Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article LECTICA

LECTICA. Litière ou lit portatif d'origine orientale et d'un usage très ancien. Les Égyptiens connaissaient déjà la litière, ou plutôt une sorte de chaise que portaient sur leurs épaules. à l'aide de brancards, des serviteurs plus ou moins nombreux. Nous possédons plusieurs représentations du palanquin royal dans lequel les pharaons conduisaient certaines processions religieuses : c'était un trône magnifiquement orné autour duquel l'air était rafrafchi par des flabellifères [FLABELLLM; le roi y était assis, le plus souvent, sous un dais qui le défendait des ardeurs du soleil ; le nombre des porteurs variait de six à huit'. Une chaise plus simple, à quatre porteurs seulement, servait aux riches particuliers pour se rendre à de faibles distances ; les tableaux peints des tombes de BéniHassan nous en ont conservé un curieux spécimen 2. Une peinture de la nécropole de Thèbes nous montre un palanquin dans lequel deux personnes pouvaient prendre place l'une à côté de l'autre ; point de toiture, mais, audessus du siège, une large touffe de lotus. La même peinture représente un autre palanquin pourvu d'un toit que supportent des colonnettes; l'ensemble n'est pas sans analogie avec nos chaises à porteurs du xvile et du xvnfe siècle 3. Certaines divinités comme Cybèle [CYBELE] étaient promenées en litière à travers les villes d'Asie; la même coutume existait à Carthage 1. Les Assyriens ne semblent pourtant pas avoir pratiqué la litière. Sur un bas-relief de Nimroud, on voit une procession où des statues de divinités sont portées à bras, mais les civières sur lesquelles elles reposent rappellent plutôt le FERCDLUM des Romains que la litière à proprement parler 8. Il n'est pas douteux que la litière n'ait été de bonne heure employée chez les Perses : Plutarque conte l'histoire d'un certain Tilnagoras, ambassadeur des Athéniens auprès d'Artaxerxès Mnémon, qui s'attira les critiques de ses compatriotes pour les faveurs dont l'avait comblé le Grand Roi ; celui-ci, notamment, l'avait fait reconduire jusqu'à la mer dans une litière somptueuse, aux porteurs de laquelle il avait donné quatre talents G. Il est question de litière dans la Bible : le Cantique des cantiques décrit la litière que Salomon s'était faite de bois du Liban, et où il avait prodigué l'or, l'argent, la pourpre, la mosaïque'. Le palanquin était également usité dans 375, LEC 1003 -LEC l'Inde ancienne'. C est donc d'Orient que la litière a passé chez les Grecs et plus tard chez les Romains, qui en ont fait un si grand usage ; voyons ce que les textes, et aussi les monuments trop rares qui la reproduisent, nous apprennent sur son histoire. GRÈCE, De bonne heure, sans qu'il y ait lieu de faire intervenir aucune influence étrangère, l'usage parait s'être établi en Grèce de transporter les blessés et les morts par accident sur des espèces de civières dont nous ignorons la forme, mais qui étaient probablement fort simples. Dans l'Androtnaque d'Euripide, le cadavre de Néoptolème est ramené de Delphes popxi v, c'est-à-dire sur une couchette portative, peut-être protégée par une sorte de baldaquin'. Était-on, dans la rue, victime d'une agression, faisait-on une chute de cheval, on était reconduit chez soi en litière tôt, grâce aux relations des Grecs avec l'Orient, particulièrement avecla Perse, la litière devint chez eux un moyen de transport à l'usage des délicats. Au temps de Périclès, l'architecte-mécani cien Artémon, qui vivait dans la mollesse et qui, d'ailleurs, était boiteux, se rendait à ses affaires couché sur un lit porté presque au ras du sol (iv xatvtô:w xpElitas'g) 7tzp7. Ti;v y-w zVTŸiv), disposition peu commune, à ce qu'il semble, très différente, dans tous les cas, de celle de la litière ordinaire (popiïov) que soutenaient des brancards reposant directement sur les épaules des porteurs. Était-ce cette disposition spéciale, ou le fait qu'Artémon ne quittait guère sa litière, ou encore la rareté des litières à cette époque? Toujours est-il que ce personnage jouissait à Athènes d'une certaine popularité, qui l'avait fait surnommer b 7cEpttpdpr,Toç 'ApTEµwv '. Au ive siècle, la litière est un luxe généralement réservé aux femmes. Démosthène, pour avoir été rencontré en litière sur la route du Pirée, est violemment pris à partie par Dinarque". Pourtant, l'habitude se répand, même pour les hommes, d'y avoir recours. On a des esclaves spécialement dressés à la porter, et nous voyons le philosophe Lycon, le successeur de Straton au Lycée, affranchir par testament deux tpopezpôpot qui sont depuis quatre années à son service Ces fonctions étaient très pénibles s. Nous ignorons quel était le nombre habituel des porteurs ; au temps de Lucien, il ne semble pas qu'ils fussent plus de quatre 10 La matière dont la litière était faite chez les Grecs, sa forme, sa décoration, nous sont à peu près inconnues. D'après Suidas, certaines litières à l'usage des femmes auraient été formées d'osier tressé". La litière dans laquelle Eumène malade se faisait porter à la tête de ses troupes était pourvue de rideaux (aû).eal), ce qui prouve qu'elle avait un toit, et comme il y passait la nuit, il faut la supposer assez grande et assez bien aménagée pour qu'il y pût dormir à l'aiseS2. Les litières d'apparat dans lesquelles les femmes de condition princière se rendaient au théàtre, ou qu'on envoyait au-devant des ambassadeurs revenant de mission et qu'on voulait honorer d'une façon spéciale, étaient splendidement décorées; les coussins y étaient de pourpre, les pieds incrustés d'argent ou façonnés dans l'argentmassif13.Car la litière, comme le lit, avait quatre pieds qui, lorsqu'elle était posée à terre, maintenaient la couchette à une certaine hauteur au-dessus du sol. Dans les litières de luxe, ces pieds étaient d'or ou d'argent. La célèbre procession organisée à Daphné, près d'Antioche,par Antiochos Épiphane, vers l'an 167 avant notre ère, montrait quatrevingts femmes dans des litières à pieds d'or ; cinquante autres suivaient, magnifiquement parées, dans des litières à pieds d'argent ". La peinture d'un vase trouvé dans la Russie méridionale (fig. 4375) représente une litière d'un genre assez particulier". C'est un lit garni de coussins, sur lequel ont pris place deux personnages, un homme à demi couché, tenant un thyrse et un canthare, et une femme assise. Ce lit est placé sur le dos d'un mulet conduit par un satyre qui danse en soufflant dans une double flûte. Le sens de la représentation n'est pas douteux : il s'agit des noces d'Ariadne et de Dionysos 30 ; ce qui est plus embarrassant, c'est le nom qu'il convient de donner à cette litière portée par une bête de somme. Il n'est pas possible de l'assimiler à la BASTERNA, sorte de chaise fermée, d'invention tardive, et que supportaient des brancards auxquels étaient attelés deux mulets, un devant, l'autre derrière. On a vu dans la peinture que nous reproduisons une image de 1 âcTpzàyi , sur laquelle nous avons peu de lumière'"; mais il semble que l'âaTpx6' ait plutôt été une espèce de selle'". La figure 4375 n'a, de toute façon, qu'un lointain rapport avec la litière ordinaire, dont le propre était d'être portée à bras d'hommes, et peut-être n'y faut-il voir qu'une simple .109. -2 Eurip. Androm. 1166 ; cf. rUAUS (p. 1374) et t.ecrus. 3 Lys. IV, 9; Andoc. De mye. 61 ; Demosth. In Con. 20. Poli. III, 94. n Armer. ap. Athen. XII, p. 533 E-F ; Ephor. et Iloruel. Pont. ap. Plut. Perict. 27. Cf. la parodie d'Arislophane (Achars. 850) d ,cep,n0srmpoç 8 Dinarch. Ira Demosth, 36. 7 en trouve aussi, pour désigner ces porteurs, le mot goperç ; voir Plut. Artar. 22; Poll. III, 94. 8 Diog. Laert. V, 73. 9 Lucian. Cyn. 10. 10 Id. Sonal. s. galbe, 0;Epist.sn.t.28.-l1 Suid.s.n.,o?CYo',.-12 Plut. Eoonen.14.Cf.Suid.s u. 13 Plut. Arat. 17 ; Posid. Apam. ap. Athon. V, p. 212 B-C. 14 Atheu, V, p. 195 C. -15 Stephaui, Compte rendu p. 1863, pl. v, 3, p.228. 10 voir An o,oce et noceurs (p. 637). Demosth. In And. 133, et le Sehn ad pan. 558, 16 :Bachot, ap. Athen. XIII, p. 582Bsgq. ; Iiesych. s. v. Sur la figure 4375 interprétée comme représentant. l'horoaére voir Hermann-Blümner, Gricch. Pr irai alterthaines, p. 481, n. 4. LEC 100!4 -LEC fantaisie. Chez les Grecs, en résumé, la litière ne fut jamais très répandue. Elle était surtout employée par les femmes; à l'époque de Lucien, elles s'y faisaient suivre volontiers de philosophes ou de poètes à gages avec lesquels elles s'entretenaient en public, et dont la présence leur donnait une réputation de bel esprit'. RoBE. Un des premiers emplois de la litière (leclica) chez les Romains; comme chez les Grecs, parait avoir été d'aider au transport des blessés 2. Dans Rome, les infirmes, les vieillards, à la condition d'être d'un certain rang, sortaient en litière. S'il faut en croire Plutarque, c'est en litière (EV tpopcap), à travers le Forum, qu'Appius Clandius, vieux et aveugle, se serait fait conduire au sénat pour combattre les propositions de paix de Pyrrhus '. Nous voyons Tibère, souffrant, se rendre à la curie dans une litière couverte 3 . Un certain nombre de textes nous montrent des généraux malades, dirigeant de leur litière une opération déterminée ou même toute une campagne : tels Hannibal au combat de Trasimène, Scipion sous les murs de Sagonte, Octave peu avant la bataille de Philippes, l'empereur Sévère en Bretagne, vers l'an 208 de notre ère'. Longtemps, à Rome, les hommes semblent n'avoir usé de la litière que contraints par la nécessité. Pourtant, d'assez bonne heure, ils l'employèrent aussi pour leur commodité ou leur plaisir, particulièrement en voyage ° et à la campagne 7. Cicéron était dans sa litière, allant de sa villa de Gaëte au rivage, oh il comptait s'embarquer, quand il fut rejoint par les soldats d'Herennius 3. Mais c'étaient surtout les femmes qui se servaient de la litière. Les femmes de sénateurs allaient en litière couverte Était-ce un privilège ?Il semble dans tous les cas qu'elles l'aient bien vite partagé avec d'autres; c'est ce qui expliquerait la mesure de Jules César interdisant l'usage de la litière aux femmes qui n'avaient ni mari ni enfants, et qui étaient âgées de moins de quarante-cinq ans "0. D'ailleurs, le droit de se faire porter en litière, pendant longtemps, n'appartint pas à tout le monde. C'était une faveur que Claude accorda à certains de ses affranchis, avec la liberté de donner des jeux publics", et que Domitien, qui voulait réformer les moeurs, retira aux femmes convaincues d'adultère12. Malgré cette réglementation, la litière parait avoir été, sous l'Empire, d'un usage a peu près général. Les femmes de moeurs légères l'employaient comme les matrones 13 ; d'après Quintilien, on en abusait pour les enfants, qui s'y amollissaient"; les jeunes gens eux-mêmes en usaient sans vergogne"; les riches, les personnages importants, trouvaient agréable de s'y étendre pour se faire conduire à leurs affaires, accompagnés de leurs clients qui, parfois, leur servaient de coureurs [ANTEAMBFLONES] et les précédaient pour écarter la foule devant eux16. Aussi y avait-il à Rome toute une population d'esclaves (lecticarii) particulièrement habiles à porter la litière. C'étaient des hommes robustes 17, généralement Cappadociens, Syriens, Mésiens, Thraces, etc. 20; ils faisaient le métier de porteur aussi bien en dehors de la ville que dans la ville elle-même 19. Tout Romain aisé en possédait un certain nombre ; avec les cuisiniers, les boulangers, ils étaient au dernier rang de la domesticité20; leurs services n'en étaient pas moins appréciés, et l'on jugeait de la fortune des gens aux lecticarii qu'ils pouvaient mettre en ligne 21. Dans une même famille, chaque membre avait los siens, spécialement attachés à sa personne 22, mais audessus de tous étaient souvent placés des chefs qu'on désignait de différente manière : parmi les inscriptions funéraires de Rome, il en est qui mentionnent des supra leetirarios23; ailleurs, on voit nommé un praepositll.s lectilca(rioruin)°t. Peut-être ce dernier titre fait-il allusion à quelque association ; nous savons, en effet, que les porteurs de litière formaient des collèges [COLLEGU7M] ayant leur DECLBIO, leurs scribes 2"". Les empereurs avaient de nombreux lecticarii ; quelques-uns de ceux qui faisaient partie de la familia Augusta nous sont connus par les inscriptions 26. Vers la fin de l'Empire, on trouve aussi des lecticarii indépendants, qui habitaient, dans la douzième région, les castra leeticarioriim ; ils étaient surtout au service des magistrats V1. Il y avait également, à Rome, des litières de louage, ou du moins des chaises (sellae) â l'usage du public26. Les lecticarii portaient une sorte de livrée qui les rendait aisément reconnaissables et dont la pièce principale était un manteau rouge ou brun, à capuchon (paenula), en laine de Canusium29. Six à huit hommes étaient nécessaires pour manoeuvrer les lourdes litières romaines ".Dans certaines litières, on tenait deux : telle était celle où Néron, au début de son règne, prenait quelquefois place auprès d'Agrippine31. Mais ces litières monumentales ne paraissent dater que de t'Empire : lorsque Cicéron, au moment des proscriptions, s'enfuit de Tuseulum avec son frère Quintus, nous le voyons monter dans une litière; Quintus monte dans une autre et, pour pouvoir se parler, ils font cheminer les deux litières de front 32. Il est question dans certains textes de litières couver s'est demandé ce qu'il faut entendre par ces expressions. D'après une opinion qui parait vraisemblable, toutes les litières, à Rome, étaient couvertes et garnies de rideaux; quand ces rideaux étaient fermés, la litière était dite operta 34. C'est dans des lecticae opertae qu'étaient transportés les malades et les morts. Car la litière était aussi employée pour les obsèques [FGsL's, p. 13901; nous avons sur ce point des témoignages précis, dont un nous reporte au temps de C.Gracchus3'. Dans ce cas, elle était entière LEC 1005 LEC ment close. Pour les enterrements populaires, on se servait d'un coffre portatif (sandapila), complètement dépourvu d'ornements ]FI;Nus, p. I390). C'est dans un coffre de ce genre que le corps de Domitien fut emporté pour être inhumé clandestinement le long de la voie Latine La sandapila n'exigeait que quatre porteurs 2. Nous pouvons nous faire une idée de la forme des litières en usage sous l'Empire grâce à différents débris trouvés sur l'Esquilin en 1874 et à l'aide desquels Au g. Castellani a reconstitué une litière complète (fig. 4370, actuellement exposée au Musée du Capitole3. Cette litière comprend : 1° un lit à quatre pieds composé d'une couchette (torus)3, sur laquelle on étendait un matelas (culcita, pulrinus)', et d'une sorte d'accotoir qu'on garnissait d'un coussin CERVICAL] pour pouvoir s'y accouder ou même y poser la tête; 2° un ciel ou toit fait en peau' et surmonté d'une tringle horizontale d'où tombaient des rideaux (vela, plagulae) Quatre colonnettes soutiennent ce toit; celles de devant se terminent par d'élégants hermès en bronze. Des anneaux fixés de chaque côté du lit retenaient les brancards (asseres) qui servaient à porter la litière [AssER] ; on aperçoit encore, à l'extrémité d'un de ces brancards, une boucle métallique dans laquelle passait peut-être une courroie destinée à soulager de temps en temps l'épaule ou les bras du porteur. Dans les anciennes litières, les asseres, semble-t-il, étaient fixés par des liens (struppi) au lieu d'anneaux'. La décoration des litières était souvent très riche. Celle que nous reproduisons avait un revêtement de bronze finement ciselé, avec incrustations d'argent. La figure 4377 représente une statuette d'argent trouvée à Rome et qui ornait, d'après Visconti, le brancard d'une litière ". Le prix qu'on attachait à ces ornements, quels qu'ils fussent, parait attesté par une inscription d'Algérie, une dédicace dont l'auteur a consacré à Bellone lecticant mn V. suis ornamentis". A l'intérieur, même luxe: en général, les coussins étaient rembourrés avec de la plume ; ceux de la litière de Verrès, de cette litière qu'il s'était fait construire sur le modèle de celle des rois de Bithynie, étaient d'une étoffe légère et transparente et tout remplis de roses de Malte ; c'est là que, nonchalamment étendu, une couronne de roses sur la tête, un collier de roses autour du cou, Verrès voyageait à travers la Sicile en portant sans cesse à ses narines une résille pleine de roses qu'il tenait à la main' 2. Les litières à rideaux, quand les rideaux en étaient fermés, ne laissaient rien voir des choses du dehors, pas plus qu'elles ne livraient passage aux regards indiscrets 13. Or, si c'était là, dans certains cas, un avantage, si Marcellus, au dire de Cicéron, quand il voulait aller quelque part, s'enfermait soigneusement dans sa litière afin de n'être détourné de son but par aucun présage '4, cette claustration, rendue nécessaire par les rigueurs de l'atmosphère, avait ses inconvénients. On imagina, pour y remédier, de mettre aux litières des vitres à l'aide de cette pierre facile à tailler en lames transparentes, que les Romains appelaient lapis specularis" [vlrnu31. Il fut possible ainsi de voir autour de soi, sans souffrir du vent; mais un pareil aménagement ne pouvait se concilier avec des rideaux : il est probable qu'aux rideaux succédèrent des parois solides, dans lesquelles on pratiqua des fenêtres qui s'ouvraient ou se fermaient à volonté". La litière, ainsi perfectionnée, offrait un refuge où il était facile de s'isoler et où, effectivement, on lisait, on écrivait, on dormait à l'aise". Il ne faut pas confondre avec la lectica la sella gestatoria, qui s'en rapprochait beaucoup, mais dans laquelle on était assis, au lieu d'être, comme dans la lectica, couché ou à demi couché. La différence, d'ailleurs, apparait nettement dans quelques textes où les deux mots sont rapprochés, ce qui prouve bien qu'ils désignaient deux choses distinctes18. Une petite terre cuite de Pompéi (fig. 4378) nous montre la sella sous sa forme probablement la plus ordinaire". On y voit deux esclaves portant à l'aide de brancards une sorte de caisse qui ressemble à une maison, et dans laquelle se trouve un personnage dont on ne saurait déterminer le sexe ni l'âge. Les deux porteurs tiennent les brancards avec la main, au lieu de les avoir posés sur les épaules ; le second a recours, pour alléger son fardeau, à une espèce de bretelle qui lui passe sur l'épaule droite ". Un autre groupe presque identique et provenant également de Pompéi, est conservé, comme celui-ci, au Musée de Naples". Nous voyons par ce spécimen que la sella gestatoria, ou chaise à porteurs, était couverte, comme la litière ; mais les ouvertures latérales 127 LEC 1006 PLEC en pouvaient être fermées par des rideaux (lintea) `. Dans certains cas, elle se composait, à ce qu'il semble, d'un simple siège flanqué de brancards 2. Il y avait à Rome des chaises de louage dans lesquelles on s'installait pour assister commodément aux spectacles du cirque 3. Deux esclaves généralement suffisaient pour porter la sella, moins lourde que la litière ; parfois, cependant, il en fallait jusqu'à six 4. La sella gestatoria (l(ypoç, iéppoç comme la litière, très en faveur sous l'Empire. Les riches sortaient dans Rome en sella, traînant derrière eux leurs clients dans la boue des rues Néron se faisait quelquefois porter en sella au théâtre, et, de la partie supérieure du proscenium, il contemplait et dirigeait les mouvements des pantomimes Nous voyons Agrippine, instruite du parricide que médite son fils, se rendre à Haïes en chaise à porteurs, afin d'éviter la nier, qu'elle redoute 3. C'est dans une chaise que Vitellius, traqué de toute part, s'échappe du Palatin et gagne, sur l'Aventin, la maison de sa femme', Il va sans dire que la sella elle-même ne doit pas être confondue avec le siège pliant que des serviteurs portaient derrière les personnes riches ou considérables, pour leur permettre de s'asseoir en tout lieu. Ce siège n'est autre chose que l'ôx),aô(aç des Grecs10, Les Romains lui donnaient le nom de SELLA", et le code Théodosien en réglait l'usager; mais il n'avait, en réalité, rien de commun ni avec la sella gestatoria ni avec la litière. P. GIRARD.