Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article MAIMAKTERIA

MAIMAHTERIA. L'existence d'une fête de ce nom est une conjecture de Meursius 1 ; mais, en réalité, aucun texte ancien ne fait mention des soi-disant Maimaktcria. Ce que l'on sait de plus positif sur la fête dont les érudits modernes ont ainsi forgé le nom se réduit à quelques indications des lexicographes. Le cinquième mois du calendrier athénien s'appelait J1atflaal'ir'r•ion [CALEVmll31FMI;ilcorrespondaittantôt exactement au mois de novembre, tan tôt à mi-novembre et midécembre 2. Ce nom lui venait d'un surnom de Zeus, dit Matu-zz7•rIç°, épithète que les lexicographes dérivent du verbe N-a.t.tzcam et qu'ils interprètent comme signifiant : le perturbateur, l'impétueux, le bouillonnant, l'enthousiaste, le désordonné 4. Zeus Maimaktès était donc le dieu des troubles atmosphériques qui marquent la transition entre l'automne et l'hiver '. Maimaktérion signifiait le mois des tempêtes : c'était le ventôse du calendrier attique. Cependant, Photius' a recueilli une autre interprétation qui conviendrait mieux au culte de Dionysos qu'à celui de Zeus. D'après lui, Maimaktérion désigne l'agitation qui se produit autour de la vigne, à (-époque des vendanges et de la fabrication du vin. Cette interprétation a sans doute été suggérée par 1a proximité du mois Maimaktérion avec la récolte et le travail du raisin qui, en certaines années, pouvaient n'être pas terminés vers le milieu d'octobre, avec la fin du mois Pyanepsion. Il en résultait que les premières fêtes maimaktériennes semblaient être le prolongement des (J.schophories, fêtes des vendanges Sur le calendrier liturgique de la Panaghia Gorgoépikoos à Athènes', on re connaît les symboles du mois -P.ts Maimacktérion dans les figures Fig. 4791.Danse de fêle a luxer comprises entre le signe du Scorpion et celui du Sagittaire, immédiatement après les représentations des vendanges. Ce sont d'abord deux personnages drapés', dont le premier ne touche au sol que par un pied, tandis que l'autre pied est relevé dans une attitude mouvementée qu'on a interprétée comme un pas de danse. M. lleuzeyt0 a reconnu dans ce personnage (fig. 11791) un homme travesti en femme et exécutant une danse liturgique à l'occasion des fêtes maimaktériennes, analogue aux danses voilées qui accompagnaient à Athènes la célébration des Antesthéries ". Dans l'ajustement du danseur, dont la tète et le corps sont étroitement enveloppés et les pieds chaussés de hautes ettl.hades [nases] dont il bat le sol, il faudrait voir le symbole de la saison froide; et dans ces bonds violents qui soulèvent le corps, le symbole du mois des perturbations, celui où l'air et la mer s'agitent et bondissent'. D'autre part, le seul témoignage positif que nous possédions sur les rites du mois Maimaktérion est celui d'une inscription attique'-, sorte de calendrier de sacrifice oit un service est marqué pour le '20 du mois en l'honneur de Zeus Laboureur (At ÉEO,cyt);l, avec offrandes de galettes, pains, fruits assortis et, libations sans vin. On peut rapprocher de ce fait. les représentations de labourage qui font suite au danseur voilé dans la. section du calendrier sculpté relative au mois Maimaktérion : on y voit un attelage de boeufs conduit par un paysan el. tan semeur avec son panier. Ce sacrifice à Zeus Géorgos avait un caractère tout rural.. Dans quelle mesure Zeus Géorgos doit-il être envisagé comme une hypostase de Zeus Maimaktès, c'est ce qu'il est difficile de déterminer. Mais, malgré la pénurie et le vague de nos renseignements, certains érudits ont prétendu reconstituer plus complètement le caractère et le programme des fèces de Zeus Maimaktès. Quelques textes" présentent ce qualificatif Maimaktès comme un équivalent de Meilichios et de Katha.rsios. On en a conclu que Zeus Maimaktès était l'objet, d'un culte expiatoire destiné iL apaiser ses colères et à transformer le dieu des tempêtes en un dieu bienveillant et purificateur De là ii attribuer à ces cérémonies le caractère de mystères, il n'y avait qu'un pas. Auguste Mommsen 5, alléguant les textes qui évoquent il. propos du qualificatif t,.atu«xr'riç des idées d'ent.housiasmea voulu reconnaitre dans les fêtes inaimaktériennes une solennité bacltiqu'e qu'il identifiait avec les l'ALOt; inais cette théorie n'est plus soutenable, depuis que la nature des Hu/na est mieux connue. On serait peut-être plus fondé à tirer parti d'un autre groupe de textes qui, avec des éléments assez mélangés, contiennent aussi de précieux indices. Eustatlie 1 rapporte qu'on désignait par le mot ôtazo,u.riEiv une cérémonie expiatoire célébrée sous l'invocation de Zeus Meilichios àla fin du mois Maimakérion. La peau de la victime, connue sous le nom rituel de toison de Zeus [Duos soniuN, FLECStNlA, LUSTI4ATIOj, y jouait un rôle parmi les 7cop.7.a"s«; on procédait aussi à des lustrations dans les carrefours °. L'ancienne symbolique prétendait retrouver dans cette Griech. hfylh. 12, p. 131-132, 144. ,i Aeortologie, p. 317. Dans la 2° édition de cet ouvrage, parue en 1898 sous le litre de L'este der stadl At/ma (p. 366, n.4), cette théorie a été complètement modifiée. La fête du 20 Maimactérion se rapporterait à Zeus, considéré comme père de iiacchos, dieu de l'ivresse, et aurait été l'anniversaire de la seconde naissance de Bacchos (Lucian. Deor. chat. 0). caia8a°. Phrynieh, ap. Pekkce, Anecd. p. 7. 15. 'soir le commentaire de Müller dans mystères d'Eleusis, 1900, p. 51) observe avec raison que cette purification spéciale n'a pas un lien nécessaire aces les mystères d'Eleusis ; A. Mommsen (Op. l.) admet que la lustration maimactérienne pouvait être une sorte de préparation aux Thesmophories. Pausanias (I, 34, 3) signale un emploi analogue de la peau du bélier sacrifié dans les purifications da sanctuaire d'Amphiaraos; cf. Slrab. VI, p. 284 et pour les représentations figurées, Bullettino, 1.879, VIt, p. 1-18. Quant aux aopaaxa, certains savants les considèrent comme une fête du mois Maimactérion, les Tommies voir moscontox, c.rsrnoc,o, p. 427); interprétation excessive, semble-Lit les toison du bélier immolé à. Zeus Meilichios le symbole du nuage 70. Zeus Maimaktès, dont la colère avait assemblé les nuages, une fois apaisé par le sacrifice, se serait transformé en Meilichios, el. il purifiait le ciel assombri. De plus, cette purification passait dans L'ordre moral: Meilichios devenait Katharsios, et le contact de la peau de la victime, par sa vertu piaculaire, conférait aux pécheurs le pardon de leurs fautes. Aujourd'hui, les communions piaculaires de ce genre s'expliquent par le totémisme : le cas du âtôç xoàè,ov rentre dans la série des cas oii le dieu était adoré sous la forme d'un animal totem. Les adorateurs se revêtaient, après le sacrifice, des dépouilles de la victime pour se communiquer à eux-mêmes sa nature sacrée 11. Le bélier considéré en Grèce comme totem de Zeus dérive peut-être des rites d'Ammon chez les Égyptiens ''. En tout cas, l'attribution par Eustatlie du ,1tes x1;Sôtov aux fêtes du mois Maimaktérion et le renseignement topique de Polémon 11, (lui nous apprend que les xystes, pour se purifier, montaient sur la toison en se tenant debout sur le pied gauche 14, nous reportent encore aux représentations du calendrier sculpté d'Athènes. Dans la figure où M. lleuzey reconnait un danseur voilé, ne serait-il pas permis de retrouver un reste de l'attitude rituelle du communiant, qui avait pris contact avec la toison sacrée en la foulant du pied gauche'? Cette interprétation n'exclut pas forcément celle de la danse : elle l'explique plutôt. Car il est, possible que la danse n'ait été qu'une adaptation orchestique de l'attitude rituelle imposée au moment de la purification comme moyen de transmission de la vertu contenue dans la dépouille sacrée, de même que les jeux de l'AS1.oLtASMos sur l'outre bachique dérivaient d'une obligation rituelle analogue. l_e personnage qui fait suite au danseur (n° 7 de la figure 1030), drapé sans que le visage soit couvert et debout clans une attitude de démarche calme et. digne, figurerait le communiant ayant acquis le bénéfice de, la. purification et participant it la 7CoN.77Ÿ, solennelle de bZeus Meilichios. On aurait ainsi, dans lii succession des figures de ce calendrier relatives au mois Maimaktérion, la représentation des phases successives des fêtes maiirtaktériennes de Zeus, considéré tour ii tour comme .Maimaktès, Katharsios-Meilichios et enfin