Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

MELICERTES

MELICL'RTES, MEarzG 'è,ç, Personnage mythologique dont la légende se rattache à la Béotie, à la Mégaride et à l'isthme de Corinthe. Il était fils d'Athamas, prince béotien, et d'1», fille de Cadmos. ll est inutile de rappeler ici les nombreuses versions de la légende d'Ino ['No LEI cornaLa plupart de ces versions aboutissent au même dénouement. Ino s'enfuit de Béotie, portant dans ses bras Melicertes enfant; après avoir traversé la Mégaride, elle arrive sur les bords du golfe Saronique ; lit, du haut de la roche Moluris, située entre Mégare et Corinthe, elle se précipite dans la mer avec son fils. Les malheurs d`Ino touchent la divinité. D'après les uns, Poseidon, d'après les autres Dionysos place la fille de Cadmos parmi les déesses marines ; désormais les navigateurs l'invoquent sous le nom de Leucothéa'. Quant à Melicertes, la légende le sépare dès lors de sa mère. Son corps est sauvé par un dauphin qui le transporte sur son dos jusqu'à la côte orientale de l'isthme de Corinthe, et qui le dépose en cet endroit du rivage sous un pin. Le petit cadavre est recueilli par Sisyphe, frère d'Athamas, qui régnait à Corinthe; Sisyphe l'ensevelit et fonde, en l'honneur de Melicertes, les jeux Isthmiques [isTHMIA. A. l'époque de Pausanias, on voyait encore à quelque distance de Corinthe, près de la mer, un autel de Melicertes (MEatxéeTOU (io,goç) ; la tradition locale voulait que cet autel eût été élevé à l'endroit précis où le dauphin était venu déposer son précieux fardeau. A la légende de Melicertes se rattachent étroitement le mythe et le culte d'une des principales divinités de Corinthe, Palaèmon. De même qu'Ino était devenue la déesse Leucothéa, on croyait dans l'Isthme que Melicertes avait été élevé au rang des dieux, sous le nom de Palaemon [MATER MATLTA, p. 16à6], Comme Leucothéa, Palaemon était un dieu marin, secourable aux navigateurs' ; son culte était associé à celui de Poseidon''; dans son temple, appelé le Palaemonium (IIa)(a.li.dvrs'r) 3, se trouvaient, auprès de sa propre image, les statues de Poseidon et de Leucothéa" ; lui-méme figurait dans un groupe considérable, consacré à Poseidon par Hérode Atticus, et qui représentait un char attelé de quatre chevaux dorés, sur lequel se tenaient debout Poseidon et Amphitrite'. Le Palaemonium faisait partie du grand sanctuaire où se célébraient les lotit tala. D'après Pausanias on y voyait, outre le naos proprement dit du dieu, un adyton souterrain, dans lequel, suivant la légende, Palaemon se cachait'. M. P. Monceaux croit avoir retrouvé l'emplacement du Palaemonium sur un tertre rocheux qui s'élève a gauche de l'entrée principale du sanctuaire isthmique : au pied de ce tertre ont été découverts plusieurs débris d'un temple ionique, tambours de colonnes àvingt-quatre cannelures, morceaux d'entablement, etc. ; ce seraient là les restes d'un temple de Palaemon relativement récent. Quant au vieil adyton, a c'était sans doute une grotte creusée dans les flancs de la colline' fl parait bien certain que, pour les anciens en général et pour les Corinthiens en particulier, Melicertes et Palaemon formaient un seul et même personnage mythique. Comme Melicertes, Palaemon était souvent représenté debout ou à cheval sur un dauphin 10. Pausanias, après avoir raconté que les jeux Isthmiques furent fondés par Sisyphe en l'honneur de Melicertes, affirme ailleurs" que les couronnes décernées aux vainqueurs des jeux Isthmiques étaient faites de pin, pour rappeler les malheurs de Palaemon; il fait évidemment allusion ici au pin sous lequel le dauphin légendaire déposa le corps de Melicertes. Rien ne montre mieux, semble-t-il, l'identité du fils d'Ino et du dieu corinthien. Melicertes-Palaemon fut l'une des divinités favorites des Corinthiens. Son culte était très populaire dans tout l'Isthme ; il y était encore célébré sous l'empire romain, Le Palaemonium est mentionné dans une inscription grecque de l'époque impérialei2. Les monnaies corinthiennes sont, à ce point de vue, très significatives. Sur des monnaies coloniales, postérieures par conséquent à la reconstruction de Corinthe en 17 av. 1--C. sont représentées diverses effigies qui se rapportent soit à la légende, soit au cuite de Melicertes-Palaemon. Ce sont : Ino-Leucothéa tenant son enfant dans ses bras et se précipitant dans la mer (fig. •896)"; le corps de Melicertes étendu sur le dauphin, avec quelquefois, à l'arrièreplan, un pin ''•; Melicertes-Palaemon à cheval sur le dauphinl'autel de Melicertes sous un pin le ; un pin, à la droite duquel ou voit le dauphin apportant sur son dos le corps de Melicertes"; enfin un temple de forme circulaire, à l'intérieur duquel on voit (fig. 4897le corps de Melicertes gisant sur le dauphin : de chaque MET. -1106 MEL saurs .0n embauma de la même manière le corps deJustinien Il est plus difficile d'expliquer pourquoi les Grecs dans les funérailles plaçaient des pots de miel sur le bûcher ; on doit peut-être voir là une tradition symbolique, souvenir d'une époque très reculée où ils n'avaient pas encore adopté l'incinération et où ils embaumaient. tous les corps avant de les livrer à la terre'. Le miel servait en outre à plusieurs usages domestiques ou indu striels; avec du vin cuit et du sel ii formait une saumure où on faisait macérer les olives noires. hors-d'oeuvre toujours apprécié dans les pays du midis. Les joailliers donnaient de la limpidité et de l'éclat à certaines pierres appelées coclldides en les plongeant dans du miel qu'ils soumettaient à l'action du feu pendant sept jours et sept nuits ; le miel de Corse, peu comestible, convenait bien pour cette opération'. Après avoir beaucoup douté de son efficacité, on a fini par rec,nliaitre quelle peut réellement être utile pour traiter les agates et qu'elle est encore pratiquée de nos jours avec succès dans certaines contrées G. Les anciens mentionnent aussi des étoffes de pourpre dont la solidité et 1'éclat avaient résisté d'une manière étonnante à l'action du temps parce qu'on les avait trempées dans du miel en les apprêtant. Il ne nous est pas possible de déterminer en quoi consistait au juste ce prôcédé 7. RELmloa. Les anciens ont souvent fait de l'abeille un symbole et lui ont prêté un rôle dans des fables relatives à plusieurs divinités APES] e. Les idées morales et religieuses que le miel éveillait dans leur esprit les ont conduits à la conception de l'ambroisie et du nectar )AMBROSIs, _NECTAR]. Il était naturel qu'un aliment aussi précieux, considéré comme un présent céleste, fût mis au nombre des offrandes qu'on déposait sur les autels des dieux. Les lie t(c^coviia avaient leur place surtout dans les sacrifices où on ne faisait pas de libations de vin (val(pxata) '. Cet hommage s'adressait ordinairement aux divinités rustiques, protectrices de l'apiculteur, telles que Pan, Priape, les Nymphes, Hermès âypo-cr,p, etc. 10 Mais nous voyons aussi qu'on offrait du miel à des divinités chthoniennes, qui présidaient à la mort et qu'on adorait dans les mystères : Pluton, Hécate, Dionysos, Déméter, etc." La raison en est sans doute que le miel, comme l'abeille, était un symbole de résurrection et d'immortalité". A la même idée se rattache la coutume i de porter du miel et d'en faire des libations sur la tombe de ceux qu'on avait perdus 1.' DROIT. Non seulement les ruches étaient très exposées aux manoeuvres des voleurs mais l'essaimage devait souvent donner lieu à des contestations entre voisins. De là dans les codes plusieurs dispositions destinées à régler la question de droit, si importante pour l'apiculture. « Les essaims d'abeilles étaient rangés en droit dans la même catégorie que les oiseaux ; ils n'avaient vraiment un propriétaire que pendant qu'ils étaient enfermés dans une ruche. Hors de la ruelle, et hors de la vue du propriétaire de la ruche, ils n'appartenaient à personne et le premier venu pouvait se les approprier' i. » Une charte municipale de provenance inconnue défend d'établir des ruches sur un terrain public, le long d'une voie par nias signale à Aegosthènes, dans la Mégaride, un sanctuaire de Mélalnpus ; on y honorait par des sacrifices et par une fête annuelle le prophète divinisé' q, STRATIO, p. 1419]. Des monnaies de l'époque impériale reproduisent peut-être l'image du temple 2. Il nous est connu encore, ainsi que les fêtes (ME),ap.rcdôela), par quelques textes épigraphiques 3. Nous voyons que ces fêtes comportaient des concours 4. Le vainqueur recevait, comme prix, une portion des victimes. La même récompense est encore décernée par l'État, en d'autres circonstances, à des citoyens ou à des étrangers '. F. DéRRBACR.