Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

LITUUS

LITCUS.-I. Bdton augurai.-On trouve aussi la forme lituum', au neutre, que les Grecs ont transcrite 'A(Tuov 2. Pline emploie le mot scipio comme synonyme de lituus 3. Le lituus était un bàton sans noeud, dont l'extrémité supérieure était recourbée : baculus sine nodo, aduncus 4 ; incurvum et leviter a summo in flexum bacillum5. C'était l'insigne des augures LAcGLR] qui s'en servaient pour déterminer le templum, c'est-à-dire pour délimiter l'espace céleste correspondant à l'espace terrestre qui devait être auguré [TEMPLLM]. L'origine du lituus augural se perd dans la nuit des temps. Nous le voyons intervenir dans les légendes qui entourent le berceau de Rome. D'après la tradition, Romulus, fondant Rome selon le rite étrusque 6, se servit du lituus pour partager les régions 7. Les Romains prétendaient même conserver dans la curie des Saliens Palatins ce même lituus 3 qui, miraculeusement, avait été préservé dans l'incendie de Rome par les Gaulois '. Les Romains avaient donc reçu le lituus des Étrusques '0; les traditions que nous venons de rappeler tendent à le démontrer et avec elles concordent les monuments archéologiques. Un bas-relief étrusque, d'une haute antiquité, représente un personnage, un augure sans doute, tenant le lituus droit t1 (fig. 4503). Sur une autre stèle étrusque, le personnage figuré tient le lituus abaissé vers la terre 12. Le lituus apparaît souvent dans les pompes funèbres étrusques, porté par des suivants comme insigne de la dignité du défunt. On le voit, entre autres, ainsi porté, sur une peinture Fig. 4583. Lituus de la tombe dite grotte du Typhon, à étrusque. Corneto 13, dans trois processions funéraires peintes, provenant d'une tombe de la même ville et ayant fait partie de la collection Bruschi 14, sur un sarcophage de Vulci15 [ETRUSCl, p. 848, fig. 2844]. LIT ---1278 LIT Les représentations du lituus augural ne sont pas moins fréquentes sur les monuments romains. Lin basrelief du Musée de Florence représente Auguste tenant le lituus «fig. 4504) dans la même attitude que le personnage étrusque représenté plus haut. Analogue est la pose de l'augure couronné par Juno Sospita sur des deniers de la gens Cornuficia (fig. 4505) 2. Cette pose est probablement hiératique et représente l'au gure dans l'acte même de son sacer doce, car elle se rencontre encore sur des monnaies des familles Antistia , Autonia 4 et Minucia . Le lituus est d'ailleurs très fréquent sur les monnaies de la République romaine 6. Parmi les bas-reliefs, nous mentionnerons un autel de Pompéi (ARA, fig. 425) et un marbre ayant appartenu à Bartoli sur lesquels le lituus est sculpté au milieu d'autres insignes sacerdotaux; on le voit encore accompagnant une inscription du temps d'Auguste sur une pierre gravée de la collection Rhodes "6. Un médaillon en terre cuite représente Auguste tenant d'une main le globe, de l'autre le lituus". Tibère 12 et Germanicusi3 le portent également sur les célèbres camées du Cabinet de France ou de Vienne. Servius dit que le bâton du roi, symbole du droit de justice, s'appelait aussi lituusi4. Il se peut que le lituus augural ait eu, comme origine, le sceptre royal. 11. Trompette. La similitude dit nom entre le lituus bâton augural et le lituus trompette tient à leur ressemblance. Cicéron, ou peut-être une glose introduite dans son texte, le dit ". Le trait caractéristique de cet instrument de musique est, en effet, la courbure de son extrémité, c'est pourquoi les auteurs lui appliquent, comme au bâton, l'épithète aduncus f6. Aussi bien que le lituus augural, la trompette appelée du même nom est d'origine étrusque. On conserve au Musée étrusque du Vatican un beau lituus en bronze, long de 1 m. 60, trouvé dans une sépulture de Cerverti, l'antique Caire " (fig. 406). Près de la même ville antique d'Étrurie, dans une tombe célèbre, dite dei rilieri, sur deux piliers, oit sont peints des ustensiles et des armes de toutes sortes, figurent deux litai (fig. 4507) S6, Une peinture d'une tombe de Chiusi représente un cortège qui précède un vainqueur dans une course de chars et oit ligure un joueur de lituus [LITICEN], dont l'instrument est bien conservé (fig. 4508); la partie recourbée est soutenue par une tige en forme de fourche, et l'extrémité opposée à l'embouchure est munie d'un petit anneau dans lequel on pouvait, pour suspendre l'instrument, passer une corde ou une courroie1°. Chez les Romains, le lituus, transmis par les Étrusques, conserva sa forme recourbée qui le distinguait de la tuba longue et droite 20 ; celle-ci était l'instrument de l'infanterie, tandis que le lituus était particulier à la cavalerie, si l'on en croit un texte d'Acro 21 dont le témoignage a été contesté" sans preuves suffisantes, L'origine étrusque du lituus a conduit O. Müller à l'identifier avec la tuba Tyrrhena mentionnée par les auteurs 23. Quoi qu'il en soit de cette assimilation, le lituus avait conservé l'ancienne forme. On peut s'en convaincre par un bas-relief reproduit (fig. 4438) au mot LITICEN, sur lequel I'instrument est figuré avec une inscription qui ne laisse subsister aucun doute. En 1761, en Angleterre, dansla rivière de Withem, près Tattershal, Lincolnshire, on a trouvé un lituus de l'époque romaine très bien conservé 2". On connaît d'autres lituus par des monuments figurés représentant des musiciens [LITICEN]. Parmi les armes qui forment les trophées sculptés sur la base de la colonne Trajane figurent des trompettes qui ne se confondent pas avec le lituus étrusque et romain : c'est le cARNYx, dont la partie recourbée se termine en tète de serpent à gueule ouverte 25 Tandis que la TUBA avait un son grave, le son du lituus, au contraire, était aigu et strident 26; on s'en servait pour donner le signal du combat". HENRY THÈDENAT. 1iW li iWllÿlf LOC 1 279 -LOC