Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article MATRES

MATRES. Quoique l'idée de maternité tienne une large place dans les conceptions religieuses et dans les pratiques du culte chez les Romains [JCNO, p. 684; tion nulle part, dans les monuments littéraires de la latinité classique, de divinités appelées Mères et invoquées à titre collectif'. Cependant ]'existence de celle classe de divinités nous est attestée par des inscriptions en grand nombre (on en connaît aujourd'hui plus de quatre cents) et même par des monuments figurés, la plupart originaires des provinces celtiques ou germaniques, les autres érigés en Italie par des Celtes ou des Germains, qui y ont émigré d'ordinaire pour cause de service militaire. Les inscriptions se compliquent de vocables et de formules empruntés aux procédés de la piété romaine ; les représentations plastiques s'accommodent elles-mêmes à ceux de l'art romain ; de toute l'acon, il y alà des documents intéressants pour l'histoire de la religion romaine, dans ses rapports avec celle des peuples conquis'. La recension et la comparaison des textes épigraphiques où survit le culte des divinités _hères, prouve qu'elfes sont appelées indifj'érem ment, suivant les régions, Maires ou Matree (avec la forme matrabus), Matronae (qui a donné matronabu.s) et enfin Mairae. Matrae, _t/'aime et les formes spéciales du datif appartiennent à la langue populaire '..ltairae a été contesté, tant qu'on n'en connaissait qu'un seul exemple, de lecture douteuse. Mais la forme est sûre, aujourd'hui qu'il en a été découvert trois autres, tous les trois dans la région où la Gaule Belgique confine à la Lyonnaise, dans celle de Dijon 4. C'est affaire aux linguistes de discuter les rapports qui peuvent exister entre Mairae, Matree et Matres ; il nous suffit de constater que ces termes désignent des personnifications identiques et que Matronae en est un synonyme 5. Le plus vénérable et le plus fréquent est celui de Matres seules les Matres sont nommées auqustae, épithète qui leur donne une sorte de consécration officielle ; quelquefois dtvae ou deae, alors que divan Matronae ne se rencontre qu'une seule fois, auqustae ou deae Matronae jamais'. Cependant le caractère divin des unes et des autres ressort de ce fait que toutes également sont invoquées à côté d'autres dieux romains, avec Jupiter, Mercure, Neptune, Minerve, Bona Dea, Diane, etc. ; avec des divinités de nom indéterminé (dis deabusque), avec des génies d'ordre inférieur comme Fortuna, les Junones, les Genii proprement dits'. Dans certains cas, l'identité des Matres et des Matronae est garantie parles énumérations où elles figurent ensemble, sans préoccupation de préséance, par leur association avec des divinités de premier rang 5, enfin par la ressemblance générale des formules d'invocation et de dédicace. II faut y regarder de près pour s'apercevoir qu'en fait les Matronae sont subordonnées aux Matres, que les fone MAT 1634 MAT scientifique des astres, c'est-à-dire de leur répartition sur la voûte céleste pour les étoiles fixes, de leurs mouvements propres pour les planètes et les e flambeaux ) régulateurs des heures, jours, mois et années, préoccupait les «philosophes », et que cette science encombrée d'hypothèses sur la nature, les distances et grosseurs probables des corps célestes, portait indifféremment le nom d' a7T9evo r.(a ou âaTponoy(a. Le mot âaTpovsg(a, peut-être antérieur à l'autre', mais moins intelligible et même entaché d'impropriété, fut le moins employé des deux; mais l'un et l'autre restèrent parfaitement synonymes, même après que l'astronomie se fut surchargée d'astrologie' ASTBO'OMlt Il y eut bien quelques tentatives faites pour distinguer les deux termes et pour réserver l'un à l'astronomie, l'autre à l'astrologie, mais l'usage n'en tint aucun compte ; et, au surplus, ceux qui voulaient distinguer ne s'entendaient pas sur le choix du sens à donner à l'un ou à l'autre terme. A Rome, les astrologues furent tout d'abord désignés par l'étiquette générique de oi. LDAEI, employée par Caton 3 et dans l'édit de Cn. Cornelius Hispallus (139 av. J.-C.) `. Lucrèce distingue: il appelle les astronomes astrologi, par opposition aux Chaldaei ou astrologues'. Cicéron de même: mais il emploie aussi, indifféremment et à quelques lignes de distance, astrologi pour désigner astronomes et astrologues 6. Manilius intitule son traité d'astrologie Astronomica. Sénèque a encore une idée très nette de la différence qui sépare les théories météorologiques et divinatoires des Chaldaei de la science exacte, apparentée à la géométrie, qu'il appelle astronomia 3 ; mais il lui arrive d'appeler mathematici et ceux qui mesurent la grandeur ou la course des astres ° et les devins qui s'en sont servis pour prédire la mort de Claude 70. Pline emploie Chaldaei au sens ethnique et appelle astrologia tout ce qui concerne la connaissance des astres (•sideralis scientia)" ; mais il entend par7nathenaticae actes la divination par les astres12. Les historiens, comme Tacite, Suétone, et Juvénal à leur exemple, ne s'occupent que des astrologues, qu'ils appellent, suivant l'usage désormais établi, tantôt Chaldaei et tantôt,nathematiei. Même synonymie dans les textes juridiques du Haut et du Bas-Empire. Les deux qualificatifs, Chaldaei et mathematici, sont parfois juxtaposés, mais forment redondance, et non distinction. On ne confondait pas encore en haut lieu les Chaldéens ou mathématiciens avec les flagi et les malefeci 13. Mais le peuple ne faisait plus guère de distinction'', et l'astrologie, en recherchant les vertus astrales dans les minéraux, végétaux, animaux, en composant des phylactères et des médicaments imprégnés de ces vertus occultes, s'était réellement incorporée à la magie'' [MAGIA]. La vogue de l'astrologie, rattachée aux traditions 1 C'est le terme employé par Aristophane (Nub. 194-201), Xénophon (Ment. typas eraseo.oµfa sai.esoi (Sympos. p. 188 B). Le mot est impropre, en ce sens que l'hasç,a 0sp ne règle pas les astres, comme l'o'o,O;.oe gouverne sa maison. 2 Polybe (IX, 19), qui était un esprit net, entend par doseo3c,ia l'astronomie, et par pa8+,p.as,aot les géomètres. 3 Cat. Agric. 5, 4. 4 Val. Max, 1, 3, 3. Lueret. V, 797. devins peuvent être punis de mort (Paul. Sent. V, 21, 3) ; mais les mugi viii exu tien et ceteris similibus). On lit dans une ordonnance de 357 Chaldaei ac mage -le Pline (XXX, 2) constate déjà que la magie s'est combinée avec l'astrologie égyptiennes par les auteurs cachés sous les noms de Néchepso et Pétosiris, tendit à éhipiner peu à peu, dans le cercle des connaisseurs, l'appellation populaire de Chaldaei et à faire prévaloir l'étiquette neutre de mathematici. L'astrologie devint la mathesis par excellence, et c'est le titre que porte l'indigeste compilation signée du nom de Pirmicus Maternus. Mais cette définition, fondée sur la méthode, ne fit nullement disparaitre les définitions réelles contenues dans les mots aslrologia, Les Grecs, qui disposaient d'un ample vocabulaire et qui s'en servaient parfois pour distinguer les diverses parties de la science astrologique, âaTpo),oy(a ou âaTpovoµ(a proprement dite (étude des corps célestes), i..7soT')tecµa,tx7 (calcul divinatoire), avec ses deux méthodes principales, la ye0SOntaaoy(a et les xarae'ui, les Grecs, dis-je, n'ont jamais nettement distingué entre l'astrologie et l'astronomie, ni réservé à l'une ou à l'autre le titre accessoire de gaàflgaTtxii ou ti.àOr,atç. C'est probablement un astrologue que Philon désigne pat«, un astronome, de ceux qui s'occupent de mathématiques''». Strabon s'est cependant efforcé de réserver les termes ieTpovop.(a, aaTov6 ,ot, âaTpovoutxo(, aux astronomes proprement dits17, et celui de v.a8-r,p.aT1xo( aux mathématiciens" ; quand il fait une allusion en passant aux astrologues, il les appelle des « astronomes qui prétendent aussi faire de la généthlialogie ». Il est même bien aise, à ce propos, d'apprendre à ses lecteurs que les vrais « Chaldéens » sont, pour la plupart, des astronomes, et que les astrologues sont chez eux l'exception19. Plutarque ne s'impose aucune règle: ses àa'lr)té' ot et 1ezi't)p.uTtxo( sont, suivant les cas, des astronomes, des astrologues ou des mathématiciens. Sextus Empiricus, s'attaquant aux mathématiques ou sciences exactes en général, distingue (c rpo),oy(av t ua9rpaTtxw, c'est-à-dire l'astrologie, de la science d'un Eudoxe ou d'un Hipparque, =,'e ôr xai âaTpovom.(av Ttv'ç xa?,o+a(20 ; mais il constate du même coup que peu de gens (Ttv_ç) faisaient cette distinction. Enfin, il se laisse imposer par l'usage la synonymie Xx),laïot et p.a0ai,p.aTtxo(91. Le grand ouvrage astronomique de Ptolémée porte le titre de Malr,N.vTtx i cûvTai;tç, et le même auteur semble éviter, dans sa Tétrabible astrologique, de séparer l'astrologie de l'astronomie en lui donnant un titre à part. Il la définit: «prévisions fondées sur l'astronomie » L'zaTp0501 (aç 77poyvwaTtxz) 22. Il est inutile de pousser plus loin la statistique des vocables. Tous les textes qui parlent de l'astrologie, depuis les Philosophumena jusqu'aux compilations byzantines dont de vaillants érudits ont commencé l'inventaire 23, emploient presque indifféremment comme synonymes les termes précités, avec des variantes analy XVI, p. 739; XVII, p. 816. Il ne s'interdit pas cependant de dire que les o,9sepo, »vspoLOyo, (astronomes) ont appris des Égyptiens la durée de l'année solaire (XVII, nstrol. p. 337. Dion Cassius (LXVI, 9) dit de même que Vespasien sois d as e 07. 6l o v s 23 Ajouter à la bibliographie du sujet, qui n'avait pu être visé qu'en passant dans le grand ouvrage de K. Krumhacher, Gesch. der Byaanlinischen Litteratur, 28 Auff. München, 1897, les fascicules suivants du Catalogua codicum astrologorum graeeorum entrepris par Fr. Cumont, Fr. Boll, W. Kroll et A. Olivieri. I. Codices Florentines descr. A. Olivieri, Bruxelles, 1898; Codices Venetos descr. Guil. Kroll et A. Olivieri, 1900 ; III. Codices Mediolanenses descr, A. Martini et D. Bassi, 1901. Au Catalogue sont joints des MAT 1633 MAT malus) sureau ; on conseillait aussi le cyprès, le genévrier, l'olivier, le rouvre et l'aubour (laburnum;' Arcs -Amis]. On cite l'if 2, le cornouiller dont étaient faits les arcs des Lyciens° et des Sauromates '. Les Arabes employaient pour les leurs le pétiole (a7txf11) de la feuille de certaines espèces de palmiers'. Commerce du bois. L'Attique ne produisant pas de bois de construction, car le figuier et l'olivier ne peuvent étre considérés comme tels, Athènes devait chercher au dehors les grands bois nécessaires à sa marine et ceux dont la charpente et la menuiserie avaient besoin °. En Europe, au Ive siècle, il n'y avait guère que la Macédoine, la Thrace et l'Italie où l'on pà t trouver du bois propre aux constructions navales. En Asie, les contrées les plus favorisées sous ce rapport étaient la Cilicie, le territoire de Sinope et d'Amisos, l'Olympe de Mysie et l'Ida. ; encore, ici, la quantité était-elle médiocre; la Syrie avait le cèdre 7. Buis, cornouiller, érable, frêne, genévrier, orme, pin, sapin, yeuse venaient en grande partie de la Macédoine, ou Amphipolis était le grand marché du bois'. Athènes importait même de simples pieux (ycipsscç) et des bois pour portes (OD90 .aTv) 5. Dans de telles conditions, cette matière devait être chère ; malheureusement bien peu de chiffres nous sont parvenus. Nous savons que si la charge de menu bois que pouvait porter un âne se vendait deux drachmes à Athènes10, auIve siècle av. J.-C., un bois de rame en valait cinq". Rome trouvait en Italie la majeure partie de ses bois de charpente. Dans son voisinage, l'Étrurie lui fournissait presque toutes les grandes et belles poutres qu'elle employait à la construction de ses maisons]' (Eiç Tç oixo~oµxç) ; Pise était un des marchés où elle s'approvisionnait vers le premier siècle de notre ère 13. Dans la Ligurie elle trouvait, à Germa (Gênes), de grands arbres pour les constructions navales ; il y avait aussi dans ce pays des bois veinés qui pouvaient rivaliser avec le thuya". Mais il semble que pour sa marine, au moins aux environs de l'ère chrétienne, elle se soit adressée à l'Orient et ait été chercher en Mysie les bois de l'Ida, dont le grand marché, pour ainsi dire le chantier (6ao'o.mtov), selon l'expression de Strabon", était la ville d'Aspanée ('A57cavE1ç), sur le golfe d'Adramyttion ; et ceux de la région du Pont, surtout du territoire de Sinope, car, de ce côté, toute la d'aine de montagnes parallèle à la mer jusqu'à la Bithynie abondait en bois excellents pour les constructions navales; on y trouvait en outre l'érable et un arbre que Strabon appelle ipoxotpuov, dont on faisait des tables16. ALFRED JACOB.