Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article MARCUS

MARCUS, MARCULUS [MALLELS'. MARGARITA. Mapyapér'gç M ce;, µaoyxp'ry. Les pins anciens souvenirs historiques de l'Inde nous montrent le luxe des perles comme très répandu dans cette contrée. Crictlna, un des grands dieux de l'Inde, ayant trouvé une perle dans l'Océan, l'apporta pour en parer sa soeur Pandaia . Mégasthène, qui a recueilli cette fable indienne, la met au compte d'Hercule'. Nous savons, notamment par les récits du voyageur français Tavernier, au Xvu° siècle, jusqu'à quel point, même dans les temps modernes, était prodigué l'usage des perles dans le luxe public et privé de l'Inde Le livre de Job `" et les Proverbes de Salomon' mentionnent les perles comme un élément très recherché de la parure personnelle. Les anciens Égyptiens. les Chaldéo-Assyriens, les Élarnites ont aussi connu et quelquefois employé la perle comme un joyau décoratif des plus précieux'. Ni Ilomère, ni les autres anciens auteurs grecs ne parlent des perles, et les fouilles archéologiques qui ont fait connaître le mobilier des premiers temps de la civilisation hellénique, celles de Schliemann, par exemple, ne contenaient point de perles au milieu des grains ou coulants d'or, d'electrum, d'argent, de. gemmes, de palles vitreuses et même d'ambre qu'on a, au contraire, recueillis en abondance, comme éléments de colliers ou de pendants d'oreilles Le premier qui mentionne les perles et les pêcheries de perles est Théophraste, disciple d'Aristote : au milieu de fables sans portée, il (lit que cet ornement des colliers se trouve dans un coqu filage de la mer des Indes et de la mer Érythrée'. Le 110111 grec de la perle, aapy4° ' J.n -(xct~-rl, viendrait, d'après Lassen, Pott et d'autres indianistes, du sanscrit naangara 9. Les extraits de Néarque, conservés par Arrien, mentionnent aussi les pêcheries (le l'huilre perlière, dans le golfe Persique ". Dans le Périple de la mer Érythrée, il est raconté que dans la baie de Colchos, è Argalos, on exécutait des broderies en perles 11. S'il. faut tut croire Philostrate7 2, les plongeurs de ces mers avaient l'art, repris par les modernes, de provoquer la formation des perles en ouvrant et en perçant les coquilles, mais son récit est mêlé de détails invraisemblables. Lesbijoux grecs, lydiens, cariens, phéniciens, cypriotes, étrusques, carthaginois, antérieurs à l'époque d'Alexandre et découyerls dans tout le bassin méditerranéen, ne. comprennent pas la perle naturelle parmi leurs éléments décoratifs: on n'y rencontre que des perles de métal précieux, de pierres dures ou de verre'". C'est seulement après la conquête de l'Orient par Alexandre que le luxe des perles envahit le monde hellénique, et cette mode atteignit son apogée en Égypte sous les Ptolémées. L'h porée que Cléopiltre s'était fait construire était garni de perles et de pierres précieuses l'", et Pline nous apprend que cette fastueuse reine possédait les deux plus grosses perles qu'on eût jamais vues : elle les tenait de rois de l'Orient qui se les étaient passées de père en fils 1''. A Rome, le goût des perles dans la parure se développa, (lit Pline, au temps de Sylla, c'est-à-dire après la conquête de la Grèce. Le naturaliste romain met les perles au premier rang de tous les joyaux ; il sait. qu'on les pêche dans l'Océan indien et sur la côte d'Arabie, dans le golfe Persique t°. Les fables puériles qu'il raconte sur la formation des perles et la manière de les pêcher, sont répétées par Solin, îlien et quelques autres 11. On pêchait également l'huître perlière clans la mer Rouge, ainsi que sur les côtes de l'Acarnanie, de la Thrace, de la Maurétanie et de la Bretagne 1". Les poètes désignent parfois les perles sous le nom de bacae 19. Les plus belles et les plus grosses s'appelaient uniones I:sans pareilles) ; on MAP 1594 MAP nappe, les petites estrades qui portaient les portraits des empereurs entourés d'objets du culte (fig. 2860, 3980, 4805 ; les armoiries impériales étaient parfois brodées sur la nappe elle-même (fig. 3981). Or, dans toute l'antiquité, le repas est un acte religieux [coE\A, p. 1269] et le christianisme a recueilli cette tradition en lui imprimant un carat tère plus pieux encore. La table est donc, en quelque façon, un autel. De même que chaque convive emploiera une serviette pour avoir les mains plus pures, de même chaque table sera recouverte d'une nappe blanche. voilà pourquoi la nappe est un accessoire beaucoup plus moderne qu'antique. On suit fort bien, dans les monuments de l'art chrétien, sur les mosaïques et les fresques, le passage du repas ancien au repas moderne, de la petite table sans nappe posée devant le lit circulaire sur lequel s'étendent les invités (fig. 1703, 1704), à la table drapée devant laquelle prennent place les convives assis sur des sièges isolés (fig. 4830)'. On peut même se demander si ce ne sont pas les draperies du lit antique qui ont passé sur la table pour former la nappe (voir les fig. 4055 et 4398). Nous possédons d'ailleurs le type de transition, qui est la Gène représentée à l'antique, sur un lit circulaire, mais où la table centrale est recouverte d'une nappe (fig. 4831) 2. II. Dans l'antiquité romaine, le mot s'applique à un objet très particulier : c'est la serviette ou le mouchoir que le président des jeux jetait dans l'arène pour faire ouvrir les carceres [cilices, p. 1195]. Cassiodore raconte que cet usage date du règne de Néron : un jour que l'empereur était encore à table et que les cris de la foule impatiente montaient jusqu'à lui, à l'heure de l'ouverture des jeux, il fit jeter par une fenêtre sa serviette (mappa) comme signal, et l'usage s'en serait perpétué'. La plupart des auteurs qui ont traité de la question pensent que cette historiette est sans valeur et que cette coutume est beaucoup plus ancienne [cfRcus, p. 1195]. Mais, en réalité, aucun des textes invoqués à l'appui de cette opinion n'est probant, car tous parlent d'une façon générale de mitteresignum et aucun ne désigne la mappa '. On ne trouve cet ac cessoire clairement nommé que dans les auteurs contemporains de Néron ou postérieurs à son règnes. Quintilien dit, il est vrai, que les Carthaginois revendiquaient pour eux l'origine de la mappa employée au cirque', mais nous n'avons actuellement aucune donnée sur l'étymologie sémitique de ce mot' et nous ne pouvons pas en tirer argument pour la date de cette coutume à Rome. C'est également sur des monuments d'époque basse, marbres 0, mosaïques et diptyques d'ivoire, que nous voyons la représentation du magistrat tenant en main la mappa qu'il va jeter dans l'arène (fig. 483210; cf. fig. 1523, 1532, 1907, 1909, 2455, 2456). La mappa donna sans doute naissance à l'habitude d'agiter, dans le public, des mouchoirs en signe de joie et de félicitation" [ACCLAMATIO, fig. 36; cf. fig. 1521, 3848]. Aurélien fit distribuer aux spectateurs des oraria MAP 1593 MAP rappellerait plutôt la chaumière de la mosaïque d'Oudna, que les cabanes coniques de la mosaïque d'El-Alia ou du sarcophage de Philippeville. Le nom de mapalia ou mappalia est demeuré attaché, à l'époque romaine, à des localités dans lesquelles se trouvait installée, à côté des colons romains, une agglomération plus ou moins considérable d'habitations indigènes. La grande inscription d'Henchir Mettich, en Tunisie, découverte en 1896, donne au domaine créé dans cette localité le nom de fondus Villae magnae Variani, id est Mappalia Siga'. Cette dernière appellation représente évidemment le nom indigène, antérieur à l'installation du tondus romain et persistant à côté de lui, comme les gourbis des Numides à côté des maisons de pierre des colons. A Carthage même, il y avait la rue des Mappales, via Mappaliensis, où de meurait, au temps du martyre de saint Cyprien, le procurateur Macrobius Candidianus 2. Cette rue, assez éloignée du centre de la ville, parait avoir été tracée sur un emplacement qui n'était, à l'origine, qu'un faubourg extérieur. C'était probablement, dit M. P. Monceaux, « cette grande voie carrossable qui, aujourd'hui encore, conduit de La Malga à Sidi-bou-Saïda ». Au ve siècle, l'une des basiliques de Carthage dédiée à saint Cyprien était sur l'emplacement do sa sépulture, aux Mappalia, près des Piscines, c'est-à-dire à proximité des grandes citernes du village de La Malga ç. Dans une glose sur Virgile, Servius signale l'existence, à Carthage, d'une zone extérieure à laquelle il donne, non pas le nom de Mappalia ou Mapalia, mais celui de Alagalia 5. Il est de toute évidence que Magalia n'est qu'une autre transcription du terme indigène ordinairement donné sous la forme mapalia. Il a persisté jusqu'à nos jours dans le nom du village arabe de La Malga situé au pied de la colline de Saint-Louis, sur laquelle s'élevait Byrsa. Le village de La Malga parait donc désigner à la fois à peu près l'endroit où passait la via Mappaliensis et l'emplacement où, à l'époque punique primitive, s'élevaient les mobiles et légers mapalia ou magalia des tribus libyennes, lorsque ces dernières venaient cultiver le sol de la banlieue de Carthage ou bien, à l'instar des tribus nègres dans nos colonies actuelles, trafiquer avec les marchands carthaginois. Certains orientalistes ont proposé de faire dériver le mot numidique ou berbère magalia, du terme sémitique i.) j 111.1 p ll.1 f , de la racine 4.11x rouler (n 11l il , cha riot), d'où le sens de « maison qui roule, qu'on trans portes ». D'autres, s'appuyant sur un passage de Servius, ont voulu voir dans Magalia une autre forme ou une altération du mot Megara'. Mais cette assimilation est peu probable. Il existait à la vérité, à Carthage, un quartier appelé Megara, représenté par le bourg actuel de La Marsa, entre Sidi-bou-Saïd et le cap Kamart9. Mais ce quartier est fort éloigné de celui où se trouvaient les Mappalia, et nous savons par Diodore de Sicile 9 et Isidore de Séville f 0 que le mot punique magar signifiait a la nouvelle ville », le quartier neuf, né de l'extension normale de la cité carthaginoise". Si donc le rapprochement entre Mappalia (ou Mapalia) et Magalia s'impose, il n'en est pas de même de celui qu'on a proposé entre Magalia et Megara, qui doit être abandonné. E. BAIIELON.