Entrées proches
MANDATUM. Grèce. Le contrat de mandat a dû certainement être pratiqué dans le droit grec autant que dans le droit romain, car les circonstances qui y donnent lieu, comme l'absence, la maladie, l'inexpérience des affaires, se rencontrent dans tous les temps et chez tous les peuples. Ce contrat est toutefois l'un de ceux au sujet desquels l'insuffisance des sources se fait le plus sentir, à ce point que, d'après certains auteurs, il y aurait, pour l'historien du droit, impossibilité de parler du mandat et des actions qui s'y rapportent. On peut cependant trouver des traces de ce contrat dans les discours des orateurs et essayer de dégager quelques règles le concernant.
C'est ainsi que, dans un plaidoyer de Démosthène, l'orateur dit qu'au moment de partir pour la Sicile, il a chargé Nicostrate de surveiller et de gérer ses affaires comme par le passé, Nicostrate étant É72til.EavT71ç xai StOIXTï75 1. Un autre plaidoyer du même orateur signale également deux cas de mandate. On a voulu voir enfin un cas de mandat dans l'action que, d'après Plutarque 3, Diomède aurait dirigée contre Alcibiade Mais l'hypothèse est fort contestable °. Quant aux 7rp07tozTOpEç et aux rpoaw).at dans lesquels on a prétendu trouver des mandataires 6, il faut y voir plutôt des intermédiaires, des commissionnaires'.
L'acte accompli par le mandataire pour le mandant, peut, du reste, dans le droit attique, avoir trait non seulement à l'administration du patrimoine, mais, d'une manière générale, à un fait juridique quelconque. C'est ainsi que le kyrios peut déléguer à un tiers l'exercice de ses fonctions tutélaires et lui confier notamment le mandat de procéder it l'engyésis de sa pupille e.
Le mandat était-il gratuit à Athènes comme à Rome'? On pourrait le croire d'après les passages précités des plaidoyers de Démosthène, oit l'on ne voit point que ceux qui gèrent les biens de l'absent reçoivent une rémunération quelconque. Bien ne prouve cependant d'une manière décisive que, dans le droit attique, la condition de gratuité fût de la nature du mandats.
L'effet normal du mandat, dans les rapports des parties contractantes, est de mettre à la charge du mandataire l'obligation d'exécuter le mandat conformément aux instructions qu'il a reçues du mandant. S'il les enfreint ou s'il ne rend pas compte des choses qu'il a acquises à l'occasion de l'exécution du mandat, il est certainement passible d'une action en justice. Mais il est assez difficile de savoir quelle était précisément cette action dans le droit attique. Un auteur f0 a cru la reconnaître dans la xaTUp aëmç ôix'q signalée par Pollux 1f. Mais cette interprétation parait peu vraisemblable 12. De même que les Athéniens ne semblent pas avoir ramené les différents cas de mandat à une seule idée générale et abstraite, et que le mot mandatum ne parait pas avoir d'équivalent en grec', de même ils ont très bien pu ne pas organiser une action spéciale pour le cas de mandat. Cela ne présente rien de surprenant quand on envisage le développement général du droit des obligations à Athènes. Le mandant pouvait donc user contre le mandataire infidèle, soit de l'action générale auv9-rlxwv aapaGOaomç, soit de l'action (i?,iIrç, qui peut être fondée sur une faute contractuelle aussi bien que sur une faute délictuelle. Si nous supposons qu'à l'inverse, par suite de l'exécution du mandat, le mandant soit tenu d'indemniser le mandataire du préjudice qu'a pu lui occasionner cette exécution, l'obligation du mandant sera encore sanctionnée par la i5-' (3ax.eriç.
Dans les rapports des parties avec les tiers, un des effets du mandat est que le mandant est obligé vis-à-vis de ceux-ci par les actes passés par le mandataire dans la limite de ses pouvoirs. La preuve en ressort notamment du plaidoyer de Démosthène contre Timothée 14. Mais les tiers avaient-ils contre le mandant une action directe et, à l'inverse, le mandant pouvait-il agir directement contre ces tiers? Dans le silence des textes, l'affirmative parait devoir être adoptée comme plus conforme à l'esprit du droit attique.
Le mandat peut d'ailleurs servir dans le droit attique, comme dans le droit romain, à réaliser une intercessio,
MAN 1566 MAN
blement possédé. Dans le droit primitif, ses enfants naissent probablement in causa niancipii ; mais à l'époque de Gai us il n'en est plus ainsi'. Le maître peut l'aliéner par mancipation cura sua causa, probablement aussi le transmettre dans sa succession, intenter par rapport à lui la revendication et l'action de vol (file ti. 11 ne peut faire en sa faveur aucune disposition testamentaire, saris lui léguer expressément la liberté; mais. quoique simplement alors héritier nécessaire et non suas, le mancipé obtient du droit prétorien le bénéfice d'abstention'. [N'étant pas objet de propriété complète, il ne serait pas compris dans la vente des biens faite à la requête des créanciers du maître ; aussi on ne lui applique pas la loi Aelia Sentia contre les affranchissements faits en fraude des créanciers. D'autre part, le droit prétorien parait autoriser les créanciers, à raison des dettes contractuelles du mancipé, à faire vendre les biens qu'il a acquis an maître et qui appartiendraient au mancipé s'il était, sui juris3.1 Remarquons que, dans le cas de mancipium fictif pour l'émancipation ou l'adoption, il fallait, d'après les Douze Tables, trois mancipations successives pour éteindre complètement la puissance paternelle sur l'enfant mille du premier degré'; mais quand la mancipation avait eu lieu sérieusement, noxali causa, il
avait controverse : les Sabiniens soutenaient contre les Proculiens qu'une seule mancipation suffisait'.
Passons aux causes d'extinction du mancipium. Il s'éteignait : 10 par la mort du sujet passif, mais non par celle du sujet actif, à la différence de la manus ; 2° par l'affranchissement, opéré par les mêmes procédés que pour l'esclave, censu, vindicta, testantenio, sans aucune des restrictions de nombre, d'àge, établies par les lois Aelia Sentia et Allia Caniniaa; en ce cas le mancipé devenait sui juris; le maitre était assimilé à un patron seulement pour les droits de succession et devenait luter fiduciarius' ; fil était préféré aux héritiers siens de cet affranchi et à son père : ce privilège qui, d'après Ulpien, remontait aux Douze Tables, venait de ce que le mancipé était sorti de sa maison d'origine par la mancipation et n'avait plus de lien d'agnation avec ses enfants; plus•tard les préteurs modifièrent ces règles trop rigoureuses et donnèrent la possession des biens de cetaffranchi à dix personnes, avant le maitre ntanumissue, à savoir : à ses père, mère, fils, fille, grand-père, grand'mère, petitfils, petite-fille, frère, soeur b ; 3° en cas d'abandon noxal, le fils de famille a le droit de demander sa libération quand il a complètement indemnisé le créancier par son travail; Papinien ajoute que ce dernier n'est pas tenu de l'action /iduciae, c'est-à-dire que le père ne peut pas exiger que son enfant lui soit remancipé': -/4°au cas de louage de services pour paiement d'une dette, d'après une règle de droit public, sans doute très ancienne, le mancipium cessait à l'époque du cens, c'est-à-dire au bout de cinq ans au maximum, malgré la volonté du maître, sans doute sur la réclamation du mancipé auprès
du censeur. On comprend que ce genre de libération ne pouvait pas s'appliquer au cas de mancipium fictif, accompagné d'un contrat de fiducie obligeant l'acheteur à remanciper l'enfant an père de famille 70.
[A l'époque de Gains, le mancipium n'est plus guère pratiqué que fictivement pour l'émancipation ou l'adoption, ou sérieusement pour l'abandon noxal. Justinien supprime ce dernier mode d'emploi l'. Mais à l'époque classique le père peut toujours louer les operae, le travail de son fils'"-. D'autre part, la vente des enfants par les parents malheureux est une pratique courante. Paul déclare qu'elle ne nuit pas à l'ingénuité des enfants"; déjà illicite sous Caracalla, elle est interdite à plusieurs reprises par Dioclétien et Constantin', plus tard encore par Justnien et Léon''.
Constantin et. Justinien autorisent cependant, la vente des enfants nouveau-nés, santpuinolenti, mais que leurs parents peuvent toujours reprendre en remboursant. le prix ou en fournissant un esclave d'une valeur équivalente 16, Mais les mœurs sont plus fortes que les lois. Un grand nombre de textes signalent la vente des enfants à toutes les époques" ; dans les pays de droit pérégrin et surtout en Orient, c'est la vente des enfants qui alimente en grande partie les marchés d'esclaves jusqu'au n° siècle de l'Empire et même plus tard" ; en 391 une loi restitue l'ingénuité aux enfants vendus sans accorder d'indemnité aux acheteurs 1'; en /r51 Valentinien III casse toutes les ventes en faisant restituer le prix augmenté d'un cinquième90.
ILLedroitroulaindistinguait lesres mancipi et les fies nec mancipi "21. Les fies mancipi étaient: les fonds de terre et les maisons italiques, les servitudes rurales sur ces fonds, les esclaves, les bêtes de somme et de trait. bœufs, chevaux, mulets, ànesl'2. On a toujours exclu de cette liste les animaux exotiques, même susceptibles d'être domptés, tels que les éléphants et les chameaux ; les Sabiniens y rangeaient les bêtes de somme et de trait, qu'elles fussent ou non déjà employées à ces usages ; les Proculiens demandaient qu'elles fussent dressées ou au moins en lige de l'être. Les autres animaux et toutes les autres choses inanimées étaient fies nec ntancipi. On a fait beaucoup d'hypothèses sur l'origine et le caractère de cette distinction sans arriver à la certitude. Dans le droit classique, les res mancipi seules (indépendamment des femmes et des enfants en puissance et des personnes in mancipio) sont aliénables par la mancipation, et la tradition ne suffit jamais à en transférer la propriété civile 21'. En outre, la femme pubère en tutelle ne peut aliéner sans l'autorisation de son tuteur que les choses nec mancipi. Les res mancipi sont donc les seules choses pour lesquelles la mancipation est possible et exigée. Sur quelle base repose et à quelle époque remonte ce classement des choses? On touche ici aux origines de la propriété à Rome. Les fonds de terre italiques et les servitudes rurales ont ou n'ont
MAN 1565 MAN
joint le contrat de fiducie'. Cette aliénation fiduciaire peut servir ainsi à réaliser un gage, un prêt à usage, un dépôt' [FIDUCIA1.
La mancipation n'avait lieu régulièrement qu'entre les personnes qui pouvaient avoir la propriété quiritaire, c'est-à-dire les citoyens romains, les Latins colon iarii et Juniani, et les pérégrins pourvus du commercium' ; par conséquent, pour les fonds provinciaux elle était nulle; cependant l'acte pouvait tout de même transférer la propriété, s'il renfermait une tradition valable'. C'est probablement pour la même raison qu'on trouve appliquée à des choses nec mancipi' la mancipation qui, dans ce cas, était théoriquement nulle 6.
La mancipation était donc le mode par excellence d'aliénation et d'acquisition des choses mancipi, indépendamment de la tradition qui ne suffisait pas'. Depuis la rédaction de l'Édit du préteur, les choses mancipi qui pouvaient être transférées par l'in jure cessio pouvaient aussi à la rigueur être transférées par la tradition e ; mais encore sous Dioclétien et Constantin, la mancipation est le mode normal d'aliénation des choses mancipi. Les parties peuvent la réaliser sans déplacer, sans avoir la possession'. Elle figure encore à la date de 35510. Mais elle disparaît avant Justinien, à l'époque où on décida que, même pour les immeubles, il n'y aurait plus translation de propriété sans traditions'.
La mancipation figure fictivement, comme formalité nécessaire : 1° dans le testament per aes et libram [TESTAMENTUM]; .1"° dans le nexum NE%LM]; 3° dans le paiement per aes et libram [soLuTIO] ; 4° dans l'adoption
[ADOPTIO] ; 5° dans l'émancipation [E biANCIPArIO] ; 6° dans la cession in mancipio des personnes en puissance et des femmes in manu; 7° dans le mariage par coemptio [MATIUMONIUM]. Dans le contrat de société elle peut servir à un des sociétaires à effectuer sa mise. Elle fournit un expédient pour constituer toutes sortes de servitudes 12 ~sERVITUS]. Elle est encore employée dans la restitution du fidéicommis universel au fidéicommissaire par l'héritier