Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article LEITOURGIA

LEITOURGIA. Le mot liturgie', pris dans son sens général, désigne toute prestation, tout service qu'on acquitte envers I'État ou qui est imposé par la loi, Ainsi l'hoplite qui s'arme à ses frais et va combattre pour la patrie acquitte une liturgie 2. ; il en est de même du citoyen qui exerce une magistrature', de l'éphèbe qui remplit les devoirs de son état 4. Mais ce mot avait encore un sens plus restreint ; il servait à désigner un certain nombre de prestations ou de contributions bien déterminées, qui avaient une organisation propre et à l'aide desquelles fonctionnait une partie des services publics. Le système des liturgies est un des traits les plus curieux de l'organisation financière des États helléniques, Il répugnait au sentiment des Grecs de demander à l'impôt tout l'argent nécessaire pour les besoins publics. Il existait bien un système fiscal : des droits de douane, des droits de mutation, une taxe personnelle sur les esclaves et les métèques; mais tous ces impôts, avec les revenus que l'État retirait des domaines publics, comme les mines, etc., avec l'appoint important que donnaient les amendes et les confiscations, ne suffisaient pas à couvrir toutes les dépenses. L'État rejetait donc sur les citoyens riches une partie des charges publiques. C'étaient eux qui étaient chargés non seulement de faire les frais de tel service, mais d'en assurer, par leur soin et leur activité, le bon fonctionnement. Les anciens distinguaient deux sortes de liturgies. 1. Les liturgies extraordinaires ont pour objet la défense de 'État; elles ne sont exigées qu'en temps de guerre. La plus importante est la TRIÉRARCHIA. Son organisation se rattache à l'institution des naucraries et des trittyes °. Elle était primitivement réservée aux citoyens de la première classe, les pentacosiomédimnes, qui devaient équiper une flotte de 48 vaisseaux, tandis que les citoyens de la deuxième classe devaient fournir un corps de 96 cavaliers ; le corps des hoplites était formé par les citoyens des trois premières classes. Ces trois façons de servir, comme triérarque, comme cavalier, comme hoplite, étaient autant de liturgies. La division des citoyens de l'Attique en quatre classes, instituée par Solon, n'a eu d'autre objet que l'organisation de la défense militaire du pays au moyen des liturgies 6. Nous n'avons pas LEI 4096 LEI à nous occuper ici de montrer comment fonctionnait ce service 1 ; rappelons seulement que, lorsque Athènes fut devenue la première puissance maritime de la Grèce, la triérarchie resta toujours un impôt qui ne frappait que les riches ; l'expression « fortune triérarchique » était synonyme de « grande fortune ». Il n'y avait d'abord qu'un seul triérarque pour un vaisseau ; à partir de 111, on trouve des euvTpti,papyot, deux ou trois citoyens s'unissent pour se partager la dépense; en 357, la loi de Périandre applique à la triérarchie le système des symmories [EisPHOBA_;; enfin ce dernier système est modifié en 340 par Démosthène. La durée de cette liturgie était d'un an ; la dépense pouvait varier entre 40 mines et un talent'. L'impôt sur le revenu, l'eiepopâ, n'était pas une liturgie il frappait sans aucune exception tous les citoyens qui avaient le revenu imposable. Mais une liturgie nouvelle fut créée, quand fut institué le système des syrnmories en 377 ; cette nouvelle liturgie était la 7rp9etecpoi, [EisPuonAl. Dans chacune des vingt syrnmories, les quinze plus riches citoyens faisaient l'avance de la prestation entière ; ils se faisaient ensuite rembourser par les autres membres de la symmorie 3. C'est cette avance qui constitua la liturgie; mais jusqu'à la réforme opérée par Démosthène en 340, cette charge n'était pas bien lourde car les 300 citoyens riches, qui avançaient la 7rooetamop«, s'entendaient pour répartir ensuite l'impôt de façon à en rejeter la plus lourde part sur les autres symmorites c'est cet abus que voulut corriger Démosthène. Enfin la cavalerie, c'est-à-dire le service dans le corps militaire des cavaliers, peut être comptée parmi les liturgies militaires ; mais cette liturgie avait un caractère particulier à cause de la nature même du service qu'avait à remplir le cavalier'' II. Les liturgies ordinaires ont pour objet les fêtes religieuses; elles reviennent régulièrement tous les ans; c'est pour cela qu'un les désigne sous le nom de Eyxéx),tot. La chorégie [CHOREGIA] était la plus importante des liturgies ordinaires ; aussi ce mot est-il souvent employé comme terme général pour désigner toutes les liturgies °. Il y avait, dans Athènes, des chorégies pour un grand nombre de fêtes ; nous en connaissons pour les Grandes Dionysies, les Lénéennes, les Thargélies, les Grandes et les Petites Panathénées, les fêtes d'Athéna Skiras, de Prométhée, d'Héphaistos. Pour chacune de ces fêtes il y avait plusieurs chorégies ; ainsi aux fêtes de Dionysos, il y avait des choeurs tragiques, comiques et cycliques, des concours de joueurs de flûte, de danseurs de pyrrhique, etc. La dépense pour un choeur cyclique pouvait n'être que de 300 drachmes ; pour un choeur tragique, elle pouvait s'élever à 3 000 6. Les autres liturgies étaient généralement moins coûteuses ; nous indiquerons les principales. surtout pour objet la préparation des courses aux flam beaux ; nous connaissons de ces courses aux Panathénées, aux fêtes de Prométhée, d'Héphaistos, de Pan, de Thésée, aux Bendidies, aux Lénéennes. La dépense pour une lampadédromie est évaluée à 1 200 drachmes L'hestiasis [11ESTIASIs] consistait en banquets que le liturge offrait aux membres de son dème ou de sa tribu à l'occasion de certaines solennités L'archithéorie consistait à faire les frais d'une théorie envoyée pour représenter l'État aux grands jeux de la Grèce, pour consulter les oracles, etc. °. L'arrhéphorie [ABHHErxocIA] constituait une liturgie qui était à la charge des parents des quatre jeunes filles désignées pour être arrhéphores 10. L'hippotrophie est aussi une liturgie ; elle a pour objet d'élever des chevaux pour concourir aux grands jeux d'Olympie, de Delphes, de l'Isthme et de Némée, ou, dans Athènes, aux Panathénées et aux Théséia, par exemple, mais seulement pour les courses désignées sous la rusur tous les citoyens qui ont de la fortune. Quant aux cavaliers, s'ils sont riches, ils ont un devoir d'honneur de prendre part à ces courses; mais en réalité il semble qu'ils n'ont été astreints qu'aux concours réservés exclusivement à la cavalerie, c'est-à-dire les concours ix tàv Enfin on peut encore citer les liturgies xav'r opus 1", Telles étaient les liturgies ordinaires qui avaient été instituées pour relever l'éclat des fêtes religieuses et qui, comme ces fêtes, revenaient régulièrement chaque année. Ce n'était pas seulement la capitale qui honorait ses dieux par des cérémonies et des sacrifices ; les dèmes avaient aussi des cultes particuliers qu'ils célébraient par des fêtes'". Ces solennités étaient assurément moins nombreuses et moins brillantes que celles de la ville ; mais elles faisaient aussi l'objet de liturgies qui imposaient de nouvelles dépenses aux citoyens riches. Les dèmes avaient deux sortes de fêtes ; les unes étaient communes à tous les dèmes, par exemple les Dionysies champêtres, les Thalysia, les Epicleidia, les Haloa, fêtes qui marquaient le retour des saisons et des occupations qui s'ensuivaient ; d'autres fêtes étaient particulières à tel ou tel dème, comme les Kybernesia pour Phalère". Le divertissement le plus goûté parait avoir été les représentations dramatiques, qui fonctionnaient là aussi par des chorégies ; nous connaissons des théàtres à Collytos, Éleusis, Aixoné, Thoricos, Phlya, Myrrhinonte; il y en avait deux au Pirée 17. Dans certains dèmes, nous voyons célébrer des lampadédromies'd, quelquefois même des lampadédromies à cheval ". Les citoyens athéniens n'étaient pas seuls soumis aux liturgies ; les métèques aussi avaient à en acquitter un certain nombre. Il y avait d'abord des liturgies qui étaient uniquement réservées aux métèques, par exemple LEI 4097 LEI la skaphéphorie et la skiadéphorie'. Les skaphéphores sont des métèques qui, à, la procession des Panathénées, portent des bassins de bronze ou d'argent qui contenaient probablement du miel ou des gâteaux ; les skiadéphores sont des femmes ou des filles de métèques qui portaient des ombrelles à cette même procession. On a prouvé aujourd'hui qu'il n'y avait dans ces deux prestations rien d'humiliant pour les métèques ; que c'était là, au contraire, un moyen de les faire participer au culte public. Les métèques étaient aussi soumis à quelques-unes des liturgies qui frappaient les citoyens, mais le fardeau qu'ils avaient à supporter de ce fait était beaucoup moins lourd. Ils étaient exempts de la triérarchie, et il semble bien que, pour les liturgies ordinaires, ils n'avaient à prendre part qu'aux concours d'euavôp(a et d'EÛO,,t) x et à la chorégie, et encore pour la chorégie seulement aux Lénéennes; nous savons qu'ils ne présentaient pas de choeur aux Grandes Dionysies ; et rien ne prouve qu'ils aient dû préparer des lampadédromies 2. Si l'on compare les liturgies extraordinaires avec les liturgies ordinaires, on voit que, pour les premières, la prestation porte à la fois sur les biens et sur les personnes; le triérarque équipe un vaisseau et il est tenu de le commander et de le conduire lui-même devant l'ennemi : ),•yroupyei yp-/;xaat xai QÛU.atit. Les liturgies ordinaires ne portent que sur les biens : le chorège est tenu de faire instruire un choeur, de l'entretenir et de l'habiller richement le jour du concours ; c'est sa fortune seule qui est atteinte par la liturgie : ),ytoupyti yp uaal, L'impôt sur le revenu, l'siaooc ,, n'est pas une liturgie ; il frappe, sans aucune exception, tous les citoyens qui ont le revenu imposable. Les liturgies, au contraire, admettent des immunités Sont exempts des liturgies tant ordinaires qu'extraordinaires : les neuf archontes 3, les orphelines non mariées, les orphelins mineurs', ,les clérouques ; si l'on assimile, comme c'est naturel, le service militaire à une liturgie, il y avait des exemptions pour les invalides 7, pour les sénateurs 6, les fermiers publics', les choreutes" et les marchands'. Nul n'était tenu à deux liturgies à la fois f2, ou à la même liturgie deux ans de suite "Al s'ensuit que ceux qui acquittaient une liturgie soit ordinaire, soit extraordinaire, étaient exempts du service militaire''". Il y avait enfin, mais seulement pour les liturgies ordinaires, des exemptions individuelles qu'on avait accordées comme des témoignages honorifiques. Ces exemptions étaient assez rares ; parmi les citoyens qui ont joui de cette faveur, nous ne connaissons guère que les descendants d'Harmodius et d'Aristogiton, Conon, Chabrias, Aristophon, Miltiade fils de Zoilos 'fi Enfin étaient exempts de plein droit de toute liturgie tous ceux qui n'avaient pas une fortune suffisante pour faire face à de telles dépenses. Y a-t-fl eu, dans Athènes, une loi fixant un cens à partir duquel on pouvait être requis comme liturge? Nous ne trouvons nulle part mention de cette loi. Il est probable que le capital fixé devait varier selon la liturgie '6 ; ce capital devait être au moins de deux talents 11 D'après Démosthène 18, le nombre des liturgies ordinaires était chaque année de soixante; il est très probable, comme le dit Boeckh ", qu'il y en avait davantage et que l'orateur a diminué ce chiffre pour les besoins de sa cause. Nous avons d'autre part une indication qui porte à 1.200 le nombre des citoyens athéniens en état de participer aux dépenses publiques 2D. Pour nous rendre compte du fardeau qu'un tel système imposait aux classes riches, il suffit de citer quelques exemples. Le personnage pour lequel Lysias a écrit le discours XXI fait le compte de l'argent qu'il a dépensé pour l'État dans l'intervalle de neuf ans, de l'ol. 92,2 à l'ol. 91-2, de 411 à 403. En 411, Chorégie d'un choeur tragique 3000 drachmes. Choeur d'hommes, aux Thargélies, victoire 2000 En 410, Concours de pyrrhique aux Grandes Pana thénées 800 Choeur d'hommes aux Dionysies, victoire 5000 En 409, Petites Panathénées, choeur cyclique 300 En 405, Prométhéia, gymnasiarchie, victoire 1200 Choeur d'enfants 1500 En 403, Chorège, comédie, victoire 1600 Petites Panathénées, pyrrhique de jeunes gens 700 Victoire aux régates de Sunium 1500 Archithéorie, arrhéphorie, etc 3000 20600 drachmes. Dans cet espace de neuf années, il a été triérarque pendant sept ans et a dépensé six talents; il a pris part deux fois à une eisphora et a dépensé 7000 drachmes. Le total des dépenses est 63 600 drachmes ou 10 talents 3 600 drachmesL1; cela fait une moyenne de 7000 drachmes par an, Cet Aristophane pour lequel Lysias a écrit un discours a dans quatre ou cinq années dépensé pour lui ou pour son père, dans deux chorégies, la somme de 3 000 drachmes; il a de plus été trois ans triérarque 22. On peut dire assurément que ces deux Athéniens ont bien fait les choses ; ils n'ont pas voulu profiter des immunités dont nous avons parlé ; ils ont acquitté plus d'une liturgie à la fois ; ils n'ont pas usé du droit qu'ils avaient de ne contribuer aux liturgies que de deux ans l'un. Un des deux citoyens, dont nous venons d'indiquer les libéralités envers l'État, dit que s'il s'en était tenu à ce que la loi exigeait il n'aurait pas eu à faire le quart des dépenses qu'il énumère 23. Pour expliquer de telles dépenses et un tel entraînement, il faut tenir compte du caractère agonistique de l'institution. La liturgie est une prestation publique imposée aux citoyens riches en vue d'un concours. Il y a des prix pour les triérarques qui ont le mieux équipé leur galère, comme pour le chorège qui a présenté le plus beau choeur : la couronne triérarchique pour les premiers, un trépied pour le second. Les fêtes religieuses sont autant de concours et ce sont les citoyens les plus riches qui se disputent les prix. Une LEI 1098 -LEI vive émulation les anime tous ; c'est à qui éclipsera ses concurrents par son luxe et par l'étalage de ses richesses. Les dépenses que fit Alcibiade quand il concourut aux jeux équestres d'Olympie paraissent incroyables ; les gens raisonnables criaient à la folie; lui, prétendait avoir ainsi rendu un grand service à la patrie', en montrant aux étrangers que les ressources d'Athènes, qu'on croyait ruinée par la guerre, étaient inépuisables. Aussi arrivait-il très souvent que ces prodigalités entraînaient des désastres et des ruines 2 ; le comique Antiphane nous montre un chorège qui avait couvert d'or les vêtements de ses choreutes, le jour du concours, et qui ensuite n'avait plus que des haillons pour se couvrir lui-même A côté du citoyen zélé et prodigue, fier de dépenser et d'éblouir par son opulence, il n'est pas étonnant de trouver l'homme froid, qui calcule, qui voit où peuvent mener ces folles dépenses et qui, sans souci de ses devoirs civiques, essaie d'y échapper. Il y avait un mot dans la langue pour désigner ceux qui cherchaient à se dérober à cette charge des liturgies : le ôtzipaslacoXi ç nous est connu par les comiques. D'ailleurs, les citoyens qui veulent éblouir le peuple et gagner ses faveurs se préoccupent de plus en plus des liturgies ordinaires qui ont pour objet l'amusement et le plaisir de la foule; ils négligent les liturgies de la guerre qui ont pour objet le salut de la patrie. L'orateur Lycurgue s'indigne contre ces abus' ; mais est-il bien sûr que le peuple fût de son avis? La loi de Démade sur le théoricon suffirait pour attester le contraire. En somme, les liturgies ont été instituées sous l'influence de cette idée que la patrie est tout pour le citoyen, qu'elle seule lui assure la liberté et la vie, et qu'en retour elle peut tout exiger de lui. Cette idée est juste et en somme pratique, quand la concorde règne dans la cité, ou quand les citoyens, qui ont à supporter les charges, ont la direction de l'État. C'est ce que Solon avait fait dans Athènes`; les premières classes avaient à acquitter les liturgies, mais elles avaient des privilèges en compensation de ces charges. Le progrès de la démocratie a consisté, dans Athènes, à enlever aux classes riches leurs privilèges en leur laissant ces charges qui étaient devenues exorbitantes ; la triérarchie, au temps de Solon, n'avait à équiper que 48 vaisseaux ; au v° et au Ive siècle, Athènes a une flotte de 300 et même de 400 galères ; les liturgies ordinaires sont devenues très coûteuses par le développement de la richesse et la rivalité des citoyens entre eux. Le fardeau finit par devenir trop lourd. Les classes riches voyaient parfaitement que le peuple ne 'regardait les liturgies que comme un moyen pour les ruiner' ; la situation devint encore plus difficile, quand, à l'époque de Démosthène, le peuple athénien, pris de lassitude et devenu indifférent pour la chose publique, répugna de plus en plus au service militaire ; alors les aristocrates pouvaient lui adresser ces paroles que Démosthène met dans la bouche de Midias : « Voilà comme vous êtes, Athéniens ; vous ne marchez pas vousmêmes, et vous ne voyez pas la nécessité de contribuer. Après cela, vous êtes surpris si vos affaires vont mal. Croyez-vous que les choses puissent durer ainsi : à moi de contribuer, à vous de recevoir ? à moi d'être triérarque, à vous de ne pas vous embarquer ? » A Rome, sous la République, l'aristocratie avait aussi à faire face à de grandes dépenses ; elle avait, surtout après les Gracques, à acheter le peuple aux élections; mais le patricien, qui s'était ruiné pour se faire nommer consul ou préteur, avait la ressource d'aller gouverner une province où il refaisait sa fortune. Athènes, après ses défaites en Sicile, doit ménager ses alliés ; après la guerre du Péloponnèse, elle n'en a plus ; le riche, qui se ruine en liturgies, n'a plus de chances de refaire sa fortune. Mais à l'époque de Périclès, Athènes est la grande cité industrielle et commerciale de la Grèce ; elle est à la tête d'un grand empire ; les vieilles familles riches ont encore une place importante dans l'État ; il leur est possible de suffire aux dépenses que le sentiment public leur impose °. C'est le grand moment de la puissance d'Athènes et le système des liturgies a été l'élément organisateur de cette puissance. C'est par des liturgies que les Athéniens ont armé ces flottes qui ont été si longtemps les maîtresses de la mer ; c'est par des liturgies qu'ont été formés ces choeurs qui, sur le théâtre de Dionysos, venaient exécuter les danses, réciter les chants que leur avait appris l'art d'un Eschyle, d'un Sophocle, d'un Euripide, d'un Aristophane. Peu d'institutions ont exercé une influence aussi décisive sur le développement de la grandeur militaire et artistique d'Athènes. La pratique des liturgies se trouve naturellement dans les colonies athéniennes, ainsi à Potidée f0, à Amphipolis11, à Siphnos L2, à Céos 13, à Délos14, à Byzance" dont la population était en partie athénienne. Ce serait d'ailleurs une erreur de croire que l'institution des liturgies est propre à Athènes ; c'est une institution hellénique ; on en constate l'existence à Égine 10 avant les guerres Médiques ; à Mytilène " à l'époque de la guerre du Péloponnèse ; à Corinthe", à Delphes 19, à Orchomène 20 ; à Rhodes 21 fonctionnait la triérarchie avec une chorégie ordinaire dans le genre de la 79oEtacpop. Une inscription importante, qui contient la décision du roi Antigone relative au synoikismos de Téos et de Lébédos, renferme une clause qui règle la question des liturgies entre les deux cités 22. On peut dire, d'une façon générale, que partout où se célèbrent des jeux, ces jeux fonctionnent à l'aide des liturgies; or chaque cité a des jeux plus ou moins importants pour des causes qui ne tiennent pas toujours à l'importance de la ville. Il n'entre pas dans la nature de notre sujet de faire une enquète complète sur les cités pour lesquelles l'existence des liturgies est constatée par des textes positifs L3. ALBERT MARTIN. LEM -1099 LEM