, sur cette rive du Charadros où siègent leurs conseils de guerre. Mais est-ce parce que la loi martiale les autorise à employer les moyens sommaires'? Non ; c'est pour donner une vague apparence de légalité à un abus de la force bru tale : leur coup manqué, ils ne peuvent que faire condamner le traître par la juridiction ordinaire à la peine ordinaire'. Même les Dix-Mille, indépendants de tout tribunal civil ou criminel, ne croient pas exercer un droit en tuant qui que ce soit sans jugement (1t3trov) 24 ; car, leur colère tombée, ils portent la peine de mort contre quiconque renouvellerait le désordre" et font purifier le camp26 La lapidation n'a donc jamais été infligée par une justice procédant en la forme. Jadis elle a pu subvenir aux défectuosités de la justice ; les Grecs ont pu invoquer la 04uç, comme les Américains invoquent la loi de Lynch. Mais il ne faut pas appeler )saéaig.oç Ux-r) '-7 ce qui n'est qu'un c3 voç i-r1g Xcu roç38 accompli sous la présidence du )uod] ts oç "Apylç 29 Seuls dans l'antiquité hellénique, les Macédoniens admirent, comme mode d'exécution légale, de xaTn)c6Ety ou de XXTaxovTfEtV, les condamnés à mort 30. C'est qu'en Macédoine la législation criminelle resta de longs siècles dans unéLatrudimentaire: on n'y connaissait pas plus qu'en Thrace" la peine capitale. Lorsqu'enfin fut organisée une juridiction criminelle, le peuple et l'armée, qui en étaient investis, selon qu'on était en paix ou en guerre 32, exécutèrentles coupables more patrio 33, sans bourreau, à coups de pierres ou de javelots, mais après avoir légitimé le supplice par une sentence. Le jugement laissait un libre cours à la vengeance privée ou publique. Condamnée par l'assemblée, Olyrnpias fut livrée aux parents de ceux qu'elle avait fait tuer et probablement lapidée 34. Le vengeur du sang,plus généralementl'accusateur,avait donc le privilège de jeter la première pierre". Il est vraisemblable que ce genre d'exécution était employé régulièrement chez les Macédoniens dans les mêmes cas où. il l'était extraordinairement chez les Grecs; mais les exemples connus sont tous consécutifs à des jugements de haute trahison. C'est de ce chef qu'Olympias fut sacrifiée à la haine de ses ennemis par la justice civile ; c'est de ce chef qu'Hermolaos fut avec ses complices condamné et lapidé par l'armée d'Alexandre 36 ; c'est enfin de ce chef que Philotas comparut devant une cour martiale de six mille hommes " et, après avoir pensé périr sous les pierres 30, périt sous les javelots39. Les Macédoniens osaient encore par principe, sauf lettres expresses de rémission, ce que les Grecs n'avaient jamais fait que par exception, dans des moments de fureur : étendre à la famille du conspirateur une solidarité mortelle 40. LA P 930 -11AP La lapidation symbolique, vestige de la lapidation réelle, se retrouve dans la vie privée, judiciaire et religieuse de la Grèce. C'est d'abord la lapidation posthume. Euripide représente Egistlle attaquant à coups de pierres la tombe d'Agamemnon'. li n'est pas sans exemple que des Grecs aient ainsi exprimé leur mépris ou leur haine àr des morts a Un meurtrier, en particulier, espérait, par cette façon de c.acyaàtegéç, rendre inefficaces les malédictions de sa victime', Mais cette idée se complète ici d'une autre : Agamemnon, victime d'Egisthe, est aussi le meurtrier d'Iphigénie. Or, voici, d'après les Lois de Platon', quel traitement doit être infligé à l'homme convaincu d'avoir tué son père ou sa mère, son frère ou sa sieur, son fils ou sa fille : a Les serviteurs des juges et les magistrats le mettront à mort et jetteront son cadavre nu dans un carrefour spécialement désigné hors de la ville. Tous les magistrats, agissant au nom de la cité entière, apporteront chacun sa pierre et la lanceront sur la tête du supplicié, afin que la cité entière soit quitte envers les dieux. Puis on le jettera sur les frontières du pays, conformément à la loi, sans sépulture. » Platon ne fait là que transcrire de vieux préceptes probablement empruntés au droit traditionnel des exégètes athéniens. Mais la lapidation du mort ne sert d'aggravation de peine que dans un cas exceptionnel. La privation de sépulture est bien plus fréquente et peut passer pour une vague réminiscence de lalapidation. Il avait toujours été interdit de rendre les derniers honneurs au criminel exécuté par le peuple en masse '. C'est une des raisons pour lesquelles on l'entraîne ou on va L'attendre quelque part hors de la ville ee Tout au plus accumule-t-on sur le corps, quelquefois encore vivant, assez de pierres pour le recouvrir ; mais, pour qu'il soit enseveli selon lente, il faut l'ordre formel d'un oracle e. Lorsque la juridiction ordinaire s'étendit aux actes de trahison et de sacrilège, c'est-à-direauxcas réglés jusqu'alors par les moyens sommaires partout elle continua,pour ces deux cas seulement, d'aggraver la peine capitale du refus de sépulture'. Peut-être aussi est-on fondé à croire que les Grecs procédaient parfois àla lapidation fictive du meurtrier inconnu sur la tombe de la victime En Phocide, à l'endroit oïl, disait-on, Labos avait été tué et enterré, on montrait un grand amas de pierres1a N'est-ce pas la même superstition qu'on a observée chez tous les peuples" et qui chez les Grecs faisait planter une lance 1 F1. 328. Mar". Argent. ap. Anehol. Pal. Vif, 403, 5. -3 C'est bien l'idée d'Euripide (320-331).-4 1X, p. 853 B-C cf. B. Schmidt, 1. c. 382-383; de Pastorei, hist. de la 1¢gisl. IV1143-144. = Phiicstr. lleroie. XI, p. 714; Paas. IV, 42, -; cf. 'rzets ad i.ycophr. 1916. G Quint. Smyrn. X, 555; Hcr. V, 38; Thuc. V, rio; Diod. XVI, 31, i ; cf. Plat, Legg. 1. c_; Strab, iii, 4, 7. 7 Quint Smyrn. X, 158-PH ; Schal. Eurip. bec. 1261; Tzeic. 1. c. ; PFxilostr. Vit, Apollon. IV, 10, 3, p. 147. -s Paus. Viii, 23, 7. -9 Pour la Gréco e,n général, voir Diod. XVi, 25, et la légende de Polynice; pour Athenes, Xcn. Hel(. 1, 7, 22; Plut. De ser. nunc. vina. 2, p. 540 A; Vie_ dec. oral. Aot jih. 28, p. 884 A ; Dio chrys. XXXI, p. Gi2 lleisko ; Corp, inscr. 011. II, 17, 1. 01-63 Thuc. 1, 138 Lyc. C. Leocr. 89, p. 159 ; cf. Vischer, Rh. Mus. XX (1865), p. 445 s. ; Le Brant, Comptes rendus de 1'Ac. des inccr. 1872, p. 377-380 ; Mahaü'y, Soc. lite in Gr. 266 ; nager, Flow Ioere the (1877), p. i-13; Lipsius, Jahresber, de Suesian, XV (1878), p. 343 ; L. Schmidt, ,Clhu d. art. Gr. II, 104, 10 Paus. X, 5 4; cf. B. Schmidt, 1. e 392. tf Cr. I .iebrecht,2ur Volkskunde, Heilbr. 1879, p. 271-276.12 Les. Segucr. ap. Bekker, Mu:cd gr. ;i. 237, 30; Ftym. Magn. p. 353, 33; Harp. s. U.; Helianie. ap. Sciml, Eurip. Ur. 1648 ; POIL VIII, 65 ; (Dom.) C. TivergG9. p. 1130 ; Eurip. Troad. 1137. -13 Ovi'. Ibis, 469-470 et Schol.; cf, Schneider, Callini. If, 544. '4 Istras, sk .0 1 a, n40 a, 1, ap. Har-p... u. tiquai és j ; cf. Mommsen, Reort. 414; Peste d. St. Ath. inx AIt. 473 ; Tdplfcr, Thargeliengebrahche, dans le 1h,, Mus. XI III (1888), p. 142-145 (Deilr. z. gr. Aile, tumsuiss. 130-933). 15 Aoli . De nat. a_.na. XII, 34. f6 Paus. I1, 32, 2 en. Lare. reant, ,lfanogr, de 1a voie sacré ( icrucyr.aiv ôdpie) i2 sur la tourbe des hommes assassinés'? Les cérémonies du culte étaient souvent des occasions de lapidations symboliques. Pendant une fête d'Abdère ", pendant les Thargélics de quelque ville asiatique 14, on faisait le simulacre d'accabler de pierres le pipfxaxoc dévoué: au nom de tous les citoyens. A Ténédos, le sacrificateur, après avoir immolé la victime, se sauvait comme an meurtrier sacrilège, poursuivi jusqu'au bord de la mer par une volée de pierres inoffensive". Pour rappeler la lapidation de Damia et d'Auxèsia, on célébrait à Trézène des At0oâdA1«Les Athéniens avaient la BzXa'5tiûç''7[BALLÉTVS]oules Tôai i8 C'était un combat fictif que se livraient les initiés pendant les Eleusinies 19, probablement sous la présidence du Atéo9dpoç, ce prêtre qui, d'après une inscription 2e, servait le culte de Démèter et Coré. Moins clair, mais bien reconnaissable encore, est le symbole de la lapidation dans certains monceaux de pierres consacrés en guise d'autels. Telle est l'interprétation que les anciens ont déjà donnée des I£errnaia et qu'on a rendu très vraisemblable par un ingénieux rapprochement avec les vzip.ara de la Grèce contemporaine ". Les dieux, disait-on, chargés de juger Hermès après le meurtre d'Argus, jetèrent à ses pieds leurs tablettes en guise de pierres", si bien que, par une contradiction fréquente dans l'évolution des légendes, les honneurs rendus au héros rappelaient son ignominie. La même explication est valable pour ces talus de pierres qu'on voyait à Ephèse L3, à Troie 24, à Tlos 2" et à Pharai 26, amoncelés en l'honneur d'Héraclès âaoaporca(nç ou âhe iq:tr,ey, de Skylal.{eus et des Dioscures, GUSTAVE GEOTZ. ROME. -A Rome, il n'y a pas de terme technique pour la lapidation 27 Le peuple jette des pierres pour exprimer sa haine ou son mépris", par exemple sur des tombeaux 00 et en matière politique, dans des émeutes 00 La tradition, représentée surtout par les poètes, considère encore la lapidation. comme une peine populaire 31. A l'époque historique, ce n'est pas un supplice de droit commun. Cependant, il a été quelquefois infligé à des soldats sous la République 32, et même sous l'Empire à des officiers33, On sait que la lapidation fut souvent employée contre les chrétiens. Une ioi de Constantin de 315 défend aux juifs de lapider les Juifs convertis au christianisrne'4. Cie. LIOCRIVAI». A,fil'!DES. Aitlot, les pierres. Ces termes servent à désigner toutes sortes de substances minérales dures et (iléus. 252-253 ; Usener, Gdtternumen, Bonn, 1896, p, 230. i7 Athen. IX, 71, p. 406 D; Hosych. s. v.; cf. fymn, Cers 265-267. 18 Hesycia. s. u. i9 Voir, outre les ouvrages mentionnés à l'art, xeccerrs, O. Crusius, 4ciIr. g. gr. Religionsgesch. u. 1'l£yth. Lcips. 1886, p, 20; Xern, art. Baaa„so,, dans la Real-Encycl. de Pauiy-Wissowa. 26 Corp, roser. ait. Ill, 702, cf. 206 t voir Vischer, Noues Se/mai». =us. Hl 0863), u. 58 ç Xcii, 1 hilol, (1866), p. 242 ; Mommsen, 11. cc. 21 B. Schmidt, t. c, 369-395. -22 Anticlid. et Xanth. ll, cc. ; cf. B. Schmidt, 1. e. 376-377. 23 Plûlostr. Vit. Apollon. V, 10, 2-3, p. 147. 24 Holianic. ap. Tzetz. ad Lycoplir. 469 (Müller, Fragm. hist. gr. fr. 138); Apoliad, II06, 4; cf, B. Schmidt, 1. c. 377-3778. -25 Quint. Smyrn. X, 161-166 ; ef. B. Schmidt, 1. c. 378379. -2s Paus, VII, 22, 5. 27 Lapidatio signifie jet de pierres en général (Cie, De domo, 5, 12; C. Th. 9, 16, 3).28Piac?t, Poenul. 3, 1,25; Petron. S'at. 90. -29 Prapert. 4, 5; Auson. Idybl. 15, 34. 36Cie. De domo, 5, 12; Tseh. Poil. erig. 8yr. 01. 31 ovid, De nuée, 2-4; Quintal. Declar.,, 12, 12; Dorat, L'pod. 5, 97 ; Apul. Meta.. 1, p. 81; 10, p. 690. 32 Poiyb. 6, 7, 35 ; Liv. 9, 50 ; il y a un cas légendaire. Liv. 1, 51, 33 Spart. Pcsc . Odig. 3.34Cod, Theod. i6, 8, 1. sancitae cassis, Lips. 1839, p. 5 ; Hellen. Allerthumskunde, éd. Halle, 1846, p. 120, 793-794 ; Ruhiao, t ,,tersuchungen üb. rôti:. Verfaos. und Gesell.. Cassai, 0830, p. 4118-480 ; Mercklin, Die Talossage und das cardon, Laeken, Saint-Pétorsh. 1851, p. 68; Thonisson, Le droit vén, de ioRep. athén. Bruxelles-Paris, 1875, p, 33-34, 02-9:3, Benn. Schmidt, Steinhaufen ale Fluchmale..termeshciligtümer und Grabhügel in LAP 931 LAP dénuées d'éclat métallique, maïs de densité, de couleur e,t de nature souvent très différentes, que l'on distingue les unes des autres en joignant aux mots a(ioç, lapis, des adjectifs qui indiquent l'origine, le caractère apparent ou l'usage ; ces termes s'appliquent alors aussi bien aux matériaux de construcl:ion les plus communs qu'aux plus beaux marbres [ni nmos' et aux pierres précieuses [Ol'stnMAE]'. Mais, en faisant ces applications, les anciens ont commis dans ce domaine, plus encore peut-être que dans les autres, des erreurs et des confusions qui rendent les identifications souvent très difficiles, De tout temps, les pierres furent utilisées comme armes de jet; nous voyons les héros d'Homère les lancer avec les mains', au moyen des plus grosses, ils brisent des portes 3. On s'en servit encore à l'époque historique mais on les lançait alors avec des frondes' j rumOA] ou au moyen de machines [TOI1n1ENTA.]. Le disque des jeux était en pierre chez les Phéaciens e intsccs]. Les belles pierres susceptibles de recevoir le poli servent de sièges aux grands et aux juges de l'épopée antique'. Les appartements des enfants de Priam sont construits en pierres de ce genre '.On ne saurait dire de quelle espèce de pierre il s'agit dans ces passages ; mais il est intéressant de noter dès cette époque l'emploi de la pierre comme matériel de construction; on en fait déjà des murs de maisons ou de clôture en l'unissant au bois 6. Partout, dès que les hommes ont éprouvé le besoin de faire des constructions solides et durables, ils ont eu recours à la pierre et ont utilisé celle qui se trouvait à leur portée". Les constructions dites cyclopéennes de Mycènes en sont la preuve; ces murailles sont constituées d'une belle brèche dure qui abonde dans les montagnes voisines ", En Attique, on a reconnu l'existence de sept différentes sortes de pierres ou roches propres à la construction, et on les a trouvées toutes dans les édifices d'Athènes et de sa banlieue f2. De mémo à Pompéi, on a constaté l'emploi des pierres qui se trouvaient dans le voisinage ou à peu de distance Les matériaux employés dans les constructions varient donc selon les lieux. Les anciens nous donnent peu de renseignements précis sur les pierres dont ils se servaient, caf' ils n'en connaissaient pas la véritable nature, Pour eux, lorsqu'ils les considèrent au point de vue de l'usage qu'on en peut faire, les pierres sont dures ou tendres, faciles ou diffi j ciles à travailler, lourdes ou légères, résistantes ou l'anis Riment altérables ; elles se prêtent ou non au sciage, à la gravure, à la sculpture ou au travail du tour 9'. En ce qui concerne la bâtisse, nous voyons dans l'antiquité deux grandes classes les pierres dures, capables de supporter les intempéries, mais ne résistant pas au feu, et les pierres tendres qui s'altèrent aux intempéries, mais résistent au ffeu'S. Les premières sont des pierres calcaires, les autres des pierres volcaniques" Tuf calcaire. L'une des pierres les plus répandues dans la nature est le tuf calcaire (tofus albus'', porus .a rhpoç n, bléoç xciis,voç 20) ; ce fut une des plus employées en architecture. a C'est à peu près la seule matière dont le Grec use dans la Grèce propre et dans ses colonies jusqu'au temps des guerres médiques 21.., Elle servit à édis fier le temple de Zeus à Olympie 22, celui d'Apollon à Delphes dont le 7cpdvaoç seul était en marbre 23. On l'assimilait pour la dureté et la blancheur au marbre de Paros, mais le tuf était plus léger". Un calcaire très estimé était celui que l'off tirait des carrières de Tibur, aujourd'hui Tivoli (tiburtinus lapis)", situées non loin du cours de l'Anio, position favorable à leur exploitation, car elle facilitait le transport des matériaux26, qui furent très employés dans les constructions de Rome. Ce calcaire appartenait au genre modérément dur (temperatum) 27. On en extrayait un semblable des carrières d'Amiternum, dans le pays des Sabins, et de celles du mont Soracte, en Étrurie 23. Ii peut être identifié à la pierre qu'on nomme aujourd'hui travertin 29. Les pierres de cette nature étaient très appréciées pour leur résistance à l'écrasement et pour la manière dont elles supportaient les intempéries, mais elles se désagrégeaient au feu 3C. Le tuf blanc (tofus albus)3', que l'on trouvait en Ombrie, en Picenum et en Vénétie, et qui se coupait avec la scie à dents comme du bois, était vraisemblablement un calcaire tendre 32. La pierre de Tibur a été reconnue dans les matériaux du Colisée et dans ceux du théâtre de Marcellus 33 ; on en e aussi constaté l'emploi à Pompéi comme équivalent du marbre 34. Elle a servi souvent pour les parties artistiques des édifices, pour des bases de colonnes, des chapiteaux 35, etc. En Grèce, au contraire, le calcaire fut rarement employé pour la sculpture ; on citait à Athènes une statue de Silène en 7csnpoç et les fouilles en ont révélé d'autres spécimens 36 En Italie, à Pérouse et à Clusium, on a trouvé des urnes funéraires en travertin, et d'autres LAP 932 LAP faites d'un calcaire jaunâtre en Étrurie On extrayait du côté de Mégare un calcaire conchylien (xoyy(tir1ç a(80ç) 2 ou lumachelle «l'une blancheur remarquable et fort en usage dans cette ville et aux environs'. Selon Pausanias, il n'y en avait nulle part ailleurs en Grèce. Mais la Sicile en possédait, puisque les temples d'Agrigente sont bâtis en calcaire de ce genre 2. Tuf volcanique. Aux alentours de Rome, près d'Albe, Rubres, à Fidènes chez les Sabins, se trouvaient des carrières d'où l'on tirait un genre de pierres tendres, faciles à travailler et qui se comportaient bien dans les constructions, à la condition d'être abritées ; car elles ne résistaient pas aux intempéries et s'effritaient sous l'influence des gelées; elles ne convenaient pas non plus pour les constructions au bord de la mer, le sel exerçant sur elles une action destructrice 6. Mais elles avaient sur la pierre de Tibur l'avantage de n'être pas attaquées par le feu Cette pierre d'Albe (lapis albanus) n'est autre que le tuf volcanique appelé pépérin (peperinus a) ; elle avait servi à édifier le portique de la maison d'Auguste sur le mont Palatin10. En Campanie, on rencontrait un autre tuf de même nature, mais de couleur rouge ou noire (ruber et niger to fus)11. Le pépérin le plus estimé était celui des carrières d'Anicius (lapicidinae anicianae), situées sur les confins du territoire de Tarquinies, dont les chantiers étaient près du lac de Volsinies et dans la préfecture de Statonia12. Cette pierre, qui pour la couleur ressemblait à celle d'Albe f3, résistait admirablement aux intempéries comme au feu ; elle se prêtait bien aux ouvrages de sculpture et ne se dégradait pas à la longue. Au temps de Vitruve, on pouvait voir, dans un municipe qu'il appelle Ferentum, d'antiques monuments construits avec cette pierre, qui offraient des sculptures délicates, statues, fleurs, feuilles d'acanthe, parfaitement conservées. Comme elle pouvait supporter une haute température, on en fit encore des moules pour la fonte du cuivre". Une variété verte, qui était aussi très résistante au feu, ne se rencontrait nulle part en grande quantité, et jamais en masse rocheuse. Les carrières étaient trop éloignées de Rome pour fournir les matériaux de ses constructions Celles de Rubres et de Fidènes, et surtout celles de Gabies, situées près du cours de l'Anio en aval de Tibur, qui fournissaient une pierre rouge estimée 16, ont été le plus mises à contribution. On savait bien qu'une partie de ces pierres volcaniques extraites dans le voisinage de Rome ne résistaient pas à l'action du temps, maison nepouvait les reconnaître à première vue; aussi, avant de les mettre en oeuvre, fallait-il les éprouver. Pour cela, après les avoir extraites de la carrière pendant l'été, on les laissait durant deux années dans des lieux découverts à l'injure du temps ; on en faisait ensuite le triage. Les pierres lésées étaient réservées aux fondations, les autres servaient pour les parties des bâtiments qui s'élevaient au-dessus du sol. Cette épreuve s'appliquait aussi bien aux moellons (caementa) qu'aux pierres de taille (lapides quadrati)17. Ces divers tufs volcaniques ont été reconnus dans les constructions de Rome et de Pompéi. On a tiré du tombeau des Scipions, sur la voie Appienne, un sarcophage en pépérin aujourd'hui au Musée du Vatican"Les pierres dont nous venons de parler sont relative ment tendres et en tout cas assez faciles à travailler mais les anciens, notamment en Italie, avaient à leur portée, en quantité considérable, une matière dure, difficile à tailler, et, par cela même, très résistante, la lave (t)aç) 10. Ils l'ont rarement employée sous forme de pierres de taille, mais ils l'ont débitée en moellons et en fragments irréguliers qui ont trouvé place dans la construction des murs; ils en ont tiré des cippes, des bornes, plus rarement des pieds-droits et des piliers, beaucoup de dalles de seuils et de trottoirs, et l'ont utilisée surtout au pavage des rues G0. C'est la lave basaltique qui, avec certains tufs volcaniques et une espèce de ponce [PUMEX], constitue la pierre à meules [MOLA] des anciens (1u),(aq ) Rob, µu) (T~ç a(9oç, 1u.é)roç, lapis molarisl 21. La lave de l'Etna est expressément indiquée par Strabon comme pierre à meules22. D'après Varron, cité par Pline l'Ancien23, les meules tournantes auraient été inventées à Volsinies en Étrurie; or le territoire de cette région est volcanique 24. La meulière italienne, d'après Pline, qui a soin de nous avertir que ce n'est pas une roche, était la meilleure de toutes"; il ajoute un peu plus loin que parfois cette pierre ne supportait pas les intempéries, ce qui fait songer à un tuf volcanique. Quelques-uns avaient donné à la meulière dure le nom de pyrite 26 I(IGNIABIA]. En dehors del'Italie,on trouvait de la pierre àmeules àNisyros , le sol de cette île, qui est volcanique, en était formé 27. Strabon fait mention d'une carrière de ces pierres ((AU)` ov) au promontoire de Mélaene (Mé),atva) en Asie Mineure28. Ces pierres servaient encore dans la métallurgie LAP 933 LA P où on les adjoignait aux minerais comme fondants '. On a constaté à Pompéi l'emploi de la ponce ]PLMEX] comme pierre à bâtir ; elle entra notamment dans la construction des voûtes ; elle trouva place aussi dans celle des murailles avec les scories volcaniques 2. D'après ce qui précède, on voit que la lave basaltique et le basalte (èi«aav(Tr)ç, lapis aelhiopicu.s) ont été connus des anciens. Du reste, on a conservé de nombreux ouvrages de sculpture en basalte noir et vert représentant surtout des types égyptiens ou des sujets égyptiens'. Pline ne parle que du basalte noir, qu'il décrit comme une pierre extrêmement dure et couleur de fer trouvée par les Égyptiens en Éthiopie 4. A ce propos, il fait mention d'un bloc énorme de cette substance d'où l'on avait tiré un groupe sculpté représentant le Nil et ses enfants, qui fut consacré par Vespasien dans le temple de la Paix'. C'est bien au basalte que paraît s'appliquer la description de Strabon', d'après qui cette matière entra dans la construction de la troisième pyramide jusqu'à mi-hauteur environ 7. On tira du basalte des mortiers pour usage pharmaceutique B, des moules de fondeurs rFORMA, p. 1245] 9; peut-être aussi s'en servit-on comme de pierre de touche [COTICULA]. On a utilisé dans le bâtiment et dans les arts d'autres pierres, dont quelques-unes, très dures, se rencontrent en blocs assez considérables pour fournir des obélisques, des colonnes, etc. Nous les énumérons dans l'ordre alphabétique. Lapis Claudianus. Cette pierre était tirée d'une carrière ouverte au commencement du règne de Claude, dans la Thébaïde, en un endroit qui fut appelé aussi nions Claudianus10. C'était un granit gris dont on fit des colonnes et des pilastres. Des blocs de ce granit ont été trouvés sur les lieux mêmes et à Rome". Lapis Lacedaemonius. Cette pierre dure, verte et de l'aspect le plus riant, que Pline range parmi les marbres12, était, selon toute vraisemblance, un porphyre mêlé V. de cristaux de labrador". Les écrivains font souvent allusion à la couleur et à la dureté des pierres de Laconie ou de Sparte et il est probable que dans la plupart des passages il s'agit de ce porphyre". C'est la pierre des carrières de Crocées (Kpoxixt), pierre difficile à travailler dont Pausanias vante la valeur décorative"; elle entrait avec d'autres dans l'ornementation d'un superbe établissement de bains construit à Corinthe par un certain Euryclès de Sparte"; elle avait encore servi à exécute]' une statue de Zn)uKpoxeâT-gç érigée à l'entrée de la ville de Crocées. Sous Héliogabal, on l'employa au pavage des cours du palais impérial". Les carrières ont été retrouvées de nos jours, ce qui a permis d'identifier la pierre de Pausanias avec le lapis laeedaemonius de Pline, et d'affirmer que cette pierre était un porphyre. C'est celui qui est connu sous le nom de porphyre vert antique ". Un autre porphyre vert, celui d'Atrax, en Thessalie (a(Ooç OETra), )20, ne parait pas avoir été connu des Romains. C'est surtout à l'époque byzantine qu'il fut employé; trois variétés de ce porphyre entraient dans la décoration de l'église de Sainte-Sophie 21; on en fit aussi des sarcophages pour les empereurs de Byzance". Ophites 23 (è p(Ty,ç24), serpentin ou granit. Cette pierre devait son nom à ses taches qui rappelaient celles de la peau des serpents. Les anciens en connaissaient trois variétés, une lourde, noirâtre et dure2o, que l'on croit être un granit "; une autre couleur de cendre, appelée aussi tephrias, ou encoreMemphites, du lieu où on la trouvait27 ; celle-ci parait être un porphyre gris20 ; enfin une blanche dont on faisait des vases divers (vasa et endos)". Les poètes ont fait mention de l'ophite dans les descriptions d'édifices somptueux"; mais, au dire de Pline, on n'en pouvait faire que de petites colonnes 31 ; on possède des vases de cette pierre qui a été aussi employée pour des pavages de luxe 32. Phengites 33 (payy(Tv,ç) 3M. Ceci est un minéral que l'on n'a pas pu identifier avec certitude" [ALABASTER]. 118 L 934 LAP Porph,yrites' (7goppupCci ç Cette substance, appelée aussi purpurâtis3, lapis purpureus4, marinaiporphyreticuian3, est le porphyre rouge'. Pline le décrit comme un marbre d'Égypte dont une variété tachetée de points blancs était appelée leptopsep0ios. C'est seulement, à ce qu'il semble, sous le règne de Claude que le porphyre fut connu des Romains, lorsque Vitrasius Pollion, procurateur d'Égypte envoya a Rome des statues de cette matière, qui, d'ailleurs, ne surent pas goûtées. On ne sait s'il entra, dès cette époque, dans les constructions romaines; mais Lucain le fait figurer dans la description du palais de Cléopâtre'. Au na siècle, le porphyre fut très recherché', et sous Antonin le Pieux on en exploita en Arabie des carrières où travaillaient des forçats". Cette matière se taillait surtout en colonnes quelquefois monolithes, les carrières pouvant fournir des blocs de toutes grosseurs; Héliogabal lunissait au porphyre vert pour le pavage des cours du palais impérial ; on le sculpta et l'on en fit des bustes, des figures entières [ACBOLITIJUS, fig. 69; LWGULCM, fig. 15031, des baignoires, des sarcophages [sEPULCBUMj, des vasques [LABxum] et toutes sortes d'objets de luxe", Silex. Ce mot ne désigne pas chez les Latins une pierre spéciale, mais en général toute pierre dure', sous quelque forme qu'elle se rencontre : le caillou à l'aide duquel on pouvait faire jaillir des étincelles", le roc qu'il faut briser dans une mine, le calcaire' 4, le tuf volcanique' appelé pépérin45, le marbre'-', la pierre dont on faisaitdes meules i la lave qui servait è paver ts, et telle matière minérale qui, en se décomposant, pouvait servir al'amend.erfaent. d'un terrain On appelait lapides silices les pierres conservées dans le temple de Jupiter Feretrius, qui servaient aux cérémonies du sacrifice, lors de la. conclusion des traités a' , Lapisrpecuiavis:" ('rèhstpsv€sas), Les plaques, qui peuvent se diviser en lames très minces, ont été longtemps, mais non exclusivement, employées en guise de vitres [rEvasTeA, p. 1039], On a tua longtemps que les anciens n'en connaissaient pas d'autres; mais on a découvert à Pompéi et a Herculanum des fenêtres garnies de vitres en verre; aussi ne peut-on plus considérer .maintenant s;c'ecularia que comme une expression générale cqui sert à désigner les vitres, qu'elles soient de mica ou de verre. Les vitres de chier ont été les premières connues et les plus longtemps employées probablement; car, il y a lieu au moins de le supposer, le prix en devait être moins élevée Les pierres qui les fournissaient se tiraient de l'Espagne citérieure, de Cappadoce, de Sicile, de Chypre ; il y en avait aussi en Afrique 26, Celles d'Espagne, qui ne se rencontraient que dans un rayon de cent milles autour de la ville de Segobriga, étaient préférées comme plus transparentes On les obtenait en fragments de cinq pieds de long au plus. Leur extraction était difficile, ii fallait creuser des puits très profonds, etsouvent la pierre était enfermée dans la roche 2e, En Cappadoce, on les extrayait en masses assez grandes et, bien que cellesci fussent peu transparentes, elles étaient l'objet d'un commerce d'exportation important". Celles qu'on trouvait en Italie sur le territoire de Bologne étaient petites et tachetées 3U. Quant à la pierre spéculaire avec laquelle on fabriquait du platre'[GYPsuiwJ, ce n'était pas du mica, mais du gypse cristallisé, ou du spath gypseux 31. Les déchets et les rognures de cette substance furent aussi utilisés : on les répandait sur le grand cirque à l'époque des jeux pour lui donner un éclat agréable32, Syenites 32, I'hebaicus tapis", granit rouge de Syène" Cette pierre, exploitée en Thébaïde aux environs de Siens 71 et que l'on avant. d'abord appelée pyr'ropoeciios, puis psaranru3'1 (dénominations qui, vraisemblablement, s'appliquent è, deux variétés), ne doit pas être confondue avec la syénite des modernes°. Pline rapporte que les Égyptiens taillèrent dans la première sorte un grand nombre d'obélisques n et que la syénite entra en gros blocs dans la construction du labyrinthe d'Égypte'°° ; en dehors de ces ouvrages, il ne fait mention de son emploi que pour les mortiers destinés â piler les préparations médicinales et les couleurs °3, On peut cependant penser, d'après Stace k2, qu'elle eut une place dans les constructions romaines, et cette opinion est confirmée par les restes du forum de LAP Trajan On en fit encore des pavages, des baignoires, etc,'. Les Grecs ne paraissent pas avoir exploité Je granit'. Tleebairus lapis. -La pierre thébaique semée de gouttes d'or (inteastinctus aueeis guttis) que l'on trouvait, selon Pline, dans une partie de l'Aurique dépendante de l'Égypte, et qui servait à faire des mortiers peur préparations ophtalmiques a, est, pour les uns, un serpentin tacheté de mica', pour les autres un granit avec des cristaux de pyrite jaune a. Il y a beaucoup d'autres pierres qui ne paraissent pas avoir figuré dans les constructions ; quelques-unes ont été employées par des artistes et un certain nombre sont intéressantes à divers titres; nous ne mentionnons que les plus connues, Aetites 3 (n.e lr7(ç)', Aétite, pierre d'aigle, géode' Les anciens croyaient que l'on trouvait ces pierres par deux, l'une mâle, l'autre femelle, dans le nid des aigles ', où elles exerçaient une action fécondante sur les oeufs. Ils en reconnaissaient quatre espèces l'aétite d'Afrique, regardée comme femelle, petite et tendre, à l'intérieur de laquelle on trouvait une argile blanche et suave ; l'aétite d'Arabie, considérée comme mâle, dure, semblable à une noix de galle ou un peu rousse, qui renfermait une pierre dure Y° ; ces deux étaient globulaires. L'aétite de Chypre", semblable à celle d'Afrique mais plus grosse, était tendre et s'écrasait facilement entre les doigts ; on trouvait à l'intérieur du sable et de petits cailloux. La quatrième sorte, blanche et ronde, appelée tapfiiusius, du nom du lieu oie elle se rencontrait, entre Ithaque et Leucade, renfermait une pierre allongée appelée callimus. On attribuait aux aétites une influence sur la grossesse et la parturition 12. Arabes lapis33 (âpxèncbt ?d6«"), Elle est donnée comme une pierre semblable à l'ivoire qui. calcinée, fournissait un bon dentifrice. On a soupçonné que c'était un silicate de magnésie'. Assius lapis, lapis sarcop'aagus'6., -On ne peut se prononcer au sujet de cette pierre qui se tirait d'Assos, en Asie _Mineure D'après la description de Pline, elle était de structure schisteuse et elle aurait eu la singulière propriété de consumer en quarante jours les cadavres dont elle formait le cercueil" ; les dents seules écttap paient à son action. De pins, aile passait pour pétrifier tous les objets enfermés avec le corps. Ei~tin, elle entrait dans une composition contre la, gouttera. Cadmea, ,ad/nia le (itaéi,g`r s ;\iloç°), Oxyde de zinc sublimé dans le traitement des minerais zincifèrea employés pour la fabrication du laiton ((les)" Le mot cadpnea signifie encore, chez Pline, le minerai zincifère lui-même, c'est-à-dire la cadmie naturelle qui était vraisemblablement la calamine (carbonate de zinc natif) oula blende (sulfure de zinc naturel22), La cadmie artificielle était un sous-produit de, la fabrication du cuivre (ses) ou plutôt du laiton; elle provenait de la cadi-aie naturelle 23, e pierre nécessaire aux fondeurs , dit Pline 2" ; il se formait ainsi dans les fourneaux pendant l'opération une nouvelle cadmie, qui devait son nom à son origine. Cadette artificielle, On distinguait plusieurs genres de cadmies artificielles, qui avaient des qualités différentes selon la place où elles se déposaient dans les fourneaux, La plus légère, appelée capnitis, se recueillai à l'orifice supérieur ; elle semble n'avoir pas été prisée. La meilleure était celle qui s'amassait à la voûte du four et y était comme suspendue (dependens) ; sa position et la forme qu'elle affectait (3orpuei€r,5) lui avaient fait donner le nom de botruitis (po-epurrts). Une troisième, dénommée piacitis (cr,ux rt6)26, s'attachait aux parois des fourneaux, où elle avait l'aspect d'une croûte diversement colorée à l'intérieur. La cadmie botruitis est décrite comme dense, modérément lourde et plutôt légère 2G, Dans la pleucitis, on distinguait deux espèces, l'une, appelée onychitis, extérieurement bleuâtre, intérieurement d'une teinte un peu plus claire, offrait à la vue des couches disposées comme celles de l'onyx ; l'autre, désignée par le nom d'ostracitis (ôsrpaxirt.,}, était noire et sale2'. Pour recueillir plus facilement les cadmies, on disposait dans les fourneaux des espèces de treillis en fer sur lesquels elles s'amassaient". La sorte la plus prisée était la botruitis de Chypre24, très employée pour les médicarmnts ophtalmiques ; les deux espèces de plOciiis étaient utilisées pour cicatriser les plaies. Après les avoir calcinées, on les éteignait dans du vin ou du vinaigre et on en faisait des emplâtres. Les cadmies de Macédoine, de Thrace et d'Espagne, étaient déclarées inutilisables ", On a encore préparé la cadmie artificielle, notamment à Soles dans Pile d C._ypre, ers soumettant au grillage des pierres appelées pyrites, sur la nature desquelles on ne ut su, prononce:, avec certitude Enfin, il se produisait dans la métallurgie de l'argent une cadmie qui était plus blanche et moins lourde glue celle qai p r°ovenali't de la fabrication du cuivre, LAP 936 LAP mais qui lui était inférieure au point de vue médical'. Cadmie naturelle. Il est certain que les anciens ont connu au moins un minerai zincifère auquel ils donnaient le nom de cadmie ; quatre passages de Pline ne peuvent laisser aucun doute à cet égard. Mais l'emploi de ce minerai dans la fabrication du laiton 2 le lui faisait regarder comme une pierre cuivreuse (aerosus lapis) 3 ; il savait néanmoins qu'on le mêlait au cuivre pour faire 1'aurichalque 4 [OBuCHALCUM]. Cette pierre, qui se trouvait dans les couches profondes de la terre, avait abondé autrefois en Campanie ; à l'époque de Pline, elle s'exploitait sur le territoire de Bergarne; il y en avait aussi en Germanie'. On ne saurait dire avec assurance quel était ce minerai, ou s'il s'agit toujours du même dans tous les passages, puisque nous n'en avons pas même une description sommaire. On peut supposer que c'est la calamine aussi bien que la blende 6, qui, jusque vers le milieu de ce siècle, ont été employées, surtout la première, presque exclusivement à la fabrication du laiton 7. Chalcitis (ymÀxèr;ç À(Aoç°). Ceci est une substance sur la nature de laquelle on n'a pas pu se mettre d'accord, les données antiques étant trop vagues pour permettre une conclusion positive 9. Pline en parle plusieurs fois comme d'une pierre dont on tire du cuivre ou du laiton (ex quo fit ses). Dans un des passages10, il semble bien que le mot chalcitis désigne un minerai de cuivre; mais dans un autre, où il essaie de la distinguer de la calamine (cadmea), les caractères décrits conviennent en partie à celle-ci, et le fait que laissée quarante jours dans du vinaigre elle prend une couleur de safran 11 ne saurait indiquer un minerai de cuivre ; enfin, dans un troisième, il s'agit d'une pierre alumineuse 12. Chernites(yEpver ;13).-Cettepierre,delablancheurde l'ivoire, passait non seulement pour ne pas consumer les cadavres, mais encore pour les conserver. Une tradition voulait qu'on en eût fait le cercueil de Darius. Ces renseignements sont insuffisants pour juger de sa nature". Coralliticus lapis. C'était aussi une pierre d'une blancheur approchant de celle de l'ivoire et qui avait quelque ressemblance avec cette substance; elle se trouvait en Asie en blocs de deux coudées au plus 16. Cette pierre se prêtait à la sculpture. On possède la description d'une statuette de Jupiter en pierre corallitique avec des vête ments dorés16. Une inscription latine 17 fait mention de deux statues de cette matière dont on ignore la nature 18. Gagates (yay«Tti ç À:0oç19). Cette substance, qui, disaiton, devait son nom au fleuve Gagès en Lycie, était une sorte de pierre noire, unie, légère, poreuse, ne différant guère du bois ; broyée, elle avait une senteur désagréable et exhalait une odeur sulfureuse ou une odeur d'asphalte en brûlant; on prétendait que l'eau l'enflammait, tandis que l'huile l'éteignait. La meilleure était celle qui prenait feu avec facilité. Elle avait la vertu d'éloigner les serpents ; de plus, c'était un remède contre l'épilepsie. On a cru que ce gagat était le jais 20, d'autant plus qu'on avait trouvé des ornements d'époque romaine taillés dans cette matière". Gangetis (yayy~Tt; )(0oç22). On a voulu identifier aussi avec le jais 23 cette pierre qui se rencontrait dans le pays des Gordyéens et qui avait, comme la précédente, la propriété de mettre en fuite les serpents. Magnes lapis"(os'vilTtç )■(0oç21),magnétite, aimant. Ce corps, auquel on donne encore les noms de sideritis (C't8rtptTtç)26 et de pierre d'Héraclée ('paxÀEtoç )(Aoç) 27, est identique avec la magnétite des modernes25 (oxyde de fer naturel). Une tradition voulait qu'il dût son nom àunberger du mont Ida, à qui l'attraction exercée sur les clous de ses chaussures et le fer de sa houlette en avait révélé la présence. Les anciens en connaissaient cinq espèces : l'aimant d'Éthiopie, qui était le meilleur de tous et se payait son pesant d'or; on le trouvait dans une région sablonneuse appelée Zmiri ; celui de la Magnésie près de la Macédoine, d'un roux tirant sur le noir ; l'aimant d'Hyettos, en Béotie, d'un roux plus clair que le précédent; celui des environs d'Alexandrie, en Troade, noir et sans valeur; enfin, l'aimant de Lydie, le plus mauvais de tous, il était de couleur claire et semblable à la ponce 29. On en avait trouvé aussi dans le pays des Cantabres, mais, quoiqu'il attirât le fer, il n'était pas regardé comme un véritable aimant30. On s'attendrait à voir ce minéral utilisé dans la production du fer; cependant, les anciens ne nous donnent à ce sujet aucun renseignement31. Ce qui parait avoir surtout attiré leur attention, c'est sa force attractive d'ailleurs très exagérée dans certains récits, comme ceux relatifs à ces montagnes d'aimant, situées près de l'Indus, dont on ne pouvait détacher les pieds ".Un architecte, Timocharès, avait songé à utiliser cette propriété dans la cons LAP --937 LAR truction d'un temple dédié par le roi Ptolémée à sa soeur Arsinoé ; grâce à l'attraction exercée par l'aimant, la statue en fer de la princesse devait paraître suspendue dans l'air. La double mort de l'architecte et du roi empêcha de tenter l'exécution de ce projet irréalisable'. Les anciens fabriquaient divers objets d'ornement avec cette pierre que Théophraste range parmi celles qui se prêtaient au travail du tour Elle entrait aussi dans la composition de médicaments ophtalmiques ; calcinée et pulvérisée, elle passait pour cicatriser les brûlures Enfin, on la fondait avec le verre, probablement pour lui donner une teinte sombre 4i, et l'on en faisait la fausse hématite 6. Ostracias, ostracitis, ostracites (ènTpax(T'1ç ),i0oç). Pline désigne, par les termes ostracias et ostracitis, une pierre d'une extrême dureté semblable à l'agate, dont les fragments servaient pour la gravure des pierres fines [GEMMAS-j; 11 est question encore chez Dioscoride et chez lui d'une autre pierre qu'ils appellent ostracites (ôsTpax(T.Oç 6) ; celle-ci ressemblait à une coquille de mollusque ; elle est décrite comme feuilletée et facile à diviser 7 ; cette description l'a fait identifier avec l'os de seiche 8. On s'en servait en guise de pierre ponce pour l'épilation. Pyrites (7cup(Tr,ç a:06iç), pyrite. Ce mot ne désigne pas toujours le même corps ; on l'a appliqué facilement à toutes les pierres dures au moyen desquelles on pouvait faire jaillir des étincelles en les frappant avec un morceau de fer [ICNIARIA]. La pyrite qui est décrite, dans Dioscoride et dans Pline 10, comme une pierre couleur de laiton donnant facilement des étincelles, est regardée avec vraisemblance comme une pyrite de fer; de même la pyrite vive (virus)", cette pierre lourde nécessaire aux exploratores des armées. La pyrite poreuse (spongeosior) f2 paraît être du quartz poreux. Siphnius lapis 13, pierre ollaire. Il y avait dans l'île de Siphnos une pierre dont on faisait des vases de cuisine et des ustensiles de table parce qu'elle pouvait se creuser facilement et se prêtait au travail du tour'. Cette pierre, dont on ne nous dit pas la couleur, était tendre, mais, arrosée d'huile et chauffée, elle devenait dure et noire. Du côté de Côme, en Italie, on en avait trouvé une de couleur verte qui pouvait se traiter de la même manière. On a découvert à Ithaque des fragments de flûtes en pierre ollaire ". Thracius lapis 16 (epgx(aç a(Aoç 1'), pierre de Thrace, charbon de terre, houille. Dans diverses mines de Thrace ou du voisinage de la Thrace du côté de la Macédoine, on trouvait des pierres fragiles qui s'enflammaient plus ou moins facilement et brûlaient comme des charbons, en répandant une odeur désagréable. Théophraste18 cite des mines, situées près d'une localité qu'il appelle Binae (B(v«t), d'où l'on en extrayait deux espèces, l'une qui avait besoin de charbons pour s'enflammer et dont l'ignition ne se maintenait pas sans qu'on soufflât;l'autre, appelée 0-7rivoç, brisée et mise en tas, s'enflammait spontanément, surtout lorsqu'elle était humectée 19. On avait encore rencontré des pierres de ce genre en Elide20 du côté d'Olympie, en Ligurie et en Sicile 21. Une autre sorte semblable à du bois pourri, trouvée à Skaptè IIylé, brûlait comme une mèche quand on l'imbibait d'huile, mais sans éprouver aucune altération22. L'usage de ce charbon de terre ne paraît pas avoir été très répandu; cependant Théophraste fait mention de son emploi par les ouvriers qui travaillaient les métaux (yzaxsiç)23. ALyIEo JACOS.