Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article MARSUPIUM

MARSUPIUM 1. Bourse. Chez les Grecs, p.amalaoç et les substantifs de même racine (114 désignaient pas autre chose qu'un sac, par exemple un sac à provisions, ou encore celui dans lequel on enfermait ses vête ments quand on se déshabillait pour i prendre un bain ou pour faire de la gm_ Fig.4852.. Bourse. GvM5AsTPGA, )Accus, avec les fig.]. Ils semblent avoir été d'un usage assez rare'. Pour désigner une bourse on se sers MA11 1622 MAIl C'est sous cet aspect qu'on le vit un jour combattre mystérieusement dans tale bataille contre les Lucaniens et les .Bru [Liens réunis, en 282 av. J.-C.', Quant aux poètes, qui s'inspirent de l'Arès grec, ils le font paraitre, sur Je champ de bataille, tantôt à pied, tantôt monté sur un char, escorté de Bel Iona, de Pax-or et de Pallor, équivalents latins de Aoiu.oç et de 'lééoç 2. La légende de Romulus enlevé au ciel sur le char de son père suppose un dieu combattant du haut d'un char de guerre 3. Il est naturel que Mars soit devenu spécialement le patron, le dieu tutélaire des soldats, et, par extension, des gladiateurs'' ; de méme, en leur double qualité de nlaitres de l'empire et de chefs de l'armée, les empereurs lui sont attachés par une dévotion particulière. Son nom revient fréquemment clans les inscriptions votives et dans les légendes monétaires de l'époque impériale avec une grande variété d'épithètes. Quelques-unes, assez rares, milit(n'isG, niilitiae poteng', campester3, rappellent simplement son caractère guerrier, sa prédilection pour les camps. D'autres expriment son intervention active. son rôle de protecteur des arrnées, de l'empire, des empereurs : propugnator c1(5105 1", conserva/or" adsertor 13, secutor cornesque 13. La plus fréquente à toutes les époques est celle de viclor"ou son équivalent in rictus' . On trouve aussi propag;atorl irnp. Aug. 16. Le dieu qui procure la victoire est aussi celui qui assure la paix de l'empire : de là le surnom de poci fer" et de poeator13. Quant au culte de Mars ultor,institné, comme nous l'avons vu, par Auguste, polir venger la mort de son père adoptif, il s'est perpétué jusqu'à la lin de l'empire romain rP. Dans les camps romains, c'est Mars Llloi' qui est devenu le dieu tutélaire du etnr:roRiiu. On a vu iI.E(Il), p. 1066; que Iliaque camp avait dans sa chapelle des enseignes où l'on déposait l'aigle avec les autres signa des légionnaires. A partir du Iu° siècle de notre ère, c'est. Mars Ultor que l'on voit apparaître, avec d'autres dii nailitares, sur les autels de ces petites chapelles. I1 finit par y supplanter les autres divinités. On a remarqué, non sans justesse, que précisément au temps où la capitale est envahie par le flot des religions orientales, c'est à l'armée, sur les frontières du monde impérial, déjà fléchissantes sous les assauts des Barbares, que la vieille divinité nationale des Romains prend un regain de vitalité20. Les divinités dont le nom est le plus souvent associé au sien dans les textes épigraphiques sont Hercule, qui est également conçu comme une des divinités protectrices les plus puissantes de l'empire ' [HERCULES, p. 1717 , la Victoire, la Fortune, Minerve, etc.22 Représentations fegu.rées. On peut dire, d'une manière générale, que l'art romain s'est contenté d'ordinaire de représenter le dieu Mars sous les traits de l'Arès grec, et qu'il répète ou adapte les motifs que nous 424 sqq.; VII, 46 sqq.; Val. FI. Ill, 89 sqq.; Claud. ira 13rtf. 1, 342 sqq. 3 La première mention de cette légende se trouve dans Ennius, ap. Cie. De cep. 1, 6 'i'crtuli. Ad nia. 1, 10. On sait que le loup, symbole de Mars, figure parmi les emblèmes des légions. Flin. Hist. nat. X, 6 ; cf. supra, art. t.t:cro, p. 1065 Colisée était consacré à Mars et à Diane en raison des tombals de gladiateurs et des combats de bêles féroces qui s'y donnaient. a Coq). VII, 390, 391; Ardt. Zeit. p. 36, u. 159 sqq.; p. 245, n. 70; p. 272, n. G0, etc.; cf. pour les empereurs dont les monnaies présentent ces divers surnoms et les suivants, l'index de Cohen, et Roselier, Le.eik. II, 2434 sqq. auxquels nous renvoyons une foi; pour loures, avons énumérés : témoin le Mars qui décore, avec d'autres divinités, le rampant d'un fronton au quatrième Fis. 4848. plais et Rhéa Silvia. temple du Capitole ruAerrocu-M, fig. I150]23. Les musées possèdent plusieurs groupes, de travail romain, qui associent Arès et Aphrodite : ces groupes sont formés par la d'Adamclissi serait consacré à ce dieu, d'après Domaszewski, cité par O. Grappe -. 23 Ardt. Zeit. 1872, pl. t.vu; Roselier, s. v. .Ires, 490; Müller-W,eseler. Den/,mâter, éd. Wernieke, p1. r,, 4; cf. DilWel, Jnhrb, nheinl. LUI, p. 27 sqq. MAR 1621 MAR crochaient, dans leur quartier, à la tour Mamilia. La queue du cheval, arrachée elle aussi à la victime, était transportée toute fumante à la Ilegia et suspendue audessus de l'autel (tonus), où le sang achevait de s'égoutter. L'objet du sacrifice de l'October tiquas nous est indiqué par Paul Diacre, qui emprunte les expressions de 'Vendus Flaccus : ob frugum eventum : par quoi il faut entendre non pas, comme le voulait Preller, qu'on appelait la protection du dieu sur les semailles prochaines', mais qu'on le remerciait de la récolte précédente'. C'est donc essentiellement, tout au moins dans son esprit primitif, un rite d'actions de gràces qui suivait la rentrée de toutes les récoltes de l'année. Il est possible, à la rigueur, que l'indication de Verrius Flaccus ne soit qu'une hypothèse personnelle de l'auteur `, et que les Romains euxmêmes n'aient plus conservé, à son époque, une conscience bien nette du caractère originel de la fête. Mais Mannhardt, dans une étude très ingénieuse et très documentée sur ce sujets, a prouvé, par la comparaison avec de nombreuses pratiques populaires de différentes régions de l'Europe, et relatives à la fête des moissons, que cette interprétation est en somme la vraie ; et il explique ainsi, non seulement le sens même de la fête, mais les différentes circonstances qui l'accompagnaient'. La conclusion que l'on peut tirer de ces dernières remarques et qui vaut pour les autres fêtes de Mars, c'est que le culte du dieu s'offre à nous sous un double aspect, à la fois agricole et militaire, et qu'il a évolué lentement de l'un à l'autre. La substitution du second de ces caractères au premier s'est faite avec une très grande facilité, non seulement parce que les limites de l'année militaire se trouvaient coïncider avec les dates extrêmes du calendrier rural, mais aussi en raison du caractère même que présentaient certains traits du culte primitif : ainsi l'équipement des Saliens, leurs boucliers, leurs danses, dont le rôle, comme on l'a vu, était tout d'abord de combattre les puissances invisibles, funestes à l'agriculteur, c'étaient là des éléments qui devaient se prêter sans effort à la conception d'un dieu guerrier'. Quant aux éléments du culte primitif qui étaient réfractaires à cette interprétation nouvelle, ils disparurent ou devinrent le partage d'autres divinités: c'est ainsi que Mars fut évincé des rites restés exclusivement agraires, comme les _1atbarvalia, où il céda la place à Cérès et à Liber. Et si l'on recherche en dernière analyse la raison de la transformation qui s'est faite dans la conception de Mars, on la trouvera dans le changement qu'a subi la cité elle-même. La population primitive de [tome se composait de laboureurs et de patres ; ses fêtes étaient des fêtes rurales ; ses principaux (lieux, d'ailleurs d'une personnalité vague et indéterminée, avaient surtout pour fonction de protéger les cultures et les troupeaux, d'écarter de l'homme lui VI. même les dangers, les maladies. Puis la cité s'est constituée en État politique et conquérant ; nombre de ses dieux 5e modelèrent à son image, reçurent des attributions et des fonctions nouvelles. Mars, le vieux dieu national, est peut-être celui dont l'effigie s'est le plus profondément altérée ; le sens primitif des anciennes fêtes s'est obscurci, et leur caractère s'est mis à l'unisson des nouvelles conceptions religieuses et politiques de la cité. La Grèce à coup sûr collabora à cette transformation et l'accéléra ; elle dut surtout contribuer à fixer la physionomie et la personnalité de la vieille divinité italiote; mais précisément pour que l'idée vint de rapprocher Mars et Arès, de les identifier, il faut admettre que le dieu latin, au moment où se fit le contact des deux civilisations, était en train de devenir le grand dieu militaire de Rome'. L'étude que nous venons de faire, tout en portant sur l'ensemble du culte de Mars, a été pour nous l'occasion d'insister, de préférence,sur la conception la plus ancienne du dieu ; il nous reste à indiquer les traits qui résument plus spécialement sa fonction militaire et politique. Si Jupiter Optiluas llla.xintus, le Jupiter du Capitole, est devenu par excellence le génie tutélaire du peuple romain, il n'en est pas moins vrai que les destinées de l'empire dépendent surtout du dieu qui préside à la fortune des armes. Il est présent à toutes les entreprises militaires, et, depuis la fondation légendaire de la ville, son nom est associé à tous les souvenirs glorieux de ses annales. Chaque fois qu'une guerre est déclarée, un des premiers devoirs du général est de se rendre au sacrariant de Mars et d'y heurter les anrilia, puis la lance sacrée de Mars en prononçant la formule solennelle: Kars vigilcr,° ::Vous avons déjà vu que ces attributs, tant à la Begia qu'à la caria Saliorunt, s'agitaient d'eux-mêmes, aux moments critiques, et donnaient des indications prophétiques 10. Pendant la campagne, et avant la bataille, on offrait au dieu des sacrifices C'est surtout en sou nom qu'après la victoire on décernait les récompenses militaires, notamment la corona géant inca ou obsidionalis, la plus glorieuse de toutes (CORONA, p. 1J3à accordée à qui avait tiré une troupe romaine d'une situation désespérée. Une victoire pouvait être également l'occasion d'un sacrifice solennel à Mars". On lui consacrait les dépouilles (spolia secunda) et les armes conquises sur les ennemis 13, souvent aussi une part du butin IPRAEDA ou de l'argent produit du butin vendu ruasi Nous avons vu que le surnom de Gradivus n'a sans doute aucun rapport, dans le principe, avec les attributions d'un dieu de la guerre; mais, avec la transformation de la divinité, le sens primitif s'altéra, et l'on expliqua l'épithète par le rapprochement avec le mot gradior ; le _Mars Gradivus devint dès lors le Mars fantassin, le dieu de la légion, type lui-même du parfait légionnaire I, 204 MAR 1620 MAR Neriene où il est facile de reconnaître Nerio 2. Ce dernier détail confirme, ce que nous savons par ailleurs, qu'à une certaine époque Minerve s'est substituée dans la tradition et dans le culte à Nério3. Quant à l'épisode raconté par Porphyrion, il tendrait à prouver que, dans la légende populaire, l'amour de Mars et de Nerio, avant d'aboutir à une union régulière, a été combattu et repoussé'. C'est peut-être un écho du même épisode que nous trouvons dans le conte d'Anna Perenna : celleci, vieille femme de Bovillae, prise pour confidente de l'amour de Mars pour Minerve, c'est-à-dire pour Nerio, s'était jouée de la crédulité du dieu et s'était substituée à la déesse dans une entrevue qu'elle devait ménager à Mars s. Enfin l'on a souvent cité, à propos de cette même fable, l'image (fig. 48446) d'une ciste étrusque de Préneste, qui représente Minerve (.Ilenerva) tenant le dieu Mars, encore jeune, au-dessus d'une cuve d'où s'échappent des flammes' : motif qui est certainement italique, car on ne connaît rien dans la légende grecque qui y réponde, mais dont l'interprétation reste très obscure. Nous devons nous borner ici à résumer les fragments épars d'un mythe, trop mutilé pour qu'on puisse avec certitude lui rendre sa physionomie primitive Rappelons encore que Nerio était aussi identifiée avec Vénus', et qu'on a voulu la retrouver aussi dans une divinité, Here Marte', que les anciens mentionnent comme faisant partie du cycle de Mars'. Les fêtes célébrées au mois de mars en l'honneur du dieu répondent à des fêtes similaires en octobre : d'après nos sources, deux jours, dans ce dernier mois, sont consacrées à Mars : le 15, où on lui offre en sacrifice un cheval après des courses de chars, et le 19 qui, dans la terminologie des calendriers, porte le nom d'ARMILUSTRIUM. On n'a pas manqué d'insister sur le parallélisme, à peu près rigoureux, entre ces deux couples de fêtes :les 14 et 19 mars d'une part (Equirria et Quinquatrusl, et les là et 19 octobre d'autre part (sacrifice de l'eguus October et arntilustriuna; et l'on a remarqué, à juste titre, que cette double période fériée marque à Rome les deux limites extrêmes de l'année militaire, le début et la fin de la campagne". Aux deux époques a lieu, par le ministère des Saliens, une lustratio arrnorurn : on purifie les armes avant la campagne, et on les purifie quand les expéditions militaires sont censées achevées'. Dans les deux cas, tandis que les aricilia sont en mouvement, les jours de fête sont religiosi : on s'abstient de toute entreprise publique et privée, notamment de toute opération de guerre'. Le caractère de ces fêtes, qui se répondent si exactement, n'est donc pas douteux : ce sont bien des cérémonies militaires. Mais ici encore se pose la question : ce qui est vrai de l'époque historique est-il vrai des origines ? Le sacrifice du cheval, tout au moins, est accompagné de rites étranges qui sollicitent une autre interprétation. Le calendrier de Philocalus, le seul qui en fasse mention ", porte, à ce jour, cette simple note: equus ad nixas fit'6. Mais d'autres renseignements, épars en différents auteurs, complètent cette brève indication16. Le sacrifice avait lieu au Champ de Mars, sans doute à l'ara tllartis, à la suite d'une course de chars attelés de deux chevaux: celui qu'on choisissait pour victime était le cheval de droite de l'attelage vainqueur": on l'immolait à Mars en le perçant d'une lancers. La tète de la victime était détachée et couronnée de pains. Il s'engageait alors une lutte passionnée entre les habitants de deux quartiers voisins, ceux de la Voie Sacrée et ceux de Subura, pour emporter cette relique sanglante. Les gens de Subura, s'ils avaient l'avantage, allaient la fixer aux parois de la Regia; ceux de la Voie Sacrée, quand ils étaient les plus forts, l'ac MIR 1619 MAR dotal, moitié militaire des Saliens, et les boucliers dont ils ont la garde font songer tout d'abord au culte d'une divinité guerrière', et il n'est pas douteux que les Romains, de très bonne heure, ne l'aient envisagé comme tel. Néanmoins la singularité des rites accomplis par cette corporation religieuse suggère une autre interprétation. Leurs danses et leurs évolutions, accompagnées de psalmodies que les Saliens débitent tout en frappant leurs boucliers du billon'`, rappellent les cérémonies bizarres des Curètes grecs [CURETES' ; elles pourraient bien avoir pour objet, comme celles-ci, d'écarter les esprits malfaisants, c'est-à-dire les influences pernicieuses qui, au printemps, menacent les jeunes récoltes'. On a rapproché aussi et avec raison la légende grecque et les fêtes printanières d'Apollon, conçu comme le génie de la lumière et qui, dès sa naissance, livre un combat contre les puissances des ténèbres et du mal personnifiées dans le serpent Python'. Des pratiques analogues se retrouvent chez maint peuple primitif, avec la même intention d'exorcisme, surtout au printemps, où les nouvelles pousses sont plus délicates t. Lydus nous a transmis, sur ces fêtes de Mars, un épisode fort curieux: le jour des ides, c'est-à-dire le 1h, le lendemain des llamuralia, on conduisait par les rues de la ville un homme couvert de peaux de bêtes et on le chassait du territoire à coups de bâtons blancs : ce personnage était censé représenter Mamurius Veturius, le forgeron légendaire qui avait fabriqué, à l'imitation du bouclier authentique de Mars, les onze autres aneilia7. Suivant Preller, Mamurius ne serait, dans cette légende et dans ce rite, qu'une autre forme du vocable Jlars, et Veturius serait de même racine et de même sens que vetus : Mamurius Veturius serait donc un symbole du printemps précédent, c'est-à-dire, par une extension de sens, une image de l'année écoulée, àlaquelle on signifierait son congé au début de l'année nouvelles. D'après une autre interprétation, due à M. Frazer, il faudrait reconnaître au contraire en Mamurius Veturius une sorte de représentation humaine et collective de tous les esprits pernicieux, qu'il s'agirait de chasser en sa personne : il jouerait donc en cette circonstance le rôle de bouc émissaire°. L'explication, naturellement hypothétique, de cet épisode particulier appelle des réserves: mais ce qui parait bien résulter de l'ensemble des cérémonies accomplies par les Saliens, c'est qu'elles avaient primitivement pour but de protéger la croissance des jeunes plantations contre les démons hostiles, afin qu'elles fussent en état de se développer pour l'avantage de la communauté '0, et nous sommes bien ramenés ainsi, par les fêtes de Mars, à la conception d'un dieu protecteur de l'agriculture. Ces mêmes fêtes frettaient Mars en contact avec plusieurs divinités féminines. Aux calendes, spécialement consacrées au dieu, on célébrait également les ,llatronalia : c'était le dies natalis ou anniversaire de la fondation du temple de June Lutina à l'Esquilin" rem, p. 68i. Dans la coïncidence des deux fêtes, il n'y a vraisemblablement qu'un synchronisme tout fortuit 12 : peut-être est-ce ce synchronisme. joint à l'autorité de la légende grecque où Arès est le fils d'Héra, qui aura suggéré aux Latins le mythe d'après lequel Junon est mère de Mars et par lui aïeule de Romulus car on ne trouve pas dans la religion romaine d'autre trace d'un lien entre les deux divinités. Ovide se fait l'écho d'une fable sur les circonstances de cette naissance; la déesse serait devenue mère du dieu au contact d'une fleur'. Le surnom de Martiali.s, donné à Junon sur des monnaies impériales d'époque tardive, fait allusion à cette maternité''. Les rapports entre Mars et la déesse 1Verio paraissent au contraire beaucoup plus anciens et plus intimes, mais nous ne les connaissons guère que par des allusions assez sommaires. Parmi différentes cérémonies religieuses célébrées le 19 mars ;Quinquatrus), Lydus mentionne des honneurs rendus aux deux divinités, ti:ux? "Aoeoç xat Xeo(vr,çlt. Qu'est-ce que 2serio, et quel est le lien qui l'unit à Mars'? Les anciens voient en elle une déesse d'origine sabine, pour la raison sans doute que le mot nero, et son féminin nerio, s'étaient conservés dans le dialecte sabin avec le sens de e fort, vaillant" Cependant cette même déesse était certainement populaire à Rome, comme nous l'attestent un vers de Plaute as et un autre du poète comique Licinius Imbrex1'2 : ces deux textes, et l'invocation IVerienem Marti.s, empruntée par Varron à un ancien formulaire sacré20, nous montrent qu'elle était considérée comme l'épouse de Mars. Aulu-Gelle nous a transmis, d'après un ancien annaliste romain, la très curieuse prière qu'aurait adressée Hersilia, épouse de Romulus, à la même déesse pour la supplier de mettre fin au combat fratricide entre Romains et Sabins': Nerio, ou, comme elle est ici appelée. IV-eria lllartis, y apparaît également comme l'épouse du dieu et comme la protectrice du mariage. D'autre part on trouve, dans une note de Porphyrion sur Horace, le souvenir d'une antique légende d'après laquelle Minerve, objet d'une entreprise amoureuse de Mars, avait réussi à résister au dieu et à garder sa virginité : à la suite de cette lutte, ajoute le commentateur, elle aurait pris le nom de MAR 1618 MAR avoir joué dans son culte le rôle d'« co-csdratc'o', la fève'. Le dieu qui veille à la prospérité des campagnes manifeste surtout sa puissance dans les phénomènes qui accompagnent le renouveau de l'année; c'est alors que renaît dans la nature entière, plantes, animaux et hommes, l'activité productrice dont il est, la personnification. Mars est. pour cette raison, conçu éminemment comme le dieu du printemps ; c'est dans cette saison que sont célébrées quelques-unes des fêtes les plus importantes de son culte. Ce caractère s'accuse tout d'abord dans l'antique usage du ver sacrant. Sans répéter ici ce qui a été dit à ce sujet nEVOglo, p. 115-1161, rappelons que cette pratique, en usage chez diverses peuplades italiotes, consistait à dévouer au dieu, en cas de calamité publique, les fruits ou les générations du printemps à venir. Quant aux sacrifices humains, qui, dans les temps primitifs, s'accomplissaient réellement, ils furent remplacés, avec l'adoucissement des rsi 'urs, par des exodes de populations. La jeune génération, ainsi consacrée à la divinité, partait,après s in gtannées rés olues,à la recherche d'unepatrie nouvelle Nous connaissons un certain nombre d'émigrations de ce genre; et, pour chacun de ces cas, la légende ne manque pas d'indiquer que la colonie exilée partait sous la conduite et la protection d'un des animaux spécialement consacrés à Mars, le loup, le pic, ou le boeuf de labour'. Mais le fait le plus caractéristique, pour cet aspect du dieu Mars, c'est que les Romains ont mis spécialement sous son invocation le premier mois du printemps, celui même qui ouvrit chez eux, jusqu'à Jules César, l'année civile et religieuse; ils lui ont donné le nom du dieu, mensis Martius : détail d'autant plus significatif qu'aucun autre des mois de l'année, à l'exception de janvier, n'a reçu le nom d'une divinité : encore faut-il remarquer que le premier jour de janoarius seul est consacré à Janus, tandis que le culte de Mars est prédominant pendant toute la durée du mois auquel le dieu préside". Il suffit de jeter les yeux sur le tableau qui a été dressé, à l'article FERIAE [p. 1049[, des fêtes primitives de l'État romain (feriae stativae), pour remarquer le nombre de celles qui se pressent à cette époque de l'année pour rendre hommage au dieu Mars. Les cérémonies commentaient dès la fin de février, le dernier mois de l'année écoulée, qui avait été rempli par les purifications et les offrandes aux morts : le 27 de ce mois avaient lieu les EQUIBRIA, qui consistaient essentiellement en courses de chevaux au Champ de Mars. Les calendes de Mars, qui sont le jour de l'an romain, étaient spécialement consacrées au dieu.' ; le calendrier de Philocalus note que ce jour est considéré comme le jour anniversaire de sa naissance' : croyance qui a sans doute son origine tout simplement dans ce fait que c'était le premier jour du mois placé sous son vocable 7. C'était encore ce jour-là, d'après les traditions, que le bouclier de Mars, le prototype des ancilia sacrés, était tombé du ciel' ou avait été trouvé dans la maison de Numa'. Aussi en ce même jour les Saliens [sxLII inauguraient-ils les processions et les divers rites qu'ils devaient ensuite exécuter, sans discontinuité, pendant toute la durée du mois jusqu'au 24. Bien que ces cérémonies eussent lieu tous les jours, il est fait expressément mention de l'intervention des Saliens à certaines fêtes déterminées : le 9, oit il est dit, dans le calendrier de Philocalus : arma (Incilia rnovent10; le 14, où recommence, en l'honneur de Mars, la célébration des Equirria", fête qui finit par prendre le nom de Jianzuralia, en commémoration du forgeron Mamurius, qui n'est sans doute qu'un doublet de Mars lui-même'; le 17, où ils participent aux Agonia 1' ; le 19, Quinquatrus, où a lieu la lustratio des ancilia11; enfin le 23, jour du tubilustrium, en l'honneur de Mars et de la déesse Serin". A cette liste, il convient peut-être d'ajouter la fête champêtre du 13 mars, où l'on célébrait ANNA PERENNA qui, dans certaines versions, était mèlée à la légende de Mars" Nous nous bornons ici à cette énumération sommaire, renvoyant, pour la description plus détaillée des différentes fêtes, aux articles spéciaux de ce Dictionnaire. Mais nous devons ici nous poser une question d'un ordre général. Est-ce uniquement par l'époque de l'année où elles tombent qu'elles rappellent le caractère agricole et printanier du dieu auquel elles s'adressent `? ou bien ce caractère se manifeste-t-il encore dans la physionomie de ces fêtes, tout au moins dans certains traits de leurs rites? Disons d'abord que le printemps étant également le commencement de l'année militaire, il est naturel qu'à l'époque où Mars fut devenu par excellence le dieu des armées et des combats, cet aspect guerrier ait fini par prédominer dans les fêtes du mois de mars. C'est ainsi que les courses de chevaux ou de chars des Equirria sont devenues éminemment les fêtes du cheval de guerre, l'equus bellator'7, l'ami et l'auxiliaire du dieu des batailles, l'orgueil de la chevalerie romaine. Il convient cependant de rappeler que ce petit être aussi à titre de dieu champêtre qu'on a mis tout d'abord sous sa protection les chevaux, dont l'élevage réussissait si bien dans les pâturages du centre de l'Italie". De même, il est bien vrai que l'accoutrement moitié sacer MAR 1617 MAR résidence est dans les régions montagneuses et forestières où se trouvent également les grands pâturages nécessaires à l'élève du bétail' ; de même d'autres divinités de la vie pastorale et champêtre, connue Silvanus, Pales, sont censées habiter de préférence les forêts'. Peut-être ne faut-il pas chercher ailleurs la raison pour laquelle on a consacré le loup à Mars. On sait le rôle qu'il joue dans sa légende : les Romains l'appellent lupus Martius, lupa Martia; son image est reproduite dans les sanctuaires du dieu ; son apparition présage le secours de Mars; enfin la fable des jumeaux allaités par la louve met en évidence cette affinité entre le dieu et l'animal Plus tard, lorsque Mars fut décidément devenu une divinité guerrière, on admit tout naturellement que le loup lui était associé comme symbole du caractère sauvage et féroce de la guerre ; mais on peut se demander si l'idée qui présida dans le principe à ce rapprochement n'est pas la croyance que le dieu était le protecteur des troupeaux contre les bêtes féroces de la forêt ° : c'est en somme la même conception qui se traduit, d'une manière plus explicite, dans l'épithète de Lupercus appliquée à FAUVrs, dieu parent et similaire de Mars. Le pic, picus Martius, l'oiseau de Mars, nous rappelle encore la nature silvicole et rurale du dieu. Il est déjà nommé dans les tables eugubines`'. C'est lui qui guide l'émigration ou ver sacrum des Picentinse, comme le loup conduit celle des Hirpins, et il intervient également dans les légendes sur les origines de Rome'. Il passait pour un oiseau prophétique', et l'on a conjecturé qu'il a été consacré à Mars précisément parce que son cri répété annonce au laboureur l'approche de la pluies. On sait que sous le nom de Picus ou de Picumnus, l'oiseau cher à Mars a été promu lui même au rang de divinité ou de héros u. Dans le même ouvrage de Caton, nous trouvons d'intéressants détails sur le rôle éminent de Mars dans les AMBARVALIAII. Célébrée le 29 mai à Rome, et à une date voisine en différentes localités1', cette fête avait essentiellement un caractère lustral. On purifiait ainsi soit une ville, soit une campagne (lustralio pagi) ; les simples particuliers purifiaient leur champ pour appeler la bénédiction céleste sur les moissons au moment où elles mûrissent 13. C'est à Mars que, dans les temps les plus reculés, on offrait en sacrifice des victimes, les suore /ourdi«, c'est-à-dire le porc, le bélier et le taureau, après les avoir promenées trois fois autour de l'objet qu'on voulait purifier'''; c'est à Mars également qu'on adressait, avant le sacrifice, la prière dont Caton nous a conservé la formule sacramentelle : a Père Mars, je t'implore, je Le prie d'être bienveillant et propice à moi, à ma maison, à tous mes gens : c'est pourquoi j'ai fait promener des suovetaurilia autour de mon champ, de ma terre, de mon bien ; empêche, détourne, écarte les maladies visibles et invisibles, les épidémies et les ravages, les dégâts et les intempéries ; permets aux plantes, aux blés, aux vignobles, aux vergers de pousser et de bien venir ; conserve en bon état bergers et troupeaux ; accorde santé et prospérité à moi, à ma maison, à tous mes gens. » C'est à peu près de même façon, quoique en termes plus sommaires, que le chant des Arvales appelle la protection du dieu sur les champs « !e permets pas. à la contagion, ô Marmar, de se répandre dans nos champs... Protège les semailles, ô Mars ! sois favorable aux semailles, ô Berber 15 ! » Dans la fête des ROBIGALIA, célébrée le 25 avril, il est associé à Robigus ou Robigo, divinité qui guérit les blés de la nielle 16, fonction qui, à Rhodes, était dévolue à Apollon eoufi.ltoçl'. Toutes ces croyances nous montrent en Mars un dieu ârro-cpdarxtoç ou aaerruncuste, qui sait combattre efficacement les fléaux dont l'agriculture est menacée. L'épithète de Gradicus, une des plus usitées, et qui fait souvent partie de l'appellation officielle du dieu i0, conserve peut-êtrela trace de ce caractère agricole.Les anciens, guidés par une analogie superficielle, ont rapproché ce mot du verbe gradior, et l'interprètent comme faisant allusion àla démarche impétueuse du dieu de la guerre 90 : mais la racine de gradior est brève, et la première syllabe de Gradivus est longue d'ordinaire21. Aussi a-t-on proposé de rattacher ce mot à la racine qui se retrouve dans grandis, grandire : le Mars Gradit,us serait ainsi le dieu a qui fait croître t les plantations22. L'épithète a eu, dans la suite, la même fortune que la divinité elle-même ; et c'est ultérieurement que, s'appliquant à un dieu guerrier, elle a paru exprimer son caractère belliqueux. Rappelons enfin, toujours dans ce même ordre d'idées, que certaines plantes ou arbres étaient plus spécialement consacrés à Mars : le figuier, qui lui a valu le surnom de Fiearius",Ie chêne", le cornouiller", le laurier qui semble MAR 1616 MAR rôle dans les danses des Saliens'. Dans le voisinage de cet autel on éleva plus tard un temple au dieu2. Quant au Champ de Mars lui-même I IMi its MARTU 5;, il semble, si l'on s'en rapporte à Tite-Live, n'avoir été consacré à la même divinité qu'après la chute des Tarcluins Outre les exercices militaires et les réunions des comices auxquelles il était affecté, on y célébrait une des grandes fêtes en l'honneur de Mars, les EQDIRRIA et les Manauralia. Au bord de la voie Appienne, entre le premier et le deuxième mille au delà de la porte Capène, et sur une petite éminence qui précède aujourd'hui la porte San Sebastiano, se trouvait lut temple de Mars." qui, d'après Servius, y était adoré sous le nom de Crut/brus'. C'est dans l'édifice même que l'on voyait sans doute une statue de Mars, entourée d'un groupe de loups, mentionnée par Tite-Live sur la voie Appienne". Au reste., toute cette région était consacrée au dieu : elle portait le nom de ad Martis et l'on y signale aussi un Clivas Marlialis ° ; diverses inscriptions, relatives à Mars, y ont été retrouvées e. Quelle est la date de la fondation du sanctuaire lui-même? On l'a cru très ancien : peutêtre est-il identique a.u temple dédié à Mars entre. les années 366 et 388 par le cluunzcir sacris faciundis T. Quinctius à la suite de l'invasion gauloises. Les autres temples de Mars à Rome sont, d'une époque postérieure. D. Junius Brutus Gallaecus, consul de l'an 138 avant notre ère, en fit édifier un près du Cirque Flaminius et y logea la statue colossale faite par Scopa,s 10. Auguste consacra à Mars L"ltor deux temples qu'il faut très probablement distinguer l'un de l'autre : le premier, au Capitole, est de l'an 20 av. J.-C. ; il avait été édifié pour glori F Temple fier la victoire remportée sur les Par tie mar"allnr. thes et qui avait vengé la défaite de Crassus" : il. devait être de dimensions assez restreintes et de forme ronde, si l'on en juge par des monnaies qui paraissent. (fig. 4811'i) reproduire sa silhouette18. Quant au second, Octave l'avait voué en l'an av. J.-C., au cours de la campagne contre Brutus et Cassius, pour venger le meurtre de César, pro ultione Jlaterna, mais il ne fut inauguré qu'en l'an b avant notre ère, et avant d'ètre, complètement achevé'3; il se trouvait au Forum Augustil ; c'était un des plus magnifiques de la cité : parmi les trophées et les nombreuses oeuvres d'art qui le décoraient, figuraient la statue de Jules César et un groupe de Mars et Vénus, ancêtres divins de la gens Julia". Le même groupe divin, d'après Dion Cassius, occupe une place éminente parmi les divinités en l'Honneur desquelles fut édifié le Panthéon d'Agrippa16. Enfin, pour achever cette énumération des édifices religieux consacrés au culte de Mars à Route, rappelons que, suivant un témoignage, on avait réservé au dieu un des sacraria annexés au temple de Jupiter Capitolin". La diffusion du culte de Mars dans l'empire romain suivit tout naturellement les progrès de la conquête. Dans un très grand nombre de colonies et de provinces, nous retrouvons des temples de Marsu, un collège de Saliens '9, un /l'amen Martialis 20, surtout des inscriptions votives en l'honneur de Mars, invoqué seul sous diverses épithètes, ou encore associé à d'autres divinités romaines, comme Jupiter, la Victoire, hercule. Minerve'. D'autre part, en beaucoup de contrées, il a été identifié avec les divinités locales des peuples qui ont été en contact avec Rome ; c'est ainsi qu'on le trouve assimilé à Teutatès, IIarmogius, Latobius, Thingsus, Lacavus, Leucetius, etc., divinités dont quelques-unes sont connues, mais dont beaucoup ne nous sont révélées que par ces mentions sommaires de l'épi graphie 22. Caractères du dieu Mars; son culte. Le Mars italique ne se prête pas, comme l'Arès des Grecs, à une définition nette et simple ; sa nature est plus complexe. Sans doute il apparaît surtout, dans la littérature et les croyances de l'époque classique et jusque sous les derniers empereurs, comme le dieu des batailles ; c'est lui qui a conduit Rome à l'empire du monde ; il a personnifié le génie conquérant de son peuple. C'est là le caractère qui frappe tout d'abord ; mais tel n'est pas, autant qu'on en peut juger, son caractère primitif ou tout au moins son caractère prédominant dans les plus anciennes croyances. Pour les antiques populations de l'Italie, il était avant tout un dieu rustique, qui préside à la végétation et à la force productive de la nature. Comment et dans quelle mesure ces deux aspects de sa personnalité se sont-ils combinés, comment la transition de l'un à l'autre a-t-elle pu se produire? C'est ce que nous tenterons d'établir, en envisageant tour à tour les différents éléments de sa nature, et en faisant appel, pour cette analyse, à tous les renseignements que nous fournissent les pratiques de son culte et de ses fêtes, ses légendes, ses épithètes, ses symboles. Dans son ouvrage sur l'Agriculture, Caton nous a conservé des indications très précieuses et très nettes sur le caractère agreste et champêtre du dieu Mars chez les populations de l'Italie. Sous le nom de Sillanus, les patres et les éleveurs l'invoquent pour la prospérité de leurs bestiaux, Iwo babas ut caleant 23. Ce Mars Silcanus est clone une divinité analogue à l'Apollon N(lI,.Io; ou Nazaioç2'1 : le surnom qu'il porte indique que sa nium et un /l'amen Martialis à Laurentum et Lavinium, à Lanuvium, à Aricie". Albe avait également un bois sacré de Mars 3 et Vélitrae un ancien autel du dieu'. A Préneste, on conservait, comme à la Regia de Rome, la lance, son symbole'. Enfin un certain nombre d'inscriptions, de différentes villes latines, confirment la diffusion de ce culte dans la région '. Quant à Rome même, bien que nos renseignements soient plus circonstanciés sur sa religion que sur celle des autres villes du Latium, les origines et la nationalité de ses cultes primitifs soulèvent encore bien des questions qui ne sont pas résolues. Ce qu'on peut dire d'à peu près certain, c'est que le culte de Mars s'y présentait, dès une très haute antiquité, sous une double forure répondant à une double origine, celle de Mars proprement dit, et celle de Quirinus. Le culte de Mars a son centre au Palatin, la première occupée des sept collines, la Bouta quadrala de Romulus, c'est-à-dire le siège, à ce qu'il semble, de l'élément latin de la cité romaine'. C'est au pied du Palatin et à l'extrémité sud-est du Forum, que se trouvait la Regia, le palais légendaire de Numa', en réalité le sanctuaire religieux des Latins" ; dans une des salles ou sacraria de cet édifice, on conservait les lances sacrées du dieu, hastae Martiae, lances prophétiques, auxquelles s'attacha toujours la plus grande vénération 10. Au sommet de la même colline s'élevait la caria Saliorum, c'est-à-dire le local où s'assemblaient les Saliens du Palatin, plus tard appelés Salii Palalini, pour les distinguer des Saliens du Quirinal [sAtn] : ils y gardaient, avec le lituus de Romulus, les douze boucliers ou ancilia qui, comme les lances de la Regia, s'agitaient d'eux-mêmes pour prophétiser dans les moments critiques"; on y voyait en outre, s'il faut en croire le témoignage de Servius, une statue de Mars armé de la lance13 Enfin l'importance du culte de Mars dans la religion primitive de Rogne est confirmée par l'existence du /t'amen Jlarlialis qui comptait au nombre des trois flamines majeurs [ILAMEN, p. 1160]. Dans la hiérarchie des prêtres telle que nous l'a transmise Festust'", c'est le rex qui occupait le premier rang; viennent ensuite le /lament Matis, le /l'amen ,Martialis et le /l'amen Quirinalis; à cette classification correspond celle des dieux Janus, Jupiter, Mars et Quirinus. Mais cette liste elle-même, bien que remontant aux premiers temps de la république, est d'une époque qui a suivi la fusion des trois tribus dont Rome s'est formée. Si l'on met à part le rex, qui n'a été créé qu'à la chute de la royauté, on est amené à penser que les trois grands flaminats répondent aux cultes les plus éminents des trois tribus, et que Mars y représente l'apport religieux des Rarnnes du Palatin, dont il était par excellence la divinité nationale". Il suffira de rappeler que, dans la légende nationale sur les origines de Rogne, c'est Mars, époux de Rhéa Silvia et père de Romulus, qui est considéré comme l'ancêtre du peuple romain. Au Quirinal, c'est une population de race sabine, les Tities, que nous trouvons établie. Elle a ses sanctuaires distincts et ses dieux propres : parmi eux, le plus important, celui qui a donné son nom à la colline ou qui l'a reçu d'elle, Quirinus. Quelle relation y a-t-il entre Mars et Quirinus? Les anciens n'ont pas hésité à les identifier 10 et les modernes sont disposés également à reconnaitre en Quirinus un Mars sabin''. Les deux divinités ont en effet même attribut, la lance; et, fait plus caractéristique peut-être, à l'époque où les trois tribus se furent fondues pour ne constituer qu'une cité, on créa, à l'imitation des Salii du Palatin, pour le culte de Quirinus, un collège de Salii Gollini qui eurent, eux aussi, la garde de douze boucliers sacrés18. Quoi qu'il en soit, et à supposer que Quirinus ne soit qu'une épithète du Mars sabin, comme Gradivns était celle du Mars latin adoré au Palatin'', les deux cultes sont restés nettement distincts, chacun avec ses sanctuaires, son collège de Saliens, son flamen particulier, et nous n'avons à nous occuper ici que du dernier20. Au témoignage de Vitruve, conformément à une coutume qu'il signale chez les Étrusques, c'est en dehors de l'enceinte primitive, à Rome, que se trouvaient les sanctuaires du dieu'. Cette assertion parait contraire à ce que nous savons : car, d'une part. elle ne tient pas compte des anciens sanctuaires du Palatin ; et, d'autre part, nous ne connaissons, comme centre d'un culte authentiquement ancien de Mars en dehors du pomoeri2lnt, que l'autel, souvent mentionné par les auteurs, du Champ de Mars (ara Jlartis)" ; on y sacrifiait en octobre l'equus ocloberG3 ; et peut-être jouait-ii quelque MAR 1611 MAR dans son nom une autre racine mer qui a le sens de « briller » (cf. le latin 7narmor, le grec µxpx(pm, la divinité Mvtp.)'. Ces essais, et d'autres que nous négligeons 2, sont également incertains. Outre la forme Mars, on trouve les noms composés de Marspifer et de _ilaspiter, qui s'expliquent, comme Jupiter et d'autres analogues, par l'adjonction du ternie pater 3. Marmar, qui se lit dans le chant des Arvales, où il est au vocatif, n'est sans doute qu'une réduplication du nom simple Dans une ancienne inscription de Tusculum, le dieu porte le nom de ilaurs dont il semble que celui de M'avons, beaucoup plus répandu et qui a survécu dans le latin classique, n'est qu'une variante par allongement (on peut comparer Faunus et Favonius) : cependant on peut admettre aussi que Jlaurs et Mavors sont réellement les formes primitives et pleines, d'où est provenue, par contraction, celle de Mars 7. Quant à la forme Mamers, elle ne se trouve dans aucun document original : peut-être a-t-elle été dérivée par les grammairiens de l'ethnique ,Ylatnertini, que portaient les habitants de Messana en Sicile, fervents adorateurs du dieu 3. Principaux lieux de cuite. L'Étrurie a été le centre d'un culte très populaire du dieu Mars 9. Vitruve nous apprend que les Étrusques avaient l'habitude de construire les temples de cette divinité hors des fortifications de leurs villes 10. En particulier, nous connaissons une statio ad Martis entre Luca et Pistorium La présence d'un mois Martius dans le calendrier des Falisques12 et la tradition, rappelée par Servius, qu'il y avait un collège des Saliens à Faléries et à Veiesf3 nous attestent également l'existence d'un culte du dieu dans la région méridionale de 1'Étrurie. Quant aux monuments figurés de l'Étrurie, notamment les miroirs, ils nous présentent deux divinités que l'on a identifiées avec l'Arès des Grecs ou le Mars des Latins : Larcin, qui apparaît sur un certain nombre de miroirs sous les traits d'un dieu jeune et guerrier, armé de l'épée ou de la lance et du bouclier, la tête couverte d'un casque, et dont la place est à proximité d'Auran ou Aphrodite ''° ; et 1llaris, qu'on voit sur les miroirs sous différents aspects et à différents tiges, parfois ailé, d'ordinaire armé et dans des scènes dont l'interprétation est difficile à cause de l'ignorance où nous sommes des légendes locales 13 En Ombrie, Mars est un des dieux nationaux les plus anciens. Les tables eugubines font connaître qu'il y était adoré avec, les surnoms de Grabovius 16, qui est peutêtre un équivalent dialectal de Gradivus 11, et de ilodius '. Le nom du dieu reparaît dans celui d'autres divinités nommées par les mêmes documents : Picius Martius, Cerfus Martius, Praestita Cerna Ger/1 Jlartii, Tursa Cer/ia Cerfi ,Ilartii 13. Dans les environs d'Iguvium a été trouvée une statue de Mars avec une inscription qui révèle une autre épithète du dieu, Cyprius, dont le sens est celui de Bonus 20. A Tuder, le culte de Mars nous est attesté par deux vers de Silius Italicus 21. Sur la voie Flaminienne, entre Namia et Mévania, la table de Peutinger et l'Itinéraire d'Anlonin mentionnent une statio ad Marlis 22. Dans la Sabine, le culte de Mars nous est signalé par la présence du mois Martius que contenait le calendrier régional, en particulier celui de Cures23. Le dieu avait un temple dans l'antique ville, ruinée de bonne heure, de Suna 24, à Trébula Mutuesca et un oracle à Tiora Matiéné 2s Il y avait auprès de la via Salaria une statio ad Martis 27. Le même culte existait chez les Picentins, peuple détaché des Sabins par suite d'un ver sacrum 2'. Quant aux Marses et aux Marrucini, leur nom même rappelle celui du dieu et témoigne du culte qu'il y occupait dans la religion nationale'-3. Il est attesté aussi à Larinum, capitale des Frentani 20. Dans le Samnium, il se constate par l'usage indigène du ver sacrum 11, par des inscriptions a2, par la présence d'un vices Martialis près de Bénévent 33. Les Osques adoraient aussi Mars comme un dieu national : Tite-Live cite un ancien temple qui lui était consacré à Capoue3''. À Calés, il y avait une Martialis porta 31. Les monnaies romano-campaniennes portent fréquemment l'image du dieu 36, et ce sont également les monnaies qui nous font connaître son culte dans la Lucanie ". Dans le Latium, le culte de Mars n'est pas moins répandu, et il remonte, là aussi, à une très haute antiquité 0e. Un mois lui est consacré, celui de Martius, notamment dans les calendriers d'Albe, d'Aricie, de Laurentum, des Berniques 39. Nous connaissons un collège des Saliens à Albe, à Tusculum, à Tibur et à havi MAR -1613i\IAR représenté par un Arès colossal du palais Borghèse le dieu porte la chlamyde et le casque, et sa main tire l'épée. Enfin il existe dans divers musées, au Louvre, à Madrid, ailleurs encore, un certain nombre de têtes d'Arès qui remontent à la même date et qui présentent toutes des caractères communs : la tête est imberbe, les traits énergi ques, l'expression un peu froide ; sous un casque attique au cimier élevé, s'échappent d'abondants cheveux bouclés 2. L'Arès Ludovisi (fig. 118'13) est, parmi les types de la statuaire, un des plus remarquables. L'attitude rappelle celle de la frise du Parthénon : le dieu est assis, les mains croisées sur un genou ; l'une d'elles tient une épée au fourreau; le pied gauche s'appuie sur le casque posé à terre; le regard, très expressif, porte au loin. Il paraît très vraisemblable que nous avons ici une imitation d'un Arès colossal exécuté par Seopas et qui figura plus tard dans un temple de Mars à home 3 ; il faudrait, dans cette hypothèse, faire abstraction d'un petit Pros qui joue aux pieds du dieu, et qui est une addition du copiste''. Les anciens citent encore deux Arès du ive siècle, une statue colossale de Léocharès ou de Timothéos et une ouvre de Piston'. Quant à Lysippe, les archéologues distinguent son influence dans divers VI bronzes qui peuvent se ramener à deux types : un Arès remettant l'épée au fourreau ou l'en tirant, et un autre appuyé sur sa lance dressée, avec l'épée pendant au côté : le premier est représenté, entre autres (fig. 4844), par une statuette de Vienne 7; le second fournira de nombreuses répliques à la période gréco-romaine 8. La numismatique de la Thessalie et de la Macédoine fournit, pour le ive siècle, quelques monnaies avec l'image d'Arès 9 ; pour la céramique, il n'y a guère à citer qu'un épisode comique d'un vase de l'Italie méridionale, qui montre Enyalios aux prises avec Iléphaistos, sous le nom de Daidalos 10. Il n'existe plus, à l'époque hellénistique, de représentation célèbre d'Arès dans la grande statuaire : tout au plus peut-on signaler sa présence dans la Gigantomachie de Pergame Il figure encore, parmi les autres divinités, sur deux monuments archaïsants, la base appelée « autel des douze dieux » du Louvre f2 et un putéal du Capitole 13. Il convient surtout de citer, comme caractérisant le goût des écoles hellénistiques, les peintures murales de la Campanie, qui représentent assez souvent les amours d'Arès et d'Aphrodite'". Le même motif a inspiré quelques bronzes' a Enfin la numismatique, pendant la même période, en Bithynie, dans le Pont, et surtout dans l'Italie méridionale et en Sicile, offre d'assez nombreuses images du dieu sous différents aspects 10, La MARS ITALIQUE. Mars, auquel les Romains ont assimilé l'Arès des Grecs, est un des dieux les plus anciennement vénérés et les plus répandus chez les populations italiques : on trouve son culte dans toute l'Italie centrale et méridionale, de l'Ombrie à la Lucanie. II semble même avoir été chez ces populations le dieu le plus important, et ce n'est que plus tard que la proéminence lui a été disputée et enlevée par Jovis ou Jupiter La forme du nom la plus commune dès la plus haute antiquité est Mars 17. On l'a rattachée l une racine mar ou mas, qui se retrouve dans le substantif nias maris, « mâle », et qui aurait ainsi le sens de « force génératrice, principe viril n. Preller, qui a défendu cette étymologie, voit en effet essentiellement dans le dieu Mars la personnification de la puissance créatrice et vivifiante qui anime la nature 18. Mais le rapprochement entre les deux mots est arbitraire et a été contesté 10. D'autres savants, partant de l'idée que la fonction primitive du dieu est celle d'une divinité céleste ou solaire, retrouvent 203 MAR 1612 MAR qui fuit devant, le héros Vers la lin de la période archaïque, on le voit, sur certains vases, paisiblement assis auprès d'Aphrodite dans les assemblées des dieux ; il y porte le long chiton ionien avec la chlamyde, tenant à la main son casque en même temps que sa lance'. Enfin il est digne de remarque que l'époque archaïque a déjà imaginé le motif de l'Arès fanfaron et ridiculisé A partir de la seconde moitié du v' siècle, le type d'Arès subit, dans les monuments figurés, une transformation sensible. Comme Hermès et comme Dionysos, il apparaît désormais, en général, sous les traits d'un héros jeune et imberbe ; de son équipement guerrier, il ne garde plus que le casque et la lance ; le corps est d'ordinaire complètement nu ; une légère chlamyde, qu'il porte souvent, est moins un vêtement qu'un motif de décoration plastique. A vrai dire, les peintres de vases, fidèles à la tradition, continuent encore à représenter Arès avec toute sa barbe et quelquefois tout armé : c'est ainsi qu'on le voit (fig. 4840) sur une très belle coupe à figures rouges du British Museum dont le motif est un banquet des dieux 4, dans la gigantomachie d'une coupe de Berlin signée d'Erginos et d'Aristophanès [GtnANTES, fig. 3561 °, et dans celle d'un vase du Louvre '. Il est imberbe cependant sur un vase du British Museum qui représente la toilette de Pandore C'est à la plastique, comme d'habitude, que l'art doit cette innovation. On se rappelle l'Arès qui figure, auprès deDéméter, dans le groupe des dieux de la frise du Parthénon (fig.1443}": une simple chlamyde entoure les hanches ; la pose, inspirée peut-être d'un motif de Polygnote à la Lesché de Delphes v, est d'un abandon charmant; le seul attribut qui désigne le dieu de la guerre est une Iance appuyée contre le siège. On n'a pas d'indications précises sur l'Arès d'Alcamènes ; mais plusieurs archéolo gues s'accordent pour considérer comme une réplique de cette oeuvre la statue du Louvre, connue autrefois sous le nom fig. 52 et couramment nommée aujourd'hui« Mars Bor ghèse » '9; en tous cas, elle remonte à un original du ve siècle 11 : le dieu est nu et imberbe ; dans la main gauche, il faut restituer la lance ; le casque est décoré de deux griffons et de deux chiens ou loups courants (fig. 484°2) ; l'anneau qui se voit, un peu au-dessus d'une des chevilles est peul-être l'attache (67C1?(faîpiov) du jambart'2. C'est à la même période de la statuaire qu'on attribue un type d'Arès un peu différent, MÀR MAR 1610 -MAR trouvons l'écho clans Eschyle présente autrement l'origine de l'appellation donnée à la colline : ce seraient les Amazones, filles et adoratrices d'Arès, qui, lors du siège qu'elles mirent devant l'Acropole, auraient établi leur camp sur cette éminence, lui auraient donné le nom de coltine d'Arès et y auraient fondé un culte en l'honneur du dieu'. Quelle que soit la valeur de ces étymologies et la relation du nom d'Arès avec l'Aréopage, le dieu avait un temple clans le voisinage de la colline, à l'entrée de la citadelle. Cu sanctuaire renfermait une statue d'Arès exécutée par Alcame nes, une Athéna d'un artiste parien, une Enyo, oeuvre des fils de Praxitèle, et deux statues d'Aphrodite'. Une inscription attique mentionne un prêtre d'Arès et d'Enyo3 ; une autre, des sacrifices à Arès', et nous avons déjà rappelé que son nom figure parmi les divinités invoquées dans le serment des éphèbes Un temple d'Arès se trouvait à Acharnes °, et Solon fit construire à Salamine un sanctuaire à Envalios en l'honneur d'Ajax et en commémoration de l'annexion de File par Athènes 7. Un certain nombre de cités du Péloponèse rendent un culte à Arès : on suppose qu'il a puy être introduit par les envahisseurs doriens, lesquels l'ont eux-mêmes emprunté à la Béotie. A. Trézène, devant les portes de la ville, s'élevait un temple du dieu, rattaché par la légende à la présence des Amazones dans la contrée'. A Hermione, Pausanias signale un temple d'Arès, contenant la statue du dieu, auprès de deux sanctuaires de divinités chthoniennes, Klyménos et Déméter Chthonia Entre Argos et Mantinée, un sanctuaire double d'Arès et d'Aphrodite renfermait les images des deux divinités, consacrées par Polynice et les héros argiens 10. A Argos même, Enyalios était devenu le patron spécial des femmes, 9_ôç yuviexôw, en sou venir d'une victoire, d'ailleurs légendaire, remportée par elles sous la conduite de la poétesse Télésilla sur les troupes du roi Cléomène" HYBI1isll(Aj ; des monnaies de la ville portent l'image du dieu debout et casqué, te d'irgos. nant soit un rameau, de la main gau che (fig. 4837), soit la lance et la patère ~2. Al'agora de Tégée était dressée une stèle avec un relief archaïque d'Arès, qui y était désigné par l'épithète de yuvatxoiioivaç : les femmes seules célébraient son culte et se partageaient les victimes immolées aux iir:v(xtn, en souvenir d'une victoire qu'elles avaient remportée sur l'armée spartiate commandée par Charillos 7" (fig. 418381. Près de la même ville, sur le mont Krésion, on adorait un Arès âni,veidg, surnom qui se rattache à une légende : Aéropé, nymphe aimée du dieu, étant morte au moment où elle donnait naissance à son fils Aéropos, l'enfant trouva du lait en abondance au sein de sa mère morte". Des monnaies de la ville montrent Arès et Athéna se donnant la main ''. Mentionnons encore, en Arcadie, un autel d'Arès à Lycosoura auprès du sanctuaire de Despoina1b, et, à Mégalopo lis, un ancien autel du dieu''. Le culte d'Arès se retrouve en Achaïe, à Patrae" et à Tlitaia 1", où le dieu aurait engendré Mélanippos, de Tritala, fille de Triton. A Olympie, où il est considéré comme père d 'OEno matis, il est adoré sous le surnom Tégée. d''1rirtoç en commun avec Athéna `I7r7rfx 20. En Laconie, entre Sparte et Thérapné, se trouvait un très ancien temple d'Arès erlpeirzg ou e ,p(zaç 2L, avec une statue que les Dioscures auraient rapportée de Colchide : quant à cette épithète, les habitants du pays la dérivaient de Bo(, nom d'une nourrice d'Arès ; Pausanias lui donne simplement le sens de « Sauvage ». A Thérapné même, les éphèbes spartiates sacrifiaient de jeunes chiens à Enyalios21; et l'on conservait à Sparte une antique idole d'Enyalios enchaîné" : singularité que l'on expliquait par le désir de fixer le dieu dans le pays, et qui provient peut-être du dessein de le rendre inoffensif 24. D'après un texte, c'étaient des prêtres d'Arès que les deux rium'doot, magistrats spartiates qui précédaient les armées et portaient des torches enflammées avec lesquelles ils donnaient le signal du combat,2'. Dans la ville laconienne de Géronthrae, Pausanias mentionne un temple et un bois sacré d'Arès 26. En Crète, on signale des fêtes guerrières, sous le nom d'IuEIoA'TOMPHONIA, consacrées à Arès 21. Dans les villes de Lalo, d'Olns et d'Hiérapytna, son nom figure, avec celui d'Aphrodite et d'autres divinités, comme garantie des serments 28, A Smyrne et à Magnésie, il est associé en cette même qualité à Athéna Apu;a 29. Son culte nous est signalé en Carie, où on lui sacrifiait des chiens 39 ; il avait un temple à 11alicarnasse31. Il est adoré, sous l'épithète de Osbç tz.€y«ç, en compagnie d'Eleuthéria, à Kyanéae en Lycie °2, Enfin nous trouvons son culte mentionné en Pamphylie 33, sur la cote nord du PontEuxin il, à Syracuse en Sicile '°. Les Grecs ont identifié avec leur Arès plusieurs divinités étrangères. Ainsi c'est par son nom qu'ils ont désigné un dieu des Scythes, le seul qui eùt chez eux ses statues et ses autels W, et auquel on sacrifiait des hommes, des brebis, des chevaux 37 et des ânes 3'. Au sud de la Perse, les Carmanites n'adoraient qu'Arès MAR 1609 MAR différentes localités, une nombreuse progéniture '. L'Iliade lui attribue la paternité des héros Ascalaphos et lalménos, nés de son hymen avec Astyoché'. D'après Phérécyde, il est le père des Amazones 3. Dans les traditions généalogiques de la Thrace, de la Thessalie, de l'Étolie, il joue un rôle important : il eut de Cyréné, Diomède, le saunage roi des Histones' ; de Chrysé, Phlégyas" ; Calydon, l'éponyme de la ville de ce nom, est né de ses amours avec Astynomé ° ; Althaia lui donne Méléagre ; Périhoia, Tydée 8 ; Protogéneia, Oxyles °; une tradition fait naître OEitomaos de son union avec Harpinna, fille d'Asopos10, etc. Culte. o Les Thraces, dit Hérodote", n'adorent que trois dieux : Arès, Dionysos et Artémis. » C'est en effet chez ces peuplades belliqueuses et sauvages de la Thrace qu'il faut, selon toute vraisemblance, chercher les origines du culte d'Arès, comme de celui de Dionysos BAC( nus, t. I, p. 5921, et c'est de là qu'il a gagné les autres régions. Déjà, chez Homère, c'est la Thrace qui est considérée comme la patrie du dieu : c'est de là qu'il vient» et c'est là qu'il retourne, en même temps qu'Aphrodite regagne Paphos, comme en son séjour préféré n. Dans maint texte, il est expressément désigné comme étant de nationalité thrace''', et une tradition veut:qu'il y soit né'". Les Thraces, d'après Ammien Marcellin, lui sacrifient leurs prisonniers, en commun avec Enyo'". Enfin diverses légendes, d'origine soit locale, soit poétique, confirment sa popularité dans cette région 11.Nous rencontrons en Thessalie un grand nombre de légendes analogues, la plupart d'un caractère généalogique 18, et diverses inscriptions attestent la présence d'un mois "Ap nç dans le calendrier de plusieurs villes thessaliennes, Lamian, Magnésie 20, Phalica3t. En Béotie, Thèbes est le siège d'un très ancien culte du dieu : 7c0sa('Awv ''Meriç, comme l'appelle le chœur dans les Sept d'Eschyle'2 : il y est intimement associé aux plus antiques légendes de la contrée. Cadmus, avant de fonder la ville, extermine le dragon né de l'union du dieu et de l'Erinys Tilphossa23, et qui avait pour repaire la source nommée 'Ap-gTtxç ou 'Apeia xEipdq'n. Chez Euripide, ce dragon est fils d'Arès et de la Terre 25, et plus tard une interprétation évhémériste fit de lui un personnage humain 2, , On sait que Cadmus massacra les Spartes, hommes armés nés des dents du monstre : pour ce meurtre, et pour celui du dragon, comme Apollon après la mort du serpent Python, il dut servir toute une o longue année » (â'iôtoç ivtmu-rdç) en guise d'expiation auprès d'Arès ; c'est à la suite de cet esclavage que le dieu lui donna pour épouse sa fille Harmonia21. Par cet hymen, Arès et Aphrodite deviennent les ancètres des Cadméones 28, Mais la légende veut que le dieu soit resté toujours irrité contre Cadmus et sa descendance; et dans les tragédies qui empruntèrent leur sujet aux sanglants épisodes de l'histoire thébaine, les poètes font de fréquentes allusions à la colère d'Arès qui persécute la ville 20. Ces légendes, dont nous ne donnons ici que quelques linéaments, et qui nous sont parvenues avec diverses variantes, témoignent de la haute antiquité d'un culte d'Arès dans la région thébaine. On a longtemps pensé que ce culte était un emprunt fait par les Gadméones aux peuplades de la Thrace 30 ;plus récemment, on a émis l'opinion que le processus était inverse, et que c'est à Thèbes que se sont formés les principaux développements du mythe d'Arès, dont quelques éléments ont passé aux tribus thraces 3L. A Athènes, nous retrouvons la trace d'un très ancien culte d'Arès. D'après un certain nombre d'interprétations, anciennes ou modernes, c'est au dieu Arès que devrait son nom la colline de l'Aréopage [AREOPACUS1 ("Apsto; ivxyoç), située à proximité de l'Acropole 32. La version la plus répandue à ce sujet voulait qu'Arès eût tué de sa main le héros Halirrhotios, fils de Poseidon, pour avoir fait violence à la fille qu'il avait eue d'Agraulos, Alkippé : pour juger ce meurtre, les dieux auraient siégé en tribunal sur la colline"; les voix se partagèrent, et le dieu, finalement acquitté par le suffrage de Zeus ou d'Athéna 3c, dut se soumettre à une longue servitude, suivant un usage dont on trouve tant d'exemples dans la fable 35. C'est en souvenir de son propre procès qu'Arès aurait institué le tribunal de l'Aréopage, destiné à juger les meurtres. On reconnaît dans cette forme de la légende une variante de l'histoire d'Oreste. La version dont nous MAR combat'; enfin la troupe des génies cruels et sanguinaires qui se ruent au tumulte des batailles, comme Ce puissant dieu de la guerre n'est pourtant pas invincible. Sa faiblesse réside dans l'impétuosité inconsidérée avec laggelle il fonce sur ses adversaires ; et ses fils ont hérité de lui cette fougue aveugle qui les voue à la défaite. Ce trait de caractère est souligné par le contraste avec la déesse au courage calme et réfléchi, Athéné, que l'épopée met souvent en contact avec Arès. Tantôt elle le saisit par la main et le désarme pour rempécher d'intervenir hors de propos entre les Troyens et les Achéens' ; tantôt elle entre en lutte indirectement avec lui, monte sur le char de Diomède et guide la main du héros qui blesse son redoutable ennemi Enfin, dans le grand combat du XXI° chant qui met aux prises tout l'Olympe, c'est Athéné qui se mesure avec Arès et l'abat d'un coup de pierre 5. La légende épique a également rapporté plusieurs combats singuliers entre Arès et le héros ami d'Athéné, Héraclès ; et d'ordinaire, c'est celui-ci qui triomphe, grâce à la protection de la déesse. On connaît le sujet du Bouclier d'Hercule attribué à Hésiode : sur les bords du golfe. de Pagases, Héraclès attaque et tue Cycnos, fils d'Arès ; le dieu veut venger son fils, mais il est blessé à son tour par le héros, assisté d'Athéna [HERCULES, p. 105]. D'après une autre forme de la légende, Zeus aurait séparé les combattants d'un coup de foudre 6. Dans une autre circonstance, devant Pylos, Arès est également blessé à la cuisse par Héraclès et dépouillé par lui de ses armes'. C'est encore une défaite du dieu qui forme un des épisodes de la fable des Aloades [ ALOADAE] : saisi par les deux géants, Arès est enchaîné et maintenu dans sa prison pendant treize mois; il y eût péri, sans l'intervention d'Hermès, averti par la marâtre des Aloades, Eériboia, qui se prit de compassion pour le dieu'. Cette mésaventure se serait produite au moment où les deux frères tentaient d'escalader l'Olympe en entassant le Pélion sur l'Ossa. D'après une autre tradition, le prétexte de cet attentat serait le meurtre d'Adonis, l'amant d'Aphrodite, tué à la chasse par Arès, jaloux de son rival'. Une fois délivré, le dieu s'enfuit à Naxos, où il se cacha dans la Parmi les liaisons amoureuses que la légende attribue à Arès, la plus célèbre est celle d'Aphrodite. Dans l'Iliade, qui n'en fait pas une mention expresse, on rencontre cependant plusieurs traits où se marque une tendresse mutuelle. Tous deux sont du côté des Troyens. Quand Aphrodite veut retirer du champ de bataille son fils Énée 1608 MAR blessé par Diomède, et qu'elle est elle-même atteinte à la main par le héros, Arès lui offre son char pour regagner l'Olympe '°. D'autre part, c'est Aphrodite qui prête assistance au dieu blessé par Athéna dans le combat des immortels ". L'Odyssée a rendu populaires les amours d'Arès et d'Aphrodite. Tout le monde sait sous quelle forme cet épisode est présenté au VIII° chant, par l'aède Démodocos. D'après la donnée adoptée par le poète, Héphaistos y est l'époux légitime d'Aphrodite : on se rappelle comment, averti par Hélios, il apprend la liaison adultère de la déesse avec Arès, le filet aux mailles fines et serrées où il saisit les coupables dans son palais de Lemnos, l'hilarité des dieux qu'il a convoqués pour leur offrir en spectacle les amants enlacés 12. Y a-t-il, dans ce joli récit, une simple anecdote imaginée par la libre fantaisie du poète? On a pensé, et sans doute avec raison, que le point de départ tout au moins de cette fable était dans la combinaison de deux traditions distinctes, qui font d'Aphrodite tantôt l'épouse légitime d'Arès, tantôt celle d'Héphaistos. La première est attestée par de nombreux textes, par le culte de différentes cités qui adorent en commun Arès et Aphrodite, par les monuments figurés, qui montrent fréquemment les deux divinités côte à côte et comme associées par un lien indissoluble. C'est à Thèbes que cette forme de la tradition a ses plus fortes racines : le couple divin y a pour fille Harmonia, l'épouse de Cadmos, par qui toute la descendance des Cadméones se réclame d'Arès comme ancêtre '3 D'autre part on a conjecturé que les immigrés thébains qui occupèrent Lemnos y trouvèrent un couple préexistant d'Aphrodite et d'Héphaistos14. Il fallut dès lors expliquer la double relation de la déesse avec ses deux époux; du contact entre les deux mythes serait née, par un compromis, l'anecdote telle que nous la trouvons dans le chant de Démodocos, et où Héphaistos joue le rôle de mari trompé 15, Outre Thèbes, on a encore des indices sur l'union d'Arès et d'Aphrodite dans le culte à Athènes et en Argolide 16, Cette affinité a été consacrée, pour ainsi dire, par le rang qui leur est assigné aux côtés l'un de l'autre dans le système des douze dieux ". Un des motifs du coffre de Cypsélos montrait Enyalios conduisant Aphrodite ". Dans le défilé des dieux du vase François, ils montent tous deux le même char 19 ; plusieurs vases peints les représentent également assis l'un auprès de l'autre 20. D'après diverses traditions, d'autres enfants encore sont nés du même couple divin : ainsi l'Éros que l'on adorait à Thespies 21 et Priape 22. En outre, un grand nombre d'unions passagères auraient donné à Arès, en MAR 1607 MAB elle doit être large et avoir des dents entrant assez avant dans la terre. Juvénal rapproche la marra du SARCUL1.'M. Il s'agit donc d'un outil è fortes dents', comme notre houe è main, et non du sarcloir en forme de ratissoire, dont on se sert aussi actuellement et à laquelle on a essayé de l'assimiler. E. SAULIO.