Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

LEGIO

LEG O. Corps de troupes, le plus considérable de tous ceux qui composaient l'armée romaine. Les auteurs grecs traduisent le mot par différentes expressions comme inscriptions on trouve surtout t n;dv ou de chercher, en s'appuyant sur le témoignage d'écrivains qui ne le savaient pas eux-mêmes, à quelle date on doit faire remonter l'établissement de la légion. Peu importe que Tite Live en parle seulement à propos de la guerre des Antemnates 8, quatre ans après la fondation de Rome, ou que Plutarque nous apprenne que ce fut la première institution de Romulus e. Si, comme le dit Varron 'g comme on l'admet, le terme legio vient de l'aga ré et signifie la « levée », la légion est aussi ancienne que Rome même: c'est l'ensemble des citoyens-soldats. La cité patricienne était composée de quelques centaines de familles groupées en curies et en tribus ; leur réunion les armes à la main constituait la légion. A en croire la tradition", ces tribus étaient au nombre de trois 'TRIBUS], les curies au nombre de trente [mua]. Chaque curie fournissait cent hommes de pied et dix cavaliers (centuria), chaque tribu comptait mille soldats et cent cavaliers [EQLITES]; par suite, la légion comprenait un effectif de 3000 hommes 12. Fausses ou exactes, ce sont là des données qu'il n'y a pas lieu de discuter. Ce qu'il importe de noter, c'est qu'à l'époque antérieure à Servius Tullius, la légion n'est autre chose que l'assemblage des diverses gentes Latrie ie*nnes, s'unissant entre elles pour la défense de la cité, sur la convocation du roi". C'est au roi Servius Tullius que les auteurs rapportent la modification de cet état de choses : ce fut une véritable révolution. Les anciens cadres de la légion patricienne furent brisés et remplacés par des cadres nouveaux. La répartition par tribus, curies, gentes, fit place a la répartition par corps et compagnies, la base de cette nouvelle organisation étant non plus la naissance, mais la fortune. Tous les citoyens propriétaires de biens-fonds furent obligés au service militaire à partir de la dix-septième année, les autres n'étant appelés que dans des cas urgents [ruimmur'C. Les propriétaires étaient répartis en cinq bans ou classes suivant leur fortune [Classes] ; les plus riches formaient la cavalerie HOUPPES], les autres l'infanterie et les services auxiliaires ". De plus, chaque classe l partageait, suivant l'âge, en deux divisions : les plus jeu nesformaient l'année active, les plus figés constituaient la réserve affeetee à la défense de la ville (legïones arrbanae)1" [EXERGUES]. «On sait peu de chose, dit M. Douché-Leclereq 1" de la légion au temps de Servius Tullius, Les auteurs qui en parlent (Tite Live, Denys d'Halicarnasse) confondent des termes et des méthodes appartenant à différentes époques. Ils assimilent la légion de Servius a la phalange macédonienne", et le groupement qu'ils décrivent, assemblage de miliciens de différentes classes et différemment armés, est loin de rappeler la masse compacte et homogène de la phalange. Enfin, on ne sait quel rôle assigner dans cette « phalange r romaine à la centurie qui est cependant l'unité tactique instituée par Servius Tullius [CENTURIA]. Aussi, les systèmes abondent et chaque érudit expliquo à sa manière la transition de l'ordre compact usité au temps de Servius Tullius à l'ordre fractionné introduit par Camille et de là à l'ordre mixte du temps de Polybe f8-» A en croire les auteurs anciens 1J, la légion servienne présentait six rangs de profondeur. Au premier et au second rang se' tenaient les citoyens de la première classe. avec armure complète (casque, cuirasse, bouclier rond d'airain et jambières); le troisième et le quatrième renfermaient les citoyens de la deuxième classe, sans cuirasse, mais avec casque, jambières et bouclier carré ; le cinquième et le sixième rang étaient formés par les citoyens de la troisième classe, armés de même, mais privés de jambières. Les citoyens de la quatrième classe, pesamment armés, suivant Denys d'Halicarnasse 26, n'ayant qu'un javelot et une lance, suivant "Tite Live 21, étaient en dehors de la phalange, avec les gens de trait, constitués par ceux de la cinquième classe 22 [Rontmu], A la légion étaient réunies cinq centuries supplémentaires : deux de l'Auei (adjoints à la première et à la deuxième classe), une de coRNICiNES, une de vuBleirals et une d'AGI:° NSi vELATI. La cavalerie était disposée de chaque côté de la légion dont elle faisait partie Une troisième transformation de la légion eut lieu vers l'époque de Camille, disent les uns 23, entre la mort de Camille et la guerre de Pyrrllus, pensent les autres "a a il est fort possible que les deux assertions soient vraies, si les innovations militaires de ce temps se sont produites, non d'un seul coup, mais par degrés et séparément. Ii parait certain que les guerres du Samnium avaient révélé les inconvénients du système de Servius Tullius. l'imitation romaine de la phalange n'était plus assez mobile pour faire face aux ennemis nouveaux de Rome, ni la LEG 1.048 -LEG composition des cadres en harmonie avec les progrès de l'art militaire ; de plus, l'armement devait être modifié afin de permettre aux légionnaires de tenir tête à des adversaires auxquels ils n'étaient point encore habitués. De tout cela résulta une organisation bien différente de la précédente'. Ce n'est plus la fortune, mais l'âge qui dorénavant assignera aux soldats leur place sur le champ de bataille. Les jeunes sont mis en première ligne (hastati), les hommes faits (principes) au second, les plus âgés (triarii ou pilani) en troisième ligne En même temps, on renonce. à la formation par masses compactes qui caractérisait le système de Servius Tullius ; on divise l'infanterie en manipules, séparés les uns des autres par des intervalles qui facilitent la manoeuvre : ce sera désormais la base de toute l'organisation légionnaire romaine'. Comment se fit le changement et par quels intermédiaires arriva-t-on à l'organisation que l'on nomme manipulaire? C'est ce que nous ignorons absolument. Ceux mêmes qui ont tenté d'éclaircir l'origine de la formation par manipules reconnaissent que les renseignements fondamentaux fournis par Tite Live sur lesquels on s'appuie pour élucider la question, sont pleins d'incertitudes et d'obscurités. Dans ces conditions, il suffit de renvoyer aux dissertations parues sur ce sujet, et à l'exposé de la question tel que l'a résumé Marquardt Autre question. Le manipule créé à cette époque est-il le même que celui dont Polybe nous a laissé la définition ? Les avis sont partagés ; c'est encore là un détail sur lequel nous ne pouvons insister ici. Nous nous contenterons, au sujet de cette réforme capitale, de transcrire ce que l'auteur grec nous a dit et d'indiquer par là quelle était, à son époque, l'économie de la légion romaine : « Quand les légions se sont réunies, les plus jeunes ët les plus pauvres sont désignés comme vélites, ceux qui suivent sont hastats, les plus vigoureux forment les princes et les plus anciens les triaires Telles sont chez les Romains, pour chaque légion, les différences de noms, d'âges et même d'armes qu'on observe. La division s'opère de manière que les plus anciens, que l'on nomme triaires, soient au nombre de six cents, les princes de douze cents, les hastats en nombre égal ; le reste est composé des plus jeunes, des vélites. Si la légion renferme plus de quatre mille hommes, chacun de ces corps augmente en proportion, excepté celui des triaires, qui demeure invariable. » Polybe décrit ensuite l'armement de chacune des parties de la légion et il ajoute : ... Après cela, les différents corps sont divisés en dix parties : chacune de ces sections reçoit pour chefs deux capitaines et deux officiers d'arrière-garde. Les vélites sont répartis en nombre égal entre toutes. Ces différents corps se nomment ti•t,,.x, r7cs(pa, r)i.ss(a. e Le principe de la division légionnaire est donc tout à fait différent de ce qui avait lieu antérieurement. La légion se compose dès lors de trois corps qui prenaient part successivement à la lutte dans des conditions différentes : après que les troupes légères avaient engagé le combat, les hastats étaient appelés à supporter le premier choc de l'ennemi. S'ils ne suffisaient pas à l'oeuvre, ils trouvaient des auxiliaires dans les princes, qui venaient remplir les vides laissés entre leurs compagnies. Ceux-ci, à leur tour, étaient soutenus par les triaires, sorte de réserve ou d'élite. Les rorarii et les accensi de l'époque antérieure ont été remplacés par les vélites, une infanterie légère propre aux escarmouches et aux opérations irrégulières (milites expediti, quasi milites, i. e. volantes) °. Ils ne forment pas une division spéciale, mais sont répartis également entre les différents manipules [vELrvES]. La cavalerie occupait les ailes de l'armée [EQUITES1. Cette organisation subsista pendant 130 ans ; durant toute cette période, la classe moyenne continua à donner à l'État ses légionnaires. Mais il vint un temps où cette classe 10, « épuisée par la conquête, rongée d'ailleurs par la misère, ne fournissait plus assez d'hommes pour remplir les légions. Marius y appela les pauvres et les ouvrit aux prolétaires. Les anciennes conditions de fortune furent supprimées. Plus de cens pour être cavalier, plus de cens pour être légionnaire. Tout homme peut ètre, suivant son aptitude, vélite, légionnaire ou cavalier. Les distinctions fondées sur la richesse ou la pauvreté disparurent. L'armée devint un corps absolument démocratique. » Assurément, cette réforme n'aurait pas été possible si elle n'avait été préparée par une lente transformation des moeurs. On avait été successivement amené à abaisser le chiffre minimum du cens [cENscsl ; on devait finir par ne plus en tenir compte ; les capite censi devinrent, au point de vue militaire, les égaux des autres citoyens 11. Cette réforme, qui peuplait l'armée de soldats besoigneux, prêts à tout entreprendre pour gagner leur solde et pour l'augmenter par le butin, disposés à suivre partout le général qui les payait", eut les plus graves conséquences pour la destinée de la République ; elle modifia profondément, et ceci seul peut nous occuper ici, l'organisation de la légion f3. Dès lors, il n'est plus question de distinctions parmi les légionnaires: les quatre sortes d'armes(hastati, principes, triarii, milites) sont confondues en une seule 14. Même armement, même dignité pour tous : les légions forment des corps homogènes où les anciennes classifications ne se retrouvent plus que dans la hiérarchie des centurions. A la même époque s'introduisait une autre nouveauté ; si le manipule continua à constituer l'unité tactique de la légion, celle-ci fut désormais divisée en dix cohortes, placées sous le commandement du premier des centurions qui s'y rencontrent. Ces cohortes n'avaient pas, comme on l'a dit", d'enseignes propres ; mais la légion elle LEG 10,19 LEG même fut dotée par Marius d'un signunl spécial, l'aigle d'argent autour duquel commenta à se développer l'esprit de corps et l'amour du régiment. Des sentiments de cette sorte n'avaient pu prendre naissance hune époque antérieure, puisque, après chaque campagne, les légionnaires étaient licenciés et rentraient dans leurs foyers. Mais ce qui était possible au moment où Rome n'avait à combattre que des voisins en Italie, cessa de l'être lorsque les expéditions devinrent plus longues et qu'il fallut porter les armes au delà de la mer. Jusque-là, comme l'a dit Lebeau 2 « chaque année voyait de nouvelles légions sans voir de nouveaux soldats » ; à la fin de la République, la multiplicité des guerres et leur éloignement engendra, sinon la permanence, au moins la stabilité des légions; en droit, on aurait, dû, si la paix était intervenue, renvoyer les hommes 3 ; mais la paix n'intervenait pas ou était de très courte durée et peu à peu les légions tendaient à la perpétuité. Les gens sans fortune qui les peuplaient n'avaient aucun désir d'obtenir leur congé et acceptaient volontiers, quand ils ne la réclamaient pas, la prolongation du service ; les généraux, tout à leur ambition personnelle, ne demandaient qu'à voir leurs armées composées d'effectifs solidement organisés. Ainsi se préparait le changement capital qui caractérise les réformes militaires d'Auguste. J'ai eu l'occasion d'expliquer ailleurs que pendant cette période de l'histoire militaire de Rome la cavalerie légionnaire n'existait plus ou du moins avait été si profondément modifiée qu'on a pu nier son existence [EQUITI:Sj. C'est au fondateur de l'Empire, à Octavien vainqueur, qu'il était réservé de décider et d'organiser la permanence des cadres légionnaires. Après Actium, la réorganisation militaire de l'Empire fut son premier souci. Le principe fondamental du nouveau système fut la persistance du service : il fit de ses soldats, suivant le mot de Dion, arpa,rtwrac â9avétouç 4 de son armée un organisme indépendant se suffisant à lui-même. D'où. les grandes réformes qui s'attachent à son nome et dont les effets se firent sentir jusqu'à la chute du principat. Tout d'abord, il lui fallait arrêter le total des forces nécessaires à la sécurité de Rome. S'il avait gardé toutes les légions ou tous les corps décorés de ce nom qui s'étaient formés pendant les guerres civiles 6, la dépense eût de beaucoup excédé les besoins. Il en licencia un certain nombre et envoya les soldats qui les composaient dans des colonies ; les autres entrèrent dans les cadres de son armée, avec une numérotation spéciale, désormais invariable. Ces légions ne devaient plus servir qu'a la garde des frontières ; Auguste les répartit, suivant les besoins, dans les provinces dont il s'était réservé l'administration directe, comme autant de divisions ou de corps d'armée ; il les organisa pour leur permettre de suffire à leur tache. Chacune d'elles se composa dorénavant, comme autrefois, d'infanterie et de cavalerie ; elle fut placée sous les ordres d'un chef unique et permanent, le 16' rjaf US legion qui commandait en même temps les troupes auxiliaires a, cohortes de fantassins ou ailes de cavalerie [EXEHalws, touons, ALA] adjointes à la légion et représentant. un effectif aussi élevé, c'est-à-dire à peu près 6000 hommes. Mais cette dispersion des corps d'armée loin de l'Italie et des pays déjà gagnés à la civilisation romaine offrait pour le renouvellement des cadres légionnaires tin certain inconvénient ; il rendait difficile le recrutement, tandis que d'autre part les Italiens témoignaient un éloignement de plus en plus marqué pour la carrière des armes 9. Auguste fit du service un métier lucratif capable d'attirer et de retenir les provinciaux": il décida que l'entrée dans les légions procurerait le droit de cité aux pérégrins 11 ; il assura aux hommes une solde régulière assez élevée; il offrit aux vétérans à la sortie de leur corps des avantages pécuniaires (praemia militiae). Ces mesures habiles réussirent pleinement. Le service légionnaire resta, en principe, obligatoire pour tous les citoyens, ce qui permettait, dans les cas difficiles, des levées exceptionnelles ; en fait, les engagements volontaires suffisaient à compléter chaque année les vides et à maintenir les légions au complet [nII.EcTUS. L'organisation intime, elle-mème, de la légion ne fut pas modifiée : elle demeura telle qu'elle avait été établie à l'époque de Marius et perfectionnée par César, avec sa division en cohortes et en centuries. Les règlements édictés par Auguste restèrent en vigueur à peu près sans changement pendant un siècle. Le premier empereur à qui l'on fasse, dans la suite, honneur de modifications sérieuses est Hadrien. Les auteurs' le considèrent comme un grand réformateur de l'armée'`. En fait, il se préoccupa surtout de mettre les institutions militaires d'accord avec les besoins de son ternps. L'énumération de ses réformes, qui touchèrent à l'armée tout entière, ne saurait trouver place dans une étude restreinte aux légions; il suffit d'indiquer en deux mots que son activité se porta sur tous les points : discipline, armement, ordre de bataille, recrutement, organisation des frontières ; ainsi il rendit plus effective la responsabilité des tribuns, diminuant par là le pouvoir exagéré des centurions"; il modifia les armes des cavaliers légionnaires pour leur permettre de tenir tête avec succès aux peuples contre lesquels Rome avait alors à guerroyer (Bretons, Sarmates, Arméniens, Scythes)", et aussi quelque peu celui des fantassins 16 ; il prescrivit, sur le champ de bataille, de revenir à la disposition en phalange l7, etc. Les légions se recrutèrent régulièrement et exclusivement sur place, parmi les indigènes de la province qu'elles étaient chargées d'occuper [DILECTUS] 16 Si les écrivains font l'éloge des règlements d'Hadrien et le considèrent comme le restaurateur de l'antique discipline, ils déclarent au contraire que Septime Sévère lui porta un coup terrible par ses réformes 19. Ce prince fut, en effet, l'auteur d'un certain nombre de mesures qui a, s. L t G ---1 Ob devaient choquer les partisans du passé. Mais il semble bien qu'il ait eu pour les prendre des raisons très soIieuses : il lui fallait rendre la carrière plus attrayante pour les soldats comme pour les officiers inférieurs. Il éle+++a donc la solde des légionnaires, il leur donna la permission de porter l'anneau d'or, réservé longtemps aux chevaliers ; il leur facilita la vie des camps en leur permettant d'y prendre des compagnes, sinon des femmes légalement reconnues': il accorda de n ou veaux privilèges aux vétérans 2 ; il autorisa les sous-officiers à former des collèges militaires En même temps, il faisait du grade de centurion le premier échelon de la carrière équestre' ; surtout il transformait le préfet du camp en préfet de la légion et lui attribuait une part d'autorité plus grande aux dépens de celle du légat C'est le premier pas vers la suppression de ce haut commandement qui devait être l'ouvre d'un de ses successeurs, Gallien 6, Une autre réforme de Septime Sévère, non moins importante polir l'avenir, fut la création de trois légions dont l'une fut établie aux portes de Rome ''. Cette mesure annonce déjà la suppression de la garde prétorienne et l'affectation de certaines légions e la défense, non plus de l'empire, mais de l'empereur Tel est précisément le caractère de l'armée au Ive siècle, à la suite des changements apportés par Dioclétien et Constantin Les garnisons des frontières cessèrent d'être composées surtout de légionnaires, et l'on fit largement appel pour les former aux populations barbares. Les légions qui y séjournaient antérieurement n'en furent pas rappelées cependant; mais une partie importante en fut détachée et ramenée dans l'intérieur du pays pour la garde du souverain e. Ainsi la légion Nle Claudia occupe toujours la Mésie, mais un détachement est en Orient, l'autre en Occident ; la Vlie GeminB n'a pas quitté l'Espagne, mais deux ou trois détachements sont campés dans l'intérieur, à la disposition de l'empereur. D'une façon générale, on peut dire qu'un détachement est affecté à l'Orient, sous le nom de,juniores, un autre à l'Occident, sous le nom de seniures. Ces divisions de la légion, qui portent, elles aussi, le nom de légions, reçurent le titre de palot muse ou eomrtatenses, c'est-à-dire attachées à la défense de l'empereur on à ;éie escorte'`. Les légions de l'intérieur étaient, ce qui est encore une nouveauté, supérieures en dignité à celles de ta frontière, dénommées pseudci-comitatenses n , elles pouvaient, en cas d'expédition, s'unir à ces dernières pour faire campagne et revenaient, la guerre terminée, reprendre leurs emplacements dans les provinces du centre. La légion de Constantin ne comprend plus de cavalerie 12; sous Dioclétien, elle renferme encore les deux armes 13. Elle se compose de citoyens romains, comme i.EG par le passé't; mais on ignore le détail de son organisation : les monuments épigraphiques sont r;xcessivement rares, et les données des-auteurs contemporains, comme irégèce, sont sujettes à caution, car elles se rapportent en grande partie à des époques antérieures': À cette époque 1'effeetif des différentes Iégions est considérablement, réduit, ce qui se comprend aisément, puisqu'elles ne représentent plus que des fragments d'une même légion. La légion mère compte encore 6000 hommes ; mais chacune des légions en lesquelles elle s'est décomposée ne contient plus que 1000fantassins56. Cette organisation eut aussi, pour le commandement, une conséquence importante : une direction unique n'étant plus possible, le légat légionnaire ou son remplaçant, le préfet de légion, disparurent; c'est un tribun qui est devenu. le chef suprême de chacun des tronçons de la légion morcelée'". La Notice des Dignités est le dernier dormnent qui nous parle des légions; il n'en est plus question à propos des guerres de Justinien 16, Effectif de la légion". L'effectif de la légion n'est pas toujours resté le même : il a varié suivant les époques. Sous le régime établi par Servius Tullius, le chiffre normal des légionnaires était de 4200 hommes; c'est celui que donnent Polybe'-'° et Tite Live2' en plusieurs circonstances, ce que l'on exprime en chiffres ronds par le nombre de 4000 22. 11 faut y ajouter les 300 cavaliers réglementaires 2ap L'effectif de la légion ne cessa dès lors d'augmenter, bien qu'il soit assez difficile de tirer des auteurs des renseignements tout à fait précis; car, dans la plupart des cas, on ignore si les cadres des légions dont ils nous parlent étaient complets ou avaient subi des réductions, En 216, le nombre des légionnaires fut porté à 500021 ou même 5 200 25 qui resta, le chiffre normal. pendant quelque temps 76. Néanmoins, lorsque le besoin s'en faisait sentir, on n'hésitait pas à l'élever encore et à atteindre le chiffre de 600027 : mais ce sont là des cas tout à fait exceptionnels, D'ordinaire, le nombre des cavaliers était de 300 par légion, quel que frit l'effectif de l'infanterie 28 A l'époque de Polybe 29, cet effectif se décomposait de la façon suivante : Rastatt infanterie 1 Prineïpes Triarii , .. . Ventes Cavalerie o Marius est le premier qui ait porté le total des légionnaires jusqu'à 6200 hommes30; mais on revint, comme Lion d'un centurion : celui de droite (prior) commandait tout le manipule et avait, par conséquent, sous ses ordres, comme lieutenant, le centurion de gauche (posterios). C'est l'état que nous décrit Polybet6. L'effectif légionnaire étant variable et le nombre des manipules étant constant. trente par légions 47, leur effectif variait naturellement, lui aussi, suivant le nombre des légionnaires. Pour la légion de 4 200 hommes on comptait l-a'G 1 051 L,EtM règle, a celui de 6000. C'était l'effectif nominal des légions de César t, bien qu'on trouve chez lui et chez les éd'ivains qui ont parlé de ses guerres des renseignements très différents sur cette question 2, ruais toutes les difficultés disparaissent si l'on considère les chiffres donnés comme représentant le nombre des soldais présents ad corps et non pas celui des inscrits sur le papier 3. C'est aussi l'effectif que les auteurs ont indiqué d'une façon générale pour Palmée impériale ë « La légion, dit Isidore', renferme six mille soldats u, et on lit dans Suidas2 : «.Ai fris iczFx Pis zxhi;'3axtsyiXiot r l zrtanT.zt, » Et ponrtantces assertions si nettes sont contredites par d'autres témoignages 6'. Suétone dit: «Legio diciturvirorum déclin fortium cil Les vélites n'avaient pas de divisions propres : « ils certzes milita-in numerus id est VIX ». D'autre part, Hyétaient, nous dit Polybe fe, répartis en nombre égal, entre gin, dont les écrits, d'après les travaux les plus récents, , tous les manipules » à raison de 20 par centuries. représenteraient l'état rie l'armée au début du u siècle, Marquardt '» admet que les hommes dans le manipule avant les réformes de l'empereur 'Hadrien ', indique pour étaient rangés sur huit rangs de profondeur, sauf les chaque cohorte le total de '180 hommes, soit 5280 pour la triaires qui étaient disposés sur cinq rangs. [Pour l'ordre légion tout entière $, la première cohorte ayant un effectif de combat, voir AcrESI. Sur une même ligne ou dans une double de celui des autres. Par contre, au temps de même file, les soldats étaient à trois pieds romains l'un Septime Sévère, Dion compte pour chaque cohorte' de l'autre (0',887); mais on modifiait cette distance si 050 soldats, c'est-à-dire 6050 pour toute la légion, ce qui l'on voulait donner plus de mobilité (ondines lu,xure)20. nous ramène au chiffre théorique de 6000. C'est, en Nous avons indiqué ailleurs que les 300 cavaliers somme, celui qu'il faut adopterf6, du moins pour l'époque légionnaires étaient répartis, de leur côté, en dix Purines postérieure à Hadrien et antérieure à Dioclétien, de 30 hommes chacune LEQUÎTESO. J'ai expliqué plus haut, d'après M. Mommsen, copinent Peut-être rencontre-t-on déjà à cette époque la trace le chiffre de 6000, tout en restant en principe celui de d'une autre division. Suivant certains auteurs, on pour l'effectif légionnaire, fut fractionné en six parties. et domrait conelure de quelques textes que parfois des fractions ment le personnel des légions du Ive siècle ne s'élevait pas se légions étaient groupées ensemble sous le nom de au-dessus de 1000 hoïnanes", cohorte, par exemple un manipule d'hastats, un manipule Cet effectif se composait de fantassins et de cavaliers, de princes et un manipule de trlaires»i. En tout cas, il du moins aux époques où la légion comprenait de l est certain que c'est là la base même de la répartition des cavalerie, On verra à l'article Er1UI1ES quel fut le nombre légionnaires en dix cohortes attribuée à Marius. Comme des cavaliers aux différentes périodes de l'histoire midila légion comptait alors à peu près 6000 hommes27, taire de Rome. Je rappellerai seulement que, sous la cohorte était forte de 600, du moins en principe, et ce l'Empire, il s'élevait à 120 au t" siècle et peut-être à 300 chiffre resta l'effectif réglementaire dans la suite; en fait, à partir d'Hadrien, érégèce donne le total de i30, qui il variait suivant l'importance des cadres légionnaires semble considérable 12 'iconons]. Divisions de la légion. l'origine, la I; giou était Naturellement, l'ordre de combat de la légion, à la suite divisée en centuries, la centurie étant une division de la de ces changements, fait complément modifié [AS.iES]. classe' [r, i;Str,R1.3. Plus tard, à la suite de la réforme Ainsi, dans le nouvel état de choses militaires qui attribuée à Lisrnili;e (voir p. 1047), l'imite Lactique caractérise le delsut du 1 e siècle a y, J. C., la légion devient le manipule, ainsi nominé de i enseigne qui e' t tait divisée en 10 eohortes, chacune de ces cohortes en distinguait et qui était primitivement, diton, une poignée 3 manipules, et chaque manipule en 2 centuries, soit de foin attachée au haut d'une perche'`. Il parait résulter fi centuries par cohorte ou 60 par légion. de certains textes" que l'on distingua d'abord par ce Hien ne tut changé par César. Cincius, son contem terine la compagnie de I00 hommes centurie et porcin, le dite, et différents passages de ses écrits le prou manipule auraient, eté alors, théoriquement du moins, la vent", On y voit très nettement, en particulier, que le même chose. Puis, les mots perdant leur valeur étymo•) manipule continua, de son temps, à être l'unité tactique 2', logique, _e manipule lut, puni dey raison militairesla centurie l'unité admira straative". dia.tis e en deux eeniu_r s, placées chacune sous la da e, ' Lanséme organisation persista sous tout l'Empire LEG -1052 -® LEG comme le démontrent de nombreux textes d'auteurs et plus d'une inscription. Il suffit, pour s'en convaincre, de se reporter aux listes militaires qui nous ont été conservées. Les soldats y sont classés, non par manipules, mais par centuries et par cohortes, chacune renfermant des principales aussi bien que des soldats'. Par contre, la centurie ne possède aucune enseigne propre; les signa continuent à être attribués aux manipules 2p De bonne heure, cependant, le nombre des soldats de la première cohorte fut doublé ; si cette modification de détail ne remonte pas à César, elle a été attribuée par certains à Auguste ' ; en tout cas, la légion dont Hygin décrit le camp, c'est-à-dire celle du début du rie siècle, offre cette particularité 4. On la retrouve aussi signalée par Végèce A partir d'une certaine époque, également, le nombre des centuries de la première cohorte fut ramené de six à cinq : il était encore de six sous Tibère " et au temps d'Hygin' ; il n'est plus que de cinq sous Septime Sévère 8. On a rapporté ce changement àl'empereur Hadrien avec vraisemblance, mais sans une certitude absolue°. Rien n'est modifié à cet égard dans la légion que décrit Végèce : cet auteur compte pour la première cohorte dix centuries', soit cinq centuries renforcées. A l'époque impériale on rencontre une autre subdivision de la centurie dont il n'était pas question auparavant, le eontubernium ou groupe de 10 hommes, avec un decanus pour chef. Végèce" nous en parle, mais nous n'en trouvons pas trace sur les monuments officiels. Chaque cohorte comprenait un certain nombre de cavaliers ; nous en trouvons la preuve sur Les inscriptions et en particulier dans les listés légionnaires qui mous présentent l'effectif de la légion divisé par cohortes". Cette répartition pourrait remonter à l'empereur Hadrien; auparavant, la cavalerie légionnaire aurait été divisée en turmes, suivant quelques-uns; mais le fait est très incer H. COMPOSITION DE LA LÉGION-, A. Le commandant en chef. Pendant toute la période républicaine, la légion n'eut pas de chef propre. Le commandement était tour à tour exercé par les tribuns. Deux d'entre eux prenaient en commun pendant deux mois la. direction des soldats 14, soit qu'ils alternassent l'un avec l'autre chaque jour 13 ou chaque mois1ft, soit qu'ils se partageassent les devoirs de la charge'', On ignore tout à fait quels étaient, dans le détail, leurs rapports entre eux et la situation des autres tribuns â leur égard. C'est César qui le premier comprit la nécessité de réunir en une seule main les fonctions de commandant supérieur ; il lui arriva plus d'une fois de choisir un officier et de le placer à la tête d'une légion soit un joui' de bataille f8, soit pour un temps plus long" ; Irais cette combinaison n'offrait aucun caractère de stabilité : les légats légionnaires de César ne sont que des officiers détachés de l'état-major et chargés d'une mission temporaire : tel est d'ailleurs le sens propre du mot legatus Avec Auguste, au contraire, l'institution devint définitive. Chaque légion fut mise sous les ordres d'un commandant unique et permanent qui, étant le délégué du chef suprème de l'adnée, l'empereur [Isn'ERATOH], reçoit le titre de legatus legionis 26, Les légats légionnaires appartenaient à l'ordre sénatorial21 ; en principe, ils étaient pris parmi les anciens préteurs (on a pourtant quelques exemples de personnages appelés au commandement d'une légion avant la préture "2), de préférence parmi les préteurs sortant de charge 23. Ceux qui ne remplissent pas ces conditions portent dans les textes le titre de pro legato ou de praepositus 2t On trouve méme au nie siècle des chefs de légion qui prennent le titre de dux, pour indiquer, sans doute, qu'ils avaient le commandement du corps dans une expédition, par opposition au praepositus qui a un sens surtout administratif 20. Le légat avait sous ses ordres, non seulement la légion dont il portait le nom, mais encore tous les auxiliaires qui y étaient rattachés 26. Il possédait, naturellement, toutes les prérogatives d'un commandant en chef. A partir du règne de l'empereur Gallien, qui interdit aux sénateurs la carrière militaire, les légions cessèrent d'être commandées par des légats. Ces officiers généraux furent remplacés par des préfets appartenant à l'ordre équestre 27, A l'état-major d'un légat légionnaire étaient attachés un certain nombre de sous-officiers : des benefciarii 28, employés à des missions spéciales, de confiance 29 [BENEFIcIABn], des stratores ou écuyers '° un commentariensis 31 qui devait tenir au courant les registres où l'on relatait chaque jour les faits intéressant la légion et conserver les archives32 ; un rornicularius", sans doute le chef des librarii on comptables"; un actarius avec des exacti, placés sousses ordres, pour rédiger les différentsactesadministratifs relatifs au corps"; peut-être un cerarius qui était un librarius d'un genre particulier (la différence nous échappe, l'origine du nom étant d'ailleurs évidente") ; enfin peut-ètre aussi un ou plusieurs yaaestionarii, pour informer Ies affaires disciplinaires de la légion". Les papiers de la légion étaientconservés dans des coffres confiés à la surveillance de capsarii 3a B. Les officiers supérieurs. Tribuns 3'. On sait qu'à l'époque antéhistorique où la légion se composait de trois contingents de mille hommes empruntés aux LEG 1053 LEG trois tribus génétiques de Rome, chacun de ces contingents était commandé par un tribun: soit trois tribuns pour toute l'année'. Plus tard, le nombre fut doublé, on ignore quand et commente, et le chiffre de six tribuns par légion devint le chiffre réglementaire pour toute la durée de la République. Ceux-ci furent d'abord désignés par les consuls ou les dictateurs, héritiers du pouvoir royal ; mais à partir de l'année 392 = 363, le peuple s'arrogea le droit de nommer dans les comices par tribus 6 tribuns sur les 24 que comportaient, chaque année, les cadres normaux de l'armée 3 ; puis, en 443 = 311, il enleva aux consuls dix autres nominations et prit l'habitude de désigner 16 tribuns ; enfin, en 547 = 207, il se réserva la totalité des nominations, ou tout au moins le choix des tribuns des quatre premières légions, les autres continuant à être nommés par les consuls 3. Ces tribuns désignés par les généraux se nommaient rufuli 0, les autres comitiati Les uns et les autres étaient considérés comme égaux. Ils entraient en fonction, comme tous les magistrats, au 1°r janvier et restaient en charge une année 9. Les tribuns étaient généralement choisis parmi les jeunes gens de la classe sénatoriale, ou les chevaliers qui voulaient commencer leur carrière (nobiles adolescentes)10 ; ils n'avaient point, d'habitude, servi antérieurement en qualité de soldats ou d'officiers subalternes, mais avaient fait leurs premières campagnes dans la cavalerie, ou dans l'état-major d'un général rCOMES, CONTUDERNALIS] ". Mais on sait, d'autre part, qu'à l'époque de Polybe, sur les 24 tribuns des quatre premières légions, 14 (levaient être choisis parmi les citoyens ayant fait à campagnes et 10 parmi ceux qui avaient dix ans de service12. M. Geppert suppose que cette obligation fut imposée par la loi Villia de 574=180; elle aurait été ensuite abolie par Sylla 13. Du temps de César, les tribuns légionnaires étaient des jeunes gens 1l, quelques-uns assez peu habitués aux choses de la guerre, c'est ce, qui explique pourquoi il les faisait remplacer à la tête des légions, dans les circonstances graves, par des officiers éprouvés (lta ati). A l'époque impériale, le tribunat militaire continua à être accordé aux jeunes gens de la classe sénatoriale, qui faisaient ainsi, assez aisément, leur temps de service obligatoire pour entrer au sénat ". On exigeait, avant de leur ouvrir les légions, l'âge minimum de dix-huit ans 16. Au commencement de l'Empire, ils géraient parfois, avant d'arriver au tribunat, une des charges du vigintivirat 11 ; d'autres fois le tribunat précédait"; à partir des Flaviens, la carrière sénatoriale n'a jamais débuté par le tribunat ". V. Les tribuns de cette sorte se nommaient tribuns laticlaves. On en rencontre jusqu'à l'époque de l'empereur Sévère Alexandre 26 ; il. est certain qu'ils disparurent en même temps que les légats au temps de Gallien. Les tribuns militaires, sous la République, avaient,, par le fait même de leur grade, rang de chevaliers et droit à l'anneau d'or. Il en fut de même sous les empereurs pour les tribuns laticlaves 21, Mais à côté de ces jeunes sénateurs, on rencontre comme tribuns des personnages qui avaient déjà accompli un certain nombre d'années de service au titre de sousofficiers ou d'officiers. C'est, là encore, le résultat des réformes d'Auguste. Il voulut ainsi fournir à la légion des chefs éprouvés. Il établit donc que, pour être admis dans la carrière équestre, les jeunes gens de famille on de cens équestre et ceux qui pouvaient prétendre au rang de chevalier par des services antérieurs devraient commencer par faire leur service militaire comme officiers [EQUES_. I1 leur imposa, entre autres, la charge de tribun légionnaire [A auLrrns]. Au début de l'Empire, le tribunat était le dernier degré de cette carrière"; il devint ensuite l'avant-dernier 2M1. Par opposition aux premiers, les tribuns militaires de rang équestre s'appelaient angusticlaves. Le rôle des tribuns était à la fois celui d'officiers et. d'administrateurs, ou plutôt une partie des tribuns d'une légion, les laticlaves généralement, s'occupaient d'administration, les autres, les angusticlaves, étant plus spécialement chargés d'attributions militaires n.; distinction qui n'est pas faite par ceux des auteurs qui nous ont parlé des fonctions réservées aux tribuns n. Ces fonctions sont : 1° Pour la partie purement militaire : conduire la légion et ses différentes parties dans les marches et. sur le champ de bataille26 ; inspecter les postes qui ont la garde du camp et surveiller les rondes 2"; former les recrues'", présider aux exercices 29 faire partie du conseil de guerre 30 et du tribunal légionnaire 3'. 2" Pour le partie administrative : tenir au courant les listes des soldats présents au corps29; donner leur congé aux libérés21'. distribuer les permissions " ; avoir soin des approvisionnements 3G et surveiller l'hôpital 16. C'est surtout comme administrateurs que les tribuns avaient besoin d'auxiliaires et de commis aux écritures. A ]'état major des tribuns étaient affectés des bene/lciariï 3', IIL1 c°on,naentarien.cis3R et un cornicularins n, chef de libq zl ii" Préfet du camp 41. Le règlement impérial qui rendit les légions permanentes et assigna à chacune d'elles un camp fixe eut pour conséquence la création d'un personnage spécial chargé du commandement de ce camp. Cette fonction demandait non point un brillant officier, 133 LEG 1054 LEG mais un homme très expérimenté et parfaitement au couqué plus haut que la centurie était une division de la fiant des détails du service ; aussi ne choisissait-on pas le légion primitive aussi bien que de la légion servienne. préfet parmi les jeunes nobles ou les futurs procurateurs L'officier qui commandait la centurie portait, comme il de rang équestre, mais parmi d'anciens centurions, gênéest naturel, le nom de centurie. Quand le manipule fut -salement même d'anciens primipiles 1. Au 1er siècle, devenu l'unité tactique, la centurie persista comme divi oû plusieurs légions occupaient le même camp, il y avait sion du manipule et chaque manipule compta deux con autant de préfets légionnaires 2 dans une province que de turions, celui de l'aile droite étant le prior, celui de castra s'alitai. Mais au H' siècle, les choses changèrent : l'aile gauche le posterior. Mais d'autre part les soldats Domitien avant décidé que désormais chaque légion comprenaient trois catégories : triarii ou pili, prime aurait son lieu de campement particulier, il fut créé un ripes et hastati; il y avait donc 20 centurions de pili, praefectus eastroruna par légion: c'est à partir de cette 10 priores et 10 posteriores, qui se distinguaient entre date que ce genre d'officiers prit le titre de praefectus eux par le numéro du manipule : un pilas prior eastrorutn legionis, ou. par abréviation, depuis Septime prioris centuriae, et un pilas posterior prioris ren Sévère, praefectus legionis 1, turiae. un pilas prior secundae centuriae et un pilas 1n texte de Végèce ', confirmé par des allusions posterior secundae centuriae, etc. De même pour les éparses chez les auteurs et par des inscriptions, nous autres sortes de manipules". apprend que le praefectus cast,'orunl était à la tête de La hiérarchie des centurions était déterminée à la tous les services intérieurs destinés à assurer l'entretien fois par celui de la classe à laquelle ils appartenaient du camp, des édifices et des baraquements qu'il conte(pili, principes, hastati) et par le rang qu'ils occupaient naïf, et du matériel légionnaire : il décidait de la position dans chacune d'elles 22 ; mais on n'est pas d'accord sur la du camp, de la hauteur du vallum et de la largeur du façon dont l'avancement se faisait. Les uns 23 veulent que fossé; il s'occupait des casernements des soldats et de les centurions aient dû franchir successivement ou, du leurs bagages; des malades,et des médecins attachés à moins, par échelons, les dix grades des centurions l'hôpital ; des voitures, des outils, des bois et des matéposteriores des hastats, puis ceux des centurions poste riaux de construction ; de l'alimentation en eau de la riores des principes, puis ceux des centurions posteriores plane, des machines de guerre, etc. Ce sont là ses fonce des pili, pour recommencer ensuite avec le rang de fions administratives. On le voit aussi chargé de maincenturion prior la même ascension à travers les divers tenir la discipline dans le camp' ; et, à ce titre, il jouismanipules de hastats, de princes et de pili jusqu'au titre sait d'une certaine juridiction, pourtant assez limitée'. de primu.s pilas. D'autres''° sont d'avis qu'il fallait par ie trouve à la tête des détachements légionnaires courir les différents degrés hiérarchiques de la classe envoyés dans la campagne pour établir des routes ou des hastats (decimus hastatus prioris centuriae, »ci construire des ponts'. Rarement il prenait part aux mus hastatus posteriores centuriae, nonus hastatus opérations militaires; d'habitude, pendant le combat, il prioris centuriae, nonus hastatus posteriores centu derneurait au camp avec la réserveprêt à marcher à riae, etc.), puis ceux de la classe des princes et enfin sa tête au secours de la légion, si sa présence devenait ceux de la classe des pili. nécessaire t0. La division en cohortes qui s'introduisit vers la fin de Le préfet du camp pouvait en certains cas remplacer la République amena un nouveau changement dans la le légat absent". C'était la règle, en Égypte, d'où les classification des centurions. Ceux-ci continuèrent à être personnages d'ordre sénatorial étaient exclus par un divisés en priores et en posteriores, à être qualifiés de règlement formel'' : les légions cantonnées dans ce pays hastati, principes et pili, bien que la distinction entre u )ut jamais eu â leur tête qu'un préfet 13 Ce fut aussi la ces différentes sortes de légionnaires eût perdu toute; règle pour les légions Parthiques créées par Septime signification; mais on les classa d'après la dignité de la Sc te et pour toutes les autres après le règne de Gallien cohorte à laquelle ils appartenaient, et dans cette li rt "da, ainsi qu'il a été dit plus haut, la suppression cohorte suivant le rang qu'ils occupaient, conformément il 1.:;:, '. gionnaires, Les p'rae fecti eastrorum, ou aux anciennes coutumes'''. La dernière cohorte était Iii eux les ,praefcréé legionis, prirent alors le titre, que naturellement la dixième, et la première était la plus 1 Ou 1' 2tontre sur les inscriptions entre Gallien et honorable ; ainsi, pour prendre les expressions mêmes de Dioclétien, de vira-legatorant ". César, les octari ondines 26, par exemple, ou centurions Les bureaux d'état-major «1y/ciron) du préfet du camp de la huitième cohorte, appartenaient à la catégorie des s. 0,2100 Gati nt de ; 'f'.''apli "1, d'un coinrnentareensis 1' inferiores ondines 21, les soperiores ondines se composant et d'un ep hnic 11 t, chef du bureau des librarii ", des centurions des cinq premières cohortes 23. Quant à C tif /iciers in fC-' .a Centurions 26. J'ai expliceux de la première, qui contenait le primipile, ils por Laient le non) de prilni ondines ' ; ces centurions occupaient clans la légion une place tout à l'ait exceptionnelle, prenaient part au conseil de guerre2 et dans plus d'un cas recevaient du général des missions de confiance'. Cette hiérarchie des centurions se retrouve sous l'Em pire Le seul changement qui s'introduisit fut le résultat de l'importance numérique donnée à la première cohorte. Sous ce nouveau régime, le nombre des centurions fut réduit à cinq, le pilas poster ion ayant été absorbé par le primas piles. Dès lors, la légion comprit ~i)) centurions, conformément au tableau suivant A effectif complet, ce qui n'arrivait pas toujours, chacun de ces centurions commandait 80 hommes 2", excepté ceux de la première cohorte qui constituaient, comme auparavant, les printi ordine.s 29. Parmi eux, d'après Végèce 30, le primipile était àla tète de 400 hommes, le princeps prior ou princeps praetorii, de 150; le primas hastatus, de 200, le primas princeps posterior, de 150; le primas Postales posterior, de 100. Outre les d) centurions réglementaires, il est probable que la légion en comptait un certain nombre d'autres, répartis, d'après leur grade, dans les différentes cohortes 31, :_i qui le général confiait des fonctions administratives spéciales (centuriones supernunierarii) 32. A l'époque républicaine, les centurions sortaient du rang; on choisissait pour capitaines ceux que leur valeur, leurs qualités militaires avaient, dans des campagnes précédentes, désignés à l'attention du général". Sous l'Empire, la plus grande partie des postes de centurions étaient encore donnés de cette facon : l'empereur appelait à ce grade ceux qui avaient fait leurs preuves dans les différentes fonctions inférieures des légions", ou mime d'autres corps de troupes3". Mais un certain nombre de centurions appartenaient à une classe sociale plus élevée, à des familles de l'ordre équestre. Au lieu de commencer° leur carrière, comme il était de règle, par le grade de préfet de cohorte auxiliaire, ils préféraient. entrer dans l'armée à titre de centurions légionnaires, attirés par les bénéfices de l'emploi: ce sont les t'enturiones ni' ettuill' romano des inscriptions 3'1 . L'avancement ne se faisait que rarement sur place Pour l'ordinaire, les centurions passaient par uln grana nombre de légions, chaque changement correspondant it une promotion dans un grade supérieur de la hiérarch e 3". Les centurions avaient d'abord et surtout un rùle militaire : ils commandaient et administraient, leur compagnie. C'est pour cela que Végèce nous apprend dans LEG 1056 LEG un passage qu'ils étaient occupés à faire respecter la discipline et à diriger les exercices ; à surveiller les vêtements et les chaussures de leurs hommes; à exiger que les armes fussent bien fourbies et brillantes ; dans un autre 2, qu'ils présidaient à l'établissement du fossé du camp et punissaient les soldats qui travaillaient avec négligence. D'après Juvénal, ils rendaient la justice 3 : le cep de vigne, signe de leur grade, indique, d'ailleurs, suffisamment leur pouvoir coercitif ". Mais, outre les fonctions propres à leur situation, les centurions étaient bien souvent chargés de missions spéciales soit auprès du commandant en chef, soit à Rome, soit même dans les provinces. Les inscriptions nous les montrent à la tête de l'écurie du légat_STRATOR 3, ou de sa garde particulière (curare agens pedituei singatariame, e.rercilofci' , praepositus equitum singularium "), directeurs de fabriques d'armes (c'uratoe opi./eunn °), ou d'exploitations minières 10, occupés à faire tracer des routes" ou à régler des contestations de frontières'', remplaçant le préfet légionnaire'', commandant des cohortes'', des ailes'', des troupes irrégulières n, des détachements souvent importants", etc.'". Parmi les différents centurions, deux méritent une mention spéciale: le primipile et le princeps pnaetorii. Le premier, nous l'avons vu, commandait un nombre d'hommes plus considérable que ses collègues; mais de plus, il avait, à certains égards, autorité sur eux ; c'était à lui qu'était confiée la garde de l'aigle'° et l'aigle était comme le centre de ralliement de la légion 'smx) MILITARiA]; il donnait le signal du départ, se portait, en marche, à la tète de l'armée, pendant le combat, à la première ligne; c'était lui qui faisait exécuter les sonneries intéressant l'ensemble des cohortes 2°. Aussi Denys d'Halicarnasse a-t-il pu dire que le primipile conduisait les Quant au princeps praetorii, son activité s'exerçait surtout, semble-t-il, sur l'administration «ad quernprope omnia quae in leyione ordinata suret pertinent 22 0. Aussi est-ce le seul des centurions auprès duquel on trouve des employés aux écritures (1i/rapin au nombre de deux 23. J'ai fait remarquer, ailleurs, que son nom figurait, pour la même raison, sur le matériel légionnaire à côté de celui du légat". On sait que les fonctions de centurion et surtout de primipile étaient tenues pour fort lucratives; les bénéfices plus ou moins licites qu'on en pouvait retirer (exemptions de corvées à prix d'argent) 2", la part qu'on avait au butin'°, la grasse retraite que ce grade assurait en faisaient un objet d'émulation pour la petite bourgeoisie à l'époque impériale. Options. Le lieutenant d'infanterie, auxiliaire du centurion, se nommait optio. « Qui ex en teinpore quo] quem retint centurionibus prrmis.sum est optare, rtiam nonien ex, facto sortitus est n'", dit Festus. Auparavant, ils étaient nominés par les tribuns militaires, dit le même auteur"; ce qui ne prouve pas, ni qu'ils aient cessé de l'être après que le centurion eut reçu le droit de les désigner, ni qu'auparavant le centurion n'ait pas été consulté officieusement par les tribuns. Sous l'Empire, la nomination appartient naturellement à l'empereur 30 Il est admis d'habitude que le nombre des options, au moins des options ordinaires, était égal à celui des centurions, soit 60 avant l'Empire, dans la suite 31. On arrivait au grade d'option en quittant un autre poste de principales 32 ; cette fonction menait assez souvent au centurionat 3a. A côté des options réguliers, ou de combat, on en l'encontre un certain nombre, chargés de fonctions purement administratives (optio vatetudinarii 31, optio navaliorumu, optio custodiarum'31, etc.. Officiers de cavalerie. Décurions. A l'époque antérieure à la guerre sociale, les cavaliers légionnaires, divisés en trente turmes, étaient commandés par des décurions : chaque décurion était à la tête de neuf de ses compagnons, et le premier décurion nominé conduisait la Hume 'EUES, p. 77iï;. En fut-il de même à l'époque impériale ? J'ai admis ailleurs, suivant en cela l'opinion d'un certain nombre d'auteurs ", qu'à cette époque la cavalerie était encore commandée par des décurions, un par terme ]EQI)Es, p. 784]. Mais ce système a été combattu récemment par M. von Douzaszessski, qui ne croit pas à l'existence des turmes en dehors des troupes auxiliaires et place les cavaliers légionnaires sous le, commandement d'un centurion 33. Options, S'il existait des décurions. c'est à eux qu'étaient attachés les optiones equitunz dont l'existence est certifiée par des textes épigraphiques '9. Dans le cas contraire, ceux-ci étaient, comme les autres options, sous les ordres des centurions, évidemment des centurions chargés (le la cavalerie. D. Sous-officiers. Au-dessous des centurions, se place toute la série des sous-officiers ou spécialistes que l'on désignait par le titre de principales" : en tète les options dont il a déjà été question et, à côté d'eux : 1° Le tesserarius"l, qui faisait l'office de notre sergentmajor. II y en avait un par centurie. Il recevait des chefs les ordres et les transmettait aux intéressés ; le mot de passe lui était remis, inscrit sur une tessère qu'il faisait circuler, d'où son nom ['FESSERA]. '2° Les porte-drapeaux et porte-enseignes; en premier lieu l'aquili fer, qui avait l'aigle légionnaire ; les signiferi. praef. leg. LEG 10.57 LEG qui portaient les signa manipulaires ; l'imaginifer, auquel était confiées dans la première cohorte les images des empereurs ; le ,'exillarius, chargé du ve.rillum attribué aux cavaliers ou aux détachements légionnaires [SIGNA). Ces sous-officiers étaient en même temps des comptables, car ils avaient la gestion des économies déposées par les légionnaires sous la protection des enseignes ; d'où la présence auprès d'eux d'élèves-enseignes, discentes'. 3° Les instructeurs (calnpidoctor) et les chefs de manèges (basilica equestris) 44° Le chef de musique (optio) et les différents genres 5° Les médecins, medicus ordinarius fMEDICUS;. 6° Les spécialistes attachés au génie : l'architectus 6, chargé de l'aménagement et de la construction des bâtiments militaires ; le librator ou géomètre arpenteur [LIBRATOR] 7, les mensores ou metatores, dont le rôle n'était pas très différent [MENSORES] 8. 7° Les gardiens d'armement IABMOBUM CosTOS '', les chefs-ouvriers, poliones t0, et l'administrateur de l'arsenal (optio navaliorttm)". 8° Les speculatores, au nombre de dix par légion", qui étaient préposés à l'accomplissement ou à la surveillance des exécutions capitales 13 9° Les ministres et auxiliaires du culte, haruspices et victimaires'r. 10° Les commis aux vivres, principalement les pecuarii15, dont la mission était de surveiller l'entretien, l'accroissement et l'administration des troupeaux légionnaires, et les venatoresf6 qui, auprès de certaines légions et surtout en cas de détachement ", fournissaient par la chasse aux besoins de leurs camarades. 11° L'el'ocatus; il n'y en avait qu'un par légion qui devait avoir un rôle administratif'8, mais dont la fonction n'a pas encore été nettement définie " EVOCATI]. 12° Les marsi, spéciaux à l'armée d'Afrique 20. L'avancement entre ces différents grades ou fonctions, sans être strictement établi, était néanmoins soumis à certaines règlesrésultant de l'importance même de ces fonctions. Le tableau suivant donnera une idée de la hiérarchie de chacune d'elles". E. Soldats. J'ai longuement expliqué ailleurs comment se recrutaient les légions romaines à toutes les périodes de l'histoire de l'armée 'DILECTUS• Je rappellerai seulement ici que le légionnaire romain est par nature un citoyen. Sous la République jusqu'à Marius, c'est un citoyen possesseur d'une certaine fortune ; après Marius, ce peut être un prolétaire. Plus tard, si, pour une raison quelconque, on avait besoin d'enrôler des non-citoyens, le général qui en faisait des légionnaires commencait par leur concéder la cité romaine. C'est un procédé que Pompée mit le premier en application lors de la guerre de Mithridate 2'; il arriva même à créer ainsi des légions entières de pérégrins changés subitement en citoyens (legionesvernaculae, c'est-à-dire levées sur place et non en Italie) 21, Le principe subsista sous l'Empire, mais on le tourna, comme avaient fait les généraux de la fin de la République. Quand on n'avait pas assez de citoyens pour suffire à la conscription, on recrutait des pérégrins, pourvu qu'ils fussent nés dans une cité et de parents libres; et il était admis que l'entrée dans les légions conférait le droit de cité". D'habitude, on n'y incorporait de la sorte qu'un certain nombre d'unités. Deux fois, cependant, on forma ainsi deux légions complètes : la légion I Adjutrix et la Ila _4djutrix, toutes deux composées de soldats de la flotte 56 ; encore, pour comprendre une telle irrégularité, faut-il tenir compte des circonstances qui amenèrent à recourir à cet expédient. J'ai aussi examiné dans l'article IOLECTUs quel était l'àge auquel on enrôlait les conscrits. J'ai admis que l'âge inférieur était de treize ans, l'âge supérieur de trente-six et l'âge moyen de vingt ans 27. La taille exigée en vue du service légionnaire était de cinq pieds dix pouces: Végèce indique cette mesure pour les cavaliers légionnaires et les soldats des premières cohortes 28. D'autres ne font pas la même distinction 29 Une fois levées, les recrues prêtaient le serment militaire : ils portaient alors, jusqu'à ce qu'ils fussent attribués à une légion spéciale, le nom de tirones 30. On les constituait en corps spéciaux wl=,xILLATIOj potlr les amener à destination ou pour leur apprendre les premiers principes de leur métier (vexilla tironunl) 31. Après quoi on leur assignait leur place dans la légion, en inscrivant leur nom sur les registres matricules de l'armée 32 et plus tard en les marquant au fer rouge 33. Par là ils acquéraient le droit au titre de milites. On les soumettait alors à toutes sortes d'exercices destinés à les préparer à la guerre. Végèce nous en parle avec détail31, Je les ai résumés ailleurs 3a. LEG 1058 LEG Quand i1 était parvenu, par un travail spécial, à une grande expérience, le soldat était dit armatura ; on a établi que ce mot., qui signifie aussi l'ensemble des exercices nécessaires pour se perfectionner dans L'art de la guerre', appliqué à un homme, indique un soldat d'élite 2. I1 y avait encore une autre sorte de recrues destinées à, alimenter les légions: on les trouve désignées sous le jeunes gens propres au. service et exercés qui recevaient une solde moindre que les soldats et étaient prêts à remplir les vides des cadres réguliers, une sorte de compagnie de dépôt 'h On en fait monter le nombre à cent ou cinquante (par cohorte?) '. Quand les légions commencèrent à se recruter sur place, il est bien probable que ces remplaçants étaient fournis, pour la plupart, par les enfants des légionnaires, nés dans les villes issues du camp lui-même (voir plus haut). Godefroid les rapproche des farniliae lllil,tuïn, cités par les codes Parmi tes milites, il y avait aussi des catégories.. On distinguait les Inunifices et les immunes. Par munifex, on entendait celui qui était soumis à toutes les corvées, à tous les menus services de détail (mimera militiae) 3 ; l'intinunis, au contraire, était celui qui en était exempt en totalité ou en partie'. Cette exemption s'achetait souvent et c'était là une des sources de revenus les plus importantes pour les centurions 8. Une autre division existait encore entre les hommes. Les uns touchaient comme faveur spéciale une double paye, c'étaient les dopla.rdi ou delllicarli 3, ou une paye égale à une fois el. demie celle des soldats ordinaires (sesquiplic'ar ii) ". Ces faveurs étaient réservées, pense-t-on", en grande partie aux réengagés [EMERrri], ou à ceux qui reprenaient du service après avoir reçu leur congé (eroeutl (. Sous la République, il arriva, en effet, fréquemment, que les généraux rappelaient desvétérans12 et les versaient dans des légions déjà existantes pour les renforcer ; le l'as s,' présenta soirs Marius", Pompée", César" et ensuite pendant les luttes des triumvirs 16 [EhOCATI . Naturellement, on leur offrait, en échange de ce service supplémentaire, des avantages importants Sous l'Empir cela. se fit encore quelquefois" Par contre, il n'était pas rare qu'on gardât à 1 armée, après leur temps de service accompli, des soldats et des sous-officiers'''. Quand on ne leur avait pas encore accordé leur congé, on les maintenait dans leur ancienne situation ; mais s'ils avaient reçu leur missio [varEBAx1], comme, en droit, ils n'étaient plus et ne pouvaient plus être soldats, on en formait des corps spéciaux avec un rexillunl pour enseigne "Q et des officiers spéciaux 21 Ils constituaient des troupes d'élite auxquelles on avait recours dans les circonstances délicates 22. 13. 6; '.'eg. Ir, 19 J. Nicole et C. Morel Art 3 31,3 ires de 131 siècle, Genève, III. OnGAxlsaTIo_v ET A1)MLVISTRATIO7, DE LA LÉGION. A. Durée du sciante. Les légats légionnaires étaient nommés par l'empereur pour un temps indéfini dont il était seul juge. Ainsi Larcins Lepidus, contemporain de Vespasien, ne resta sans doute pas à la tête de la Iégion XeFretensis plus de neuf ou dix mois 23, durée du siège de Jérusalem; Hadrien commanda la légion I Minervia pendant un peu moins de deux ans' ; le légat de la légion III° Auguste, qui était, en même temps, gouverneur de Numidie, conservait son commandement, un, deux, trois et même jusqu'à cinq ans de suite" Les tribuns étaient tenus par la loi à un an de service militaire au moins 26, mais par faveur spéciale l'empereur autorisait certaines personnes à ne rester à l'armée que six mois (tribunatus selnestris) 27. Plus d'un tribun, par contre, demeurait deux ou trois années attaché à une ou plusieurs légions 28, par exemple Hadrien, qui fut tribun dans trois légions successivement, pendant les années 95, 96, 97 29 ; quant aux tribuns d'ordre équestre, on en trouve qui ont conservé leur poste cinq ou même neuf ans" Pour les simples soldats et les officiers au-dessous des tribuns, la durée légale du service était, de vingt ans'', l'année militaire commentant au Pr mars qui suivait l'entrée au service 32. Mais d'ordinaire et surtout pendant le rer siècle, il était d'usage de garder plus longtemps les légionnaires 33 ; on trouve des exemples de légionnaires qui ont servi vingt-trois 34, vingt-quatre 3', vingt-six 36 vingt-huit", trente-deux 38 années ou même davantage 39. La moyenne est de vingt-cinq ans 10. Hadrien parait avoir agi, à cet égard, tout à fait arbitrairement ; Antonin le Pieux revint aux traditions et à la légalité 4i. Naturellement, les sous-officiers et les centurions, en particulier, qui trouvaient au service un grand avantage et au réengagement un bénéfice, restaient plus longtemps encore sous les armes. On peut citer le nom de centurions qui ont servi dix-neuf", trente-sept 43, quarante-cinq ", voire même quarante-huit ans 46. eut pas d'armée permanente, il était inutile de s'occuper de la condition faite aux soldats, une fois leur temps de service achevé ; ruais du jour où les généraux de la fin de la République eurent créé un métier militaire auquel les hommes durent se consacrer à l'exclusion de tout autre, il leur fallut songer à assurer leur existence dans leur vieillesse. Marius, César les avaient récompensés par des concessions de terre [COLONLA, MERCCTIO] ; Auguste agit de même. Il avait à pourvoir les vétérans de son armée et ceux d'Antoine et de Lépide. Les plus jeunes, au cas oit 11s n'entrèrent pas dans les légions reconstituées, reçurent une indemnité pécuniaire; les autres une assignation de terres en province ou en Italie 1fi. Il procéda ainsi à deux rrtriorrrru). 22 Tac. Anna. 111, 21. 2 3 Voir ce que dit au sujet dej ce personnage 3399, 3602, etc. 29 Vit. Had. 3; C. i. 1. III, 550. Trajan servit dix ans comme 1 LEG -1059 .E E déductions, la première en 724= 30, la seconde en 740=14 1. 11 décida, de plus, qu'à l'avenir les légionnaires, leur temps de service achevé, recevraient une retraite, quand ils arriveraient à obtenir l'honesta nrissio [MlssiO]. Il la fixa à 3000 deniers2; Caligula la réduisit de moitié mais Caracalla la releva 'a Elle était prise sur une caisse particulière, l'AEBARICM MILITABE. Il arriva aussi, pendant la suite de l'époque impériale, qu'on donna des terres aux vétérans, comme par le passé, en Italie et surtout en province :; ; tantôt on les envoyait dans des villes qui existaient déjà, tantôt on forniait avec eux des colonies sur les frontières les chargeant à la fois de défendre le territoire soumis et de servir de pionniers à la civilisation romaine. On sait combien ce système fut en faveur après Dioclétien [vETERANI]. C. Solde des légionnaires. L'établissement d'une solde pour la légion remonte au siège de Véies par Camille (348 de Rome = 406 av. J.-C.) Au temps de Polybe elle était de deux oboles par jour, c'est-à-dire de 1200 as ou 120 deniers par an10. César le premier apporta des modifications à cette loi : il doubla la soldeou plus exactement il paya trois stipendia au lieu d'un, ce qui porte le total de la solde à 225 deniers. Auguste réglementa dans le même sens la question 1". Domitien ajouta un quatrième stipendium, c'est-à-dire qu'il éleva la paye d'un légionnaire à 300 deniers par an ". Elle était payée ,'n trois termes 14 Sur cette somme on prélevait à l'époque républicaine les fournitures faites par l'État, en habillements 15, en armes" et en vivres 1'. Sous l'Empire, il en était encore ainsi au 1" siècle "e. Postérieurement, il est possible que le règlement ait été modifié". Naturellement, la solde des sous-officiers et celle des officiers était supérieure à la solde des soldats. Nous avons parlé plus haut (p.1058) des duplarii et des sesquiplicarii. D'après Polybe, les centurions recevaient une allocation double de celle des soldats 9° ; nous n'avons aucune autre donnée à ce sujet. Les auteurs ne disent pas quelle était la solde d'un tribun aux deux premiers siècles, mais ils laissent supposer qu'elle atteignait un chiffre assez élevé". Le marbre de Thorigny donne celui de 25000 sesterces pour un tribunat senlestris9. Au ale siècle, on trouve comme chiffre 250 eurei 1/3; mais tout porte à croire que c'était là un taux extraordinaire". Pour les légats légionnaires, nous ne possédons aucun renseignement. Les officiers avaient d'autres bénéfices pécuniaires que leur solde. Les centurions se faisaient de gros revenus en faisant payer les exemptions de corvée ou la levée des punitions '. Quantaux tribuns, les soldats leur faisaient des cadeaux (slillatarae) u. L'usage fut d'abord regardé comme abusif et condamne par les empereurs"; plus tard, on le toléra en le réglementant"i [STILLATDBA]• A la solde, il faut ajouter les gratifications que lés officiers et les soldats recevaient de l'État sous la République comme sous l'Empire, à l'occasion îles triomphes, de l'avènement des souverains, d'événements intéressant la famille impériale, de révoltes même qu'il fallait faire cesser à prix d'or [DONATIVCM]. Les légionnaires arrivaient ainsi à se constituer un capital si élevé que Domitien, par prudence, limita à mille nuanmi la somme que chacun d'eux pouvait avoir avec lui au camp 23. On sait, en effet, que César donna à ses soldats 500 deniers par tête, en 7082"; Auguste 2 500 en 711"; Tibère, au début de son règne, 62 deniers 1/2 31, etc. Enfin, bien que le butin, en droit, fût propriété exclusive de l'État 20, il arrivait souvent qu'une partie en fait distribuée entre les soldats et les officiers après la victoire. En pareil cas, la part accordée était d'autant plus importante que le grade était plus élevé . dans le partage du butin, comme dans les distributions d'argent, les centurions recevaient le double des soldats, les tribuns le double des centurions" [PRAEDA). Service de la solde.Trésorerie militaire. Sous la République, où l'argent nécessaire à la solde et aux achats de vivres était fourni par le trésor public, le trésorier' en chef' de l'armée était le questeur34. Le tquaestor ad exercilum 'trissas était rustos pecuniae". C'est donc à lui qu'il revenait de payer la solde des légions. Ela sait qu'une place spéciale lui était réservé() dans le camp [ét, AESTOR, QCAES'r oBII'M. Sous l'Empire, oit la caisse impériale faisait les frais de l'entretien de l'armée, le trésorier de l'année et de la v légion, quand il fut établi que chaque légion occuperait un camp distinct CIE. 465. e 6lenna" [CASTRA], ne pouvait cire qu'un délégué de l'empereur. J'ai admis ailleurs que le maniement des fonds était entre les mains d'esclaves et d'affranchis de l'empereur (familia castrensis)36 [cAS'rp0. ses]. Ils formaient l'officiant rationnm3'' : un tabllzrias était à ira tète du bureau38; un ou plusieurs dispensatore, recevaient les mandats, les 'vérifiaient, en' autorisaient le paiement 39; un arlvarius l'effectuait à des officiers trésoriers de la légion 4°. Quant a l'émission des mandats, à la comptabilité légionnaire, elle était confiée au' bureaux du légat, des tribuns, du princeps praetorii. et spécialement aux librarii (voir plus haut). L'argent étai'•; fourni par le procurateur de la province ou d'une province voisine. Quand on en manquait, le général en faisait frapper (LCASTRENSES NiMMIj, OU simplement faisait apposer sur du numéraire existant des contremarques destinées à donner provisoirement à la monnaie une valeur fidu- LEG 1060 LEG ciaire suffisante pour pouvoir effectuer le paiement de la légion' (fig. 4105 2). D. Vivres et vêtements. Service de l'intendance. -Il a été question dans un article spécial des vivres du soldat romain, et en particulier du légionnaire [ctsARIA MIISTUM]. Je rappellerai seulement 3 que la ration d'un soldat était de 4 boisseaux (60 livres par mois, soit 27 kilogrammes environ) ; le cavalier qui avait deux valets à nourrir en recevait soixante-douze, ainsi que de l'orge destiné aux trois chevaux qu'il devait entretenir 4. Du temps de Sylla, la ration paraît avoir été augmentée au moins temporairement, et cela dura sans changement sous l'Empire jusqu'à Septime Sévère, auquel on attribue un nouveau relèvement de la ration légionnaire. Les officiers et sous-officiers avaient droit à des vivres plus abondants, en proportion de leur grade 3. Outre du blé, on fournissait encore aux légions du sel, du vin, du vinaigre pour la posta, de la viande fraîche ou salée c. Ces vivres étaient distribués à certaines dates et pour un temps limité. Quand on était en station, la distribution se faisait pour une période assez longue (dix-sept ', vingt 8, trente 9 jours). On rangeait la légion dans l'ordre de bataille et chaque soldat, à l'appel de son nom, sortait du rang pour recevoir ce qui lui était dû. Plus tard, il semble qu'on ait à peu près renoncé aux distributions à long terme 10. Ces distributions étaient surveillées par les généraux qui tenaient à se rendre compte de tout par eux mêmes' 1; mais c'était surtout l'affaire des tribuns chargés spécialement du service des vivres'"-. On comprend par là pourquoi on a recueilli dans les camps légionnaires ou aux environs des poids portant le nom d'une légion 13 (fig. 4406) ou certains cachets, comme celui qui a été trouvé assez récemment à Mayence, et que l'on pense avoir servi à marquer les pains d'une centurie de la légion X1Vi4 (fig. 4407). La nourriture des troupes était assurée, en temps de paix, par l'existence de dépôts de subsistance _IIORREA MILITARIAI. Avant César, sem ble-t-il, les généraux en campagne faisaient choix de certaines villes pour servir de centre de ravitaillement; mais il n'existait pas de magasins militaires ; il est le premier qui ait songé à en organiserl0. Sous l'Empire, au contraire, on en trouve de nombreux exemples'6. C'est de là que les légions tiraient leurs approvisionnements n. En cas de marche ou polir les détachements légionnaires, on avait recours aux réquisitions ; on demandait aux autorités locales ce dont on avait besoin et on leur donnait, en échange, des reçus 1'. En temps de guerre, on créait des dépôts dans le voisinage du terrain de combat, et au besoin les troupes vivaient sur le pays 19. Le système adopté pour la fourniture des vêtements était à peu près le même : ils étaient réunis dans des magasins où les légions venaient s'approvisionner 20. On ne sait à peu près rien sur la façon dont les chevaux et les bêtes de somme étaient fournis aux légions 21. E. Armes. Machines de guerre. Service de l'artillerie légionnaire. Il sera question plus loin de l'armement des légionnaires. L'artillerie romaine donnera lieu à un article spécial [TORMENTA], comme aussi les différentes enseignes [SIGxA MILITARIA]. Il faut noter seulement que la légion, étant une division complète, avait avec elle ses machines de guerre et ses provisions d'armes. Nous en avons la preuve dès l'époque de César" et pour toute la durée de l'Empire. C'est ainsi que nous voyons, lors de la guerre d'Alexandrie, la légion XXXVII° venir débarquer (levant la ville avec ses armes et machines de guerre. Ailleurs, nous lisons que César envoya au secours des habitants de Thabena un tribun avec une cohorte légionnaire et des machines23. Tacite, dans la deuxième bataille de Bédriac, fait mention d'une baliste de la légion XVe qui fï t merveille contrel'ennemi24 ; Josèphe nous parle des machines des différentes légions qui assiégèrent J érusalem2o. Enfin, et pour ne point citer d'autres exemples, Végèce nous apprend que de son temps chaque centurie avait une carroballiste traînée par des mules et servie par lA hommes: il ajoute qu'il y a dans chaque légion 55 carroballistes, 10 onagres, un par cohorte, et tout le matériel nécessaire aux travaux du génie; o car, dit-il, la légion doit porter avec elle tout ce qui est nécessaire à la guerre pour que, à quelque endroit qu'elle établisse son camp, elle puisse former une cité tout armée 29 o, Armes, machines, outils, tout cela était fabriqué dans des ateliers spéciaux répartis entre les différentes villes de l'Empire [FARRICAIi 27 ; mais, de plus, chaque légion possédait des ateliers propres pour l'entretien, la réparation, et au besoin la fabrication des armes. Ces ateliers, appelés fabricae également, étaient peuplés d'un personnel d'ouvriers de toute sorte, civils et militaires", sous les ordres d'un optio fabricae et avec des contremaîtres instructeurs29 En outre, dans chaque cohorte, il y avait des gardes d'artillerie (custodes armorum) et des fourbisseurs (poliones) pour l'entretien journalier et la conservation des armes et des machines3o. Le dépôt d'armes, le magasin légionnaire se nommait LEC 1061 __ LEG ARMAMENTARII'M. Il était placé sous la surveillance d'un officier (cureter armainentarii)1 responsable, avec un personnel de scribes sous ses ordres 2. J'ai montré ailleurs que l'armamentariumd'une légion, comme sa fabriea, étaient soumis au préfet du campe, lequel avait aussi à surveiller le train des équipages F. Baraquements, casernes, ramps. Les armées en marche se retranchaient, on le sait, chaque soir dans un camp construit suivant des règles fixes et propres à assurer la sécurité absolue des soldats. Ce qu'étaient ces camps et comment les différentes troupes y étaient réparties, c'est ce qui a été expliqué à l'article CASTRA. Ils contenaient d'habitude plusieurs légions. Il en était de même des camps permanents au début de l'Empire; à la mort d'Auguste, trois légions étaient établies, sous Blaesus, dans le même camp en Pannonie tandis qu'à Vetera deux légions étaient réunies 0. Sous Domitien, on agissait encore ainsi', et ce fut là, dans l'opinion de l'empereur, ce qui facilita la révolte d'Antonius Saturninus. Aussi défendit-il désormais d'admettre dans un même camp plus d'une légion. Dès lors, l'histoire des camps se confond avec celle des légions. Et comme, d'autre part, à partir du début du ii' siècle, les changements de garnison se firent très rares, les anciens camps avec Lentes et baraquements firent place à de véritables places fortes avec casernes, contenant tout ce qui était nécessaire à la vie des soldats en temps de paix. On en a retrouvé des restes importants dans plusieurs pays. Les plus célèbres et les mieux conservés que l'on connaisse encore sont ceux de Lambèse a en Algérie, et de Carnuntum en Autriche, auxquels il fau t comparer tous les camps du limes en Angleterre t0, sur le Rhin ", ou ailleurs [LIMES, VALLON'. Ces forteresses légionnaires, dont on peut considérer le camp de Lambèse comme le type le plus parfait (fig. 41108), étaient conçues sur le plan des anciens camps provisoires. Comme eux, elles étaient entourées de retranchements: mais au lieu de défenses en terre ou en petites pierres, c'étaient de solides murailles, flanquées rie tours et capables de résister à des assauts répétés"; comme eux elles étaient divisées en quatre parties par deux voies perpendiculaires, la via principaux allant de la porte latérale gauche à la porte latérale droite, la ria plraetoria et sa continuation, la via decumana, rejoignant la porta prraetoria à la porta decumana. A la rencontre de ces deux grandes voies s'élevait le praetorium avec tous ses accessoires ; derrière le praetorium était situé le cjuaestorium, et tout autour on disposait les différentes constructions nécessaires aux besoins de la légion. Mais ces divers édifices étaient conçus dans de bien plus grandes proportions, comme i1 convient à des bàtiments qui sont destinés à avoir une certaine durée. Nous reviendrons sur ce sujet aux mots PRAETORIt'M et Ql'AESTOmuM. Il suffira de rappeler ici qu'un camp légionnaire contenait, outre les casernes mêmes, des bains spécialement affectés à l'usage des soldats 13, des salles de réunion pour les sous-officiers [scoLA]lb, des chapelles pour le culte (voir plus loin), des bureaux pour les services administratifs (tabularium) ia, un hôpital (valetudinarilem) 1i', une prisons', un arsenal (armamentarium)18, un marché'', des magasins (Icorrea) ', etc. On doit signaler aussi un monument qui paraît avoir été comme une annexe du camp, bien qu'il filt situé en dehors de l'enceinte, l'amphithéêtre 91. Des quatre. portes de 1a forteresse partaient des voies, prolongement des voies intérieures, qui étaient bordées à droite et à gauche de cimetières militaies22. Le camp et les édifices qui s'y élevaient étaient sous le commandement du préfet de la légion, praefeetus castrorum leoionis (voir plus haut, p. 9033). La présence de ces camps attirait naturellement une grande quantité de marchands de toute sorte; ceux-ci s'établissaient d'abord sous des cabanes ; puis la brique et la pierre succédaient à la toile et aux planches, et peu à peu un village se fondait, embryon d'une ville future CANABAE]. Ces villes, nées des camps légionnaires'', ont joué un grand rôle dans l'histoire des légions impériales ; elles leur ont fourni lai plupart de leurs recrues à partir de l'empereur Hadrien, ainsi qu'il sera expliqué plus bas, et 134 LEG 1062 1,EG elles n'ont pas été sans influence sur la propagation de la civilisation romaine dans les provinces. G. Territoriunl leglouis'. Le camp d'une légion était, à l'époque impériale, le centre d'un vaste territoire dont elle avaitin jouissance. On le trouve mentionné sur les monuments épigraphiques iterritoriurn legionis 2, prote legtonis) 3. Toute l'étendue de ce terrain, qui couvrait souvent un espace considérable, était réservé aux besoins de la légion : c'est là qu'elle trouvait le foin nécessaire à ses bêtes de somme les herbages pour faire paître les troupeaux 3 confiés it la garde des pecuarii, le bois de construction et de chauffage °, bref tout ce qu'une grande propriété fournit à des familles ou à des collectivités. Dans ce territoriuna legionis7, ii n'y avait pas de villes établies, en dehors de celles qui émanaient de la légion meule et dont je vais parler; le territoire de la légion était, par rapport à celle-ci, ce qu'était le territoire d'une municipalité par rapport à cette municipalité : le légat y était maître, comme les quatuorvirs ailleurs. On conçoit, dès lors, aisément, comment se constituaient ces grandes cités voisines des camps auxquelles j'ai fait allusion. Le commandant de la légion attribuait aune marchands et autres qui en étaient l'origine et les premiers habitants un terrain pris sur les dépendances du camp légionnaire, en ayant soin de le choisir à. une certaine distance de ce camp afin de ne pas gêner la défense et de réserver les servitudes militaires'. On comprend aussi par là comment on pouvait concéder aux vétérans, sans mienne difficulté et sans léser aucun habitant du pays, des terres à cultiver et des emplacements pour des villes. L'histoire de la légion d'Afrique nous fournit à cet égard des renseignements très précis. Le territoire qui lui était réservé était absolument désert au début du n' siè ;le, quand les soldats vinrent l'occuper ; il se peupla peu à peu de cités dont quelques-unes devinrent florissantes : Verecunda, qui est toujours resté un viclts dépendant de la municipalité de Lambèse, Ksar-clGhennaia. qui n'arriva pas non plus à une grande fortune, El-Macler et Seriana, agglomérations plus importantes, enfin .Zana (Diane veteranoruo), dont le nom seul témoigne de la qualité des habitants, et qui atteignit une véritable prospérité". Dans ces cités, certains monuments étaient faits par la légion mème10, ce qui prouve, mieux que tout, les rapports étroits qui les unissaient au corps d'armée sur le territoire duquel elles s'élevaient. M. Schulten admet que, même lorsque ces agglomérations avaient obtenu de la faveur impériale une administration civile autonome, elles restaient soumises à la surveillance du commandant légionnaire". H. Service médical de la légion 17. Il n'y eut point de médecine militaire organisée pendant la durée de la République, Les consuls, les préteurs ou même des officiers moins élevi s en grade emmenaient avec eux des esclaves, médecins ou chirurgiens 13, q,u'ils achetaient pour leurs usages personnels et qu'ils pestaient, en cas de besoin, pour donner leurs soins aux légionnaires blessés ou malades 14 Les armées de César n'étaient pas mieux organisées à cet égard", Sous l'Empire seulement les choses changèrent"; à partir de cette époque, il y avait, pour chaque légion, un service sanitaire bien conçu. Des médecins de corps étaient chargés de passer la visite des malades dans les tentes et de les y traiter quand la maladie était légère 17 (nedici ordinarii)n ; ils accompagnaient aussi les soldats dans leurs marches et leurs expéditions pour donner leurs premiers soins aux malades et aux blessés'°. Lorsque la maladie était grave, on transportait les hommes dans l'hôpital légionnaire (valetudinarium)20 qui était sous les ordres du préfet du camp V1 qui avait ses administrateurs particuliers (optio valetudinarii) 22, ses médecins distincts (nedicus castrensis)27 et ses infirmiers (qui aegris praesto sunt(26 Les blessés qu'on laissait en arrière dans un hôpital étaient rangés, comme tous les soldats détachés, sous un vexillum'-3. Des médecins, il convient de rapprocher les vétérinaires, chargés de soigner les bêtes de somme, particulièrement les chevaux (VETEBTXABIL'M 26. 1. Occupations des légions en temps de paix. D'après les principes des généraux romains, qui sont ceux de tous les hommes de guerre, un soldat doit toujours s'exercer s'il veut rester à la hauteur de sa tâche. « Un bon soldat qui ne s'exerce plus, dit Végèce, quelque àge qu'il ait, reste toujours un conscrit27, » Soit en présence de l'ennemi, soit en temps de paix, le légionnaire était soumis à des travaux réguliers n. Outre les exercices imposés aux recrues, il faut citer: les marches (ambulatio) et promenades qui se répétaient trois fois par mois : les fantassins parcouraient dix milles (16 kilom.) au pas militaire, avec armes et bagages2° ; les manoeuvres (decursio 3°, exercitatio 31) , les travaux de fortification et de terrassement 32 ; le saut 3.1, la nage 34, etc. Les grands chefs militaires de la République s'intéressaient tout particulièrement, à ces exercices" et certains empereurs y apportèrent toute leur attention. On sait que Hadrien, dans son voyage en Afrique, fit évoluer devant lui les fantassins et les cavaliers de la légion II10 Auguste, et leur adressa, à la suite de ces manu-navres, un ordre du jour qui nous a été conservé en partie 36. Mais, de plus, afin de fournir à l'activité des légionnaires des occupations que les exercices même répétés n'auraient pas suffi à leur procurer, l'autorité ne se faisait pas faute d'employer les hommes à des travaux intéressant les provinces, qu'ils eussent ou non un but militaire. En 667 de Rome, le consul Flaminius fit tracer par ses troupes la' route de Bologne à Arretium3 ; Scipion Nasica occupa ses soldats à construire des navires, a bien LEG 1063 ® LEG qu'il n'eût aucun besoin d'une flotte et simplement pour empêcher l'oisiveté de corrompre les moeurs' » ; Marius kit ainsi creuser le canal du Rhône2 et Sylla détourner le Céphise 3 ; César ordonna à une de ses légions de relier par une muraille fortifiée le Jura au lac de Genève'. Sous les empereurs, les mêmes traditions se perpétuèrent et Auguste décida que les troupes pouvaient être employées à des travaux publics mais non à des entreprises privées'. Grâce aux inscriptions, nous connaissons un grand nombre de ces constructions militaires a) Établissement de routes stratégiques 8 : en Dalmatie (route de Salone â Andetriurn tracée par la VIII légion) 9 ; en Pannonie (route d'Aquincum 0 à Mursa tracée par la légion Il' Adjulrix) ; en Syrie (voie établie par la légion III° Galliica) "; en Afrique (route de Carthage à Theveste établie par la légion Hie Augusta t2 ; route de Theveste à Tacape faite dans les mêmes conditions"; voie stratégique à travers l'Aurès ouverte par un détachement de la légion II° Ferr'ata)14 [VIA]. b) Ponts sur ces routes : à Nauportus, en l'an 14 à Chemtou, sous Trajan'', e) Tunnels : le grand tunnel de Séleucie de Piérie''. d) Citernes sur les routes : les réservoirs de la route de Coptos à la mer Rouge, pour la construction desquels 128 hommes des légions HP Cyrenaica et XXII° Dejotariana furent détachés". e) Camps, places fortes : en Bretagne, sur le vallum d'Hadrien 1° et sur celui d'Antonin le Pieux 90 [VALU si]; en Germanie, sur le limes du Rhin [LIMES[ 21 ; en Illyrieum sur le Danube" ; en Afrique, au camp central de Lambèse23 et à la frontière même la plus extrême de la province 2'; en Asie jusque dans les pays situés en dehors de la domination romaine immédiate 25. Mais les légions n'étaient pas seulement occupées à des travaux d'intérêt défensif ou stratégique; pour ne pas laisser les hommes inactifs ou pour venir en aide aux provinces, on les employait à élever des édifices de toutes sortes : elles traçaient le plan de colonies et en bâtissaient les grands monuments, les villes de Timgad en Afrique 2" et de Sarmizegetusa en Dacie 21 ont été créées de la sorte ; elles construisaient des temples", des amphithéâtres 29, des aqueducs et des fontaines 30 ; elles étaient employées à l'exploitation des mines 31, etc. Rien ne permet, d'ailleurs, d'affirmer que, en pareil cas, les légionnaires aient fait vraiment l'office d'ouvriers. Tout porte à croire, au contraire, qu'il n'en était ainsi que devant l'ennemi et pour des travaux militaires urgents. Pour les autres, ils jouaient plutôt le rôle de nos piqueurs ou conducteurs du génie et des ponts et chaussées; les grosses besognes étaient laissées soit aux soldats des cohortes auxiliaires, soit aux esclaves et aux gens du pays mis en réquisition. La preuve en est fournie par la part faite, dans les inscriptions mentionnant les travaux, aux légionnaires et aux soldats auxiliaires : lc' nombre des premiers est tout à fait minime à côté de celui des seconds. Ainsi, pour construire les citernes sur la. voie de Coptos à la mer Rouge, on détacha l d,S hommes sur les 10 on Id 000 que comptaient les deux légions d'Égypte, et 1'273 sur les 7 ou 8000 que comportaient les ailes et les cohortes dit pays 32. On peut juger du nombre de ces constructions militaires par celui des tuiles et briques estampillées que l'on a recueillies dans toutes les parties du monde romain [FICLINUM OPUS, p. 11201, Comme les légions les faisaient ellesmêmes, elles y inscrivaient, à l'exemple des industriels, leur nom et leur numéro, en les faisant suivre quelquefois d'indications secondaires et de la désignation du spécialiste attaché à la fabrication". Par cela même, ces monuments sont fort importants, puisque leur présence su"" un point du monde romain permet de conclure à celle d'une légion, ou, tout au moins, d'un détachement légionnaire à cet endroit'7. L'officier chargé de surveiller l'atelier des briques était I'optio navalioruln, cité plus haut''. 3. La discipline dans la légion. Pour maintenir la discipline dans une armée, il faut des punitions et des récompenses. Chez les Romains, les unes et les autres ont toujours été les mêmes, à peu près, sous la République aussi bien que sous l'Empire. C'était aux tribuns qu'il appartenait de se prononcer sur les cas les moins graves 3tl ; ceux qui entraînaient la peine capitale revenaient aux généraux 37 ; ils avaient aussi à informer sur les délits commis par les officiers". Les punitions infligées aux légionnaires étaient la privation de solde ; la dégradation ; le renvoi de l'armée; les peines ignominieuses ; les châtiments corporels et même la peine de mort. Tout cela sera étudié à l'article PoENAE MILfTUM. Les récompenses se composaient d'avantages pécuniaires, augmentation de solde " ou gratifications [DONATLVA] ; de décorations pour les officiers comme pour Il y avait aussi, pour soutenir les légionnaires dans l'accomplissement de leur tâche de chaque jour, l'espoir de la retraite. D'après les règlements d'Auguste, celle-ci consistait dans une somme d'argent payée une fois pour toutes à ceux qui étaient honorés de l'honesta mis.010 MIOSIO]. Nous en avons parlé brièvement plus haut. K, État civil des légionnaires. La création de l'armée permanente qui obligeait Ies légionnaires à rester au service de dix-sept ans à quarante ans pour le moins devait entraîner, sous le rapport de leur état civil, de graves modifications. Si le soldat était marié avant d'entrer dans l'armée, il pouvait garder sa femme 40, sauf à ne pas vivre avec elle, mais aussi il lui était loisible de LEG --1064 -LEG divorcer. e Il arrive souvent, lit-on au Digeste', que pour cause de service militaire, le mariage ne peut être utilement maintenu , en ce cas, bona gratia dissolvitur ». S'il n'était point marié avant son enrôlement, il lui était interdit de le faire pendant son service 2. C'est ce que certains textes prouvent surabondamment 3, en particulier une lettre du préfet d'Égypte Lupus en 116/117 oïl on lit en toutes lettres : Oû y ï ,ea-rtv Qtipz ,dY7-riv ,raj.aïv ". Si donc il leur plaisait de s'unir à des femmes pendant le temps qu'ils passaient à l'armée, cette union, contractée en dehors de la loi, n'avait pas le caractère d'un justum matrimonium, d'un conubium ; la femme n'était en droit qu'une concubine et les enfants que des enfants illégitimes. Mais comme ces fils de soldats, ces enfants de troupe, pouvaient fournir à la légion d'excellentes recrues, imbues par tradition de l'esprit militaire, l'empereur avait trouvé moyen d'effacer à peu près pour eux l'inconvénient qui résultait de leur naissance, lorsqu'il les employait à son service. Il leur donnait, lors de leur entrée dans la légion qui leur conférait le droit de cité [teLECTUS], non pas son gentilice, mais celui de leur père, avec le prénom paternel: pourtant la faveur impériale n'allait pas jusqu'à les autoriser à faire suivre leur nom de la tribu paternelle, ce qui les aurait assimilés entièrement à des enfants légitimes. Ils n'étaient pas davantage inscrits dans la tribu de l'empereur, sous qui ils prenaient place dans la légion, mais bien dans la tribu Pollia, dont le nom, de bon augure par sa racine ,même, semblait promettre à ceux qui y figuraient la force et le courage '. Il y avait donc, en somme, entre la loi et la pratique une sorte de désaccord, les empereurs faisant tout ce qui était en leur pouvoir pour créer une famille au légionnaire, sans modifier les règlements militaires qui le défendaient, L'empereur Septime Sévère poussa plus loin encore la tolérance : d'après Hérodien 6, il autorisa les légionnaires à habiter avec leurs femmes. La réforïne fut capitale : elle modifia entièrement la vie des soldats. Le camp cessa d'être pour eux une cité commune où la plus grande partie de leur vie se passait ; il devint simplement un lieu d'exercices où ils se retrouvaient quelques heures par jour. Leur demeure véritable se transporta dans le ville voisine où ils retrouvèrent femme et enfants Le service légionnaire se change dès lors en une sorte de milice territoriale. Cette tolérance devait amener un remaniement dans l'état civil du légionnaire; on croit qu'elle se produisit au ive siècle 3. La défense de contracter mariage ne pouvait s'appliquer aux officiers supérieurs, légats ou tribuns, qui appartenaient à l'ordre sénatorial ou à l'ordre équestre Pour les officiers inférieurs et les sous-officiers, la solution est beaucoup moins claire. J'ai émis, ailleurs, l'opinion qu'ils étaient soumis àla condition des soldats ". M. P. Meyer" est d'un avis contraire. Pour lui, les offi tiers, comme les centurions et les évocats qui, à partir de Septime Sévère, avaient rang équestre, pouvaient contracter mariage au service. Quant aux principales, la même facilité leur aurait été donnée : il en fournit comme preuve le fait que, suivant Végèce12, les « principales privilegiis muniuntue » et la façon dont sont rédigées les épitaphes de ces sous-officiers13 (la femme s'y appelle conju.x, les enfants portent le gentilice du père). Mais ni l'un ni l'autre de ces arguments ne me semble probant'". L. L'épargne des légionnaires et les collèges militaires. Ce serait une erreur que de considérer tous les légionnaires, même les simples soldats, comme réduits à leur solde. Ils avaient le droit de posséder et quelques-uns en usaient largement. Les codes contiennent toute une série de dispositions relatives à leur avoir, à ce qu'on appelait leur peculium castrense. Celui-ci se composait d'abord des sommes d'argent qu'ils tenaient de leur famille, equodpro ficiscenti ad nt ilitiam dater'' , guod aparentibus vel cognatis in militia agenti donatum est '6 » à cela s'ajoutaient les héritages qu'ils recueillaient de leurs compagnons d'armes et dont les inscriptions nous parlent plus d'une fois 17, le produit de la solde et surtout les libéralités impériales (donativa). Cette petite fortune était reconnue par la loi et protégée : le légionnaire en disposait librement, même lorsqu'il était en Elle lui servait en partie à s'assurer certaines aises, en particulier à acheter et à entretenir auprès d'eux des esclaves hommes ou femmes 'e, sur qui ils se déchargeaient de toutes les besognes serviles, du soin des bagages 12 et de celui des armes20. Mais d'autres n'étaient point aussi fortunés ; pour eux l'argent que leur donnait l'État formait leur seul avoir, jusqu'au jour où ils touchaient leur prime de retraite. Or tous n'étaient point assurés d'y arriver : les maladies, les accidents pouvaient les arrêter. L'État avait donc dû envisager le cas où le légionnaire serait obligé de quitter l'armée avant sa libération. De là des mesures de prévoyance dont Végèce nous a conservé le souvenir2i. Il nous apprend que, pour empêcher les hommes de dépenser tout l'argent qu'ils recevaient, pour les obliger à l'économie, on faisait sur les donativa des retenues qu'on mettait en dépôt au nom de chaque légionnaire, entre les mains des signiferi et sous la protection des enseignes. La retenue était égale à la moitié du donativum. Cette réserve était rendue aux intéressés, une fois le service achevé; elle pouvait s'élever assez haut, puisque Domitien, craignant de voir se former ainsi un trésor de guerre à la disposition d'un chef ambitieux et infidèle au souverain, limita à 1000 deniers la somme que chaque soldat pouvait déposer Si, Quand il mourait au service, le dépôt, faisant partie du LEG 4065 -_ LEG peculium castrense, passait à son père ou aux héritiers qu'il avait institués par testament'. Cette caisse n'était pas la seule. Il en existait une autre, destinée à procurer une sépulture honorable aux soldats morts au service. « Dans cette caisse, dit Végèce 3, tous les légionnaires mettaient quelque argent, de façon que si l'un de leurs camarades venait à mourir on trouvât là de quoi faire face aux dépenses de sa sépulture. » C'est une organisation qui rappelle celle des collèges funéraires. Elle se comprend d'autant mieux que la loi interdisait aux soldats de former des collèges dans le camp ce qui se comprend aisément : le contraire eût été incompatible avec les règles les plus élémentaires de la discipline ; ils ne pouvaient donc pas, comme le plus humble des habitants de l'Empire, prendre les mesures nécessaires pour s'assurer à peu de frais une sépulture honorable. L'État, pour y remédier, avait fait des légions autant de sociétés d'assurances en cas de décès. Il n'en était pas de même des sous-officiers. Ceux-ci, du moins à partir de Septime Sévère, se constituèrent directement en associations, en cercles Nous avons conservé le souvenir d'une vingtaine de ces associations et, ce qui est mieux, le règlement d'un certain nombre d'entre elles °. Nous y voyons que, à son entrée dans le collège, chaque membre doit verser entre les mains du trésorier une certaine somme (seamnarium) qui donne droit de prendre place sur les bancs de la société, soit qu'il la payât en une fois, soit plutôt qu'elle fût répartie en une série de contributions mensuelles. Avec les fonds ainsi réunis, le collège assurait aux participants certaines primes. Ainsi, chez les cornicines de Lambèse l'associé promu à un grade supérieur dans la légion avait droit à 500 deniers; celui qui passait dans une autre légion recevait la même somme augmentée de frais de voyage; les vétérans touchaient aussi 500 deniers, tandis que ceux qui quittaient le service par punition n'avaient droit qu'à 250 deniers ; enfin celui qui mourait au service était enterré aux frais de la caisse, qui versait 500 deniers entre les mains de l'héritier ou du procurateur du défunt. Dans tous les cas, la prime donnée à la sortie du collège (anulariuin) était inférieure à la somme versée à l'entrée ° par les intéressés. J'ai montré longuement ailleurs, après M. Boissier, que les collèges avaient comme but principal d'assurer la sépulture à leurs membres. Quand le sous-officier mourait au service, la prime servait à sa sépulture; mais, comme la plupart du temps il quittait la société au bout de quelques années ; comme, d'autre part, il ne fallait pas qu'il perdit, pour cela, le fruit du sacrifice fait en vue de s'assurer une tombe, on lui versait, de son vivant, la somme à Iaquelle il aurait eu droit s'il était mort ; ainsi, « l'anularium n'était autre chose que le prix de la sépulture payé d'avance à quelqu'un qui ne pouvait pas l'attendre sur place 10 ». Avec cette somme, l'assuré se faisait inscrire dans un nouveau collège, collège de sous-officiers s'il restait au service, collège de vétérans s'il avait atteint la limite de temps ; et cette mise de fonds qu'il avait faite lors de sa récep Lion dans une première association, augmentée de souscriptions supplémentaires à mesure qu'il montait en grade, le suivait sans aucun risque pendant toute sa carrière. De la sorte, il assurait sa sépulture presque en entrant au corps et se gardait contre tous les accidents possibles. D'autre part, ces collèges ne pouvaient pas avoir un caractère aussi exclusif que les collèges funéraires ordinaires ; ils mettaient aussi les membres à même de faire face à certaines dépenses attachées à la carrière des sousofficiers, par exemple les changements de garnison. Le surplus de l'avoir du collège servait à pourvoir aux dépenses et aux fêtes de l'association. Il est remarquable que le lieu de réunion de ces associations était le camp lui-même et que leurs salles de cercles ont été retrouvées dans la partie postérieure du praetorium". Ils recevaient donc de l'autorité impériale un accueil bienveillant; on faisait plus que les tolérer, on les encourageait et on les protégeait. Ainsi, qu'il s'agit de simples soldats ou de sous-officiers, l'autorité faisait en sorte que les légionnaires pussent s'assurer un tombeau honorable, par des moyens très semblables. Grâce à la caisse de sépulture légionnaire, les simples soldats étaient certains d'être enterrés avec les égards convenables; grâce à la retenue sur les donatiia, ils avaient de quoi se faire inscrire, à leur libération, dans un collège funéraire civil, et grâce aux associations de sous-officiers, ceux-ci pouvaient envisager, sans crainte, soit la fin de leur service, soit même les hasards de l'existence militaire. M. Culte des légions. Le principe qui faisait de la, légion un ensemble complet et qui l'avait pourvue de tout ce qui lui était nécessaire s'appliquait aussi à la. religion' elle transportait son culte avec elle, comme elle transportait son artillerie ou ses ateliers. Il fallait donc qu'elle adorât des dieux mobiles, ce qui était contraire àl'essence même de la religion romaine u, où les dieux ne pouvaient être enlevés ni déplacés sans des cérémonies minutieuses. De là la nécessité de limiter le culte légionnaire à un petit nombre de divinités, facilement transportables. Sous la République, d'après les recherches très intéressantes de M. Domaszewski, ces divinités militaires étaient au nombre de cinq. Au temps où les anciens Latins représentaient leurs dieux sous la forme d'animaux, on les avait assimilées à certains oiseaux ou quadrupèdes, et, pour pouvoir les avoir toujours avec eux, les légionnaires en avaient fait des enseignes. Pline 13 nous apprend qu'avant Marius, « erat aquila prima cum quatuor aliis lupi, lninotauri, equi, aprique singulos ordines anteibant. » Dans ces emblèmes, M. Domaszewski a reconnu J upiter (aigle), Mars (loup), Quirinus (sanglier), -ces trois divinités forment la triade primitive du culte romain, -Jupiter Feretrius (minotaure), le dieu de l'offensive, et Jupiter Stator (cheval), le dieu de la défensive 74. L'origine de ces signa explique pourquoi, même transformés, ils restèrent toujours un objet de culte pour les soldats. Ils étaient, en effet, à l'époque impériale, suivant le mot de Tacite, les propria legionum rumina 13. Qu'il s'agit de LEG 1066 LEG 1 aigle, enseigne de toute la légion ', des signa manipulaires 2 ou des animaux servant d'emblèmes aux différentes légions 3, la piété des troupes les entourait de la même vénération. L'aigle lui-même, au dire de Dion, était porté au haut d'une hampe terminée en pointe par le bas, dans une sorte de chasse affectant la forme d'un tem ple (vaùç gtxpdç) `. En ou tre, chaque camp avait sa chapelle des enseignes où l'on déposait l'aigle avec les autres signa légionnaires 5. On voit une représentation très nette de ces édifices sur l'épée de Tibère «fig. 4409) et sur un bas-relief de Vimi nacium (fig. 41.10) 7; = t t • . T on y distingue nette ment au centre l'aigle, et de chaque côté les signa et les emblèmes. Une pierre votive de la légion Xe Gemina nous montre aussi un emblème, le taureau, dans une édicules (fig. 4411). Pareille place était ré servée aux images des empereurs portés sur les signa et aux vexilla des détachements ° C'est dans ces temples qu'aux jours de fête et, en particulier, au jour anniversaire de la création de la légion (natalis aquilae) 10, on venait offrir' 1 des sacrifices et célébrer les cérémonies du culte. Nous dirons ailleurs quels rapports unissaient cette chapelle avec le guaestorium A côté des enseignes, les légionnaires honoraient d'un culte spécial l'empereur et sa famille. En expédition et dans les camps de marche, les hommages ne pouvaient s'adresser qu'aux images du prince représentées sur des médaillons pendus aux enseignes ou cousues sur les vexilla rimAGO(12 ; mais dans les camps permanents il en était autrement On élevait aux empereurs des statues de pierre ou de métal précieux et on les disposait sur des piédestaux ou dans des édicules, au praetoriurn ou ailleurs"Al n'est pas de garnison légionnaire où l'on n'ait point trouvé des bases de statues ou même des statues impériales, en grand nombre Puis venaient certains des grands dieux de l'Olympe (dii militares' bellorum dei16), Jupiter, Junon et Minerve, soit seuls, soit associés '; Mars, le dieu militaire par excellence, Mars ultor 18, Mars militari., 19, Mars nailitiae potens 20, Mars campester 2t • la Victoire, sa compagne 29, Victoria Aeterna 23, Victoria Jledux 21; et au me siècle, dans certaines parties de l'empire, Hercule u ; quelques-unes de ces entités auxquelles les Romains de ]'Empire accordaient tant de place dans leur religion : Fortuna 28, Honos 27, Virtus 28, Pietas 29, Bonus Eventus 30 ; et enfin la Disciplina militaris 31, sans laquelle il n'y a pas d'armée digne de ce nom. Ces divinités diverses avaient aussi, dans les camps permanents, leurs chapelles et leurs autels, devant ou dans le praetoriurn [PBAETORIUM . 011 les trouve sculp tées sur les monuments élevés par les légionnaires (fig. 4412)". On ne s'étonnera pas de voir figurer également, parmi les divinités honorées dans les camps, les dieux protecteurs dulieu oit ils étaient établis, des corps qui y étaient fixés, des édifices qui s'y élevaient, Genius legionisGenius castrorum 34, Geniuspraetorii 35, Genius valetudinarii 35, Genius centuriae37, bene/eciariorum 3s scholae 39 ; et des divinités qui réunissaient toutes les précédentes sous un seul vocable, les Lares militares 40. Il ne s'est agi dans l'énumération précédente que des dieux adorés par la légion dans l'intérieur du camp, que du culte officiel de l'armée. On comprend que la piété ou la superstition des soldats ne s'en contentât pas en temps de paix. Ils s'étaient habitués, avant leur entrée au service, à révérer d'autres divinités, chères à leurs compatriotes, à leur cité, à leur famille ; ils en conservaient le culte sous les drapeaux. De plus, ils trouvaient dans les pays où le sort leur désignait une garnison des divinités LEG 1067 -LEG locales, qu'ils apprenaient à connaitre et à vénérer. Ils souhaitaient pouvoir s'adonner à ces dévotions toutes privées. L'État n'avait aucun motif pour y mettre obstacle : il les ignorait. Libre aux officiers et aux soldats de se créer en dehors du camp des sanctuaires où, dans leurs moments de liberté, ils allaient porter leurs hommages au dieu de leur choix. Cette tolérance religieuse n'était point, d'ailleurs, une neutralité absolue; les légionnaires élevaient ces temples annexes sur le territoire de la légion, ce qui suppose une concession de terrain par l'autorité. A Lambèse, le temple de Jupiter Optimus Maximus Dolichenus était situé aux portes mêmes du camp' ; celui d'Isis et Sérapis, ce qui est plus caractéristique encore, fut construit gràce à la main-d'oeuvre légionnaire par toute une série de légats2. A Carnuntum, on a déblayé récemment, tout à côté de 1 amphithéàtre, un sanctuaire dédié à Némesis '. II était rempli d'ex-voto consacrés par les soldats. La statue de la déesse avait été offerte par un primipile de la légion XIVi Gemina. N. Armement et costume des légionnaires. Nous avons déjà dit, en parlant des différentes phases par lesquelles a passé la légion romaine, que l'armement des soldats s'était modifié suivant les époques et suivant les besoins de la tactique. En consultant pour la période républicaine les textes des auteurs, pour l'Empire les écrivains et les monuments figurés ''t, on peut arriver à des conclusions assez précises. Il ne sera point question ici des cavaliers dont l'équipement a déjà été étudié [BOUTES]. Sous le régime de la constitution servienne, le légionnaire de la première classe était revêtu d'une armure complète. constituée par le casque [GALEA[, la cuirasse [aonica, un bouclier rond [ciaPEUS' en airain et des jambières (ocreae) ; il avait de plus un glaive [cLAUitsï, une haste [ûASTA] et des javelots [TELUM] 3. Aux soldats de la deuxième classe étaient attribuées les mêmes armes, moins la cuirasse ; le clipeus était remplacé, pour eux, par le scutum (bouclier de forme rectangulaire) ; l'armement de ceux de la troisième classe était semblable, à l'exception des jambières. Enfin, ceux de la quatrième étaient dépourvus de toute arme défensive et réduits à la haste et Pour la période suivante, qui correspond à l'introduction de la tactique manipulaire, Polybe 6 nous a conservé de précieux renseignements. D'après lui, les trois genres de légionnaires, hastats, princes, triaires, portaient une armure qui ne diffère que par les détails. Il s'exprime ainsi : Les plus jeunes sont tenus d'avoir pour arme une épée, des javelots et la parma. C'est un bouclier d'une construction solide et assez grand pour couvrir le corps ; il est circulaire et e trois pieds de diamètre. Ils ont, en outre, la tête garnie d'un casque sans crinière, mais recoin cil quelquefois de la peau d'un loup ou d'un autre animal, pour servir à la fois de protection et de marque distinctive. Les chefs peuvent ainsi plus facilement reconnaître ceux qui se sont signalés par leur courage. Le bois de leurs javelots a généralement deux coudées de long et un doigt d'épaisseur. La pointe, qui a une palme, est tellement acérée, effilée, que dès le premier coup elle se recourbe et que les ennemis ne peuvent la renvoyer.. Les soldats qui viennent au second rang pour rage, PL que l'on nomme hastaires, doivent porter une armure complète. Cette armure se compose, chez les Romains, d'un bouclier convexe, large de deux pieds et demi, long de quatre. Les plus longs ont une palme de plus... Les hastaires ont aussi une épée qu'ils portent suspendue au côté droit : ils l'appellent ibérique. Excellente pour percer, elle est tranchante des deux côtés. La lame en est forte et solide. Ajoutons à cela deux javelots, un casque d'airain et des jambières. De ces javelots, les uns sont .épais, les autres minces. Parmi ceux qui sont épais, plusieurs sont ronds et ont une palme de diamètre ; d'autres sont carrés et ont une palme sur chacun de leurs côtés. Les minces sont semblables aux épieux de médiocre grandeur que les hastaires portent avec le reste. La longueur de la hampe et de tous ces traits est d'environ trois coudées : le fer qui y est adapté a la forme d'un hameçon et une longueur égale à celle du bois; on l'attache si fortement, pour en assurer l'effet, par des liens et de nombreuses agrafes jusqu'au milieu du bois, que le lien ne manque jamais avant que le fer soit brisé, Or, à son extrémité et à l'endroit où il s'unit au bois, ce fer a une épaisseur d'un doigt et demi, tant les Romains apportent de soin et d'attention à consolider cette jointure. De plus, leur casque est surmonté d'une aigrette ou de trois plumes rouges ou noires, droites, d'une coudée environ Ces ornements placés au sommet de l'armure semblent doubler la taille des soldats... La plupart ajoutent à cela une plaque d'airain, de la largeur d'une palme en tous sens, qu'ils mettent sur leur poitrine et qu'ils nomment xao8toé é),ai : c'est le complément de l'armure. Ceux qui possèdent plus de mille drachmes, au lieu de cette défense, se ceignent la poitrine, d'une cuirasse. Les princes et les triaires portent les mêmes armures, si ce n'est que les triaires ont des lance; au lieu de javelots. » De ce passage il résulte que tous les légionnaires étaient armés d'un casque, d'un bouclier, de jambières, et d'une cuirasse, Sous cette cuirasse, faite de cuir, vers la région du coeur, était une plaque de fer haute et large de trois quarts de pied. Les hastes seuls étaient vêtus d'une cuirasse composée d'anneaux ou de plaques de métal. Comme armes offensives, les soldats de cette époque portaient tous le glaive espagnol qui semble avoir été introduit par Scipion au cours de la deuxième guerre punique ; leshastats et les princes étaient munis du pilant, les triaires de la laasta. Mais, assez rapidement, le pilant fut donné à tous les soldats sans distinction : il devint l'arme caractéristique de la légion romaine PILEM] Les vélites ne portaient pas de cuirasse ; leur casque était de cuir, leur bouclier rond et léger; ils étaient armés de l'épée espagnole et de hastes (hasta velitaris`, e, Les écrits de César ou de ses lieutenants et les fouilles faites autrefois sur l'initiative de Napoléon III à Alise LAP~CENNJV C FAY°LVCM I L' LEC 1f-S Ew LEG -tl 1068 -LEG et ailleurs, nous donnent sur l'armement et le costume des légionnaires dans les dernières années de la République des renseignements assez précis'. Ils étaient armés du glaive espagnol et du pilum comme à la période précédente 2; mais il n'est plus question des deux pila, un long et un court, dont parle Polybe : chaque soldat ne portait avec lui qu'un seul pilum 3. Il n'est pas fait mention non plus, parmi les armes des légionnaires, d'une petite épée (pugio) que l'on trouve figurée sur les monuments de l'époque impériale : cette arme n'était pas réglementaire. D'ailleurs, le pugio parait plutôt avoir été réservé aux officiers 4. Les armes défensives se composaient d'un bouclier, d'un casque et d'une cuirasse. Le bouclier des fantassins était le scutum rectangulaire 6, le casque, la galea 6 Pour la cuirasse, la question est un peu plus compliquée Les officiers, depuis les tribuns jusqu'au général, cela est certain, portaient une cuirasse de fer e ; pour les soldats, le doute s'impose. De certains passages on peut déduire que leur cuirasse était assez pesante ° et qu'elle brillait au soleil 10, toutes données qui obligent à supposer, dans sa composition, l'emploi du métal. Mais, comme, d'autre part, les soldats étaient astreints à des travaux qui nécessitaient une souplesse de mouvement incompatible avec la rigidité d'une cuirasse faite tout d'une pièce", on peut supposer que la tordra des légionnaires de César était ou une cotte de cuir renforcée de pièces de métal, ou la cotte de mailles, ou la lorica segmentata, telle qu'on la voit figurée sur la colonne Trajane f2. Pour les centurions, on possède un texte assez embarrassant": il y est fait mention d'un centurion de l'armée de César qui traversa un bras de mer a duabus tonals onustus ». Les unis ont vu dans ces deux lorïcae les deux moitiés d'une cuirasse de métal, les autres une cuirasse de cuir recouverte d'une lorica de fer. On ne trouve pas, dans les écrivains militaires de cette époque, la mention de jambières, comme dans Polybe. Sous la cuirasse, les soldats portaient une tunique; comme manteau, ils avaient un sagum". Nous ne possédons malheureusement pas, pour cette période de l'histoire romaine, de représentations figurées relatives à des légionnaires : le monument de saint Rémy, qu'on a souvent interrogé à cet égard, et l'arc d'Orange, ne présentent aucune garantie de fidélité dans l'exécution des costumes militaires13. Les légionnaires ne se servaient (l'habitude ni d'arcs ni de frondes : ils en laissaient l'usage aux auxiliaires , FuitClIChES, SAG-ITTAHU . Exceptionnellement pourtant, au siège de certaines villes, ils usèrent eux-mêmes de ces sortes de projectiles. Parmi les balles de fronde rGLANDES qui ont été recueillies à Ascoli et qui remontent au temps de la guerre des Marses, quelques-unes portent inscrits les noms des légions XI et XV 1G ; sur celles qui proviennent du siège de Pérouse de 713-7144 (de Rome), on a lu le nom des légions II, IX, XI et XII '7. L'armement et le costume des Iégionnaires sous l'Empire nous sont connus par certains passages d'auteurs latins ou grecs, comme Tacite ou Josèphe, par des repré sentations funéraires qui, du moins jusqu'à la fin du 1°l' siècle, ont une certaine importance, les soldats y figurant avec leurs armes, ce qui ne se rencontre plus aux périodes suivantes 18 ; enfin par les sculptures des colonnes et des arcs triomphaux élevés pendant le ne siècle. Ces documents nous permettent d'arriver à quelque précision. On peut dire, d'une façon absolue, que le vêtement se composait d'une tunique et d'un sagum. La tunique, qui parait sur les mo numents funéraires aussi bien que sur les bas-reliefs militaires, était peut-être de cou leur rougeàtre (russata) '°; le sagum est très visible sur un monument du musée de Strasbourg reproduit ici (fig. 1413) 20 Pour l'arme ment, il faut tenir compte des différentes époques. Les armes défensives consistaient en un casque, une cuirasse, un bouclier, un t'i.n nutam. Le casque, de métal, était garni de deux pièces latérales, couvrant les oreilles et se reliant sous le menton. La forme en a été nettement indiquée à l'article GALEA. Le sommet était surmonté d'un panache, comme on le voit sur la tombe du légionnaire C. Valerius Crispus à Wiesbaden (fig. 14111)2', et sur la colonne de Marc Aurèle (fig. 11115), ou d'une sorte d'anneau comme sur la colonne de Trajan et sur l'arc de Septime Sévère (fig. -4416). Au début (le l'Empire, la cuirasse fut probablement en cuir, consolidé sans doute intérieurement de plaques de fer : le légionnaire de Wiesbaden en est revêtu et aucun monument de cette date, relatif à un simple soldat, n'en présente d'autre'. On la complétait par deux pièces (humeralia) protégeant les épaules. Le bouclier réglementaire était le scutum, muni à sa partie antérieure d'un umbo saillant, au milieu d'une pièce rectangulaire qui formait la partie centrale du bouclier. On en a trouvé plusieurs spécimens, dont l'un, découvert en Angleterre [connus], est particulièrement intéressant (fig. 441317). Un texte de Végèce nous apprend que cette partie centrale, sinon le bouclier tout \LCF ERTA.MEN } A.C.R1sPvs MLLEG.-viti AVGANXLST'llXX14F F-C LEG 1069 LEG entier, était peinte et constituait un épisème qui permettait aux différentes cohortes de se reconnaître : Ye milites aliquando in tumultu /)roelü a suis contubeenalibus aberra l'ent, direreis eolrortibus diversa in .scutis signa pinge liant, ut ipsi no minant, dig mata ; et, en effet, le bouclier était la seule partie de l'armure qui différencie les légions entre elles'. Le reste de l'arme était, d'ailleurs, égalementornementé, ainsi qu'il ressort des repré sentations des colonnes Tra jane et Aurétienne. Les cuisses, sur le monument de Wiesbaden, sont défendues par des bandelettes de cuir formant comme une sorte de culotte très courte. Une ceinture [c1NGreumj entourait la taille, à laquelle s'adaptait un tablier formé de lanières doublées de métal, qui retombait sur le ventre et le basventre pour les protéger. Les pieds étaient chaussés de la caliqa, qui est essentiellement la chaussure des simples soldats et des officiers de grade inférieur [cALIGA]. Autour du cou s'enroulait une cravate, utile surtout aux légion V. paires dans les pays froids [FOCALE] ; on la distingue très nettement sur le relief de Wiesbaden (fig. 4111). Comme armes défensives, les soldats portaient, ainsi qu'à l'époque républicaine, un large glaive, maintenu au côté droit par un baudrier suspendu à l'épaule gauche [BALTEOS'ou par une ceinture, et le pilum. Parfois, ou voit, sur les monuments, un poignard ou une petite épée supplémentaire attachés au flanc gauche. Au ne siècle, quelques détails de cet armement ont changé. La cuirasse de cuir a fait place à la cuirasse, dite segmenta/a, faite de plusieurs pièces. Celle-ci se compose essentiellement de deux carapaces de bronze réunies sur le dos par deux charnières et par (les boucles sur la poitrine; la taille et les épaules sont garnies de bandes de cuir, suivant les uns de lamelles de métal, suivant certains', juxtaposées et se recouvrant l'une l'autre [f,mueA, ciNGtLOM]. C'est la cuirasse qui caractérise les légionnaires sur la colonne de Marc Aurèle' et sur l'arc de Septime Sévère ; on la verra aussi sur le groupe de soldats de la figure !e118, empruntée à la colonne Trajane : elle montre une troupe de légionnaires en marche, qui portent leur casque suspendu à l'épaule droite, leurs provisions et ustensiles au haut d'une perche (SABCINA]". Le bouclier rectangulaire semble ne plus être à cette époque le seul dont on fit usage régulièrement ; le bouclier oblong se remarque au bras des légionnaires sur la colonne de Marc Aurèle et sur l'arc de Sévère; sur la colonne Trajane, il est réservé aux prétoriens et aux auxiliaires. Sur toutes ces représentations (fig. 1415, 4416), la tunique descend jusqu'au genou; Ies jambes sont nues et chaussées de la caliga. Pour le lue siècle et la période suivante, nous n'avons plus de documents figurés concluants. Les dessins que l'on possède des colonnes de Théodose et d'Arcadius nous offrent peu de garanties pour l'exactitude des détails; et, en tout cas, il n'est pas possible d'y distinguer les 135 I 'lui-ei aurait eu t a faiblesse d'y. consentir. Les Romains, désormais sans défense, auraient été de ce fait drotivés par les ',,s Goths, ctaca Ze Ç rite' iLt o7o légions des autres troupes. Tout ce que e peut dire, c'est que l'armement général ne semble point avoir éprouvé de guindes moditications. West aussi ce qui. ressort d'un passage de Végète. D'après lui' les soldats Légionnaires, qu'il divise encore en l' partaient Basques (i d (cri,,. `['raie), jambières «+ teae), deux épées (.spatha et .s ernispathium), un seutum, dans lequel ils dissimulaient cinq javelots (ptuirtéc°tae); et enfin, au lieu du pi/a.'m., deux lances, l'une assez grande (.s~?icrt lem), l'autre plus petite ('erutuon). La natore de la cuirasse dtsignée dans ce texte par tatatracta est difficile à reconnaître ; car Végèce se sert la plupart du temps de ce mot pour indiquer une cuirasse h 'conq .se 2. Peut-être, ( p dent, faut-il y -voir la cuirasse SgUanaata ou haanata, la, cotte de n elles î.ArAFinale° TA). Dans en autre isage, d'ailleurs', il ajoute un renseignement contradictoire ; a, partir de Gratien, la, plupart des soldats, par mols se, auraient deadé à l'empereur la oernaiss en u aban_ lit arlres tra. Le costume distinctif des divers seuls-officiers ou spécialistes de la légion _e nous et? ■-,,une " ; il est probable, d'ailleur , qu it ne di d't I d. ries simples légionnaires que par les détails. Pour les particularités relatives à l'armement des musiciens, e l'uniforme des porteenseignes, voir conte et sIua SMILITARIA. Nous possédons pour les options légionnaires deux monuments : le plus important a été trouvé à Aquincum et appartient au musée de Pesth '(fig. 4413), On y voit un homme revêtu d'une tunique terrée à la, taille par une ceinture à laquelle est attachée une épée. Il est couvert d'un sagtcrrl, dont les pans retombent par devant, présentant une suite de festons. La main droite =appuie sur une lance ; de la gauche il tient des (ablettes, indices de ses _onctions administratives, Les pieds sont chaussés de Mique. L'inscription apprend qu'il appartenait e la légion Adjutrix ; le monument remonte donc au tu' siècle', le second, tout récemment publié ', vient d'Angleterre il est conservé dans le Grosvenor Museum à Chester. fie défunt y porte les x'mène"cs insignes : saguni retombant en te sur le devant 7.u corp épée, lance, ,lettes; il servait dans la légion N.X' 'aleria Victrix. Nous sommes assei. bien inforrriéo pour le costume des centurions, go qua tre, représe 2frs plue nl ?s possédons le tombeau de M. Caelius, tu lors de la défaite de Varus (fig. 44201 8, celai de Or Sertorius Festu.s (f g., 4421 ° celui dei 1, 1 ubdius Severu,s t g. 4.122)'6 et enfin celui de M. e'ao;onius lraeilis8l (fig. 4423), morts tous vers la première moitié du i" siècle, Les centurions portaient, comme les légionnaires, une cuirasse : mais il semble que la nature en ait varié avec 1 pJTC A L I b t v` l, E01,1. En ('L EG X°v A nLL IIANNURI0.I:vl I v i „o~ a dlt ' EG. ' Et j V Li, IÇ lit`\i' N T H y E LE(; 1071 L.E(1 1's époques; celle de M. Caelius est de cuir avec trois rangs de lambrequins retombant sur le ventre et autant sur chaque bras ; celle de Favonius est analogue, les deux autres ont une cuirasse du genre dit squa/nata. M. Domaszewski a. supposé que Claude avait eu la pensée d'imposer ce genre de cuirasses à toute l'armée romaine, maïs qu'il avait renoncé assez rapidement'. Et., en effet, nous n'en trouvons plus trace sur les monuments figurés du Ire siècle, en particulier sur les colonnes, où on a certainement représenté des centurions, sans que nous puissions, d'ailleurs, les reconnaître. On y revint peut-être plus tard : car Végète leur assigne des catatractae comme aux autres légionnaires'. Leur grande tenue comportait, en outre, une riche tunique (fig. i4H2.1), des jambières ornementées (fig. 'tir2F 4422 et r r'3j, et peutêtre des caltai (fig. 'sra21 et. 4423). En temps ordinaire, ils portaient la. caliga Leur casque, comme l'indique V'égèc , n'offrait au tune particularité, sinon il 'lre couronné d'un panache transversal 'cristae fraiisianis e) parfaitement. risible à la figure .i I`_2 ; ce panache était. blanc d'argent, art cvler'ïus agraoscereiétu,' a suis Leur manteau tuait le .s ipi' ii (fig. a/tdl et (I-iil3). Le relief sculpté au-dessous de l'épitaphe de Calidius (fig. l'iàb) semble prouver clades étaient montés, quelques-uns d'entre eux, tout au. moins; c'est ce qu'on peut inférer aussi d'un texte de Dion ". Chacun sait qu'ils portaient comme insignes du commandement un cep de vigne wTisj, qui les caractérise sur tous les monuments. Comme on le voit sur un de ceux-ci fig. 11331, ils avaient certainement un glaive. Il faut aussi, si l'on en croit Végèce, ajouter, comme dernier complément au costume, un suit.lm in ° Le vêtement et 'armement des officiers supérieurs de la, légion' présente de grandes différences avec tous ceux que nous S«enons de décrire. Sans parler de leur bouclier, qui était sans doute plus orné, et. delelr casque dont le panache devait èt.re plus fourni , t plus brillant, mais dont nous n'avons pas conservé d'exemples certains, leur cuirasse était le corselet plein et droit (Ooipa a aots,) à lambrequins et à épaulières ; leur épée, le. t,lamlitrs ou plus proprement le /amies , pendu à l'épaule. par un baudrier ou supporté par une ceinture ; leur manteau consistait en un srrgntty plus riche que celui de leurs subordonnés. M. lfolnms..'vo croit qui' sous la République, les ' i-bans se distinguaient par le riants, comme les généraux par le paludaiue'ofuia et les centurions par le ee'p de vigne d'où serait venu le diminutif de l•u)°rrius appliqué au tribun par opposition avec la pourpre du générai " [C1.. vus]. S'il en est ainsi, on peut croire que sous l'Empire le légat, et le tribun se i' , v,rna.issaient r la :s doute aussi, 1m. tribuns lai ici ues et les angr siicla.ve5. Les officiers uasaient point de aitiga '.in, sinon ce petit ceinturon souple noué sur l'estomac'0 dont l a été question à l'article crxarl.um. 11 faut enfin signaler qu'ils portaient des braies qui tombaient jusqu'au genoux et que leur chaussure était le calceu..s. ;Malheureusement, les représentations précises de légats et de tribuns manquent complètement sur les monuments funéraires et sont très rares sur les bas-reliefs des colonnes, ou, du moins, très difficiles à reconnaître. .Nous possédons pourtant certainement, sur la colonne Tra,jane, le portrait de deux légats de légions : leur présence à la tête du groupe de légionnlu'es cité plus haut et en al-ant des porte-enseignes ne laisse aucun doute à. t . vrd (fig. li'4d'4?", ils sont cui rassés et couverts d':.;1 'Let retenu à l'épaule par une fibule; dl' la main gauche ils tenaient un bâton de commandement ou un rouleau très détérioré aujourd'hui. :Ailleurs, derrière l'empereur, et à côté d'un autre légat, figure un jeune officier, dont les braies et tes caltai indi LEG 1072 LEG quent la dignité ; sa cuirasse est de peau et, il n'a pas d'épaulières. M. Cichorius pense que ce pourrait être un tribun, à moins qu'il ne faille y voir un préfet de cohortes auxiliaires, ou même un tribun de cohorte prétorienne. Dans le doute, il convient de s'abstenir de toute affirmation 1. IV. LÉGIONS JUSQU'A DIOCLÉTIEN. Nombre des légions. Le nombre des légions romaines a varié suivant les époques et sui vant l'importance des guerres que l'État a eu à soutenir. En principe, et pendant les deux premiers siècles de la République, l'armée se composait chaque année de quatre légions, réparties en deux divisions commandées chacune par un consul. Le consul recrutait les deux légions dont il avait la direction 2. Mais la durée et l'extension des guerres nécessitèrent un déploiement de forces plus considérables, et les quatre légions annuelles furent assez rapidement remplacées par six légions et même davantage. L'histoire de la seconde guerre punique, pour laquelle nous avons beaucoup de renseignements, est à cet égard très instructive. J'emprunte à un travail de M. Schemann 4 les indications suivantes qui sont le résumé de ses recherches. En fait, chaque année, par le sénatus-consulte de e.rercitibus, le sénat arrêtait le nombre des légions20, ainsi que celui des socii, et les répartissait en autant d'armées qu'on créait de provinces militaires italiques et extra-italiques2l. Il décidait, en outre, si les légions déjà formées seraient licenciées" ou maintenues23, s'il y avait lieu de procéder à des levées24 pour compléter les armées existantes" ou pour en former d'autres 26. En règle générale, il décrétait annuellement le recrutement de deux nouvelles légions97 ; mais il pouvait augmenter sensiblement ce nombre qui alla jusqu'à 8 au moment de la guerre de Persée 28. A partir du début de la deuxième guerre punique, il y a, en principe, à côté de l'armée active, une armée de réserve composée de deux29et même de quatre légions30: ce sont les legiones urbanae 31. Ce qui caractérise les armées légionnaires dans tonte cette période, antérieure à Marius, c'est qu'elles étaient formées d'un nombre de légions tout à fait variable et que leur existence n'avait aucune durée fixe. Les réformes introduites par Marius apportèrent à cet égard de grands changements, ainsi qu'il a été expliqué plus haut. Du jour où, contrairement à l'ancienne coutume, les citoyens des classes ne furent plus seuls admis dans l'armée, où les capile censi purent être enrôlés, ceux-ci restant au service pendant de longues années, les légions acquirent une sorte de permanence, et on commença à les distinguer entre elles par un numéro qui leur était propre. Ce n'est pas à dire qu'on ignorait jusque-là toute numérotation: on trouve dans Tite Live des exemples de légions spécifiées par des chiffres de classement", et l'on sait que le, numéro d'un certain nombre de celles qui prirent part au siège d'Asculum pendant la guerre sociale figure sur des balles de fronde recueillies aux environs de cette ville 33. Mais cette numérotation, qui comprenait la série de toutes les légions de la République, se renouvelait chaque année, si bien qu'une légion, sans voir son personnel complètement modifié, pouvait recevoir un numéro différent de celui qu'elle portait dans la campagne précédente, si le rang qui lui était attribué dans l'ensemble de l'armée n'était plus le même. C'est précisément là ce qui commence à changer vers l'époque de César. Ainsi, pour n'en citer qu'un exemple, la légion Ve qu'il recruta en Gaule 34 se trouve citée plusieurs fois avec le même chiffre dans la suite de ses guerres83. Cette persistance de la numérotation Initiale n'est point encore une règle établie, mais elle a tendance à s'établir. De ces légions numérotées et quelquefois même caractérisées par un surnom, nous connaissons un certain nombre, non seulement par les auteurs, mais encore par des monuments épigraphiques : une legio II de Pompée 36, une legio II Sabine," , une legio 1111 Sorana au temps des triumvirs38, une legio V Urbanau, une legio VI Gennella, qui est une légion de César40, une legio rH, une des plus célèbres de son armée 41, une legio VIII Mutinensis42, une VIIIIa Triuinphalis43, une X Veneria 4'", une XII Paterna 42, une XIIX de Cornelius Spinter46, une XXX Classica47, une XXXIII une XXXX1 "9, etc. En même temps, le nombre, des légions se multipliait d'une façon excessive, chaque compétiteur levant des corps nouveaux pour grossir l'armée sur laquelle il basait ses espérances. César, qui en 58, en partant pour la Gaule, avait 6 légions 20, était à la tête de 11 légions en 5161; c'est avec le même nombre qu'il combattit à Phar LEG 1073 LEG sale'. A sa mort, le total de ses légions se montait à 37 2. Pompée avait avec lui à Pharsale 11 légions ; le reste de son armée se composait de 7 autres légions, 6 en Espagne et 1 en Afrique Brutus et Cassius alignèrent à Philippes 19 légions tandis que leurs adversaires, qui n'en engagèrent qu'un nombre égal, en possédaient plus d'une quarantaine °. Au moment de la bataille d'Actium, Antoine pouvait mettre en ligne 30 légions, 19 formant l'armée de terre °, 8 étant sur la flotte 8 et 4 autres se trouvant en Égypte °. Les monnaies de ce général nousles mentionnent avecleurs numéros/0. La figure 4425 reproduit, comme spécimen, une de ces monnaies. L'armée d'Octavien comprenait quarante à quarantecinq légions'' . La bataille gagnée, les troupes du vaincu venaient grossir. l'armée du vainqueur. Celui-ci en licenciait une partie et gardait le reste. Ainsi, après la bataille de Philippes et la mort de Cassius et Brutus, quarante mille de leurs soldats furent incorporés dans la légion d'Antoine et d'Octave 12. Il en fut de mème après Actium : Octavien vainqueur se trouva à la tête de plus de cinquante-sept légions, suivant Marquardt", d'une cinquantaine suivant M. Mommsen'". C'était beaucoup plus qu'il n'en fallait pour la sécurité de l'empire. Il en supprima un grand nombre et envoya les soldats qui les composaient dans des colonies". Quant aux autres, il les conserva et leur donna une organisation définitive, sans créer, d'ailleurs, de cadres nouveaux ni de dénominations nouvelles. ll leur garda les numéros et les surnoms qu'elles portaient, soit dans son armée, soit dans celle de son compétiteur, ce qui explique qu'on trouve plusieurs fois le méme numéro dans la liste des légions impériales 16. Voici, d'après M. Mommsen, comment les choses se passèrent". Lorsqu'il organisa l'armée permanente en 725=29, Octavien, craignant de froisser les susceptibilités du peuple romain, déclara publiquement que son armée ne compterait plus que douze légions ; il licencia donc celles dont le chiffre distinctif dépassait le nombre douze. A ces troupes il ajouta seulement six légions, empruntées à l'armée d'Antoine, ou plutôt cinq légions d'Antoine et une de Lépide, qui avalitpassé antérieurement àAntoine'3, légions qui, d'après une observation assez récente, auraient été celles qui avaient déjà servi sous César". Mais les guerres qui éclatèrent sur le Rhin en 757 = 4 et en Illyricum dix ans plus tard l'obligèrent à augmenter l'effectif de l'armée impériale. II créa donc pour y faire face huit nouvelles légions, qu'il cantonna ensuite en Germanie et sur le Danube et auxquelles il donna une numérotation supérieure à douze. Cela portait le nombre de ses légions à 26. Mais, d'autre part, trois des légions engagées avec Varus ayant été détruites et rayées des cadres de l'armée, il les remplaça par deux seulement; de sorte qu en somme le total des légions d'Auguste, tant de celles qu'il conserva après Actium que de celles qu'il établit dans la suite, se monta à 25. Cette théorie a trouvé des contradicteurs. Ch. Robert, le plus ardent d'entre eux, l'a combattue dans une note assez développée 20. Pour lui, rien ne justifie l'adoption du chiffre de dix-huit légions après Actium ; toutes les probabilités historiques sont, au contraire, en faveur de la conservation par Octavien vainqueur d'un pied militaire plus considérable. En conséquence, les huit légions numérotées de XIII àNX doivent remonter beaucoup plus haut que l'année 6,sans doute à l'organisation de l'arméeperrnanente 21. Quant au nombre des légions àlamort d'Auguste, personne ne conteste qu'il se soit élevé à vingt-cinq 22. Dès le règne de Claude, on constate la création de deux nouvelles légions par dédoublement de légions déjà existantes2U, la XV Primigenia et la XXII Primigenia. Néron constitua la I Italica et la I Adjutrix; Galba, la VII Gemina. Sous les Flaviens, le nombre total des légions ne fut pas modifié, mais quatre des anciennes disparurent et furent remplacées par quatre nouvelles : II Adjutrix, IV Flavia, XVI Flavia et Jlinervia; sous Domitien, deux légions sont supprimées àla suite de défaites; Trajan en crée deux autres, la II Trajana et la XXX Ulpia; le numéro donné à cette dernière nous montre qu'à cette époque le nombre total des légions romaines était de trente. Au temps de Marc Aurèle, la formation des deux légions Italica vint combler le vide résultant de la suppression de deux autres sous lladrien, mais sans changer la somme des légions existantes. Nous possédons, en effet, un document officiel de ce temps, un laterculus legionui'n rédigé entre 120 et 170 ap. J.-C. et gravé sur une colonne conservée au musée du Vatican26. On y lit le nom de trente légions, celles qui existaient à la fin du it siècle, énumérées dans l'ordre géographique. A la suite, et rajoutées après coup, figurent trois légions créées par Septime Sévère (I Parthica, II Parthica et III Parthica), ce qui porta le total des légions romaines à trente-trois : c'est le chiffre donné par Dion Cassius". Il se maintint jusqu'à Dioclétien. Numéros et surnoms des légions'-'. Nous avons déjà indiqué que la plupart des numéros portés par les légions impériales sont ceux qui leur étaient attribués soit dans l'armée d'Octavien, soit dans celles d'Antoine. Il en est de même d'un certain nombre de surnoms, en particulier de ceux qui provenaient du nom des provinces où les légions avaient combattu ou avaient été levées (illacedonica, Gallica, Cyrenaica, Ilispana, etc.). D'autres furent tirés de noms de divinités comme Apollinaris ou Ylinervia ; d'autres de particularités relatives à leur formation (Adjutrix, Primigenia, c'est-à-dire obtenue par voie de dédoublement, la Primigenia étant l'ancienne légion ; Gemella, c'est-à-dire obtenue par voie de fusion). Certaines légions portèrent le nom de l'empereur qui_ les créa : Augusta, Claudia, 1'-'aia, Tee 1.,EG 107 i'r LEG ?ana. II est impossible d'insister ici sur tous ces surnoms ; l'origine d'un grand nombre d'entre eux sera expliquée à propos de l'histoire particulière de chaque légion. A. côté de ce surnom caractéristique, on en rencontre d'autres que les légions recevaient comme récompense de leur dévouement à l'empereur ce sont les épithètes Pie, f idelis, (Ponstans, P irrna, Ï ,r'tri;x•, etc. De plus, à partir de Caracdla, l'usage s'établit de donner à toutes le légions un surnom supplémentaire tiré du nom du souverain régnant, pour bien affirmer l'union du prince et de l'armée, pour marquer nettement la. soumission de celle-ci celui-là. On voit alors apparatn'c les épith; ie. de Ànionie e «C-rai 1u eiferinna, .1' rc évèrl Al ~ litres 'io (Maximin), Gordien), Ph il i , ., (philippe', (/ntlilda e: (Ga1 lien )„ etc., qui fournie e nt des donnés criminologiques fort utiles sur les inriptions. Insignes des 1On a reconnu depuis longtemps que chaque tr .on nvsit un ou plusieurs insignes, généralement des Pnr•naux, qui la caractérisaient; ces insignes se rencontrent soit. soit fuenle seuls, et è la plies du nom de la légion, noois sur des monu ments figurés et sur ile, menu exemple, sur une pierre trouvée à 13enwell ( ~e lit les mots Lep. II :2a», sur une eus.',_ , Pstee d"un Capri cor°ne et d.'un Pégase «fig. sur une plaque de bronze découverte ii Crémone, 1'bu action Leq. 1711 .L~c. figure entre deux disques supportés par , oie l'on voit un faureau et une chèvre ' (flet, Une brique découverte dans le Castellum de 13ntzbaclt montre è côté des mots Leg. XXII Pr. P. l%., un capridorne et d'autres, recueillies t Jérusalem, l'indication Leg. X Fret., accompagnée d'une galère° et d'un sanglier (fig. !rl.`?Sl. C'est ce qu'on voit aussi sur une monnaie contremarquée 2 de la même légion (fig. 490). Des monnaies de Virninaciurn portent c une femme tenant un cexillurli de chaque main ; sur celui de droite se voit le chiffre Vil, sur celui (le gauche le chiffre IV; à droite de la femme est un taureau, à gauche un lion. D'autres monnaies de la même ville offrent la même représentation, mais sans que le numéro des légions soit indiqué (fig. 'i42ff et, !x430) Enfin, toutes les monnaies militaires émises par Gallien °, Carausius ° et Victorin 16, hg. .4431, 4432, 4433), présentent les noms et, les insignes des légions pour la solde desquelles elles étaient frappées. On est d'accord aussi pour admettre que ces insignes figuraient sur les enseignes légionnaires ". Leur origine ^± leur nature n'avaient point été déterminées. C'est à M. Domaszewski que revient l'honneur de les avoir fixées. 11 a établi très ingénieusementf2 que la plupart de ces animaux n'étaient autres que des signes du zodiaque et indiquaient des dates en rapport avec 1°origine de la légion. Ainsi le taureau est le signe du. zodiaque du mois auquel préside Vénus'a; Vénus est; d'autre part, la divinité protectrice de la gens Julia. Le taureau, dans les armes d'une légion. signifie donc qu'elle doit sa création à César. Le capricorne correspond à la dernière quinzaine de décembre et à la première semaine de janvier. Or, c au début de janvier qu'Octave déposa son pouvoir ,1 b!±°l'rxrd (mus'ti/menehcce pour le changer contre la puissance impériale''. Les légions que caractérise le capricorne seront donc des légions d'Auguste. Si elles ont à a fois comme insigne le taureau et le capricorne, c'est pour rappeler que leur origine remonte à César et que leur introduction dans l'armée impériale est le fait d'Auguste' 3. De nième pour la légion iliioertfia de Domitien. La déesse Minerve présidait au mois que le bélier caractérisait comme signe du Zodiaque' ; il est tout naturel que la légion ait pour emblème à la fois Minerve et le Bélier, Ces observations ne suffisent pas à expliquer tous les assignes légionnaires, Ainsi la cigogne de la 1ff' Palier' n'est, pas un signe du. zodiaque, le Pégase des deux légion` et de la it° l ugustce non plus. II faut donc eh c .r, dans certains cas, d'autres interprétations. 9?T unes sont évidentes; ainsi le dauphin de 1a X' Fi'e est certainement un souvenir de son origine, ,ndis que le taureau que lui attribue , !es monnaies la signale comme une légion de César. Les autres sont encore incertaines. ,'il est. possible que la cigogne ait cté assignée à la légion tI`FtIJlit-u, nommée aussi cet oiseau. est le symbole de la concorde', il parait 'bien moins probable que Pégase ait ' t' donné à cer taines troupe,"ce que Pégase, d'apis' -les résultats des rert tc 'r ssyriologique-, était, chez les Chaldéens, une constellation sacrée ' De iaiénae est-il bien certain' quo le sanglier, qui caractérise, par exemple, la légion X X la. .A' ,(rete'nsis, n"aitpas d'autre raison d'être que d'avoir figuré sur les enseignes de 1 , m' " romaine antérieure à Marius' ? Il subsiste encoa 'sas (es questions, quelque obscurité. V: Lfio'rontl: soM histoire des difféi nies légions impériales reté écrite plusieurs fois, soit pour leur ensem ble, soit dans le détails. Elle est es-u rée:'t. filer pour la période antérieure au li siècle, g! ie ' 'trx récits de Tache et (l'autres historiens de cette epe , e. Il devient beaucoup pliemalaisé de la précise iv. pér ~cae postérieure. Notre seule ressource ou à peu prés réside alors dans les inscriptions, surtout ans celles qui mentionnent des exépéditions ou des décorations militaires, s Voir surtout Crotetend, dans la Ri L propos de ch.iue Vaglieri dans le D, c.. r notes e A(,ad. (pile. tristor, classe), o de M de tuggiero, 1; p ; Id. Le dite tegioici Tirée, 1896, p. 32 et suiv. 8 La naissance 'te la légion a donné lieu h des ue.;css 1: a.r et dans 3,. nimnn a.eS légionnaires de Sept _rz2e Sé r e., de quetques-uns de ses successeurs. Il faut t ajouter l'étude des différents camps dont, les ruines existent encore sur toute l'étendre de l'empire romain, Je présenterai les faits relatifs à chaque légion, en me bornant au strict necessai e. Pour le reste, le lecteur devra se reporter aux ouvrages entés en note, Legtct 1 5 djut;rIx '. Insignes : Capricorne, Pégase. Suivant toute vraisemblance. la légion ft1.t constituée par *drop en 68, un pelé avant sa mort, elle était, formée de soldatde la flotte probablement, de lai flotte de Misène". Son surnom d'Adjutri.t' indique un corps de troul d~ , un moment difficile pour venir en aide d tr., régulières. Il lui fut, conservé; nous le b ail irons mitonné dès l'année i38 dans un diplôme mi-:es litaire ". A 1a mort de Néron, elle resta tt Rome avec quelques r, , tro,unes de Germanie". Elle se, déclara presque aussitôt pour Othon''. Pile combattit pour lui é, Hé mais n'en fut pas moins vaincue". La guerre ter ïni , Vitellius l'envoya en Espagne « ut pare et ()tif) r,tescer'e('` ,o Cette combinaison ne réussit pas: dès qu'elle vit la possibilité de se déclarer pour le nouveau compétiteur Vespasien, elle n'hésita pas et, son adhésion eutraina celle fi deuautres légions espagnoles, la Y I" Vicinité etlaN r "aelques auteurs ont pensé'", à.juste titre, qu'elle are' r pris part, l'armé', ..uivante, à la guerre contre Civilis,tBataveL . d',tt irmettent iii contraire, qu'elle .butta pas l'l • tte jusqu'en l ,nn(-e 88". En cette r' ` -eus l'emptt i,;r Domitien, éclata la sédition d'.?nton-t 7 iJu1 ninasLa légion, qui avait alois sans doute pour légat Trajan.. fut appelée sur le Rhin pour combattre les rebelles1"Elle v resta et occupa 1 r de Mayence". C'est delà qu'elle partit ou envoya pchements à la guerre de Domitien contre les Chatti et à l'expédition de Nerva contre les Suèves et, les Germains". Elle prit vraisemblablement aussi part à. la guerre D cique d Trajan. D'après M, .Ji'tnem'inn elle aurait quitta la a muni, dès le début de la campagne, puis, entre led e , : 1'editions, aurait été cantonnée à 9x,1.i-um o `. revenue après la tin de la seconde guerre et la -,d: en' )n de la Dacie en province". File' n'y ap . longtemps, Lorsue,entt4,lalégionNt;'.st/rii partit. lire" Trajan pour l'Asie, elle fut tppeiée en Pannonie à sa pïacea et s'établit à lsregetio, dans ta, province supérieure'''. `0n y a trouvé des preuves pigrapltigt_es tt•iss nontl e_tses de son existence2". Elle y resta campée jusqu'à la fin. de l'i"rnpire. Comme toutes les légions 'le Pannonie, elle dut participer aux luttes qui se livrèrent .u: le Danube penda:,lt la deiixiem.e moitié du siècle et la première moitié dei ii?` siècle; nOUS :S'su .:, le 'r2t atii 014. de pre1SOnIptilOnS (pie parut. 23 . Plut. (Pitt. 1 -, et,) étant assez difficiles s si ia er; cf, A c5i ,rï. t'),t cit. p. 7 s 3,ttro.ncnn, p, 5 et e . Jüneeaanii, p. 49 --lo C. i .1I'l; Dipc. IV, p 9'' 3 T0. lit, . -18 P5' c' cit. , ,''t. c ..itscbr139 3, p. 11s et suit. t. le cd. s 3.7 ; Ritterlin2, De :'e X e•'r,atna, p. 70, éaglierc Op. c'is` (d'o' s Cat. Ri k _ : Se..taac Fra et Oc sea -se dardas, l'on 8 introduit . a son ,r rection ,centra; j R. t;,er,at, 0. i tut, de J'épitrr, e'et,,,., ferles, Damai, 1884, p, et s.) 17 Jüne,eannp. 35 et s. 4876, p. 134 ets. `m Jiinerv,rnn, Op. cit. p. 40 et s. 20B i ornas., p. 94, avec renvoi auz inscriptions. --27 idnc 1528. 223E , v .-m_ ., 20. p. itt, 86 J;ino:nann, p. 72. t' C. i. 1. 1, '''e l lote, t Si, 1.4 t 3, p. 292 , briller) i Lb_.. m atwa, yt. t r. 08 eo~:. ;Il, p. aS. LEG 1076 LEG les suivantes: expédition germanique de Marc Aurèle et L. Verus ; guerre contre les Marcomans 2; guerre contre les Germains et les Chatti3 ; expédition Parthique de Septime Sévère 4 ; guerre de Maximin contre les Daces '. Elle figure sur les monnaies de l'empereur Septime Sévère° et de l'empereur Gallien 7. Elle existait encore au i t" siècle et continuait à occuper le camp de Bregetio. Elle porte sur les monuments les surnoms de Pia Fidells. qu'elle n'avait pas encore reçus en 98. On ne peut donc pas admettre, ainsi qu'on l'a fait, qu'elle les acquit à la suite de la révolte d'Antonius Saturninus ; on ne sait pas davantage à quelle occasion elle fut appelée /tenant Pia I idelis 10. Au début du me siècle, une inscription lui donne le titre de Coostans"