Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article NOBILIS

NOBIL[S. La noblesse, nubiles, nobilitas (de noseere, nomen) n'a été à Rome, sous la République, ni une noblesse au sens moderne du mot, ni une institution analogue au patricial, mais simplement un parti politique. Nous ne savons pas s'il y avait déjà une nobilitas lorsque les patriciens possédaient seuls les magistratures curules. Plus tard, dès que le consulat eut été ouvert aux plébéiens, les familles plébéiennes arrivées aux magistratures curules s'unirent aux familles patriciennes ; et ainsi se forma la nobilitas, parti aristocratique, représenté surtout par le Sénat et qui accapara pendant plusieurs siècles les grandes magistratures [sENATUS;. Le nobilitas est donc une aristocratie en fait, non en droit, par opposition aux ltomines norii, ignobilitas, noms qui désignent les familles non nobles'. Elle est héréditaire, par transmission aux descendants agnatiques. L'homo novas qui arrive à une magistrature'curule n'est pas lui-même nobilis2, mais il anoblit ses descendants, La nobilitas comprend : 10 les patriciens; un patricien n'est jamais homo novas, même s'il n'a pas de magistrats curules parmi ses ancêtres ; un patricien sorti par émancipation de la puissance paternelle ou passé à la plèbe n'est plus patricien, mais reste noble' ; les plébéiens arrivés aux magistratures curules et leurs descendants. Le seul privilège officiel de la nobilitas est le jus imaginuoi [isi GO, p. 41v-414. Mommsen a conjecturé que le cognomen héréditaire avait été le signe du patriciat et que la noblesse plébéienne avait peut-être aussi reçu d'une loi le droit de le porter [NOMENl', Sous l'Empire, l'ancienne nobilitas se maintient en fait, mais de plus en plus restreinte, à côté de la nouvelle nobilitas officielle de l'ordre sénatorial, qui dès Auguste s'étend aux femmes, descendants et agnats jusqu'au troisième degré'. Au ive siècle après J.-C., les Césars portent l'épithète de nobilissirrlas, Ca. Lecluvais NO L) NOI1US. àcC,.'fç, na''ud. Sans nous arrêter aux diverses acceptions du mot dans le lai t age courant, ni rechercher chez les anciens les emplois variés du nœud [quelques-uns sont expliqués ailleurs 'ixia1.1 Si, l'ALLILM, faire remarquer l'importance qu'avait un noeud solide et difficile à défaire, au temps où l'on ne connaissait pas de meilleur moyen d'assurer la clôture de ce que l'on voulait conserver. Ulysse, se préparant à quitter l' de des Phéaciens, a soin de fermer le coffre où il a serré les dons d'Alcinous, à l'aide d'un nœud. compliqué (icrlr.o, ;TCtx(acs), dont. Circé lui a enseigné le secret'. De même avant l'invention des serrures et encore longtemps après, on assujettissait les portes par un système de cordes ou de Courroies [I1NUA, SERA fi Le joug était lié au timon d'un char par un nœud fait d'une lanière très longue, plusieurs fois enroulée 2. tin exemple fameux de cette sorte de o'eu t puissant est celui du char de Cordius, consacré par alitas, son fils : le nœud gordien, si habilement entrelacé que personne n'avait jamais pu le démêler. Un oracle promettait à celui qui y parviendrait l'empire de. l'Asie; Alexandre s'3' essaya : n'y pouvant réussir il le trancha de son épée 3. On ne mettait pas moins de soin à faire, pour attacher les prisonniers, des nœuds indissolubles 4. Le nombre et la diversité des noeuds inventés de tout temps sont infinis; il est inutile d'énumérer un certain nombre de noms qui nous sont parvenus', mais nous devons dire quelque chose de celui qui est le plus fréquemment mentionné par les auteurs et figuré dans les monuments', le no;fus fderculeus ou f-fe l'ulaneas lorsque, desserré, il est le plus clairement figuré, comme dans l'exemple ici reproduit (fig. à323) r, ce nœud est fait de deux boucles, dont l'une passe en dessus, l'autre en dessous des prolongements du cordon. Cette forme répond à la description qu'Oribase donne du nœud d'Hercule 8, et on peut s'assurer que ce nom est bien celui qui lui convient par le rapprochement de quelquesuns des objets oui on le rencontre et des textes où il en est parlé. Ainsi, il est question cirez Athénée «le vases appelés oxiefot `Hsxxaewrtxoi, caractérisés par leurs anses portant un noeud d'Hercule : or il existe des vases, de Fig. 5326. Noeud de ceinture. Fig. 5397. Nœud servant d'amulette. NOl) --88N0M formes diverses d'ailleurs', dont les anses sont ainsi nouées (fig. 532'i). Plusieurs auteurs appellent noeud d'Hercule celui qui est produit par l'enlacement : de deux serpents autour de la baguette (le Mercure '. Ce n'est pas la forme ancienne du caducée [MERemtuus, p. 18071; les exemples toutefois n'en manquent pas, et l'on en possède encore 3 où le noeud est reconnaissable (fig. 532€;). Fig. ',,3s,~. A,,so en forme de nœud On l'a vu plus haut (fig. 5323) employé comme fermoir de chaîuet; des colliers `', des ceintures étaient souvent attachés de la même manière (fig. 5326)", soit que le noeud fût formé par le ph de l'étoffe même, soit qu'il fût imité en orfèvrerie ; on le retrouve dans des couronnes et des bandeaux ', dans des bagues', des fibules, etc.'. Une telle prédilection ne peut s'expliquer, quand il s'agit de délicats bijoux, par l'intention de leur donner une attache en apparence résistante et forte ; son élégance a pu le faire choisir, mais ce choix se comprendra mieux, sans doute, si l'on se rappelle avec quelle profusion étaient répandues, clans les objets portés sur la personne, les amulettes de toutes sortes au moyen desquelles on croyait se mettre à l'abri des maléfices [AMULE'II31, FASCINUS]. Le noeud d'Hercule en était un. II ne sert pas seulement d'agrafe aux colliers, ilestau nombre des éléments dont ils se com posent ou des emblèmes préservatifs qu'on y voit suspendus'. .lux exemples qui sont cités ailleurs [AMULETUM, p. 254 et 257] nous ajouterons ici un collier grec" où sont assemblés des cylindres et deux masques de Méduse en médaillons (fig. 53277) qu'entoure un noeud pareil ; on sait flue l'image de la Gorgone était considérée elle-même comme un puissant 7tsTpé oewv [CORGONES, p. 1615]. D'autres témoignages montrent la vertu singulière que l'on attribuait à ce noeud. « C'est merveille, dit Pline'', combien est plus prompte la guérison des blessures quand le bandage est fait en noeud d'Hercule. Et il ajoute que, même pour l'usage quotidien, il est bon de pl. n, 19; iv, 8'; autres, Ibid. p. 38 sq. t Macrob. Nat. 1, 19, 16: Aihcuagor. lev. pro Christ. XVI, 5; Cornutus, p. 67, Osann, dit seulement :bagas, pl. u, 11, p. 33. 34 sq. c Statue provenant de Cyrène, an Musée Britannique; Smith, Catalop. of seulpt. n. 1405; Smith et Porcher, Disooreries at Cgrene, p. 101, n. 35. Ceinture pareille en orfèvrerie, voir eramn.mr, cg. 1475. Les naéuds de ceinture de cette forme sont en grand nombre, niais rarement reproduits par les gravures assez distinctement; il faut voir les monuments mêmes. Notons dès à présent se ceindre de ce noeud, « quippe cura Hercules eue prodiderit » : croyance qu'il faut rattacher sans doute à la conception, qui se retrouve en Italie aussi bien qu'en Grèce, d'Hercule dieu qui écarte 1es maladies et tous les autres maux [IIERCt'LES, p. 111 et 1'27'. Chez les Romains, les nouvelles mariées portaient en ceinture un cordon de laine attaché par un noeud d'Hercule que le mari devait délier sur le lit nup tial: on y voulait voir un présage de fécondité t3. A un autre ordre d'idées paraissent se rapporter des faits qui sont encore à noter. A Rome, le Jïamen dialis ne pouvait avoir aucun noeud, ni dans sa coiffure, ni dans son vêtement, ni rien qui ressemblât à un lien, pas même un anneau[FLAMEN, p. 1158]. Entrer dans le temple de Juno Lutina sans avoir desserré ses cheveux ou en gardant sur soi aucun noeud était défendu aux femmes, lorsqu'elles allaient demander une heureuse délivrance 1 : ce qui s'explique peut-être par cette idée très ancienne que tout ce qui est noué met empêchement au dénouement souhaité; et il faut en rapprocher ce que dit Pline 16 des doigts entrelacés et des genoux croisés, attitude qui peut arrêter l'accouchement ou nuire à l'effet d'un remède, et enfin l'histoire de la naissance d'Hercule retardée par les Moirai qui se tenaient près d'Alcmène, les mains ainsi ,jointes", pour obéir à Héra. E. Sncuo.