Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article MERCATURA

MERCATURA. Le Commerce. I. GRÈCE AVANT LE vIIIe SIÈCLE. Nous n'avons sur l'état du commerce grec, dans les périodes les plus anciennes, celles qu'on nomme époque prémycénienne ou troyenne (2500-2000 environ) et celle qu'on nomme époque mycénienne (2000-1000 environ)', que des sources archéologiques. Les sources linguistiques et littéraires n'apparaissent qu'avec les poèmes homériques (1000-700 environ). Période prémycénienne. Elle est qualifiée quelquefois de période troyenne 2, parce que les fonds qui la caractérisent le mieux sont ceux des cinq premières villes (particulièrement de la seconde) qui se sont succédé à Hissarlik, sur le sol de l'ancienne Troie. Ces fonds ont été mis au jour par les fouilles de Schliemann. La population des premières villes de Troie n'était pas de race hellénique. Mais la civilisation qui a régné à Troie a laissé des traces dans d'autres lieux. On a trouvé des fonds analogues dans les Cyclades, à Amorgos, à Mélos, à Santorin (Théra)' ; en Chypre; sur le continent enfin, près d'Athènes, à Tirynthe, à Mycènes, etc. Les instruments et les armes qu'on a trouvés dans ces stations nous révèlent une civilisation intermédiaire entre l'âge de la pierre et l'âge du métal : ce sont encore des haches, des scies, des pointes de flèches, des peignes, fabriqués en pierre ou en os. Mais à côté de ces ustensiles primitifs, on remarque aussi des couteaux, des aiguilles, quelques bijoux de cuivre On y rencontre des vases de cuivre assez grossiers; ceux du fond de Théra révèlent une ornementation florale originale. Tous ces objets sont de types assez semblables, même dans les fonds les plus distants les uns des autres : ceux de Troie et ceux de Chypre présentent des analogies frappantes ; bien plus, des vases identiques, comme forme et comme ornementation, à ceux de Troie et de Chypre ont été découverts dans les plus anciennes nécropoles d'Étrurie, à Tarquinii, Vetulonia, etc. On en a conclu que ces produits ont été introduits par la voie commerciale et qu'il devait exister dès cette époque un commerce de mer Cette conclusion est défendable, bien qu'elle ne puisse être pleinement vérifiée'. En comparant les produits fabriqués de la civilisation troyenne à ceux d'autres civilisations antérieures ou contemporaines (Babylone et Égypte), on constate que les premiers n'imitent pas les seconds; ils sont originaux dans leur facture et leur ornementation. La civilisation troyenne se serait donc développée d'une manière autonome et en dehors de toute action étrangère. Le fonds de Chypre fait exception, il porte seul l'empreinte d'influences orientales (sémitiques) 8. La conséquence serait qu'il n'y a pas eu, dans notre période, de relations commerciales entre l'Orient et la mer Egée. Mais il faudrait établir que tout commerce, quels que soient ses objets, entraîne nécessairement des imitations dans le domaine de la fabrication et de l'art décoratif. L'absence même d'influences orientales dans les pays égéens à cette époque n'est pas établie 9. ll est probable que des relations ont existé entre l'Égypte et la Grèce, sinon par la voie directe d'Égypte en Crète, du moins par Chypre et la Palestine10. Il est possible que les Phéniciens ne servissent pas encore d'intermédiaires à ce trafic. A plus forte raison faut-iI se défier des tentatives qu'on a pu faire pour reconstituer les formes du commerce de la période prémycénienne par la comparaison des formes du commerce dans d'autres civilisations primitives". Période mycénienne (2000-1000 environ'2). Mycènes fut l'un des centres principaux de la civilisation de cette époquef3. Les palais de Mycènes et de Tirynthe, le palais de l'acropole, le vieux mur aux neuf portes et MER 1742 MER faciatis): unguentari facile rogo1. On pourrait multiplier les exemples 2 ; ils suffisent à prouver l'intervention des marchands syndiqués dans la politique municipale, à laquelle leur intérêt ne leur permettait pas de rester étrangers. Aussi les cités reconnaissaient elles leur pouvoir par des faveurs; on leur accordait des places d'honneur au spectacle 3 ; dans les cérémonies publiques ils figuraient avec leurs bannières déployées 4 ; dans les banquets offerts par des citoyens généreux ils n'étaient jamais oubliés s. On alla même jusqu'à leur demander leur concours pour certains services intéressant la municipalité, qu'ils acceptaient de rendre parce qu'ils y trouvaient de leur côté une augmentation d'influence et certains avantages pratiques; c'est ainsi qu'on eut de bonne heure recours, pour former des corps de pompiers, aux hommes que leur profession ou leur commerce désignait plus spécialement : les centonarii et les dendrophori, marchands de centons [caxTO] et de bois, qui étaient généralement réunis aux (abri dans la cironstance 6 [t'ABRI, p. 9561. Cette utilisation des collèges aussi bien par l'État que par les particuliers se généralisa à partir du m' siècle et devint la règle générale. De bonne heure l'autorité impériale avait compris que les collèges de marchands établis dans la capitale étaient un des organes essentiels de la vie journalière, et qu'il était impossible de s'en désintéresser. Elle essaya donc de les encourager. Auguste, Tibère, Claude, Néron avaient accordé des privilèges à ceux qui fournissaient, Rome de blé (mercatores frumentarii) et d'huile ()Tierca.tores oleari) ; Trajan exempta les marchands de blé de la tutelle 8; c'est lui qui donna aux boulangers (pistores) le jus Quiritium pourvu que, étant déjà citoyens de droit latin, ils eussent une boulangerie à Rome depuis trois ans au moins et qu'ils fissent cuire 300 boisseaux par jour 3; il les exempta également de la tutelle90. Hadrien étendit ce privilège en les dispensant de la tutelle des enfants de leurs collèges", c'est-à-dire de ceux qui faisaient partie du même collège, Caracalla accorda pareillement l'excusatio tutelae aux charcutiers, à la condition qu'ils consacreraient à l'annone les deux tiers de leur patrimoinei2 ; pour être admis à ces avantages, les marchands devaient se soumettre au contrôle permanent du préfet de la ville ou de celui de l'annone : ceux-ci tenaient des listes exactes des commerçants qui étaient dans les conditions requises et vérifiaient les déclarations reçuesf3, Au siècle suivant, ces immunités sont encore étendues par l'exemption des munera sordida, en particulier aux charcutiers i3. Ainsi se préparait lentement la réforme que l'on attribue à l'empereur Sévère Alexandre. Jusque-là il y avait eu des commerçants libres, des collèges protégés par l'État parce qu'il s'en servait et des collèges dont il se désintéressait, Désormais tous les collèges de commerçants sont déclarés officiellement indispensables à l'État : on les reconnaît d'utilité publique, on les protège, on les enrôle dans l'administration. Bien plus, on n'admet guère plus qu'il y ait des marchands non syndiqués : presque tous seront réunis en collèges, et en collèges soumis à la même réglementation '°. En retour, on leur accordait certains privilèges; il était juste, disait-on, que ceux qui, par l'exercice même de leur profession. avaient une sorte de fonction publique fussent dispensés, en retour, de charges réservées aux citoyens à qui l'État ne devait rien16, Ces privilèges consistaient surtout dans l'exemption de la tutelle ", des munera sordides et extraordinaria l", la collatio equorum 19, la dispense du service militaire 20, dans la protection accordée contre les abus de pouvoir des fonctionnaires subalternes2t, dans la possibilité, du moins pour les chefs des collèges, de parvenir à certains honneurs". Mais cet état privilégié devait avoir pour les commerçants de terribles conséquences : ils souffrirent de l'oppression dont moururent, aux bas temps, toutes les classes de la société qui avaient quelque rapport avec l'administration. ils subirent, comme tous les corporati, la pire des servitudes. On commença par déclarer les patrimoines affectés pour toujours à l'exercice d'une profession 23 : c'était les frapper d'une hypothèque perpétuelle, comme gage du travail de ceux qui les possédaient, pendant leur vie, comme garantie des services qui devaient se continuer après eux pour le bien de l'l tat2'`. Puis on attacha les personnes au métier à perpétuité : perpetuo sint obnoxii functioni », disent les Codes 33; enfin on déclara le métier même héréditaire : la charge transmise aux enfants par les biens le fut dès lors par le sang, a la fatalité de la naissance, telle devint la loi suprême de l'Empire 26», On finit par faire la chasse à ceux qui essayaient de se soustraire au commerce imposé par la loi et par les ramener de force à leur devoir27. Ainsi finirent les commerçants à Rome. En était-il de même dans les différentes villes de l'Empire et se passa-t-il dans les provinces ce qui se passait dans la capitale? On l'admet généralement 28; là aussi la plupart des négociants se seraient formés en corporations, ceux qui restaient isolés ne formant qu'une infime minorité 29 ; là aussi les collèges auraient été utilisés polir des services publics 30 ; le difficile est de déterminer quels étaient ces services P. Il est certain qu'ils étaient différents de ceux qu'on demandait aux sociétés à Rome et à Constantinople. M. Waltzing a discuté longuement la question 322; sa conclusion est que les membres des collèges municipaux au Ive siècle étaient les auxiliaires des curiales et que ceux-ci choisissaient dans les diverses corporations les spécialistes dont ils avaient besoin pour accomplir leurs fonctions" Ainsi, les décurions devant veiller aux approvisionne MER 174,1 MER soumis. Dès Iors, le collège constitué et « confirmé », suivant l'expression technique', pouvait agir librement. Toute corporation professionnelle se composait de membres actifs, de membres honoraires et de patrons. Les membres actifs, qui faisaient le fond de l'association, étaient ceux qui pour y être inscrits pavaient d'abord un droit d'entrée et qui, de plus, versaient chaque mois une cotisation'. Cet argent leur permettait de profiler de tous les avantages attachés au titre de membre du collège et, en particulier, d'être enterrés dans la partie du cimetière ou dans le monumentacquis par lui'. Les membres honoraires, choisis souvent en dehors des professions auxquelles appartenaient les autres, étaient, au contraire, nommés à cause de leur nom ou de leur influence et dispensés de toute cotisation; leur seule obligation était d'aider leurs confrères de leur crédit et de leurs conseils, ce qui ne les empêchait pas de leur faire plus d'une fois des dons en argent 3. Quant aux patrons, c'étaient des personnages haut placés dont on sollicitait la protection en éctlange du titre qu'on leur décernait ; on leur demandait de défendre en toutes circonstances les droits de la corporation et aussi de se montrer généreux envers elle par des cadeaux de toute sorte que l'on laissait à leur initiative et auxquels ils ne se dérobaient point. La cooptation d'un patron se faisait en séance plénière du collège; et l'on nommait une députation )LEGATIO] chargée d'aller lui porter la tablette de bronze où le décret d'adoption avait été gravé PATRONUS]. Les membres des collèges professionnels étaient divisés soit en centuries8, soit en décuries', lesquelles avaient à leur tète des décurions ou des centurions 10 ils figuraient avec ces divisions sur la liste générale de la corporation (album, fasti) gravée souvent sur marbre et affichée dans la salle des séances". L'administration se partageait entre l'assemblée et les dignitaires. L'assemblée (conventus) se tenait d'habitude dans la chapelle de l'association [scuoLA] 12, aux dates fixées par le règlement ou, dans certains cas extraordinaires, lorsqu'une circonstance fortuite rendait la convocation nécessaire. Pour que ces assemblées fussent valables, il fallait un certain nombre d'assistants, peutètre les deux tiers du nombre total". Elle avait pour fonction primordiale de rédiger et de voter la loi constitutive du collège-LEx], ou d'y apporter tel changement qui pouvait sembler utile 14; puis de prendre des décisions sur tout ce qui intéressait la communauté (affaires courantes, sacrifices à offrir aux dieux ou à la divinité de l'empereur, organisation des repas de corps, sépultures des membres défunts, constructions ou réparations des immeubles de la société, acceptations de legs, récompenses à attribuer aux membres ou honneurs à décerner aux patrons)''. Le pouvoir exécutif était entre les mains de dignitaires élus VI. par l'assemblée : magistri, annuels ou quinquennaux suivant que le collège compte par années ou par lustres ' 3 [MAGISTER] ; curatores, personnages élus annuellement' pour aider les magistri auxquels ils étaient soumis 18 et dont la mission principale semble avoir été de gérer les finances de la compagnie, d'en administrer les biens et de surveiller l'exécution des décretst2; quaestores (trésoriers', qui encaissaient les recettes et opéraient les payements 2° [QUAESTOR], on les nomme aussi arcarii; enfin, secrétaires (scriban, notarii, tabularii` chargés des écritures, des procès-verbaux des séances, et de la garde des archives''. Il est inutile d'ajouter que toute cette organisation est la reproduction exacte de ce qui se passait pour l'administration des cités. On s'est demandé depuis longtemps si ces associations professionnelles avaient pour leurs membres ou pour le commerce un avantage économique 22, si les sociétés de commerçants, en particulier, n'étaient pas constituées en vue d'entreprises communes 23. C'est une opinion que l'on a tout à fait abandonnée aujourd'hui 24; un des arguments les plus probants contre cette manière de voir est que les collèges de commerçants recevaient parmi eux des membres qui exerçaient un autre métier que celui dont ils portaient le nom25, et un métier tout à fait différent, où aucune communauté d'intérêts ne pouvait exister. On a donc reconnu que ces associations avaient pour but et pour avantage de donner à des éléments épars une cohésion et une force qui leur manquait à l'état d'isolement25. Les empereurs ne songeant aucunement à protéger le commerce, il fallait trouver ailleurs des protecteurs. De temps immémorial, les faibles s'étaient faits clients de quelque grand personnage; la corporation fut une nouvelle forme de la clientèle; elle donna à tous ces corps associés le moyen de se défendre; elle leur assura une considération qui leur eût manqué autrement et qui faisait d'eux non seulement des ensembles qu'on ne pouvait pas violenter impunément, qui avaient la force et le moyen de faire valoir leurs réclamations, mais presque des organes de la vie municipale. De bonne heure, en effet, des rapports s'établirent entre les villes et les collèges qui y existaient. Les inscriptions prouvent qu'ils formaient une classe spéciale placée immédiatement au-dessus de la plèbe urbaine; une sorte d'ordre à part qui se range après les décurions et les sévirs augustaux 27, et que sa cohésion rendit bien vite influent. On s'en aperçut aisément : les syndicats n'hésitaient pas à intervenir lors des élections pour recommander et faire passer les candidats de leur choix. Parmi toutes les affiches électorales qu'on a recueillies à Pompéi, un certain nombre émanent de collèges de commerçants: M. Cerrinium aed(item) pornari rodant 28; M. Holconium Priscum II vir. j. d. pomari universi cumHelvio Vestale rodant 29: Cn. Helvium aed. Hernies coin... cairn gallinariis rog.30; Nerum aed, o(ro) 219 MER 17440 MER chands grecs qui vendaient toutes sortes d'objets en détail, au détriment des tabernarii spécialistes ; mais on pourrait aussi y voir des commerçants en boutiques, qui tenaient ce que nous appelons aujourd'hui des bazars. Nous ne sommes pas suffisamment renseignés sur leur compte pour pouvoir préciser. Enfin, tenant le milieu entre les ambulants et les boutiquiers, existait toute une classe de petits commerçants qui étalaient leurs marchandises sur le sol ou sur des tréteaux sous les portiques des rues et des places publiques ; on en voit un exemple dans la même série des peintures du Musée de Naples(fig. 4923)'. D'après la comparaison de quelques textes on peut admettre que certains commerçants avaient des succursales dans différents pays. L'exemple le plus frappant est donné par Marquardt2. Une famille de tlrurarii de Rome portait le nom de Faenius ; on connaît deux de ses membres : L. Faenius Primus3 et L. Faenius, L. et mulieris libertus, Favori. Or on a rencontré à Pouzzoles un L. Faenius L. 1. Alexander ', à Ischia un L. Faenius Urso 6, tous deux tlaurarius; et l'on sait qu'un L. Faenius Telesphorus était établi à Lyon comme unguentarius'. II semble donc bien que la maison principale fût à Rome et eût des représentants dans plusieurs villes. De même on trouve à Milan et à Lyon aux deux extrémités de la voie qui reliait l'Italie à la Gaule par les Alpes Cottiennes, la mention des negotiatores Cisalpini et Pour attirerl'atten tion du public des marchands romains avaient recours, comme on l'a toujours fait, à la réclame. Nous ignorons s'ils connaissaient le « prospectus » ; du moins avaient-ils soin, par des formules habilement choisies, inscrites sur les devantures de leurs magasins, de flatter les acheteurs ou de solliciter leur confiance. Une marchande de volaille et de gibier, dont un bas relief de la ville Albani représente (fig. 49'2I4) l'étalage sous un portique, se recommande à sa clientèle par ces vers de Virgile 16. Une fleuriste qui vendait des guirlandes et des couronnes aux environs de Nîmes avait pris la devise Nous avons parlé plusieurs fois, à propos des marchands, de collèges, de corporations : c'est que la plupart d'entre eux étaient, en effet, groupés ensemble. Nous avons indiqué aussi que la première mention de groupements de cette nature remonte à l'époque dite royale et qu'ensuite il n'en est plus question qu'en 9.59 av. J.-C., à propos des marchands de l'Aventin. On sait, en outre, que les collèges professionnels, auxquels la République n'imposait aucune condition, à qui elle n'accordait non plus aucun privilège, prirent un grand développementS2 et jouèrent tin rôle politique important dans les troubles qui marquèrent la fin de la période républicaine ; aussi furent-ils supprimés par César et ensuite par Auguste 13. Mais celui-ci comprit qu'il fallait, pour établir à cet égard un régime stable, régler d'une façon définitive le droit d'association: à l'avenir on refusa l'existence à tous les collèges qui ne seraient pas munis d'une autorisation spéciale et personnelle du Sénat'; on n'admit que ceux qui offraient quelque caractère d'intérêt public, si bien que les associations devinrent tin organisme inférieur de l'État, en puissance du moins, jusqu'au jour où l'on trouva bon de les employer. Les collèges commerciaux ne diffèrent pas des autres en cela; il est donc inutile d'insister sur ces détails qui ont été exposés à l'article COLLEGIUM. Mais l'organisation intérieure des collèges ayant été à peine effleurée dans cet article, il convient d'y revenir ici en quelques mots 15. Les négociants, appartenantà la même profession ou à des professions voisines, qui voulaient se réunir commençaient par rédiger des statuts 16: ceux-ci votés, on sollicitait l'autorisation du Sénat, qui ne pouvait évidemment se prononcer qu'après lecture du règlement à lui MER -1739 MER rencontrait les négociants les plus divers, coronarii', pemmarii 2, margarilarii , unguentarii pir/men- tarii 3, librari ; il en était ainsi, du reste, dans les villes d'Italie ou de province, où les foreuses sont souvent men donnés Certaines industries et certains commerces étaient même concen trés, dans des quartiers ou dans des rues spéciales ce qui est assez fréquent dans tous les temps et dans touslesp5s. Ces rues prenaient en conséquence le nom des corps de métiers qui les peuplaient à Rorne 3. On con naît le vicus frumentarius2, le vicus lorarius10, le vicus materiarius", le vicus pulverarius'2, le vicus sandaliariu.s'3, le virus vitrarius"et le vicus unguentariu.s'° à Pouzzoles il y avait un vicus thurariu.s et un clivus vitriarius"; un vicus sandaliaris18 à Metz; un vicus argenlarius ' 9 à Carthage ; une l44AlA platea Seplasia, à Capoue, in qua unguentsrii negotiari sint soliti 20 (d'où le nom de sepla ~1' siarius). Les différents lieux de vente avaient, du reste, égale ment reçu, pour la plupart, un MYLIES, nom tiré de celui des commer Ih li f NtÉt Gants qui s'y assemblaient soit d'une façon permanente, soit à 1!~ '.J e certains jours de la semaine, et des denrées ou marchandises qu'ils vendaient : forum boa Hunt 2', suarium 22 piscato ~+ Hum", pïstorumV4, vinarium26, holitorium 26 ; campus pecua rius ", lanatorius ou lana rius 28 ; basilica floscellaria 29 vascularia 20, à Rome ; forum pecuarium à Atina31 et à Ferentinurn 32, vivarium à Ostie 33, vestiariumàTimgad 34, holitorium à Thuggai3 ; basilics vestiariaàCuicul36, etc. Ces marchands, quels qu'ils fussent, portaient le nom général de tabernarii 37 (fig. 449220). A côté d'eux, il exis tait des marchands ambulants, qui parcouraient les rues, criant leurs marchandises, ou attirant les badauds par leurs boniments. Un bas-relief nous montre un fruitier qui porte devant lui un panier rempli de pommes; à côté. on lit : Mata .t mulieres mulie res meae 6 36 (fig 4921)On a vu ailleurs [coAO Nmuiis, fig. 22017, 22018] des peintures ltprésentant des marchands de guirandes : un enfant tient suspendue une son gue perche d'où pendent des guirlandes : un acheteur semble vouloir acquérir l'une d'elles, qu'il examine 39. Sénê que nous dépeint les boulangers, les pâtissiers, les marchands de saucisses étalant, à la porte des établissements de bains, leurs victuailles devant le public etinsignita rnodulatione vendentes 40; Aulu Relie, les vendeurs de remèdes offrant leurs spécifiques à grand renfort de paroles 41 Ailleurs il est question de commis voyageurs (circitores, coctiones, arillatores) que les vestiarii et les lintearii chargent de colporter des étoffes ou des habits et de les vendre à la criée "2. Il est possible que ce soient des marchands de cette sorte que représente une peinture du Musée de Naples" (fig. 4922). Peut-être faut-il aussi ranger dans cette catégorie les pantapolae 4i mars MER -1738-MER vienne société aristocratique et surtout agricole fait place a une société industrielle largement ouverte à tous; les anciens préjugés sur le commerce ont disparu ; ii n'est plus déshonorant de s'ylisrer ; les négociants de l'époque impériale affichent même leur métier sur leurs épitaphes ; ils se font représenter sur Ieurs tombes avec les outils de leur profession ou les comptoirs de leur magasin, ce qui prouve nettement 1 et l'aisance de ces industriels assez riches pour se construire de coûteux tombeaux, et la fierté de ces représentants du travail libre qui, loin de cacher leur condition, veulent être vus, après leur mort, avec l'outil qu'ils tenaient de leur vivant. Ces hommes ont évidemment l'orgueil de leur profession et, s'ils l'avaient, c'est que leurs concitoyass trouvaient cette fierté légitime 11. Si l'on veut distinguer les négociants non plus par leur état civil, par la classe à laquelle ils appartenaient, mais par des particularités relatives à leur commerce même, on arrive à établir plusieurs catégories. On peut opposer les marchands en gros et les détaillants. Ceux-là se nommaient magnarïi 2, les autres manticularii 3 ; à la catégorie des premiers se rattachent tous les négociants qui formaient dans les grandes villes de puissantes corporations, marchands de blé (mercatores frumentarii)°, marchands de vin (mercatores vinarii)', marchands d'huile (negotiatores olearii) 6, etc. ; les seconds sont ou de petits fabricants qui vendent eux-mêmes leurs produits, lintearii, vestiarii, sutures, pistores, unguentarii, etc., ou qui débitent au public les objets produits ou préparés par autrui, le comparalor mercis sutoriae d'une inscription de Milan', le inercator omnis generis niercium transmarinarum d'un texte de Reate2, Fayoum 9, les iyOvord)àat iv 'Pwlt.r, 90, les negotiatores macellariiles vendeurs de poteries fabriquées par de grands entrepreneurs (negotiatores anis cretariae 12) [FinuLaS], et, en général, tous les marchands de comestibles, nombreux dans la capitale aussi bien que dans les diverses villes du monde romain. On peut aussi établir une distinction entre les marchands originaires d'une ville qui y prenaient un commerce ou continuaient celui de leurs parents, et les étrangers qui venaient s'établir dans une cité plus ou moins éloignée de leur pays d'origine, afin d'y faire fortune. On en rencontre dans tous les grands centres commerçants de l'Empire; cultores Jouis Berytenses qui Puteolis consistuntet corpus Heliopolitanorum'4, à Pouzzoles; Gaiatae consistenses ntunicipit,, à Napoca "; collegium 'Aalavà'c xclve7, à Malaga 47. On sait que les commerçants de cette sorte possédaient, au moins dans les endroits les plus importants, des entrepôts pour leurs marchan dises (stationes)1H ; il en existait de tels à Rome" sur le Forum et à Pouzzoles 20. Deux villes de la Gaule nous présentent un exemple très instructif de ce mélange d'éléments indigènes et d'éléments étrangers : ce sont Lyon et Bordeaux. Dans la première ville, à côté d'un grand nombre de marchands qui n'indiquent pas leur patrie, pour la plupart, ce qui était inutile s'ils étaient du pays 2', on trouve un Syrien de Germaniciana, négociant en broderies (barbaricaria (mis)", un habitant de Canattia, negotiator 23, un lintiarius de la cité des Veliocasses ", un verrier de Carthage 21, un negotiator artis nzacellariae, cinés Tribocus 20, sans compter tous les autres 21. A Bordeaux existait, pareillement, une importante colonie de commerçants étrangers: Bellovaques28, Rutènes20, Aulerques", Curiosolites'', Parisiens37, Séquanes", Rémois", Mediomatrices 3", Trevères 36, Germains3t, Espagnols38, Grecs 39, Syriens 40, etc. Tous ces commerçants, perdus ainsi dans un centre éloigné, se resserraient pour former des corporations" ; et lorsque l'un d'eux mourait, s'il n'était pas ramené dans son pays natal, il trouvait place dans un cimetière particulier, réservé à ces épaves de tout le monde romain, où toutes les patries se confondaient pour une dernière demeure ", Il faut mentionner encore parmi les marchands venant s'établir danslesvilles ceux qui s'adonnaient au commerce après avoir suivi quelque temps une autre carrière, en particulier les soldats qui, leur retraite obtenue, se faisaient négociants. A Lyon, un vétéran de la légion Ire Minervia exerça le métier de marchand de poteries'' ; un vétéran de la légion XXII" Prirnigenia, retiré à Mayence, y utilisa son expérience en vendant des glaives 44. On a trouvé aussi en Dalmatie l'épitaphe d'un Aurelius Maximus qui est qualifié de a militiis en même temps que negotiator celeberrimus45. Parmi tous ces commerçants, le plus grand nombre étaient établis dans des magasins permanents [TABERNA] situés dans les rues populeuses ou sur les places. A Rome, où les épitaphes des commerçants contiennent souvent l'adresse du défunt, nous savons, par exemple, qu'il y avait des marchands d'habits sur le compitum ,4 liarium 46, près du temple de Castor47 et de celui de Cérès48, près des horrea d'Agrippine 49, près de ceux de Volusius J0, dans le vicus Tuscus 31, Dans la même rue on trouvait des purpurarii uo et des parfumeurs 53. Sur l'Esquilin on vendait des poteries 54 et des couleurs ' ; au Vélabre étaient des marchands de vin n, à Subure des cordonniers o7 ; des lanarii dans le vicus Caesaris 58 et dans celui de Fors FortunaJ9; des bouchers sur le Viminal 60, des fruitiers près du Cirque Maxime 67. La voie Sacrée et le Forum étaient naturellement le centre du commerce, surtout du commerce élégant; on y MER 1737 MER ce qui élait nécessaire aux besoins des maitres; une vie industrielle et commerçante indépendante était à peu près inconnue. Il faut pourtant noter que dès une époque reculée, dès Numa, dit la tradition', on sentit le besoin de pourvoir par la division du travail à certaines industries qui exigent une aptitude spéciale et un apprentissage. Cette création marque pour nous le début de l'industrie romaine et aussi du commerce qui en estla conséquence obligatoire. Néanmoins, il est courant de dire que jusqu'aux guerres puniques le commerce n'existe pas. 0 Le père de famille produit sur son domaine tout ce qu'il consomme, sa nourriture et celle de sa famille, la laine de ses vêtements, le cuir de ses chaussures et les matériaux de sa maison'. » Cette assertion, vraie en soi, n'exclut pas l'existence de certains petits commercants, surtout pour les objets nécessaires à l'existence journalière. N'y avait-il pas des boutiques sur le Forum et des bouchers à l'étal desquels Virginius trouva le couteau dont il frappa sa fille [LA5141311M ]'? Mais sur les petits commercants de cette époque nous sommes fort mal informés. Il a semblé à certains que ceux-ci, n'ayant pas encore à redouter la concurrence servile ', pouvaient fort bien être des hommes libres, « plébéiens, clients et affranchis, qui ne possédaient, pas de terres et trouvaient un moyen d'existence dans ces métiers détachés de la famille, que l'on ne méprisait du reste pas encore ° ». Les renseignements, peu nourris d'ailleurs, que nous possédons pour l'époque républicaine commencent à une date ultérieure, avec le développement économique qui suivit les guerres puniques. Peu à peu s'était faite une double transformation ; les pères de famille, qui jusque-là se contentaient de suffire à eux et à leur entourage, commencent à produire bien au delà de leurs besoins, grâce au nombre toujours croissant de leurs esclaves; ils sont amenés à vendre au dehors le surplus de leur production, En même temps les richesses du monde affluent à Rome, entre les mains de capitalistes qui ont à l'étranger des courtiers, des représentants NEGOTIATOR1. Les uns comme les autres ont recours, pour la vente, à des esclaves' ; dès lors la plupart des commerçants appartiennent à la condition servile 8. C'est une pratique qui se continua pendant toute l'époque impériale. L'emploi des esclaves comme commerçants offrait de grands avantages à ceux qui les employaient s. D'abord ils échappaient par là au blâme qui s'attachait aux professions non libérales et les rendait inabordables aux gens de qualité i° ; on pouvait ainsi mener de front la carrière des honneurs et celle de l'intérêt. Puis ils évitaient, du moins en principe, tous les risques commerciaux ; ils avaient les profits sans être exposés aux pertes, la personne responsable aux yeux du consommateur étant l'interposé ; ensuite, les esclaves, qui appartenaient pour la plupart à des peuples étrangers vaincus ", essentiellement commerçants, Carthaginois, Grecs, Syriens, savaient les langues étrangèrest2, pouvaient s'aboucher avec les marchands ou les acheteurs de leur pays, possédaient plus de souplesse, plus d'habileté; enfin on était en droit d'attendre des esclaves un travail continu, car ils n'étaient soumis à aucune obligation envers l'État, ni civile, ni militaire. On les utilisait de deux façons": ou bien on les préposait à un commerce tout installé', on les prenait simplement comme intermédiaires, comme agents de vente capital, avec charge de le faire fructifier par le commerce ". Sur ce capital ils devaient naturellement servir un intérêt; par contre, ils avaient droit à des parts de bénéfices" dont ils formaient un pécule 18. Celui-ci leur servait ultérieurement à acheter leur liberté 13, quand leur maître, pour les remercier de leur habileté commerciale, ne leur accordait pas gratuitement 2° la manumission, avec le fonds de commerce qu'ils avaient géré à son compte 2'. Ainsi se produisit lentement une transformation dans la condition du commerce et des commercants. L'esclave ne cessait pas, en devenant affranchi, de se livrer au négoce : il continuait à son compte le métier auquel il s'était adonné au nom d'un autre" ; d'où l'existence de marchands indépendants de plus en plus nombreux, d'abord affranchis, puis, à mesure que les générations se succédaient se transmettant leur fonds de commerce, ingénus. De la sorte l'emploi d'esclaves comme marchands amena peu à peu la substitution de négociants libres aux négociants serviles. D'autres causes intervinrent également. Ainsi, quand la révolution économique qui se produisit au Ive siècle de Rome eut annulé la petite propriété rurale, beaucoup des anciens cultivateurs de naissance libre, devinrent disponibles; il est croyable qu'un certain nombre d'entre eux se tournèrent vers le négoce. Tout cela amena une augmentation des associations d'industriels et de commerçants 23 ; « au vie siècle, dit M. Waltzing, elles se multiplièrent de telle façon qu'il semble évident que, malgré toutes les circonstances défavorables, une classe industrielle et commerçante s'était formée 24 ». Les affranchis y dominaient sans conteste. Il est remarquable que, parmi toutes les inscriptions antérieures à César et à Auguste que nous possédons. aussi bien pour Rome que pour le reste de l'Italie, une seule mentionne un négociant ingénu, et encore le fait n'est-il pas tout à fait hors de doute23, tandis que toutes les autres nous présentent des affranchis26, La situation change à l'époque impériale : aussi bien dans les textes relatifs à des commerçants syndiqués qu'à des isolés, les ingénus et les affranchis se rencontrent indifféremment 27. En même temps leur nombre s'accroît à l'infini : l'an MER 1736 MER TBIASOS1'. L'Ëpavoç surtout, association permanente ayant pour trait caractéristique des repas communs à intervalles périodiques [EBANOS[ 2, rappelle la gilde germanique du moyen tige qui, on le sait, présente la même particularité 3. Ce sont des marins et des marchands étrangers qui, après les guerres médiques, à l'époque du grand essor du commerce grec, importent en Grèce les dieux barbares et créent ces associations'. Les étrangers, les esclaves, les femmes en peuvent faire partie' Elles se développent presque exclusivement dans les villes commerçantes. Ainsi, l'on trouve un très grand nombre déranes marchands au Pirée 6 : telle est cette confrérie des négociants de Cittium qui obtient, en 333, du conseil et du peuple athéniens le droit de fonder au Pirée un temple d'Aphrodite'. Beaucoup de ces éranes ont pour patrons les Cabires ou Patèques phéniciens, protecteurs des navigateurs 8. On trouve encore un grand nombre de gildes marchandes à Délos" (par exemple le thiase des Iléracléistes, composé uniquement de négociants et d'armateurs tyriens '0), à Rhodes ", à Chios, à Thasos 13, La plupart de ces gildes, dont les inscriptions nous ont conservé des traces, sont composées surtout de grands commerçants (i i.7copct et va(ix),r,pm) 13, Il semble que les simples xz7criAot ne s'y associent guère, peut-être parce que les cotisations en sont trop élevées 14. En Asie seulement, où le commerce terrestre a plus d'importance et, à l'époque de la domination romaine, les x7trtaot prennent peut-être une part plus active dans les gildes marchandes, par exemple dans les associations de caravaniers (euvoô(at) de Palmyre : chaque caravane constitue une véritable compagnie sous la direction d'un auvoètxpyv 15. L'organisation économique des éranes et des thiases commerciaux est mal connue. Peut-être ont-ils une juridiction disciplinaire sur leurs membres]', En tout cas, beaucoup d'entre eux jouent le rôle de banques de crédit mutuel", Peut-être servent-ils d'intermédiaires entre l'État et leurs membres pour les affaires qui intéressent ceux-ci (par exemple pour le paiement des redevances et impôts qui frappent le commerce et les commerçants). C'est du moins ce que l'on peut conclure d'une inscription du Pirée, d'après laquelle l'importante gilde des vetixATIpot payait pour chaque navire une certaine redevance'''. L'intervention de l'État dans la condition des marchands est assez limitée. Solon aurait, au dire d'Athénée' 6, interdit aux hommes la vente des parfums, et Sparte aurait expulsé de ses murs les parfumeurs. Pareille politique somptuaire n'a plus guère d'écho à partir du ve siècle. Les cités commerçantes laissent une large liberté au commerce intérieur. Elles font aux étrangers, au point de vue du droit public comme du droit privé, une situation généralement fort acceptable 20. Des impôts spéciaux frappent les mouvements de marchandises. Ils p. 55-110. 7 Corp. inscr. ait. II, 168; Waehsmulh, II, 1, p. 152. 8 Foucart, Clerc, Métèques, p. 126; Ziebarth, p. 196. 12 Ziebarth, p, 31. 13 Par exemple 14 Pour les artisans, Guiraud, Main-d'muvre, p. 206. 16 Ziebarth, p. 32. seront étudiés à d'autres places [SIEBCATLBA[. Mais on ne trouve pas de traces d'impôts spéciaux frappant les marchands comme tels. A Athènes, la capitation levée sur les métèques (yuTs(xlov) 21, les droits de place qui, au marché, frappent tous les étrangers", bien que jouant pratiquement le rôle de contributions spéciales aux marchands, s'appliquent à tous les étrangers ou à tous les métèques, quel que soit leur métier. D'autre part, la loi accorde parfois, au moins dans les cités commerçantes, des faveurs à certaines catégories de marchands. A Sybaris, on exempte d'impôts les marchands qui importent la pourpre marine 23. A Athènes, une inscription atteste que les négociants de Sidon qui viennent s'établir dans la cité sont exemptés de toutes les charges qui peuvent peser sur les métèques 76. A en croire un scoliaste, dont le témoignage sur ce point n'est pas confirmé, tous les '.,i otot seraient exemptés des liturgies militaires" : cela ne saurait s'entendre, dans tous les cas, que des =u.7opot métèques, les citoyens n'étant jamais exempts de ces contributions20. Tout au moins savons-nous que les ENsopot peuvent être exceptionnellement dispensés du service personnel de guerre". Il n'est pas probable d'ailleurs que ces privilèges soient accordés aux xx7[-),om, que les textes ne mentionnent pas à ce sujet. Il convient de noter toutefois que le droit de cité demeure d'ordinaire inaccessible aux marchands étrangers : c'est seulement en plaisantant que le comique Alexis peut dire que les Athéniens ont concédé aux fils de Chaeréphile le droit de cité â raison de leur commerce de poisson salé 28. Et c'est sans succès que Xénophon propose de décerner au nom de l'État des honneurs et des distinctions aux marchands qui auraient, par des services importants, bien mérité de Rome. Deux mots sont employés chez les Romains pour désigner les commerçants, negotiator et znercator. A l'époque républicaine, le sens de ces deux mots est très différent. Par negotiator on entend le négociant en gros qui fait à la fois, la plupart du temps, dans les pays nouvellement soumis, la banque et le commerce 30, comme les argentarii et les feneratores à Rome ; par znercator, on désigne, au contraire, le marchand proprement dit. A l'époque impériale, les deux mots deviennent synonymes et le terme de negotiator3f se rencontre pour désigner de petits commerçants établis à Rome aussi bien qu'en province32. Nous réserverons pour l'article NEGOTIATOR ce qui a trait aux négociants-banquiers; il sera question ici des marchands en gros ou en détail, quel que soit le vocable sous lequel ils soient désignés par les textes littéraires ou sur les inscriptions. Aux premiers temps de Rome, où la plupart des citoyens étaient propriétaires ou cultivateurs, le commerce était peu développé: les esclaves fabriquaient dans les maisons éd. Frünkel, Berlin, 1886, 1, p. 109, n. e. 28 Athen. III, p. 119, in fine; !\IER 173 --a MER Avec le temps, celte organisation primitive doit se transformer. Ces installations provisoires ne peuvent suffire aux besoins du commerce d'Athènes au iv'° siècle, ou d'une des grandes places de l'époque hellénistique. Aussi des locaux appropriés tendent-ils à se substituer aux marchés en plein air. Ce sont des halles couvertes (aTOai) Avec les progrès du commerce elles se multiplient; Sparte même en possède2. On en construit d'abord de spéciales. A Mégalopolis, il existe une halle où se vendent des parfums et des huiles odorantes eTOx N.upd7«als)'. Athènes a, de bonne heure' une halle pour la vente au détail, et par l'entremise de marchands', des farines et des sons. C'est la aro ,),tflcdirwX,ç6, qu'il ne faut, pas confondre avec la halle du même nom construite plus tard dans l'Emporion du Pirée, efqui sert sans doute d'en trepôt aux approvisionnements de l'État'. Dans la d'Athènes , les farines à vendre sont exposées dans des casiers de bois rectangulaires, en forme de coffres D'autres halles sont, après celleci, affectées suc cessivement au commerce de détail à Athènes : c'est la halle du Dromoss, peut-être aussi la stoa Poecile10 et, plus tard, la stoa dite d'Attale, bàtie par Attale II Philadelpbe, et dont les ruines, mises au jour à partir de 1860, ont fait connaître l'aménagement intérieur, adapté aux besoins du commerce de détail'". Peu à peu le système des halles couvertes se substitue partout au système ancien du marché. La différence consiste essentiellement en ce que le lieu des échanges, au lieu d'être une place entourée de bâtiments indépendants, est un corps de bâtiment fermé, et accessible seulement du dehors par des portes12. Les marchés se transforment ainsi en un ensemble complexe de halles couvertes assez semblables aux bazars de l'Orient moderne 13. C'est en Asie Mineure, peut-être par suite des exigences du climat, que cette forme du bazar est d'abord apparue (par exemple à Smyrne)" et c'est en Asie Mineure qu'on en a retrouvé des traces (à Cnide, Aphrodisias, etc.)16. Mais elle s'est répandue très vite dans la mère-patrie. Au temps de Pausanias, l'ancienne forme de l'agora ne subsiste plus qu'à Elis et à Pharae16 En dehors des marchés des villes, les marchands ont d'autres centres d'affaires : ce sontprincipalementles foires et les rassemblements de troupes. Les foires 1' se tiennent surtout à l'occasion des grandes fêtes religieuses (37v57,YtipEe;) , PANEGynis] : à Olympie, à Delphes, à Corinthe, à D élos. Leur organisation matérielle nous est mal connue; elle doit être assez analogue à celle des marches des cités grecques, mais avec de plus grandes proportions. On n'y insistera pas ici, car les grands commerçants y jouent un rôle plus important que les simples xxrr.z;As'. Les rassemblements de troupes servent aussi de rendez vous aux marchands t3. On sait que les soldats grecs devaient en principe s'entretenir eux-mêmes. Aussi étaientils suivis en campagne par une nuée de revendeurs, cantiniers, mercantis de toute espèce, qui s'installaient près de leurs campements", toujours prêts à leur vendre fort cher ce dont ils avaient besoin, et à leur acheter à vil prix les esclaves ou le butin pris à l'ennerai20. C'est ainsi que, au dire de Thucydide, l'expédition athénienne en Sicile était accompagnée de tout un convoi de marchands'', Les marchands grecs ne forment pas, tout au moins avant la domination ro maine, de cor porations exclu sives et héréditaires, dotées de privilèges et de monopoles pour certaines branches du commerce; le régime des castes commerciales, qui a fonctionné dans d'autres civilisations, est inconnu de la Grèce indépendante. Par contre, les marchands grecs s'organisent parfois volontairement en associations (xolvwv(at) 92 pour défendre leurs intérêts professionnels communs et améliorer leur situation sociale. Nous ne songeons pas ici aux sociétés commerciales, réunissant dans une même entreprise plusieurs personnes qui cherchent à réaliser un bénéfice pécuniaire ; ii sera parlé à d'autres places tMFBCATUBA, S0CIETAS] de ces sociétés, nom breuses et prospères en Grèce 23. Mais nous songeons aux associations professionnelles de marchands Elles existent en Grèce pour les commerçants, sinon pour les artisans [ARTIFICES) 2'. Elles présentent d'ailleurs, au moins en apparence, un caractère religieux très accentué; il n'y a pas de ligne de démarcation sensible entre l'association laïque et l'association religieuse25. Les éranes, les thiases, les oasgéons, qui sont des confréries réunissant pour la célébration de certains sacrifices et de certaines Pètes les adeptes des cultes d'Orient, ont souvent un caractère économique assez marqué : ce sont de véritables gildes marchandes MER 1734 MER laisser les femmes se mêler, au marché, d'affaires qui sont du ressort des hommes'. Il y a beaucoup de reven rieuses (xxre» eçl 2 dans les villes. On rencontre à Athènes des affranchies ou des femmes libres qui sont boulangères, cabaretières, marchandes de sésame, d'encens, de sel, de rubans, de couronnes, de pelotons de fil', etc. ; et l'on sait qu'Aristophane fait grief à Euripide d'être le fils d'une marchande de légumes'. La mésestime des Grecs pour toute la classe des petits débitants se traduit de façon assez curieuse chez les auteurs : ainsi Plutarque, en écrivant la vie de Solon, se croit obligé d'excuser son héros d'avoir fait le commerce, en alléguant la simplicité des mœurs anciennes, ainsi que les exemples de Thalès et d'Hippocrate le Mathématicien 6. Si tenace est même cette prévention, qu'une loi, citée dans le plaidoyer de Démosthène contre Eubulide doit permettre aux marchands d'intenter la a(x'r1 xxx-riyop(aç contre ceux qui leur reprochent injurieusement leur profession. Les marchands sont répandus un peu partout dans la cité grecque Mais il y a certains centres oh s'exerce principalement leur activité. Les grands commerçants font leurs affaires à l'Emporion, aux environs du port ou de l'Agora, dans de grands bâtiments spécialement affectés à leurs besoins (docks, entrepôts) 3. Les petits marchands ont pour centre d'opérations le centre même de la vie commune de la cité, 1 âyop . [AGORA) °. C'est là que les xt.7t7Àot étalent chaque jour, et toute la journée 16, leurs marchandises. C'est là que les marchands de modes offrent leurs voiles brodés, leurs châles, leurs manteaux, leurs sandales; les marchands d'habits, leurs vêtements neufs" et d'occasionf2; les joailliers, leurs chaînes d'or, leurs bracelets, leurs sceaux, leurs bagues, leurs peignes ; les quincailliers, leurs cribles, leurs cuillers, leurs aiguilles, leurs hameçons"; les fleuristes, leurs couronnes et leurs guirlandes'". Les voitures chargées de cruches ou d'outres de peau pleines de vin 13 se tiennent près du marché aux fruits, abondamment pourvu d'olives, de pommes, de grenades, de raisins, de citrons, de figues et de melons 16. Les diverses marchandises ont, au moins à Athènes, leurs quartiers particuliers (x(x)5;)'7 séparés par des cloisons mobiles 1B, et portant des noms spéciaux le marché aux comestibles (Elç zoû1,ov)1°, dont le marché aux poissons (o) 's/6étç) constitue la plus importante subdivision'°; le marché aux poteries (Est T7; y'A oe1) ; le marché au vin (Elç -càa oivov)"; le marché aux esclaves (E(ç Tx vosx17o)oe)2E; peut-être le marché aux parfums (eiç'râ cépa)u, etc. Les bibliophiles trouvent un quartier consacré aux livres2'`. Ailleurs se tiennent les marchands de légumes (TZ ),x/a)/x)°5, les marchands de bêtes de trait et de bétail; plus loin, Ies bouchers, les charcutiers26; les marchands de fromages27; puis des porteurs de bois vendant des matériaux de chauffage 28 ; des fripiers99, des marchands de nattes, de mèches de lampes, de volailles, de réchauds, de lits, de cruches, de tapis, de besaces, de sacs"; enfin des marchands d'argent et de crédit (trapézites) 3 ` . A côté du marché primitif se créent peu à peu des marchés spécialisés (par exemple, à Athènes, le marché aux métaux) 22. On cherche même à séparer les marchands des citoyens vaquant aux affaires publiques, en isolant le marché commerçant de l'agora politique et judiciaire 33 Nous possédons quelques indications sur l'organisation matérielle du petit commerce en Grèce, et spécialement à Athènes. Les xx.7t'f st installés au marché crient leurs marchandises, et appellent les chalands qui passent devant leurs étalages34. Ceux-ci examinent les objets exposés et les marchandent 3'. De petits commissionnaires (aooüvelxot) se tiennent près des boutiques, pour porter à domicile les marchandises achetées 36. Les marchands sont installés assez sommairement, la plupart sur le sol même de la place. Quelques mauvaises planches suffisent à faire un étalage, le vendeur s'abritant luimême du soleil sous un parasol". Les marchands plus importants ont des boutiques. Ce sont des baraques mobiles, temporairement in tallées sur le marché. Les unes sont faites de claies de jonc ou de roseau ('ta) 36 les autres sont des tentes de toile (cx Ivx(). On y vend les choses les plus diverses3°. Ces échoppes sont d'ordinaire meublées de comptoirs (rpzaesu;)B0 et de sièges pour le marchand, et, à l'occasion, pour le public(fig.4919;". Il n'est pas question, au v°siècle, de magasins fixes et permanents. Cependant les installations foraines de l'agora sont incommodes et disgracieuses. Aussi propose-t-on au Ive siècle, sans grand succès d'abord, de les remplacer par des magasins construits aux frais de l'Éta°t, qui tirerait un revenu important de leur location'. MER 1733 MER affranchis qui font le commerce pour le compte d'autrui, leurs maîtres ou leurs patrons ne dédaignant point du tout les bénéfices indirects qu'ils peuvent retirer des capitaux placés dans leurs commerces. On appelle y,wp'tç oixouvrEç les affranchis ou les esclaves qui habitent hors de la maison de leurs patrons ou de leurs maitres pour se livrer à quelque négoce ou à quelque métier ; ils leur rendent compte de tout leur gain ou leur paient une redevance fixe (â7roropâ)'. Tel est ce capitaine de vaisseau, Lampis, dont parle Démosthène', et qui trafiquait de compte à demi avec Dion. Tel est aussi sans doute ce Midas qui, d'après Hypéride', gère un commerce de parfumerie au nom de son maître Athénogène à qui il rend compte tous les mois. Tel est encore, d'après Démosthène, cet esclave qui sertà Chrysippe de consignataire dans le Bosphore 4. L'avare, dans Théophraste, a confié à son esclave un petit commerce à l'agora et lui fait payer le change quand il s'acquitte de son aop,opâ en cuivre au lieu d'argent La p.ETaèJÂ7(Ttx comprend, d'après les auteurs grecs °, deux sortes de commerces, la xa7riaE:a et l'4.7iopf ; et les marchands se rangent en deux catégories, qu'on distingue soigneusement et entre lesquelles on établit un certain contraste 7, celle des grands commerçants (Ep.7iopot, negotiatores) et celle des marchands proprement dits (xx7rlaot, mercatores stricto sensu). Il sera parlé ici surtout des les 4.7eopot devant être étudiés sous le Le grand commerçant (ip.7topoç) est essentiellement, à l'origine, celui qui voyage sur mer. On a remarqué que, dans Homère, le terme Èp.7topoç ne désigne que l'homme qui voyage sur mer dans un vaisseau étranger'. Jusque dans les temps historiques, les deux idées de grand commerce et de commerce maritime demeurent étroite ment liées dans le même mot. "Ep.ropoç et vaéx),71poç sont généralement employés ensemble'. Toutes les grandes affaires sont des affaires maritimes : les grandes affaires de crédit privé sont toutes des affaires de crédit maritime (prêts à la grosse, commandites, etc.) et ce sont ces transactions qui procurent aux manieurs d'argent (trapézites) la meilleure part de leurs bénéfices. Le simple marchand (xâ7trlaoç), d'après la définition d'Aristote et de Platon 10, est essentiellement un revendeur, c'est-à-dire qu'il ne produit pas lui-même ce qu'il. vend, mais qu'il l'achète, soit au producteur, soit à un grand commerçant. Pour insister davantage sur ce caractère de revendeur, d'intermédiaire, attribué au petit marchand, certains textes lui donnent le nom de na),tyxâas oç". Mais cela ne suffit pas à le distinguer de 1'ëp.7ropoç, qui souvent aussi achète pour revendre. Kxar(),oç VI. a une signification plus étroite et plus précise. Il désigne sans doute originairement le marchand qui trafique sur terre. C'est en ce sens qu'Hérodote peut dire que la Lydie a été le berceau des premiers x1.7tr1?,ot i ; il a évidemment en vue les marchands qui trafiquent par caravanes, car cette forme de commerce terrestre est très florissante en Lydie, dès le vue° siècle, à une époque où il n'y a presque aucun commerce encore en Grèce13. Dans ce dernier pays, le commerce de terre ne prend d'ailleurs jamais la même extension, et c'est pourquoi le mot qui désigne originairement le marchand trafiquant sur terre sert aussi à désigner le petit marchand, le petit boutiquier, le colporteur. Tantôt c'est un détaillant qui tient un cabaret (xi-ii»,;, campo) dans la ville ou sur le marché, et qui y vend à boire et à manger (vin, poissons) t4 [CACPONAI ; ou qui installe sur la place un petit déballage de marchandises !fruits', flambeaux'", armes ", charbon 1', esclaves'") ; tantôt c'est un débitant qui circule, la bouteille sous le bras, pour faire goûter son vin à ses clients20; tantôt c'est un colporteur qui voyage, avec un mulet chargé d'une pacotille (pitoç), dans les bourgs et les campagnes 21, et va de village en village 2', de porte en porte23, crier ses marchandises et offrir aux paysans des couleurs, de la parfumerie, de la quincaillerie, de la mercerie, de la bimbeloterie. Ce sont les Phéniciens24, puis les Iginètes 28 qui ont originairement le monopole de ce commerce de colportage. Les marchands forment une part importante de la population urbaine. Avec les artisans, ils composent essentiellement la classe inférieure de la société". Mais les xx7criÀot sont tenus peut-être en moins d'estime encore que les artisans 27. D'où vient ce mauvais renom? Moins peut-être d'un préjugé général contre le commerce, préjugé peu concevable, quoi qu'on ait dit, dans des sociétés commerçantes2N, que des mauvaises moeurs et de la déloyauté ordinaires de ces revendeurs. Les xzxt-r),ot sont gens de fort mauvaise compagnie, et leurs établissements sont souvent mal famés : il est peu honorable de les fréquenter 29. En affaires, ils manquent de conscience et de scrupules, et mentent effrontément : Ils trompentà qui mieux mieux leurs clients, notamment sur les poids et mesures 31 ; ils surfont leurs marchandises32. Un vase du Vatican (fig. 4918) nous montre un client qui achète de l'huile et se plaint que la mesure est insuffisante u. Beaucoup de marchands n'ont d'ailleurs adopté cette profession que parce qu'ils sont incapables d'en exercer une autre. Ce sont des propres-à-rien (âzpeïot) ou des infirmes (â68EVECTaTOt)34. On trouve même parmi eux des femmes, malgré la répugnance qu'on éprouve à 218 MER 1732 MER ceux-là seuls sont marchands qui font habituellement le commerce. Cela exclut les personnes qui font un ou plusieurs actes de commerce, mais accidentellement, à titre exceptionnel, sans que ces actes aient un caractère professionnel. Platon, qui, pour subvenir aux frais d'un voyage en Égypte, engagea une spéculation sur les huiles', n'était pas de ce chef un marchand. Cela exclut aussi les personnes qui vendent des choses qu'elles produisent elles-mêmes (agriculteur vendant l'excédent de ses récoltes sur ses besoins ; artisan vendant le produit de son travail) ou qui achètent à autrui certaines choses pour satisfaire à leurs besoins personnels, et dans la mesure de ces besoins (consommateur qui achète du vin pour sa boisson, du blé pour sa nourriture) : agriculteur, artisan, consommateur ne sont pas des marchands. Le marchand n'achète ou ne vend pas pour lui-même. 11 est avant tout un intermédiaire dans la circulation des richesses. Les auteurs grecs distinguent nettement le système économique dans lequel chacun vend directement ce qu'il produit, ou achète directement ce dont il a besoin (xlTn o),tx-i,) du système dans lequel des intermédiaires s'interposent entre le producteur et le consommateur (p.i'ra )Ttxr)9.Cedernierestleseulquipuisseêtreregardé comme commercial, le seul où il y ait des marchands. A partir de quelle époque trouve-t-on en Grèce des marchands de profession? Dans les temps homériques, on en rencontre fort peu, et encore ils ne sont pas Grecs3. Rien d'étonnant d'ailleurs à cela. Les Grecs, du xe au vm° siècle, vivent d'une vie presque exclusivement agricole ; chaque famille, chaque groupe social forme un tout qui se suffit à lui-mème. Ces groupes n'ont à vendre que le superflu de la production agricole ou de l'industrie domestique sur leurs besoins. Ils n'ont à acheter que les choses que ne produit pas la terre qu'ils cultivent ou qu'ils ne savent pas fabriquer (matières premières rares : métaux, ivoire, ambre ; objets de luxe : bijoux;-instruments de fabrication difficile: ustensiles, armes) [MERCATURA]. Limités à ces quelques objets, les échanges se font généralement sous le régime de l'aüTOSw) x ,. C'est pourquoi il n'y a point encore de marchands grecs. 11 n'est question, dans les parties les plus récentes de l'Odyssée, que de marchands phéniciens peut-être aussi de Taphiens 3. C'est à un étranger que songe Euryale, lorsque, reprochant à Ulysse de paraître ignorer les jeux où s'exercent les hommes, il le compare au patron d'un navire qui n'a souci que de sa cargaison et de gains à faire, plutôt qu'à un athlète 0. Mais le système de la IAETagÂYTtxij ne tarde pas à s'introduire en Grèce à côté de l'aôTo7rmatx.l. Le commerce y fleurit à partir du vue siècle. L'économie commerciale prend le pas sur l'économie agricole et l'économie familiale. Dès lors, il existe de nombreux marchands dans la société grecque. Ces marchands sont assez rarement des citoyens. Le citoyen se résigne difficilement à entreprendre un coffin merce ou un métier. Le vrai citoyen se doit tout entier à l'État; au point de vue économique, il est improductif'. Il est vrai qu'avec le temps cette manière de voir perd du terrain. Malgré les résistances du parti oligarchique (dont Platon se fait l'interprète lorsqu'il veut, dans ses Lois, que seuls les métèques et les étrangers exercent le métier de marchands 8), on trouve aux assemblées du peuple athénien, à côté des artisans, quelques citoyens qui sont marchands et brocanteurs 3. Mais ils ne constituent qu'une part relativement minime de la population commerçante : ce qui le prouve, c'est que le seul fait d'exercer un négoce constitue une présomption d'extranéité. Cette présomption apparaît dans le plaidoyer de Démosthène contre Eubulide. Euxithée, fils d'une vendeuse de rubans, fait appel d'une décision qui l'a rayé de la liste des démotes, et ainsi privé du droit de cité. On lui oppose la profession de sa mère, et l'argument parait si fort que l'orateur doit supplier le tribunal « de ne pas regarder comme étrangers ceux qui travaillent, mais de regarder les dénonciateurs comme des scélérats f0 ). Ainsi le trafic échappe en grande partie aux. citoyens. Il est surtout aux mains d'hommes de condition inférieure et dépendante : étrangers, métèques, affranchis et esclaves. Les sources littéraires et les inscriptions nous font connaître un grand nombre de. métèques qui font le métier de détaillants (xzari),ot) 11. Tels sont, par exemple, Pyrrhias, revendeur" Philon, marchand de salaisons 13 ; Thratta, revendeuse", etc. D'autres nous sont signalés comme grands négociants ç ytropot) 13. De ce nombre sont Chrysippe frères, négociants originaires du Bosphore et établis à Athènes, qui constituent un prèt à la grosse à Phormion t" ; Artémon et Lacrite, à qui Androclès, citoyen athénien, prête à la grosse 3000 drachmes". Le commerce maritime, notamment le commerce des céréales, est en grande partie aux mains des métèques 1" ; il en est de même pour le commerce de l'argent : la plupart des trapézites et des préteurs (ôavtt'r a:, Tox1 'raO sont aussi des métèques 19. C'est pourquoi Hésychius peut faire de yTotxoç le synonyme d'" a npoç 20. Beaucoup de ces métèques sont d'ailleurs d'origine servile (on n'ignore pas qu'à Athènes les affranchis entrent, au point de vue du droit public, dans la classe des métèques 21) [METOIROI]. Il arrive souvent que les marchands, en se retirant des affaires, remettent leur commerce à des affranchis, d'abord employés chez eux en qualité d'esclaves. Ainsi, le grand banquier et armurier Pasion lotte sa banque et son atelier d'armes à son affranchi Phormion. Pasion était lui-même un affranchi 22. C'est également un affranchi que ce banquier Eustathès, qui est revendiqué comme esclave par les héritiers de son ancien maître et pour qui plaide Isée 23. Nombreux aussi sont les esclaves et les MEN 1731 MER soutenue par Hultsch' et appuyée sur un témoignage de Pline', à savoir qu'Ératosthène, voulant à la fois adopter une longueur de stade qui se reliât au système des mesures alexandrines, et pùt être prise comme évaluation moyenne du stade itinéraire, réduisit à 400 pieds royaux (au lieu de 600) l'unité géographique qu'il choisit. Il s'ensuivrait que sa mesure de la circonférence de la terre (252000 stades) serait singulièrement exacte. Quant aux mesures de capacité, les Ptolémées, tout en partant des contenances attiques pour le cotyle et le conge, adoptèrent une nomenclature plus commode leur cheni.r ne contient que 3 cotyles (au lieu de hl et devient le quart du conge. Le metrète prend le vieux nom égyptien d'ortabe; le rnédimne est élevé au double de l'artabe; son sixième, 1'ber/eus, et son douzième, 1'lrémiecton, deviennent donc respectivement de 48 et de 21 cotyles. Mais ce système ne parvint pas à s'implanter définitivement ; les anciennes coutumes provinciales subsistèrent à côté et l'intervention ultérieure des Romains amena de nouvelles complications. Des mesures médicales. On doit classer à part ce qui concerne, dans l'antiquité, les petites mesures de capacité inférieures à la cotyle ou hémine, qui servaient pour le dosage des médicaments. En réalité, il n'y a eu, dans l'antiquité, qu'une division de la cotyle assez généralement reconnue, à savoir en 2 T€rxpTx (quartarius, par rapport au setier), 4 ;' ~«rn. (acetabulum), 6 xu7.Oouç (ryallrus). Cette dernière mesure (un petit verre àvin) servit en particulier chez les Romains de l'époque classique pour doser la quantité versée du cratère dans les coupes : suivant les santés portées, on multipliait le nombre des cvathes à boire d'un trait. Les indications médicales étaient naturellement d'ordinaire aussi vagues que chez nous : un verre, une cuillerée mais des différences dialectales rendaient souvent obscures les prescriptions des auteurs déjà anciens. Galien 3 essaya de débrouiller les confusions intervenues ; et dans les écoles, on dressa des tables établissant une coordination de ces petites mesures (le Tpvà) (ov, assimilé à la cotyle, le tables sont discordantes entre elles, et les coordinations supposées, d'ailleurs probablement très tardives, malgré les noms sous lesquels elles nous sont parvenues, ne peuvent être considérées que comme fictives. Un système assez bizarre, pour les dosages réellement méthodiques, nous est révélé par Galien. On se servait, pour l'huile en particulier, de cornes graduées de la contenance d'une hémine, qu'on appelait abusivement liure d'huile (n.rpx Toc ËÀ«(ou) et qui était divisée en 12 onces métriques, quoique ne pesant guère que 10 onces. Des médecins grecs avaient, tout aussi arbitrairement, divisé cette hémine en 60 drachmes métriques. Les metrologici scriptores. Les renseignements fournis dans cet article ont été empruntés en presque totalité, soit à l'ouvrage de Friedrich Hultsch, Griechische und rünlische Jlletrologie4, soit à sa collection des 3fetrologicnrum scri/7foruni reliquiae ". Dans le premier de ces ouvrages. on trouvera une bibliographie complète de la matière, à laquelle il n'y a pas lieu d'ajouter quelque ouvrage capital, paru depuis. Le second renferme des prolégomènes dont l'étude reste indispensable, quoique à certains égards la question ne se pose plus dans les mêmes termes. En réalité, les études métrologiques n'ont commencé qu'assez lard dans l'antiquité, et des confusions ou des erreurs graves sont restées possibles pendant toute la période classique. Ce qui nous reste des ouvrages originaux de la décadence est bien peu de chose et consiste surtout, chez les Grecs, en extraits plus ou moins informes, où apparaît en même temps que le besoin de faire connaître les changements qui s'introduisent, surtout dans le système monétaire, le but d'expliquer la métrologie des Livres saints. Hultsch a déployé, dans le classement chronologique et la critique de ces documents, une sagacité que l'on doit qualifier de merveilleuse. Toutefois, les résultats auxquels il est arrivé ont besoin d'être contrôlés par une étude approfondie de la tradition manuscrite, étude qui petit amener à les rectifier sur divers points. En particulier, il a attaché trop d'importance aux écrits de géométrie pratique, qui sont connus sous le nom de Héron d'Alexandrie. La récente découverte de l'ouvrage original de Héron, les Mo'a'xz, a révélé que cet auteur n'employait dans ses calculs aucune unité concrète S. Toute la collection héronienne ne doit donc plus compter que comme une oeuvre byzantine, qui peut certainement avoir conservé des tables anciennes, mais dont les témoignages ne peuvent être acceptés comme de première main. Héron lui-même ne peut plus guère être placé désormais plus haut que vers la fin du Irr siècle de notre ère. Quant à la tradition métrologique médicale, elle ne remonte probablement pas avant le Ive siècle et elle ne me semble guère avoir définitivement pris corps qu'au temps de Paul d'Égine, au vlr" siècle ap. J.-C. En résumé, la métrologie des Grecs et des Romains est sans doute désormais arrêtée dans ses grandes lignes, mais un très grand nombre de questions de détail n'ont revu jusqu'à présent que des solutions provisoires, et une tâche importante est réservée au nouveau siècle li1È OUSA DIRE [ÉRÉlios Dn.É,,. dème de l'Attique, des citoyens chargés de certaines affaires du dème, en particulier du soin de sacrifices