Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article LORARIUS

LORAR,IUS I. Esclave chargé de lier et de frapper avec des courroies (axéroç, LoROM2) ses camarades pris en faute'. I1 avait sa place marquée dans toute maison qui comprenait un nombreux domestique`; sa condition n'était du reste ni plus relevée, ni plus heureuse que celle des patients livrés à ses coups 3. C'est surtout par la comédie que ce personnage nous est connu: il est probable que Ménandre et les autres poètes de la Comédie Nouvelle s'en étaient beaucoup servis 6 ; Plaute lui donne 164 LOB 1 302 LOB des noms plaisants tous grecs, qu'il avait dît emprunter à ses modèles: Colapllos (soufflet), Cordalion (corde), Corax (potence)'. Un bas-relief en marbre, provenant de Rome, et aujourd'hui au musée de Naples, représente une scène de comédie qui a été diversement expliquée2; on y voit un des personnages, peut-étre un loraritls, tenant, prêt à frap ,¢[ per (fig. 4518) une corde ou courroie mise en double, qui semble garnie de balles de ),oopoTw.oç), fabricant de cour '' noies, sellier, bourrelier. Cet ouvrier exerçait un métier analogue à ceux du -zAi,o PISTRLM . Il façonnait particulièrement les articles en cuir nécessaires pour brider, seller et atteler les chevaux III. Sous le nom de bruni. (nôpcv'n on a désigné, à partir du in' siècle de notre ère, un galon qu'on cousait en un ou plusieurs rangs sur un vêtement de couleur différente [LOnryln I11. 11 est possible que l'ouvrier qui fabriquait des galons pour cet usage se soit appelé lorarias '. Il y avait à home un ('ülts loral'ius qui tirait son nom, soit des selliers, soit des fabricants de galons qui habitaient cette rue. On ne sait pas dans quel quartier de la ville elle était située. GEORGES LAF.YYE. LORICA (O, ses 'n (hneéxtov».-Cuirasse, pièce d'armure, de cuir ou de métal, couvrant le dos etla poitrine et protégeant la région thoracique. Les descriptions que les anciens nous ont laissées de la cuirasse sont d'ordinaire fort confuses et les notices des lexicographes ont l'inconvénient d'avoir été rédigées à une époque où ces formes anciennes étaient hors d'usage, aussi s'accordentelles mal avec les monuments. Ceux-ci, d'autre part, ne sont ni assez nombreux, ni assez précis ou assez bien conservés pour suffire à une étude d'ensemble. Dans l'état actuel de la science, tout essai en ce sens ne peut être qu'hypothétique. Du moins essaierons-nous de nous conformer, le plus strictement qu'il nous sera possible, à l'ordre historique et à, l'enseignement qui se dégage des représentations figurées. I. Les Grecs semblent avoir appris très tard à se servir de la cuirasse, Nous tacherons d'en voir tout à l'heure les raisons, mais les représentations archaïques permettent de constater que l'armure nouvelle ne fut pas acceptée sans résistance et que l'ancienne coutume de 1 Plant. Copi. III, !e Scènes on parait, le n'oui,, : elaut. Cap/. 1, se. 2 et HI, sc. Ter. Amie. 091. 2 Voir les opinions résumées par d. I( p. 314, n. et 543h n. 1. C est peul elu (Ions ce sons. et non dans le sens combattre sans la cuirasse persista, une fois celle-ci inventée et définitivement adoptée. Il n'est pas rare de voir sur les vases peints corinthiens ou attiques deux ennemis lutter l'un contre l'autre, dont l'un a la poitrine protégée et dont l'autre n'a que le bouclier. Les scènes d'armement, très fréquentes sur les monuments archaïques, sont plus instructives encore. Nous voyous maintes fois apporter au héros des cnémides, un bouclier, lin casque, une on deux lances, et point de cuirasse : ce n'est pas oubli du peintre, mais persistance d'un vieil usage. En négligeant provisoirement les exceptions homériques et mycéniennes, nous conclurons de ces exemples que les Grecs n'ont pas inventé d'eux-mémes la cuirasse. Ils l'ont recuc toute faite du dehors et se sont bornés à la perfectionner et à l'adapter à leurs besoins. H. Parmi les peuples auxquels ils ont pu l'emprunter, se présentent d'abord les Égyptiens. Nous trouvons figurés, sur certains monuments égyptiens, de hauts corselets écaillés retenus aux épaules par de larges bretelles et dont la destination était, sans nu1 doute, de prolégerlapoitrine contre les coups de lance.' : l'idée première de la cuirasse a pu venir de là, mais l'arme était très différente de la carapace de cuir ou d'écailles qui sera plus tard en usage. Il semble d'ailleurs que les Égyptiens se soient rarement servis de cette pièce d'armure ; du moins les représentations n'en sont-elles pas fréquentes. Nous connaissons, par contre, beaucoup de monuments assyriens ' où les combattants, à cheval ou en char, paraissent couverts d'une lourde étoile écaillée (Voir t. ii, fig. 2199). Les feuilles rivées sur ces cottes, qu'elles fussent en métal ou en os, se recouvraient les unes les autres (le façon que la pointe de la lance ennemie dût glisser sur leur assemblage : c'est le principe de la cuirasse antique, ou du moins l'une de ses formes les plus fréquentes. Sans doute l'attache de l'arme, sa disposition et l'agencement des courroies diffèrent de ce qu'ils seront, plus tard, mais, si l'on réfléchit que l'Ionie parait, sur ce point comme sur beaucoup d'autres, avoir servi d'intermédiaire entre la Grèce propre et l'Orient, on attribuera aces modèles assyriens une importance tout autre qu'aux monuments plus éloignés et plus rares de l'Égypte. III. Chypre, rapprochée par sa position et par son art de ces civilisations orientales, sera par suite l'une des premières terres grecques où des cuirasses seront en usage. Encore paraissent-elles sur des œuvres d'art qu'on peut à peine qualifier d'helléniques. Sur la belle plaque d'ivoire du Musée Britannique, trouvée avec des objets de style mycénien, le conducteur du char est vêla dune sorte de cotte de mailles qui le protège. et un caparaçon de même structure couvre son cheval". Sur une patère d'argent trouvée à Larnaca', certains des cavaliers portent, non plus un caleçon ou un justaucorps allant jusqu'aux hanches, mais une cotte croisillée qui s'arpète et Chipiez, Hist. dei l'Art, IV, fig p. l 1. 5 Cr. la cotte de ,milles des archers sur le bas-relier de Sennacherib, Ibid., U. fg 311, p. 46: (1ig. 282, p. 1815), la cotte écaillée du guerrie r de 6oucoundjik (Ibid. fig 115, p. 24:3), la robe chargée de bractées d'Assoucr anipal (Ibid tg. i, I. 47), le vair uoul du doryphore du Louvre Il d. fig. __a, p.551) sont de œ3œc autant d cuirasses, Il c aurait lieu. de rapprocher également les reliefs hittites, ou Remo dans les scènes de chasse, paraissent des justaucorps écaillés (l'erres., hist. de l'Art, LOB -1303LOR à la ceinture et oit il est difficile de voir autre chose qu'une cuirasse, car l'armure qui défend les jambes est d'un travail tout différent. Une statuette de Chypre (fig. 419) nous montre également un prototype de la cuirasse à épaulières où un anneau demi-circulaire unit les extrémités des lames rabattues' : la grossièreté du modelé permet d'y voir plutôt-un original que l'imitation d'une oeuvre grecque. IV. Dans la Grèce propre, deux monuments mycéniens sont, jusqu'à ce jour, les seuls sur lesquels on retrouve, avant la période archaïque, l'indication d'une cuirasse. L'un est depuis longtemps connu, c'est le vase des guerriers : on y voit (fig. 4520) une longue file de combattants passant à droite et vêtus d'un justaucorps frangé et serré à la ceinture2. L'étrangeté du costume a surpris. C'est l'une des raisons qui ont déterminé des érudits tels que MM. Arndt' et Pottier' à faire descendre l'époque de ce fragment jusqu'à la période du Dipylon ou même au temps du vase d'Aristonophos. Quelle que soit la valeur de leurs arguments, il semble que les faits aient décidé en sens contraire. M. Tsoundas a trouvé récemment dans une tombe de Mycènes', une stèle peinte à fresque où sont reproduits les mêmes guerriers On y voit nettement (fig. -4521), passé sur un chiton bigarré et frangé, un justaucorps couvrant le buste et les bras : le vêtement, de cuir sans aucun doute, semble fait de deux pièces, l'une noire par devant, l'autre rouge derrière le corps. Que les manches soient attachées ou non à cette carapace, que la fresque soit ou non antérieure au vase, il n'importe pas ici : l'essentiel est que ce soit bien une cuirasse et que deux monuments mycéniens la montrent employée comme pièce d'armure. Il reste après cela que le cas fut excep tionnel, car nous ne retrouvons rien de pareil sur les intailles et les reliefs mycéniens. Même l'art du Dipylon, qui est postérieur, n'a pas connu ces cuirasses. L'innovation dut être fortuite et n'a pas prévalu. V. Cette rareté, ou, pour mieux dire, cette quasi-absence de la cuirasse dans l'art primitif semblait s'accorder mal avec la mention qui est faite assez fréquemmentdu O(Spr„ dans les poèmes homériques. Il y a là une contradiction qui mérite d'être expliquée. M. Ileichel, qui a étudié ce point dans les Ilonlerische IYâf ens, a résolu, semble-t-il, la difficulté. Suivant lui il faut distinguer entre les divers emplois du mot OG.or,ç ou de ses dérivés : ou bien le terme a vraiment le sens de cuirasse, et le passage est récent et interpolé, ou bien le texte est ancien, mais la signification du mot est toute différente. eè. désigne en effet la cuirasse, mais par une extension du sens primitif' : c'est d'abord et surtout la poitrine ; puis. et par suite, tout ce qui la recouvre, non seulement la carapace double des temps classiques, niais tout vêtement, tout bouclier et même toute ceinture. Par exemple. la p.ltica, ce ceinturon placé sous le chiton et directement sur la peau, ne petit être définie ~puu.a ypodç 2, si la cuirasse était là pour remplir cet office. De même le ôa,caobs 00iprl;i0 ne serait autre chose'' que l'ensemble du r,o -t';p et de la uirpa, l'une placée sur le corps, l'autre pardessus le chiton, toutes deux formant un rempart double contre les traits. De même encore 0wpif,caw ne signifie primitivement que se protéger le corps avec des armes défensives, ou simplement s'armer. Pendant l'évolution des poèmes homériques il arriva que les choses changèrent et que la cuirasse véritable fut inventée. Dès lors il ne pouvait être question de peindre les héros légendaires sans le perfectionnement que les aèdes de Fionie, ou de l'liolide voyaient employer autour d'eux; de là les remaniements et les ajouts du poème, de là cette cuirasse légendaire d'Agamemnon 12 avec son mélange des trois métaux 13 et ses trois serpents dressés de chaque côté à l'attache du cou. Toutes ces additions ne doivent guère être antérieures à la rédaction la plus récente des poèmes homériques, c'est-à-dire à 700 environ avant notre ère. C'est à peu près le moment où la cuirasse fait son entrée officielle dans la littérature et dans 1' art grecs. Jusque-là, sauf une exception isolée, elle paraît n'avoir pas été connue des Hellènes. VI. S'ils l'ont imaginée si tard, c'est que sans doute ils n'en sentaient pas le besoin, la remplaçant par des ceintures ou des peaux de diverses sortes. A l'époque mycénienne, c'est le pagne enroulé et serré à la ceinture de manière à protéger les parties molles du ventre: ce n'est pas la cuirasse des temps postérieurs, ce n'en serait tout au plus que le apa; mais le grand bouclier rectangulaire attaché aux épaules suffisait bien à protéger le corps. Cette ceinture appliquée sur la peau devient de métal à l'époque du Dipylon "° et nous la retrouvons, souvent comme seule pièce d'armure, sur des statuettes archaïques de l'Acropole d'Athènes, d'Olympie et de Delphes 5CINcuLua4;. A côté d'elle paraissent les peaux de diverses espèces. L'égide de Zeus et d'Athéna est en réalité une cuirasse '°. La robe de 1' e Artémis asiatique » sur un LOR 130i LOR vase de "NI ilo 1 est de même écaillée sur le buste, ce qui indique, sinon un vêtement spécial, du moins une protection particulière pour le haut du corps. Les peaux de bêtes, de lions, de loups et d'autres animaux, que se passent en écharpe Héraklès ou d'autres dieux et de simples guerriers, remplissent, elles aussi, tant bien que mal, l'office d'une cuirasse. Enfin le, justaucorps «corinthien» 2, étroit et collant, serré à la ceinture et s'arrêtant aux cuisses, est évidemment fait de cuir et sert, lui aussi, de défense contre les traits 3. Ces différentes armes auraient sans doute suffi, si le bouclier n'avait, depuis l'époque mycénienne, changé à la fois de forme et de dimension. Aux demi-tours primitives succéda d'abord le grand bouclier échancré du Dipylon, puis l'arme devint plus petite, plus mobile il est vrai, mais découvrant par suite ou pouvant découvrir le haut du corps. Les Grecs sentirent le besoin d'une protection plus efficace pour le thorax et c'est la raison qui leur fit emprunter aux Asiatiques l'arme que ceux-ci, nous l'avons vu, avaient depuis longtemps inventée. VII. Cette première cuirasse, qui apparait dans l'art vers l'an 700 avant notre ère, est la cuirasse dite à gouttière. Elle se compose de deux lames convexes protégeant l'une le dos, l'autre le devant du corps. On les appelait, à cause de leur forme convexe, « eAv, et la cuirasse -ua),ofid~?a : ces plaques rigides, qui recouvraient le buste sans se mouler sur lui, étaient généralement fixées sur le côté. Les représentations sont muettes sur ce point, mais tous les exemplaires conservés, quoique d'une date généralement postérieure, ont ce même mode de fermeture et certaines peintures à figures noires' montrent (fig. id22) que les cuirasses à gouttière étaient échancrées sur le côté, ce qui fait croire qu'elles se fermaient latéralement. Il est probable que les deux cuirassés étaient réunies d'un côté d'une manière fixe, avec une échancrure ménagée à l'épaule : le guerrier passait un des bras dans l'ouverture ainsi préparée, rabattait sur le buste la lame antérieure et la fixait sur le côté opposé à la fermeture. Tel devait être l'usage général, mais il y avait des exceptions. Sur une amphore « vieille attique » de la collection Bourguignon (fig. 1523), une fente médiane et verticale, longée d'une ligne de points blancs, partage en deux une cuirasse : l'arme se passait comme une veste sans manches, et les deux demi-plaques de l'avant étaient ensuite rabattues sur le torse et fixées l'une sur l'autre'. Dans les deux cas, dont le second parait avoir été beaucoup plus rare que le premier, le bas des plaques était retourné et relevé, sans doute pour s'adapter à la courbe des hanches, d'où le nom de cuirasse à gouttière. Un bronze de Dodone, conservé au Musée de Berlin, montre (fig. 71324) comment était rr itle rebord: la lame était repliée sur elle-même pour éviter de blesser le corps par une surface tranchante'. Le plus souvent le même résultat était obtenu d'une manière beaucoup plus simple On voit très souvent sur les vases peints, non seulement le bord inférieur, mais le tour du cou et le contour des aisselles, cernés d'une ligne parallèle de petits points' : ce sont autant de clous qui fixaient la plaque métallique sur une doublure de peau ou de cuir, rembourrage qui rendait la cuirasse plus épaisse et l'empêchait de glisser sur le corps. Quelquefois, pour assurer plus d'adhérence, on la fixait par une ceinture appliquée sur la cuirasses, mais d'ordinaire l'arme tenait seule, retenue par la jointure latérale, par l'échancrure des bras et par le rebord inférieur. VIII. Cette cuirasse est fréquemment représentée sur les monuments archaïques. Un vase la' représente isolée, à côté des autres pièces de l'armure complètet0, Le plus souvent elle couvre des guerriers luttant et au repos. La gigantomachie de Sélinonte un vase grec à reliefs du Cabinet des Médailles t2, un grand nombre de statuettes 13 en donnent des exemples plastiques, et les vases peints nous en fournissent d'innombrables. Les potiers corinthiens 14 et les peintres attiques de vases à figures noires " en revêtent presque exclusivement leurs combattants ; ils en affublent même les Amazones au lieu du justaucorps de cuir qui les couvre d'ordinaire". Dans toutes ces représentations, le décor de la cuirasse varie assez peu. La plaque antérieure, la plus souvent figurée, est quelquefois sans aucune espèce d'ornement ", mais ce cas n'est pas fréquent et est dû, semble-t-il, à la négligence de l'artiste. Sur un vase corinthien du Louvre, des traits en blanc sur le fond reproduisent un motif assez simple de lignes courbes et de chevrons ". Le décor le plus fréquent n'est guère plus compliqué : il se compose de deux spirales venant s'enrouler à droite et à gauche sur les LOR 4305 LOR mamelons et d'une demi-ellipse suivant à peu près le contour de la cage thoracique (fig 1525)1. Sur une hydrie de Céré une palmette tournée vers le bas s'épanouit exceptionnellement entre les spirales 2 et sur un canthare à figures noires des plaques rondes se superposent aux volutes'. IX. Cette cuirasse était passée sur les vêtements les plus variés. Il arrivait assez fréquemment que le guerrier fût nu sous le rembourrage de cuir: dans ce cas, le bas du ventre et les parties étaient entièrement à. découvert D'autres fois le torse était vêtu d'un chiton finement plissé et s'arrêtant aux hanches °. Ce n'était pas par pudeur, car l'étoffe s'ouvrait souvent devant les parties 8, mais uniquement pour éviter à l'épiderme le contact direct de la lourde armure. Enfin, au lieu du chiton, on revêtait des justaucorps collants, simples ou brodés, mais tous épais et qui paraissent le plus souvent faits de cuir'. Il arrivait exceptionnellement que par-dessus ce justaucorps et sous la cuirasse une peau de bête servit d'une troisième défense au torse a. Sur la cuirasse même, d'ordinaire on ne mettait rien, mais, lorsque la plaque de métal n'avait pas de doublure à l'extérieur, les rayons du soleil devaient la frapper directement et la chaleur devenait alors insupportable. Pour remédier à cet inconvénient, une chlamyde ou une draperie étaient passées obliquement sur la cuirasse 9. X. Le défaut de cette armure était dans le manque de protection du bas-ventre. Il semble que les Grecs l'aient senti et qu'ils aient tenté divers moyens d'y obvier. L'un des plus simples était d'attacher par devant au bas de la cuirasse une sorte de tablier, analogue à celui qui pendait des boucliers ioniens, mais plus court et d'étoffe plus épaisse13 . Micali a publié une statuette de bronze, de style gréco-étrusque (fig. 4525). où ce dispositif parait très clair11. Sur un vase, on voit sous le bouclier, devant et derrière le corps, une étoffe écaillée, échancrée sur le côté": il n'est pas sûr que ces deux pièces tombent de la cuirasse; peut-être continuaient-elles simplement un justaucorps de cuir. Une solution nouvelle fut de franger le rebord inférieur, de manière à offrir au bas-ventre un rempart mobile contre les coups 13. Une transition tout indiquée menait à l'invention des lambrequins. Sous la ceinture, ou sous le rétrécissement de la cuirasse à la taille, le rebord saillant de la cuirasse fut, non plus simplement relevé, mais divisé en lames de cuir mobiles''°, indépendantes les unes des autres, et qui, peu à peu, descendirent assez bas pour protéger la région de l'aine. Il est à vrai dire souvent difficile de savoir si les divisions marquées verticalement dans cette partie de la cuirasse correspondent à des échancrures de l'étoffe ou ne représentent que de simples ornements gravés ; mais il parait certain que la cuirasse à gouttière se transforma peu à peu, avec ou sans épaulières, en cuirasse à lambrequins. I1 faudrait d'ailleurs se garder de croire que cette armure, d'abord seule connue, puis bientôt négligée pour la cuirasse à épaulières, ait jamais été entièrement abandonnée. Non seulement on la retrouve sur des vases à figures rouges de style sévère ou mème de beau style libre 19, mais nous verrons que les exemplaires de métal conservés jusqu'à nous sont généralement de ce type : seule la terminaison inférieure a été modifiée et le rebord saillant est devenu moins sensible. C'est aussi bien à très peu de chose près la forme actuelle et, j'ajouterai, la forme nécessaire de toute cuirasse faite de deux lames simples réunies sur le côté. XI. La nouvelle armure, dite cuirasse à épaulières, diffère de la première par trois points essentiels. D'abord, ce qui est l'exception dans la cuirasse à gouttière, elle est munie d'une pièce spéciale pour la protection du basventre, et ce tablier ou ~~ou,a16 est à lambrequins, 7c'7€pu'Eçl7. Puis la fermeture est rendue àla fois plus fixe, plus aisée et plus parfaite par l'intervention de pièces, ~7[tiluoBoç 18, se rabattant sur les épaules et se fixant sur le devant. Enfin, au lieu d'une lame unique, la cuirasse est ordinairement composée d'une série de plaques, lames ou écailles, )Aetr(loç, co)iieç 19, dont le jeu très libre permet une adhérence plus grande de l'arme sur le corps : la carapace devient souple et le combattant, plus libre dans ses mouvements, est en même temps mieux protégé, les lamelles superposées arrêtant mieux les coups violents. On a coutume d'ajouter une quatrième différence, de distinguer les cuirasses à épaulières par le cuir dont elles seraient exclusivement formées, au lieu que les cuirasses à gouttière seraient faites de fer ou de bronze. Rien à mon avis n'est plus inexact. L'une et l'autre forme s'accommodaient àlafois du métal et de la peau de bête ; j'ajoute que, pour toutes deux, la réunion des deux matières était presque nécessaire. La cuirasse à gouttière était, comme nous l'avons vu, rembourrée. Quant à la cuirasse à épaulières, le dessous était bien en cuir, mais je ne connais pas d'exemple d'une arme laissée en cet état: non seulement les épaulières, mais les deux cuirasses 20 et les lambrequins étaient revêtus d'une infinité de petites ou de grandes plaques de métal. Tout au plus pourrait-on dire que le cuir était ici plus apparent ou jouait un rôle plus facile à constater. XII. La date à laquelle apparaissent ces armures est difficile à fixer avec exactitude : nous constatons qu'elles sont déjà connues des peintres qui décorent les sarcophages de Clazomènes21, mais ceux-ci étaient en avance sur leurs confrères de la Grèce propre", qui ont évidemment emprunté aux Ioniens ce perfectionnement. Aussi LOR 1306 LOR est-ce sur des monuments ioniens ou chez des peintres, comme Exekias 2 et Amasis 3, dont l'origine paraît étrangère, que nous voyons d'abord ces cuirasses. Vers le milieu du vie siècle avant notre ère, elles commencent à être d'un usage courant` et nous les retrouvons sur la stèle d'Aristion (fig. 4526)3, XIII. Avant de passer en revue les éléments dont se compose la cuirasse, nous chercherons com ment elle s'ajustait sur la poi trine. Un assez grand nombre de représentations sont conservées // qui permettent de le savoir avec exactitude. Un petit bronze du Louvre montre les épaulières déjà rabattues et les deux mains oc cupées à ramener par devant les deux côtés de la cuirasse 6. Le 7u motif est exceptionnel et ne se comprendrait pas si le corselet n'était très peu élevé, et si par suite son bord supérieur n'était pas, contre l'ordinaire, au-dessous des deux épaulières. Cellesci, le plus souvent, se rabattaient sur la cuirasse une fois fermée, aussi les voyons-nous maintes fois (fig. 4527) se dresser rigides sur chaque épaule, tandis que les deux mains, ramenées devant la poitrine, ferment l'armure par devant'. Dionysos, sur un vase du Cabinet des Médailles 8, a déjà presque rabattu les deux bords, le petit doigt des deux mains tombant le long de la jointure, les trois autres repliés sous la lame et se touchant presque d'une main à l'autre : l'opération est terminée, aussi tourne-t-il simplement la tête à droite, sans se soucier du geste de ses bras. Un éphèbe, sur un vase de Munich au contraire penche la tête sur l'épaule droite, car le seul côté gauche de la Fig. 4527. Ajustement de la cuirasse. cuirasse est en place : un léger effort est encore né cessaire pour ajuster le bord de droite. Les choses pouvaient aussi se passer d'une manière plus compli quée. Au lieu de rabattre successivement les épaulières et les côtés de la cuirasse, on pouvait, pour aller plus vite, combiner les deux mouvements. Sur un vase de l'Italie Méridionale, un guerrier maintient en place d'une main le côté droit de sa cuirasse, tandis que l'autre main relevée rabat Uépaulière gauche i0; l'armure est désormais fixée et ne peut glisser du corps; le guerrier pourra donc à loisir rabattre l'autre côté de la cuirasse, puis descendre la seconde épaulière. Le même motif se retrouve en sens inverse sur un assez grand nombre de vases peints, la main droite à l'épaule, le bras gauche maintenant la cuirasse". Il est à remarquer que ces diverses manières de revêtir l'armure supposent toutes qu'elle s'ouvre par devant, et non sur les côtés. De fait, la fermeture sur le milieu paraît, à la différence de ce que nous avons vu pour la cuirasse à gouttière, être de règle pour la cuirasse à lambrequins. Il n'est même pas sûr qu'il y ait des exceptions. Sans doute nous voyons dans certains cas une charnière ponctuée de clous sur le côté de l'arme sans qu'il y ait au milieu aucune indication d'ouverture", mais les jointures pouvaient être perfectionnées et très peu apparentes, l'une des lames recouvrant le bord de l'autre au lieu de lui être fixée par des oeillères ou des lacets : dans ce cas le peintre a pu fort bien, pour ne pas charger son dessin, négliger la simple ligne verticale qui aurait partagé en deux la cuirasse. En tout cas, l'on dut préférer le premier mode de fermeture, plus simple et surtout plus pratique. La cuirasse ainsi ajustée était passée sur toute sorte de vêtement, mais jamais, semblet-il, sur le corps nu du guerrier : un justaucorps apparaît parfois sous l'armure73, ruais le chiton court et plissé semble avoir été surtout employé. Sur l'armure, on ne mettait rien. C'est tout à fait par exception, et seulement sur des exemplaires récents, qu'on voit un himation ou une draperie jetés sur la cuirasse 14. Peut-être les Grecs affectaient-ils de dédaigner une pratique qui, suivant Hérodote, était en usage chez les Perses 13 et que d'ailleurs rendait moins nécessaire une armure plus souple et oit le métal était moins apparent. XIV. La forme de la cuirasse proprement dite était sensiblement la même dans tous les exemplaires : seule l'ornementation différait sensiblement. La seule modification introduite par la suite fut de rendre l'arme moins rigide etde l'adapter de plus près àla forme du corps. Nous n'étudierons provisoirement que les cuirasses dont le Vig« est séparé du v'Sa),ov par une ligne droite et horizontale. Le décor en est infiniment varié. Il peut arriver, mais ce n'est pas le cas le plus fréquent, qu'aucun motif ne vienne décorer le devant de la cuirasse 1G. Le plus souvent des bandes horizontales en rompent l'uniformité. Ce sont des ceintures unies, ou ornées des motifs les plus divers, rangées de points ", filets 18, losanges ou carrés pointillésn, méandres 20, rais de coaur27, zigzags, postes 22, lignes ondulées etc. Le plus souvent ces bandes ne LOR 1307 LOR font pas le tour de la cuirasse: une sorte de plastron est réservé par devant, de forme généralement rectangulaire et qui, comme étant plus en vue, est aussi plus spécialement décoré. Ce plastron peut être bas et limité, sous les épaulières, par une bande horizontalel• Il peut aussi, ce qui est le cas le plus fréquent, être continué jusqu'au cou, tantôt sous la forme d'une bande étroite 2, tantôt sous celle d'un large champ rectangulaire «fig. 4528). La séparation de la poitrine et des parois latérales est quelquefois à peine marquée 4, mais elle peut être nettement indiquée et soulignée comme dans la figure 4528 par des agrafes juxtaposées : il en était à plastron. ainsi lorsqu'une plaque métallique couvrait le devant du corps et était assujettie au rembourrage de cuir. XV. Entre les diverses bandes horizontales de la cuirasse, au dedans et au dehors du plastron rectangulaire ou même sur la surface non divisée de l'arme °, les motifs les plus divers remplissent le champ. Nous ne pouvons songer à les indiquer tous. La plupart appartiennent au système des écailles métalliques cousues ou rivées sur le cuir et qui, juxtaposées ou souvent superposées, devaient protéger efficacement contre les coups. Elles sont de plusieurs formes, mais toujours attachées par le haut : les exceptions à cet égard, et à toutes les époques de l'art, sont infiniment peu nombreuses 6. Dans la cuirasse à lambrequins, les écailles sont souvent allongées et rectangulaires (fig. 4529)7 ; d'autres fois allongées dans le sens horizontale et toute la partie inférieure de la cuirasse peut être faite de carrés découpés, posés l'un sur l'autre en imbrication et mobiles comme les lanières des lambrequins. Il y en a de presque triangulaires et qui doublent, semble-t-il, d'autres feuilles rectangulaires disposées verticalement'. Enfin un très grand nombre sont de forme plus ou moins arrondie vers le bas '0. A côté des écailles, parait le motif du treillissage oblique ou des losanges (fig. 4530)", avec un petit point central marqué souvent au centre des champs. Le damier était aussi connu et employé dans les mêmes conditions 12. D'autres motifs sont moins schématiques, comme des lignes ondulées superposées r3 ou des séries de petits cerclesl'°. Dans tous ces cas, nous avons évidemment affaire, non à des ornements brodés ou poinçonnés sur le cuir, mais à des plaques rappor tées et cousues. On peut remarquer que rien, dans le décor, ne sort de l'ornementation linéaire. A l'époque de ces cuirasses, qui est la période classique de l'art, la fin du vIe et le ve siècle, les motifs non continus ou empruntés à la figure humaine sont des plus rares. C'est exceptionnellement que nous voyons en haut du Yrlaaov une simple étoile17 ou une tête de Méduse". Puis l'armure se modifiera. Sur la statue équestre qui passe pour celle d'Alexandre, au Musée de Naples 17 et dans la figure qui le représente dans la mosaïque de Pompéi (fig. 4531) 1e, appas rait une ceinture véritable nouée au milieu du buste qui sera désormais et jusqu'à la fin de l'empire romain un insigne du commandement [Voir XXVP. Plus tard, des rinceaux compliqués couvriront le torse, mais dans une LOR 1308 LOR peinture qui représente des personnages orientaux'. Il faut attendre le Ive siècle pour trouver, sur le vase de Cenosa2, farine surchargée et comme brodée, d'e,nbleniata et d'ornements précieux, d'où procédera, avec quelques modifications, le type des statuae loricatae [Voir § XXVI]. XVI. L'un de ces changements qui transforment l'ancien modèle consiste à rendre courbe, de rigide qu'il était, le bas de la cuirasse à lambrequins, là où s'attachent les pteryges. C'était, par là même, lui faire épouser de près la forme du corps. La modification ne se borne pas là : la nouvelle armure reproduira sur sa surface extérieure les principaux détails anatomiques ; elle sera plus souple à la fois et plus vivante. Sans discuter si le perfectionnement était, ou non, plus esthétique, constatons qu'il apparaît de bonne heure, dès les vases de beau style libre et quelque peu avant le milieu du ve siècle. L'ornementation des nouvelles armures est, tout naturellement, assez variée. On en trouve qui sont toutes composées d'écailles : le jeu des plaques glissant les unes sur les autres rendait le corselet très souple et se prêtait à tous les mouvements du corps 2, Des volutes s'enroulent fréquem mentautour des seins et surmon tent l'indication sommaire de la cage thoracique (fig. 453ù) 4. Dionysos, sur un beau vase à Saint-Pétersbourg 3, est vêtu de cette cuirasse où l'on retrouve, quelque peu transformé, le motif de l'ancienne carapace à gout tière. Ires mêmes palmettes ° et les rhèmes rinceaux ornent cer tains bronzes d'un travail soigné et qui représentent Arès ou des héros. Il ne faudrait pas croire que le décor soit dé à la seule fantaisie de l'artiste: nous retrou verons la môme indication des et à lambrequins. muscles sur des stèles funéraires attiques, où le mort est figuré tel qu'il était pendant la vie, avec ses armes et son vêtement habituels 3 Sur des pièces de luxe, l'ornementation pouvait être moins sévère. Des masques ou des protomes, une tête de panthère', un gorgoneion10 étaient appliqués sur le devant du torse. Exceptionnellement, des bandes entières, ciselées ou repoussées, se déroulaient comme des bas-reliefs superposés" : si la petitesse des représentations empêche de bien voir les scènes figurées, nous pouvons cependant nous faire une idée de la splendeur et du luxe de ces armures. XVII. Les épaulières, nous l'avons vu, fixaient le yéxaov sur le buste, mais il va sans dire qu'elles pouvaient aussi le décorer : la forme et l'ornementation de ces pièces rabattues ne contribuaient pas médiocrement au bel aspect de la cuirasse. Il n'y avait nullement uniformité dans la coupe de ces clapets mobiles. Les plus anciens étaient de simples pattes, assez larges, allongées et arrondies vers le bas 12. Ce premier type ne fut pas abandonné par la suite, mais simplement affiné, le bout rond devenant un angle aigu 13. Une modification plus importante fut la division de l'épaulière en deux pièces superposées, l'une plus large et plus haut placée, l'autre fixée sous la première et qui servait à maintenir l'armure. Les deux parties sont parfois l'une et l'autre rectangulaires mais, le plus souvent, l'inférieure a l'apparence d'un triangle rectangle dont l'hypoténuse serait remplacée par une ligne courbe 13. Enfin la figure compliquée résultant de ces deux éléments combinés se rencontre aussi sans que la ligne de séparation entre eux soit indiquée "'. XXII. Le décor des épaulières est des plus variés et généralement, à l'époque classique, plus riche que celui du yfz)aov. II est assez rare que le champ n'en soit pas orné 17, mais un rectangle78 ou des lignes transversales 19 peuvent suffire à le remplir. Sur une hydrie de C eré paraissent des spirales 20, sur le vase de Canosa une rosette et des fleurons V1, ailleurs des étoiles rayonnantes22, surtout dans la partie supérieure, une fois même une grenade et un serpent dressé Le lion. symbole de la vaillance et d'Arès, sert fréquemment d'apofropaion.On le rencontre rampant 24, mais plus souvent sous forme de simple masque 20. Une belle épaulière de Dodone, conservée dans sa partie inférieure, est ornée d'une tète d'Omphale 26, et les bronzes de Siris, aujourd'hui au British Museum, nous montrent (fig. /o533) des Grecs terrassant des Amazones 27. XXIII. Il y avait, pour fixer les épaulières, plusieurs procédés que nous connaissons assez bien. Elles pouvaient ne tenir que par leur seul poids 28, niais la partie LOB. 1309 LOB inférieure du rabat, conservée dans un bel exemplaire de Dodone, était souvent munie d'un anneau' où passait la cordelette ou la courroie d'attache. Ou, au lieu de la bélière, une oeillère était ménagée dans un empiècement qui renforcait l'épaisseur du cuir 2. Dans ce cas un bouton, rivé sur la cuirasse, entrait dans l'ouverture, ce qui pouvait suffire à fixer l'épaulière, mais cette fermeture provisoire dispensait rarement de la cordelette qui entrai t dans l'oeil de la bélière. Généralement un bouton (rarement une oeillère) était fixé sur le devant de la cuirasse, au-dessous des épaulières et juste en leur milieu. Les attaches, partant des deux bords des rabats, venaient se nouer à cette saillie du plastron 3. Comme ce point était symétrique par rapport aux clapets mobiles, le poids était également réparti sur les épaules et l'armure se trouvait solidement assujettie. Pour mieux l'assurer encore, au lieu de deux cordelettes distinctes, on pouvait n'en employer qu'une qui passait horizontalement entre les deux oeillères et dessinait ainsi sur la cuirasse un triangle équilatéral'. Ou bien les deux lanières se croisaient en X sous les épaulières et s'attachaient à deux boutons ou oeillères placés sur la même ligne : les bouts étaient ensuite noués ou non l'un avec l'autre °. Il arrivait aussi, surtout dans les exemplaires récents, qu'on fixât séparément les deux épaulières. Sur une ciste de Palestrine, deux courroies verticales, descendant des oeillères, s'accrochent à la ceinture, et, en passant, à deux boutons à mi-hauteur et réunis entre eux Ailleurs, la fermeture est beaucoup plus simple et les lanières verticales ne sont aucunement reliées 7, quoiqu'elles puissent être nouées autour de plusieurs boutons superposés 8. Sur un vase de beau style, une seule attache fixe les courroies verticales, mais plusieurs bandes horizontales, dont l'agencement reste peu clair, assujettissent les épaulières °. Ou bien encore, au lieu d'une cordelette au bout des rabats, deux ou plusieurs en pendent verticalement' °. La complication augmente quand les épaulières, comme sur une peinture de Nicosthènes, sont au nombre de quatre qui s'entre-croisent autour d'un omphalos central ". Mais l'innovation ne dut pas être adoptée, car l'exemple reste isolé. XX. Les lambrequins complètent sur le devant le décor de la cuirasse. II y en a de diverses espèces. D'abord les longs, de forme rectangulaire. Ceux-ci peuvent former une série continue, juxtaposés sans transition apparente, comme découpés dans un tablier de hauteur uniforme 72. Ils peuvent être profondément tranchés et nettement séparés les uns des autres 13, ou un simple trait oblique, tracé près de l'attache, indique la manière dont étaient fixées ces lames, métalliques et mobiles 14. Il y en a de grandeur inégale, alternativement longs et courts''. D'autres sont en séries superposées, dont la plus haut placée masque en partie l'inférieure 16. Enfin le motif peul se combiner avec celui de la frange, que celle-ci soit audessus" ou au-dessous" des lambrequins. Les lamelles arrondies sont rares dans la première partie du ve siècle' °, mais elles apparaissent avant l'an 400 sur un certain nombre de monuments. On les trouve arrondies ou de forme ovale, surperposées en deux 20 ou même trois 21 rangées successives. Elles alternent avec des lames rectangulaires, de couleur différente, ou figurées comme telles sur les vases peints 22. Ou encore elles se combinent avec elles et une suite de ptéryges carrés pend d'une rangée de plaques foliolées 23. XXI. Telle était l'armure prise de face. Nous avons déjà vu que, sur les côtés, son aspect était généralement différent et nous en avons fait pressentir la raison : il fallait que sur les flancs l'armure fût tout particulièrement souple et se prêtât, sans gène aucune, à tous les mouvements du corps. C'est pourquoi nous rencontrons sur ce point des écailles 2'` ou de grandes lamelles rectangulaires2" ayant toute la hauteur des cuirasses et jouant librement les unes sur les autres. Les charnières représentées sur une peinture de vase étaient sans doute plus rigides 16, niais la série de rectangles incisés que nous trouvons à cet endroit de la cuirasse sur l'une des statues d'Égine (fig. 453i1 devait, sans doute, remplir le même office 27 : des courroies passaient par les orifices ainsi ménagés et fermaient l'armure en lui permettant de suivre les mouvements du torse. XXII. Un assez grand nombre de représentations qui montrent la cuirasse de dos ou de profil, la font voir pourvue d'un couvrenuque. Xénophon parle aussi d'un hausse-col protégeant la gorge et au besoin le bas du visage ". On ne l'a reconnu sur aucun monument". Dans une peinture du British Museum" (fig. 4533), le 'fé)iov postérieur apparaît beaucoup plus court que la pièce d'avant : sa terminaison supérieure est marquée par un bord pointillé entre les deux pointes du couvre-nuque. Celui-ci est fixé par la base et seulement par sa partie médiane : 165 Fig. 4536. Cuirasse avec Cous ce-❑utlne. LOB 13 01.013 les deux ailes qui se rabattent à. droite et à gauche peuvent ainsi passer au-dessus du ,;tIa),ov, tandis que rattache médiane, cachée par la bande décorée, ne se meut qu'avec la cuirasse. De cette manière, non seulement la région placée sous les aisselles est défendue par les deux rabats, mais les mouvements du haut du corps et des bras ne sont nullement entravés. En haut, le contour du couvre-nuque suit la ligne des épaules avec une petite bordure en saillie en bas du cou. On a prétendu 1 que cette pièce était rarement employée. L'armure, à dire vrai, était complète sans elle, mais, si nous en constatons rarement la présence, cela tient, sans doute, à ce que les combattants ne sont presque jamais figurés de telle manière que leur nuque puisse être aperçue. Il faut, pour cela, ou qu'ils soient accroupis, comme sur le vase de Londres ou sur la coupe de Sosias (fig. !4330, 4333), ou. qu'ils soient en train de mettre leur armure ou qu'ils se présentent debout et de profil. Rarement ils sont vus de dos 3 ou dans des engagements de guerre qui découvrent leur nuque 3'. Or, lorsqu'ils sont représentés dans ces positions, les monuments de bonne époque les montrent le plus souvent avec le couvre-nuque. On l'apercoit derrière l'épaule d'Achille dans la figure 4328, quoique le héros s'y présente de face; il est très visible dans une statuette de bronze gréco-étrusque (fig. .4536)." et dans une autre trouvée à Agrigente ". On le retrouve sur les bas-reliefs (le Pergame et jusque sur les monnaies d'Euainetos s. Son ornementation est des plus simples, elle se compose d'une ou (le deux bandes avec pointillé Celle de la cuirasse, au-dessous de lui, est semblable 10. Elle est quelquefois, on l'a vu (fig. 1.330), mais rarement, composée d'écailles juxtaposées 1t XXIII, Les monuments figurés nous ont permis d'étudier les deux types principaux de ].'armure grecque, la cuirasse à gouttière et la cuirasse à lambrequins. Les textes ajoutent peu à leurs renseignements. Ils nous parlent â plusieurs reprises de la épelas, armure de cuir attachée aux épaules ", qui ne se confond pas avec la cuirasse de métal que portaient les cavaliers 13. C'est, peut-être celle qu'on remarque sur des stèles funéraires attiques et sur quelques vases peints [EQDITES, p, 763'...Il est d'ailleurs possible que la spolas fût un justaucorps de cuir, analogue à celui que nous ont déjà fait connaltre les peintures des vases corinthiens. Quant aux Iaéllnithohah'ia (demi-cuirassest't) inventées par Jason de Phères 13 et employées par Alexandre 16, nous ne savons aucunement. en quoi elles consistaientNous (Dahu, O «sens. 903, p. 290, 291). « Gerhard, Aas. Pas. I1, pI. cxi.vw. 3 Micali, L'Italie avant les Romains, pl. xxx de l'édit. française; la statuette vue de face a été donnée plus haut (fig. 1649, p. 1254). Voir aussi plus bas, la fig. 4541. 6 Ber. archéol. 1897, pl. xvn et xvm.. Décadrachmes de Syracuse, cf. Svoronos, Tahrb. (le bord supérieur du yiai.si cupide sur les poinles latérales), 10 fonuns. XI, III, p. 195-6). 12Poll. On, 1, 134; 7, ;0; Xen. An. 3, 3, 20. 13 }feu. An. 3, 4, 48; Eguit. 11, cf. Plnlaroh. Phi/. G. 1'6 Poli. On. 1, 134; 7, 155; 10, 142. 18 Poll. On. 1, 134. 13 Tluic, 4, 34, et schol. 2011. Il, 929; II, 830; Aleae. ignorons de même ce qu'étaient les thorah'ites de Polybe 17, corps d'armée intermédiaire entre la phalange et les troupeslégères.Lesarmures ôN.wa)so 0(18 sont peut-être les plastrons garnis de rouelles que nous étudierons plus loin (; XXXI). Les cuirasses de feutre, connues seulement par un passage obscur de Thucydide. étaient portées par les Lacédémoniens à Sphactérie 19, mais nous ne connaissons ni la composition exacte du tissu coACTILrA , ni pendant combien de temps il fut en usage. Les auteurs parlent de cuirasses de lin20, Celles des Argiens étaient renommées. Les Carthaginois s'en servaient à la guerre, et c'est peut-être par eux qu'elles furent introduites en Italie21 Ces cuirasses furent, dit-on, employées pour la chasse. On assure même que la dent des animaux s brisait contre leurs plis serrés ; mais on ne voit guère comment ces justaucorps d'étoffe pouvaient protéger contre les bêtes fauves, et les essais tentés par les modernes 22 semblent avoir été très peu concluants en ce sens. La cotte 11e mailles, â)uaswv 23, faites de chaînons entrelacés, est mieux connue et nous verrons que les Romains et plusieurs peuples de l'antiquité en ont fait usage, mais il n'est pas sûr que les Grecs l'aient connue. du moins à l'époque classique : leurs monuments n'en offrent aucun exemple certain et le Gcpucns; i(TO)v homérique 2: semble avoir un tout autre sens'. XXIV. Ils connaissaient, en revanche, fort bien la cuirasse écaillée, faite de plaquettes cousues et se couvrant les unes les autres. Nous en avons déjà vu (fig. 4530, 1536) de représentées sur les monuments : les textes et les fragments conservés permettent de nous en faire une idée plus précise. Les écailles pouvaient, nous le savons, être de plusieurs sortes et faites de plusieurs matériaux. Pausanias parle d'une cuirasse cvcucwµuclrèç, consacrée sur le versant de l'Acropole. près de 1'Asklépieion, et composée avec l'écaille provenant de sabots de cheval'. Des restes de ces armures sont venus jusqu'à nous. Telle est la cuirasse scythe de RomniLes Barbares faisaient, nous dit-on, grand usage de ces lamelles de corne 2A. Les cottes de fer venaient vraisemblablement des Assyriens : les Perses 2'3, et plus tard les Parthes", durent les recevoir de la vallée de l'Euphrate. Les plaques de métal étaient cousues sur du cuir 31 ou sur de la toile 3-. Les tombes de la Russie méridionale, le tertre des Sept-Frères, le tumulus de Kertch, la nécropole de Nymphacon, les environs de Nicopol en ont livré un grand nombre de spécimens, dont la doublure était méme conservée. Les Antiquités du Bosphore Cinamérien montrent comment étaient fixées ces plaques : trois trous percés en haut du rectangle permettaient de les attacher à l'aide de rivets 33 et vers le lias, du côté arrondi de la languette, un clou les empêchait de se relever sous le choc ~cArAPnaacTlj. Les tètes des clous étaient rabattues sur la lame 3'. Les plaques, ainsi maintenues, étaient rectangulaires ou carrées, fr..56, 1 (Ant/tol. I3crgk-lliller, 48 éd.) ; Pans. 1, 21, 7 ; Herod. H. 182; imt./toi. .gr. XIV, 73 Suid. s. MEqu1 O; Corp. iriser. Mt. 1l. 731: C. rendu, 1874. p. 183. 21 Annali d. Ist. 1874, p. 257 et s.; Nouant. X, pl. xb, fig. 3; x d, fig. 6, 10; Helbig, Die Italil,er in d. Poebeze, p. 68. 22 Papadopoulo-Vrelos; ltdnu des .sa!'ants élit. Acad. des Inscr. 1, 18444, p. 337 et s.; Hermann-Droysen, p. 8. 23 poil. On. 1, 134. 2« Hum. Il. V, 713; XXI, 31. 2, Reichel, Horn. VVaffen. p. 101 et sq. 20 Pans. 1, 21, 3-6. 27 Koudakoff-Tolstoï-Reinach, Antiq. de la Russie mérid. p. 208. 28 Amm. Marcel. 17, 12, 2 (Guadet: et Sarmates en 358 ap. J.-C.). Autres exemples dans Stephani, C. rendis, 1874, p. 184, 29 Her. 7, 61. 30 Koudakoff, 1. c. p. 350. 31 C. rendis, 1876, p. 223, 2; 18744, p. 222. 32 Koudakoff, 1. c. p. 268. 33 Koudakoff, I. c. p. 268; Antiq. Bosph. Cim. pl. xxsu, 4-6 ; Ibid. pi. xxvu, 3 (p. 74, 75, éd. Reinaeh) ; C. rendus, 1874, p. 222 ; 1876, p. 113.5, 3« Anlig. Bosph. Gin,. pl. xxsn, 4-0. passaient des lanières: 1a plaque correspondante étant disposée de même et généralement. de manière àce que les anneaux alternent ou s'entre-croisent, rien n'était LOR 1319 L011 les angles inférieurs généralement abattus. Elles pouvaient avoir aussi la forme d'écailles de poisson, et se superposer en rangées alternées, le côté concave des ménisques tourné tantôt vers la droite et tantôt vers la gauche' . Le fer pouvait être doré, comme chez les Perses2 et au tombeau des Sept-Frères. oit une lame d'or enveloppait le noyau métallique 3. On a trouvé dans les nécropoles de la Russie méridionale beaucoup de ces écailles doublées et dorées. La plupart des lamelles devaient être de bronze ceL alliage étant à la fois plus souple et plus résistant. XXV. En dehors de ces fragments, un nombre limité de cuirasses entières est venu jusqu'à nous. Nous les avons réservées pour la fin, parce que, sauf une exception, elles ne sont pas sûrement helléniques et qu'elles ne reproduisent exactement aucune des deu). armures que nous avons distinguées. Si l'on devait les rattacher à l'une d'entre elles, ce serait de la cuirasse à gouttière qu'elles procéderaient, mais sans le relèvement du yuxnov au bord inférieur. C'est la preuve qu'il n'y eut pas abandon de la première forme au profit du perfectionnement nouveau, mais transformation insensible du type primitif. Parmi ces cuirasses, les deux exemplaires archaïques d'Olympie occupent le premier rang. Ce sont des plaques dorsales, des sujets incisey représentent une scène compliquée, mais sans grand rapport avec la forme de l'armure et du corps, comme on le voit par celle qui est ici reproduite (fig. 4537) ; une bordure en relief y marque le contour des épaules. lin exemplaire de Cassel est décoré de spirales simples, semblables à celles qui ornent la surface des cuirasses à gouttière'. Les autres, dont beaucoup de musées possèdent des exemplaires, se raflaclient à ces modèles primitifs : elles sont généralement simples et sans surcharge d'ornements (fig. 4538) 7, Ces différentes armures se ferment sur le côté et d'une manière àpeu près identique : sur les bords sont ménagés ou rivés un certain nombre d'anneaux dans lesquels plus facile que d'assujettir solidement les deux ybxnz. Des agrafes, Ta?dvxt e, ou une charnière pouvaient d'ailleurs remplir le même office. XXVI. Nous placons à la suite des cuirasses grecques celles des statues dites loricatae ou t/toracatae' qui en sont dérivées et dont on voit revêtues les images des empereurs romains, celles de Mars et d'autres dieux guerriers. Avant de les décrire en détail, notons brièvement les caractères communs à tous les exemplaires. Sur la plaque allongée, couvrant le corps jusqu'aux hanches, était souvent nouée la ceinture souple (cinctoriicni) avec son flot relevé "0. Les lambrequins s'attachaient au bas de la ligne courbe qui terminait en bas l'armure, comme sur la cuirasse à musculature modelée des Grecs. On distingue parfois, sous ces lambrequins, une cotte de toile plissée adhérente à la cuirasse. Aux deux épaules, un ou plusieurs rangs de languettes ou lambrequins ou des manches très courtes, généralement frangées, tenaient également au plastron de métal. Les ornements les plus divers étaient prodigués sur la cuirasse. Les statuettes de bronze qui en sont revêtues sont fréquemment " incrustées d'argent ou de cuivre mat. Il devait en être de même dans la réalité, car les statues de pierre, revêtues du même costume, gardent les traces d'une polychromie vive et variée f2. Ces différentes teintes juxtaposées correspondaient à celles qui étaient obtenues sur les exemplaires de luxe par les procédés de l'incrustation, de l'émail ou de la niellure [CURYSOGRAPIIIA1. Nous étudierons successivement dans ces cuirasses les reliefs du buste, les épaulières et les lambrequins. XXVI1. En haut du torse, le gorgoneion, que la cuirasse grecque des temps classiques avait déjà connu, rappelle presque invariablement l'égide' ', devenue un emblème de la puissance souveraine 'AECTS, p. 103 et suiv.]. Au-dessous du gorgoneion, rien n'est plus fréquent que de rencontrer des animaux fantastiques, affrontés ou groupés. Les griffons, que l'art hellénistique représentait si volontiers, LOR 1312 LOR s'opposent en paires, les têtes en arrière ou retournées l'une vers l'autre, une patte de devant levée, la gueule généralement ouverte et menaçante'. Ils sont séparés, le plus souvent, par une palmette ou une simple fleur', un candélabre ou un thymiaterion 4. Au-dessous parait souvent un aigle, tenant la foudre dans ses serres, et les ailes éployées '. Parfois les légendes hyperboréennes sont rappelées et illustrées. Deux Arimaspes combattent deux griffons 6. D'autres êtres fantastiques, tels que les pégases 7, les dragons 8 et les hippocampes, seuls ou montés par des Néréides 9, remplacent parfois les griffons. D'autres représentations, plus rares, sont mythologiques, voire même allégoriques. La centauromachie'9, ou des légendes empruntées à l'enfance de Jupiter il, en fournissent'les sujets. Certains motifs sont plus compliqués. La présence simultanée de Minerve, de la Terre portant un fruit, et de l'Océan, sur une armure du palais Colonna 12, est moins une flatterie qu'un rébus ingénieux, de même que le quadrige et le dieu couché d'une statue de Naples13. Deux marbres d'Athènes, trouvés dans le gymnase d'Hadrien, sont décorés d'allégories relatives à l'Iliade et à l'Odyssée ''°. D'autres représentent des divinités ou des personnifications de villes, telles que Cyrène", ou Dolichenus entre deux taureaux 16. Parfois des animaux , spécialement consacrés à certains dieux, en remplacent l'image, tels que le taureau pour Dolichenus " et, pour Jupiter, l'aigle 13. La Victoire est très fréquemment représentée sur les cuirasses impériales. Elle apparaît quelquefois seule, comme motif central et entourée d'emblèmes divers 19, ou comme Tauroctone, sacrifiant le boeuf en signe de triomphe 20. Mais, le plus souvent, les Victoires sont au nombre de deux, elles volent ou s'avancent vers le milieu du buste. On les voit portant une couronne et un candélabre, groupées autour d'un thymiaterion 21, portant un vexillum22, ou elles tiennent dans leurs bras des boucliers 23. D'autres fois on les voit occupées à construire un trophée2', ou entourant Minerve ou le Palladium (fig. 4339 et voir 1MDERILM, fig. 39882). Des allégories font allusion aux guerres impé riales. Sur une statue de Lucius Verus, la Victoire, tenant la palme et la corne d'abondance, se dresse entre deux trophées, auprès desquels un Barbare vaincu est agenouillé ; en bas, une femme couchée, portant des fruits, représente la Terre 26. Sur une statue de Salone, deux Barbares sont enchaînés de part et d'autre du trophée 27. Ou bien, au lieu des deux prisonniers, une femme captive et un captif sont adossés au poteau triomphal96. Ailleurs une femme barbare à genoux porte la main à un trophée qui se dresse au-dessus d'une tige d'acanthe : au-dessous, un enfant nu est accroupi29. L'allusion est plus manifeste encore dans la statue d'Auguste, trouvée à Prima Porta. On y voit [IMAGO, fig. 3974 entre autres motifs, un Barbare remettant des enseignes à Mars Ultor C'est la représentation d'un fait historique récent, la victoire qui avait effacé la honte de la défaite de Crassus et rendu à Rome les aigles prises par les Parthes. XXVIII. Les épaulières des cuirasses impériales ont généralement la forme et le mode d'attache des armures helléniques. Tout au plus peut-on relever deux ou trois exceptions. Sur quelques bustes les pattes paraissent fixées par devant et il semble qu'on les rabattait par derrière 31, mais ce peut être une illusion et un simple motif ornemental. Ailleurs, le rabat se fixe, sans noeud ni cordelette, à un bouton ou une saillie du plastron 32 : nous avons déjà rencontré en Grèce ce mode d'attache. Sur un bas-relief de la Piazza di Pietra, les épaulières, au lieu d'être éloignées l'une de l'autre et de former entre elles un angle aigu, sont rapprochées, verticales et parallèles 33 ; elles descendent du cou, non des épaules, et ne conservent plus que la forme, et non le rôle, des anciens rabats rectangulaires. Le décor de ces pièces est moins varié que celui des yua),a, et à peine plus riche que celui des armures grecques de l'époque classique. On y trouve avec la tête de lion 34 et le masque de Gorgone, qui nous sont déjà connus, des foudres ", des Victoires jouant de la trompette 3'. XXIX. Les lambrequins sont disposés d'une manière plus compliquée et plus richement décorés. Nous ne pouvons songer à distinguer les différentes manières dont ils s'attachaient au bas de la cuirasse. Le trophée dit de Marius qui est reproduit figure 4334, porte cinq rangs superposés, deux de lambrequins à coins arrondis, un de languettes rectangulaires, et deux de cordelettes frangées. Ailleurs, des lambrequins rectangulaires et à mascarons surmontent deux épaisseurs de lamelles à bout frangé". Ailleurs encore, les plaques sont suspendues à des écailles arrondies et posées sur une sorte de tablier, fait de toile ou d'étoffe 38. Les écailles supérieures ont parfois ensuite la cuirasse à gouttière 21 et toutes les variétés de l'armure grecque, la cuirasse et la cotte couvertes d'écailles (Voir fig. 11536) 22, la cuirasse de deux pièces (Voir flg.4538) reproduisant la musculature du torse 23, la cuirasse à épaulières et à lambrequins découpés dans le cuir et couverts de plaques de métaI, sur plusieurs rangs, quelquefois montant jusqu'au milieu de la poitrine (fig. 4540) 24. La statue de bronze connue sous le nom de Mars de Todi2e offre le type d'une cuirasse à épaulières, lambrequins et couvrenuque, entièrement faite de lanières serrées, cerclées de bandes qui les maintiennent (fig. 45Ii11. Toutes les manières de remplir les divisions de la cuirasse qui ont été étudiées chez les Grecs ont été employées par les Étrus paraissent faites de cuir ou d'une LOR '1313 L011 double épaisseur'. Un fragment de statue colossale montre bien comment étaient disposées ces franges qui, très épaisses et très rapprochées, devaient bien défendre contre les coups 2. Une infinité de motifs décorent les plaques. Parmi les ornements, il faut citer les rosettes les foudres 4, les casques 3, les boucliers s. Parmi les masques d'animaux, on peut relever les tètes de lion', le plus fréquent des prophylactiques ou des symboles, les tètes de tigre 8, de panthère de bouc 10, de bélier'', d'éléphanti2, de taureau1', d'aigle'. D'autres sont allégoriques ou mythologiques, comme les masques scéniques 15, les tètes d'Ammon 10, de Pan barbu", de Cha rybde18 ou les gorgoneions 1D. A. DE RIDDEl3. XXX. En Italie, nous trouvons d'abord l'armure de cuir. En Étrurie, elle est représentée sur des monuments très anciens (t. II, fig. 1834)'0. On y rencontre ques 26 et ils paraissent les avoir encore compliquées. On remarque quelquefois sur la poitrine des guerriers une plaque carrée diversement ornée 27, qui est peut-être le xo°,pôto(pS)(a; dont il sera question plus loin ( XXXI, XXXII) et, suspendu àla ceinture, un tablier en demi-cercle, le plus souvent couvert d'écailles, pour la défense du ventre28. La figure 4542 reproduit un fragment en terre cuite trouvé à Chiusi 29 ; le tablier y est placé au-dessus d'un quadruple rang de lamelles de cuir découpé; il est attaché à une large ceinture sur laquelle une lame de métal semble être fixée par des boulons. La ceinture des cuirasses étrusques est souvent d'une très grande hauteur et renforcée par des plaques et des clous à tète plus ou moins épaisse 30. Sur une urne sculptée du musée de Chiusi 31 elle est ornée de personnages. XXXI. Dans l'Italie du Sud, l'armure est moins compliquée. Nous nous contenterons de rappeler d'abord un vête ment qu'on a pu voir ailleurs [BARBARI, fig. 793], sorte de justaucorps de cuir, orné de bandes verticales et serré par une ceinture, qui n'est pas, à proprement parler, une cuirasse32.Mais ce sontbien des cuirasses que portent ( fig.4543) les guerriers, vrai semblablement Samnites , représentés dans les peintures d'un tombeau de Paestum33, et dont on retrouveles analogues sur des vases peints de l'Italie méridionale 34 ; e cuirasses enveloppent le torse et se prolongent en avant de manière à protéger le N'entre; elles LOR 1314 LOR étoffe épaisse de couleur foncée, sur laquelle se détache en clair un plastron carré modelant la poitrine. Celui-ci est: fixé aux épaules et sur les côtés par des courroies. La même armure, un peu moins large et en forme (le coeur, au lieu détrl carrée, se voit (fig. 454ii) sur une statuette de bronze trouvée en Sicile ; le plastron est orné ou renforcé de trois disques en bosse. Une cuirasse semblable (fig. 4545), venant d'Apulie, est conservée au Musée de Karlsruhe 2 : le plastron, à peu près triangulaire, échancré au cou, est orné de trois bossettes circulaires et bordé de petits trous qui ont servi àlafixer sur un rembourrage. Quatre plaquettes rectangulaires, reliées par des agrafes au bord de l'arme, étaient rabattues sur les épaules et sur les flancs. Les représentations d'armures semblables sont fréquentes sur les vases peints de l'Italie méridionale '; on ne les rencontre pas ailleurs, ni en Étrurie, ni sur les monuments romains. On peut se demander cependant si le pectoral (dont on doit aussi rapprocher des cuirasses à plaque carrée centrale figurées sur des monuments étrusques 0) n'est pas le zapôtoyéaas dont parle Polybe t', qui fut adopté par l'armée romaine. XXXII. Nous connaissons mal le costume le l'armée romaine primitive. On sait que, d'après la constitution de Servius Tullius. les citoyens de la première classe, à qui leur fortune ne permettait pas d'entrer dans la cavalerie, portaient, dans l'infanterie, une armure complète ; la cuirasse en faisait nécessairement partie. Nous ne savons comment elle était faite. Tite-Live dit' qu'elle était de bronze. Celle de cuir était d'ailleurs en usage chez les Romains, le nom, lorica, commun à toutes les cuirasses, l'atteste suffisamment, soit que celle-ci fût faite d'un assemblage de lanières découpées se superposant l'une à l'autre. comme l'indique Varron', et pareille à quelques-unes des cuirasses que nous avons vues en usage chez les Grecs et chez les Étrusques (Voir les fig. 4540, 4641), soit qu'elle enveloppât le corps tout d'une pièce comme celles des guerriers du tombeau de Paestum dont un est plus haut dessiné (fig. 4543); et la plaque carrée que l'on remarque sur la poitrine pourrait être le xapliapu)tal que, d'après Polybe ,les lias! ah, les principes et les triarii ajoutèrent à leur cuirasse : cette plaque était de bronze et de trois quarts de pied en hauteur et en largeur. La cuirasse de cuir ne parait pas avoir jamais été abandonnée : elle fait pallie du costume d'un légionnaire de la fin du 1°r siècle ap. J.-C., dont l'effigie a été conservée [Lralo, fig. 4414; on l'y voit munie d'épaulières, d'où deux rangs de lanières découpées descendent sur le haut des bras, des lanières semblables couvrent aussi le haut des cuisses'. Au ne siècle, on rencontre de nombreux exemples de la cuirasse de cuir, sur les colonnes et les arcs triomphaux : elle y est portée" par descavaliers (fi g. 1_516), par des troupes de pied légèrement armées et par des officiers de différents grades". Mais ce n'est pas celle qu'on y observe le plus fréquemment. La cuirasse de l'infanterie légionnaire est désormais celle que les antiquaires modernes ont appelée, faute d'en connaitre le nom ancien, lorica seginentata. Ce qu'on remarque d'abord dans cette armure, c'est une série de lames de fer12, se superposant de telle façon que le bord inférieur de l'une couvre le bord supérieur de l'autre, et assez flexibles pour se prêter aux mouvements du corps. Les unes, enserrant la taille et le bas de la poitrine, peuvent s'ouvrir à l'aide de charnières placées au milieu du dos (fig. 4547): les autres, couvrant les épaules, sont fixées devant et derrière par des boutons. Mais ces lames ne constituent pas à elles seules la cuirasse, elles s'appliquent sur un corselet de deux pièces, lesquelles se joignent sur la poitrine, où elles sont attachées par des boucles, et sont munies de charnières, derrière le dos,qui leur permettent de s'écarter. C'est ce qu'on voit nettement dans les figures 4547, 4548, tirées des bas-reliefs de la colonne Trajane On peut reconnaître qu'il s'agit de simples soldats, d'après les travaux auxquels sont souvent occupés ceux qu'on voit ainsi armés. On ne saurait dire, dans l'état actuel de nos connaissances, à quel moment précis cette cuirasse fut adoptée pour le miles gregarius. D'autres cuirasses continuaient à être portées dans le même temps : d'abord la lorica de cuir, comme on vient de le voir (fig. 4546); puis des cuirasses tout en métal, ou en métal recouvrant une enveloppe de cuir ou d'étoffe résistante. XXXIII. La cuirasse droite, de deux pièces, le Odpa; atiâLoç des Grecs, à épaulières et lambrequins, telle qu'on l'a vue figurée sur des monuments de la période hellénistique", s'est conservée chez les Romains. Elle fut réservée aux officiers qui exerçaient un haut commandement, aux tribuni, aux legati [LEGIO, fig. 4424], surtout à l'inlperator : c'est celle que porte (fig. 4549) Cn. Domitius Ahenobarbus, sur la frise de l'autel, aujourd'hui au LOR 1345 LOB Musée du Louvre, qui fui dédié dans la deuxième moitié du ier siècle av. J.-C.', et nous la voyons se perpétuer jusqu'à la fin de l'Empire «Voir BAUMES, fig. 775). Les statues des empereurs dites loricatae nous l'ont fait connaître dans tous ses détails (Voir ti XXVI et suiv.). On la retrouve traitée avec plus de simplicité dans les bas-reliefs des colonnes de Trajan et de Marc-Xurèle et sur les autres monuments oit l'empereur est représenté en action, dans son costume de guerre 3 : là sa cuirasse ne diffère en rien de celles de l'état-major qui l'entoure. Elle est unie. Les lambrequins consistent en lanières de cuir, plaquées de métal et frangées; tous les officiers, y compris les centurions, en portaient de semblables, attachés à une cuirasse de cuir ordinairement couverte d'écailles. Il nous reste à pari ces cuirasses à écailles ainsi que des cottes de mailles. Les unes et les autres furent portées par les Romains sous la République et sous l'Empire. XXXIV. La cuirasse ou cotte de mailles, faite de chaînons de fer ou de bronze (ex anulis ferrea aswv 3) engagés les uns dans les autres, nous r.P, est connue par quelques tants et par d'assez nombreux monuments où elle est représentée. La figure 4550 reproduit un fragment trouvé àMayence, avec beaucoup d'objets romains, et conservé au musée de cette villes; la ligure 4551, quelques maillons appartenant au Musée de Kiel 1; on en remarquera la rivure. Les maillons s'appelaient kami 8. Leur enchainement n•'était pas toujours simple comme dans l'exemple que l'on a sous les yeux : ils pouvaient s'insérer l'un dans l'autre par un double ou triple anneau cf. CATENA, fig. 1243? : d'où, par analogie avec les lisses (rida) où entre le fil, dans le tissage des étoffes rTELA1, les expressions bilix et trilix appliquées à la trame de métal tloricant eonsertamhamis auroque trilicemet. C'est une cotte de ce genre que portent, sur le monument déjà cité10 du Louvre, les cavaliers (fig. /Ii52), probablement de la cohorte prétorienne, qui assistent à la cérémonie des suozletaurilia ; leur costume et leurs armes sont ceuxque Polybe " décrivait déjà un siècle auparavant. La lorica kamis conserla se retrouve sous l'Empire, figurée sur le tombeau d'un porte-enseigne'", elle se rencontre fréquemment sur les bas-reliefs des colonnes et des arcs triomphaux 13. XXXV. La cuirasse à écailles (lorica .slaanzis concerta ou concatenatal4), était faite d'écailles de fer, de bronze ou de corne ; des érailles en os sont conservées au Musée de Naples ". Celles-ci sont liées les unes aux autres au moyen de fils de métal passant par des trous placés en haut, de chaque côté; cette attache n'est pas visible quand les lames sont réunies, le bord inférieur de chaque rangée couvrant le bord supérieur de la rangée suivante (fig.Iiàà3'h On peut voir ailleurSLGATAI'liRACTA) des écailles disposées d'une manière analogue, porvenant des tombeaux de la Russie méridionale. Les lames pouvaient être aussi cousues ou rivées sur du cuir, ou sur une autre étoffe consistante, et toujours posées en imbrication, comme les écailles d'un reptile ou celles d'un poisson. On a vu que les Grecs avaient déjà des termes spéciaux, yo tBwTÔS, y olelo rds, pour distinguer 1.es cuirasses, suivant que les écailles ressemblaient davantage à celles d'un serpent" ou à celles d'un poisson 11. Les Romains en avaient un autre, lorica plumata, qu'un historien applique le aux armures d'écailles dont les Sarmates se couvraient tout entiers, LOR 1316 LOR eux et leurs chevaux, et qui convient également à des cuirasses figurées sur les monuments, dont les écailles, à nervure médiane, imitent les plumes d'un oiseau. Nous en donnons pour exemple celle d'un des trophées dits de Marius, datant probablement du temps de Domitien «fig. 4534) ; cette cuirasse est sans épaulières, mais garnie de lambrequins très ornés comme on en voit aux cuirasses impériales. Du reste, dans plusieurs de leurs portraits, les empereurs sont revêtus de la cuirasse à écailles 2. Il semble qu'elle ait été portée par des officiers de tous grades ; car, tandis que les monuments du u° siècle montrent, comme on l'a dit plus haut, la cuirasse qu'on est convenu d'appeler seglRenlala, seule à l'usage des légionnaires, la cuirasse à écailles fait partie de l'armure des centurions sur la pierre de leurs tombeaux 1LEGIo, p. 1071] et sur d'autres monuments «fig. 'e5:35) ; elle appartient aussi à des signifeci, à des cavaliers, auxiliaires ou légionnaires EQL-ITES, fig. 2733, '74l '", en tout cas aux cavaliers prétoriens; car on sait, par le témoignage de Dion Cassius', que les prétoriens eurent la cuirasse à écailles (Océsaxaç tioûç ?,E. rtôw'ro.,ç) jusqu'au règne de Ma crin, qui les en débarrassa sous prétexte de les rendre plus légers dans le combat. La cuirasse cependant resta en usage au m° et au ive siècle : Végèce 6 semble l'appeler indifféremment lorica et calaplzparla. Le même auteur dit que les soldats amollis du Bas-Empire ne demandaient qu'à être soulagés du poids de la cuirasse et qu'ils ne la portèrent plus à partir du règne de Gratien. Les cuirasses écaillées que l'on voit longtemps après sur des monuments du Bas-Empire et de Byzance ne sont pas seulement un souvenir de l'ancienne armure romaine, elles appartiennent aussi bien à l'armure des Barbares de l'Orient et du Nord [CATAPHRACTI], que les Romains connaissaient depuis longtemps pour l'avoir vu porter par des auxiliaires qui combattaient à côté d'eux 8 et qui prirent dans l'armée une importance toujours croissante 9. XXXVI. On a aussi appelé Owçnxtov, l'armure qui fut donnée quelquefois aux éléphants [ELEPJIAS, p. i;10]. Par extension, les mots Oéoa;, Owpzxtov, Ompxxsïov, lorica loricula ont été appliqués à toutes sortes d'ouvrages de défense d'un lieu fortifié, murs, remparts, parapets, palissades ou mantelets qui protégeaient les machines des assiégeants 10 ou derrière lesquels manceuvraientles assiégés 11 ; et aussi au pavoi de la gabie servant de poste à des marins au haut d'un mât [CARCHESIUM, p. 92012. Puis, on appela lorica tout mur, toute barrière formant clôture'. Vitruve' 6 appelle lorica l'enduit dont une muraille est revêtue. G (rz; est le nom de la pièce circulaire du moyeu, dans laquelle s'engagent les rayons d'une roue''. C'est aussi la sertissure d'une pierreservant de cachet". E. SACrao. LORIC0RIUS. Owçaxo7owç1. Fabricant de cuirasses. La fabrication des cuirasses (Osi, xo7roix) 2 dans l'antiquité formait une branche particulière de l'industrie ; elle était florissante à Athènes 3. Ou voit quelles en étaient les règles et les difficultés par une conversation de Socrate avec Pistias, ouvrier d'Athènes connu pour y exceller Quoiqu'on vendit des cuirasses toutes faites, il était bon de prendre mesure lorsqu'on voulait qu'elles fussent parfaitement adaptées à la conformation du client, et c'était justement par son habileté à saisir les proportions du corps et à les rendre dans ses ouvrages que Pistias surpassait ses confrères. Chez les Romains, il y avait des fabricae lorica7•iae attachées au service des armées'. Sous le Bas-Empire, lorsqu'on créa les monopoles et les fabriques impériales, il y eut des fabrècae loricariae et Clibanariae, entre autres à Autun, à Crémone, à Mantoue, à Antioche, à Nicomédie et à Césarée'. G. L9FA5'E.